Sunteți pe pagina 1din 5

Dans les Très Riches Heures du duc de Berry :

un prélude à Armageddon
Le tableau est censé représenter la victoire du roi David sur les Jébuséens ; mais il s’agit
d’une scène de bataille — médiévale — opposant les forces du Bien (à l’armure dorée) à
celles du Mal (à l’armure sombre), un avant-goût d’Armageddon.
L’artiste n’a pas hésité à symboliser, au premier plan, la victoire d’un camp sur l’autre en
montrant un chevalier en armure dorée enfonçant sa lance dans le fondement d’un enne-
mi, chevalier désarçonné ou fantassin, agenouillé face contre terre.

La silhouette du chevalier en armure dorée du premier plan, pourfendeur de mécréants,


rappelle, mutatis mutandis, celle de saint Georges terrassant le dragon.

Saint Georges terrassant le dragon


(Юрій Змееборец),
icône du XIVe siècle, provenant de l’église
des saints Joachim et Anne,
dans le village de Stanylya (Станиля),
dans la région de Lvov (Львів).

Musée ukrainien des beaux-arts


(Музеï украïнского искусства).

[Юрій et Львів sont les formes ukrainiennes


correspondant au russe Юрий et Львов.]

Змееборец me semble un calque


de « sauroctone » (σαυροκτόνος).
L’illustration de première page, une miniature (folio 95 r), œuvre de Jean Colombe (v. 1440-v.
1493), qui a succédé aux frères Limbourg, est au nombre des trésors que recèlent les Très
Riches Heures du duc de Berry, au Musée Condé de Chantilly. Elle illustre le Psaume XXIX (offer-
toire du Mercredi des Cendres au début du Carême) :
« Exaltabo te, Domine, quoniam extraxisti me nec delectasti inimicos meos super me »
(Ὑψώσω σε, Kύριε, ὅτι ὑπέλαϐές με καὶ οὐκ ηὔφρανας τοὺς ἐχθρούς μου ἐπ’ ἐμέ).

Le phylactère dont les volutes ornent le pied de page porte suscepisti « tu [m’]as soutenu »
là où la leçon admise est maintenant extraxisti « tu [m’]as arraché » et, par erreur, exultabo
« je serai transporté de joie » au lieu d’exaltabo « je [te] glorifierai » ; le tracé des « N » y est
« en miroir ».

« Zoo fel en bont was het leven,


zoo verdroeg het den geur van bloed en rozen dooreen »
(Si violente et variée était la vie [au Moyen-Âge]
qu’il y régnait une odeur mêlée de sang et de roses)

“So violent and motley was life that it bore the mixed smell of blood and of roses”

Johan Huizinga [1872-1945]


Herfsttij der Middeleeuwen, 1919
[vers la fin du premier chapitre, intitulé « ’s Levens felheid »]
trad. : The Waning of the Middle Ages ~ The Autumn of the Middle Ages, 1924

Le néerl. herfst « automne » correspond à l’all. Herbst « id. », à l’angl. harvest (v.-a. hærfest)
« moisson », au suéd. höst (v.-norr. haust) « automne » ; l’ensemble est apparenté au lat.
carpĕre « cueillir » (carpe diem) et au gr. καρπός « fruit ».

À en croire les textes, avant la bataille (en réalité un assaut) dont l’enluminure donne une
vision médiévalisée, les Jébuséens avaient traité David avec une ironie pleine de mépris en
lui annonçant qu’il ne parviendrait pas à pénétrer dans leur citadelle parce qu’aveugles et
boiteux le repousseraient.
On peut comprendre par là soit qu’il suffirait d’un groupe d’infirmes pour lui tenir tête
(donc ses troupes sont quantité négligeable), soit que même le rebut de la société jébusé-
enne (ceux qui étaient exclus à la fois de certaines cérémonies du culte et de tout service
armé) le rejette.
Tout cela est facile à comprendre aussi longtemps qu’on ne plaque pas sur la situation d’alors
des schémas — bons ou mauvais — de notre époque.
Mais les textes grâce auxquels l’anecdote nous est parvenue reflètent la diversité de la tradi-
tion qui nous les a transmis.

2 Samuel, V, 6 :
Καὶ ἀπῆλθεν Δαυὶδ καὶ οἱ ἄνδρες αὐτοῦ εἰς Ἱερουσαλὴμ πρὸς τὸν Ἰεϐουσαῖον τὸν κατοικοῦντα
τὴν γῆν. Kαὶ ἐρρέθη τῷ Δαυίδ· Οὐκ εἰσελεύσει ὧδε, ὅτι ἀντέστησαν οἱ τυφλοὶ καὶ οἱ χωλοί

Jérôme :
Et abiit rex, et omnes uiri qui erant cum eo, in Ierusalem, ad Iebusæum habitatorem terræ: dictum-
que est Dauid ab eis: « Non ingredieris huc, nisi abstuleris cæcos et claudos »

Noua Vulgata :
Et abiit rex et omnes uiri, qui erant cum eo, in Ierusalem ad Iebusæum habitatorem terræ.
Qui dixit ad Dauid :
« Non ingredieris huc, sed depellent te cæci et claudi »

Les trois versions sont d’accord pour comprendre « Tu n’entreras pas ici » ; ensuite, des diver-
gences apparaissent. Le texte grec porte ἀντέστησαν, aoriste de ἀνθίστημι « se dresser (ἱστά-
ναι) contre qqn, résister à qqn, s’opposer à qqn » : aveugles et boiteux « se sont dressés » (con-
tre toi), passé aussi difficile à justifier qu’à concilier avec les temps des traductions latines.
Jérôme comprend nisi abstuleris (subjonctif parfait) « à moins que tu n’aies écarté, sans avoir écar-
té, tant que tu n’auras pas écarté » ; la Nouvelle Vulgate explique qu’aveugles et boiteux « te
repousseront ».

Edouard Dhorme (1956, t. I, p. 941) clarifie la situation par sa traduction de l’hébreu :


« Tu n’entreras pas ici, puisque les aveugles et les boiteux te repousseront. »
La source grecque — telle que nous la connaissons — demeure aberrante et ne correspond
pas à celle que Jérôme a suivie ; la Nouvelle Vulgate est conforme, sur ce point, à l’original.

Autre source rapportant l’anecdote : Flavius Josèphe, Antiquités judaïques (Antiquitates Iudaicæ
(ed. B. Niese), VII, 3 = Τάδε ἔνεστιν ἐν τῇ ἑϐδόμῃ τῶν Ἰωσήπου ἱστοριῶν τῆς Ἰουδαϊκῆς ἀρχαιο-
λογίας). La traduction française citée ainsi que les notes sont empruntées à l’excellent site de
Philippe Remacle ; l’anglaise, due à William Whiston (1667-1752), est disponible sur le site du
Project Gutenberg.

Tῶν δὲ κατοικούντων τὴν πόλιν Ἰεϐουσαίων, γένος δ’ εἰσὶν οὗτοι Χαναναίων, ἀποκλει-
σάντων αὐτῷ τὰς πύλας καὶ τοὺς πεπηρωμένους τὰς ὄψεις καὶ τὰς βάσεις καὶ πᾶν τὸ
λελωϐημένον στησάντων ἐπὶ χλεύῃ τοῦ βασιλέως ἐπὶ τοῦ τείχους καὶ λεγόντων κωλύ-
σειν αὐτὸν εἰσελθεῖν τοὺς ἀναπήρους, ταῦτα δ’ ἔπραττον καταφρονοῦντες τῇ τῶν τειχῶν
ὀχυρότητι, ὀργισθεὶς πολιορκεῖν ἤρξατο τὰ Ἱεροσόλυμα.
[47] Les Jébuséens, qui habitaient la ville et qui étaient de race chananéenne, lui fermèrent les
portes et fiirent monter les aveugles, les boiteux et tous les estropiés sur les remparts, pour railler le
roi [48], disant que les infirmes suffiraient à l’empêcher d’y pénétrer, — tant ils avaient d’orgueil-
leuse confiance dans la solidité de leurs remparts. — David, irrité, commence d’assiéger Jérusalem.

[47] II Samuel, V, 6 ; I Chron., XI, 4-7. Josèphe a combiné et délayé ces deux récits.

[48] Dans l’hébreu de Samuel, les Jébuséens dirent à David : « Tu n’entreras pas ici que tu
n’aies délogé les aveugles et les boiteux », entendant par là : « David n’entrera jamais ici. »
Josèphe a mis en scène la simple indication du texte. D’après les LXX, ce sont les aveugles
et les boiteux qui s’étaient opposés à l’entrée de David : ὅτι ἀντέστησαν οἱ τυφλοὶ καὶ οἱ
χωλοί. Dans les Chroniques, les habitants de Jébus disent à David :
« Tu n’entreras pas ici » ; il n’est pas question d’aveugles et de boiteux.

“Now the Jebusites, who were the inhabitants of Jerusalem, and were by extraction Canaanites,
shut their gates, and placed the blind, and the lame, and all their maimed persons, upon the
wall, in way of derision of the king, and said that the very lame themselves would hinder his
entrance into it. This they did out of contempt of his power, and as depending on the strength
of their walls. David was hereby enraged, and began the siege of Jerusalem […].”

Somme toute, l’aoriste ἀντέστησαν n’est peut-être qu’une bourde de copiste (que personne
n’a osé rectifier) pour ἀντιστήσονται et l’anecdote elle-même qu’une interpolation orne-
mentale, une enjolivure ; à moins, a contrario, qu’il ne s’agisse d’un reliquat, d’un témoin
(au sens où les géologues parlent de butte-témoin) d’une version plus détaillée de l’épisode
qui aurait fait l’objet d’une compression de texte.

Souvienne vous de celuy à qui, comme on demandast à quoy faire il se pénoit si fort
en un art qui ne pouvoit venir à la cognoissance de guiere de gens:
J’en ay assez de peu, respondit-il,
j’en ay assez d’un,
j’en ay assez
de pas un.

S-ar putea să vă placă și