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perdre conscience être totalement inconscient avoir la conscience tranquille
ne pas avoir conscience de ses actes avoir un meurtre sur la conscience
conscience politique en son âme et conscience
avoir bonne / mauvaise conscience
conscience professionnelle
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Cours Le sujet et la raison et le réel
Mme Guernon Conscience, inconscient, matière et esprit
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Cours Le sujet et la raison et le réel
Mme Guernon Conscience, inconscient, matière et esprit
Première partie
La conscience est-elle la source de
toutes nos connaissances ?
1 La conscience comme représentation du monde
extérieur
1.1 Le 1er degré de la conscience : perception et sensation
est indispensable à la connaissance du monde qui nous
entoure
1.1.1 Être en relation avec le monde extérieur
On peut déjà dire que les plantes ou animaux « inférieurs » sont en rela-
tion avec le monde extérieur au sens où ils apportent une réponse aux vari-
ations du monde extérieur qui leur permet de subsister. Il s’agit de ressentir
un stimulus et de réagir en conséquence, mais on ne parlera pas encore de
perception ni d’action, mais simplement de réaction réflexe. Ils sont simple-
ment en contact avec leur environnement, avec lequel ils sont en interaction.
Toutefois, cette relation au monde extérieur, si elle est indispensable à
sa connaissance, puisqu’elle est ce qui nous permet d’être en relation avec
lui, d’être en contact avec lui, ne suffit pas à le connaı̂tre (elle est nécessaire
mais pas suffisante pour la connaissance). Il s’agit d’un rapport immédiat 1
(direct, sans médiation) au monde, qui ne permet pas de le connaı̂tre : on
se contente d’adhérer au monde, de se confondre avec lui, sans la prise de
distance nécessaire à la connaissance.
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Bilan à noter Descartes s’est aperçu que certaines de ses opinions, qu’il
croyait parfaitement assurées, étaient fausses. Si certaines de ses opinions
étaient fausses, il se peut que d’autres le soient aussi, voire qu’elles le soient
toutes. Pour se défaire de l’erreur et être absolument certain de ce qu’il tient
pour vrai, il va alors falloir qu’il considère tout ce qui est douteux comme
faux. Il va falloir qu’il abandonne toutes les opinions douteuses comme si
elles étaient fausses.
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Bilan à noter Mes sens m’ont déjà trompé. Si on applique le doute hy-
perbolique, on peut donc dire qu’il est possible qu’ils me trompent toujours.
Je ne peux donc pas tenir pour vrai ce qui me vient de la sensation et de la
perception. Mais lorsque j’imagine, je ne peux pas tout inventer de A à Z :
il faut au moins que certains éléments me viennent de choses réelles que j’ai
perçues. Ces éléments-là ne seraient pas douteux, ils pourraient être la base
d’une connaissance certaine.
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Bilan à noter Même les éléments simples sans lesquels je ne peux pas
penser sont peut-être faux. Il peut en effet y avoir un Dieu trompeur qui
s’amusent à mettre dans mon esprit des idées fausses.
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3.1 Je suis
• Si je me suis persuadé ou seulement si j’ai pensé quelque chose, c’est
que, assurément, j’étais, sans quoi je n’aurais pas pu penser.
• S’il y a un mauvais génie qui me trompe, alors il n’y a pas de doute
que je suis : le mauvais génie ne peut donc pas être une objection à
mon existence.
• D’où « il faut conclure, et tenir pour constant que cette proposition : Je
suis, j’existe, est nécessairement vraie, toutes les fois que je la prononce
ou que je la conçois en mon esprit ».
Descartes, Méditations métaphysiques, 2e méditation, manuel p. 25.
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elle-même, il lui faut quelque chose pour exister : une table, un mur,
etc., il lui faut un support, et ce support, c’est la substance. En ce sens,
la substance est un sujet, c’est-à-dire quelque chose de constant,
de permanent, à quoi on rapporte des qualités qui, elles peuvent être
changeantes. Le sujet, c’est ce qui supporte des qualités, c’est un sup-
port. Quant à ces qualités, on les appelle des « accidents », l’accident
étant ce qui existe non par soi-même, mais grâce à une autre chose et
par suite ce qui peut être modifié sans que la chose elle-même change
de nature ou disparaisse. Rapport avec ce qu’on appelle aujourd’hui
l’accident ? L’accident est ce qui peut être ou ne pas être, ce qui aurait
pu être autre sans changer la chose : l’accident est contingent tandis
que la substance appartient à l’essence de la chose, à sa na-
ture profonde, à ce qu’elle est fondamentalement (quand on cherche
ce que je suis, on cherche mon essence). [Essentiel / accidentel] Exem-
ple : il fait partie de l’essence d’un triangle d’avoir 3 côtés, mais il est
accidentel que ce triangle soit rectangle ou isocèle.
• « Qu’est-ce qu’une chose qui pense ? C’est-à-dire qui doute, qui conçoit,
qui affirme, qui nie, qui veut, qui ne veut pas, qui imagine aussi et qui
sent. » Tout cela ne peut pas être distingué de ma pensée, c’est-à-dire
séparé de moi-même.
• Pour l’instant, je sais seulement que je suis un esprit, rien de plus.
Je ne sais en particulier pas si j’ai (ou si je suis) aussi un corps.
Cette possibilité de penser l’esprit (ou la conscience) comme substance
indépendamment de tout corps est à l’origine du dualisme cartésien :
il y a pour Descartes 2 substances distinctes et séparées, le corps et
l’esprit.
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Transition Y a-t-il une réalité du monde que je juge être le monde extérieur
en dehors de ma conscience ?
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qui ne signifie pas qu’il existe en dehors de moi un tel triangle), il apporte
« les raisons desquelles on peut conclure l’existence des choses matérielles ».
Raisons de l’existence des choses matérielles :
– Différence entre concevoir et imaginer. L’imagination, contraire-
ment à l’entendement, n’est pas uniquement spirituelle : elle a besoin
de se tourner vers la nature corporelle, elle est à la fois spirituelle et
corporelle. L’existence de l’imagination rend donc très probable une
existence de la nature corporelle, dont je fais l’expérience comme unie
à ma pensée.
– J’attribue naturellement mes sensations à l’action de corps extérieurs
sur moi. Cette inclination naturelle ne peut pas être tout le temps
illusoire sans quoi ça voudrait dire que Dieu m’a créé de sorte que
je me trompe tout le temps, ce qui est impossible, puisqu’il est
parfait et bon.
Mais Descartes admet que l’existence des choses extérieures n’est
pas aussi certaine que celle de mon esprit, de Dieu et de mon âme. Par
ailleurs, savoir qu’il existe des choses matérielles en dehors de nous ne nous
garantit pas que nous ne nous trompons pas sur ce qu’elles sont. L’existence
des choses matérielles reste donc un point faible de la pensée de Descartes.
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Deuxième partie
e
2 cours : Peut-on dépasser la
séparation entre l’esprit et la
matière ?
1 Puis-je sortir de ma conscience pour connaı̂tre
le monde objectivement ?
1.1 L’idéalisme
Pb qui se pose = si je ne peux pas avoir d’accès au monde en dehors
de ma propre conscience, il ne m’est donc jamais possible de comparer un
monde extérieur qui serait objectif 2 à la représentation subjective que
j’en ai. Comment puis-je alors savoir que je ne transforme pas le monde,
comment savoir si le monde est bien conforme à la représentation que je
m’en fais ? Il ne m’est pas possible d’avoir accès au monde tel qu’il est en
dehors de ma conscience.
C’est déjà ce qu’on peut comprendre de l’analyse de Kant, dans la
Critique de la raison pure, qui explique qu’on ne peut avoir accès qu’aux
phénomènes, càd aux choses telles qu’elles nous apparaissent et non aux
choses en soi (noumènes), càd telles qu’elles sont en dehors des cadres que
nos capacités cognitives projettent sur le monde. Le but de Kant est de
déterminer les conditions de possibilité de notre connaissance. Notre pensée
a certaines structures et c’est à partir de ces structures que nous connais-
sons le monde, elles fonctionnent un peu comme un filtre qui met en ordre
le monde. Kant dit que la connaissance des objets dépend des “structures a
priori [càd avant expérience] de la sensibilité et de l’entendement”. L’espace
et le temps n’appartiennent pas au monde extérieur mais sont des “formes a
priori de la sensibilité”. Les catégories de l’entendement sont des concepts
comme l’unité, la causaité, etc.
C’est ce qu’on appelle un idéalisme (= affirme la prééminence des idées,
des représentations mentales abstraites, sur la réalité concrète et matérielle).
Chez Kant, on parle d’idéalisme transcendantal (= ce qui rend possible
la connaissance indépendamment de toute expérience). Cet idéalisme n’ex-
clut pas l’existence des choses extérieures, ne la remet même pas en cause,
mais dit qu’il serait vain de vouloir connaı̂tre les choses telles qu’elles sont
indépendamment de la manière dont elles nous apparaissent.
La forme la plus extrême de l’idéalisme est l’immatérialisme de Berkeley.
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Objectif / subjectif. Est subjectif ce qui relève d’une perception personnelle, ce qui
est relatif au point de vue d’un sujet et objectif un fait, ce qui est réellement, les qualités
réelles d’un objet, indépendamment du jugement d’un sujet.
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Pourtant, nous avons bien l’impression que nos idées, nos imaginations,
etc., ne sont pas la même chose que ce que nous percevons comme des objets
en dehors de nous.
Bilan Puisque nous ne pouvons jamais sortir de notre esprit, nous ne pou-
vons pas savoir s’il existe des objets en dehors de nous, s’il existe un monde
extérieur, ou si tout n’est fait que des idées qui sont dans notre esprit. Il
se pourrait que le monde que nous considérons comme nous étant extérieur
soit en fait intégralement inclus dans notre esprit. Pourtant, nous faisons
spontanément la différence entre ce qui relève uniquement de la fiction de
notre esprit ou des pensées abstraites et ce que nous considérons comme
existant à l’extérieur de nous.
1.2 La phénoménologie
• Comme nous l’avons vu, la phénoménologie considère que la conscience
se caractérise par son intentionnalité, càd que la conscience est tou-
jours conscience de quelque chose. [Phénoménologie principalement
représentée par Husserl, allemand, fin xixe – début xxe ]
• Contrairement à Kant, la phénoménologie considère qu’il n’y a pas
d’essence de choses, de choses en soi, en dehors des apparences, au-delà
des phénomènes. Il n’y a rien d’autre que des phénomènes. L’essence
des choses, c’est l’apparence.
• Est-ce que cela suppose l’existence de quelque chose en dehors de la
conscience, de transcendant à la conscience, qui serait à l’origine de
ces apparences ?
• La réponse n’est pas évidente, car on pourrait penser, comme le fait
Berkeley, que si la conscience est bien conscience de quelque chose, elle
pourrait très bien viser quelque chose qui est inclus en elle.
• Pourtant, ce que nous montre la phénoménologie, c’est que nous ne
nous rapportons pas de la même manière à ce que nous percevons
comme nous étant extérieur et à ce que nous imaginons, à ce dont
nous nous souvenons ou à ce que nous pensons, et dont nous con-
sidérons que cela se situe dans notre conscience, et non à l’extérieur
de nous.
• La phénoménologie considère que la conscience est toujours conscience
de qch et étudie les différentes formes que peut prendre ce qch (imag-
ination, perception, etc.) pour étudier les différentes forme de con-
science qui en résultent.
• L’imagination considère son objet comme absent, tandis que la per-
ception considère son objet comme présent et extérieur à la conscience.
Husserl, dans Chose et Espace, parle d’un objet qui se tient là sur le
mode de la présence-en-chair-et-en-os.
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• Mais là encore, tout cela pourrait venir de nous. C’est nous qui con-
sidèrons l’objet perçu comme présent.
• Il y a cependant d’autres différences entre ce que je perçois et ce
que j’imagine ou ce que je pense : Textes de Husserl et de Sartre
(français, xxe siècle).
• Lorsque je conçois une chose dans mon esprit, je la connais immédia-
tement tout entière, j’appréhende toutes ses facettes, toutes ses pro-
priétés d’un seul coup. Rien ne peut m’échapper puisque l’objet n’est
que ce que j’en pense, il n’a donc aucune autre propriété que celles
que je lui attribue.
• Lorsque, au contraire, j’ai conscience d’une chose comme perçue, lorsque
je la vise comme étant extérieure à ma conscience, je dois en faire le
tour, c’est-à-dire percevoir successivement ses différentes facettes. Il
me faut alors unifier par la conscience ces différentes facettes que je
vise comme étant les différentes facettes d’un seul et même objet per-
manent, il me faut en faire la synthèse (poly analyse/synthèse). Du
point de vue de la connaissance, un certain nombre de problèmes peu-
vent se poser dans le cas de la perception :
– Je n’ai accès qu’à une succession d’impression mais je considère l’ob-
jet comme constant, comme permanent. Je pourrais me tromper : il
pourrait être changeant.
– Je pourrais également me tromper en groupant les sensations. Qu’est-
ce qui me prouvent en effet qu’elles vont bien ensemble, qu’elle provi-
ennent d’un même objet qui a une unité ?
– Je n’ai que des aperçus de l’objet, que des points de vue sur lui.
Par exemple, quand on regarde un cube, les côtés n’apparaissent
pas égaux. Il m’en faudrait une infinité pour être sûr de bien avoir
cerné l’objet, de lui attribuer les bonnes propriétés.
– Pour la même raison, on ne peut pas connaı̂tre tous les détails de
l’objet, soit parce qu’ils sont trop nombreux, soit parce qu’ils nous
sont inaccessibles (trop petits par exemple).
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chose qui existe réellement de cette manière hors de nous. Lorsque nous
percevons la matière, nous ne pouvons pas séparer totalement la matière
perçue de l’esprit qui la perçoit.
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Ce qui fait que j’ai confiance dans mes théories, c’est qu’on n’a pas un
système isolé constitué d’un ensemble d’observations et d’une théorie qui a
la fois les explique et et permet de les interpréter, ce qui risquerait de mener
à une circularité : j’observe le phénomène grâce à la théorie qui l’explique et
le phénomène ne peut donc jamais être en contradiction avec elle, mais une
imbrication de plusieurs théories et plusieurs observations. C’est de
la cohérence de toutes nos théories avec toutes nos observations que résulte
notre confiance dans la science. Exemple de Hertz : on a pu rectifier l’er-
reur parce que la théorie électromagnétique de Maxwell fonctionnait dans de
nombreux domaines et qu’on n’était pas prêt à l’abandonner si facilement.
En comprenant que les ondes radios pouvaient se refléter sur les murs du
laboratoire et interférer entre elles, on a pu compléter nos connaissances
théoriques tout en expliquant le phénomène qui se produisait dans le lab-
oratoire de Hertz. Cela montre qu’en adaptant mutuellement nos théories
et nos observations, i.e. en interprétant mieux nos observations grâce à nos
théories et en modifiant nos théories grâce à nos observations, on peut se
situer non pas dans un cercle vicieux où l’observation est forcément en ac-
cord avec la théorie, puisque c’est la théorie qui permet d’interpréter l’ob-
servation, mais dans un cercle vertueux où théorie et interprétation des
observations s’améliorent mutuellement en se modifiant quand elles sont en
désaccord. Pour que cela fonctionne, il faut qu’une observation mette en
jeu plusieurs théories et qu’une théorie puisse expliquer plusieurs
sortes d’observations. C’est en effet dans la confrontation, et en ne faisant
varier à chaque fois qu’une théorie ou qu’une interprétation d’observation
qu’on pourra trouver où réside l’erreur. Exemple pour Hertz, on ne remet
pas en cause toute la théorie électromagnétique, mais seulement le fait que
les ondes radios ne se réfléchissent pas sur les murs du laboratoire.
On a d’autant plus confiance dans les théories qu’elle prédisent un
grand nombre de phénomènes en dehors de ceux pour l’explication
desquels elles ont été élaborées. Plus une théorie permet d’expliquer de
phénomènes, plus on a confiance en elle, mais aussi et surtout, plus elle
peut en prédire qu’on n’a encore jamais testés, plus on va avoir confiance,
car on ne pourra pas dire qu’on a « bidouillé » la théorie pour qu’elle ex-
plique des phénomènes qu’on constatait. Relativité générale prédisait que les
rayons lumineux qui viennent des étoiles sont déviés par le soleil. On n’avait
jamais pensé à regarder ça avant la relativité générale, et ensuite, on ne
l’avait jamais vérifié parce qu’on ne voit pas les étoiles en même temps que
le soleil. L’éclipse de 1919 a permis d’observer cette déviation des rayons
lumineux issus d’étoiles lointaines et cela a été considéré comme une impor-
tant confirmation de l’ensemble des hypothèses rassemblées dans la théorie
de la relativité générale. Elle a conduit un grand nombre des physiciens de
l’époque à accorder leur confiance à cette théorie.
Le fait qu’on ait plus confiance dans des théories qui prédisent plus de
phénomènes explique qu’on applique le principe d’économie et qu’on préfère
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3.2 Les deux positions extrêmes : tout est esprit ou tout est
matière
3.2.1 Tout est esprit
Idéalisme, que nous avons déjà vu.
Le mécanisme et le réductionnisme
• La position inverse, le mécanisme, consiste à dire qu’on peut ramener
tous les phénomènes vitaux à des phénomènes mécaniques et qu’il est
inutile de postuler des principes occultes, mystiques, comme le principe
vital.
• Descartes, animal-machine, Discours de la méthode, 5 e partie. L’or-
ganisme vivant serait constitué sur le modèle de l’horloge, avec un
agencement de parties, de pièces mécaniques, de rouages, et une ex-
plication de tous les phénomènes par contact.
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• Il n’y aurait rien de plus dans le vivant que dans l’inerte. Le vivant
suivrait totalement les lois de la mécanique. Quelle différence alors
entre le vivant et la machine ? Simplement la complexité.
Ce qui ne semblera nullement étrange à ceux qui, sachant
combien de divers automates, ou machines mouvantes, l’in-
dustrie des hommes peut faire , sans y employer que fort peu
de pièces, à comparaison de la grande multitude des os, des
muscles, des nerfs, des artères, des veines, et de toutes les
autres parties qui sont dans le corps de chaque animal, con-
sidéreront ce corps comme une machine qui, ayant été faite
des mains de Dieu, est incomparablement mieux ordonnée,
et a en soi des mouvements plus admirables, qu’aucunes de
celles qui peuvent être inventées par l’homme.
Descartes, Discours de la méthode, 5 e partie.
• Pour Descartes, il serait impossible de faire la différence entre une
machine compliquée et un animal. La frontière ne se situe pas entre
l’animal et la machine, entre le vivant et l’inerte, mais entre l’animal
sans raison et l’homme qui possède la raison. On comprend bien que
pour lui, l’esprit n’est pas réductible à la matière, puisque, comme
nous l’avons vu, il distingue la substance spirituelle de la substance
corporelle. Deux arguments pour séparer l’homme, qui possède la rai-
son, de l’animal :
1. On peut bien concevoir une machine qui parle, mais pas une
machine qui serait capable d’arranger à l’infini ses paroles pour
les adapter à tout ce qui se dira en sa présence, pour déclarer aux
autres ses pensées.
2. Les machines font certaines choses beaucoup mieux que nous,
comme l’horloge qui compte le temps beaucoup mieux que nous,
mais elles ne peuvent pas s’adapter à l’infini, pour faire face à
toutes les occurrences de la vie.
• Pourtant, le réductionnisme, qui hérite du mécanisme cartésien, va
consister à vouloir réduire non seulement le vivant, mais aussi l’esprit
au physico-chimique, aux lois et propriétés de la physique et de la
chimie. Le réductionnisme est une position qui consiste à dire qu’on
peut ramener les phénomènes d’un niveau de complexité supérieur
aux lois et phénomènes du niveau inférieur. La sociologie se réduit à
la psychologie, qui se réduit à la biologie, qui se réduit à la chimie,
qui se réduit à la physique. Ce qui signifie que, en définitive, les lois,
processus et entités de la physique permettent de tout expliquer.
• Tenir une telle position, c’est défendre l’idée selon laquelle la pensée
se réduit à des interactions physiques et chimiques dans le cerveau.
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des cellules, qui étudie les molécules. C’est une branche réductionniste
de la biologie. Seule différence : les méthodes, parce que se situe
dans des organismes vivants.
2. L’évolutionnisme, qui ne cherche pas à dissocier l’organisme en
ses constituants, mais au contraire à l’étudier dans son milieu
et comme élément d’une population. Il s’agit d’étudier les rela-
tions entre l’organisme et son milieu. Les organes ne sont par
exemple plus étudiés par leurs constituants mais par leurs fonc-
tions, en fonction de leur adaptation au milieu, plusieurs archi-
tectures physiques pouvant remplir la même fonction. Le rein des
dauphins n’a pas exemple pas du tout la même structure que le
rein d’un chimpanzé, mais il a la même fonction. Ou branchies vs
ou poumons.
• On ne comprendrait pas grand chose à l’évolution en restant au niveau
de la cellule, de même qu’on ne comprend pas grand chose au fonc-
tionnement d’un moteur de voiture en restant au niveau des molécules
métalliques.
• On doit avoir le même type de pb entre microéconomie et macroéconomie :
est-ce que en rester aux comportements des individus permet vraiment
de comprendre les phénomènes macroéconomiques ?
Nous connaissons beaucoup de faits sur ce qui se passe effec-
tivement dans le cerveau, mais nous n’avons toujours pas d’-
analyse théorique unifiée de la manière dont ce qui se passe au
niveau de la neurobiologie permet au cerveau de faire ce qu’il
fait, pour ce qui est de causer, de structurer, d’organiser notre
vie mentale. (...) Peut-être s’apercevra-t-on finalement qu’essayer
de comprendre le cerveau au niveau des neurones est aussi vain
qu’essayer de comprendre le moteur d’une voiture au niveau des
molécules métalliques du bloc-cylindres.
Searle, Le Mystère de la conscience, 1999.
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Bilan à noter Les deux positions que nous avons envisagées (considérer
que l’esprit est quelque chose qui vient s’ajouter à la matière ou considérer
qu’il n’est rien d’autre que le résultat d’interactions physico-chimiques qui
se produisent dans le cerveau) ne sont en réalité pas exclusives l’une de
l’autre. La science contemporaine nous permet de penser l’esprit comme un
phénomène émergent. De l’organisation complexe d’éléments physiques dans
le cerveau résultent des propriétés nouvelles qui n’existent pas au niveau des
éléments physiques.
Conclusion
Le fossé creusé entre l’esprit et la matière par le dualisme nous empêchait
de comprendre quelle pouvait être la relation entre l’esprit et la matière.
Nous nous sommes alors demandé s’il était possible de dépasser la séparation
entre l’esprit et la matière. Pour cela, il nous a d’abord fallu comprendre
comment nous pouvions, par notre esprit, connaı̂tre la matière extérieure à
l’esprit. Nous avons alors vu qu’il nous était possible de faire la différence
entre notre pensée, notre imagination, et le monde réel, matériel, qui nous
est extérieur. Notre connaissance de ce qui nous est extérieur n’est en effet
pas immédiate, mais nécessite de faire le tour l’objet, d’apprendre l’objet.
Nous avons donc bien accès au monde extérieur, mais avons-nous accès à
ce monde tel qu’il est ? Nous avons vu qu’il était impossible de séparer le
monde tel qu’il est de l’interprétation que nous en faisons. Notre problème
s’est alors transformé : il ne s’est plus agi de se demander comment dépasser
la séparation entre l’esprit et la matière, mais au contraire de se demander
comment démêler l’esprit et la matière. Existe-t-il quelque chose comme un
esprit qui serait différent de la matière, qui ne lui serait pas intimement lié ?
Le physicalisme non réductionniste semble pouvoir donner une réponse au
moins provisoire à ce problème. Il admet que l’esprit n’est bien composé
que des éléments physiques du cerveau, mais ajoute que la complexité de
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Troisième partie
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4 cours : L’inconscient est-il ce qui
en moi m’échappe ?
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