dossier
PHILIPPE MARTINEZ
«Le salaire, marqueur de Il’af
La mol
Pourquoi la CGT fait-elle de la hausse des
salaires Fune de sos priorités de la rentrée sociale?
La campagne pour laugmentation des salaires est
Ie prolongement de ce qui a été engagé depuis
mai 2015, La question des salaires est essentielle,
non seulement pour les salariés, mais aussi pour
les retraités et les privés d’emplois puisque, der-
rigre le pouvoir d’achat, ily a les cotisations so-
ciales, les fameuses «charges» que dénonce
constamment le patronat. A la CGT, on parle de
‘«salaire socialisé», ce qui inclut aussi la protection
sociale, Tassurance chomage, la retraite. augmen-
tation des salaires appréhendée de cette maniére
permet, defacto, d’accroitre les rentrées de cotisa-
tions, sans méme avoir besoin de relever le taux de
cotisation. C'est profitable a l'économie dans son
ensemble. En cela, le salaire nest pas lennemi de
Yemploi, contrairement & la rengaine de nos adver
aires qui parlent du prétendu «coat » du travail,
depuis des décennies. Le travail nest pas un coat
mais un investissement. D’ailleurs, si le gel des sa-
aires que Yon nous impose avait été essentiel dans
la bataille pour Femploi, on devrait en voir les ré-
sultats, non? Les chiffres du chomage témoignent
pplutét du contraire...
L’augmentation des salaires est une bataille
Idgologique connectée avec la réalité des
salariés. Pour autant, est-il evident de les
‘mobiliser, qulls soient syndiqués ou non?
Ceite centralité des salaires ost en phase avec ce
que pense la grande majorité des salariés. Mais,
pas toujours de manigre immédiate, tant elle va &
Yencontre des idées dominantes. C'est aussi le eas
pour la réduction du temps de travail, ailleurs. Je
‘vous passe les noms doiseaux que jai pu entendre
de la part des économistes libéraux, lorsque j'ai
parlé des 32 heures. Cette emprise médiatique et
idéologique peut peser sur les militants. Mais par-
‘tout oit 'on parvient a la dépasser, on obtient des
résultats. Dans une entreprise de WAllier - oi la
CGT niest pas la premi¢re organisation syndicale -,
nous sommes allés faire une distribution de tracts.
Sur 1 600 salariés, 700 ont signé la pétition de
notre campagne salaire, et cing ont adhéré au syn-
dicat, dans la foulée. Sur lo terrain, cette cam-
pagne parle aux gens. Il est essentiel que la CGT
continue de nourrir le d¢bat, d'affater ses argu-
‘ments. Ce qu'll faut, cst que ce genre d’exemple
se généralise, car on a trop tendance a considérer
que la question des salaires ne se pose que lorsque
les entreprises ont décidé d’ouvrir la porte des
négociations.
22 NWO septemire ors
sation intersyndicale du 8 octobre sera un temps
fort pour revendiquer l'amélioration du pouvoir d'achat, qui
constitue un enjeu crucial pour relancer l'économie, ainsi
que |'explique le secrétaire général de la CGT.
année 2016 a été marquéo
par de nombreux conflts
portant sur les salaires.
Pourtant, nombre de
négociations annuelles
obligatoires (NAO) n’ont pas
about, Nest-ce pas
paradoxal?
Out ded du bon moment pour
patler des salairos? Le patron
bles salaries? Tl aut sorte du
seul ealendrier des NAO. Pour
porter nos revendeations, dit-
fon vraiment attondre la convo
tation la réunion? Dans beat-
coup d'entreprises, les
camarades prennent les de-
vants, dod’ ces nombreux
confits sociaux en faveur dane
‘tugmentation des slaires. Ala
CGT, on soutient les salariés
dans leurs revendications sal-
Tales, quel que soit fe moment.
La loi dite Rebsamen ouvre
méme la possibilité, sous eer
{aines conditions, une négocia-
tion salaval triennate, au lio de Pactuellenégocia-
tion annuelle. Qui peut eroire que les salaries vont
accepter de ne partersalaire que tous les trois ans?
Crest ne pas connaitre, ne pas comprendre la ralité
surle terrain.
Ala CGT, on parle de «salaire
socialisé», ce qui inclut la
protection sociale, l’'assurance
chémage, la retraite 9
La CGT peut-elletenir le mame discours a
PME, TPE et aux grandes entreprises cotées en
bourse? Le rapport n'est pas le méme, le type
exploitation non plus.
Détrompez-vous. Cest moins 6vident, sans doute,
mais on est dans ie méme rapport dtexpoitation. Ce
discours est parfois intSgré par les salariés eux-
memes, qui nous disent: «ley, i n'y a pas daction-
naire juste un petit patron, et il ne peut pas nous aug-
mmenter.» Saut que, lorsqu’on discute en profondeur,
dn sapercolt que ceux qui imposent lorganisation
du travail appattiennent le plus souvent aun groupe
Pour Philippe Martinez, secrétare général de la CGT,
du CAC 40. Ces salariés font done aussi partie de la
grande chaine de production, qui permet de distri-
buer des dividendes anx actionnaires. Ht, en géné-
ral, ils sont encore plus pressurés que les autres. 1
y a des lettres de cadrage, non écrites, qui font la
plnie et le beau temps pour la négociation salatiale.
Et encore, quand celle-c a lieu, car, dans nombre de
‘TPE/PME, du fait de la faible représentation syndi-
cale, elle n'existe méme pas.
Il faut savoir qu'il y a une logique derridre tout ga.
‘La justification de la sous-traitance, la justification
des délocalisations, c'est de baisser le prétendu
«colt» du travail. Le salaire demeure le marqueur
de 'affrontement entre le capital et le travail. Ga
existe toujours, et je crois que Foffensive n'a jamais
6té aussi importante,
Dans ce contexte, comment abordez-vous la
prochaine conférence sociale?
‘Nous souhaitons que la question des salaires soit