Sunteți pe pagina 1din 3
Stéphane Mallarmé (1842-1898) Apparition, Poésies (1887) Séraphins (v. 1) anges Archet (v. 2) : en musique, baguette droite (auttefois recourbée en forme d’arc, d’oit son nom) sur laquelle sont tendus des crins qui servent A faire vibrer les cordes de divers instruments de musique (violon, contrebasse, violoncelle...) Violes (v. 3) : instruments de musique & cordes Corolles (v. 4) : ensemble des pétales d’une fleur Déboires (w. 8) : déception ou échec La réputation d”hermétisme est systématiquement appliquée & la poésie de Mallarmé. Ce dernier révait d'une poésie pure, od le podte « céde initiative aux mots » (recueil de Poésies, para en 1887). Pourtant ce qualificatif d’hermétisme ne convient pas aux premiers poémes de cet auteur, encore inspirés du romantisme et de Baudelaire. Les circonstances de Pécriture d’« Apparition » sont obscures. En effet, Mallarmé le confie & Verlaine en 1883 pour la publication des Poéres maudits, mais en 1887, dans La Revue Indépendante, il le place entre les poemes « Le Guignon » et « Placet futile» qui datent de 1862. Mallarmé aurait alors eu une vingtaine d’années lors de sa composition. On n’est pas sir non plus de la femme a qui ce poeme est dédié: certains commentateurs penchent pour la fiancée du poste, Maria Gerhard, d’autres évoquent une dette envers son ami le poéte Henri Cazalis (podte symboliste). D’aprés une lettre de Mallarmé datée de juillet 1862, on apprend que Cazalis avait demandé un poéme 4 Mallarmé qui lui avait promis. Cazalis était épris dune jeune anglaise Etie Yapp, et dans une lettre de 1863, il rappelle sa dette & Mallarmé : «... je te rappellerai une dette, ces vers, ce portrait que tu mavais promis ». Le potme « Apparition » pourrait alors étre la réponse a cette lettre et dater de l’été 1863. Quelle que soient les circonstances réelles de la composition, le poéte y évoque une rencontre amoureuse. On peut distinguer deux moments : d’abord I’évocation des circonstances (v. 1-9), puis le récit (v. 10- 16) de cette rencontre. Nous allons voir que les temps et l’ordre du récit obéissent de maniére trés souple a la fois a la logique de la remémoration et a celle de l’apparition. Nous étudicrons également comment la forme poétique permet de créer un véritable hymne A la femme aimée. A travers 16 alexandrins disposés sans strophe et aux rimes plates, selon un schéma propice au déroulement du récit, Je poéme évoque une rencontre amoureuse. Les temps employés, imparfait (1-10: «s'attristait, tiraient, c’était, s'enivrait, j'errais», et 15: «passait ») et le passé composé (11-13 : « tu m'es apparue, j'ai cru»), sont ceux du récit authentique, du souvenir raconté. Le passé composé accentue la composante autobiographique. Le titre « Apparition » a des connotations religieuses : on pense a l’apparition de la vierge Marie, ce qui met la femme aimée sur le plan de la divinité. Mais la comparaison finale est paienne : il s’agit de la fée des contes => comparaison fréquente : cf. déja Victor Hugo, Contemplations XXI, « Elle était déchaussée, elle était décoiffée... » : «je crus voir une fée », w2. I. Les circonstances (v. 1-9) Le début du poéme (v. 1-4 et 6-9) présente les circonstances de la rencontre. Il s’agit @un soir : « la lune » (v. 1; ef «dans le soir », v.12) => théme de la belle crépusculaire. Une atmosphere de vision céleste 4 connotations religieuses baigne les premiers vers. Outre le titre, qui oriente Ia lecture du poéme, on peut relever : « séraphins » (v. 1), « azur» (v. 4), « béni » (v. 5). Onala sensation que cette peinture céleste se situe hors du temps. Mallarmé ne décrit pas, il exprime des impressions. Le poéme est en effet une succession dimpressions dont l'ensemble compose une atmosphere suggestive. L’état d’ame qui régne dans cette premiére partie est la mélancolie: « songerie, martyriser » (v. 6). « parfum de trisiesse » (v. 1), « Réve » (W. 9), « J'errais » (v. 10). L’allitération en {m] du vers 6 insiste sur la soufirance qui en découle : « Ma songerie aimant & me martyriser », de méme que lallitération en [k] et la dérivation de « cueillaison /cueilli » au vers 9 : «La cueillaison d'un Reve au coeur qui U'a cueilli ». La nature et univers semblent de connivence avec cet état d”Ame (théme romantique par excellence) : « La lune s’attristait, Des Séraphins en pleurs / révant » (v. 1), « mourantes violes» (v. 3), «sanglots» (wv. 4). La time riche des deux monosyllabes « pleurs / ‘fleur » (v. 1-2) forme une paronomase [figure qui consiste a rapprocher dans une phrase des paronymes, c’est-d-dire des mots presque homonymes, qui se prononcent presque pareil] qui montre I'adéquation entre les différents éléments de l’univers. Cette paronomase aux deux premiers vers est particuligrement signifiante, car elle détermine la double tonalité, heureuse et mélancolique, du poeme. Les fleurs sont rappelées sémantiquement par le mot « corolles » (v. 4), placé lui aussi ala rime. Ces deux mots évoquent a la fois des sensations visuelles et olfactives (ef. aussi v. 7 « parfum de tristesse »). D'ailleurs, en ce début de poéme, de nombreux sens sont en éveil : sensations tactiles (« 'archet aux doigts », v. 2; glissant sur l'azur des corolles », v. 4) et surtout sensations visuelles et auditives. La rime « viole / corolles » (wv. 3-4) est non seulement originale par le choix des mots, mais elle est aussi signifiante par la synesthésie entre l’ouie et la vue. Et Vassonance en [a] des vers 3 et 4 traduit la sonorité plaintive des « mourantes violes» (v. 3), dont la longueur est renforcée par l’enjambement : « tiraient de mourantes violes / De blanes sangiots glissant ». Les circonstances de la rencontre sont interrompues par une parenthése au vers 5 : ce vers constitue a la fois une annonce de la rencontre qui sera développée & partir du vers 10, et une ellipse puisque I’épisode du baiser lui-méme ne sera pas repris. Dans ce vers, les termes dissyllabiques « béni » et « baiser » sont associés par leur sonorité en « b » ainsi que par leur place et leur accentuation identique dans les deux hémistiches, fagon pour le podte d’exprimer son bonheur. La encore, la rime qui associe « baiser» (v. 5) et «martyriser» (v. 6) est signifiante : les deux termes, qui s’opposent sémantiquement, mettent en valeur le renversement radical qu’a constitué la rencontre de la bien-aimée dans la vie du poéte. Ce méme renversement sera rappelé par la rime « cueilli / vieilli » aux v. 9-10. IL Le récit de la rencontre (v. 10-16) Si la premiére partie du poéme faisait une large place la mélancolie, la seconde partie laisse entrevoir la joie du poste, joie lige & la rencontre de la femme aimée. D'ailleurs, cette seconde partie n'est composée que de rimes vocaliques en (iJ, [y], [éJ. ce qui contribue & sa grande musicalité, Elle n’est composée que d’une seule phrase, qui s’étend sur 7 vers : son rythme, ample, créé aussi par les enjambements successifS, figure l'importance de la révélation, effet de l’apparition sur le poéte et refléte le suspense du souvenir dans le temps. La tension entre la syntaxe et le vers se manifeste : = dans le double mouvement de rejet et de contre-rejet des vers 11 et 12 (« dans la rue / Et dans le soir»), qui met en relief les circonstances spatio-temporelles de apparition. La trivialité de 1a rue s’oppose au romantisme du soir. Le rappel de ces circonstances spatio-temporelles permet de suspendre momentanément le souvenir : apparition n’intervient qu’au second hémistiche du v. 19, soit trois vers aprés le début de la phrase (Cf. Du Bellay « Déjé la nuit en son pare amassait... », L Olive, LXXXIII, pour le procédé) ; = par le rejet de « Pessait » (v. 14-15), qui dramatise l’apparition de la « fée » du souvenir d’enfance. Deux souvenirs se télescopent alors, celui de l’apparition de la femme (en réalité) et celui de l’apparition de la fée (dans les réves d’enfant) => la femme symbolise done aussi I’enfance retrouvée. ~ par les variations rythmiques qui font alterner des rythmes irréguliers pour les phases @ apparition au v. 11 (1+543/3) et au v. 14 (3+5+4, suivi du rejet) et des rythmes plus réguliers pour les phases de contemplation au v. 13 (4#2/3+3) et au v. 16 (2+4/3+3). Les vers 10 a 16 s’attardent sur le récit de la rencontre, avec ses étapes traditionnelles : - Le rappel des circonstances : le v. 10 reprend par le « done » les vers précédents et rappelle la mélancolie du potte. I] est comme plongé en lui-méme et ne voit pas ce qui l’entoure : «Vel rivé sur le pavé vieilli ». L’allitération en [v] souligne son enfermement en lui-méme, son indifférence au monde extérieur. = L’importance du regard : « apparue » (v. 12), « cru voir » (v. 13). La paronomase a la rime (rime riche) « la rue / apparue » (v. 11-12) souligne également "importance de la vision dans cette rencontre. La conjonction de subordination « Quand » (v. 11) marque 'irruption de la temporalité, elle souligne la rupture entre I’avant et I’aprés de la rencontre. La tristesse du « pavé vieilli » (v. 10) s’efface devant le rayonnement d’un nouveau soleil (v. 11). L’image de la femme aimée évoque la divinité, la gloire et la splendeur : « avec du soleil awe cheveux » (v.11) ; «au chapeau de clarté » (v. 13). La jeune femme est comme un astre, on assiste 4 un lever du soleil, alors que le véritable soleil est déja couché. - L’effet produit par l’apparition (v. 14-16) : la reconnaissance de la fée des réves d’enfants. La femme aimée incarne aussi la douceur et la maternité, comme le suggére l’expression « enfant gité» (v. 14), et encore la générosité : « laissant toujours de ses mains mal fermées / neiger » (v. 15-16). L’adverbe « toujours » insiste sur cette derniére qualité. Cette femme a un, double aspect, a la fois : © figure féerique (« /a fée », v. 13) et familiére («en riant », v. 12. Cf. La Nymphe de « Déja Ta nuit en son pare amassait...» de Du Bellay, L’Olive, LXXXII : « Je vis sortir [...] / une Nymphe en riant », v. 10-11), ©. irréelle et bienfaisante. Sa nature divine et cosmique se révéle a travers ses cadeaux : « bouguets d'étoiles parfumées » (v. 16). Les deux demiers mots a la rime, « fermées » (v. 15) et « parfumées » (v. 16), font écho par leur sonorité en [f] au mot « fée » du v. 13, et parachévent ainsi I"hymne a la femme aimée. Grace au travail ciselé des vers, le lyrisme n’est pas triomphant, mais feutré, lié surtout aux sonorités. Conclusion Le theme de I’évocation de la femme est done traité avec pudeur et délicatesse. Le travail de la forme poétique apparait indissociable d’une exigence de perfection spirituelle. Le lyrisme n'est pas absent de la poésie mallarméenne, mais il y est volontairement retenu, rendant ainsi le miracle d’un instant parfait et I’équilibre entre la contemplation et le souvenir denfance. Admirable de grice et de mélancolie feutrée, ce poéme semble illustrer les propos de Mallarmé a son ami Cazalis : « Tu me demandes des vers, fiere... je te les promets exguis. Je ne peut pas faire cela d'inspiration : la turbulence du lyrisme serait indigne de cette chaste ‘apparition que tu aimes, Il faut méditer longtemps : l'art seul, limpide et impeccable, est assez chaste pour la sculpter religieusement » (Lettre de Mallarmé & Cazalis, juillet 1862).

S-ar putea să vă placă și