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Grosse le Expédition le Cour d'Appel de Bordeaux n nal de Grande Instance de Bordeaux Jugement du: 12/01/2016 1 ERE CHAMBRE - DOSSIERS COMPLEXES N° minute = 162 N° parquet 11027000050 Plaidé les 03-04-05/11/2015 Délibéré le 12/01/2016 JUGEMENT CORRECTIONNEL A audience publique du Tribunal Correctionnel de Bordeaux les TROIS, QUATRE et CINQ NOVEMBRE DEUX MILLE QUINZE, Composé de : Président: Monsieur ROUCOU Denis, premier vice-président, Assesseurs : Madame VOLLETTE Anne-Marie, vice-président, ‘Madame PONS Sylvia, juge, Assistés de Madame BOUTET Michele, greffidre, en présence de Madame ALLIOT Marie-Madeleine, procureur de la République, a été appelée Paffaire ENTRE : Monsieur le PROCUREUR. DE LA REPUBLIQUE, prés ce tribunal, demandeur et poursuivant PARTIE CIVILE: Madame SCHUELLER Liliane épouse BETTENCOURT pris en la personne de son tuteur adjoint Monsieur PELAT Olivier, ayant élu domicile chez Maitre DUCOS ADER Benoit 26 Place des Martyrs de la Résistance 33075 BORDEAUX CEDEX, partie civile, non comparante, M. PELAT Olivier, tuteur adjoint, comparant assisté de Maitre DUCOS-ADER Benoit ct Maitre DUPIN Amaud avocats au barreau de BORDEAUX, ET Page 1/34 NATURE DUJUGEMENT: — Prévenw ce cs op wD Nom : GATTEGNO Hervé, Albert Sip né le 28 juillet 1964 & THIONVELLE (Moselle) pIUcENCES: de GATTEGNO Yves et de MAYER Marléne Blcuuc cer Nationalité : frangaise 1 Extent rou Situation famiiale : marié © Linas SPC Situation professionnelle : Journaliste ola Antécédents judiciaires : déja condamné spertine SME + Notir 0 Bap confsetion domeurant one Hija Situation pénale ; libre 1 Géme chamtee ‘comparant assisté de Maitre LE GUNEHEC Renaud avocat au barreau de PARIS, Prévenu du chef de: UTILISATION D'UN DOCUMENT OU ENREGISTREMENT OBTENU PAR UNE, ATTEINTE A LA VIE PRIVEE D'AUTRUI faits commis courant juin/juillet 2010 a PARIS Prévenu ee ey Nom: GIESBERT Franz, Olivier Signifi le: né le 18 janvier 1949 a WILMINGTON (DELAWARE) (ETATS-UNIS) de GIESBERT Frédérick et de ALLAIN Marie Bice cana Nationalité ; _frangaise / américaine laste Gare Situation familiale : / Linsse °C Situation professionnelle : Directeur de publication oRcP Antécédents judiciaires : déja condamné 1 Expertise nee demeurant : JOURNAL LE POINT 74 avenue du Maine 75014 PARIS ore . 1 Fie Situation pénale : libre 1 ime chambee non comparant représenté avec mandat par Mattre LE GUNEHEC Renaud avocat au barreau de PARIS, Prévenu du chef de: UTILISATION D'UN DOCUMENT OU ENREGISTREMENT OBTENU PAR UNE ATTEINTE A LA VIE PRIVEE D'AUTRUI faits commis courant juin, juillet 2010 et ‘courant 2010 4 PARIS: Page 3/34 | 4 NATURE DU JUGEMENT: © as DD Siniti le DILIGENCES: 1 Casierjuticiire 1 Bxtenitéerou |G Lisase SPC ‘oRCP 1 Expertise SME + Notit 1 Exp confiscation DITr D Fiji 1 Geme chambre NATURE DU JUGEMENT: © as DD Sigil: DILIGENCES: 1 Casierjuliciire (0 Extrait sorou 1 Liasse PC o RCP (0 Expertise 0 SME + Notit (0 Exp confiseation corre 0 Fiji 1 Géme chambre Prévenu Nom : ARFI Fabrice, Anthony né le 4 septembre 1981 A LYON 69008 de ARFI Alain et de BEAULIEU Colette Nationalité ; frangaise Situation farnliale : marié Situation professionnelle : Journalist Antécédents judiciaires : jamais condamné demeurant : Chez Maitre Emmanuel TORDIMANN 39 ruc Censier 75005 PARIS SEME Situation pénale: libre comparant assisté de Maitre MIGNARD Jean-Pierre avocat au barreau de PARIS et ‘Maitre TORDJMANN Emmanuel avocat au barreau de PARIS, Prévenu du chef de : UTILISATION D'UN DOCUMENT OU ENREGISTREMENT OBTENU PAR UNE, ATTEINTE A LA VIE PRIVEE D'AUTRUI faits commis courant juin 2010 et courant 2010 & PARIS Prévenu Nom : BONNEFOY Paseal, Jean-Pierre né le 11 janvier 1963 4 CHATEAUROUX (Indre) de BONNEFOY Pierre et de GUEGAN Pierrette Nationalité : _fiangaise Situation familiale : marié Situation professionnelle : gérant d’hétel Antécédents judiciaires : jamais condamné demeurant Situ pénale : libre comparant assisté de Maftre GILLOT Antoine avocat au barreau de PARIS, Prévenu du chef de : ATTEINTE A LINTIMITE DE LA VIE PRIVEE PAR CAPTATION OU ‘TRANSMISSION DES PAROLES D'UNE PERSONNE faits commis du 25 mai 2009 au I] mai 2010 a NEUILLY SUR SEINE Page 2/34 NATURE DU JUGEMENT, ec a DD Signi DILIGENC (Casio juiiieo 8 Extrait dorow 1 Lines SPC 0 RCP 1 Expertise 1 SME + Notit 1 Exp confiscation Dire 0D Piss 1 Géme chambre NATURE DU JUGEMENT: cas DD Signifé le: DILIGINCES: 0 Casis jot 1 Extrait éerou 10 Lins $e oReP 1 Expertise 1D SME + Nott, 1D Exp confieation ome 1 Fijss 1D Géme chambre Prévenu Nom : LHOMME Fabrice né le 17 novembre 1965 PARIS 75006 de LHOMME André et de LAURENCE Frangoise Nationalité : _frangaise Situation familiale : divoreé Situation professionnelle : Journaliste Antécédents judiciaites : déja condamné demeurant : Journal LE MONDE 86 boulevard Auguste Blanqui 75013 PARIS 13EME Situation pénale : libre comparant assisté de Maitre SAINT-PIERRE Frangois avocat au barreaa de PARIS et ‘Maitre BURGUBURU Marie avocat au barreau de PARIS, Prévenu du chef de: UTILISATION D'UN DOCUMENT OU ENREGISTREMENT OBTENU PAR UNE ATTEINTE A LA VIE PRIVEE D'AUTRUI faits commis courant juin / juillet 2010 a PARIS Prévenu Nom : PLENEL Hervé, Edwy, Olivier née 31 aofit 1952 4 NANTES (Loire-Atlantique) de PLENEL Alain et de BERTREUX Michelle Nationalité : _frangaise Situation familiale :/ Situation professionnelle : Directour de publication Antéoédents judiciaires : dgja condamné demeurant.: Chez Mattre Jean-Pierre MIGNARD 39 rue Censier 75005 PARIS SEME Situation pénale : libre comparant assisté de Maitre MIGNARD Jean-Pierre avocat au barreau de PARIS et Maitre TORDIMANN Emmanuel avocat au barreau de PARIS, Prévenu du chef de : UTILISATION D'UN DOCUMENT OU ENREGISTREMENT OBTENU PAR UNE ATTEINTE A LA VIE PRIVEE D'AUTRUI faits commis courant juin 2010 & PARIS DEBAT:! A Lapel de ta cause, le président, a constaté V'absence de GIESBERT Franz, la présence et l'identité de BONNEFOY Pascal, ARFI Fabrice, LHOMME Fabrice, PLENEL Hervé et GATTEGNO Hervé et a donné connaissance de l’acte qui a saisi le tribunal. Page 4/34 S, Le président informe les prévenus de leurs droits, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui leurs sont posées ou de se taire Avant toute défense au fond, unc exception de nullité relative a lacte de saisine a é soulevée par les prévenus GATTEGNO Hervé ct GIESBERT Franz, Les parties ayant été entendues et le ministere public ayant pris ses réquisitions, le tribunal a joint incident au fond, aprés en avoir délibéré Le président a instruit Vaffaire, interrogé les prévemus présents sur les faits et regu leurs declarations, Mme Liliane SCHUBLLER épouse BETTENCOURT seprésentée par son tuteur adjoint M. PELAT Olivier s'est constituée partie civile par Pintermédiaire de Maitre DUCOS-ADER Benoit ct Maitre DUPIN Amaud ont été entendu en leurs demandes. Le 4 novembre 2015, le ministére public a été entendu en ses réquisitions. Maitre GILLOT Antoine, conseil de BONNEFOY Pascal a éé entendu en sa plaidoirie, Maitre MIGNARD Jean-Pierre et Maitre TORDJMANN Emmanuel, conseils de ARFI Fabrice ont été entendus en leur plaidoirie, Maitre SAINT-PIERRE Frangois ct Maitre BURGUBURU Marie, conscils de LHOMME Fabrice ont été entendus en leur plaidoirie, Maitre MIGNARD Jean-Pierre et Maitre TORDIMANN Emmanuel, conseils de PLENEL Hervé ont été entendus en leur plaidoirie, Maitre LE GUNEHEC Renaud, conseil de GATTEGNO Hervé a été entendu en sa plaidoirie. Maitre LE GUNEHEC Renaud, conseil de GIESBERT Franz a été entendu en sa plaidoiri. Les prévenus ont eu Ia parole en demier. Le greffier a tenu note du déroulement des débats. Puis a l'issue des débats tenus & audience des TROIS, QUATRE et CINQ NOVEMBRE, DEUX MILLE QUINZE, le tribunal composé comme suit Président: Monsieur ROUCOU Denis, premier vice-president, Assesseurs Madame PONS Sylvia, juge, Madame VOLLETTE Anne-Marie, vice-président, assistés de Madame BOUTET Michele, greffigre ‘en présence de Madame ALLIOT Marie-Madeleine, procureur de la République, Page 5/34 1 informé les parties présentes ou réguligrement seprésentées que le jugement serait prononcé le 12 janvier 2016 a 14:00. A cette date, vidant son délibéré conformément A la loi, le Président a donné lecture de la décision, en vertu de Tarticle 485 du code de proeédure pénale, ‘Composé de Président: Monsieur ROUCOU Denis, premier vice-président, Assesseurs Madame PONS Sylvia, jue, Madame VOLLETTE Anne-Marie, vice-président, Assistés de Madame BOUTET Michile, greffidre, et en présence du ministere public. Le tribunal a délibéré et statué conformément & Ia loi en ces termes : Les prévenus ont &18 renvoyés devant le tribunal correctionnel par ordonnance de Monsieur Jean-Michel GENTIL, Vice-Président chargé de Vinstruction et Madame Cécile RAMONATXO, Vice-Président chargé de Vnstruction au Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX en date du 30 aotit 2013. ARFI Fabrice a été cité selon acte d'huissier de justice, délivré & domicile le 6 juillet 2015, ARFI Fabrice a comparu a [audience assisté de son conseil ; il y a lieu de statuer contradictoirement & son égard. Test préveru davoir a Paris et sur le tertitoire national, courant juin 2010 et courant 2010, en tout ‘cas depuis temps non couvert par la prescription, conservé ou utilisé de quelque maniére que ce soit tout earegistrement ou document obtenu & Laide de Hun des actes prévus par Larticle 226-1 du code pénal, en lespéce par l'enregistrement de paroles prononoées a titre privé ou confidentiel au préjudice de Liliane BETTENCOURT-SCHUELLER. faits prévus par ART.226-2 AL.1, ART.226-1 C.PENAL. et réprimés par ART.226-2 AL.1, ART.226-1 AL.1, ART.226-31 C.PENAL. BONNEFOY Pascal a été cité selon acte d'huissier de justice, délivré personne le 5 aofit 2015, BONNEFOY Pascal a compara audience assisté de son conseil ; il y a lieu de statuer contradictoirement a son égard, Test prévenu avoir & Neuilly et sur le tervitoire national, depuis temps non couvert par la prescription, ct notamment du 25 mai 2009 au 11 mai 2010, au moyen d'un procédé quelconque, en Yespéce a l'aide d'un dictaphone, volontairement porté atteinte & Vintimité de la vie privée de Liliane BETTENCOURT-SCHUELLER, & ttre privé ‘ou confidentiel en captant, enregistrant ou transmettant sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées a titre privé ou confidentiel Page 6/34 faits prévus par ART.226-1 AL.1 1° C.PENAL. et réprimés par ART.226-1 AL.1, ART.226-31 C.PENAL, GATTEGNO Hervé a été cité sclon acte dhuissier de justice, délivré a étude dhuissier de justice le 6 juillet 2015 (accusé de réception signé le 08/07/2015). GATTEGNO Hervé @ comparu a laudience assisté de son conseil ; il y a lien de statuer contradictoirement & son égard est prévenu avoir a Paris et en tout cas sur le terrtoire national, courant juin/juillet 2010 et en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, conserve, wilisé de quelque maniére que ce soit tout enregistrement ou document obtenu a Taide de T'un des actes prévus par larticle 226-1 du code pénal, en lespéce enregistroment de paroles prononcées a titre privé ou confidentiel au préjudice de Liliane BETTENCOURT-SCHUELLER. faits prévus par ART.226-2 AL.1, ART.226-1 C PENAL. et réprimés par ART.226-2 AL.1, ART.226-1 AL.1, ART.226-31 C PENAL, GIESBERT Franz a été cité selon acte dhhuissier de justice, délivré a domicile le 6 juillet 2015 (accusé de réception signé le 08/07/2015) GIESBERT Franz n'a pas compara mais ost régulitrement représenté par son conseil muni d'un mandat ; i y a lieu de statuer contradictoirement son égard, Hest prévenu davoir, en qualité de directeur de la publication, directeur du POINT, & Paris et sur le territoire national, courant juin, juillet 2010 et courant 2010, en tout cas depuis temps non couvert par la proscription, conservé, porté ou laissé porter a la connaissance du public ou dun tiers ou utilisé de quelque maniére que ce soit tout, enregistrement ou document obtenu a l'aide de l'un des actes prévus par l'article 226-1 du code pénal, en Tespéce par lenregistrement de paroles prononcées & titre privé ou confidentiel au préjudice de Liliane BETTENCOURT-SCHUELLER, et avec fa circonstance que les faits ont &é commis par la voie de la presse écrite. faits prévus par ART.226-2 AL.1, ART.226-1 C.PENAL. et réprimés par ART.226-2 AL.1, ART.226-1 AL.1, ART.226-31 C.PENAL, LHOMME Fabrice a compari a V’audience assisté de son conscil ; il y a lieu de statuer contradictoirement a son égard. Test prévenu avoir & Paris et en tout cas sur le territoire national, courant juin juillet 2010 et en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, conservé, utilisé de quelque maniére que ce soit tout enregistrement ou document obtenu a l'aide de l'un des actes prévus par article 226-1 du code pénal, en lespéce les enregistrements de paroles prononeées titre privé ou confidentiel au préjudice de Liliane BETTENCOURT-SCHU! ER, faits prévus par ART.226-2 AL.1, ART.226-1 C.PENAL. et réprimés par ART.226-2 AL.1, ART.226-1 AL.1, ART.226-31 C.PENAL, Page 7/34 PLENEL Hervé a été cité selon acte d’huissier de justice, détivré & domicile le 6 juillet 2015. PLENEL Hervé a compan a laudience assisté de son conseil ; il y a lieu de statuer contradictoirement a son égard, Test prévenu avoir, on qualité do président de la SAS MEDIAPART et directeur de la publication, Paris et sur le territoire national, courant juin 2010 , en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, conservé, ports ou laissé porter 4 la connaissance du public ou d'un ters ou utilisé de quelque maniére que ce soit tout enregistrement ou document obtenu a l'aide de lun des actes prévus par article 226-1 du. code pénal, en lespéce par Venregistrement de paroles prononeées a titre privé ou confidentiel au préjudice de Liliane BETTENCOURT-SCHUELLER, et avec la citconstance que les faits ont 6 commis pat la voie de ta presse écrite. faits prévus par ART.226-2. AL.1, ART.226-1 C.PENAL. et réprimés par ART.226-2 AL.1, ART.226-1 AL. 1, ART.226-31 C.PENAL, MOTIFS 1/ SUR LES INCIDENTS DE PROCEDURE SUR LA DEMANDE DE NULLITE DE L’ORDONNANCE DE RENVOI In limine litis, Hervé GATTEGNO ct Franz-Olivier GIESBERT ont soulevé la mullité de lordonnance de renvoi aux motifs: - des contours imprécis de fa prévention, en ce sens que les juges n’ont pas tenn compte de la qualité de journaliste d’Hervé GATTEGNO, que Vordonnance ne dresse pas la liste des articles incrimings, que sont visés 13 articles alors que ne sont listés dans le corps de l'ordonnance que quatre articles, que des articles sont postérieurs & la plainte de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT, que des articles publiés sur le site internet LePoint.fr sont des reprises de dépéches des agences AFP et REUTERS - que la plainte préalable est indispensable a la validité de la poursuite et que le tribunal ne pourra que constater que Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT n'a jamais eu la volonté libre et éclairée de porter plainte, que la plainte a été initiée par son entourage, qu’au regard de son état de faiblesse elle n'a pas rédigé cette plainte, que si M° KIEJMAN par courrier du 10 novembre a annoncé une confirmation de cette plainte, celle-ci ne se trouve pas dans le dossier ~ que le plainte du 18 juin 2010 ne vise que l'article du 17 juin 2010 et que par la suite Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT n'a jamais déposé d’autre plainte, qu’ainsi le réquisitoire du procureur de la République Monsieur COURROYE du 19 octobre 2010 outrepasse les termes de la plainte initiale Les conseils des autres prévenus ne se sont pas associés a cette demande, Les conseils de la partie civile ont demandé au tribunal de rejeter ces exceptions, Page 8 / 34 Le Ministre Public entendu sur les nullités soulevées a demandé au tribunal de dire les exceptions irrecevables, mal fondées, de les rejeter et de joindre incident au fond IL fait valoir que la question de la capacité A porter plainte est une notion distinete de celle de vulnérabilité, qu’il n’y a pas eu de désistement de la part de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT, ni de décision du juge des tutelles autorisant un retrait de plainte par le tuteur désigné, que la plainte du 18/06 visait tous les cenregistrements; Par ailleurs, en ce qui concerne l'absence de précisions do ’ordonnaneo de renvoi, le représentant du ministére public fait valoir que par arrét du U6 juin 2013, la chambre de Vinstruction de la cour d’appel de BORDEAUX a confirmé le refs des juges instruction de procéder aux investigations complémentaires sollicitées par le parquet et qu’en tout état de cause la juridiction est saisie in rem et qu'il lui appartiendra de statuer sur les faits dont elle est saisie. SUR CE * sur la plainte préalable L’article 226-6 du code pénal prévoit que dans les cas prévus par les articles 226-1 et 226-2, Vaction publique ne peut étre exercée que sur la plainte de fa vietime, Cette question a déja été évoquée devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BORDEAUX et il convient de rappeler qu’en vertu des articles 175 et 385 du code de procédure pénale, Vordonnance de renvoi purge les nullités antérieures, Pour autant, s'agissant de la mise en couvre @’une plainte préalable, ’exercice de action publique signifie 1a saisine d'une juridiction d'instruction ou dune juridiction de jugement. En Pespéce, Ala date de la saisine des magistrats instructeurs de NANTERRB,, il existait bien une plainte préalable de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT du 18 juin 2010 (D752-754) par un courrier adressé au procureur de la République de NANTERRE dans lequel elle manifeste son soubait qu’une enquéte soit diligentée sur les agissements de Pascal BONNEFOY et des joumalistes qui ont divulgué des éléments recucillis lors des enregistrements elandestins, Dés lors, ce moyen ne saurait prospérer. * suri ig de Lili LER-BETTENCOURT 8 porter plainte En ce qui conceme 1a capacité de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT & porter plainte, il ne saurait étre déduit que sa particuliére vulnérabilité retenue par ailleurs par la juridiction dans sa décision du 28 mai 2015 signifierait une insanité esprit, lui retirant toute possibilité de porter plainte, ces deux notions tant totalement distinetes. II n’est pas démoniré qu’ la date du 18 juin 2016, il existerait une insanité esprit de la plaignante. Page 9/34 Par ailleurs, le juge des tutelles de COURBEVOIF n'a pas souhaité que la plainte déposée avant la mise en place de la mesure de protection par décision du 21 octobre 2011 soit retirde, dés lors, il doit etre considéré qu’en ne remettant pas en cause cet acte antérieur a sa saisine, il I’a validé. Ainsi, ce moyen doit étre rejeté * sur les contours de la prévention En ce qui conceme les contours imprécis de la prévention, il convient de relever que les prévenus Hervé GATTEGNO et Franz-Olivier GIESBERT ont pu s‘expliquer de fagon précise sur la totalité des faits et en particulier sur les articles litigicux devant Jes enquéteurs (D55 et DS6) puis devant le magistrat instructeur (D112 et D 113), Leurs conseils ont pu faire valoir leur argumentation par des observations détaillées (D 168 et 215) versées A la procédure. Dés lors, il appartient a la juridiction de jugement de rechercher si pour les infractions dont elle est saisie les éléments constitutifS des infractions sont réunis, Dans ces conditions, il convient de rejeter ce moyen, 2/ SUR L’ACTION PUBLIQUE 2-1) ELEMENTS DE CHRONOLOGIE ET DE PROCEDURE Le 19 décembre 2007, Frangoise BETTENCOURT-MEYERS portait plainte auprés da procureur de la République de NANTERRE a lencontre de Frangois-Marie BANIER ct tous autres pour abus de faiblesse commis au préjudice de sa mero, complicité et recel dabus de faiblesse, Cette procédure donnait lieu & une enquéte préliminaire confiée a la brigade financiére de la Direction Regionale de la Police Judiciaire de la Préfecture de Police de PARIS. Francoise BETTENCOURT-MEYERS dénongait l'emprise que Frangois- Maric BANIER pouvait avoir sur sa mére, Agée de 85 ans, qui selon elle, présentait des troubles de la mémoire ainsi que des pertes de consciences passagires de nature & la rendre vulnérable. Les donations effectuées a son profit représentaient des sommes considérables, Le 2 septembre 2009 le parquet de NANTERRE décidait du classement sans suite de Penquéte préliminaire (D37/40) pour infraction insuffisamment caractérisée. Précédemment, Ie 15 juillet 2009, Mme Frangoise BETTENCOURT- MEYERS faisait citer directement Frangois-Marie BANIER devant le tribunal correctionne! de NANTERRE pour abus de faiblesse. Aprés audience de consignation, aprés plusieurs renvois et aprés que Pexorcice de voies de recours ait été déclané irrecevable, le dossier devait venir & audience de plaidoirie le 1* juillet 2010. Page 10/34 Quelques semaines avant cette audience, Ie jeudi 10 juin 2010, un coursier, ‘mandaté pat Frangoise BETTENCOURT-MEYERS déposait & Paccueil de 1a Brigade financitre de la Direction de la police judiciaire & PARIS un pli contenant ~ six enveloppes fermées par un cachet de cire, chacune supportant une carte de visite de la Selarl Jéréme COHEN, huissior de justice ot portant un numéro identification du CD-ROM quielle contenait, une date et des noms de personnes ou initales, = un étui contenant 28 CD-ROMS portant le méme type d'inscription, ~ une chemise portant la mention « procés-verbal de constat » contenant, d'une part, un courtier introductit redigé par Maitre COHEN et daté du 18 mai 2010 faisant mention de la requéte de Frangoise BETTENCOURT-MEYERS et indiquant que celle-ci avait intérét 4 faire retranserire des enregistrements contenus sur des CD-ROM, dautre part, une liasse de feuillets relatifs & la retranscription de six CD-ROM. Liensemble de ces documents se rapportait a Yenquéte préliminaire pour abus de faiblesse sur la personne de Liliane BETTENCOURT, Entendue a son domicile par les policiers le 15 juin 2010, Frangoise BETTENCOURT- MEYERS expliquait les conditions dans lesquelles elle était entrée en possession des CD-ROMS. Elle indiquait que Pascal BONNEFOY, le maitre hdtel de ses parents, lui avait demands le 17 mai préeédent wn rendez-vous qui avait, eu liew chez elle. I fui avait fait part des enregistrements auxquels il avait procédé, ce qui, disaitlle, Yavait « sidérée ». Il lui demandait dattendre ta fin du mois pour en faire état jusqu'd ce que sa démission soit effective. I] ne lui avait rien demandé. Au départ de Monsieur BONNEFOY, elle avait aussitét contacté son avocat et sur ses conseils, ils étaient allés chez un huissier aux fins de transcription. Dés qu'elle était ‘entrée cn possession d'une transcription partielle, cile avait fait déposer l'ensemble au service de police qui était en charge de l'nquéte pour abus de faiblesse. (D1/ 631). Le procureur de la République prés le tribunal de grande instance de NANTERRE, a ordonné Je 15 juin 2010 (D1/ 6 bis-n? parquet 10. 166.001/7) ouverture d'une enquéte confige en co-saisine & la Brigade financiére (procédure n° 2010/708) ct la Brigade de répression de la délinquance contre les personnes (BRDP n° 2010/297). Ia demandé que soit effectués la transcription des CD-ROMS, lesquels supportaient des enregistrements de conversations. Lécoute des 28 CD-ROMS a révélé quis correspondaient & lenregistrement, de conversations privées tenues au domicile de Liliane BETTENCOURT sur une période allant de mai 2009 A mai 2010, Ses principaux interlocuteurs paraissaient étre = Patrice de MAISTRE gestionnaire de fortune de Liliane BETTENCOURT au travers des socidtés CLYMENE et TETHYS quil dirigeait depuis fin 2003 + Maitre Fabrice GOGUEL et Mattre Georges KIEIMAN, avocats de Liliane BETTENCOURT - Maitre Jean-Michel NORMAND, notaire de Liliane BETTENCOURT ~ Frangois-Marie BANIER, un ami - Carlos CASSINA VEJARANO, gestionnaire de file d'‘ARROS, Page 11/34 Le 30 juin 2010, le procureur de la République adressait une réquisition au chef du Service central de Tinformation et des traces technologiques de la Sous- direction de Police Technique et scientifique de la Dircetion Centrale de la police judiciaire & ECULLY aux fins, notamment, de procéder la retranscription des conversations contenues dans les dictaphones remis par Pascal BONNEFOY, et faire toute constatation technique relative & lutlisation de ces dictaphones, Dans son rapport déposé le 30 aodt 2010 (D1/7229), l'expert Monsieur PERRAUD formulait les conclusions suivantes + il constatait la présence de deux dictaphones contenant chacun des enregistrements audio de conversations entre différentes personnes et dénombrait 28 fichiers lisibles, comespondant exactoment a ceux déja en possession des services dienguéte. > il notait qu'étaient retranscrits les propos tenus dans les différents enregistrements, précisant n!avoir constaté aucune anomalie, ~ il indiquait avoir vérifié Vauthenticité des enregistrements et n'avoir détecté aucune trace de manipulation, = ill mentionnait avoir restauré ttois fichiers sur Tun des dictaphones comespondant probablement & des essais de Vappareil ot ne contenant aucune parole en rapport avec Fenguete. + il ajoutait que les dates des enregistrements correspondaient aux dates probables auxquelles ils avaient été cffectués, seul un fichier intitulé « WS211701. WMA » daté du 13 janvier 2010 ayant ét6 enregistré le 27 janvier 2010 selon les propos qu'il contenait. Le 14 juin 2010, & 17 H, paraissait sur Je site du joumal en ligne MEDIAPART un article titrant “SARKOZY, WOERTH, Sraude fiscale : les secrets volés de l'affatre BETTENCOURT”. Sous la plume de Fabrice ARFI et de Fabrice LHOMME était révélée au public l'existence de ces enregistrements clandestins réalisés entre mai 2009 et mai 2010 par “ws des employés de maison, le mattre d'hétel” Les journalistes indiquaient avoir pu prendre connaissance des documents audio ot soulignaient, en citant de larges extraits des enregistrements litigieux, que selon eux les conversations tennes démontraicnt ~ l'intérét particulier que portait I'Elysée & la procédure judiciaire opposant Frangoise BETTENCOURT-MEYERS a Frangois-Marie BANIER ("“Acte I: les interférences de I'Elisée"), - Vexistence des conditions dlembauche patticuliéres de !'épouse du Ministre du Budget au sein de la Société CLYMENE gérant la fortune de Liliane BETTENCOURT ("‘Acte Il: les relations avec Erie et Florence Woerth"). ~ existence de comptes bancaites détens en Suisse par Liliane BETTENCOURT ("‘Acte III: les comptes suisses secrets"), ~ les enjeux relatifs a la succession future de Liliane BETTENCOURT + la succession de Liliane Bettencourt") Cot article était suivi entre le 16 et Ie 28 juin, sous les mémes signatures, autres articles : - Je second en date du 16 juin 2010 avait pour titre : "Mme WOERTH, on lui donnera de l'argent parce que c'est trop dangereux", = le troisiéme en date du 17 juin 2010 avait pour titre “Affaire BETTENCOURT, j'ai peur que le fisc tire un fit" Page 12/34 = le quatriéme en date du 21 juin 2010 avait pour titre "Affaire BETTENCOURT, trois chéques, trois questions”, et était également signé par Edwy PLENEL, = Ie cinguiéme en date du 28 juin 2010 avait pour titre "MEDIAPART public de nouveaux enregistrements" Le 21 juin 2010, te journal MEDIAPART publiait en effet sur son site, accessible aux seuls abonnés, dos extraits sonores de certaines de ces conversations (D 1346 tome 2), A partir du 16 juin et jusqu'au 05 juillet 2010, le joumal LE POINT, soit sur son site en ligne, soit sur son support papier, publiait A son tour treize’ articles, notamment sous Ia signature Hervé GATTEGNO, dans lesquels étaicnt reproduits des extraits des enregistrements clandestins. Le premier article titrait : "Affaire BETTENCOURT-Les enregistrements secrets du Maitre d'hétel”, dautres parus le méme jour : "Le notaire lui a dit que ‘était de la folie'', "Des enregistrements « pirates » de Bettencourt remis a la police" Diautres articles suivaient: "Bettencourt : interrogations sur le réle du couple Woerth auprés de la illiardaire"™ farde a vue prolongée pour I'ex-employée de Liliane Bettencourt" "Bettencourt ; les enregistrements évoquent des comptes suisses non déclarés" "Info lepoint.fr — L’Eilysée a recommandé son avocat a Liliane Bettencourt’ Lrensemble de Ia presse se faisait ensuite I'Echo de ces publications. Par la suite, différentes plaintes étaient adressées au procurcur de la République de NANTERRE Le 17 juin 2010, Maitre Pascal WILHELM, avocat, adressait au procureur de Ja République de NANTERRE une plainte signée la’ veille par Patrice do MAISTRE et dirigée contre personne non dénommée pour ativinte & la vie privée, complicité ct recel. Il visait les enregistrements, opérés clandestinement par un employé de maison, des conversations échangées par son client et Liliane BETTENCOURT a titre privé ou confidentiel au domicile de celle-ci et leur reprise le 14 juin précédent dans un article intitulé « SARKOZY, WOERTH, fraude fiscale : les secrets volés de Vaffaire BETTENCOURD, diffusé sur le site MEDIAPART. (1/590) Le 18 juin 2010, le Docteur Xavier MONNET portait plainte, par Vintermédiaire de son ayocat Maitre Pascal WILHELM, contre personne non dénommée auprés du procureur de la République de NANTERRE pour atteinte & la vie privée et violation du secret professionnel. Il exposait que, dans un article de thebdomadaire LE POINT paru le 17 juin 2010, il avait pris connaissance du fait quill était nommément cité dans les enregistrements clandestins. Il était indiqué dans Tarticle en cause (D1/543 & D 550) cum médecin qui 'a accompagné en vacances regoit 55.000 euros en especes ». Le 18 juin 2010, Frangois-Marie BANIER, par t'intermédiaire de son avocat, Maitre TEMIME, portait plainte contre personne non dénommée pour atteinte 4 la vie privée, complicité et recel, ; Page 13/34 | Le 18 juin 2010, Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT portait plainte pour atteinte A la vie privée, vol, abus de confiance, violation du secret professionnel, complicité ct recel de ces délits. Elle invoquait l'entreprise despionnage dont elle avait &t8 victime, mise en ceuvre par Pascal BONNEFOY, pour apporter son concours & sa fille qui avait, & tout le moins, recelé ces enregistrements pendant un temps assez. long, pour en organiser leur divulgation dans la presse, comme sen était vanté en tormes & peine voilés son avocat dans un article pars dans Ie Nouvel Observateur du 10 juin 2010. Elle accusait sa fille détre Vinstigatrice des enregistrements clandestins réalisés par son maitre dhétel, Elle dénongait également Claire THIBOUT, son ancienne comptable, comme ayant emporté au moment de son départ Tessenticl de ses archives et comme ayant conduit d'autres employés a témoigner contre elle. Elle visait également les Docteurs KOSKAS et KALAFAT qui l'avaient examinée sans son accord et avaient remis les résultats 4 sa fille au mépris du secret professionnel (D1/752). Les plaintes de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT et de Frangois-Marie BANIER étaient transmises par le procureur de la République aux policiers le 18 juin 2010 ( D1/1049), Le 5 juillet 2010, Mattre Fabrice GOGUEL, a la suite de son audition par les policiers, portait également plainte pour atteinte & Tintimité de la vie privée ( D1/835). La perquisition, réatisée le jour méme & son domicile, permettait de découvrir deux dictaphones et un cable USB dont il indiquait qu'il s'agissait du matériel enrogistrement ainsi que 28 CD-ROM contenant les enregistrements et quatre CD- ROM de sauvegarde (D1/640 — D1/643), Lors de ses auditions, et notamment le 16 juin 2010, Pascal BONNEFOY indiquait avoir ét8 embauché en 1989 au service de la famille BETTENCOURT, en qualité de maitre d'hétel. De nouvelles opportunités professionnelles avaient conduit 4 démissionner en 1993 mais il avait été de nouveau embauché par Ia famille BETTENCOURT en 1999 en qualité de maitre d’hétel mais également de valet de chambre d'André BETTENCOURT (D1/634). IL a dit avoir démissionné en mai 2010 en raison de Tambiance malsaine qui régnait dans la maison, d'une part et de ses projets d'ouvrir un hotel, d'autre part. Ila expliqué qu’en raison de la plainte déposée par Frangoise BETTENCOURT-MEYERS contre Frangois-Marie BANIER, ce demier “gui avait Ia main mise sur cette maison avait commence & épurer tout le personnel génant gui allait pas dans son sens” Ainsi, selon M. BONNEFOY, Frangois-Marie BANIER avait répandu la rumeur selon laquelle le maitre d’hétel avait témoigné contre lui et contre Madame BETTENCOURT aupris des enquéteurs de la Brigade Financiére chargés de Penquéte. Pascal BONNEFOY avait méme d@i se défendre de ces accusations larvées devant Liliane BETTENCOURT, en présence de son infirmier Alain THURIN, puis devant Lindsay OWEN-JONES, lequel lavait spécialement interrogé & ce sujet, fin février 2009. Page 14 / 34 Aprés ces entrevues, il disait avoir compris que personne ne eroirait plus en sa loyauté et il avait alors eu l'idée d'enregistrer les conversations tenues dans le bureau de feu André BETTENCOURT afin “de se défendre et de se protéger’. La plupart des conversations entre Frangois-Maric BANIER et Liliane BETTENCOURT so tonant dans la chambre do cette domiéro, il avait préfixé placer son dictaphone derriére le fauteuil qu‘elle occupait dans le burean dAndré BETTENCOURT oi se déroulaient les rendez-vous daffaires Connaissant la veille pour le Jendemain le programme des visites, Pascal BONNEFOY avait particuligrement ciblé celles que lui rendait Patrice de MAISTRE en espérant que Frangois-Marie BANTER. serait évogué. En écoutant ces ccnregistrements il Iui était appara que Frangois-Marie BANIER n’était pas le seul & profiter de la vulnérabilité de la vieille dame, Selon lui, Patrice de MAISTRE exergait lui aussi des pressions morales pour obtenir divers avantages, Lui comme Frangois-Marie BANIER dénigraient Frangoise BETTENCOURT-MEYERS en la présentant aux yeux de sa mére comme une personne malveillante, Pascal BONNEFOY relatait plusieurs anecdotes propres & démontrer que Liliane BETTENCOURT était particulidrement désorientée depuis plusieurs années et qu'elle subissait 'influence néfaste de son entourage immédiat. Pendant un an, lo maitre d’hdtel avait done procédé ces enregistrements sans en parler & quiconque, saufa son avocat qui avait alerté sur Vill6galité du procédé. Il avait néanmoins continué pour, disait-il, « découvrir la vérité » puis avait décidé de les remettre & Frangoise BETTENCOURT-MEYERS sans on attendre aucune contrepartic, If insistait de fagon ferme tant sur le fait que personne n’avait commandité la mise en place des dictaphones que sur l'absence totale de motivation financiére & son geste. Il expliquait également avoir sollicité un ami informaticien, Philippe DUNAN, pour transférer sur CD-ROM les conversations enregistrées sur les dictaphones, chaque CD-ROM correspondant & une conversation, Toutefois, il ne signalait pas aux enquéteurs que cet informaticien n’ était autre que le mari de Claire THIBOUT, ancienne comptable de fa maison BETTENCOURT, dont il affirmait quelle n'était au courant de rien Claire THIBOUT, lors de sa garde & vue du 18 juin 2010, (D736) indiquait avoir été avisée par son mari de la demande de transferts d'enrogistrements faite par Pascal BONNEFOY mais prétendait avoir ignoré de quoi il s'agissait. Philippe DUNAN était & son tour placé en garde & vue et expliquait que, par Vintermédiaire de son épouse Claire THIBOUT alors comptable des époux BETTENCOURT, il avait été chargé de Vinstallation informatique de leur domicile en 2002-2003. Il avait ainsi travaillé pour leur compte jusqu'au déots d'André BETTENCOURT a Ia fin de l'année 2007, En janvier 2010, Pascal BONNEFOY, avec lequel il avait sympathise, lui avait demandé, comme un service, de transférer des cenregistrements réalisés aide d'un dictaphone sur CD-ROM, ce qui avait fait sans prendre connaissance de leur contenu et sans en prendre de copie (D1/717, DI/718, D713, D1/699). Page 15/34 Réentendue le 17 aot, Francoise BETTENCOURT-MEYERS contestait, avoir demandé & Pascal BONNEFOY, le maitre d'hdtel de ses parents, deffectuer les enregistrements litigieux. Elle expliquait, que lors de ta remise des CD-ROM, il ui avait contié ne plus supporter de voir sa mére ainsi abusée et quill avait voulu Tider dans la procédure qu'elle avait initiée lorsque, dés apres le décés de son pire, elle avait eu connaissance du projet de Monsicar BANIER de se faire adopter par Liliane BETTENCOURT. A la suite de l'audition début juillet 2010 de Claire THIBOUT, le procurcur de la République de NANTERRE chargeait la Brigade Financiéte d'une enquéte [2010/315} sur les faits dénonoés quant 4 la remise de fonds faite, selon elle, & la demande de Patrice de MAISTRE (DI/4132 4 1/4946) et d'une autre enquéte [2010/32] sur les faits révélés par les enregistrements clandestins (D1/4960s) relatifs ‘un éventuel trafic d’influence. Le 8 juillet 2010, Maitre LE BORGNE, avocat d’Erie WOERTH portait plainte pour dénonciation calomnieuse (D1/7196) visant les déclatations de Claire THIBOUT relayées par MEDIAPART (D1/7198), notamment les accusations concernant un financement illégal d'activités politiques. Par ordonnance du 29 octobre 2015, le magistrat instructeur a renda une décision de non-lieu, le plaignant se désistant de sa plainte Le 20 octobre 2010, Maitre WILHELM, cette fois-ci en qualité davocat de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT, adressait au procureur de la République de NANTERRE une nouvelle plaints pour violences psychologiques visant sa fille Frangoise BETTENCOURT-MEYERS en invoquant les actions entreprises par celle- ci, assimilables & du harcélement, en particulier celles tendant a son placement sous tutelle (DI/7181), Le 26 octobre 2010, le procurcur général prés 12 Cour d'Appel de VERSAILLES donnait instruction ¢crite au procurcur de la République de NANTERRE de bien youloir “ouvir sans délai une information judiciatre contre X. ‘pour toutes les procédures d'enquéte préliminaire en cours". Le 29 octobre 2010, au vu de l'ensemble des investigations diligentées, te procureur de la République de NANTERRE ouvrait une information judiciaire visant l'ensemble des procédures évoquées infra, & l'exception de celle pour abus de faiblesse, des chefs de ~alteinte ala vie privée, complicité et recel - violation du secret professionnel, complicité publication denregistrements de paroles prononcées a titre privé ou confidentiel, complicité ~ dénonciation calomnieuse commise au préjudice de Bric WOERTH ~ subornation de témoins = vols commis au préjudice de Liliane BETTENCOURT et de Frangois- Marie BANIER, complicité et recel - trafic d'influence actif commis pat un particulier = trafic dinfluence passif commis par une personne investic dun mandat électif public ~ blanchiment = escroquerie commise au préjudice de Liliane BETTENCOURT, complicité et recel Page 16/34 = abus de confiance commis au préjudice de Liliane BETTENCOURT, complicité et recel = financement ilicite de parti politique ou de campagne électorale, complicité et recel - violences volontaires sur ascendant nlayant pas entrainé d'incapacité totale de travail, commises au préjudice de Litiane BETTENCOURT = abus de biens sociaux commis au préjudice de la société CLYMENE, complicité ct recel (D1/7218). Le 8 novembre 2010, Francoise BETTENCOURT-MEYERS, par Fintermédiaire de son avocat Maitre METZNER, (D1/7777) se constituait partic civile “concemant les faits susceptibles d'etre qualiiés de blanchiment d'abus de faiblesse visant notamment Vile @ARROS et les détournements opérés au préjudice de la structure financiére CLYMENE en charge de faire fructifier les avoirs familiaux" Le 10 novembre 2010, Liliane BETTENCOURT, par linntermédiaire de son avocat Maitre Georges KIEIMAN (D1/7795), s'est constituée parti civile des chefs de ~ atteinte a lintimité de la vie privée concemant les enzegistrements clandestins, -vols de documents par photocopies, = subomation de t&moins = infractions & la déontologie médicale, Le 15 novembre 2010, les juges d'instruction co-désignés de NANTERRE ont saisi la chambre de instruction de ta cour @appel de VERSAILLES aux fins qu'il soit statué sur la régularité de la provédure, s‘agissant des enregistrements clandestins présents au dossier (D 1/D7796), Par arrét du 17 novembre 2010, la chambre criminelle de la Cour de cassation a renvoyé la procédure instrute par les juges d’instruction de NANTERRE devant la juridiction d'instruction de BORDEAUX, dans 'intérét d'une bonne administration de la justice, et celle suivie devant la chambre comrectionnelle du TGL de NANTERRE devant le TRIBUNAL CORRECTIONNEL de BORDEAUX. Par arrét du 08 décembre 2010, la chambre criminelle désignait la chambre de l'instruction de Ia cour d'appel de BORDEAUX aux fins de statuer sur Yordonnance précitée des juges d'instruction de NANTERRE du 15 novembre 2010. Les juges d’instruction de BORDEAUX, désignés pour suivre cette information rendaient, le 27 janvier 2011, une ordonnance de disjonction (D1/8383), des faits visés au réquisitoire introduetif donnant lieu & huit informations judiciaires distinctes dont les dossiers 10/20 : trafic dinfluence actif commis par un particulier, trafic dinfluence passif commis par une personne investie d'un mandat électif public, financement illicite de parti politique ou de campagne ¢lectorale, complicité et recel de ce délit ; cette affaire a été audiencée en mars 2015 et par décision du 28 mai 2015 le tribunal a prononeé la relaxe d’Eric WOERTH et de Patrice de MAISTRE. E11/03 ; il s’agit du dossier d’abus de faiblesse audiencé & compter du 26 janvier 2015 ot par décision du 28 mai 2015 le tribunal a prononeé la relaxe d’Eric WOERTH, et la condamnation de Frangois-Marie BANIER, Patrice de MAISTRE, M? Pascal WILHELM, M°NORMAND, M? Patrice BONDUELLE, Carlos CASSINA Page 17/ 34 VEJARANO ; appel a été interjeté par plusieurs prévenus ; la décision est désormais définitive A l’égard de Patrice de MAISTRE qui s’est désisté de son appel et de Stéphane COURBIT qui n’a pas interjeté appel E11/08 ; atteinte a Lintimité de la vie privée, complicité et recel de ce délit, violation du secret professionel, complicité de ce délit, publication d'enregistrements de paroles prononcées 4 titre privé ou confidentiel, complicité de ce délit, dossier dont est le tribunal correctionnel de séant, Saisie en annulation de la procédure pénale notamment au sujet des enregistrements clandestins, la Chambre de Instruction de a Cour «Appel de BORDEAUKX statuait le 28 juin 2011 et disait n'y avoir liew a anmulation des actes de Vinformation (D.37). La Chambre Criminelle dé la Cour de Cassation zejetait par la suite, dans un arrét du 31 janvier 2012, le pourvoi formé et soulignait que les enregistrements litigieux “n’étaient pas, en eux-mémes, des actes ou des pices de Tinformation susceptibles d’stre annulés mais des moyens pouvant etre discutés contradictoirement" (D826). Le tribunal reléve que les plaintes déposées auprés du procurcur de Ia République de NANTERRE en juin 2010 étaient pour atteinte a la vie privée alors que infraction prévue par le code pénal est celle d’atteinte & Pintimité de la vie privée. Paralldloment aux plaintes déposées auprés du procureur de la République prés le tribunal de NANTERRE, des procédures étaient engagées au plan civil devant Ie président du tribunal de grande instance de PARIS dans le eadre d'une provédure de reéféré pour faire cesser la publication des-dits articles. Par ordonnance de référé du président du tribunal de grande instance de PARIS du 1* juillet 2010 Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT était déboutée de ses demandes : la décision da premier juge était confirmée par arrét de la cour dappel de PARIS du 23 juillet 2010, dans sa dévision la cour faisait valoir que Considérant que le seul fait que les propos diffusés aient été enregistrés sans le consentement de leurs auteurs, n’est done pas en lui méme suffisant pour constituer Vinfraction @ Varticle 226-2 et, ce faisant, pour qualifier de manifestement ilicite le trouble causé par leur diffusion ; Considérant que c'est ainsi d bon droit que le premier juge s'est penché sur le contenu des enregistrements diffusés sur le site de Médiapart pour examiner s'ils portaient ou non atteinte “é l'intimité de la vie privée" de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT et si le droit de toute personne au respect de sa vie privée devait céder devant la liberté d'information. par le texte ou par image ; Considérant & cet égard que les entretiens publiés par les articles litigieux concernent principalement la gestion du patrimoine de Liliane BETTENCOURT et les liens quelle entretient ow a pu entretenir avec différentes personnalités politiques ; Cet arréta été cassé par décision de la Cour de cassation [Chambre civile | n° (00898) du 06 octobre 2011; au motif que, ‘Attend cependant que constitue une atteinte a Uintimité de la vie privée, que ne légitime pas l'information du public, la captation, Venregistrement ou ta transmission sans le consentement de leur auteur des paroles prononeées 4 titre privé ou confidentiel; i Page 18/34 » » Zh. Cette motivation a été reprise par Ia cour d’appel de VERSAILLES le 04 juillet 2013 désignée comme cour de renvoi. A la suite de cette affaire un projet de loi sur fa protection des sources des joumalistes a été déposé sur le bureau de Tassemblée nationale, en juin 2013 ; dans la présentation de ce projet, la disposition suivante est envisagée "Bn outre, un journaliste ne pourra ire condamné pour le délit de recel de violation du secret de Venguéte ou de Vinstruction, dune violation du secret professionnel ou d'une atieinte a la vie privée, lorsque les documents quil détient contiendront des informations dont la diffusion au public constitue un but légitime en ratson de leur ‘intérot général” Ce projet n’a jamais été inserit 4 l'ordre du jour pour discussion en séance, Ainsi, en ce qui conceme les journalistes et les directeurs de publication, 1a juridiction devra statuer non seulement au regard des dispositions du code pénal des articles 226-1 et 226-2 du code pénal mais également a l’aune de la Convention Enropéenne de Sauvegarde ot des Droits de I’Hommo, en particulier des articles 8 sur le droit 4 Vintimité de la vie privée et de l'article 10 sur le droit a la liberté expression et de son interprétation par la cour européenne, 2-2 Sur les faits reprochés & Pascal BONNEFOY Tl fui est reproché d’avoir du 25 mai 2009 au 11 mai 2010, cw moyen d'un procédé quelconque, en Vespece a Vaide d'un dictaphone, volontairement porté atteinte dl'intimité de la vie privée de Liliane BETTENCOURT-SCHUELLER, 4 titre privé ou confidentiel en captant, enregistrant ou transmettant sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées a titre privé ou confidentiel. Plus précisément, il est fait grief au majordome davoir enregistré au moyen lun dictaphone les paroles que la vieille dame a prononcé a titre privé ou confidentiel, son domicile de NEUILLY, entre le 25 mai 2009 et le 11 mai 2010. Pascal BONNEFOY a sollicité sa relaxe cn application des dispositions de Particle 122-7 du code pénal sur l'état de nécessit, et subsidiairement une dispense de peine. * sur les éléments matériels de I'infraction Tout au long de la procédure, dés l'enquéte initiale lors de sa garde a vue les 16, 17 et 18 juin 2010, puis devant le magistrat instructeur comme 4 l’audience de jugement, Pascal BONNEFOY a toujours reconnu avoir agi seul et de sa propre initiative pour mettre en place I’enregistreur et procéder aux enregistrements. Pascal BONNEFOY a expliqué qu'il avait acquis deux dictaphones qu'il a utilisé pour effeetuer les enregistrements en les plagant dans le bureau au domicile personnel de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT ; il a ajouté qu'il avait fait le choix de ne pas les placer dans la chambre de la viille dame estimant qu‘ s'agissait @'un lieu trop intime (D134), bien que cette chambre soit le lieu ob elle recevait le plus souvent Frangois-Marie BANIER. Page 19 / 34 Pascal BONNEFOY a de manigre constante, reconnu que Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT ‘ait pas informée de son entreprise et quiil dissimulait dans son bureau et derritre son fauteuil Ic dictaphone quelques minutes avant chaque entretien ; il a précisé quill connaissait a Pavance le programme des rendez-vous ainsi que Ie nom des visiteurs la veille au soir et quil était de la sorte & méme d'apprécier 'intérét de lenregistrement, Ainsi, il pouvait déclencher l’enregistreur avant l'arrivée du visiteur, Si Philippe DUNAND, informaticien et mari de Claire THIBOUT est bion intervenu pour le transfert des données du dictaphone vers des CD-ROMS, les investigations menées n'ont pas établi qu'il ait en connaissance de cause participé a un stade ou un autre a la mise en ceuvre de la captation des conversations privées de Liliane SCHUBLLER-BETTENCOURT et de ses interlocuteurs. De méme, les nombreuses investigations menées n'ont ¢tabli ni une manipulation de Pascal BONNEFOY par Frangoise BETTENCOURT-MEYERS ni tune participation de celle-ci directement ou indirectement ni le versement d'une quelconque rémunération. Pascal BONNEFOY a affirmé avoir remis les enregistrements le mardi 18 mai 2010 a Frangoise BETTENCOURT-MEYERS paree que seule la famille pouvait les, utiliser, Au regard de la qualification pénale poursuivie, le délit n'est caraotérisé que si les paroles captées clandestinement concemnent I'intimité de la vie privée. La notion dlatteinte a 'intimité de la vie privée définie par le code pénal est plus restrictive que la notion civile d'atteinte la vie privée, envisagée par larticle 9 du code eivil. La jurisprudence considere & ce titre, par référence & la définition donnée par les professeurs MERLE et VITU, qu'en matiere pénale, latteinte a la vie privée c'est tout ce qui concerne lindividu dans ses relations familiales ou amicales, sa vie conjugale ou sentimentale, sa vie physique, sa santé, ses loisirs excluant de cette sphere les éléments ayant trait é la vie professionnelle, commerciale, ow aux reverts ; cette protection de la personne humaine vaut pour tout citoyen, y compris surtout coux ui jouissent d'une notoriété publique. Il n’est pas contesté que les éléments recueillis lors des enregistrements, qui cont fait Pobjet des retranscriptions par les services de police puis par une expertise judiciaire, établisscnt les importantes difficultés de santé de Liliane SCHUELLER- BETTENCOURT notamment quant 4 sa profonde surdité, l'isolement depuis le décés de son mari, sa désorientation et des états de confusions ; de toute évidence, ces Géments concement bien I'intimité de la vie privée de Liliane SCHUELLEI BETTENCOURT, D’autres éléments recucillis concernent son patrimoine, ’actionnariat de L’OREAL, la dissimulation de comptes bancaires en Suisse, I'ile d”ARROS et le financement de partis politiques. Page 20/34 ~ 4 Au regard de I'incrimination et de son interprétation par Ia doctrine comme rudenee, il ne pent étre considéré que la captation de ces demitres ifs du délit d’atteinte & intimité de la vie privée. par Ja j informations sont con: * surI'élément intentionnel Dans le cas despéce, V'intention et la volonté d'agit de Pascal BONNEFOY ne sont pas contestés, Il a reconnu devant le magistrat instructeur (D134/127 ) le 4 mai 2012: "fai en peur & chaque mstant”, "je ne me suis confié d personne, j'ai gardé ga (pour mol ; cela a été dur é porter, mais je voulais que mon entourage soit mis dans la confidence afin de les protéger", "si au début c'était pénible, a la fin e'était plus facile méme si c'était pesant”. ‘A la question du juge instruction, "Est ce que vous avez conscience denfreindre ta loi ?, il a répondu, "Vai décidé de poursuivre ces enregistrements, sachant que cela powvait constituer une infraction, notamment si Mme MEYERS. BETIBNCOURT décidait d'utliser ces enregistrements". De plus, regu par son avocat en janvier 2010 et averti sur les risques de poursuites qu'il encourait, il a poursuivi ses agissements délictueux jusqu‘au mois de ‘mai 2010 soit pendant prés de quatre mois encore. Enfin, le renouvellement des manceuvres de mise en place du dictaphone et enrogistrement avant chaque rendez-vous pendant plus d'une année caractérise 1a détermination constante du prévenu, Ila précisé & l'audience (notes pL) qu’il avait conscience que ce qu'il avait fait était illégal Dés lors, en ayant conscience de commettre un acte prohibé par la loi, intention délictueuse est établie Ainsi, les éléments constitutifs de linfraction, tant matériel qu’intentionnels sont bien réunis * sur état de néces: Pour que cot état, soit retenn, il faut démontrer un danger réel dans sa matérialité, aetuel et injuste, ce danger pouvant étre pour soi-méme ou pour autrui. La régotion de sauvegarde doit étre nécessaire et mesure. L’état de nécessité, création jurisprudenticlle en 1956, a été consacté par le legislateur dans le code pénal en viguour depuis le 1% mars 1994, En Pespéce, les faits reprochés 4 Pascal BONNEFOY sont intervenus dans un contexte tout 4 fait particulier. A la suite de la plainte de Frangoise BETTENCOURT-MEYERS sur les abus dont était victime sa mére de décembre 2007, les enregistrements ont démontré que Pentourage de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT était informé de P’évolution de enquéte notamment par le procureur de la République de NANTERRE comme par Pun des conscillers du chef de lEtat, que ce méme entourage était d’ailleurs Page 21/34 informé de la future décision de classement sans suite et de la date & laquelle il allait intervenir et ce des le début de I'été 2009. En 2009, plusicurs personnes proches de Liliane SCHUELLER- BETTENCOURT qui interviennent au quotidien auprés delle sont licenciés ; dans le méme temps, Pascal BONNEFOY est accusé a tort, par Frangois-Marie BANIER, avoir témoigné contre Ini dans le cadre de Venquéte menée a la suite de la plainte éposée par la fille de la viele dame. De méme, a la suite de la citation ditecte de Frangoise BETTENCOURT- MEYERS contre Frangois-Marie BANIER en juillet 2009, le parquet de NANTERRE a multiplié les recours pour que Paffaire ne puisse venir & audience devant la Jjuridiction de jugement, Manifestement, des membres de entourage de Liliane SCHUELLER- BETTENCOURT ne voulaient pas que état de faiblesse de la vieille dame soit econnu par une juridiction et qu’une véritable mesure de protection, qui écarterait certains d’entre eux, soit mise en place. Le danger encouru par Liliane SCHUFLLER-BETTENCOURT n’était pas seulement patrimonial et financier, puisqu’en décembre 2007 des démarches avaient 4 entreprises par Frangois-Marie BANTER pour qu’il soit non sculement légataire universel mais également adopté par la vieille dame. Pascal BONNEFOY a rapporté quill avait entendu Frangois-Marie BANIER dire je suis le fils que vous n’avez pas eu. Ainsi, il existe & cette époque un climat de suspicion et des clans au sein de la maison BETTENCOURT et Pascal BONNEFOY a ponsé qu’il allait étre licencié et il a voulu se protéger en utilisant un procédé illégal. ‘A aucun moment Pascal BONNEFOY n’a profité des enregistrements qu’ill a remis & Frangoise BETTENCOURT-MEYERS ; il n'a bénéficié de cadeaux de la fille de la vieille dame ou de toute autre personne ni antéricurement a la remise des captations ni postérieurement, Les indemnités de départ, dont il a bénéficié, ont été conformes a celles prévues & son contrat de travail et & celles dont ont bénéficié les autres salariés de la maison BETTENCOURT qui ont quitté précédemment leur cemploi. Enfin, Pascal BONNEFOY n'a pas cherché & monnayer la remise dos enrogistrements & quicongue et notamment & des jouralistes, Si initialement Pascal BONNEFOY, comme il a dailleurs pu le dire, a procédé de Ia sorte pour la défense de ses propres intéréts, il a précisé que lorsqu’il a décidé en mai 2010 de confier les enregistrements & Frangoise BETTENCOURT- MEYERS, c’était pour Tui le seu! moyen utile pour que la protection de la vieille dame soit assurée compte tenu du contexte trés particulier de P’époque (D1/661) Je confirme encore une fois ma déclaration, je n'ai pas fait cela pour de Vargent. Je Vai fait dans Tunique but de me protéger et dévoiler @ Mme MEYERS les atteintes graves sur la ‘personne de Mme Liliane BETTENCOURT. Page 22/34 L a 1a pu préciser devant le magistrat instructeur (D 134) : J'ai déconvert que Ton essayait a’écarter Francoise MEYERS-BETTENCOURT de sa mére. It était ‘martelé ci Mime BETTENCOURT par des personnes qui étaient la pour la protéger, que sa fille voulait la mettre sous tutelle. Je me suis apergu également que lors de ces conversations Mme BETTENCOURT niavait plus aucun contréle de la situation, il y avait des apartés dont elle était exelue, Elle ne comprenait absolument pas de quoi il stagissait. C'est lr que j'ai découvert que M. de MAISTRE ne protégeait pas Madame et Vorientait vers des décisions inappropriées. ai le sentiment que M. de MAISTRE et M. BANIER étaient de connivence lorsqu'l y avait un intérét commun. Je pense notamment & mon éviction. Sai été également tres choqué par les remarques sur la confession juive de M. MEYERS, Pascal BONNEFOY a attendu d’avoir Tune des seules conversations Gablissant plus particuligrement les abus, of apparaissait Frangois-Maric BANIER, celle du 11 mai 2010 (D1/7770) oi cclui-ci va d’ailleurs dire la tutele, elle la risque sur 2006, pour cesser les enregistrements et contacter Frangoise BETTENCOURT- MEYERS pour lui faire part des enregistrements et de leur contenu, en la mettant seule en position de les utiliser. Force est de constater que le choix d’un lieu, en loccurrenice Je bureau, ot Gtaient censées étre évoquées principalement des questions en lien avec les affaires navait pas pour but premier de porter atteinte a lintimité de la vie privée de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT, méme si Pascal BONNEFOY a pu déclarer qu'il avait initialement agi dans un intérét personnel, Iau conscience dés les premiers enregistrements d'une situation de danger dans laquelle était Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT qui le mettait lui-méme en grave difficulté compte ten du contexte précédemment rappel. De plus, en matiére de délit, notamment l'abus de faiblesse, qui se perpétue dans le tomps ct dont la caractérisation est particuliérement difficile a établir compte tenu de environnement familial et de l’espace clos dans lequel se déroulent les faits, alors méme que les plaintes et enquétes ne suffisent pas & mettre un terme aux agissements abusifs, la durée des actes reprochés doit s'apprécier, en fonction des éléments de Tespéce eu égard au temps nécessaire A l'obtention d’informations pertinentes, Tel est le cas, en I'espéce, pour Pascal BONNEFOY. En conséquence, Maction de Pascal BONNEFOY réunit les conditions de Pétat de nécessité en sauvegardant des intéréts dont la valeur est supérieure a celle des intéréts sacrifiés ; son acte est done socialement utile et la société n’a aucun intérét le punir, la sanction perd toute utilité sociale et personnelle. Dés lors, cette double inutilité sociale de la poursuite et de la sanction, justific en définitive Pimpunité de Vinfraction “nécessaire” pour lequel il est poursuivi, Ainsi, il existe bien un état de nécessité qui doit étre retenu par la juridiction. Dans ces conditions une retaxe s'impose. Page 23/34 yer 2-3 / Sur les faits reprochés aux journalistes et aux organes de presse Le choix des poursuites a été fait sur le fondement du droit commun, et non sur celui de la Joi sur a presse de 1881 Les recherches portant sur les conditions dans lesquelles les journalistes et les ‘onganes de presse Médiapart et Le Point sont entrés en possession des ‘enregistrements clandestins sont deneurées vaines. En V'état, Vorigine des faites des enrepistrements est inconmu, méme si les investigations menées ont établi que Maitre MEZTNER et Maitre HUC MOREL ont cu entre feurs mains les enregistrements et ont fait provéder & leur retranscription. Les journalistes comme les directeurs des publications n'ont & aucun moment de lenquéte ou de instruction contesté avoir été en possession des enregistrements clandestins, Par ailleurs, par dewx arréts du 6 octobre 2011 et du 2 juillot 2014, la premiére chambre civile de la cour de cassation a considéré que le recours & des procédés clandostins de captation au domicile de l'intéressée ne saurait se justifier par information du public, Ces décisions prises par la plus haute juridiction civile ne sauraient lier la juridiction correctionnelle, le fondement de action n’étant pas le méme et le cadre juridique étant distinet. Pour que les infractions reprochées aux journalistes, avoir conservé ef utilisé les enregistrements, ot anx directeurs de publication, avoir conservé, porté ou laisse porter di la connaissance du public les enregistrements, il doit étre démontré qu’ existe ‘une atteinte & I'intimité de la vie privée, Le seal fait d’avoir détenu les enregisirements ltigicux ne pout étre reproché aux journalistes, sauf a retenir une infiaction de recel d'informations d'origine illégale, une telle qualification des fits est prohibée par les conventions signées ‘comme par la jurisprudence interne et européenne. Retenir a [encontre des journalistes les infractions reprochées, de conservation et d'utilisation des enregistrements réalisés par Pascal BONNEFOY, ne peut avoir pour conséquence de condamner les journalistes pour violation du secret des sources et de porter atteinte a la liberté de la presse. De plus, sans qu'il soit un droit absola, il existe pour les journalistes un droit au seoret des sources et il ne saurait étre porté atteinte a ce droit par l'utilisation d'une autre incrimination pénale. Par ailleurs, l’infraction de Particle 226-2 du code pénal, qui vise Jes joumalistes et les directeurs de publication, est autonome de l'incrimination de Particle 226-1 Le seul fait que les propos diffusés aient été enregistrés sans le consentement de leurs autours, n’est pas en lui méme suffisant pour constituer Vinfraction de l'article 226-2 du code pénal Page 24/34 Z Toute automaticité, qui serait retenue entre les deux infractions, reviendrait & considérer qu’existe une intention délictueuse sans rechercher la réelle volonté de Pauteur de la seconde incrimination ; un tel positionnement aboutirait & condamner Ie joumaliste sans que ta protection du secret des sources ne soit respectée, Il est done nécessaire d’examiner si le contenu des conversations captées ot divulguées portent atteinte a 'intimité de la vie privée, dans leurs éléments matériels puis dans f'affirmative, de rechercher, l'existence de I’élément intentionnel ; la simple conslatation malérielle que les enregistrements ont été réalisés au domicile de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT ne suffit pas matérialiser le délit. Le principe de la protection de la vie privée est essentiel dans une société démocratique afin que chaque citoyen puisse mener Ia vie qu'il entend dans le respect des lois communes. La loi du 17 juillet 1970 a introduit ie droit au respect de In vie privée tant par Particle 9 du code civil que par les articles 368 et 369 du code pénal. Dans le cadre des travaux préparatoires, le député Pierre MAZEAUD, a rappelé lors des débats a I’Assemblée Nationale l’importance du mot intimité placé ayant l’expression de la vie privée, dans les dispositions pénales, afin que ce nouveau texte ne porte pas atteinte & la liberté de ta presse. La liberté de la presse est un fondement de notre démocratie qui a pour objet de permettre l'information des citoyens ; le pluralisme est une garantie fondamentale dans notre société ‘La question posée 4 la juridiction est de savoir ou se situent les cbomes», entre ces deux droits essentiels, droit au respect de Pintimité de la vie privée et liberté @informer ; ces deux droits sont repris par la convention européenne de sauvegarde dans ses articles 8 et 10. Seton l'article 8 de la Convention : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 Ine peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans Vexercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire 2 la sécurité nationale, @ ta sfreté publique, au bien-ttre économique du pays, a la défense de Vordre et ad ta prévention des infractions pénales, a ta protection de ta santé ou de la morale, ou a la protection des droits et libertés d'autrui. Tnitialement, cet article avait pour objet dassurer pour toufe personne une protection contre ’ingérence de I’Etat et des enquétes illégales. La Cour Européenne, par l’interprétation de ce texte, a élargi son champs d’application et a estimé que tout citoyen a droit & une protection contre des ingérences de I'Etat mais également contre des ingérences de personnes privées. La liberté d’expression est un principe a valeur constitutionnelle et figure dans la déclaration des Droits de I’ Homme et des Citoyens du 24 aotit 1789, Page 25 / 34 De nombreux engagements internationaux sousorits par la France protogent la liberts d’expression ot le droit pour le public d’étre librement informé, de pouvoir recevoir et rechercher librement des informations, en particulier l'article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de Homme du 10 décembre 1948, et article 10 de la Convention Huropéenne de Sauvegarde des Droits de ' Homme ot des Libertés Fondamentales (CEDH). Selon l’atticle 10 de la Convention 1. Toute personne a droit a ta liberté d'expression, Ce droit comprend ta liberté dopinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontiore. Le présent article n'empéche pas les Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision & un régime d'autorisations, 2. Liexercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut étre soumis i certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions préoues par ta loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, a la sécurité nationale, & Uintégrité territoriale ou a ta stireté publique, & la défense de Vordre et a la prévention du crime, a la protection de fa santé ou de la morale, & la protection de la réputation ou des droits dautrui, pour empécher Ia divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir Vautorité et Vimpartialité du pouvoir judiciaire. Le droit a information du public, corollaire de la lberté d’expression telle qu’elle est envisagée notamment par Particle 10 de la Convention, commande de publier des informations relevant de sujets d’intérét général Il sagit d'une liberté cssentielle sur laquelle reposent les fondations de toute société démocratique. Il ne saurait leur étre porté atteinte sans motif cxceptionnellement grave. Cette affaire pose également la question primordiale de Vinterférence entre des droits essentiels, Ja liberté d’expression ot le droit 4 Vinformation, d'une part ot autres droits fondamentaux comme la protection de Vintimité de la vie privée, autre part . Les développements du droit tant dans Je cadre des traités et conventions intemationales qu'en droit interne ont construit peu & peu un corpus» tendant & fixer un équilibre entre ce deux valeurs primordiales. Crest & la lumigre des textes et de la jurisprudence de la Cour de Cassation comme de la Cour Buropéenne de STRASBOURG que la juridiction saisie doit statuer, D’autant plus que comme la Cour de cassation I'a prévisé dans son arrét hu 15 avril 2011 (n° 10-17049, Bull, Ass. pl., n° 1), en jugeant que I’Etat frangais, les cours et les tribumaux esont remus de respecter les déctsions de Ia Cour européenne des droits de l'homme, sans attendre d'etre attaqués devant elle ni d'avoir modifié leur législationy. Page 26/34 * \) Pour que la protection prévue par l’atticle 8 de la convention trouve sa pleine efficience, Pattaque a la réputation personnelle doit atteindre un certain niveau de gravité et avoir été effectuge do manire A causer un préjudice la jouissance personnelle du droit au respect de la vie privée, Sagissant de la mise en balance du droit & la liberté d'expression ot du droit au respect de ta vie privée, le tribunal reprend les critéres jurisprudentielles qui sont notamment la contribution a un débat dintérét général, la notoriété de la personne visée et Pobjet da reportage, le comportement antérieur de la personne concemée avant la publication du reportage, Ie contenu, la forme et les répercutions de la publication, le mode d’obtention des informations et leur véracité, fa gravité de la sanetion imposée. La Cour européenne a ainsi trés nettement affirmé la primauté de Ia liberté expression et du droit a l'information sur le respect de la vie privée, ajoutant dans Parrét Caroline de Hanovte, du 19 septembre 2013, que (§ 42), «Si la presse ne doi pas franchir certaines limites, concernant notamment la protection de la réputation et des droits dautrui, il lui incombe néanmoins de communiquer, dans te respect de ses devoirs et de ses responsabilités, des informations et des idées sur toutes les questions Wintérét général et de publier des photos. A cette fonction S‘ajoute le droit, pour le public, d’en recevoir». Selon la Cour, la garantie que l'article 10 offre aux journalistes, en ce qui concerne Jes comptes rendus sur des questions d'intér8t général, est subordonnée & la condition que les intéressés agissent de bonne foi sur Ia base de faits exacts et fournissent des informations « fiables et précises » dans le respect de la déontologie jouralistique (Axel Springer c/Allemagne, Colombani et auttes o/Franec). Ainsi, pour la recherche de cette équilibre, plus la valeur informative est grande pour le public et la question abordée d'intérét général, plus Vimpératif de protection de la sphere privée devient relat, A cet effet, il doit étre retonu le sérieux du travail d’enquéte mené par les joumalistes des deux médias. 2-3-1) Sur les faits reprochés & Hervé GATTEGNO et Franz-Olivier GIESBERT Il est reproché & Hervé GATTEGNO d'avoir a Paris et en tout oas sur le lerritoire national, courant juin/juillet 2010 et en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, conservé, utilisé de quelque maniére que ce soit tout ‘enregistrement ou document obtenu d Taide de l'un des actes prévus par l'article 226- 1 du code pénal, en Vespece Venregistrement de paroles prononeées d titre privé ow confidentiel au préjudice de Liliane BETTENCOURT-SCHULLER. I est reproché Franz-Olivier GIESBERT d'avoir, en qualité de directeur de la publication, directeur du POINT, @ Paris et sur le territoire national, courant juin, juillet 2010 et courant 2010, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, ‘conservé, porté ou laissé porter ala connaissance du public ou d'un tiers ow utilisé de quelque maniére que ce soit tout enregistrement ou document obtenu a Vatde de Pun des actes prévus par Varticle 226-1 du code pénal, en l'espece par Venregistrement de paroles prononcées @ titre privé ou confidentiel au préjudice de Liliane BETTENCOURT-SCHUELLER, et avec la circonstance que les faits ont éé commis par la voie de la presse éerite. Page 27/34 | | a) at ae Comme Pa souligné la défense, Vordonnanee de renvoi ne précise pas quels articles signés par Hervé GATTEGNO sont susceptibles d°étre incriminés par Pinfraction reprochée. Le 27 octobre 2015 le Ministére Public a fait verser aux débats la céte 58 du dossier initial d’abus de faiblesse au préjudice de Liliane SCHUELLER- BETTENCOURT contenant les articles litigieux. Hl doit étre relové quo Vhebdomadaire a publié 13 articles reprenant des conversations tenues les 12 juin, 3 juillet, 21 juillet, 7, 9 et 17 septembre, 23, 27 et 29 octobre, 19 novembre et 14 décembre 2009, 4 et 12 mars, 7 et 23 avail et 11 mai 2010, Seuls trois articles ont été signés par Hervé GATTEGNO, les autres étant dos reprises de dépéches d’agences de presse de I’AFP ou de REUTERS, ds lors la signature du journaliste ne figurant pas sur ces articles et sans qu’il soit nécessaire d’examniner plus Join leur contenu, une relaxe s"impose pout les articles qu'il n'a pas signés. En co qui concerne les articles signts pat le journaliste, du 1" juillet, du 05 juillet 2010, et sur lepoint.fr du 16 juin (D3627) et du 30 juin (D3650), il est effectivement question de la santé, des conflits familiaux et des dispositions testamentaires de Liliane SCHUBLLER-BETTENCOURT. Lors de sa mise en examen, Hervé GATTEGNO a déclaré (D 112) qu’il avait Iu les enregistrements ; ce simple fait ne peut tre pénalement répréhensible sauf a porter atteinte a la liberté de la presse et des journalistes Hervé GATTEGNO a précisé qu’il avait toujours participS au choix des extraits de conversations publiées dans le Point. Il a ajouté Les éléments choisis nous paraissaient étre ceux qui a la fois mettaient en évidence les manigances de entourage et ménageaient Ia vie personnelle de Mme BETTENCOURT dans ses aspects intimes. Le choix était fait de reproduire des phrases relatives & son état de santé, a sa succession, a sa famille parce que ces éléments 1a étaient au caeur des infractions dont Mme BETTENCOURT était susceptible d'etre victime I avait dailleurs précisé lors de son audition par les enquéteurs (D55) En occurrence, plusieurs conversations me paraissaient montrer que Mnte BETTENCOURT Liliane était manipulée et quielle ne comprenait pas certaines décisions tres importantes qu'elle était sensée avoir prise ou que son entourage la persuadait de prendre. ~--Nous avons fait le chote de nous efforcer d'écarter les extraits qui ne concernatent que la vie personnelle et Uintimité de Mme BETTENCOURT pour privilégier cew: qui étaient susceptibles de mettre en évidence les agissements de certains de ces proches dont elle pouvait étre victime.- S'il est certain que pour comprendre les atteintes qui sont portées & son encontre, Ie journaliste a publig des éléments relatifs & Pile d’Arros et aux réactions de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT oi I’on peut entcndre notamment ses hésitations et ses pertes de mémoire, ces éléments ne viennent qu’llustrer un contexte, dautant plus que la communication officielle de ses conseillers tendait 4 montrer le parfait état de santé de Ia vieille dame. Page 28/34 Certes, fa publication d’extraits des enregistrements a montré son état affaibli, mais ce sont bien ces révélations qui ont contribué & établir son état de faiblesso, les abus dont elle a pu étre l'objet de Ia part de son entourage, qu'elle était sous Pinfluence de ceux qui étaient 1A pour la protéger et qu'une protection adaptée soit mise en place. Par ailleurs, c’est a la suite do la diffusion de ces informations au cours des ois de juin et juillet 2010, que les discussions entre les conseils de la mére et de la fille ont permis d'aboutir & l'accord passé en décembre 2010 destiné initialement & écarter ceux qui abusaient Welle et A la protéger. Hervé GATTEGNO a effectué un travail journalistique séricux de tri parm les informations d’ordre privé ne retenant que colies relatives aux questions d’intérét général, Ces publications sinscrivent dans son travail journalistique dinvestigation qu'il a effectué largement avant 1a publication des extraits des conversations reprochée, puisque dis le 17 décembre 2008, il éerivait un article publié par Le Point sur la plainte de Frangoise BETTENCOURT-MEYERS et le comportement de entourage de ta vieitle dame. A la lecture des articles signés par Hervé GATTEGNO, il apparait que les éléments rapportés ne font que conforter des éléments publiés antérieurement par ce méme journaliste ; en juin 2010, il est de notoriété publique que Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT est une personne sourde, qu'il existe un conflit familial important et le journaliste a deja écrit des articles relatifs aux aigrefins qui entourent la vieille dame. Ainsi, les extraits cités par Hervé GATTEGNO dans les articles en cause concement une information dintérét général, qui conformément de la jurisprudence de la Cour de STRASBOURG, ne reprend des informations & Iappui de ses articles concemant un débat public antéricur qui avait éé initié au préalable sans oes éléments, par un travail sérioux. Enfin, la partie civile ne s'est pas désistée de sa plainte, elle n'a pas pour autant, & Paudience apporté d’éléments démontrant que par son action et ses éorits Hervé GATTEGNO avait porté atteinte a Vintimité de la vie privée de la vieille dame. Ainsi, il n’est pas démontré la volonté d’Hervé GATTEGNO de porter atteinte Aintimité de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT. Dés lors, une relaxe s*impose. En conséquence, Hervé GATTEGNO ayant bénéficié d'une relaxe, le directeur de la publication ne peut qu’étre relaxé. Page 29/34 i ws Al 2-3-2 / sur les faits reprochés a Fabrice LHOMME, Fabrice ARFI et Edwy PLENEL est reproché & Fabrice LHOMME et Fabrice ARFI d avoir Paris et en tout cas sur le territoire national, courant juin{uillet 2010 et en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, conservé, utilisé de quelgue maniére que ce soit tout enregistrement on document obtenu d Vaide de l'un des actes prévus par Varticle 226- 1 du code pénal, en Vespece Uenregistrement de paroles prononcées & titre privé ow confidentiel au préjudice de Liliane BETTENCOURT-SCHULLER. est reproché & Edwy PLENEL d'avoir, en qualité de directeur de président de la SAS MEDIAPART et directeur de la publication, & Parts et sur le territoire national, courant juin 2010, en out cas depuis temps non couvert par la prescription, conserve, porté ou laissé porter d la connaissance du public ou d'un tiers ow utilisé de quelque manidve que ce soit tout enregistrement ou document obtenu a Vaide de l'un des actes prévus par Varticle 226-1 du code pénal, en l'espéce par l'enregistrement de paroles prononcées a titre privé ou confldentiel au préjudice de Liliane BETTENCOURT-SCHUELLER, et avec la circonstance que les faits ont été commis ar la voie de la presse écrite. Le 27 octobre 2015 le Ministére Public a fait verser aux débats la céte 56 du dossier initial d’abus de faiblesse au préjudice de Liliane SCHUELLER- BETTENCOURT contenant les articles litigieux. Au vu des éléments du dossier, ill est reproché aux joumalistes et & MEDIAPART d’avoir publi¢ - le 16 juin 2010, un article intitulé «SARKOZY, WOERTH, fraude fiscale : les secrets volés de Vaffaire Bettencourt ». = Le 17 juin 2010, MEDIAPART rendait public un nouvel article : « Mme Woerth, on lui donnera de Vargent parce que c'est trop dangereux ». - Le 18 juin 2010, un nouvel article était publié intitulé: «Affaire Bettencourt :j’ai peur que le fis tire un fil». i Le 21 juin 2010, le site MEDIAPART procédait & la diffusion d’extraits enregistrements sous Vatticle: «Affaire Bettencourt, trois cheques, trois questions ». Ainsi, la série d’articles publiée par Mediapart en juin 2010 a abordé les thémes relatifs & la gestion de un des groupes industriels frangais les plus importants, L'Oréal, dont la principale actionnaire, Liliane SCHUBLLER-BETTENCOURT, était vietime de graves abus, commis par certains proches, qui ont profité de son état de santé défaillant, susceptibles d’avoir organisé un systéme de fraude fiscale d’ampleur ‘majeure, ainsi que des opérations de financement occulte de responsables politiques. I est pas rapporté l’existence d’ une enquéte préalable de Mediapart. Dans ce cadre, il est névessaire de prendre en compte l'appréciation par la Cour de STRASBOURG du rdle de la presse comme «chien de garden de la démocratie. Page 30/34 J « Faut tenir compte du role éminent de la presse dans un état de droit (...). Si elle ne doit pas franchir les bornes fixées en vue, notamment, de la protection «de la réputation d’autrui », il convient néanmoins de communiquer les informations et des idées sur des questions d’intérét public. A sa fonction qui consiste & en diffuser, s’ajoute le droit pour le public d’en recevoir. S’ilen allait autrement, Ia presse ne pourrait jouer son réle indispensable de "chien de garde” » (CEDH, 25 juin 1992, Thorgeir ‘Thorgeirson c. Islande, Req, n° 1378/88, § 63). Par Ieur publication, les journalistes vont contribuer & mettre au jour un débat intérét général sur une possibie fiaude fiscale de la plus grande fortune de France, qui conduira le parquet de NANTERRE A saisir les juges instruction pour blanchiment de fraude fiscale, sur les possibles conflits d'intéréts entre l'une des gestionnaires de la plus grande fortune de France et son mari ministre du Budget par ailleurs trésorier du parti majoritaire 4 "Assemblée Nationale, et enfin sur le financement de la vie politique et les micros-partis destinés a faciliter le financement de campagnes électorales Les entretiens publiés par les articles litigiewx concernent. principalement la gestion du patrimoine de I'intéressée et les liens que Madame BETTENCOURT centretient ou a pu entretenir avec différentes personnalités politiques Les informations révélées qui mettent en cause Ia principale actionnaire de Pun des premiers groupes industriels frangais, et dont l'activité et les libéralités ont fait Pobjet de trés nombreux commentaires publics, relévent de la légitime information du public, IL en est de méme lorsque ces informations, concement l’employeur de la femme d'un ministre de la République, alors trésorier d'un parti politique. Enfin lors de la publication des extraits, le 16 juin 2010, dans la mbrique intitulée «Boite noite », le directeur de la publication de Mediapart a pris soins de poster Vavertissement suivant «Apres avoir pris connaissance de Vintégralité de ces enregistrements, MEDIAPART a jugé qu'une partie consistante de leur contenu révélait des informations qu'il ait Idgitime de rendre publiques parce qu’elles concernaient le fonctionnement de la République, le respect de sa loi commune et Véilique de ses fonctions gouvernementales. Nous avons bien entendu exclu tout ce qui se rapportait de pres ou de loin a Ia vie et a Vintimité privée des protagonistes de cette histoire. Nous nous en sommes tenus aux informations dintérét général Figurent donc dans ces verbatim les seul passages présentant un enjeu public : le respect de la loi fiscate, Vindépendance de la justice, le réle du pouvoir exécutif, la déontologie des fonctions publiques, Pactionnariat d'une entreprise frangaise mondialement connue. Nous nous sommes enfin efforcés d’obtenir des réactions des personnes citées et des parties concernées. En plus de celles qui sont rapportées dans le corps de cet article, on les trouvera in extenso en lisant cet autre article ». Page 31/34 En apportant ces précisions, le directeur de la publication a manifestement voulu éviter tout sensationnalisme en portant & la connaissance du public des éléments qui selevaient de Vintimité de Liliane SCHUBLLER-BETTENCOURT et qui pouvaient porter atteinte a la dignité de la vieille dame. S'il est certain que dans son interrogatoire (D 123) devant le magistrat instructeur, Edwy PLENNEL a admis avoir choisi de reproduire certaines conversations relatives a létat de santé de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT et 4 ses dispositions testamentaires, il a expliqué que c°était dans le dessein «'apporter assistance d une personne en dangers. Par ailleurs, ill doit étre relevé te contexte trés particulier de ’affaire BETTENCOURT ct l'interférence du pouvoir exécutif et notamment du conseiller justice du président de la République dans le traitement de la plainte pour abus de faiblesse déposée par Frangoise BETTENCOURT-MEYERS comme dans la requéte auprés du juge des tutelles de COURBEVOIE pour mettre en place une mesure de protection de la vieille dame, Les conversations enregistrées des 12 juin et 21 juillet 2009 dont des extraits ont été publiés par MEDIAPART Ie 17 juin 2010 sont & cct égard éloquentes, sur les rapports entre 'avocat et conseiller fiscal de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT, M° GOGUEL, le gestionnaire do fortune, Patrico de MAISTRE, le procureur de la République de NANTERRE et I'Elysée. Face & un tel dysfonctionnement dans le cours normal de ta justice, il était dintérét général que de tels faits soicnt portés 4 la connaissance du public et des citoyens, Le tribunal constate, chronologiquement, qu’a la suite de la médiatisation de ces dysfonctionnements, le Procurcur Général de la cour d’appel de VERSAILLES a cenjoint au procureur de la République de NANTERRE Touverture d’une information judiciaire et la saisine de magistrats instructeurs puis d'une requéte auprés de la chambre criminelle de la cour de cassation pour un dépaysement des dossiers traités & NANTERRE vers le tribunal de grande instance de BORDEAUX. Dés lors que Pintérét général est en jeu, la question de Fatteinte a la vie privée deyient plus relative ; do plus, il faut rappeler qu’en publiant des extraits des conversations, les journalistes et le directeur de publication ont pris soin d’écarter les enregistrements dans lesquels Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT paraissait le plus en difficulté qui pouvaient constituer une atteinte A ’intimité de sa vie privée Manifestement ces articles ont participé aux débats d’intérét général et sociétal, notamment le nouveau débat sociétal relatif aux micros partis et au financement de la vie politique, sans rentrer dans les éléments de la vie privée et des cconflits familiaux existant au sein de la famille BETTENCOURT. De méme que pour Hervé GATTEGNO et I’hebdomadaire Le Point, la partic civile, & audience, n’a pas plus apporté d’éléments démontrant que par Jeur action et leurs écrits les journalistes avaient portés atteinte a l'intimité de la vie privée de la vieille dame. Page 32/34 Dans ees conditions, méme si des éléments relatifs A V'intimité de Liliane SCHUELLER-BETTENCOURT ont été publigs, 1’élément moral de l'infraction n’est pas établi Ainsi, au regard de P’appréciation ensemble de ces éléments, dans le cadre de Péquilibre reckerché entre le droit au respect de la vie privée et la liberté information, V'infraction reprochée ne peut étre retenue ; une relaxe doit done sire prononcée tant I'égard des journalistes que du directeur de la publication. SUR L’ACTION CIVILE Les conscils de Liliane SCHULLER-BETTENCOURT représentée par Olivier PELAT, agissant es qualité de tuteur adjoint ont renouvelé leur constitution de partie civile et n’ont formulé aucune demande & I’encontre des prévenus, Teonvient de déclarer recevable, en la forme, leur constitution de parti civile et de constater qu’aucune demande n'est faite & son encontre. PAR CES MOTIFS Le tribunal, statuant publiquement, en premier ressort et contradictoirement a I’égard de BONNEFOY Pascal, ARFI Fabrice, LHOMME. Fabrice, PLENEL Hervé, GATTEGNO Hervé, GIESBERT Franz et SCHUELLER, Liliane, SUR L'ACTION PUBLIQUE : SUR L'EXCEPTION DE NULLITE : Rejette exception de nullité soulevée par les prévenus ; Relaxe ARFI Fabrice, Anthony des fins de la poursuite ; Relaxe BONNEFOY Pascal des fins de la poursuite ; Relaxe GATTEGNO Hervé des fins de la poursuite ; Relaxe GIESBERT Franz, Olivier des fins de la poursuite ; Page 33/34 Relaxe LHOMME Fabrice des fins de la poursuite ; Relaxe PLENEL Hervé, Edwy, Olivier des fins de la poursuite ; SUR L'ACTION CIVILE : Déclare recevable en la forme la constitution de partie civile de Mme Liliane SCHUELLER épouse BETTENCOURT représentée par son tuteur M. PELAT Olivier constate l'absence de demandes ; ct le présent jugement ayant été signs par le président et la greffiére. ] LA GREFFIERE LE PRESIDENT HI { \ \ >) Page 34/34 POUR EXPEDITION CERTIFIEE CONFORME P/LE GREFFIER EN CHEF DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BORDEAUX

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