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Un poéte en voyage... n refoulement d’idées et de sen- timents. Un fleuve qui fuit la mer. L’on dit : « Remonter aux sour- ces », comme si elles étaient des estuaires. Nappes d’eau souterraine, réserve mondiale d’eau pure? La poé- sie? Tout le monde aime ga. Un peu de poésie et beaucoup de commerce. Il suffit d’y mettre les formes comme les gouvernements quand ils ont a défendre des entreprises hasardeuses. Beaucoup de poésie et peu de com- merce. C’est bien involontairement que je suis un poéte en voyage. Sans doute faut-il que je sois cela puisque au- cune firme sérieuse n'a voulu me déléguer ses pouvoirs. Ou étais-je? Bond Street; un lieu idéal pour mé- diter sur les glorieuses aliénations artistiques. Si ce pays est celui des poétes, cette rue seule est toute l’An- gleterre. Que suis-je venu faire dans cette galére? Tout me parait a rebrousse-poils. Bond Street comme Vavenue Louise est une artére bordée de magasins de luxe. Avant qu’elle ne tombe en ruines sous V’effet de la misére périphérique et de la force du temps — attendons encore un moment — il faudrait la faire entrer au Musée Tussaud. Automne et hi- ver, les visons courent sur ce pavé et en toute saison les parapluies de soie. Mon réve est celui-ci : Nous som- mes au XIX® siécle. Vers 1875. Moi, vétu d’un costume d carreaux et chaussé de guétres compliquées, ar- pentant cette méme Bond Street. Avec un moral anglais. Dans la petite mallette en crocodile que je porte allégrement il y a les cartes de ce monde & conquérir pour les vilains yeux de la reine Victoria. Avec un moral de tonnerre de Dieu. Qui naurait voulu étre Anglais au XIX’ siécle d part les poétes de V’épo- que? C’est vraiment singulier et dans ce pays plus qu’ailleurs, les poétes wont jamais voulu savoir ce qu’ils sont et en méme temps la société se sert deux comme enseigne, comme faux nom pour ses marchandises. Atterré par cette découverte d’or- dre moral, j’explorai les galeries nombreuses dans les environs. Je présume que les artistes-peintres échappent au sort des poétes. D’ail- leurs ils sont beaucoup plus dans le monde des affaires. J’avais déja vu dexcellentes expositions 4 Londres. La vie artistique s’y développe en raison inverse de la puissance poli- tique, VEmpire a perdu la plupart de ses rayons. A LONDRES Au cours d’un vernissage a I’LC.A. Gallery, 4 Londres : Coply, a gau- che, Man Ray, a droite. A la New London Gallery, une exposition Moholy Nagy. Mais le meilleur voisine avec le pire. Plus loin, des peintures bizarres qui ne révélent de la part de leurs auteurs qu'un gotit de Vimitation. Woodstock Gallery, un bon peintre sud-africain, Fradan. Ce dernier a défrayé la chro- nique car il fut menacé de mort par le Klu-Klux-Klan en raison de ses attaches avec la cause des noirs. A VLC.A., VAméricain Coply avec un art caricatural — on pense a Steinberg — mais il vise plus parti- culiérement les mceurs anglaises. C’était le vernissage et d Londres, cest extraordinaire. On boit beau- coup et personne ne regarde les ta- bleaux, ostensiblement. J’eus alors le courage de quitter Bond Street, j’y avais perdu ma peau. Comme un vé- ritable critique, j'ai pu admirer prés dHyde Park. ad la galerie One les wuvres de Tamayo. Foule. On y buvait encore plus qu’d VLC.A. Le conservateur de la Tate Gallery en redingote se tenait appuyé sur son parapluie, de Vautre main il tenait un verre. J’ai encore noté la présence de gens de couleur. Des garcons ja- ponais circulaient entre les rangs. Brochettes de viande et de poisson. Enfin, je quittai l’Angleterre, ivre- mort. Je n’y ai rien compris. Faut- il y retourner? Aller ailleurs? Ou rester sur ma chaise? M. BROODTHAERS.

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