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B 162
Menace d’accouchement
prématuré
Étiologie, diagnostic, principes du traitement
Dr Véronique HOUFFLIN-DEBARGE, Dr Damien SUBTIL, Pr Francis PUECH
Service de pathologie maternelle et fœtale, CHRU, hôpital Jeanne-de-Flandre, 59037 Lille cedex
TABLEAU I
Le coefficient de risque d’accouchement prématuré (CRAP) (Papiernik, 1969)
Nombre Mensurations et conditions Antécédents Circonstances
Travail
de points socio-économiques obstétricaux de la grossesse
CRAP < 5 : pas de risque d’accouchement prématuré ; de 5 à 10 : risque potentiel ; > 10 : risque certain.
• La béance cervico-isthmique constitue une incapacité • Un traumatisme peut être responsable d’une menace
(incompétence) du col et de l’isthme utérin à se maintenir d’accouchement prématuré. Il peut s’agir d’une chute, d’un
fermés ; elle est congénitale ou acquise. Elle est suspectée accident de la voie publique mais aussi d’une intervention
devant les antécédents obstétricaux (avortements tardifs, chirurgicale.
accouchements prématurés) et (ou) des modifications pré- • L’altération de l’état général, quelle que soit son origine
coces du col utérin pendant la grossesse. L’échographie et de nombreuses pathologies d’ordre général peuvent
endovaginale pourrait aider son diagnostic par la recherche entraîner une menace d’accouchement prématuré.
d’une déhiscence de l’orifice interne. En dehors de la gros-
sesse, elle est diagnostiquée lors de l’examen clinique (une
bougie de Hégar n° 8 peut passer sans difficulté l’orifice Diagnostic
interne) et (ou) par une hystérosalpingographie. Son trai-
tement est préventif et consiste en un cerclage du col uté- La démarche diagnostique doit permettre de confirmer la
rin en fin de premier trimestre. menace d’accouchement prématuré, de juger de sa gravité
et de préciser son origine.
3. Causes générales
Diagnostic clinique
• L’infection est certainement la principale cause des
menaces d’accouchements prématurés. Elle peut être d’ori- 1. Signes fonctionnels et généraux
gine virale (hépatite virale, cytomégalovirus…), bacté- L’interrogatoire recherche la présence de contractions uté-
rienne (E. coli, streptocoque B), ou parasitologique (palu- rines douloureuses dont la fréquence, la régularité, l’in-
disme en zone d’endémie). L’hyperthermie peut, à elle tensité et les facteurs déclenchants sont précisés. L’absence
seule, être responsable de l’apparition de contractions uté- de métrorragies, de leucorrhées, de signes fonctionnels uri-
rines. L’infection urinaire doit être systématiquement naires ou d’un syndrome grippal est vérifiée. La rupture de
recherchée. Elle est en effet extrêmement fréquente pen- la poche des eaux est parfois le seul symptôme. Une hyper-
dant la grossesse et est le plus souvent asymptomatique. thermie évoque une infection.
De même, il faut savoir suspecter une listériose devant un
syndrome grippal. La présence de Gardnerella vaginalis 2. Signes physiques
et (ou) de germes anaérobies au niveau vaginal (vaginose) L’examen gynécologique est réalisé sur une table gynéco-
pourrait être associée à un excès de prématurité. logique, si possible vessie vide.
TABLEAU II
Score de Bishop
Score 0 1 2 3
TABLEAU IV
Mode d’administration et posologie des traitements tocolytiques
Bêtamimétiques Salbutamol (Salbumol) Ampoule à 5 mg (Salbumol fort) 1 amp/500 cm3 de SGI* Seringue autopulsée
Ampoule à 0,5 mg 10 amp/500 cm3 SGI* 0,6 à 1,2 mg/h pdt 24 h
IV strict
Comprimé à 2 mg Orale 4 cp/jour
Suppositoire à 1 mg 2 suppositoires/jour
Ritodrine (Pré-Par) Ampoule à 50 mg 2 amp/500 cm3 de SGI* 9 à 12 mg/h
IV
Comprimé à 10 mg Orale 4 à 6 cp/jour
Antiprostaglandines Indométacine (Indocid) Comprimé à 25 mg Orale 3 à 6 cp/jour en 3 prises
Suppositoires à 50 et 100 mg
Progestatifs Hydroxyprogestérone Ampoule à 500 mg Intramusculaire 1 amp tous les 2 jours
(Progestérone retard
Pharlon)
Progestérone Capsule à 100 mg Orale 4 à 6 caps/jour
(Utrogestan)
Dydrogestérone Comprimé à 10 mg Orale 2 à 4 cm/jour
(Duphaston)
* SGI : sérum glucosé isotonique.
matoires non stéroïdiens ont une action sur la contraction prématurée des membranes, la surveillance a pour but de
utérine et la dilatation du col. L’indométacine (Indocid) est dépister la chorio-amniotite. La mise en route d’un traite-
le plus prescrit. Leur prescription est limitée du fait de leurs ment tocolytique peut permettre de retarder l’accouche-
effets indésirables maternels (troubles digestifs, troubles ment afin d’accélérer la maturation pulmonaire par admi-
de la coagulation) et surtout fœtaux (trouble de la coagu- nistration de corticoïdes et d’instaurer une antibiothérapie
lation, fermeture prématurée du canal artériel avec hyper- si nécessaire.
tension artérielle pulmonaire persistante). Pour ces raisons, • En fonction de l’étiologie : dans les cas où une étiologie
ils ne sont utilisés qu’en traitement discontinus et sont a été mise en évidence, un traitement adapté sera bien sûr
déconseillés voire contre-indiqués après 26 semaines d’âge associé au traitement tocolytique (par exemple : traitement
gestationnel. d’une infection urinaire).
• Les progestatifs : seuls les progestatifs non virilisants Plusieurs situations contre-indiquent la mise en route d’un
peuvent être prescrits pendant la grossesse (Utrogestan, traitement tocolytique quel qu’il soit. Il s’agit essentielle-
Duphaston). Ils sont prescrits per os, seuls dans les menaces ment des pathologies maternelles nécessitant une inter-
d’accouchements prématurés légères ou en association avec ruption de la grossesse (pré-éclampsie, cardiopathie,
les bêtamimétiques dans les menaces d’accouchements pré- hémorragies abondantes…), de la souffrance fœtale aiguë,
maturés plus sévères. Leur efficacité n’a pas été scientifi- de la mort in utero et de la chorio-amniotite. En cas de
quement démontrée. Leur prescription doit cependant être retard de croissance intra-utérin, une surveillance fœtale
effectuée avec discernement. Ils sont en effet parfois res- rigoureuse (échographie avec vélocimétrie doppler, enre-
ponsables d’hépatites médicamenteuses avec cholestase gistrement du rythme cardiaque fœtal…) permettra d’adap-
cédant à l’arrêt du traitement. En intramusculaire, à dose ter la conduite à tenir et d’arrêter éventuellement le traite-
élevée, la 17-α-hydroxyprogestérone a un effet prophy- ment tocolytique quand les bénéfices à maintenir la
lactique.
• Le sulfate de magnésium : la voie intraveineuse qu’il
impose, ses effets indésirables et son action modérée par Points Forts à retenir
rapport aux bêtamimétiques font qu’il est peu utilisé en
France. Il est par contre très largement employé dans les
• L’accouchement prématuré est défini par toute
pays anglo-saxons.
naissance survenant avant 37 semaines
Prévention des complications fœtales d’aménorrhée. La menace d’accouchement
prématuré associe des contractions utérines
• Les corticoïdes sont utilisés en prévention de la maladie à une modification du col utérin.
des membranes hyalines. En effet, ils accélèrent la matu- • Ses causes sont multiples : ovulaires (fœtale ou
rité pulmonaire de façon clairement démontrée. Ils ont un annexielle) ou maternelles (facteurs de risque
effet bénéfique certain entre 28 et 34 SA, et probable en surtout socio-économiques, causes locales
dehors de cette période (avant 28 SA et après 34 SA). La congénitales ou acquises, causes générales).
prescription consiste en 2 injections intramusculaires de Sa prévention est essentielle et repose sur une
bêtaméthasone retard (Célestène chronodose : 1 injection meilleure surveillance prénatale.
de 12 mg à renouveler après 24 h) ou 4 injections de dexa- • Les bêtamimétiques sont les thérapeutiques
méthasone (Soludécadron : 6 mg en IM toutes les 12 h). les plus prescrites après le repos (essentiel), par
Son efficacité est immédiate mais optimale 24 h après la voie parentérale (de courte durée) dans les formes
première injection. Les cures peuvent être répétées tous les sévères, per os le plus souvent. Leurs contre-
10 jours à concurrence de 4 cures maximales. indications doivent être scrupuleusement
• Antibiothérapie: elle doit être largement prescrite, afin respectées en raison d’accidents cardiovasculaires
d’éviter les infections néonatales d’origine materno-fœtale. mortels rares mais décrits.
• Ces mesures doivent permettre de limiter
Indications la prématurité, et surtout les séquelles
• En fonction de la gravité de la menace d’accouchement neurologiques et respiratoires qui lui sont
prématuré : la notion de gravité repose sur l’importance associées.
des contractions, la dilatation du col et surtout le terme de
la grossesse. Au-delà de 3 cm de dilatation, l’accouche-
ment peut être considéré comme imminent. La rupture pré- POUR EN SAVOIR PLUS
maturée des membranes est un facteur aggravant. Jacquetin B, Labouz F. Une menace d’accouchement prématuré.
En cas de menace d’accouchement prématuré légère et Conduite à tenir. In : Lansac J, Body G (ed). Pratique de l’accou-
moyenne, la prise en charge associera repos à domicile avec chement. Paris : Simep, 1988 : 222-34.
Merger R. Précis d’obstétrique. Paris : Masson ed 1993 : 204-9.
traitement tocolytique per os, par progestatifs et (ou) bêta- Papiernik E. Coefficient de risque d’accouchement prématuré
2-mimétiques. Dans les menaces d’accouchements pré- (CRAP). Presse Med 1969 ; 77 : 793-4.
maturés sévères, la patiente sera hospitalisée et la tocolyse Papiernik E, Cabrol F, Pons JC. Prévention de la prématurité. Obs-
tétrique. Paris : Médecine-Sciences Flammarion, 1995 : 611-31.
sera débutée par voie intraveineuse. Après 35 SA, la voie Thoulon JM, Audra Ph et al. Quelle place reste-t-il pour les bêta-
parentérale n’est plus prescrite. Le traitement per os est le mimétiques dans le traitement et la menace d’accouchement pré-
maturé. Rev Fr Gynecol Obstet 1992 ; 87 : 372-92.
plus souvent maintenu jusqu’à 37 SA. En cas de rupture