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Un cadeau personnalisé

« - La compréhension du Moi en rapport à Mon environnement, qu'elle soit naturelle ou


induite, progressive ou imposée de manière brutale, n'exempte en rien la nécessité de
l'expérience pour atteindre la connaissance.
- Seriez-vous en train de m'expliquer qu'il serait possible de savoir sans connaître ? J'en
suis perplexe. »
Extrait des dialogues entre Merlin et l'archevêque de Canterbury

Le vide. Le néant. Rien.


Je ne sais pas comment qualifier ce qui m'entoure. Je sais que je suis moi. Mais de
ce qui n'est pas moi, je ne sais rien.
Ah, si ! Quelque chose enfin … le temps. Je sais que le temps passe. Je ne sais pas
à quelle vitesse, ni depuis quand. Mais « avant » n'est pas pareil que « peut-être après ».
Alors c'est qu'il y a au moins le temps en dehors de moi.
Et s'il y a le temps, il y a l'attente. L'attente qu'il y ait autre chose que le temps.
L'attente de pouvoir mettre des mots sur ce qui n'est pas moi.
Mais pour l'instant, c'est le vide, le néant. Il n'y a rien.

Là ! Quelque chose ! Je sens quelque chose !


C'est comme une pression. J'ai un corps. Et je sens une pression sur ce corps. Elle
est légère. Elle balbutie. Elle me dit que j'existe en dehors du vide. Quelqu'un peut-être
existe en dehors de moi ? Et ce quelqu'un a aussi un corps. Il exerce une pression sur le
mien. Je sens cet appui, presque fortuit.
L'Autre hésite. Il cherche mon corps. Non, cela n'a pas de sens. Il explore mon corps.
L'appui se déplace. Je sens un mouvement. Et mes contours prennent forme. Grâce à
cette sorte de palpation systématique de toute mon anatomie, je devine au fur et à mesure
les limites de mon enveloppe charnelle. J'ai un torse et des membres, et une tête aussi. Je
sens que tout cela s'articule dans un bel ensemble.
Mon corps est capable de se mouvoir. Il y a donc de l'espace autour de moi. Mon
corps peut bouger dans cet espace. D'ailleurs, il bouge, je le sens. Mais je n'en suis pas le
moteur. C'est peut-être l'Autre qui dirige la manœuvre ? Mes bras se lèvent et d'un seul
coup, je sens mes mains. La pression se fait plus faible. Je ne la sens presque plus. Mais
ça y est … j'ai des doigts et des ongles. L'opération se répète avec mes jambes. C'est
merveilleux cette sensation de mouvement par le jeu de mes muscles, grâce au soutien
d'une structure osseuse. Je suis fait de chair et de sang. Je suis vivant !
Un frottement lent et régulier, une sorte de caresse voluptueuse … hi, hi ... ça
chatouille. Certaines zones de mon corps ne réagissent pas comme les autres. Elles sont
plus sensibles. Je frémis. Je découvre une autre texture que celle de ma peau. J'aime
bien. Mais il faut croire que l'agréable n'est que de courte durée. Cette douceur fugitive est
trop vite remplacée par une surface lisse mais dure, un contact brut. Aïe ! Cette masse
rigide fait mal. Tiens ! La douleur, c'est nouveau comme sensation.
Et puis il y a de la chaleur, dans cette direction. C'est une enveloppe languissante, un
cocon de bien-être. Hé ! Pas trop chaud quand même ! Ça brûle là ! De l'autre côté, c'est
frais. Une petite brise agréable refroidit la fournaise. Mince, là encore, c'est temporaire. Le
vent se transforme en courant glacé.

− Papa, qu'est-ce que tu fais ?


− Rien de spécial, ma chérie. Je travaille. Ne rentre pas ! Tu sais bien que mon atelier
t'est interdit. C'est dangereux, surtout pour les petites filles qui ne savent pas ce qu'elles
font. Si je te revois dans les parages, j'en parle à ta mère !
− Mais Papa, c'est Maman qui m'envoie te chercher ! Elle dit qu'il est tard et qu'elle a
faim … et euuhh … que si tu ne te dépêches pas, on va commencer sans toi.
− Oh pardon, ma puce. Je n'ai pas vu le temps passer. Je vous rejoins dans un
instant. Allez ! File !

Plus rien. L'Autre n'est plus là. Mon corps, lui, reste, mais ne bouge plus. A part ce
rythme. Oui, cette pulsation là, sur mon cou … et mon cœur. Je crois que je respire aussi.
Je respire l'air de l'espace autour de moi. Il est de plus en plus froid. Je commence à
trembler. Je ne sens plus mes doigts. Après ce qui me semble être une éternité, ma
texture change. Je ne tremble plus. Je perds de ma souplesse.

− Et merde ! J'ai oublié de couper la baisse automatique du chauffage ! Foutu


programmateur ! Quel imbécile je fais. Il fait moins de cinq degrés ici. Je suis revenu juste
à temps. Un peu plus et il fallait tout recommencer. Ça m'apprendra à m'autoriser des
grasses matinées en plein milieu d'une manipulation !

Une chaleur humide m'enveloppe complètement. La souplesse regagne doucement


mes membres. La douleur aussi. Fulgurante. C'est mon sang qui recommence à circuler
laborieusement dans mes veines. L'Autre est revenu. Je me demandais s'il m'avait oublié.

Il ouvre ma bouche. Mais, qu'est-ce qu'il veut ? Il place une goutte de liquide sur ma
langue. Pouah ! C'est amer ! Si je le pouvais, je recracherais bien le tout. L'Autre s'active.
Est-ce que je serais un cobaye ? Il continue en m'appliquant une série de mixtures
différentes, à des températures variables. Certaines sont agréables, d'autres infectes. Il y
en a des vraiment originales, qui font monter la température. Certaines explosent. Une
seule goutte suffit à mettre ma bouche entière en feu. Certaines pétillent et me chatouillent
le palais. D'autres encore collent, poissent, mais sont si douces et si sucrées.
Je commence à avoir du mal à faire la différence entre les mixtures. J'ai du mal à tout
dissocier. Je mélange tout. Et puis je sens que mon estomac remonte. C'est presque
douloureux. J'ai le hoquet. L'Autre s'arrête subitement.

− Bon sang ! Il va m'en mettre partout. C'est dégoûtant ! J'ai peut-être un peu trop
forcé la dose.
− Papa ?
− Quoi ?! Tu es encore là, toi ?
− Ça sent pas bon ici ! T'es malade ? Maman a dit que tu avais trop mangé hier soir.
− On appelle ça faire honneur au repas. Et puis je t'ai déjà dit de ne pas traîner ici !
− Je cherche Ticoon.
− Il n'est pas là ! Enfin, essaie d'utiliser tes neurones pour une fois ! Premièrement,
c'est une mauvaise excuse pour essayer de voir ce que je fais. Deuxièmement, vu que tu
n'as pas le droit d'entrer ici, je ne vois pas ce qu'il y ferait. Troisièmement si tu faisais un
peu plus attention, tu ne le perdrais pas aussi souvent.
− Mais Papa ! Ça fait deux jours qu'il a disparu maintenant.
− Cherche plus fort alors, mais ailleurs. Papa travaille. Allez ! Ouste !

L'Autre passe quelque chose de chaud et humide sur le bas de mon visage et le haut
de mon corps.

− Bon ! Te voilà un peu plus propre maintenant. Toi aussi tu as trop mangé hein ?! Je
suis un brin trop enthousiaste peut-être ? Mais tu vas t'en remettre. T'es costaud. Allez, on
passe à la suite. Faudrait pas que je commence à prendre du retard moi.

Là ! Un mouvement, près de mon nez. Mais qu'est-ce qu'il me prépare encore ?


Chaque moment passé avec l'Autre est une expérience nouvelle. Des fois je m'en
passerais bien. Mais ce n'est pas comme si j'avais le choix …
Ah ! C'est écœurant ! C'est … une odeur ? Beurk ! Elle est partout. Elle vient de moi
je crois. Heureusement qu'elle est de plus en plus faible. Ouf ! Elle était vraiment
insupportable. Quant à ce léger courant d'air, il est suave, lourd. Cet autre qui arrive est
presque enivrant. Et ATCHA ! Il pique celui-ci. Il chatouille le cerveau.

− Mais c'est pas vrai ! Voilà que maintenant il se met à m'éternuer dessus ! Qu'est-ce
que c'était que ce flacon ? Du poivre. Mince, je croyais l'avoir rangé au bout. Pas étonnant
qu'il réagisse. Avec la dose que je lui ai mis.

Il y a bien d'autres effluves qui arrivent, mais je crois que je ne sens plus rien. On
dirait que je suis tout engourdi. Des gouttes salées s'écoulent de mes yeux. Ce n'est pas
vraiment facile d'apprendre ainsi. L'Autre est un bon professeur, mais pas très tendre.

− C'est bien ma veine, tiens ! Avec mon organisation foireuse, je l'ai saturé. Tant pis !
De toute façon il se fait tard. Et, petit père, si tu ne veux pas une fois de plus te faire
engueuler, tu ferais mieux de te grouiller d'aller au lit. Rien de tel qu'une petite nuit de
repos pour repartir du bon nez ! Ah, ah ! Qu'est-ce que je suis drôle !

Mais où est l'Autre ? J'aime bien quand il est là. Il se passe des choses. J'apprends.
Et puis même si ce n'est pas toujours agréable, ça change du vide … et du froid. L'Autre
est parti. Cela fait un moment maintenant. Je crois que je n'aime pas la solitude. Quand il
n'est pas là, il n'y a ni mouvement, ni goût, ni odeur. L'espace est fade sans l'Autre.
Et puis finalement, après une longue attente, la ronde des parfums a repris. Cette
fois-ci, je n'ai pas eu mal au nez, ni aux yeux. Certains d'entre eux m'ont bien donné de
petits picotements sur la langue. Mais rien de comparable à ce qui m'avait fait pleurer. Je
crois que c'est parce que j'associe maintenant un goût avec une odeur. Je peux
maintenant percevoir un même élément de plusieurs façons différentes.
Je ne sais pas si l'Autre le fait exprès, mais il y a aussi cette odeur de fond,
persistante. Elle est très caractéristique. Tiens, elle a disparu suite à un mouvement de
l'Autre. J'ai compris ! C'est son odeur, une sorte de signature personnelle. Est-ce que moi
aussi j'ai une odeur ?

− Dis-moi, mon cœur, tu comptes rester longtemps là-dedans ?


− Regarde ! J'avance bien, elle sera ravie ! Ça fonctionne à merveille pour l'instant.
Croise les doigts pour que ça continue jusqu'au bout.
− C'est très bien … mais si tu ne veux pas qu'elle te boude le moment venu, tu ferais
bien de t'en occuper un peu entre-temps. C'est les vacances, mais tous ses amis sont
partis. J'ai l'impression qu'elle s'ennuie un peu, surtout sans Ticoon.
− C'est bon, j'ai compris. Je vais l'emmener se balader un peu.

Et le temps passe. La solitude est bien pesante. Elle dure. Surtout quand on ne sait
pas pour combien de temps. Mais, je le sens. Le revoilà ! Tu ne me surprendras plus
maintenant que je sais identifier ta trace. Sa main, c'est bien une main, prend la mienne et
la secoue légèrement. Est-ce une façon de communiquer ? Je n'ai rien appris avec ce
geste. L'Autre est vraiment étrange.

− Salut l'ami !
Aarrgghh ! Qu'est-ce que c'est que ça ? L'Autre me … parle. Nous allons enfin
pouvoir communiquer. Pour l'instant c'est un peu à sens unique, mais j'apprendrai
sûrement bientôt à parler aussi.
− On ne se connaît pas bien pour l'instant, mais ça va venir. Je suis ton créateur. Tu
m'as probablement déjà identifié.
Tout s'éclaire ! L'Autre est en fait mon … créateur. Je ne serais que le résultat d'une
expérience, le fruit de son imagination ! Moi, je préfère l'idée de professeur et d'élève. Il
m'apprend plein de choses. Et puis, après tout, j'ai une conscience. Je ne veux pas être
juste une création, une chose. Je suis moi, même si je ne sais pas encore qui ce « moi »
est. En attendant, je l'appellerai Professeur.
− Comme tu l'as sûrement constaté, je suis en train de t'enseigner quelques petites
astuces pour reconnaître ton environnement. Je suis désolé si le cours accéléré est
parfois un peu désagréable, mais tu dois être prêt pour demain soir. C'est le grand jour.
Aujourd'hui, je vais t'éduquer un peu l'oreille. Et demain, je te peaufine avec le dernier
sens, la vue. Ça te plaira, j'en suis sûr. Mais bon, on fait les choses dans l'ordre,
d'accord ?
Bien sûr que je suis d'accord ! Si je le pouvais, je te le dirais de vive voix. J'aimerais
bien savoir quand je pourrai parler. Pas avant demain soir, je parie.
− Alors on va commencer par une série de petits exercices auditifs. Je vais te passer
des bandes sonores qui contiennent les fréquences audibles pour l'homme. Je ne sais pas
exactement jusqu'où vont tes semblables, alors après, je déborderai un peu dans les
aigus et les graves.
Après un petit « clic », j'ai compris ce qu'il entendait par « bandes sonores ». Ce sont
juste des sons. Un peu comme s'il disait le même mot, « ooooo », encore et encore, mais
de plein de façons différentes. Bizarre. Enfin bon, c'est lui le Professeur.
− Voilà, c'est fini pour la journée. Je t'abandonne pour la nuit. Je n'oublie pas de
laisser le chauffage et puis, tiens, je vais te brancher la radio aussi. Tu pourras t'entraîner
sur la musique. Bonne nuit, à demain.
Cette fois-ci je l'ai entendu sortir de l'espace. Il est donc possible d'être ailleurs. Il
existe d'autres lieux peut-être. Il ne disparaissait pas, il partait, tout simplement. Il y a
maintenant un enchevêtrement de sons qui viennent de cet autre coin. Ce doit être la
musique dont il m'a parlé. Je commence même à reconnaître des rythmes, des
redondances, et à apprécier.

Il y a un nouveau bruit en dehors de la pièce : toc, toc …


− Papa ? T'es là ?
Un silence. Je n'entends plus que la musique.
− Allez ! Je sais que tu es là. Ouvre-moi … s'il te plaît. Je veux te montrer quelque
chose.
Ce n'est pas le Professeur. C'est une voix plus aigüe, plus mélodieuse et féminine,
comme dirait l'Autre de la radio. Il y a plein d'Autres, pas seulement le Professeur. J'ai hâte
d'échanger avec eux pour voir qui ils sont vraiment. Des bruits de pas … elle s'éloigne.
Dommage. Il me reste encore la radio pour passer le temps.

Le Professeur rentre violemment dans la pièce. Il semble tout excité. Son souffle est
court. Il respire fort. Son odeur est plus marquée aussi. La porte claque.
− Non mais tu te rends compte de ce que je dois faire pour toi ! Non, hein ! Je suis
obligé de mentir à ma propre fille. Comme s'il était crédible de mettre un minuteur sur la
radio pour qu'elle s'éteigne toute seule. Tu as de la chance qu'elle soit si jeune et naïve.
Sinon, j'aurais dû revenir pour tout éteindre. Et tu aurais passé une nuit de plus tout seul.
Résultat, je me suis fait passer un de ces savons … bah !! Tu t'en fiches, hein ?
Il a l'air de s'inquiéter pour moi. C'était bien la radio. J'aimerais pouvoir le remercier
de l'avoir laissée. Plus tard peut-être. Quand je pourrai, je lui demanderai de m'emmener
avec lui. Ce n'est pas drôle de rester seul. Je voudrais savoir ce qu'il y a de l'autre côté de
la porte.
− Passons. Aujourd'hui tu vas en voir de toutes les couleurs. Je t'ai concocté un
programme aux petits oignons.
Je sens qu'il place sur moi un objet froid, qui repose à la fois sur mon nez et l'arrière
de mes oreilles.
− Ce sont des lunettes spécialement conçues par moi, pour toi. J'en suis très fier. Tu
vas voir défiler plein d'images sur les verres-écrans. Ne t'inquiète pas. Au début, c'est le
spectre - ça fait très arc-en-ciel - mais après, on passe aux choses sérieuses, avec de
l'art, des paysages, ou des petits films. Tu verras bien. Comme ça tu pourras mieux
appréhender les couleurs et les mouvements.
Une petite tape sur ma tête, et j'ai ouvert les yeux. C'est vrai que c'est surprenant.
Après un petit temps d'adaptation, je vois le monde comme s'il était autour de moi.
Pendant que j'apprends, le professeur est affairé à côté. Il chantonne. Il doit être heureux.
− Et voilà ! J'ai terminé ! Et toi ?
Il m'ôte les lunettes du nez, et je le vois pour la première fois. Il est immense ! Ou est-
ce moi qui suis petit ? C'est un homme. J'en ai vu dans ses films.
− Bon alors, je t'explique. Tu vois cette petite fille sur la photo, c'est ma fille. Elle est
très gentille. Tu es son cadeau. C'est elle qui te donnera ton autonomie. Tu pourras alors
bouger et parler. Vous mettrez peut-être un peu de temps à vous découvrir l'un l'autre.
Mais, vu votre passé en commun, je pense que vous devriez bien vous entendre. En
attendant qu'elle te découvre, je vais devoir te laisser dans cette boîte. Je t'installerai le
plus confortablement possible. Elle est vraiment très excitée, alors tu ne devrais pas y
rester très longtemps. Je doute qu'elle fasse la grasse matinée. Courage !
Il m'a finalement déposé sur le fond moelleux de la boîte. Je vois de la lumière par
les petits trous des côtés. La boîte se soulève. Je sors enfin de la pièce. Il me dépose de
nouveau à terre. Et je sens comme une odeur de résineux.

Dans une petite maison, au fond d'une petite banlieue froide et grise, un énorme
sapin occupe la moitié du salon. Il est surchargé de guirlandes multicolores. Les boules de
verre suspendues brillent des reflets des bougies disposées alentour. Une gigantesque
étoile scintille à son sommet. Et un paquet, seul, gît sereinement, à côté d'une basket
rose à la dernière mode, attendant son heure.
Une enfant déboule à toute allure, suivie par des parents souriants. Elle doit bien
avoir cinq ou six ans. Ses longs cheveux châtains sont tout emmêlés. On devine qu'elle
sort du lit.
− Viens Papa, c'est l'heure ! Tu crois qu'il est passé ? … Oohhh … j'ai un cadeau !
C'est pour moi hein ? Je le savais ! T'avais pas le droit de m'embêter !
− Mais oui, ma puce. Tu as été très sage cette année, et comme ce n'est pas mon
cas, je pense que ce paquet est pour toi. Allez ouvre-le !
− Elle est bizarre cette boîte, mais j'aime bien le nœud. Pourquoi il y a des trous sur
le côté ?
− Si tu continues à ne faire que le regarder, tu ne risques pas de le savoir. Et puis
comment le devinerais-je ? Je ne suis pas devin, moi !
La petite fille défait fébrilement le ruban de soie et ouvre doucement son précieux
paquet. Elle jette un œil à l'intérieur et sursaute. Elle commence ensuite une petite gigue
autour du sapin.
− Ticoon !! Papa, c'est comme Ticoon ! Le Père Noël m'a rapporté Ticoon ! Youpi !!!
− Tu es sûre ! Sors-le de la boîte qu'on voit ça. C'est bizarre, d'habitude il ne rapporte
pas les doudous perdus.
− Oh ! Mais il est beaucoup plus lourd que Ticoon. On dirait un vrai lutin, pas un
doudou.
− Suis-je bête ! Je comprends enfin ce mot que j'ai trouvé ce matin. Ce doit être une
formule magique que le Père Noël m'a laissée pour donner la vie à Ticoon. Tu devrais
l'essayer. Ce serait super si Ticoon était vivant.
− C'est quoi, c'est quoi ? Dis-moi la formule !!
Le père s'approche alors de sa fille et lui murmure quelques mots à l'oreille.
− Tu sauras le répéter ?
− Oui oui !
− Alors, dis les mots magiques à haute voix. Si c'est moi, cela ne fonctionnera pas.
C'est ton cadeau. Tu es donc la seule à pouvoir le faire.
La petite prend son air le plus sérieux et s'approche du lutin. Elle se redresse et,
mettant une main sur la tête de Ticoon, déclame très sérieusement :
− Attawi bako maladoudou kezako Ticoon … Aatttchoum !! … monami pourtoujour.

Je suis libéré ! Je peux bouger ! Elle aussi elle est grande, mais moins que le
Professeur. Je vis !
− Bonjour Ticoon ! Je suis Adélaïde. Tu te souviens de moi ? Tu étais mon doudou,
avant. Mais j'ai eu un super cadeau, la formule pour que tu sois vivant. Tu veux bien être
encore mon ami ?
− Aargghh … keuf keuf … Ton ami ? Oui. Je veux bien. Pourquoi pas.
− Viens, je vais te montrer ma chambre.
− Euh … non ! Moi, je sors. J'ai plein de choses à voir.
Le lutin se précipite alors vers la porte, malheureusement non verrouillée. Il disparaît
si vite qu'aucun des trois n'a le temps de réagir. La petite fille s'assoit sur le perron et
commence à pleurer doucement. Son présent est parti.

− Chéri …
− Oui … ?
− Je suppose que l'éternuement d'Adélaïde a fait que la formule n'a pas été prise en
compte en totalité …
− C'est probable …
− Juste une question. Tu avais laissé la radio sur quel canal cette nuit ?
− Le deux, ils ont une programmation très variée. Cela m'a semblé l'idéal. Pourquoi ?
− Il y avait une soirée spéciale sur les dictatures du siècle et les réfugiés, hier soir, sur
le canal deux.
− Aïe ...

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