Sunteți pe pagina 1din 2

Physique ou Chimique

« Et pourquoi est-ce que je ne devrais pas y aller, donne moi une seule bonne raison ! »
Elle dévisagea son mari pendant trente longues secondes, attendant une éventuelle réponse, un
sursaut d'orgueil. La mine déconfite, il n'osait même pas lever les yeux de la moquette synthétique.
Dans les mains, il triturait nerveusement la feuille qu'elle venait d'imprimer, preuve de son dernier
forfait.
Dans un geste d'humeur, elle lui agita une clé USB sous le nez. Rouge et haletante, elle semblait sur
le point d'exploser.
« C'était la dernière fois, Régis ! »
Elle se retourna, faisant une croix sur dix ans de mariage, quinze ans de sa vie. Elle réajusta le
bonnet de son fils aîné, reboutonna le col de sa cadette, et prit résolument la direction de la porte.
Les valises attendaient déjà sur le perron de leur pavillon de banlieue.

Dans la voiture, étrangement silencieux, les enfants ne comprenaient pas ce qui se passait. Maman
leur avait juste dit qu'ils allaient rester un moment chez Mamie, qu'elle avait une affaire à régler.
Surtout, il ne fallait pas parler à Papa. Il avait fait quelque chose de très très mal et il allait être puni.
A l'avant, elle parlait tout bas, ressassant un discours qui ne lui convenait pas.
Comment pouvait-elle décemment faire une chose pareille ? C'était son mari. Non ! C'était pour le
bien de tous. Il fallait d'abord penser aux autres, aux enfants ! C'était trop dangereux.

L'appartement de Mamie sentait bon le gâteau au chocolat. Elle avait placé quelques DVD de
dessins animés sur la table basse, devant le poste de télévision. La chambre était prête, une énorme
peluche sur l'oreiller de chacun des deux petits lits. Pendant que sa mère s'occupait des enfants, elle
rangea fébrilement les quelques vêtements qu'elle avait emporté pour eux, dans la commode les
séparant.
Elle savait qu'elle traînait, qu'elle devrait déjà être repartie. Son ancienne chambre de petite fille lui
rappelait son enfance. Elle n'aurait jamais pensé y installer ses propres enfants ainsi. Elle avait été
heureuse ici. Ses petits le seraient aussi. C'est ce qui la faisait tenir.

« J'y vais Maman. », finit-elle par dire dans un soupir.


« Tu es sûre ma chérie ? ». Compréhensive et discrète, comme toujours, elle n'avait mis aucune
condition pour prendre les enfants chez elle.
« Je crois, oui », répondit-elle, une main sur la poignée de la porte.
« Est-ce que tu me diras de quoi il retourne ? », demanda la grand-mère alors qu'elle était déjà
engagée dans l'escalier.
Elle leva la tête, s'arrêta entre deux marches et, après quelques secondes, hocha négativement de la
tête.
« Je ne pense pas, Maman. Désolée. Je n'en aurai pas le courage ... et je suis sûre que tu préfèrerais
ne pas l'avoir su, après.
« Je t'appelle dès que je saurai quand je peux rentrer. Merci Maman.
« Et surtout, n'ouvre pas à Régis s'il ose se pointer ici ! »
Et déjà elle disparaissait à l'étage du dessous. Bientôt, la porte du rez-de-chaussée claqua, ne
laissant que le murmure du vent, passant à travers un carreau mal fermé, répondre aux questions.

Elle fit une courte pause devant le commissariat. Puis, persuadée qu'elle n'avait d'autre choix, elle
entra. Elle secoua rapidement la pluie de son manteau et s'approcha du comptoir d'accueil. Un jeune
homme, penché sur un rapport, leva la tête en la voyant arriver.
« Bonjour Madame, que puis-je pour vous ? », dit-il, probablement pour la trentième fois de son
service.
« Je souhaiterais porter plainte contre mon mari. »
« Il vous bat ? », demanda-t-il en la dévisageant, cherchant peut-être des traces de coups.
« Non »
« Mon officier supérieur est en entretien. Merci de bien vouloir patienter en salle d'attente. Il vous
recevra dès que possible, pour prendre votre déposition. Pouvez-vous remplir ce formulaire en
attendant, s'il vous plaît ? ». Il lui tendit une feuille, prise sur la pile placée devant lui. Ce n'était ni
plus ni moins qu'un questionnaire d'identité et des raisons de sa venue.

Elle s'installa près du radiateur. Elle fouilla dans son sac pour trouver un stylo et s'appliqua à
remplir toutes les cases. Au bout de quelques minutes, elle s'abîma dans la contemplation du
plafond. Elle 'avait pas pensé à prendre un livre. Et de toute façon, elle n'avait pas la tête à ça. Les
magasines qui traînaient ne l'intéressaient pas. Elle avait bien d'autres préoccupations en ce
moment.
Une demi-heure plus tard, un homme passa en trombe devant la salle. Il hurlait que ça ne se
passerait pas comme ça, qu'il en parlerait à son supérieur, qu'il avait des relations !
Peu après, celui qui devait être l'officier supérieur l'appela et l'invita à le suivre, dans une salle un
peu à l'écart. Il avait l'air furieux de sa précédente altercation. Il allait tout de même falloir qu'il
l'écoute. C'était important.

« Bonjour Madame, je suis le commissaire Haujourt. Asseyez-vous, je vous en prie.


« Vous souhaitez donc porter plainte contre votre mari ? ». Sa voix était douce. Elle contrastait
fortement avec les éclairs qu'il avait dans les yeux. Au moins, cet homme savait se contrôler, pas
comme son mari.
« Puis-je voir votre formulaire, s'il vous plaît ? », ajouta-t-il en tendant la main.
Elle le lui tendit. Elle tremblait, et ce n'était pas de froid.
Il lut la page en diagonale, s'assit et la relut méticuleusement. Les éclairs avaient disparu de son
regard. Son front se plissa. Il posa le papier sur la table, recula sa chaise et soutint le regard de la
pauvre femme pendant de longues secondes.
« Vous ne semblez pas déraisonnable, Madame. Vos accusations sont très graves. J'espère que vous
avez songé à apporter quelques preuves pour étayer vos propos. »
La gorge serrée, elle ne répondit pas. Elle prit juste son sac à main et en sorti deux objets : un album
photos et une clé USB.
« J'avais quelques soupçons. Depuis ma formation en informatique et cette trouvaille, je n'en ai
plus. Nous avons deux enfants, Monsieur le commissaire, de trois et cinq ans. Je n'ai pas le choix.
« Je répondrai à toutes vos questions. Je vous dirai tout ce que je sais. Je ne vous demanderai qu'une
seule chose : Êtes-vous en mesure de fermer les yeux s'il devait lui arriver quelque chose, dans le
cas où cette fameuse loi ne passerait pas, la semaine prochaine ? ». Très tendue, elle attendait la
réponse qui tardait à venir.
L'homme se leva. Lentement il se dirigea vers la porte, l'entrouvrit, puis appela son collègue :
« Jo, tu peux éteindre l'enregistrement. J'ai fini de prendre la déposition de la dame. Merci. »
Il referma la porte, attendit une bonne minute pour la forme puis se retourna vers cette mère
désespérée.
« Oui, Madame. Vous pouvez rentrer chez vous, maintenant. Je repasserai vous voir demain
matin. »

Deux jours plus tard, l'affaire faisait la une des journaux. « Démantèlement d'un réseau pédophile en
banlieue parisienne ». En plein débat sur la castration chimique, elle se doutait que cela ne passerait
pas inaperçu. Elle leva les yeux au ciel et remercia une fois de plus le commissaire de ne pas avoir
donné son nom aux vautours.
Elle avait fait le principal, assuré la sécurité de ses enfants. Après, la justice trancherait … ou bien,
elle se ferait justice elle-même. Il était hors de question de prendre le risque d'une récidive ... pour
les enfants.

S-ar putea să vă placă și