Sunteți pe pagina 1din 112

LE MANAGEMENT

public en formation?

Séminaire des responsables de formation – EN3S Octobre 2006


Note aux lecteurs
Le Réseau des écoles de service public a instauré depuis 1998 l’organisation régulière de séminaires destinés aux
cadres pédagogiques et aux formateurs des écoles, visant à partager les expériences et à mutualiser les compétences.
Temps forts pour le RESP, ces séminaires représentent l’occasion de décliner, à partir d’une problématique assez large,
différents thèmes liés aux questions d’actualité relatives à la formation.

Pour le RESP, ces séminaires ont plusieurs retombées positives.


Ils donnent à toutes les écoles du réseau la possibilité de se retrouver autour d’une préoccupation commune et de
s’enrichir des expériences des autres.
Au-delà de l’apport spécifique lié au thème traité, ils favorisent la mise en place d’une culture partagée et appropriée et
contribuent à asseoir les principes fondamentaux du réseau basés essentiellement sur la coopération.

A l’issue de la session, la pérennité du travail est assurée par la publication des actes du séminaire qui servent de
référence à l’ensemble des écoles.
Même s’il est difficile de vouloir prétendre retraduire l’exhaustivité des interventions et des échanges qui ont eu lieu au
cours de ce séminaire, il nous paraît essentiel de garder des traces de ceux-ci.

Comme toute trace, elle est spécifique et caractéristique de l’événement auquel elle se réfère, sans toutefois le repré-
senter totalement. Pour ceux qui ont participé à ce séminaire, les textes de ce document permettent de se remémorer
les travaux et ainsi de renouer et de poursuivre la réflexion, en d’autres lieux. Pour ceux qui n’ont pour être présents, ces
témoignages sont, à n’en pas douter, des sources d’informations, de questionnements, une incitation à se rapprocher
des collègues qui ont eu la chance de participer, et un déclencheur de débats au sein de chaque institution.

Ce document prétend transmettre l’essentiel des apports et des échanges. Ce n’est toutefois ni un compte-rendu
exhaustif, ni un résumé. En effet, sans entrer dans des détails qui pourraient se révéler fastidieux, et sans chercher à
retranscrire l’exactitude des débats, des apports et des échanges, ce document est un outil de communication au sens
de mise en circulation d’éléments de réflexion qui contribuent à la création d’une culture partagée au sein du Réseau
des écoles de service public.

Cette production que nous nommons « actes » est ainsi un document de travail à l’usage des responsables de formation
et des formateurs des écoles du Réseau ?

Ce nouveau séminaire prouve tout l’intérêt du développement d’une réflexion menée collectivement sur les dispositifs
et les méthodologies de formation mis en œuvre à ce jour. Il confirme la proximité des préoccupations et souligne
l’appartenance à une communauté professionnelle. Les intervenants et l’ensemble des participants ont tous contribué à
la qualité de ces journées. Qu’ils en soient remerciés.
Un remerciement tout particulier est adressé à la direction et à l’équipe de l’EN3S pour l’organisation qui a favorisé les
travaux et pour l’accueil convivial et chaleureux qui a été réservé à tous les participants.
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Sommaire Le comité
de pilotage
INTRODUCTION Ce séminaire est conçu par le Réseau
Claude bigot, des écoles de service public qui réunit
Président du resp et directeur de l’en3s p. 04 35 institutions. Il s’est tenu à l’Ecole
nationale supérieure de sécurité sociale. Il
était coordonné par un comité de pilotage
Présentation du séminaire national composé de :
Pierre CAMMARATA,
ESEN, Animateur du comité de pilotage du séminaire p. 06 Pierre CAMMARATA
Ecole supérieure de l’éducation nationale
Ouverture de la réflexion (ESEN)
Qu’est-ce que le management ? p. 09
Thierry PICQ, Christine CASTANY
Sociologue à l’Ecole de management de Lyon Institut régional d’administration de Bastia
(IRA de Bastia)
À quoi tient la spécificité du management public ? p. 16
Annie BARTOLI, Maxence CHORVOT
Professeur à l’université de Versailles/Saint-Quentin en Yvelines Institut national des études territoriales
(INET)
La formation au management et en particulier Christian JEANDEMANGE
au management public p. 24 Ecole nationale supérieure des officiers de
Marcel PROULX, sapeurs pompiers
Directeur général de l’Ecole nationale d’administration publique (ENSOSP)
de Québec
Maïlys KNAUB
Synthèse des conférences p. 32 Ecole nationale d’administration
Bernard DIZAMBOURG, (ENA)
Animateur général
Michel LOUAZEL
Travaux en ateliers Ecole nationale de la santé publique
(ENSP)
Atelier 1 : De l’émergence du besoin à la réalisation d’une formation
au mangement public ou comment se conçoit Danielle MICHEL
la formation au management public ? p. 34 Réseau des écoles de service public
(RESP)
Atelier 2 : La mise en œuvre de la formation p. 50
François MOLIN
Atelier 3 : Les contenus de la formation au management public p. 66 Ecole nationale supérieure de la police
(ENSPo)
Atelier 4 : L’évaluation des effets de la formation
au management public p. 76 Marie Noëlle PAILLOUX
Ecole nationale des travaux publics de l’Etat
TABLE RONDE (ENTPE)
Que pourrait être la formation des managers dans 10 ans ? p. 90
Pierre RAMON BALDIE
Ecole nationale supérieure de la sécurité
SYNTHÈSE GÉNÉRALE ET PROSPECTIVES sociale
Bernard DIZAMBOURG p. 100 (EN3S)

ANNEXES
Problématique du séminaire p. 105
Liste des participants p. 110

3
Introduction
Claude BIGOT
Directeur de l’École nationale supérieure de la sécurité sociale
Président en exercice du RESP

4
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

J’ai le plaisir de vous accueillir aujourd’hui à Saint Étienne en qualité de président du


RESP. Le réseau des écoles de service public est déjà ancien. Créé en 1995, il regroupe
aujourd’hui 35 écoles de service public, appartenant aux trois fonctions publiques
– d’État, territoriale et hospitalière – et au service public de Sécurité sociale.
Ce réseau a pour objectif de faciliter la réflexion et les échanges, notamment sur les
méthodes pédagogiques. Il a également pour finalité de permettre l’organisation de
sessions communes aux élèves, aux responsables pédagogiques et aux formateurs ;
aujourd’hui, nous nous trouvons dans cette dernière configuration. Son fonctionnement
participe de la dynamique des différents groupes qui le composent, et ce séminaire des
formateurs s’inscrit dans ce cadre.

Le séminaire des formateurs est un rendez-vous régulier extrêmement important dans


le réseau. Les thèmes abordés autour de la question du management public nous
concernent tous au premier chef.
Il apparaît toujours plus clairement que l’apprentissage du management est une des
missions essentielles d’une école de service public. Une fois formé, l’agent aura en
permanence à gérer, à accompagner des ressources humaines et des évolutions et par
conséquent à faire du management. Si nous voulons que le service public se réforme et
se modernise, nous devons être particulièrement performants en matière d’enseignement
du management.

Je souhaite que les réflexions menées aujourd’hui permettent à tous de repartir avec une
vision dynamisée de ce que doit être l’enseignement du management dans nos écoles.

Ce séminaire a été organisé par Pierre Cammarata de l’ESEN, que je voudrais remercier
officiellement ainsi que tous ceux qui, d’une part, ont participé à la définition des
thématiques et des contenus de ce séminaire et, d’autre part, ceux qui ont accepté
d’intervenir sous une forme ou sous une autre, en particulier Bernard Dizambourg,
Inspecteur général de l’administration de l’Education nationale et de la recherche qui a
accepté d’être l’animateur général de notre séminaire.

Je tiens enfin aussi à remercier de sa présence Marcel Proulx, Directeur de l’ENAP (Ecole
nationale d’administration publique) du Québec, qui nous permettra d’enrichir les travaux
d’un regard extérieur d’un grand professionnalisme.

5
Présentation
du séminaire
Pierre CAMMARATA
École supérieure de l’éducation nationale
Animateur du comité de pilotage

Le management public
en formation ?

6
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Je tiens tout d’abord à remercier un certain nombre d’acteurs de ce séminaire,


notamment les dix écoles qui ont participé à son organisation. Ces collaborations étroites
sont révélatrices des vocations du réseau, qui sont l’écoute et la facilitation des échanges
entre ses différents membres.

Le réseau englobe 17 activités au sein desquelles il faut distinguer deux champs


principaux : la formation d’une part et la mutualisation des réflexions et de la recherche
de l’autre.

Au sein de la formation, il est possible de distinguer ce qui relève de la formation initiale


de ce qui dépend de la formation continue. Cette dernière est elle-même subdivisée en
deux parties : la formation liée au travail de terrain et celle fondée sur les échanges et la
réflexion. Je tiens à mentionner tout particulièrement le groupe «Professionnalisation,
Etudes, Recherche et Formation» qui est à l’origine de cet séminaire.

Nous sommes donc dans une logique d’échanges, mais aussi de mise à distance destinée
à s’extraire du quotidien afin de partager les points de vue sur l’ensemble des pratiques.
Je vous invite à garder à l’esprit que ce séminaire est aujourd’hui conçu comme un lieu
de confrontation des idées et non comme un lieu d’enseignement.

Le programme du séminaire est construit sur trois temps différents :


- un premier temps constitué de trois conférences sera l’occasion d’aborder la
notion de management au sens large.
Elles doivent donner lieu à une première réflexion sur la définition du management, la
spécificité du management public et les particularités liées à la formation au management
public.
- un deuxième temps constitué d’ateliers, qui engage chacun personnellement sur
la mise en œuvre de la formation et sur les contenus.
Quatre thématiques sont déclinées : la conception de la formation, la mise en œuvre de la
formation, les contenus de la formation au management public, l’évaluation des effets de
la formation au management public. Chaque atelier aborde le thème en trois étapes : état
des lieux, identification des problèmes rencontrés, perspectives et évolutions possibles.
- enfin, un troisième temps consistant en une table ronde relative aux évolutions des
écoles de management dans les dix ans à venir.

Je tiens enfin à remercier l’EN3S pour son accueil, ainsi que Danielle Michel, déléguée
permanente du RESP pour son implication et sa réactivité.

7
Ouverture
de la réflexion
Thierry PICQ
Sociologue à l’Ecole de management de Lyon

Annie BARTOLI
Professeur à l’université de Versailles/Saint-Quentin en Yvelines

Marcel PROULX
Directeur général de l’Ecole nationale d’administration publique de Québec

Bernard DIZAMBOURG
Animateur général

8
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Qu’est ce que le management ?

Thierry PICQ
Sociologue à l’Ecole de management de Lyon

Sociologue à l’Ecole management de Lyon, titulaire d’un doctorat de gestion, Thierry Picq dispose aussi
d’une expérience de consultant lui permettant de poser un regard différent sur le fonctionnement des
organisations.
Il s’est beaucoup intéressé aux développements et aux transformations des organisations ; de plus, il
propose une vision particulière sur la question de la conduite des projets ainsi que sur le secteur des
nouvelles technologies. Il peut ainsi rendre compte d’un certain nombre de transformations notables et
radicales du concept de management.

Qu’est-ce que le management ?

Je tiens tout d’abord à remercier le RESP pour son invitation. Je vous propose de parler de management,
à l’heure où ce terme est très largement utilisé mais où cette notion suscite un grand nombre de
questionnements.

L’objectif de mon intervention sera de susciter la réflexion au risque parfois de paraître provocateur. Mon
propos est marqué par mon expérience de sociologue du monde de l’entreprise et du secteur des nouvelles
technologies, et les exemples de pratiques du management que j’évoquerai aujourd’hui pourront vous
sembler surprenants ou excessifs mais auront, je l’espère, la vertu d’ouvrir votre réflexion et témoigneront
des plus récentes évolutions.

De nombreux liens pourront être tissés avec l’intervention de Mme Bartoli, relative au management public.

Cette conférence s’articule en quatre temps. Il s’agit dans un premier temps d’appréhender la notion de
management. Il importe aussi dans un deuxième temps de comprendre que le management est toujours
situé dans un contexte économique précis. Un troisième temps sera consacré aux récentes formes de
management. Enfin, nous évoquerons les principales questions que les managers peuvent se poser.

La notion de management

J’ai demandé à ma fille ce qui lui venait à l’esprit quand on évoquait le mot management : les buildings,
l’entreprise, la finance, les États-Unis sont les mots qui lui sont venus spontanément à l’esprit. Il convient tout
d’abord d’analyser l’étymologie du mot : management est une déclinaison du verbe américain «to manage»
– réussir, se débrouiller – mais sa véritable origine est celle, latine et française, du mot «ménage».

Pour bien appréhender la notion de management, il faut savoir que ce nom prend sa racine dans le terme
latin manus – main. Au Moyen Age, le sigle « mn » est présent dans de nombreux documents royaux : cette
marque renvoie à l’idée de commandement, de pouvoir et d’autorité. La troisième notion implicite est celle du
manuel, du travail à la main, de manipuler. Le management se situe au carrefour de nombreuses disciplines
scientifiques, de la sociologie à la psychologie en passant par l’économie, ainsi que les sciences politiques
ou les théories de l’organisation. Qu’il s’agisse d’une discipline scientifique ou non, c’est un domaine qui ne
peut s’affranchir d’un grand nombre de sciences humaines et de l’entreprise.
De plus, le management s’applique dans de multiples champs d’activités, tels que le sport, la mise en œuvre
d’un projet, la gestion des crises, etc. Son application est très large.

9
Essayons d’y voir plus clair. De quoi parle-t-on lorsque l’on évoque la «  gestion management » ? Je propose
que l’on distingue d’abord la gestion d’entreprise, c’est-à-dire l’ensemble des grandes fonctions spécialisées
de l’entreprise, de la «  gestion management ». En effet, j’estime pertinent d’assimiler le management à un
certain nombre de processus transverses aux différentes fonctions de l’entreprise, et qui ont en commun
l’objectif de la production de valeur. Un management stratégique n’est pas incompatible avec cette idée
d’entrées/sorties déclinable au sein de chaque activité, qu’elle soit commerciale, de production, etc.

En adoptant cette vision processuelle du management, on peut affirmer que le management est une
mise en mouvement de ressources, sous l’effet d’un certain nombre de contraintes, afin d’atteindre une
finalité identifiée. Le management désigne les actions complexes mises en œuvre pour la réalisation d’une
stratégie.

Contrairement à une vision gestionnaire qui se découpe par fonctions, le management regroupe une série
de processus transverses. C’est un processus contenant plusieurs étapes. Le manager peut commencer
par analyser le contexte - où sommes-nous ? -, avant d’identifier des buts, puis de définir une stratégie
- comment faire pour atteindre ces buts ?-, et, ensuite, mettre en œuvre un plan d’action, d’animation et de
suivi de projets ainsi qu’une dotation de moyens. Enfin, à l’issue de ce processus, il est toujours intéressant
de se poser la question des impacts.
Ce processus semble pouvoir s’appliquer dans tout type de contexte.

Une autre façon d’appréhender cette fonction de management est de l’opposer à celle de leadership : « le
management consisterait à bien faire les choses, le leadership à faire les bonnes choses ». Le management,
dans ce cadre, serait cantonné à la dimension sociotechnique, c’est-à-dire à l’interaction des hommes et des
moyens de production, suivant des logiques d’économie et d’optimisation de moyens. Le leadership vise
davantage la mobilisation d’énergies au profit d’une vision. Cette dernière notion revêt donc un sens plus
large, moins précis, mais davantage fédérateur d’énergies. Le manager est celui qui jouit d’une légitimité
institutionnelle – d’une nomination par exemple -, la légitimité du leader émane quant à elle des autres
collaborateurs du groupe qui lui reconnaissent un charisme personnel.

Les sources d’action du manager résident principalement dans l’organisation hiérarchique et les stratégies
définies précédemment dont il est le relais désigné. Le leader réussit à créer un effet d’entraînement,
notamment grâce à sa présence, et s’appuie sur l’exemplarité de sa conduite personnelle pour la faire rejaillir
sur l’ensemble du groupe. La question du sens est donc centrale. Le sens, pour le leader, se réfère à la notion
de signification et d’intégration par tous des priorités. Le management se réfère au sens directionnel et relève
davantage de l’organisation et de la méthode.

Il importe de retenir que les deux notions ne sont pas à renvoyer dos à dos. L’une n’est pas meilleure que
l’autre et une bonne organisation est celle qui va réussir à combiner ces deux éléments. Un leader sans action
concrète et précise sur les organisations peut décevoir ; de même, un manager ne s’appuyant que sur la
méthode et l’objectif risque de voir la mobilisation de ses équipes faiblir, faute de vision plus large.

Une autre façon d’appréhender le management consiste à en analyser les déclinaisons particulières. Quand
on parle de niveaux, les Anglo-saxons distinguent les top-managers des middle-managers et des lowlevel-
managers.

Le top-manager définira la stratégie et la performance globale de l’entreprise.


Au sein des filiales, ce sont les enjeux liés à la mise en œuvre de cette stratégie qui vont être pertinents. Pour
le manager d’un magasin, c’est la question opérationnelle qui prend toute la place.

10
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Et pourtant, à ces trois niveaux, la notion de management est utilisée et pertinente bien que les fonctions
soient radicalement différentes. Il en va de même pour les interactions relationnelles. Le chef d’entreprise
est en contact étroit avec les actionnaires dans l’élaboration de la stratégie. Le manager opérationnel est
davantage une courroie de transmission entre les dirigeants et le personnel, sachant qu’il entretient un grand
nombre de relations horizontales.

Les enjeux du chef d’entreprise sont : la mise en question de lui-même autour de décisions à forts
enjeux et, pour sa carrière, son intégration dans un réseau de haut niveau. Le manager opérationnel est
à titre personnel intégré dans une dynamique de promotion et pris dans ses fonctions dans une pression
contradictoire venant du haut et du bas.

Derrière le même mot se cachent donc des préoccupations très diverses.

Un concept toujours à situer dans un contexte

Pour poursuivre l’analyse de la polysémie du management, je souhaite évoquer la notion de relativité de


la notion en fonction du contexte et de la situation. La contingence du management est liée à la diversité
personnelle des managers. On s‘aperçoit en effet aujourd’hui que le leadership dépend largement d’une
interaction entre un leader et des collaborateurs.

Ceci amène à définir le management comme une relation dont on ne peut se passer : même une non-décision
est un acte de management. Si l’on poursuit sur ce modèle, on remarque qu’il existe une grande diversité de
managements. On peut citer le management familial de type paternaliste, correspondant souvent à un patron
fondateur qui tisse des relations fortes avec les collaborateurs, le manager tribal ou le manager militaire qui
s’appuie sur la discipline. Le manager bureaucrate est un type particulier, courant dans les administrations et
certaines grandes entreprises privées, qui fonde son action sur le respect des normes et des procédures. Le
manager expert occupe sa place de direction du fait de la reconnaissance dont il dispose dans son domaine,
tel le chirurgien devenu directeur d’hôpital. Le modèle entrepreneurial très à la mode aujourd’hui est celui du
manager qui lance des projets.

Le manager associatif est un modèle cohérent dans un contexte où les membres de l’organisation sont
souvent bénévoles. Les start-up ont fait naître un management de décontraction propre à un environnement
assez jeune où les valeurs du capitalisme et de l’innovation sont largement partagées. De même, le
management peut se décliner suivant les nationalités françaises, américaines, etc.

L’ensemble de ces typologies débouche sur des outils concrets adaptés à chaque contexte. Le management
est mis en œuvre de différentes façons. Il peut être conduit personnellement par le manager ou confié
à d’autres, voire même exercé de manière collective. « Faire », « faire faire », « laisser faire » : toutes
ces formules renvoient à des managements particuliers. La matrice habituelle de l’analyse des différents
managements distingue le management concentré sur la tâche à accomplir de celui davantage centré sur les
relations de travail, la communication et le dialogue.

Il est possible d’inclure d’autres distinctions, notamment entre un management directif fondé sur les
résultats et les directives – modèle adapté dans un contexte souvent difficile, voire d’urgence - d’un
management persuasif qui veille aussi à l’intégration des méthodes par le personnel. Un troisième mode
serait le management participatif qui implique l’ensemble du groupe suivant un registre d’écoute. Le dernier
mode est celui de la délégation, qui ne signifie pas l’absence de tout contrôle.

11
De cette typologie, il faut retenir qu’aucun style de management n’est en soi meilleur qu’un autre. De plus,
chaque manager adopte naturellement un type de management dans lequel il se sent plus à l’aise. Le
manager aura donc intérêt à intégrer des éléments des autres modes de management à celui qu’il privilégie.
Il importe donc de se questionner et d’analyser quel est le bon mode de management selon les éléments
contingents.

J’espère que cette première séquence, que j’ai voulue polysémique, est susceptible de rendre compte de la
diversité de la notion de management.

Les formes de management : historique et actualité

Je vous propose d’évoquer à présent quelques évolutions conceptuelles et historiques. La représentation du


management s’intègre en effet :

- dans la manière de concevoir l’action collective,


- à une époque donnée,
- dans un contexte idéologique et culturel donné,
- et dans un ensemble conjoncturel des best practices à la mode.

Il est aussi influencé par les grandes figures et les grands leaders du moment – tels que Henry Ford,
Robert Taylor, Jack Welsh, Bill Gates - . Il apparaît donc que le management est une idéologie polymorphe,
dépendante de ces quatre éléments précédemment cités.

Une fois présentée cette conception idéologique et contextualisée du management, je vous propose une
segmentation permettant d’éclairer certains aspects du sujet.

La première étape du management aurait pour origine les années 1960 et le développement industriel,
dans un contexte économique de croissance et de production, où l’usine est la structure économique
dominante.
Le mode d’organisation privilégié est pyramidal, s’appuyant sur les principes de l’uniformisation et de la
standardisation. L’environnement scientifique privilégie la rationalité et les lois mécaniques du management.
Cette vision scientiste du management recherche des principes d’organisation universels.
Cette approche révèle la difficulté, voire l’impossibilité, d’intégrer complètement les hommes et les
femmes dans une organisation mécanique. Elle fait apparaître les lois propres à des groupes, les effets
de l’observation des agents au travail, etc. La fonction ressources humaines vise dans cette organisation
à administrer le personnel en vue d’une optimisation des ressources, en se chargeant de recruter, de
sanctionner l’absentéisme, etc. Dans ce schéma, et de manière simpliste, le travail du manager consiste
principalement à contrôler le respect des normes dans l’objectif d’une productivité optimale.

La deuxième phase s’étend des années 1960 aux années 1980. Elle se caractérise par une inégalité entre
l’offre et la demande, et par la diversification des produits et des moyens de production pour rechercher
la croissance. Dans cette économie de distribution apparaissent de nouveaux modèles organisationnels.
De grands conglomérats agrègent un nombre important d’activités différentes et l’enjeu principal est
l’adaptation. Les références scientifiques dans ce genre d’organisation empruntent souvent à la biologie pour
évaluer l’adaptation à un marché ou analyser l’entreprise comme un corps vivant ; de même, on s’intéresse
aux cycles de vie des entreprises ou à la sélection naturelle des entreprises de façon darwinienne.
La fonction des ressources humaines se transforme elle aussi et s’attache à évaluer la notion de « portefeuille
de compétences ». Au moyen d’évaluations et de formations se construisent des parcours de compétences

12
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

nécessaires pour des activités liées à des produits divers et variés. Le manager doit devenir un organisateur
de compétences dans un contexte de diversification.
La troisième époque – et j’observe que les cycles sont de plus en plus brefs – recouvre les années 1980 et
1990 : je l’appellerais « phase du service client ».
Dans ce contexte, c’est évidemment la prise en compte de la globalisation qui va compter ainsi que le service
comme outil de différenciation. Les exigences du client font loi et l’excellence prime. Il est donc nécessaire
que le projet soit porté par tous les niveaux hiérarchiques de l’entreprise.
Cette approche est moins mécaniste que sociologique et politique ; il s’agit dès lors d’analyser les
phénomènes de pouvoir, de résistances au changement, etc.
La fonction de ressources humaines a pour objectif de favoriser l’adhésion au moyen de projets d’entreprise,
du management participatif, de l’autonomie et de la valorisation, autant d’outils nécessaires pour garantir la
qualité des services finaux. Le manager devient aussi animateur en faisant partager des valeurs.

Aujourd’hui, nous nous situons dans des logiques d’ultra flexibilité et d’incertitudes. Certaines technologies
possèdent des cycles de renouvellement de 6 mois. La compétition se « virtualise » et s’internationalise.
Les modes d’organisation doivent être plus souples et permettre de favoriser l’adaptation au changement,
en faisant travailler des réseaux capables de s’auto-organiser. Le management est axé sur l’apprentissage
organisationnel et l’intelligence collective.
Dans ce contexte de diffusion de l’information, les principes mécanistes s’affaiblissent. La conception de
l’organisation vise à repérer les talents de façon segmentée, à développer la flexibilité et à créer de la valeur
en développant des hauts potentiels. Le manager s’apparente au jardinier qui crée un contexte propice à la
croissance des meilleurs talents.

Ce parcours historique illustre bien l’aspect contextuel du management et je vous propose de porter
maintenant un regard sur le contexte actuel des organisations à partir de l’exemple de trois secteurs
d’activités.

Le premier type relève du secteur automobile : il s’agit du processus de création d’un nouveau véhicule.
Dans les années 1990, le développement d’une automobile durait 5 ans, en prenant appui sur chacun des
métiers de l’organisation et en suivant un développement de type séquentiel. Aujourd’hui, un modèle est mis
au point en deux ans. Ce gain très important s’obtient par le biais d’un développement par projet ; chaque
métier est associé et représenté dans un groupe transverse qui va porter ce projet. Chez Renault, une telle
structure regroupe 500 personnes de tous les métiers du groupe qui peuvent rapidement, sur un même lieu,
tester les nouvelles idées.
Le manager acquiert une dimension transversale très prononcée. Le management de projet est
pluridisciplinaire et non hiérarchique.

Le second type, assez particulier, a pris naissance dans l’industrie cinématographique. On a vu, en effet, des
films être tournés dans les pays de l’Est, disposer de studios d’effets spéciaux au Japon, être montés en
Grande-Bretagne et validés par un metteur en scène se trouvant en Afrique du Sud. Ce type d’organisation
permet de fonctionner 24 h sur 24 h, en économisant 40 % des coûts liés à ce genre de projets. Il n’est pas
limité au secteur du film. Chez Benetton, tout un réseau de stylistes et d’intervenants conçoit les produits.
Benetton est une entreprise virtuelle qui ne possède qu’une compétence d’assembleur de matières réalisées
en externe.
Le management est donc particulièrement modifié par ce modèle.

13
Le dernier type est celui de « compétition ». A Grenoble, un pôle de recherche en nanotechnologies appelé
« Alliance » présente la particularité d’associer 1500 ingénieurs détachés par des entreprises concurrentes
sur un même secteur. L’objectif est de mutualiser les coûts de recherche et de développement excessifs. On
assiste donc à la collaboration d’ingénieurs employés par des entreprises concurrentes, suivant des modes
de rémunérations différents, afin de mettre au point des produits qui donneront lieu ultérieurement à une
compétition acharnée entre les entreprises. Ce modèle tout à fait particulier est récent.

J’espère avoir réussi à mettre en lumière de nouvelles formes d’organisations, telles que l’organisation
virtuelle, l’organisation d’alliance stratégique, de projet ou d’assemblage. Mais l’élément clé de ces nouveaux
schémas est ce que j’appellerais « l’équipe transversale ». Cette équipe est souvent constituée d’individus de
compétences diverses, d’unités d’appartenance hétéroclites et de localisations géographiques éloignées. Les
mots clés sont la grande complexité, la précarité, la responsabilité des équipes au niveau local : il est évident
que le management est fortement questionné par ces nouvelles formes d’organisation.

Les questions posées au manager

Le manager doit désormais faire le lien entre la stratégie et la mise en oeuvre ; il est davantage un manager
de collectifs que d’individus. Il doit être capable de donner du sens dans des situations complexes et de créer
de la valeur dans un contexte de court terme.
Accompagner les nouvelles formes d’organisation est aussi un enjeu essentiel car ces dernières génèrent
de nouvelles formes de socialisation et d’exclusion, sur la base de nouvelles dynamiques sociales. Se pose
alors la question de savoir si ce management par projet n’a pas pour effet de faire porter un poids excessif
aux collaborateurs. Une littérature nouvelle apparaît sur ce sujet.

D’un point de vue synthétique, le manager transversal évolue dans le non hiérarchique sans les moyens
traditionnels de contrôle des équipes de projets. L’évaluation est souvent effectuée en demandant l’avis des
collègues et des clients. Sa tâche est de faire de la diversité une richesse, tout en sachant que le management
de projet est évalué au résultat final. De plus, le manager actuel doit souvent être capable de gérer le
multilinguisme et la multiculturalité pour parvenir à en faire émerger de la valeur. De même, le manager doit
être capable de gérer l’éloignement.

Il importe par ailleurs de souligner l’importance du knowledge management, à savoir « réussir à construire
sur des connaissances, indépendamment des personnes ».
Un moyen pour y parvenir est de mettre en réseau les managers. Dernièrement, une enquête a montré que
la qualité du management est le facteur « numéro un » pour retenir le personnel en créant une atmosphère
de travail favorable.

Le manager d’aujourd’hui est aussi manager de lui-même, qualité d’autant plus essentielle dans des
contextes d’instabilité permanente. Les formations de développement personnel l’accompagnent dans cette
voie car il doit faire face à des pressions importantes générées par des demandes contradictoires.

Ceci amène à un certain nombre de questions. Faut-il plus ou moins de management ? La vague des start-up
a porté une idéologie allant contre les modèles hiérarchiques traditionnels. On s’aperçoit aujourd’hui que
davantage de management semble être souvent demandé, notamment un management de proximité
fournissant des repères dans des organisations toujours plus complexes.

Le management n’est-il pas éclaté entre des paramètres multiples et contradictoires, tels que la hiérarchie/les
relations horizontales, le court terme/le long terme, etc. ? On remarque que le management est de moins en

14
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

moins lié à un statut, mais devient plutôt un rôle fluctuant selon les situations et les projets. Les Américains
parlent de stewardship, c’est-à-dire du fait d’être au service d’un collectif. La question du manager coach
est également posée : est-il réellement possible de participer au développement des collaborateurs tout en
poursuivant ses propres objectifs ? Les questions de l’équipe managériale, ou encore du degré acceptable
de pression sont aussi d’une brûlante actualité.

Enfin, comment savoir comment l’on devient manager ? La nécessité de professionnaliser le management
se fait jour dans les entreprises mais de nombreux experts ont estimé que le management ne pouvait faire
l’objet d’une formation. La pédagogie traditionnelle est certainement assez inefficace - ce qui pose les limites
de l’éducation habituelle qui tend à identifier chaque faiblesse comme un problème -. Or, dans l’entreprise, il
est toujours nécessaire de questionner plusieurs fois les difficultés et d’acquérir ainsi de l’expérience.

Le domaine du management est donc un domaine à forts enjeux et susceptible d’évoluer fortement.

Je vous remercie de votre attention et je suis prêt à répondre à vos questions.

Questions/Réponses

De la salle
Le management exercé dans le pôle des nanotechnologies a-t-il un fort retentissement dans le management
d’aujourd’hui ?

Thierry PICQ
Il est certain que ce domaine est suivi avec une grande attention car il met en jeu des mécaniques de
construction de confiance.

De la salle
Je reprends votre mot de confiance. Vous avez peu évoqué les rapports du manager avec le comptable, le
taux de profit, etc. Le manager n’est-il pas dépendant de ces fortes contraintes ?

Thierry PICQ
Comme je l’ai dit en évoquant les pressions, il est possible de présenter ces évolutions sous un jour exaltant
mais aussi de les considérer comme les manifestations de l’apparition d’un nouveau taylorisme. J’ai observé
que dans la Silicon Valley, on est soit au-dedans soit au-dehors des réseaux, sans demi-mesure.

De la salle
Le leadership n’est-il pas en fait une compétence managériale et non une notion différente ?

Thierry PICQ
Évidemment, le leadership est complémentaire du management. La victoire suisse lors de l’America’s Cup
en 2003 est un exemple de complémentarité leadership/management dans un contexte très complexe :
un milliardaire charismatique a nommé un manager à forte compétence technique pour qu’un pays sans
tradition maritime remporte cette épreuve contre des nations ultra-compétitives historiquement. De plus, le
management est aujourd’hui une réflexion sur soi, qui permet de créer une solidité, base de la flexibilité.
Le management est certainement insuffisamment développé dans les formations actuelles. J’ai proposé par
exemple de mettre en relation des étudiants de pays différents et de construire de la confiance pour mener
à bien un projet ; sur ce point, on a constaté que la rapidité des réponses est essentielle pour construire de
la confiance.

15
À quoi tient la spécificité du management
public ?

Annie BARTOLI
Professeur à l’université de Versailles/Saint Quentin en Yvelines

Professeur de gestion, Annie Bartoli s’est distinguée par ses nombreux écrits dans le domaine du management
public. Elle a, par ailleurs, assumé des responsabilités de management au sein de son université et a produit
un ouvrage sur le management public qui en est aujourd’hui à sa deuxième édition. Elle s’est particulièrement
penchée sur la question de la formation des cadres de la fonction publique et a de plus participé à la mise en
œuvre de certains programmes de formation au ministère de l’Equipement. Sa démarche correspond donc
tout à fait aux problématiques abordées dans le cadre de ce séminaire.

À quoi tient la spécificité du management public ?

Lorsque les organisateurs de ce séminaire m’ont sollicitée, j’ai d’emblée identifié trois questions dans la
problématique que l’on me soumettait.

La première d’entre elles est celle de la définition même du management. Thierry Picq nous a éclairés
brillamment et mon intervention sera brève sur ce point. La question suivante est celle de la définition du
management public, notamment de la détermination du périmètre. Enfin, la troisième interrogation consiste
à se demander si le management public est un domaine spécifique, séparé du management au sens large. À
vrai dire, cette dernière question est actuellement la plus discutée et la plus incertaine de toutes. D’ailleurs,
je souhaite connaître l’avis de l’assistance : « Selon vous, existe-t-il une spécificité du management public ?
Cette discipline est-elle comparable au management au sens large ? »
(Les avis sont extrêmement partagés et divers).

J’observe que face à un public d’initiés aux questions du management, il est particulièrement difficile d’obtenir
une réponse pleine et entière. Pour ma part, au début de ma carrière, mon terrain de prédilection était celui
de l’entreprise et j’avais alors tendance à estimer que le management public n’était pas une discipline à part
car les organisations publiques ou privées doivent entreprendre des démarches d’adaptation comparables.
Petit à petit, notamment après avoir davantage approfondi les disciplines connexes telles que le droit public
ou les sciences politiques, mon point de vue a évolué. J’ai alors considéré que le champ du management
public était spécifique ; à présent, ma réponse n’est pas tranchée.

La spécificité dépend en effet de la proportion des caractéristiques propres à la sphère publique, je qualifierais
donc cette spécificité de relative.

Qu’entend-on par management public ? 

Je sais, après une longue expérience dans ce domaine, qu’il n’y a pas une seule manière de définir le
management public. Cette incertitude est conditionnée par les ambiguïtés de la notion même de management
et est accentuée par celles qui concernent la sphère publique. C’est à dessein que j’emploie le terme de
sphère pour ne pas utiliser les termes de secteur ou d’activité trop réducteurs ou inadaptés ; les frontières
de cette « sphère publique » sont fluctuantes, influencées par des choix particuliers, ce qui contribue à rendre
la définition de management public d’autant plus malaisée. De plus, les grilles d’analyse sont très variées et
influencent à chaque fois la réponse que l’on peut apporter.

16
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

En France, le management est extrêmement connoté : considéré comme une notion d’origine anglo-saxonne,
le management inspire de nombreux a priori. Est-ce parce que le terme de manus, origine étymologique
de management, figure sur les dollars ? Quoi qu’il en soit, l’Académie française a officiellement reconnu le
vocable de management et je propose donc de le prononcer à la française.

Par ailleurs, le champ d’application initial fait aussi débat. En effet, il n’est pas certain que l’activité de
management ait d’abord été exercée au sein de l’entreprise. Les premières grandes organisations telles que
l’armée ou les manufactures dépendaient du pouvoir royal et nécessitaient que l’on définisse des objectifs,
des stratégies et donc que l’on ait recours au management. Finalement, le champ d’application initial est lui
aussi touché par les stéréotypes. Il me paraît important de souligner que des travaux théoriques ont montré
que de nombreuses méthodes de management ont été empruntées à celles de la puissance publique.

Toujours dans le cadre de cette partie introductive sur les origines et le sens, j’aimerais faire remarquer
qu’Henri Fayol, souvent considéré comme le pionnier du management moderne, est une figure stéphanoise.
Diplômé de l’École des Mines de Saint-Étienne en 1860, il a défini la fonction d’administration dans les
organisations selon des exigences et des critères proches de ceux du management actuel.
Il considérait que l’administration était constituée de 5 éléments : la planification, l’organisation, le
commandement, la coordination et le contrôle. Si le vocabulaire a changé, il n’en reste pas moins que ces
principes sont encore pertinents.

Les disciplines contributrices ou fondatrices du management sont nombreuses et cette diversité doit être
prise en compte lors des formations en management. Le droit reste la matière la plus importante des
concours administratifs, ce qui est logique et souhaitable, je soutiens toutefois qu’il est nécessaire de
compléter la formation des futurs managers publics, notamment par l’étude des sciences de gestion.

Vers une définition de l’activité publique

Poursuivant dans l’analyse des difficultés posées par le concept de management public, la définition du
périmètre de l’activité publique pose problème. Les domaines de la puissance publique varient en effet dans
le temps et dans l’espace. Certes, certaines activités dites régaliennes se retrouvent dans toutes les sociétés,
mais la puissance publique concerne des périmètres extrêmement différents selon les contextes.
Le sens de l’adjectif public est difficile à cerner, notamment du fait des nuances entre secteur public, service
public et fonction publique. Il est par exemple possible de trouver des fonctionnaires dans des organismes
qui ne font pas partie de la fonction publique ou des agents non fonctionnaires qui exercent des missions de
service public. Tous les cas de figure sont possibles. L’organisme public renvoie à des réalités extrêmement
variées et les frontières entre public et privé, marchand et non marchand, lucratif et non lucratif sont souvent
difficiles à déterminer car mouvantes.

La sphère publique est donc une réalité complexe et j’estime qu’il serait réducteur de poser des exclusions
idéologiques ; j’adopte pour principe d’inclure une organisation dans la sphère publique dès lors qu’elle
comporte des caractéristiques d’intérêt général. Je propose donc une approche extensive de cet ensemble
qui va être concerné par le management public.

Le management public = une spécificité ?

La spécificité de cet ensemble fait toujours débat et sur cette question, ma démarche consistera à défendre
les points de vue opposés afin d’aboutir à une position de synthèse. En premier lieu, je me ferai l’avocate
d’une conception qui s’oppose à la spécificité du management public.

17
Pour une universalité du management

Si le management est un ensemble de processus transversaux alors toutes les formes d’organisation ont
recours au management. Toutes ont besoin d’actions de planification, d’organisation, de commandement, de
coordination et de contrôle. Certes, chaque organisation lance des actions de management de façon plus ou
moins efficace ou plus ou moins consciente mais toutes ont recours à des actions de finalisation. Il est donc
peu pertinent de considérer qu’une différence essentielle existe selon les types d’organisation considérés.

En outre, la frontière qui distingue l’action publique du privé est-elle réellement opérante ? On s’aperçoit que
la différence entre une multinationale et une échoppe est plus importante qu’entre une administration et une
grande entreprise. Dès lors, quels sont les critères de distinction entre les différents types de management ?
Il me semble que le raisonnement attribuant une spécificité au management public mènerait à accorder une
spécificité à tous les types de management, suivant les contextes et les organisations.

Cet argumentaire du non est convaincant.

Dans le même ordre d’idées, on peut estimer que les différences ne concernent que des outillages de
fonctionnement qui sont au service de la politique générale, qu’elle soit publique ou privée. Mais le
management, public ou non, n’est qu’un ensemble d’actions s’adaptant à des stratégies déterminées
préalablement. Certes, une contextualisation de ces outils est nécessaire mais elle ne va pas jusqu’à
constituer des différences essentielles.
Si des spécificités existent, elles ne tiennent pas aux techniques mises en œuvre mais ont leur origine dans
les grandes orientations politiques et juridiques qui vont avoir un impact sur les actions d’exécution ou, en
aval, sur les effets attendus ; au niveau du fonctionnement, la spécificité n’est en réalité qu’une adaptation à
ces exigences particulières.

Ces arguments du non conduisent à penser que le management public consiste surtout en une manière
particulière de communiquer. En effet, si les processus de management permettent de piloter et de
faire fonctionner une organisation et conduisent à des effets en termes de performance, alors le type
d’organisation va influer sur la manière de présenter et de déterminer les objectifs.

Dégager des surplus ou des bénéfices n’est pas non plus un critère pertinent de distinction entre les actions
de management au sens large et celles de management public. En effet, si dans le secteur public les surplus
ne sont pas alloués aux actionnaires, ils peuvent tout de même être dégagés au profit de l’intérêt général.

Ce plaidoyer du non signifie donc que le management public fait l‘objet de tabous et d’ambiguïtés qui ont
souvent pour origine des résistances fortes aux actions de management.

Pour une spécificité du management

L’argumentaire opposé, celui en faveur de l’admission de la spécificité du management public, s’appuie


sur quelques idées fortes. Il postule que l’exigence de l’intérêt général de la puissance publique et la finalité
non lucrative des organisations ont des incidences très importantes sur le mode de fonctionnement des
structures. De même, ses partisans soulignent que la neutralité des outils utilisés est sujette à caution.
En effet, les techniques de management construisent des représentations. Les outils entérinent un certain
nombre de choix en interagissant avec le contexte dans lequel ils s’insèrent.

Le principe de neutralité des démarches et des actions est donc mis en doute car l’examen des organigrammes
ou des systèmes d’information particuliers révèlent bien souvent des politiques et des stratégies.

18
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Une fois admise cette porosité entre le domaine des stratégies et celui des techniques organisationnelles, le
management public présente nombre de spécificités.

Parmi ces dernières, je me propose ici de n’évoquer que celles qui me semblent être les plus importantes. En
matière de gestion, il est nécessaire de prendre en compte les particularités du contexte socio-économique,
juridique et institutionnel. La sphère publique se différencie du secteur marchand en ce qu’elle s’appuie sur
des principes fondamentaux – par exemple les lois de Rolland*– qui ont des répercussions considérables
sur les méthodes de gestion interne.

La proximité du facteur et de l’acteur politique est par exemple loin d’être négligeable ; ceci est tout à fait
propre au secteur public. Chaque organisme de la sphère publique voit son action encadrée par une série de
dispositifs juridiques et réglementaires extrêmement prégnants.
Certes, l’entreprise est sujette à de nombreuses règles mais les impacts sur les comportements
sont davantage visibles dans le secteur public. Les organismes publics maîtrisent-ils réellement leur
fonctionnement, sachant que le manager du secteur public dispose de peu de marge de manœuvre dans la
gestion des ressources humaines et des effectifs ?
Par ailleurs, l’enjeu de survie à court ou moyen terme que connaissent les entreprises a très rarement
d’équivalent dans la sphère publique ; j’admets toutefois qu’à long terme, cette survie est plus incertaine.

Une autre spécificité de taille est celle de l’impossibilité de choisir les publics/usagers. De plus, les activités
de la sphère publique sont encore dépendantes d’un certain nombre de contrôles, émanant d’autorités dites
de tutelles.
Dans le domaine de la gestion des ressources humaines, une grande partie des personnels est concernée
par un statut. Ces statuts sont divers, extrêmement complexes et constituent une limite certaine à la marge
de manœuvre de tous les managers qui, au niveau des services, des départements ou des organismes, ont
des volontés de réformes.

La gestion des effectifs dans la sphère publique ne dispose pas non plus des mêmes moyens d’adaptation
que dans le privé, tel que le recours à des entreprises externes. La flexibilité n’est donc pas la même, bien
que les activités sont, tout comme dans le secteur privé, sujettes à un grand nombre de fluctuations et
de variations. Enfin, un aspect à ne pas négliger est celui de la multiplicité des parties prenantes dans le
processus de décision.

Vers une spécificité relative du management public

L’inventaire des raisons principales plaidant pour la spécificité du management public me conduit à adopter
une position plus nuancée. Selon moi, la spécificité du management public est relative.

En effet, la vocation particulière de la puissance publique est lourde de sens. Autour de la notion de service
public s’agrègent de nombreuses valeurs qui se déclinent dans les choix et les méthodes de fonctionnement
des organisations. La plupart des actes, même quotidiens, sont imprégnés par la notion de service public.

De plus, le milieu public se caractérise souvent par une très forte complexité organisationnelle et
décisionnelle. Les processus ont souvent un caractère hybride : par exemple, si les systèmes s’identifient
souvent à des bureaucraties telles que les a décrites Weber, je remarque que le système de « l’adhocratie »
est un modèle pertinent d’analyse. « L’adhocratie » est un système qui consiste à s’adapter à des contextes
fluctuants ; dans l’action publique, ce système d’adaptation sur mesure est souvent nécessaire en plus de
règles bureaucratiques qui ne peuvent répondre à tous les questionnements.

*Principes définis par le prof. Louis ROLLAND fondant le service public : - mutabilité (adaptabilité face aux évolutions,
aux besoins collectifs, à l’intérêt général) – continuité – neutralité – égalité.
19
Cette double réalité organisationnelle m’a souvent semblé flagrante. De même, le management pyramidal
coexiste avec le management transversal : par exemple, le fonctionnement en réseau est aussi présent dans
l’hôpital public, en parallèle d’une hiérarchie traditionnelle bien établie et ancrée.

Quand on analyse le rôle de l’encadrement, on s’aperçoit que plusieurs filières hiérarchiques peuvent
coexister, certes avec des points d’intersection, mais qu’elles agissent souvent suivant des modalités
parallèles. La bicéphalie dans l’hôpital, avec d’une part le directeur de l’hôpital et d’autre part le président de
la commission médicale d’établissement est un exemple parlant. Le politique et le gestionnaire forment un
couple tout à fait propre aux organismes publics.

De plus, les formes de pouvoir s’expriment suivant des logiques diverses. Le manager exerce son pouvoir
sur la base légale et juridique ; dans d’autres occasions, il lui sera nécessaire de jouer sur d’autres ressorts
qui appartiennent davantage au registre du leadership.

La complexité ne concerne pas seulement les ressources humaines mais aussi les processus de prise de
décision. Le fait que des orientations différentes coexistent fait de tout choix un parcours d’obstacles. Notons
que la sphère publique se trouve à la croisée de pressions locales et nationales, d’enjeux électoraux, de
logiques de court et de plus long terme…Certes, le secteur privé est aussi concerné par ces dynamiques
mais dans une moindre mesure que ne le sont les organismes publics.

Ces processus complexes accouchent souvent de non-décisions qui sont largement déplorées par les
agents. Ceci étant, une particularité de la sphère publique est sa capacité à fonctionner en s’appuyant sur
des non-décisions qui se révèlent au final parfois pertinentes.
Le manager public, quant à lui, est soit immergé dans ce contexte, soit étonné d’une telle complexité
décisionnelle.

Je souhaite aussi évoquer la multiplicité des parties prenantes, à la fois en interne et en externe.
D’un point de vue interne, les acteurs politiques et leurs représentants cohabitent avec le personnel
administratif ainsi qu’avec un grand nombre d’experts supposés incarner le savoir-faire de l’activité
de l’organisme public. Il est aussi nécessaire de citer une quantité de commissions qui jouent un rôle
considérable dans le fonctionnement des organisations sans oublier l’éclatement des sites qui ajoute des
acteurs hétérogènes à un même ensemble.
Les parties prenantes externes sont aussi multiples.
Parmi elles, il importe de citer les institutions politiques, les bénéficiaires des services publics – dénomination
large qui justifierait à elle seule un débat – ainsi que les institutions politiques locales.
À cette liste, il convient d’ajouter l’importance croissante de partenariats en tout genre, des organismes
publics entre eux, mais aussi des organismes publics avec des entreprises du secteur privé.
Cette dernière configuration génère un grand nombre de réglementations destinées à protéger le droit de
la concurrence dans les appels d’offres, à garantir les exigences de service public et contribue largement à
complexifier l’analyse de la sphère publique.

De plus, au-delà de ces spécificités identifiables, il est indispensable de rendre compte de données plus
subjectives, liées au ressenti des agents de la sphère publique.

20
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

A quoi tient cette spécificité « relative » ?

Le manager public est à la fois chef d’orchestre et homme-orchestre, celui qui coordonne et celui qui doit
tout accomplir par lui-même. Cette confusion des genres est très présente lorsque les managers du secteur
public évoquent leur pratique au quotidien. La noblesse de l’activité est au centre de leur perception d’eux-
même ; ils soulignent aussi souvent la constante nécessité de légitimer les actions de management auprès
du personnel. La rigidité du système est souvent pointée du doigt, notamment le manque de marges de
manœuvre dans le domaine des ressources humaines.
Les mots sont parfois durs : on évoque les processus de décision « tortueux ». L’indispensable vocation,
l’engagement et l’endurance nécessaires pour exercer sa profession au sein de la sphère publique sont
souvent mentionnés. Par ailleurs, l’atteinte des objectifs ou l’aboutissement des projets suscitent des
satisfactions tout à fait particulières.

Au fil du temps, ma conviction s’est forgée autour de certains principes.


Le premier d’entre eux consiste à ne pas se leurrer quant aux effets attendus du management public ;
un grand nombre de rigidités persiste et le management n’est pas la panacée pour vaincre tous ces
immobilismes.
Plus particulièrement, deux pièges sont à éviter lorsqu’on tente de mettre en œuvre des actions de
management dans le secteur public.
Il s’agit dans un premier temps de mettre en garde contre des positions que je qualifierais de trop extrêmes.
Par exemple, la transposition pure et simple de méthodes de management qui ont fonctionné précédemment
et dans d’autres contextes risque de créer l’effet inverse de celui escompté. Chaque organisme comporte
ses particularités et nécessite une adaptation des outils d’orientation organisationnelle. De même, le rejet de
principe de méthodes inspirées de l’extérieur conduit à alimenter les immobilismes. Une fois ces dangers
bien connus, il semble nécessaire de construire des outils ad hoc, mais aussi de conserver une ouverture
d’esprit qui prémunira contre les situations d’enlisement prolongées.
L’autre piège qu’il est essentiel de connaître est celui des stéréotypes touchant le management public. Il est
nécessaire de les combattre à l’heure où les contextes évoluent rapidement.

Questions/Réponses

De la salle
Quelle est votre opinion sur le système actuel des concours pour entrer dans la fonction publique ?

Annie BARTOLI
Il est clair que le concours apparaît comme un point-clé de la spécificité de la sphère publique. Il m’est
également arrivé de penser que des spécificités plus importantes étaient à mentionner. Parmi elles, toujours
en matière de ressources humaines, la difficulté de recourir au marché externe de l’emploi est tout à fait
cruciale pour l’analyse de ces questions. Certes, le concours est une facette de cette spécificité.
Le système de fonction publique de carrière crée une relation tout à fait particulière entre les organisations
et l’extérieur, car en général, il est décidé de mener à bien les actions publiques en ne comptant que sur les
effectifs existants. Or, le personnel a été recruté par le biais d’un filtre tout à fait original, celui d’un concours
fortement axé sur le juridique et est appelé à rester longtemps au sein des organisations.

21
Dès lors, comment faire pour adapter les organismes à de nouveaux contextes ? Une variable d’ajustement
est offerte par la formation. C’est d’ailleurs pour cette raison que le taux de formation dans le secteur public
est supérieur à celui du secteur privé.
Les capacités d’adaptation et le fonctionnement de la sphère publique sont donc fortement déterminés par
cette donnée de départ.
Ce cloisonnement est-il positif ou négatif ? Il est frappant que l’évolution du contenu des concours ait été
davantage discutée que la question du principe même des concours. Or j’estime que le principe de concours
ne doit pas être tabou et que le recrutement au sein de la fonction publique par cet unique moyen mérite
débat. Ceci étant, des ouvertures existent, notamment au sein de la fonction publique territoriale.
Ce statu quo est néanmoins pour moi une source importante d’interrogations.

De la salle
Comment expliquez-vous le succès du management public parmi les disciplines universitaires, sachant
qu’une matière comme la science administrative est en net recul ?

Annie BARTOLI
Selon moi, le management public se nourrit de la science administrative et il serait erroné d’opposer ces
deux disciplines.
Le management public est aussi fortement influencé par l’économie politique, car toutes les questions
relatives aux biens publics et à la fiscalité sont essentielles dans l’élaboration de techniques managériales.
Ceci étant, il est clair que depuis quelques années la dimension gestionnaire a émergé ; elle n’a pu le faire
plus tôt du fait de la permanence de nombreux stéréotypes et blocages. Mais selon moi, ignorer l’ensemble
des disciplines connexes au management public constitue une erreur grave.

De la salle
Il ressort de vos propos que les perspectives du manager privé sont de très courts termes et celles du
manager public de plus longs termes. Néanmoins, on observe aujourd’hui une certaine porosité entre les
deux pratiques.

Annie BARTOLI
Cette contamination existe sans aucun doute au niveau des individus. Les agents de la sphère publique
sont écartelés par des contraintes de temps souvent incompatibles. Effectivement, le temps long de l’action
publique tranche avec les injonctions d’immédiateté liées à des phénomènes de société. Cette contradiction
est parfois vécue avec beaucoup de difficultés dans les organisations.

De la salle
Il me semble que la question des valeurs reste toujours très prégnante. Dans l’école que je dirige, 25 %
des élèves sont des Français issus de l’immigration ; il me semble que le concours est un outil porteur des
valeurs de l’intégration.

Annie BARTOLI
Il est tout à fait exact que le système est issu de choix idéologiques et culturels fondamentaux. Il ne s’agit
pas de balayer ces valeurs. C’est d’ailleurs sur cet ensemble de choix que repose la spécificité de la sphère
publique. Le concours correspond à une grille de lecture et à des représentations liées à l’égalité d’accès au
travail quelle que soit l’origine des candidats.
Je suis tout à fait convaincue qu’il s’agit là d’un des atouts majeurs du système français, au-delà de sa
lourdeur et de ses inerties.

22
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

De la salle
La question des valeurs concerne aussi l’usager. En quoi la prise en compte de l’usager peut-elle avoir des
incidences sur le management public ?

Annie BARTOLI
L’exemple actuel de la démocratie participative me semble à cet égard intéressant. Il s’agit de prendre en
compte l’avis des citoyens par le biais de sondages, d’enquêtes et de débats.
Si les décisions du management public se fondent exclusivement sur ces dispositifs, les choix consistent
à réagir à des demandes locales et sociales. Mais le danger est de négliger les aspects liés à la démocratie
représentative, dans laquelle le programme pluriannuel qui détermine de plus larges orientations, joue un
rôle central. La compatibilité de ces deux approches doit être examinée au moment de la définition des choix
et des stratégies sous peine de se heurter à des difficultés et des blocages.
Le management public repose fondamentalement sur un système institutionnel de démocratie représentative
mais se confronte et s’adresse quotidiennement aux usagers.
C’est à cette double réalité que doivent faire face les managers de la sphère publique.

23
La formation au management
et en particulier au management public

Marcel PROULX
Directeur général de l’Ecole nationale d’administration publique de Québec

Marcel Proulx connaît bien la France. Il a notamment travaillé en 1986 au Centre de sociologie des
organisations de Michel Crozier, étudiant à cette occasion le fonctionnement des tribunaux d’instance. Il est
par ailleurs, l’auteur d’une abondante publication sur le management public, en particulier sur les aspects
de gestion des ressources humaines. Il semble également important de souligner que l’ENAP se présente et
se revendique comme l’université de l’administration publique au Québec. Si l’ENAP a en effet pour mission
de dispenser des enseignements et d’élaborer des contenus de formation, elle se donne aussi pour tâche
d’être un observatoire de l’évolution des modes de management public.La formation au management et en
particulier au management public

J’ai eu l’occasion, pendant le trajet me conduisant de la gare à cette salle de conférence, d’entendre plusieurs
chanteurs québécois et je crains une certaine indigestion du public français. Bien que je puisse comprendre
une telle réaction, je prie l’assistance de ne pas la tourner à mon encontre ! Car, après tout, en quoi les
Français ont-ils besoin de chercher des idées de l’autre côté de l’Atlantique, notamment en matière de
management public ?

Bien que je sois universitaire d’origine, j’ai aujourd’hui l’intention d’axer mon intervention sur mon expérience
pratique. Je suis, en effet, à divers titres praticien de management public depuis une dizaine d’années tout en
restant enseignant. L’ENAP est sans doute une école proche des enjeux et des besoins de l’administration ;
sa mission est celle du développement des organisations publiques par la formation et la recherche. Les
Québécois ayant le goût des dispositifs syncrétiques, l’ENAP bénéficie du statut universitaire.

Dans la continuité des interventions précédentes, je vous propose de parler du contenu et des modalités de
la formation. Il me semble en effet nécessaire de se poser d’emblée la question des fantasmes fondateurs
sur lesquels se basent nos pratiques de formateurs de managers publics. J’estime que, dans ce domaine, il
existe un modèle idéal du manager public chargé d’assumer un grand nombre de compétences. Le manager
est supposé gérer ce qui fonctionne, mais aussi ce qui fonctionne moins bien. Si les organisations répondent
aux attentes placées en elles, c’est grâce à ces gestionnaires, qui deviennent les véritables facteurs de
réussite ou d’échec. Former ces cadres représente dès lors un enjeu considérable.

Ceci étant, j’observe que les gestionnaires ont souvent le sentiment de ne pas être à la hauteur de l’ensemble
de ces projections intellectuelles. Comment les préparer à de telles exigences alors que le manager est
considéré par beaucoup d’experts comme une ambition insuffisante, lui préférant celle de leader ? Nous
avons nous-même à l’ENAP une chaire de leadership. Certes, il est nécessaire de rassembler les énergies,
mais cette notion de leadership tend à prendre une place tout à fait exorbitante.

Selon le discours dominant, le manager ne doit pas être seulement compétent, il doit avoir des vertus
personnelles qui le placent naturellement au-dessus de la mêlée ; le vrai leader est celui qui dispose de
qualités morales. Aujourd’hui, le discours sur le management – notamment en Amérique du Nord – souhaite
qu’il y ait des leaders partout.
Je ne crois pas que nos institutions doivent chercher à répondre au manager idéal. Ce concept me semble
peu pertinent ; quoi qu’il en soit, nous devons être un peu plus modestes. Il est nécessaire de ramener

24
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

la définition de la formation des managers à ce qui est du domaine du possible pour nos institutions. Il
s’agit là d’un geste d’humilité. Les écoles ne peuvent être à l’origine de toutes les avancées en matière de
management bien qu’il soit aussi nécessaire d’essayer d’en intégrer certaines.

À cet égard, je propose de rester fidèle à la notion de métier. En effet, oublions pour un moment les qualités
supérieures des managers pour nous pencher davantage sur les éléments constitutifs de la fonction du
gestionnaire. S’il est difficile de se former au charisme, il est possible d’orienter les enseignements sur des
matières qui peuvent réellement être acquises dans une école. Il est certain que tout ne s’apprend pas de
façon scolaire, et les organisations ont aussi le devoir d’encadrer le développement de leurs éléments.

En premier lieu, il est nécessaire d’identifier les métiers du management. Le management recouvre des
activités très variables et il me semble pertinent de raisonner par segmentation.

D’une part, je distinguerai la catégorie des métiers proprement de gestion ou de management et d’autre part,
celle des métiers d’appui à la gestion ou de spécialiste.

Sur ce point, une ambiguïté subsiste. La mission des écoles est-elle de former des spécialistes ou des
créateurs d’action collective ? Cette confusion est particulièrement présente en France où de nombreux
gestionnaires ont été formés comme des spécialistes et d’ailleurs comme des spécialistes d’excellent niveau.
Comment ensuite s’étonner de leurs limites en matière managériale ?

C’est pour cette raison qu’il a été décidé à l’ENAP de distinguer la formation des spécialistes d’appui à la
gestion – dans les domaines juridique, fiscal, etc. – de la formation des gestionnaires de collectifs.

Je propose d’aborder la question de la formation des managers par le biais des savoir-faire. La nomenclature
des objectifs pédagogiques identifie des savoirs, des savoir-faire et des savoir-être. Bien que cette dernière
notion ne me semble pas très heureuse, je l’emploierai dans mon exposé, faute de mieux.

Si les savoirs sont certainement opportuns, l’ENAP a choisi de centrer son action sur les savoir-faire. En
effet, nombre de spécialistes se sont révélés médiocres ou enclins à ne valoriser que les connaissances au
détriment des savoir-faire concrets.

Notre contenu pédagogique a pris le parti de transformer le savoir en objet purement instrumental,
considérant que les connaissances transmises n’ont de sens qu’au regard de l’action. Il s’agit d’une
approche proprement novatrice et je garde en mémoire l’exemple d’un économiste qui s’est élevé contre
notre démarche, estimant indispensable que les élèves maîtrisent les aspects fondamentaux de l’économie
générale. De même, la sociologie n’est enseignée que dans ses aspects qui peuvent se révéler utiles pour un
manager public ; le savoir est toujours évalué suivant sa pertinence pratique.

Concernant la catégorie du savoir-être, il été longtemps débattu au sein de l’école de l‘opportunité de


dispenser des formations en la matière. Pour certains, le savoir-être consiste en des postures morales qu’il
faut développer ; d’autres s’opposent à ce qu’ils considèrent comme un endoctrinement. L’orientation choisie
fut de tenter de donner aux élèves un certain nombre d’outils qui puissent leur permettre de construire un
raisonnement moral. Il ne revient pas à une école d’administration de prescrire des comportements dans
les relations humaines ; en revanche, amener les personnes à réfléchir sur les conséquences et le sens de
leurs actions présente un intérêt certain, notamment pour que le sujet soit aussi capable d’évaluer la qualité
de son management. L’ENAP a donc conclu que les cours d’éthiques ne devaient pas consister en des
endoctrinements : l’objectif de ces programmes est de faire comprendre que le manager est constamment
aux prises avec des dilemmes moraux et des exigences contradictoires.

25
L’enjeu de l’identification des savoir-faire se pose aujourd’hui avec une forte acuité.
Notre choix est de considérer que les premiers savoir-faire sur lesquels il est possible de travailler sont
de types cognitifs ; il s’agit de façons d’aborder l’objet administratif et managérial. L’expression qui
rend le mieux compte de cette démarche est celle d’une « éducation du regard ». Nous pensons que la
principale qualité du gestionnaire public est celle de la capacité à intégrer des réalités complexes. Les pires
gestionnaires publics – qui sont plus facilement identifiables que les meilleurs – sont ceux qui analysent la
réalité à travers un prisme unique. Pour ainsi dire, ce sont ceux qui «  voient des vis partout, puisqu’ils ne
disposent que d’un tournevis ».

Or, il est important d’amener les élèves à analyser les situations et à poser un diagnostic. Cette éducation
suppose une formation à des regards concurrents. En effet, les propos d’un sociologue des organisations
peuvent contredire ceux d’un économiste du secteur public. Ces analyses concurrentielles apportent une
variété d’outils qui devront être intégrés par les étudiants. Nous considérons qu’un programme cohérent et
univoque n’est pas forcément celui qui donnera au futur manager les moyens d’assumer correctement ses
responsabilités.

Le management public varie selon les circonstances et il est nécessaire que les gestionnaires soient en
mesure de s’adapter à diverses conjonctures. Préférant le prisme multiple au prisme unique, nous exposons
nos étudiants à des regards disciplinaires concurrents sur des mêmes réalités. De plus, ces regards sont
tronqués : nous ne livrons que ce qu’une discipline peut apporter sur le sujet, sans imposer aux élèves un
savoir universitaire solide. Par exemple, le point de vue pertinent de la psychologie sur le management public
traite principalement de la question de la motivation et ceci suffit à l’objectif pédagogique que nous nous
sommes assigné, sans qu’il soit nécessaire de remonter à Freud, Charcot ou Lacan.

Il s’agit de transcender les disciplines pour n’en conserver qu’un regard aiguisé sur l’objet qui nous intéresse.
À cet égard, cette démarche a été saluée par l’équivalent québécois du Président de la Cour des Comptes. En
fin de compte, nous avons pour ambition de former des élèves intellectuellement ouverts et à perspectives
larges. Il est particulièrement difficile de trouver des formateurs qui acceptent de renoncer à enseigner ce
qu’ils ont appris à l’université pour axer leur pédagogie sur le management public.
Toutefois, ce regard pluridisciplinaire ne suffit pas. Il est aussi indispensable de mettre l’accent sur les savoirs
techniques des processus de gestion. Aujourd’hui, nous avons tendance à déprécier ces connaissances
pratiques, au motif qu’elles sont supposées s’apprendre sur le terrain. Nous avons constaté qu’un minimum
de savoir technique prémunit les gestionnaires contre des erreurs lourdes en matière de planification ou
d’évaluation des politiques et des programmes publics. L’ENAP a développé des outils et des techniques
qu’il est utile de transmettre aux élèves.

De même, en matière de conception des organisations et d’aménagement des programmes, la mode est au
changement des organigrammes et à la répartition du travail ; or bien peu de gestionnaires ont une formation
minimale sur les concepts et les principes qui structurent ces activités. Par ailleurs, la gestion des personnes
occupe dans nos programmes la même place que celle occupée par le droit dans les enseignements
traditionnels des écoles d’administration publique. Nous considérons en effet que la gestion des personnes
est au cœur de l’activité des managers.

Un troisième élément est la capacité à lire l’environnement public qui est, nous l’avons vu dans les
précédentes interventions, bien plus complexe que l’environnement d’une entreprise.
Les gestionnaires doivent acquérir des réflexes qui leur permettent de décrypter la vie politique des
institutions. En effet, un gestionnaire qui se désintéresse de la politique ne propose que des solutions
techniques inapplicables. Une solution qui tient compte du raisonnement des acteurs politiques a

26
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

certainement plus de chance d’aboutir. Or, ce n’est pas dans les niveaux les plus élevés de la hiérarchie que
se conçoivent les programmes qui constituent réellement l’action de l’État. Les gestionnaires doivent être
conscients de la légitimité des politiques et pour ce faire, des cadres d’explication leurs sont enseignés.

L’importance de la connaissance de soi a été précédemment évoquée. Que peut faire une école de
management public dans ce domaine ? Je nourris certaines réserves à l’égard d’un enseignement de
l’intelligence émotionnelle. J’estime qu’en effet il est difficile de distinguer la bonne de la mauvaise attitude,
bien que certaines d’entre elles soient facilement identifiables comme néfastes.

Cependant, il est possible d’apprendre aux gestionnaires à poser un regard lucide sur eux-mêmes. La
création d’un cours de développement personnel du gestionnaire a suscité beaucoup de railleries. Or, même
les étudiants les plus cartésiens ont salué ces programmes, qui permettent aux élèves de mettre le doigt sur
leurs carences ou leurs peurs. Certains se sont même rendus compte qu’ils n’étaient pas appelés à devenir
managers ; ceci est problématique à court terme pour l’école, mais bénéfique à plus long terme pour les
organisations publiques. Toute une série de cours porte aujourd’hui sur cette réflexion personnelle. J’estime
aujourd’hui par expérience que des élèves de caractère compulsif ou perfectionniste ont peu de chances de
devenir de bons gestionnaires.

Ce genre de réflexion sur soi se transforme en un véritable savoir-faire, qui donne au gestionnaire la capacité
de se demander si tel poste est adapté à sa personnalité. L’ENAP dispense aussi des cours « d’emotional
labour », ou de travail émotionnel. Il ne s’agit pas d’un travail thérapeutique, mais d’un travail sur la manière
d’entrer en relation avec les autres en utilisant les attributs du langage émotionnel. En effet, communiquer
uniquement sur un plan intellectuel amène bien souvent des résultats négatifs. L’incapacité à se situer sur
le plan émotionnel est source de nombreux échecs ; s’il est difficile de se changer, il est possible d’être
davantage conscient de soi.

Cette pédagogie a d’abord été développée pour la formation des personnels navigants du transport aérien ;
dans ce secteur, la mission du steward a été davantage définie comme consistant à créer une atmosphère
favorable au voyage que comme un travail technique de service.

Par ailleurs, les gestionnaires doivent exercer des compétences à géométrie variable. En effet, Fayolle
affirmait déjà que les compétences administratives de gestion se retrouvaient à tous les niveaux de la
hiérarchie. Même l’opérateur de bas niveau s’insère dans du collectif et doit opérer des arbitrages. Ceci
signifie que l’intensité des compétences managériales varie selon les niveaux hiérarchiques.

Malheureusement, plus on monte dans la hiérarchie et moins les agents sont formés au management public.
Je déplore cette situation qui explique selon moi de nombreux échecs de mises en œuvre de politiques
publiques. Les très hauts fonctionnaires sont souvent incapables de se voir aussi en tant que gestionnaires
responsables du fonctionnement et des réformes des services. Or, l’on devrait retrouver à tous les niveaux
des compétences correspondant aux attentes en matière de gestion.
Tout ceci pose la question du moment idoine pour former au management. Notre conviction est que la
formation initiale doit être davantage axée sur des connaissances théoriques plutôt que sur des savoir-
faire techniques. L’erreur a souvent été commise de former des jeunes étudiants à des fonctions qu’ils
n’occuperont qu’à la fin de leur carrière : certes la planification stratégique est plus noble que l’organisation
du travail, mais certainement moins utile pour un jeune fonctionnaire. Or, une formation qui n’est pas
sollicitée dans les deux années est oubliée. Cette démarche entraîne donc un gaspillage certain, pour l’école
comme pour l’élève.

27
Il est indispensable de structurer la formation en différents volets temporels. L’enseignement technique
du management ne peut être efficace que s’il est dispensé à des élèves qui le demandent réellement. Les
étudiants qui sont à la veille de prendre des fonctions de management sont toujours les plus dynamiques
car ils ont une idée précise des applications pratiques de ces connaissances.

Dès lors, comment être sûr de délivrer la bonne formation au bon moment ? Nous considérons qu’une
carrière est rythmée par plusieurs étapes. Le premier temps est celui de l’entrée dans l’organisation, le
deuxième est celui où l’agent commence à gérer des personnes et des équipes puis vient le temps où l’agent
devient gestionnaire de gestionnaires. Cette dernière étape est d’ailleurs la plus périlleuse, car le manager
de managers est en prise avec des questions stratégiques et a souvent tendance à délaisser la gestion des
organisations et des effectifs. Pour pallier ces carences, le manager de haut niveau a besoin d’une formation
sur les dimensions les plus macroscopiques de la gestion des organisations.

L’ENAP développe un processus de formation par étapes – pas encore diplômante bien que je le souhaite
fortement -. Nous avons élaboré des contenus pédagogiques d’appuis à la transformation des organisations.
L’intégration et la mise en œuvre des réformes nécessitent en effet un certain nombre de connaissances et
de raisonnements. Nous envisageons donc avec une certaine modestie les objectifs de formation à la gestion
publique. Notre approche se caractérise par une diversité des regards et des moments de formations.

Qu’en est-il des méthodes ?

Le credo de notre organisation est celui de l’intérêt pratique des connaissances. Cette obsession a pour
origine aussi la nature de notre public : la plupart des étudiants travaille déjà dans l’administration et choisit
de se former afin d’acquérir davantage de compétences réellement professionnelles. Dès lors que ces
étudiants ont le sentiment que les enseignements n’ont pas d’intérêt direct pour l’exercice de leur métier, ils
quittent les programmes. C’est donc pour répondre à ces exigences que l’ENAP a choisi d’axer sa pédagogie
vers la pratique au sein des organisations publiques.

Certains aspects théoriques sont pertinents pour l’activité professionnelle et d’autres ne le sont pas :
il appartient aux formateurs de procéder à ce tri. Cette idée est souvent rejetée par des formateurs
universitaires. Max Weber est un auteur passionnant, mais l’ENAP ne sélectionne de son œuvre que les
aspects utiles aux élèves gestionnaires.

Cette démarche a aussi une influence directe sur le choix des contenus.

Chaque cours fait l’objet d’une analyse en termes de pertinence, ce qui transforme les professeurs en
vendeurs. L’enseignant doit en effet convaincre les élèves de l’utilité de son cours, bien qu’il n’en soit souvent
nul besoin, tant les étudiants sont capables d’associer telle connaissance à telle situation concrète de leur
vie professionnelle.

Trop souvent, les concours administratifs recrutent des élèves connaissant les savoir-faire des organisations
publiques sans être capables de les appliquer. Décrire la gestion participative et la gestion par résultats est
une chose, être capable de les mettre en œuvre en est une autre. Or, il est possible de transformer les salles
de classe en ateliers pratiques où les élèves s’approprient de façon immédiate les contenus enseignés. On
sait en effet que les élèves oublient les connaissances dont ils ne se sont pas servis rapidement après leur
transmission.

28
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

A cet égard, je suis plutôt enclin à réduire la quantité des savoirs que j’enseigne. Chaque étudiant doit sortir
de cours en ayant l’impression d’avoir acquis un embryon de savoir-faire. Notre démarche donne aussi
la priorité à des méthodes d’enseignement plus participatives qui suscitent la réflexion personnelle des
étudiants. Le dialogue est en effet une méthode d’appropriation très efficace.

S’il est difficile de former des adultes, c’est qu’ils se construisent un ego professionnel qui entraîne une
attitude de défiance à l’égard des enseignements. Si l’on accorde la liberté aux étudiants de discuter les
propos du formateur, en les infirmant ou les confirmant, les connaissances seront acquises plus rapidement
et plus précisément. Nous avons en effet constaté dans nos formulaires d’évaluation que les élèves ont
appris autant des professeurs que des autres participants.

Les interventions des élèves permettent d’élargir la connaissance à d’autres contextes et à d’autres métiers. Il
revient donc à nos formateurs de transmettre un enseignement pertinent, mais aussi de créer une dynamique
d’échanges, tout en se réservant la possibilité d’intervenir de manière inductive. Il est même possible de
proposer dès le début du cours des cas concrets sur lesquels les étudiants devront travailler, puis dans un
deuxième temps, de proposer les modèles qui permettent d’aller plus loin et de vaincre les obstacles. Cette
méthode est pédagogiquement très efficace.

J’aimerais d’ailleurs mentionner l’existence d’un débat « sur le face à face et la distance ». Il est souvent
affirmé que la distance entre l’enseignant et l’élève n’a plus d’importance à l’heure d’Internet et des vidéos-
conférences. Personnellement, je reste convaincu que l’apprentissage électronique est un pis-aller. Il est
certain que l’apprentissage à distance est très efficace pour l’apprentissage des connaissances ; il est en
revanche peu pertinent pour l’appropriation des savoir-faire, en particulier des savoir-faire de gestion, car il
y manque la dynamique interpersonnelle de la salle de classe.

En effet, s’il a été observé que le cours magistral est de moins en moins efficace, le discours en faveur d’une
généralisation de l’enseignement à distance me paraît extrêmement dangereux. La salle de classe est appelée
à devenir le lieu privilégié de la mise en jeu de connaissances acquises par enseignement à distance et restera
à ce titre indispensable.

Quant à la technologie, il me semble que les projections de types Power Point conduisent souvent à vider le
propos du professeur de tout son sens. Le Power Point doit être un complément de l’enseignement et non
une béquille corrigeant ses faiblesses.

Je poursuis mon état des lieux de l’enseignement dans les écoles publiques par la question des stages.

S’ils constituent un outil très précieux pour nos étudiants les plus âgés qui travaillent en alternance, on
constate que chez les plus jeunes, les stages sont trop souvent déconnectés des enseignements. Or il ne
doit pas y avoir de rupture entre les deux,  sous peine de voir le stage contribuer à discréditer l’enseignement
dispensé en classe. Pour y remédier, il est nécessaire de contrôler les mandats des tuteurs de stages.

En guise de conclusion, j’estime que la réflexion sur les métiers de gestionnaire public est fondamentale. Une
fois identifiés les éléments forts du métier, il devient possible de créer des contenus pédagogiques réellement
adaptés. Il s’agit d’être capable de former des managers qui disposent des compétences de base et des
moyens de progresser au sein des organisations. En effet, une des vocations de nos écoles est d’accélérer
les acquis engrangés dans le milieu professionnel. J’ai d’ailleurs récemment rencontré un étudiant qui avait
suivi mes cours à contrecœur et qui ne s’est rendu compte qu’in situ de la pertinence de mes enseignements.
Ce genre d’anecdote est encourageant.

29
Il reste un certain nombre de questions non résolues sur l’apprentissage des compétences. La transmission
des savoir-faire et l’évaluation de leur intégration par les élèves restent problématiques. Le discours sur les
savoirs-faire est abondant mais j’estime que notre approche est trop cartésienne : comprendre les principes
ne signifie pas être capable de les mettre en œuvre. Le vrai défi des écoles d’administration est de réussir à
rendre les agents plus efficaces, plus performants et non plus savants.

Questions/réponses

De la salle
Quel est le profil des formateurs de l’ENAP ?

Marcel PROULX
La moitié de nos formateurs sont des professeurs avec un cursus universitaire classique. Ils ont donc tous
appris nos méthodes sur le tas et au contact des plus anciens. Mais aujourd’hui, nous nous rendons compte
que l’apprentissage par compagnonnage ne fonctionne plus lorsqu’on engage massivement de nouveaux
professeurs. En revanche, les formateurs dans les cursus non diplômant sont des formateurs de métier très
expérimentés.

De la salle
Pratiquez-vous des formations de type PNL ?

Marcel PROULX
Nos formations de développement personnel ne sont pas réellement des formations à la PNL.

De la salle
Pour l’apprentissage des compétences managériales, pratiquez-vous la gestion associative des
étudiants ?

Marcel PROULX
Nos étudiants la pratiquent spontanément et nous sommes à la veille de la reconnaître, à condition que les
étudiants y intègrent des principes théoriques.

De la salle
Qu’entendez-vous par cadres d’explication ?

Marcel PROULX
La théorie peut être comprise comme une explication définitive de la réalité ou comme une grille
d’interprétations. C’est ce dernier choix qui a notre préférence, même si cela implique de réduire le champ
d’une discipline à ce qui semble utile à notre enseignement. Une même situation peut être éclairée par des
modèles psychologiques, sociologiques, économiques, etc.

De la salle
Le cours de développement personnel ne risque-t-il pas de heurter les étudiants ?

Marcel PROULX
Le risque existe et nous sommes très vigilants au recrutement de nos formateurs. Il est important de donner
aux élèves qui ont recu une certaine « déconstruction » les moyens de se reconstruire rapidement.

30
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

31
Synthèse des conférences

Bernard DIZAMBOURG
Inspecteur général d’administration de l’Education nationale et de la recherche

Il convient à ce stade de dégager les points-clés qui pourront soutenir les réflexions pendant les travaux
en ateliers.

L’intervention de Thierry PICQ a bien montré que la fonction du manager est profondément contingente des
organisations et des domaines d’activité dans lesquels elle s’exerce.
Il ressort aussi de cet exposé que le management subit à l’heure actuelle des transformations profondes ;
dans le secteur privé, le management s’oriente vers des dispositifs beaucoup plus flexibles, éclatés et
précaires. Au sein du management public, les réformes se réfèrent davantage à un type de logique/client.
La LOLF insiste, en effet, sur l’importance de la responsabilisation et sur le développement d’unités
décentralisées. Dans ce cadre, le manager devient animateur d’équipes et accorde une grande part de son
action à l’évaluation des résultats. L’exigence de performances est à l’œuvre aujourd’hui au sein des services
publics et est certainement due à une remise en cause de la légitimité de l’État.

L’objectif est ainsi de davantage prendre en compte l’usager, ce qui peut représenter un progrès mais aussi
un danger en fragilisant à terme les politiques publiques. La redéfinition de l’action publique à un périmètre
plus restreint peut aussi conduire à davantage de délégations, de partenariats, qui rendent la frontière de
la sphère publique plus incertaine. Ce phénomène a beaucoup de conséquences sur les acteurs de terrain.
Ces logiques de transformations profondes ont nécessairement des impacts sur la nature des personnes à
recruter dans nos organisations.

Un autre point à relever est la particularité de la dualité politique/manager. Le politique est censé jouer un rôle
de leader et le manager celui de gestionnaire administratif de haut niveau. Or, cette distribution des tâches est
souvent mise à mal dans les faits : le manager, face à l’inaction des politiques, peut être tenté d’élaborer des
politiques publiques et inversement, pour vaincre les immobilismes, le politique peut intervenir massivement
dans les administrations, au risque de trop techniciser son action.

Les processus de changements accélérés émanant du privé apparaissent dans la sphère publique, malgré la
plus grande complexité du contexte et des actions. Le secteur public est contraint en effet de faire cohabiter
des actions de gestion de masse avec des logiques d’innovation. Par exemple, les C.R.O.U.S gèrent la
restauration universitaire et se voient investis aujourd’hui d’une mission de développement du logement
au niveau local. Il est très difficile d’exercer des activités aussi différentes au sein d’une même structure.
Cette diversité d’interventions est propre au secteur public qui ne peut pourtant pas fragmenter son action
à l’envie.

Dès lors, comment former au management ? Il est clair qu’un module de management ne sera pas suffisant :
c’est bien un programme plus vaste qui peut amener un certain nombre de résultats. Il est plus que jamais
nécessaire d’interroger l’ensemble des contenus de formation.

Une autre question est celle du public à former. Former des cadres qui ont déjà une expérience professionnelle
et former des jeunes qui s’apprêtent à intégrer les organisations sont deux choses bien distinctes. Il est
crucial de garder à l’esprit que la formation est un processus à long terme.

32
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Par ailleurs, le cadre est certainement une personne capable de se former elle-même. Il revient donc aux
écoles de transmettre des outils qui accompagnent l’agent dans cette démarche.

Les dimensions collectives de la formation impliquent aussi une déclinaison des priorités politiques dans les
contenus pédagogiques, notamment celles des politiques de changement.

Au-delà de ces questions, les écoles doivent identifier le cœur de leur métier. Choisir les bons formateurs
et les contenus adaptés est un objectif ambitieux, mais la nécessité de transmettre des connaissances
directement applicables se pose avec acuité. C’est selon moi cette dernière ambition qui est amenée à
occuper, à l’avenir, une place centrale dans l’action des écoles de service public.

33
Atelier n°1
Animatrice : Anne-France Didier - ENTE (école nationale des techniciens de
l’équipement)

Rapporteurs : Maxence Chorvot - INET (institut national des études ter-


ritoriales) - Michel Louazel - ENSP (école nationale de la santé publique)
- Marie-Noëlle Pailloux - ENTPE (école nationale des travaux publics de
l’Etat).

Deux témoignages : Jacqueline Magnier, responsable de la formation


initiale des élèves administrateurs territoriaux à l’INET - Joseph MOISAN,
responsable de la filière « Directeur d’hôpital » de l’ENSP.

Participants : Anne Delmas (ENSSIB) - Martine Faure (EN3S) - Béatrice


Gayet (ENG) - Eric Larcher (ESEN) - Richard Pégourie (EOGN) - Didier
Rosselin (ENSPo) - Dominique Schaefer (ENAP) pour la 1ère séquence.

De l’émergence du besoin
à la réalisation d’une formation
au management public
ou comment se conçoit
la formation au management
public ?

34
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Objectif

Dans cet atelier, il s’agissait de réfléchir sur le processus amont de conception d’une formation en management
public, c’est à dire sur toutes les étapes allant de la détection et du traitement des besoins de formation
jusqu’aux choix présidant à la conception d’actions de formation :
- Quels sont les éléments déclencheurs de la décision ?
- Comment sont recensés les besoins de formation en management public et par qui ?
- Comment sont-ils analysés et par qui ?
- Quels sont les problèmes rencontrés par les écoles dans l’identification et dans la formulation des
besoins ?
- Quelles questions et problèmes spécifiques se posent lorsqu’il y a une commande d’un employeur
(institution ou collectivité territoriale) ?
- Quel rôle pour les écoles de service public au regard de l’identification et de l’analyse des besoins ?
- Et par conséquent, quels savoir-faire développer dans les écoles de service public ?

L’atelier s’est déroulé en trois séquences qui se sont intéressées successivement :


- aux constats sur l’existant (comment les écoles appréhendent les besoins ?) ;
- aux questions et problèmes liés à l’identification des besoins ;
- aux éléments de prospective et pistes d’actions possibles.

 Séquence 1 - Quelles sont les pratiques actuelles des écoles de service public en
matière de recensement et d’analyse des besoins de formation en management public ?
Présentation de deux expériences : INET (Institut national des études territoriales) et
ENSP (École nationale de la santé publique)

- Quels sont les besoins ? (besoins individuels ou personnels, collectifs, de l’institution) ;


- Qui s’exprime sur les besoins ? (commanditaires de formation, professionnels ou supérieurs
hiérarchiques, futurs stagiaires…) ;
- Pour quelle période de formation (formation initiale, formation continue ?) ;
- Pour qui ? Les besoins varient-ils selon le positionnement hiérarchique ou les fonctions tenues ?
- Et quand former au management public ? Sur quelles bases (référentiels, demandes spontanées,
stratégie de formation…)? ;
- Comment et avec qui sont construits les référentiels existants (métier, compétences, formation) et
comment sont-ils exploités par les écoles de service public ?

La question de l’existant a d’abord été abordée sous un angle pratique au travers du témoignage liminaire
de deux écoles (INET et ENSP) sur leur expérience en matière d’identification des besoins de formation
en management public, ce qui a constitué une base pour nourrir les échanges avec les participants des
différentes écoles.

1ère Expérience : L’INET (CNFPT), un recueil des besoins à travers l’activation des
structures paritaires existantes, l’utilisation plus ou moins informelle des retours
d’expérience des élèves et des stagiaires ainsi que les référentiels et les enquêtes
sur les métiers
[Présentation de J. Magnier, responsable de formation des élèves administrateurs territoriaux à l’INET]

Au départ, il est nécessaire d’avoir à l’esprit que le management public est ici envisagé comme étant
spécifique.

35
Présentation du CNFPT, de l’INET et de l’organisation pour recueillir les besoins de formation
Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) est un établissement public national qui organise
les concours, la formation, la professionnalisation ainsi que la régulation de la carrière et de l’emploi des
agents de la fonction publique territoriale (1,6 millions d’agents). Il est financé par une cotisation obligatoire
des collectivités locales (régions, départements, communes) et de leurs établissements qui correspond à 1%
de leur masse salariale. Il s’organise en 28 délégations régionales, des services centraux ainsi que quatre
écoles d’application dédiées à l’encadrement intermédiaire (les ENACT) et un institut, l’Institut national des
études territoriales (INET). L’INET est une structure mise en place par le CNFPT pour former les cadres de
direction des collectivités de plus de 40 000 habitants (A+ et A en situation de responsabilité). Il dispense une
formation initiale d’application (FIA), avec un statut d’élève, les administrateurs territoriaux (une soixantaine
par promotion) et les conservateurs territoriaux de bibliothèque ou du patrimoine (sur la base d’une
convention avec l’ENSSIB, l’INP). Il forme également en FIA les administrateurs territoriaux nommés dans
le cadre de la promotion interne, les ingénieurs en chef, les médecins territoriaux, vétérinaires, biologistes et
pharmaciens (la durée de la formation dépend du cadre d’emploi). L’INET accueille également, sur les mêmes
profils, des stagiaires en formation continue (FC) - un peu plus de deux cents par an - au sein de formations
sur catalogue où les publics sont mixés (FIA et FC). Les formations sont principalement orientées sur le
management, qu’il soit opérationnel ou stratégique, en fonction de thématiques particulières (management
par projets, gestion stratégique des finances locales, pilotage de l’action publique territorialisée, construction
et évaluation des politiques publiques, etc.). Le CNFPT se caractérise par sa gestion paritaire : les représentants
des employeurs (les élus locaux) et les représentants de leurs personnels (les syndicats) siègent et délibèrent
au sein du conseil d’administration, du conseil national d’orientation (CNO) et des 28 conseils régionaux
d’orientation (les CRO). Le CNO élabore les priorités nationales de formation et les CRO les déclinent en
fonction du contexte local. Les orientations de formation font l’objet d’un vote.

Les structures paritaires du CNFPT sont en elles-même une source de recueil des besoins de formation
pour l’INET, en particulier en raison de la présence des employeurs dans les instances décisionnelles et de
l’ancrage territorial fort de l’établissement (les délégations et conseils régionaux d’orientation).

Il existe un référentiel national des métiers et c’est à chaque responsable de formation de l’INET d’en
déduire les référentiels de formation. Le répertoire des métiers est récent puisqu’il date de 2004/2005. Les
délégations régionales et les collectivités s’appuient aussi dessus.

Un observatoire des métiers réalise des études thématiques et statistiques sur l’emploi et les métiers
territoriaux (observation, analyse, prospective).

Le référentiel est enrichi par une veille sur l’évolution des métiers de direction des collectivités territoriales.
Cette veille s’organise notamment à travers les pôles de compétences du CNFPT qui produisent des notes
sectorielles sur les métiers de la FPT et leur évolution. L’INET est, par exemple, pôle de compétence sur le
management stratégique et la DR Rhône-Alpes Lyon sur les pratiques managériales. La difficulté consiste
ensuite à traduire les compétences en objectifs de formation. C’est là qu’intervient le travail de l’équipe
pédagogique, travail qui aboutit à la programmation annuelle des actions de formation.

Au titre de la veille, il faut souligner l’intérêt, pour les cadres pédagogiques responsables de formation de
participer, aux congrès et assemblées générales des associations professionnelles (AATF, AITF, etc.)

Le cas de la formation au management public

Contenu de la note sectorielle concernant le management public


Cette note présente les facteurs d’évolution du management public dans le milieu territorial : il s’agit d’un
constat. Les cadres institutionnels et le management public ont profondément évolué depuis « l’acte II » de
36
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

la décentralisation et l’intercommunalité. Il s’agit aujourd’hui de maîtriser la dépense publique. Le travail de


veille législative et réglementaire est aujourd’hui très important dans de nombreux domaines : travailleurs
handicapés, risques, e-administration, etc. L’évaluation des politiques publiques est devenue à la fois une
nécessité et une obligation. Les modes de l’action publique changent :
- Territorialisation (ex. : les maisons du département) qui surdétermine l’organisation du travail et de
l’action publique ;
- Partenariat horizontal (avec l’Etat, les fonds européens, le secteur associatif) ;
- Contractualisation verticale avec l’Etat ;
- L’apparition de la notion de performance par le biais de la LOLF ;
- Gestion de la proximité.

Ces évolutions institutionnelles s’accompagnent d’évolutions techniques et technologiques (NTIC, « e-


administration ») qui posent la question de la gestion stratégique des systèmes d’information en interne
et en externe. C’est une situation riche en opportunités car les collectivités territoriales ont une part de plus
en plus importante dans l’élaboration, la conduite et l’évaluation des politiques publiques dans un contexte
néanmoins mouvant et non exempt de risques (marchés publics, etc…). Ces différents éléments ont une
incidence sur le rôle des cadres de la fonction publique territoriale :
- Plus de management stratégique et de transversalité ;
- Une accentuation du travail collaboratif ;
- Une approche en termes de marketing et de prospective.

Cela se traduit par une évolution des compétences et le développement de compétences comme la médiation
et la négociation (cf. partenariats), ainsi qu’un regard particulier sur la relation entre l’élu et le cadre dirigeant,
c’est-à-dire disposer de grilles pour analyser les configurations qui peuvent se présenter :
- Le directeur général des services (DGS) qui décide à la place de l’élu ;
- L’élu qui s’adresse directement aux services administratifs, etc.

Le travail du formateur est ici de former les cadres de direction à l’aide à la décision de l’élu, dans le cadre
d’une véritable fonction de maîtrise d’ouvrage et d’ensemblier des politiques publiques locales.

Une dimension particulière du métier auquel prépare l’INET est la posture du cadre de direction des
collectivités territoriales vis-à-vis des élus et de leur cabinet avec souvent l’absence de « n+1 » dans la
hiérarchie administrative.

À cette organisation se rajoutent différentes voies plus ou moins informelles pour sonder le besoin : les
retours de stage ou de mission des élèves, le vécu des stagiaires en FC, l’expertise des intervenants.

Les besoins repérés dans le cadre du cursus des élèves administrateurs en FIA
Pour le responsable de formation des élèves administrateurs territoriaux (EAT), le traitement des besoins
se fait aussi en cours de formation. Celle-ci dure 18 mois se répartissant en 6 mois de stages théoriques et
12 mois de stages pratiques. Ceux-ci, effectués, sauf exceptions, au sein d’une collectivité, donnent en effet
lieu à des rapports de stages qui permettent aux cadres pédagogiques de déceler des besoins émergents en
lien avec le terrain professionnel. Certains de ces stages consistent en une véritable mission de consultance
effectuée par des petits groupes d’élèves encadrés par un intervenant : les « projets collectifs ». Les travaux
sont restitués à la collectivité et à l’INET devant un jury de professionnels. Les bilans de stage donnent une
vision des activités conduites et la façon dont les cadres pensent leur formation.

37
Les entretiens individuels avec les stagiaires en FIA (EAT et autres) dans le (et hors du) cadre du PIF
(projet individuel de formation)
La relation de face à face entre le cadre pédagogique et les élèves permet l’expression de manière informelle
d’un certain nombre de besoins (« Je m’appuie sur les difficultés ressenties. », comme, par exemple, les
questions liées à la compréhension de l’environnement ainsi que la compréhension de la commande). Ces
besoins ne peuvent d’ailleurs tous trouver leur satisfaction dans une action de formation. Les retours de
stage sont une source de recueil potentiel des besoins. Une autre source est constituée par les entretiens
individuels avec les stagiaires en FIA afin de co-élaborer leur projet individuel de formation. Il s’agit non
seulement des EAT, mais aussi de toute une série de stagiaires qui s’apprêtent à changer de poste/de grade
à l’issue d’un concours ou d’une promotion interne et qui sont soumis à une obligation de formation dont la
durée varie selon le cadre d’emploi. Les entretiens individuels sont destinés, à partir de l’expérience vécue, à
déterminer avec l’intéressé ses besoins en formation, après l’avoir aidé à faire le point. La réponse ne passe
pas forcément par la formation et pas forcément par l’INET : « Tout n’est pas soluble dans la formation ».

Deux exemples de sources d’expression des besoins lors de la formation continue : les missions de
consultance du CSM et les bilans professionnels de type « bilan management »
 Le Cycle supérieur de management (CSM) : il s’agit, pour des cadres confirmés, en exercice, de perfectionner
leur management stratégique et opérationnel par un cycle structurant se déroulant sur un an. Outre des
phases théoriques, le cycle amène les stagiaires à répondre à des demandes de consultance, sur des sujets
précis, de la part des collectivités territoriales.
 Les bilans professionnels (ex bilan management). Ils sont destinés aux cadres supérieurs de la FPT désireux
de s’engager dans une démarche de bilan pour élaborer un projet d’évolution professionnelle cohérent,
raisonné et réaliste. Les besoins liés à la posture du manager dans son équipe, vis-à-vis de sa hiérarchie et
de son élu, s’y font toujours sentir.

Des enquêtes spécifiques (ex : enquête du CNAM)


L’idée du RESP de lancer une étude sur le métier de cadre de direction dans l’ensemble de la sphère publique
s’est traduite, pour qui concerne l’INET/CNFPT, par un travail des chercheurs du CNAM sur l’évolution
des métiers de DGS et DGA (analyse de l’activité professionnelle). Il s’agit d’un recensement, pas encore
d’une analyse. Le but est de positionner les besoins émergents dans les différentes enquêtes par rapport au
référentiel. C’est l’idée de disposer d’un outil partagé pour analyser les métiers et les compétences qui leur
sont associées.

De ces différentes sources émerge la programmation annuelle de l’offre de formation sur catalogue de l’INET,
sachant que la formation des EAT obéit à des principes un peu différents, en particulier en raison de la réforme
des études et le tronc commun obligatoire avec les élèves de l’ENA depuis la rentrée 2006.

Questions

Quel est le parcours antérieur des EAT ?


Sur une promotion de soixante élèves, la moitié est composée d’externes de 24/25 ans originaires de Sciences
Po. Les internes viennent des collectivités locales ou des services de l’Etat. 10% environ sont passés par le
3ème concours et viennent du secteur privé. On voit bien l’hétérogénéité des publics.

Comment s’agencent les périodes de stages théoriques et pratiques ?


On essaie de varier les stages, les durées, les lieux d’accueil. La durée est aussi fonction des objectifs de
stage. Ce sont les stagiaires qui choisissent les stages et les collectivités.
Il faut aussi souligner que personne n’est affecté à l’issue de la formation, les administrateurs territoriaux
sortant de l’INET ont à trouver leur emploi dans une collectivité.

38
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

La notion de besoin : est-ce que le besoin est une donnée, est-il visible à l’œil nu ? Ou est-il à cerner par
une analyse ? Et si c’est à l’œil nu, faut-il enchaîner automatiquement sur une formation ? Si le besoin
de formation est de l’ordre du ressenti, quel est le ressenti à prendre en compte : celui du stagiaire, de
son supérieur, du cadre pédagogique ?
Les EAT passent tous les quatre mois devant un conseil d’évaluation composé d’universitaires reconnus et
de cadres dirigeants en exercice des collectivités territoriales qui évaluent leur parcours. Par ailleurs, lors
des stages en collectivités, les élèves ont chacun un tuteur qui doit remplir une fiche d’évaluation, mais cela
n’est pas satisfaisant dans la mesure où il s’agit juste d’un texte très général sur les qualités d’intégration du
stagiaire et sur le type de poste qu’il devrait rechercher.

2ème expérience : la construction d’un référentiel de métier de directeur d’hôpital


(DH) à l’ENSP : une démarche de projet au cœur d’un milieu professionnel
[Présentation de J. Moisan, ancien directeur d’hôpital, enseignant en droit à l’ENSP et responsable de la filière DH]

Présentation de l’école et des enjeux du milieu professionnel (directions d’hôpitaux)

L’Ecole nationale de la santé publique forme des cadres de santé publique (directeurs d’hôpitaux, inspecteurs,
médecins, pharmaciens de santé publique…), que ce soit dans le secteur public ou plus largement tout type
de cadre intervenant dans les politiques de santé publique (dix filières). Elle dispose d’un corps d’enseignants
et de chercheurs en santé publique et s’attache en permanence à concilier enseignement et terrain. L’ENSP
noue également des coopérations internationales en matière de recherche et de formation (par ex. : formation
de directeurs d’hôpitaux au Maroc). Les missions du responsable de formation sont d’organiser la formation
des directeurs d’hôpitaux (27 mois dont 13 mois de stages pratiques), et d’accompagner les stagiaires (60%
projets individualisation). Cette formation s’effectue au sein d’un regroupement en pôle de trois filières pour
formater les cadres oeuvrant dans les structures hospitalières publiques afin de mutualiser les outils et les
processus. Le responsable de formation participe également à l’évaluation du système de la formation.

Le travail de réorganisation de la formation s’inscrit dans un contexte interne de transformation de l’ENSP en


établissement public (EHESP) sous-tendue :
- Par une volonté de créer un réseau fédérateur de tous les acteurs et toutes les ressources qui oeuvrent
dans le domaine de la santé publique ;
- Par un environnement en pleine mutation, à savoir la dernière réforme hospitalière qui impacte le
management hospitalier.

Le plan gouvernemental « hôpital 2007 » organise en effet un nouveau mode de financement pour les
hôpitaux : on quitte le confort relatif du système de la dotation globale, pour revenir à une tarification à l’activité
(la « T2A »). Les directions des hôpitaux doivent donc connaître aux mieux les coûts, restructurer les services
pour être concurrentiels avec le privé et faire des choix. Il s’agit d’une culture économique nouvelle à partager
entre les différents acteurs, notamment dans le cadre du « projet médical de territoire » qui amène à une
stratégie hospitalière plus offensive et à une « nouvelle gouvernance hospitalière » qui se généralisera à partir
de 2007, dans le cadre d’un co-pilotage médico-administratif. Ceci implique également une nouvelle culture
organisationnelle. Les services se regroupent en pôles, avec pour chaque pôle un chef de pôle (un médecin,
avec un principe de gestion de proximité et des délégations). Cette nouvelle organisation va sans doute se
traduire par la montée en puissance du rôle des directeurs adjoints des hôpitaux comme coordinateurs des
pôles. D’un point de vue quantitatif, d’un effectif de 3300 directeurs d’hôpitaux (90 nouveaux directeurs
d’hôpitaux en moyenne sont formés chaque année), on va passer à un effectif de moins de 2000. En moyenne,
à l’issue de la formation, le temps passé au poste de directeur adjoint est compris entre 4 et 8 ans. Un décret
imminent va créer un centre national de gestion des cadres hospitaliers, véritable service de gestion des
ressources humaines.

39
Les besoins découlent des réformes récentes du système hospitalier public

Selon la loi hospitalière, les directeurs doivent inscrire l’hôpital dans une démarche à 5 ans : l’équipe de
direction détermine le projet d’établissement pour 5 ans avec les partenaires. En plus de l’aspect stratégique,
on retrouve toutes les composantes de la gestion au quotidien (soins, social, information, RH, finances, etc.)
ainsi que les exigences de qualité, de sécurité et de continuité du service public. Aux aspects fonctionnels
nécessitant une maîtrise des méthodes (finances, logistique, économie) s’ajoutent donc, pour le DH,
des aspects de management interpersonnel : animer et mobiliser une équipe, arbitrer, négocier avec les
partenaires, gérer les crises (l’hôpital étant un milieu souvent conflictuel)…

Face à ces enjeux de formation importants, il y a une véritable « solitude de l’organisateur de formation ».
Solitude par rapport au ministère, l’école étant rattachée directement à celui-ci : le silence relatif du ministère
(en particulier la DHOS, qui ne formule jamais de demandes) est-il une marque de confiance ? Solitude par
rapport aux professionnels, (que ce soient les syndicats de la profession ou les associations d’anciens élèves)
qui n’investissent pas dans la formation. En revanche, un travail permanent d’adaptation est fait entre le
responsable de formation et les responsables de modules qui sont souvent d’anciens directeurs d’hôpitaux.
Le métier de responsable de formation et celui de responsable de module évoluent, ce qui amène les conseils
de filières réunissant les responsables des modules, la direction des études et les délégués des élèves à
réfléchir à ces évolutions.

Il existe trois formes de formation obligatoires pour les DH :


- la formation continuée : statut oblige à se former tous les ans ;
- la formation d’adaptation à l’emploi à l’occasion d’un changement de poste ;
- une formation obligatoire pour les directeurs d’établissements.

Un comité pédagogique regroupant la DHOS, les syndicats et associations d’anciens élèves organise une
fois par an une journée de réflexion sur les évolutions de la FI et de la FC.

La construction de référentiels pour former les directeurs d’hôpitaux

En 2003 à l’initiative des anciens élèves réunis en association, avec une chercheuse, Chantal Heyraud, ont été
déterminés dix champs d’activité professionnelle, suite à une série d’entretiens avec des professionnels. Ces
champs ont donné lieu à une description et à une traduction en termes de compétences. Il y a eu des allers-
retours vers les interviewés. Le référentiel de compétences a été créé en 2005.
En 2006, il s’agit de définir les savoirs et connaissances indispensables pour mettre en œuvre ces compétences
professionnelles, afin de construire un référentiel de positionnement.
A partir de 2007 sera systématisé un document déclaratif à remplir par les élèves (cf. annexe référentiel de
positionnement ENSP), ainsi qu’un entretien servant à tracer le parcours de formation de chacun (aide aux
choix des stages, etc.). Des « bilanteurs » seront formés à cet effet. Des fiches pédagogiques traduiront le
projet de formation.
Il faut que tout le système pédagogique soit revisité à partir de la notion de compétences professionnelles qui
s’organisent en deux axes majeurs :
1. Les compétences « socialement attendues » ;
2. les compétences liées à la mise en œuvre de projets (les élèves sont pourtant satisfaits de la formation
actuelle, Cf. enquête du CREDOC).

40
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Questions

Des compétences repérées comme nécessaires (les « compétences socialement attendues »), on passe
à l’identification des compétences et à des fiches sur les connaissances. Où sont les savoirs-faire et
savoirs-être ?
La traduction des compétences attendues en objectifs de formation passe par la déclinaison des compétences
en connaissances, savoirs-faire et savoirs-être. La notion de « compétences socialement attendues » est
vaste et relativement exhaustive. Il faut aussi préciser que 13 mois de stages donnent lieu à un rapport qui
vient compléter le dispositif.

Dans cette configuration, qui est porteur de sens (celui du service public), sachant qu’il s’agit là d’une
des caractéristiques du manager public ?
Un projet d’établissement est arrêté en CA pour 5 ans, c’est là qu’on retrouve les autres acteurs et que le sens
est donné.

Est-ce que le turn-over dans ce type de fonctions n’est pas antinomique avec la logique du projet
quinquennal et d’inscription dans un territoire ?
Les projets peuvent au contraire inciter un DH à rester plus longtemps dans le même poste, afin de voir son
projet aboutir.

État des lieux des écoles : de la commande institutionnelle au recueil informel des
besoins de formation en management public

En formation initiale, l’élaboration des programmes peut relever de processus très différents :
- Processus centralisé avec consultation de l’école sur des contenus prédéfinis
- Processus plus déconcentré avec formalisation par l’école validé en conseil d’administration ou avec
une réflexion partenariale avec les différents acteurs concernés.
La validation par le CA est plus ou moins formelle et plus ou moins étendue, pouvant, au delà du programme,
concerner les intervenants. Dans certains cas, la validation des programmes relève d’un comité technique
paritaire de branche.

Des formations « prise de poste » peuvent être institutionnalisées et rendues obligatoires à un changement
de grade ou à l’accès d’une fonction directoriale (commande centrale).

En formation continue, des plans nationaux de formation (PNF) sont élaborés le plus souvent par les
administrations centrales et peuvent être déclinés à des niveaux régionaux voire départementaux. Une circulaire
de cadrage présentant les orientations stratégiques des ministères pour l’année n+1 peut éventuellement se
substituer à ce PNF. Les commandes institutionnelles centrales représentent en général 20% de l’activité
de formation continue des écoles et sont parfois le fruit d’une actualité urgente, comme par exemple une
commande de formation à la déontologie après un dérapage des forces de l’ordre médiatisé. Plusieurs écoles
signalent que 80% des besoins en formation sont repérés au cours des stages, auprès des apprenants ou des
intervenants et conduisent à une offre importante de formations par l’école.
Dans la plupart des cas, la collecte des besoins n’est pas organisée. Mais une évolution est perceptible avec
une gestion des ressources humaines moins administrative et plus centrée sur la gestion prévisionnelle des
emplois et les compétences (GPEC) : le recueil des besoins se structure et est accompagné de l’élaboration
de référentiels métiers, compétences et formations.

41
Plusieurs méthodes pour recueillir les besoins en formation continue sont citées :
- Enquêtes spécifiques ;
- Exploitation des remontées des entretiens d’évaluation effectués avec le supérieur hiérarchique ;
- Recueil systématique par le biais d’une question dans les questionnaires d’évaluations des formations
suivies ;
- Retours lors de l’évaluation différée de la formation initiale effectuée auprès des élèves et des
employeurs un an après leur sortie d’école ;
- Séminaires régionaux réunissant les acteurs de la formation initiale, continue et les cadres…

L’élargissement du recueil des besoins aux partenaires des agents concernés diversifie les données recueillies :
un préfet interrogé sur les besoins en formation d’un commissaire de police peut avoir un point de vue très
différent de celui de l’administration centrale.

Ce qui particularise les formations dans le domaine du management public tient à la relative pauvreté de la
commande, le management n’étant pas toujours repéré comme une composante importante des métiers des
cadres ou restant un sujet tabou. Les formations en management doivent tenir compte de la personnalisation
des parcours, s’ancrer au plus près des situations professionnelles rencontrées par les stagiaires. Les besoins
détectés en management ne relèvent d’ailleurs pas toujours d’une réponse formation.

 Séquence 2 - Questions et problèmes liés à l’identification des besoins de formation au


management public : difficultés liées au contexte, aux acteurs, aux méthodes

Les participants sont invités à repérer et formaliser de manière précise et concrète les questions et difficultés
posées par l’identification des besoins de formation au management public :
- Quels sont les problèmes rencontrés par les écoles dans l’identification et l’analyse des besoins en
formation au management public ?
- Quelles questions et problèmes spécifiques se posent lorsqu’il y a une commande d’un employeur
(formation « intra »…) de l’institution (volonté de la hiérarchie…) ?
- Peut-on identifier des spécificités des problèmes d’identification et d’analyse des besoins en formation
au management
public en formation initiale et en formation continue ?

Nota : les débats de l’atelier ayant été foisonnants, on retrouvera ci-après les éléments recueillis tout au long des 3
séquences de l’atelier 1 concernant les difficultés relatives au recueil de besoins de formation ou relatives à la commande
de formation.

Quels sont les problèmes rencontrés par les écoles dans l’identification et l’analyse
des besoins en formation au management public ?

Un contexte d’évolution permanente qui impacte les métiers, les compétences et, de fait, la déclinaison
en formation

Deux mouvements majeurs caractérisent l’environnement de l’action publique et donc le métier des cadres
de direction du secteur public :
- Le processus de décentralisation qui ne cesse de s’approfondir, (au travers notamment du transfert
croissant de compétences et de charges nouvelles), ainsi que la montée en force de l’intercommunalité et de
la multiplicité des acteurs constituant une véritable gouvernance des territoires ;
- La restructuration des finances publiques (la LOLF, la responsabilisation croissante des agents) qui
nécessite de faire plus et mieux avec des ressources budgétaires limitées. Ces mouvements entraînent une
nouvelle manière de piloter l’action publique axée sur la territorialisation et la co-construction des politiques

42
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

publiques impliquant des choix stratégiques et une mobilisation permanente des équipes. Le métier de
manager public comporte par conséquent ces deux dimensions que sont le développement d’une vision
stratégique et le travail sur les postures personnelles en situation de travail partenarial, de négociation et de
mobilisation de la ressource humaine des organisations publiques.

Ce contexte si incertain et complexe est un élément qui rend le travail de prospective délicat. Et pourtant :
« nourri de l’expérience d’hier, on forme aujourd’hui les cadres de demain ».

Les besoins recensés ne sont pas exhaustifs

Les besoins identifiés sont ceux auxquels on tente de répondre dans les formations. Mais peut-on véritablement
recueillir les besoins ? Comment identifie-t-on tous les besoins ? Les remontées de ces besoins par la voie
des entretiens d’évaluation des cadres ne sont pas encore généralisées, à cause de la présence forte de
tabous (difficile de reconnaître un besoin en formation face à un supérieur hiérarchique).

Qui doit être responsable du recueil de ces besoins ?

Les points de vue sur les besoins en formation au management public d’un cadre peuvent être différents
selon les acteurs : supérieur hiérarchique, cadre concerné, administration centrale… sans oublier les
partenaires ou interlocuteurs du cadre (un préfet par exemple peut avoir son point de vue sur les besoins en
formation des commissaires de police…). La responsabilité du recueil des besoins de formation d’un individu
relève en principe du supérieur hiérarchique, celle des besoins collectifs relève plutôt d’une structure (école,
administration centrale…). De ce fait, les risques de recensement partiel des besoins existent. A noter que
pour l’administration centrale les besoins ne s’appuyant pas sur les référentiels métiers ou de compétences
sont souvent des besoins mis en évidence par les à-coups de l’actualité (un dérapage de la police peut par
exemple entraîner une commande de formation sur la déontologie).

Les publics formés sont hétérogènes et spécifiques

L’un des facteurs déterminant le besoin de formation est l’âge auquel on accède à la fonction de manager (ex :
25 ans pour un commissaire, environ 43 ans pour un directeur d’hôpital).
L’âge et donc l’expérience professionnelle et familiale sont des facteurs qui influent sur la nature des besoins.
Les élèves en formation initiale constituent une cible diversifiée qui complexifie le recueil des besoins.
L’accès à des métiers à fortes responsabilités de plus en plus jeune (par suppression des postes d’adjoints
qui permettaient d’acquérir de l’expérience par exemple) repose de façon accrue l’adéquation de la formation
initiale aux situations professionnelles futures.

En matière de formation continue, le choix d’un thème de formation au management est dans la plupart des
cas laissé au libre arbitre du cadre demandeur. L’offre proposée est alors multiple (concurrence entre les
différents organismes de formation continue).

Quelles questions et problèmes spécifiques se posent lorsqu’il y a une commande


d’un employeur (formation « intra »…) de l’institution (volonté de la hiérarchie…) ?

La commande institutionnelle et ses difficultés

La commande est diverse : inexistante ou décalée, informelle ou structurée, plutôt construite sur les besoins
collectifs qu’individuels…

43
La commande (ou la recommandation !) d’une formation en management public pour un cadre est très
rarement effectuée par le supérieur hiérarchique de ce cadre.
Pour l’INET en particulier : quand le n+1 n’existe pas, comment s’expriment les besoins de formation ?
Comment former les cadres de direction en relation directe avec les élus ?

Si les besoins collectifs, appuyés sur l’élaboration de divers référentiels, sont traduits dans les commandes
passées aux écoles par l’administration centrale, pour les besoins individuels la prise de conscience est plus
récente. Certaines orientations en matière de formation au management évoluent en faveur de l’individualisation
du traitement des besoins (bilan de compétences, accompagnement, coaching...) en n’ayant pas toujours
recours à la formation.

Une commande institutionnelle « thématique » liée à l’actualité est souvent décalée par rapport au métier des
stagiaires ou des élèves.

Dans plusieurs cas, les cahiers des charges n’existent pas et la commande est informelle.

Spécificités des commandes de formation au management public en formation initiale et en formation


continue

En formation initiale, le problème de l’absence d’expérience professionnelle peut se poser :


- La formation au management public doit se nourrir des expériences terrains ;
- La formation continue est souvent un acte volontaire du cadre ;
- L’offre est multiple et les écoles sont souvent en situation concurrentielle ;
- L’offre en formation continue n’est souvent appuyée que sur les besoins recensés à partir des retours
effectués par les stagiaires ou les intervenants.

Peut-on travailler sur des savoirs-être ?

La part des savoirs-être dans les compétences du manageur est importante. Le groupe s’est arrêté longuement
sur les difficultés suivantes, qui renvoient à des problématiques traitées dans les ateliers 2 et 3.

Peut-on contribuer à ce que quelqu’un développe des attitudes, des comportements


différents ? Et comment traduire certaines compétences (voire des attitudes) en
formations ? Quelle prospective peut-on faire sur ces aspects-là des métiers ?

« Ce qui est sûr, c’est qu’on ne peut pas former uniquement par la parole. »

Deux pistes :
- l’individualisation de la formation (suivi individuel, tests connaissance de soi, coaching…) ;
- la formation ancrée dans les situations professionnelles (coanimation de consultants et de professionnels
du même métier que le stagiaire ; montage de situations fictives proches du réel d’apprentissage).

Dans le domaine du management, les écoles peuvent faire appel à des intervenants extérieurs de type
consultants ou coachs par le biais de consultations. Leur rôle peut être d’accompagner les stagiaires dans
leurs projets personnels (ex : élèves administrateurs) ou de leur faire prendre conscience des différents
profils managériaux par le biais d’entretiens avec un psychologue ou de tests de personnalité : le retour est
alors individuel et facultatif. Ces dispositifs ne sont pas toujours bien adaptés à la formation initiale et peuvent
se révéler à contre temps. Ils peuvent être utiles quand il y a ultérieurement un entretien de recrutement.

44
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Il peut aussi être fait appel à un référent, personne du milieu professionnel qui se porte témoin des
apprentissages à valoriser, qui constitue une aide technique sur les métiers et favorise l’apprentissage par le
groupe, par des phases d’écoute et d’échanges avant et après les stages.
Un autre type d’outils est la mise en place de situations décalées de type semaine sportive ou de vacances ou
de situations professionnelles fictives (simulation de crises) ou extrêmes pour tester en grandeur nature les
capacités à vivre en équipe ou à encadrer une équipe.
Dans tous les cas, il s’agit plus de prendre conscience de ses limites que de contribuer à une véritable
évolution personnelle, même si c’est l’objectif affiché.

Il n’y a en général pas de recrutement professionnel mais un accès par concours. De ce fait dans certaines
écoles on estime à 10% les profils inadaptés à la fonction future. Cela fait des dégâts… sauf quand l’école a
les moyens d’éliminer ou de réorienter les élèves concernés (métiers de l’urgence et de l’ordre public).

« On ne peut pas travailler sur des savoirs être avec la formation ».

Est évoquée incidemment l’expérience de coaching des DIREN (directeurs régionaux de l’environnement),
orientée vers la connaissance de soi, la gestion des conflits, le travail sur les postures, les clés de lectures, le
parcours personnel. Il y a une réticence et des tabous à dépasser pour que les besoins qui sous-tendent ce
genre de dispositif s’expriment de manière explicite. Dans certains cas, se faire coacher peut être assimilé à
un signe de faiblesse.

Ce long débat pointe le fait que dans le domaine du management public, la formation n’est pas le seul dispositif
pour répondre aux besoins en compétences. L’accompagnement par des coachs, le tutorat exercé par des
collègues expérimentés sont d’autres moyens auxquels peuvent recourir les écoles dans les formations
qu’elles organisent et auxquels les administrations centrales sont de plus en plus sensibilisées. Le problème
n’est alors plus de recenser les besoins en formation mais plutôt d’offrir aux cadres des moyens adaptés pour
les aider à résoudre leurs difficultés au quotidien. La question se pose du rôle des écoles de service public
dans l’offre aux cadres, tout au long de leur carrière, de ces dispositifs autres que la formation.

La question du « recrutement » des publics en formation initiale

La question des publics en formation initiale dans nos écoles a été élargie au recrutement des élèves, tant il
est apparu que les modes d’entrée conditionnent ensuite la manière dont les besoins sont pris en compte et
les formations doivent être construites.

Il faut faire la distinction entre les connaissances, la réussite aux examens et aux épreuves intellectuelles et la
capacité ou non à occuper un poste donné. Des problèmes de comportements peuvent être détectés lors du
passage à l’école. On peut être bon en théorie, adapté au concours, et mauvais dans les mises en situation
ou la vie au sein d’un collectif. Il serait utile de modifier les épreuves des concours pour y introduire des
épreuves comportementales. Cela implique bien entendu une réflexion éthique sur ces questions. Il faut de
toute manière tenir compte d’une assez forte hétérogénéité des profils au sortir du concours (jeunes lauréats,
professionnels confirmés dans la même filière ou une autre, etc.).

La survalorisation de l’entretien lors d’un oral basé sur le CV et la lettre de motivation par rapport à des
épreuves « techniques » à l’écrit peut être une forme de réponse à cette question, mais est-il possible de dire
à un moment donné :
« Je considère qu’un tel ne pourra plus évoluer… ?

45
 Séquence 3 - Les perspectives d’évolution pour ces commandes de formation au
management public : éléments de prospectives et pistes d’actions pour les écoles. Le rôle
des écoles de service public dans l’émergence des besoins en formation va-t-il évoluer ?

- Quel est le rôle des écoles de service public dans la phase d’identification et d’analyse des besoins
- Quelle pourrait être l’évolution des outils et des méthodes d’appréhension et d’analyse des besoins
(par exemple évolution des référentiels de formation) ?
- Les écoles de service public sont-elles amenées à avoir un rôle d’expert en matière d’identification
et d’analyse des besoins de formation en management public ?
- Comment le cas échéant doivent-elles s’organiser pour le devenir dans un contexte de plus en plus
concurrentiel ? (capacités à développer pour les personnels concernés, outils, méthodes…).

Le rôle spécifique des écoles de service public et leur légitimité dans la formation au
management public

Pour traiter des perspectives d’évolution, le groupe s’est interrogé en premier lieu sur ce qui faisait la spécificité
des écoles de service public. La mission de service public qui légitime ces écoles est-elle suffisante ? Notre
légitimité est historique, temporelle, elle est conférée par le système démocratique. Dans ces conditions
la « commande » qui nous est faite est renouvelée au gré des changements politiques.

Plusieurs écoles soulignent qu’elles sont là pour donner du sens, porter des valeurs, porter la notion
« d’intérêt général ». Mais, d’autres opérateurs ne seraient-ils pas à même de le faire sur la base d’un cahier
des charges préalablement défini ? Légitimité ne signifie pas exclusivité. Nos dispositifs de formation sont
d’ailleurs de plus en plus ouverts. Des dispositifs hybrides associant formation professionnelle et formation
universitaire sont en place. Pour autant, l’université ne peut à elle seule réaliser la formation. Notre valeur
ajoutée et notre élément de différenciation c’est la contextualisation, une mise en perspective des
notions (concepts) de management à nos problématiques particulières, à nos métiers et aux valeurs qui
sous-tendent notre action. A ce propos, certains ont souligné l’intérêt de la co-animation des séquences de
formation au management. La proximité des écoles de service public avec les milieux professionnels rend
possible (et souhaitable) un travail de traduction difficilement réalisable par d’autres opérateurs.

Le positionnement au cœur des métiers et des réseaux professionnels fait qu’au-delà de la formation des
individus que réalise l’université, les écoles de service public forment des groupes professionnels. Cela
a pour conséquence de légitimer nos investissements dans l’élaboration des référentiels (référentiels de
compétences puis de formation). Cela permet également de proposer nos prestations à des publics extérieurs,
à nos ministères de rattachement, mais qui, du fait des missions proches qu’ils exercent, doivent mobiliser
les mêmes compétences.

Quelles actions peuvent-elles être entreprises dans le cadre du RESP ?

- Une première action simple consisterait à recenser les cycles de formation au management existants
et d’échanger sur la nature des dispositifs ;
- Une autre pourrait consister à échanger sur les méthodes d’élaboration des référentiels ;
- Dans le prolongement de ces deux premières actions, un travail pourrait être engagé sur l’identification
de compétences communes aux cadres des services publics, puis l’élaboration d’un référentiel
des compétences partagées. Plusieurs participants ont souligné l’intérêt d’un tel référentiel en tant
qu’outil d’information pour l’élaboration de parcours professionnels individuels dans une optique de
mobilité inter-ministérielle ;

46
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

- Ce référentiel des compétences partagées peut être enfin un point de départ pour engager des
collaborations entre écoles du RESP sur des programmes de formation en management dans l’esprit
du « cycle de management supérieur » des cadres dirigeants du service public.

Pour conclure cet atelier sur les perspectives d’évolution pour nos écoles, la question de la certification des
diplômes et de la compatibilité avec le système LMD de nos formations professionnelles a à nouveau été
posée.

ANNEXE : Référentiel de positionnement (ENSP)

5-8 Champ d’activité 8 


Directeur d’hôpital, responsable de la communication
Cocher pour chaque item, sauf les items en grisé, la colonne correspondant à votre positionnemen
Positionnement
Compétences
A B C D

8 - Optimiser la communication de l’hôpital en valorisant ses


activités et ses projets, en vue de faciliter les synergies internes
entre professionnels et accroître la reconnaissance sociale de
l’établissement
81 - Concevoir une stratégie de communication pour l’hôpital qui se
concrétise par un plan de communication

811 - Arrêter en concertation avec le chef d’établissement la


politique de communication de l’hôpital et les objectifs généraux
à afficher dans le projet d’établissement, voire dans un projet de
communication spécifique
812 - Obtenir l’engagement de l’équipe de direction de l’hôpital
sur un contrat de communication, formalisé par une charte, pour
garantir la cohérence nécessaire des messages et optimiser la
qualité des relations
813 - Construire un plan de communication qui soit cohérent avec
le projet d’établissement de l’hôpital et obtienne la validation du
chef d’établissement
814 - Communiquer régulièrement sur le plan de communication
de l’hôpital pour en évaluer la fonctionnalité et la progression

Positionnement
Compétences
A B C D

82 - Garantir une réalisation efficiente du plan de communication


de l’hôpital

822 – Définir préventivement les modalités de traitement de la


communication interne et externe de l’hôpital lors de situations
présentant un potentiel élevé de risques de dysfonctionnements,
pour mieux réguler dans l’urgence de l’évènement
823 – Coordonner l’ensemble des actions mises en œuvre pour
opérer les régulations nécessaires à l’atteinte des objectifs affichés
dans le projet d’établissement de l’hôpital
824 – Evaluer les processus et produits de chaque action de
communication de l’hôpital, pour décider de leur développement
et/ou pérennisation et juger à moyen terme de la stratégie globale
retenue

47
Cocher pour chaque item, la case correspondante à votre positionnement
Positionnement Commentaires
Connaissances
A B C D ou précisions

Connaissances requises par le contexte global de l’action

- Théorie des organisations

- Théories et modèle de la conduite du changement

- Les bases de la stratégie d’entreprise

- Rôles et missions des managers


- Le concept de culture d’entreprise
- Les principaux concepts en matière de communication
(communication, information, médiation, dispositif,
organisation, argumentation, rhétorique…)

- Les principales théories et modèles de la communication


(interpersonnelles, organisationnelle, institutionnelle, commerciale)

- L’économie générale des médias

- Le phénomène de rumeur

- Droit de la communication (droit à l’image, droit d’auteur, secret


de l’instruction…)
- Connaissance de l’organisation de son établissement

Cocher pour chaque item, la case correspondante à votre positionnement


Positionnement Commentaires
Connaissances
A B C D ou précisions

Connaissances requises concernant les acteurs externes et internes


- Connaissance de l’histoire et des métiers de son établissement
- L’environnement syndical et son histoire
-la carte des publics hospitaliers internes (direction, cadres,
management intermédiaire, médecins hospitaliers, personnel
soignant…)
-la carte des publics externes (tutelles, préfecture, médias,
médecine libérale, autres établissements…)

Cocher pour chaque item, la case correspondante à votre positionnement


Positionnement Commentaires
Connaissances
A B C D ou précisions

Connaissances requises pour la conduite de l’action


- Les étapes clés de la démarche stratégique de communication
- La méthodologie du plan de communication
- L’écriture journalistique
- Les différents formats de l’information médiatique
(presse écrite, audiovisuelle, Internet)
- Les techniques d’enquête et de mesure de l’opinion
- Les techniques de recueil d’information
- Les outils de la relation presse
- Les outils de l’identité visuelle (logo, charte graphique…)

48
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

- Les outils de la communication interne


(journal interne, messagerie, intranet…)
- Les outils de la communication externes
(Internet, sponsoring, mécénat…)
- Les outils de la communication évènementielle

- Les bases de données en matière d’usages des médias


et des technologies de l’information et de la communication
- Le fonctionnement d’une agence de communication
(métiers, compétences…)

Fiches de synthèse

CHAMP 8 : Directeur d’hôpital responsable de la communication

COMPETENCES CONNAISSANCES

Points forts

Points de reserve

Propositions d’objectifs
d’apprentissage et
modalites envisagees
(enseignements, stages,
autoformation)

REFERENCES DES TEXTES REGLEMENTAIRES

Elèves directeurs d’hôpital

- Décret n° 2005-921 du 2 août 2005 portant statut particulier des grades et emplois des personnels
de direction des établissements hospitaliers

- Arrêté du 15 avril 2003, fixant les modalités du cycle de formation théorique et pratique des élèves directeurs
et élèves directrices d’hôpital de 3ème classe

Fonctionnaires de la catégorie A accédant par la voie directe aux première, deuxième et troisième
classes du corps des personnels de direction

- Décret n° 2005-921 du 2 août 2005 portant statut particulier des grades et emplois des personnels
de direction des établissements hospitaliers

- Arrêté du 11 juillet 2001 fixant les modalités du cycle de formation théorique et pratique organisé à l’ENSP
49
Atelier n°2
Animateur : Thierry GOBERT

Rapporteurs : Christine CASTANY (IRA Bastia) - Alain BOUVIER (ESEN)

Participants : Dominique PIZZINI (ESEN) - Christine CEPEDE (ENAP) - Axel


FAVIN (ENSPo) - Monique BARBIER (IRA Nantes) - Laurent DUCHEMIN
(ENG) - Catherine POIRIEUX (ENTPE) - Céline DUBOIS-CUSIN (EN3S) -
Marc NAGELS (ENSP) - Florence LOUIS (ENAP) - Philippe GIGNOUD (ENG)
- Sandrine BONVILLAIN (INET) - Jean-Paul RIFFLE (ENACT de Montpellier)

La mise en œuvre
de la formation

50
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Introduction

L’atelier 2 est consacré à la mise en œuvre de la formation au management. Les objectifs de cet atelier sont
d’amener les participants à réfléchir sur la pertinence de leurs choix pédagogiques et, par la présentation des
modalités de la mise en œuvre de la formation, de permettre un échange sur les pratiques pouvant déboucher
sur une mutualisation.

Démarche méthodologique

L’atelier a été organisé autour de trois séquences en phase avec la démarche générale du séminaire, visant
une progression commune de l’ensemble des ateliers :
- La première séquence s’attache à faire l’état de l’existant en favorisant un échange d’expériences entre
les participants, à partir du témoignage de deux écoles ;
- La deuxième séquence permet d’aborder les avantages, l’intérêt mais aussi les problèmes, les difficultés,
les risques, les limites de ces dispositifs de formation ;
- Enfin, la troisième séquence met l’accent sur la mutualisation des expériences, des formations et
l’identification des bonnes pratiques.

 Séquence 1 - État des lieux de l’existant

L’atelier débute par deux témoignages évoquant, dans des contextes différents, la mise en œuvre de la
formation au management :

Mise en œuvre de la formation initiale des conseillers d’administration scolaire et


universitaire (CASU) : Dominique Pizzini de l’Ecole supérieure de l’éducation nationale
(ESEN)

Contexte

L’ESEN est un service à compétence nationale rattaché à la Direction de l’encadrement du ministère de


l’éducation nationale de l’enseignement supérieur et de la recherche (MENESR).
Les 18 174 postes d’encadrement du MENESR se répartissent de la manière suivante :
- encadrement supérieur (5 %) ;
- corps d’inspections (17 %) ;
- direction d’établissements scolaires du second degré (72 %) ;
- encadrement administratif (6 %,) dont font partie les conseillers d’administration scolaire et
universitaire (CASU).
L’ESEN assure la formation initiale des CASU et des inspecteurs des 1er et 2nd degrés, ce qui représente un
volume total de plus de 350 stagiaires par an. La formation des personnels de direction des établissements
du 2nd degré, est réalisée dans les 30 académies sous la coordination de l’ESEN.
Les CASU constituent un petit corps de 1 500 fonctionnaires. Ils ont vocation à exercer les fonctions de
chefs de division dans les services déconcentrés du MENESR (rectorats, inspections académiques), dans les
organismes relevant de l’enseignement supérieur (universités, écoles d’ingénieurs, …) et de gestionnaires
comptables d’établissements du second degré. Ce corps constitue le vivier de recrutement «naturel» des
emplois fonctionnels du MENESR (secrétaires généraux et secrétaires généraux adjoints de rectorats et
d’inspections académiques, secrétaires généraux et secrétaires généraux adjoints d’université, directeurs et
directeurs adjoints de CROUS, …).

51
Organisation générale de la formation

La formation initiale des CASU est une formation professionnalisante organisée sur une année à l’issue du
concours. Les stagiaires CASU (75 à 80 stagiaires par promotion) totalisent entre 4 à 25 années d’expérience
professionnelle dans un corps de catégorie A (15% du recrutement est extérieur au MENESR).
Durant leur stage ils ne sont pas en responsabilité mais placés auprès d’un tuteur CASU dans l’académie dont
ils sont issus et avec lequel ils mènent des activités visant à l’acquisition ou à la consolidation de compétences
dans les domaines administratifs, juridiques, financiers, comptables et managériaux.

3 principes caractérisent cette formation :


- Alternance : 15 semaines à l’ESEN par périodes de 2 à 3 semaines, le reste en académie,
- Individualisation : un dispositif d’accompagnement et de suivi des stagiaires permet la prise en compte
de leurs acquis professionnels antérieurs et la construction d’un projet individuel de professionnalisation
(PIP) qui permettra des parcours de formation différenciés.
- Intercatégorialité : a pour vocation de faire acquérir aux CASU et aux inspecteurs des 1er et 2nd degrés
une culture commune d’encadrement dans le respect des logiques professionnelles de chacun, permettant
une compréhension mutuelle pour mieux travailler ensemble. 30% des formations dispensées aux CASU
sont intercatégorielles.

L’originalité de la mise en œuvre de cette formation réside dans le fait :


- Que le référentiel de formation actuellement utilisé est basé sur les compétences transversales attendues
des stagiaires pour accéder à ce corps et pas sur les référentiels des métiers que les CASU ont vocation
à occuper à l’issue de cette formation,
- Que les stagiaires ne connaissent qu’en toute fin de formation leur affectation définitive, rendant difficile
un travail d’adaptation à l’emploi décisif pour réussir leur prise de poste.

Pour ce qui concerne les contenus de la formation, ils se répartissent selon deux grands domaines :
- Les fondamentaux de l’Education nationale (connaissance du système éducatif, accompagnement à la
mise en œuvre des politiques éducatives, …) qui représentent 25% des contenus dispensés,
- Le socle commun des enseignements de gestion qui représentent les 75% restants répartis en :
- 20 % : gestion des environnements juridiques et réglementaires (déontologie, responsabilité, prévention
du contentieux, achat public),
- 17 % : gestion administrative (stratégie, pilotage, organisation, méthodes et systèmes d’information),
- 38 % : gestion financière, budgétaire et comptable, LOLF et contrôle de gestion,
- 25 % : gestion des RH et management (management, animation d’équipe, communication professionnelle,
GRH, problématiques sociales, prise de poste),

Modalités de mise en œuvre de la formation au management

Pour la formation statutaire des CASU, l’École a adopté une définition large du management en considérant
qu’il englobe l’ensemble des domaines qui font référence :
- aux structures (dans leur dimension organisationnelle, stratégique et de pilotage),
- aux interactions de groupes d’individus dans un contexte professionnel,
- aux fonctionnements individuels dans les organisations,
- aux techniques de communication professionnelle,
- aux techniques de GRH,
- aux techniques de développement personnel (techniques et modes d’expression verbale
et non verbale, …)

52
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Par ailleurs, l’École considère que ces différents domaines interagissent entre eux et en permanence avec les
champs professionnels développés en formation.
Ce «management appliqué» largement contextualisé ne fait, par conséquent, pas l’objet d’un enseignement
de type magistral à proprement parler mais se trouve intégré à différents moments clés de la formation en
appui et en interaction avec les contenus métiers développés tant à l’École qu’en académie.

Il est possible de distinguer quatre phases dans la formation au management résumées dans le tableau
suivant :

1- Le positionnement managérial du CASU

QUOI OBJECTIFS QUI QUAND


- définir la place le rôle et les missions de 1er
Explicitation des attentes l’encadrement au MENESR, Direction de regroupement
institutionnelles - spécifier les missions et des obligations l’encadrement ESEN (juil)
dévolues au corps des CASU
- identification des éléments transversaux
(référentiel de formation) et les spécificités
Représentation du stagiaire par Tuteurs en 1er
métiers du corps,
rapport à son futur métier et à académie, regroupement
- construction d’une identité
son futur corps d’appartenance formateurs académie
professionnelle,
associés (sept)
- construction d’un projet individuel de
professionnalisation pour la formation

Apports conceptuels & - revisiter les différents champs du Universitaires,


méthodologiques basés sur management à partir des expériences consultants
2ème
l’expérience managériale antérieures des stagiaires, extérieurs,
regroupement
antérieure des stagiaires - identifier les acquis transférables au formateurs
ESEN (nov)
«les fondamentaux du regard du référentiel de formation, associés
management» - identifier des besoins de formation

Développement d’une «culture


mieux se connaître pour mieux travailler
commune d’encadrement»
en équipes hétérogènes
par l’intermédiaire d’objets de
Tout au
formation transversaux :
Organisation de modules intercatégoriels Divers long de la
- évaluation de dispositifs,
mêlant CASU, inspecteurs du 1er et intervenants formation
- audit à visée participative,
2nd degrés et chefs d’établissements
- accompagnement à la mise en
stagiaires
œuvre des politiques éducatives,

53
2- Dimension managériale propre à chaque domaine professionnel abordé en formation
À titre d’exemple :

QUOI QUI QUAND

Elaboration budgétaire dans les établissements publics locaux d’enseignement


Divers
(EPLE) :
intervenants Tout au
- spécificité du management de l’EPLE,
pairs, long de la
- démarche projet de l’EPLE,
consultants formation
- organisation fonctionnelle et GRH de l’EPLE
extérieurs, IG
à partir de conduites d’observation en académie (COA*)
réalisées par les stagiaires

Analyse financière et comptable :


Divers
- EPLE, GRETA, Supérieur,
intervenants Tout au
- démarche d’auto-diagnostic de l’agence comptable,
pairs, long de la
- organisation et fonctionnement de l’agence comptable,
consultants formation
- analyse financière, projet d’établissement et pilotage par les résultats à
extérieurs, IG
partir de COA*

Divers
LOLF et contrôle de gestion :
intervenants
- pilotage stratégique, Tout au
pairs,
- conduite du changement, long de la
consultants
- évaluation de la performance et dialogue de gestion à partir de COA formation
extérieurs, IG

Divers
Tout au
Découverte de l’enseignement supérieur : intervenants
long de la
- spécificités du management et de l’organisation dans l’enseignement pairs,
formation
supérieur, gouvernance à partir de COA consultants
extérieurs, IG


*COA : conduite d’observation en académie menée par les stagiaires (protocole + grille d’observation +
mutualisation accompagnée)

54
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

3- Ateliers pratiques management et communication professionnelle

QUOI OBJECTIFS QUI QUAND

A partir des besoins de formation


identifiés par les stagiaires, organisation
d’ateliers thématiques de type études de
4ème
Ateliers pratiques alimentés cas pour faire acquérir ou développer
regroupement
par les retours d’expériences des techniques d’animation et de
ESEN (mars)
antérieures et actuelles et les communication professionnelles :
et
COA* des stagiaires : - conduite de réunions et prise de parole Consultants
regroupement
en public extérieurs
facultatif
Ateliers obligatoires au choix - démarche de négociation et gestion de
ESEN (avril)
et conflits
facultatifs au choix - management de projets et dynamique
de réseau,
- conduites d’entretiens individuels, ...

A partir de mises en situations simples,


Tout au
Ateliers facultatifs «techniques et faire identifier aux stagiaires leurs propres Consultants
long de la
jeux d’expression « modes de communication verbale et non extérieurs
formation
verbale


4- Management et prise de poste

QUOI OBJECTIFS QUI QUAND


Co animation
- Professionnaliser la prise de poste
Ateliers pratiques alimentés par CASU en poste Dernier
- Accompagner l’organisation du
les témoignages de CASU ayant et regroupement
dernier stage en académie sur le poste
récemment pris leur poste consultants ESEN (juin)
d’affectation
extérieurs

Retour promotion A partir des besoins de formation


exprimés par les stagiaires :
- accompagner la prise de poste par des
apports techniques, méthodologiques et
conceptuels, 6 mois après
Intervenants
- commencer la démarche d’analyse de leur prise de
divers
pratiques professionnelles dans leurs poste
métiers respectifs,
- accompagner l’organisation de leur
parcours de formation permanente

55
Mise en œuvre de la formation au management : Christine CEPEDE Ecole nationale
d’administration pénitentiaire (ENAP)

La formation à l’ENAP

L’ENAP est un établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de la justice. Elle forme
les 5 corps de personnels de l’institution : direction, surveillance, insertion et probation, techniques,
administratifs.

Les quatre axes stratégiques de l’ENAP déclinés dans le contrat d’objectifs 2007/2009 sont :
- Professionnalisation des agents ;
- Développement d’une activité de recherche opérationnelle ;
- Poursuite de la politique partenariale et internationale ;
- Adaptation de la gestion aux fonctions d’opérateur de l’Etat.

L’ENAP forme 7000 élèves et stagiaires par an (4000 en formation initiale et 3000 en formation continue)
pour un effectif total de 31 000 fonctionnaires dans l’administration pénitentiaire. Hormis une interruption de
3 semaines, l’ENAP fonctionne toute l’année. Elle accueille jusqu’à 1200 personnes en formation par jour sur
le plateau pédagogique.
Si la charge est importante, elle offre des opportunités nombreuses pour l’intégration et la diffusion de
nouvelles compétences. C’est un des fondements de la stratégie d’ingénierie des dispositifs centrés sur le
management et les publics de cadres et d’encadrants.

Formation continue et formation initiale travaillent en concertation et en cohérence. Ce qui est enclenché par
la formation continue enrichit la formation initiale et réciproquement (ingénierie en boucle, stratégie « en
tenaille » de transfert de compétences) avec une accentuation du sens et une appropriation ancrée dans les
situations professionnelles.

Mise en oeuvre de la formation au management

La mise en oeuvre de formations au management n’est pas une chose nouvelle. Cependant, la LOLF du
1er août 2001, induisant le passage d’une logique de moyens à une logique de résultats évalués au regard
d’indicateurs, a été le déclencheur - accélérateur - de commandes de formation pour les cadres, notamment
sur le thème du management par objectifs.

Plutôt que de traiter séparément les commandes de formations parallèles reçues pour les différents corps,
l’ENAP a choisi d’adopter une démarche globale, puisque tous ces cadres ont vocation à travailler ensemble.
Le projet a été construit autour de 3 principes :
- Favoriser la cohérence par une « approche système » et la recherche d’homogénéité (procédures,
pratiques….).
- Accompagner les personnes pour favoriser leur adaptation, notamment par la capitalisation de leurs
expériences
- Intégrer les changements « au fil de l’eau » (la LOLF, l’Europe….), pour mieux anticiper les évolutions des
missions des personnels pénitentiaires en charge de la garde et de la réinsertion des personnes placées
sous main de justice.

L’ENAP a souhaité donner du sens à la formation, un sens partagé par tous, et l’inscrire dans l’opérationnel
pour être en adéquation avec les attentes de l’institution et des personnes.

56
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Atteindre cet objectif requérait l’optimisation des modalités de mise en œuvre de la formation et la ré-ingéniérie
permanente des dispositifs avec une attention particulière centrée sur l’alternance, le choix des intervenants,
les méthodes pédagogiques et l’actualité comme terrain d’application.

L’alternance
Toutes les formations dispensées aux encadrants et aux cadres sont bâties sur le principe de l’alternance des
lieux d’apprentissage (ENAP, établissements pénitentiaires, services d’insertion et de probation, tribunaux,
hôpitaux, conseils généraux, associations partenaires…) et des temps d’apprentissage (découverte, mise en
situation, évaluation…).

A titre d’exemple, les directeurs des services pénitentiaires bénéficient d’un dispositif de formation de deux
ans avec une exigence très forte en termes d’opérationnalité dès l’entrée en fonction. Sept stages hors école
(découverte de l’univers carcéral, découverte de la fonction, mise en situation dans la fonction….) ponctuent
leurs temps d’apprentissage et de professionnalisation. Chaque stage est assorti d’objectifs pédagogiques et
techniques comme l’expérimentation pendant le stage et la restitution des résultats lors du cycle ENAP.
Ainsi le stage de découverte de la fonction de directeur adjoint intervient deux mois et demi après l’entrée en
formation. C’est un temps durant lequel il leur est demandé de mettre en pratique l’outil de diagnostic/audit
(360°) délivré pendant la formation à l’école. C’est un outil, qu’ils seront amenés à utiliser dans le cadre de
leur exercice professionnel et qui est utilisé comme outil de découverte des problématiques et des enjeux de
la fonction. Dès leur retour à l’école, un débriefing technique de deux jours est opéré durant lesquels un retour
est effectué, sous forme d’ateliers, sur l’étonnement, le positionnement professionnel, les compétences à
développer. Ce retour d’expérience, permet une capitalisation pour engager et nourrir la construction d’une
réflexion et d’un positionnement professionnels en qualité de manager. Un second débriefing est centré sur
les autres missions/activités du directeur adjoint.

Les retours d’expérience des élèves, des professionnels partenaires ont permis de détecter des pistes
d’amélioration. En premier lieu, le travail de préparation et d’association des lieux de stage (établissements
pénitentiaires) bien que réalisé, demandait à être précisé et complété. S’il y a eu peu de réactions de blocage
ou de rejets de la part des directeurs qui ont accueilli les élèves, quand bien même audit et diagnostic
étaient culturellement liés aux missions d’inspection, l’information et l’association en amont des partenaires
demandaient à être renforcées. Aujourd’hui, cette modalité pédagogique est pleinement ancrée dans les
pratiques.

Choix des intervenants

L’ENAP s’est intéressée également aux intervenants. Elle faisait appel à de nombreux intervenants extérieurs.
Les évaluations des séquences faisaient apparaître des ruptures par rapport aux situations professionnelles
réelles et une perte de sens en dépit d’un important travail en amont avec les prestataires. Il a été donc décidé
d’internaliser tout ce qui était sous-traité. Aujourd’hui tous les modules centrés sur le management et ses
outils sont pris en charge par les formateurs ENAP, seuls ou en co-animation avec des chefs d’établissements,
des professionnels. Cela a amené à développer et optimiser progressivement les modalités pédagogiques.

Modalités pédagogiques

Elles sont au nombre de 3 :


- la co-animation : des directeurs de services pénitentiaires et un animateur travaillent ensemble à
donner du sens à ce que les élèves ont vécu et expérimenté et à déplacer ou étendre, chaque fois que
possible, le cadre de référence.
- la co-conception : l’étape suivante a conduit à travailler avec eux, à co-concevoir des situations
pédagogiques managériales : études de cas, dossiers pédagogiques, situations d’apprentissage par la
simulation, etc.
57
- la co-évaluation terminale : les acquis de formation en management sont évalués par des professionnels
expérimentés sur la base de cas pédagogiques construits essentiellement sur les situations
professionnelles. Sur cette modalité, a été identifiée une dimension qui avait échappé : la
tendance des professionnels à « évaluer à côté ». Ceci a permis d’enclencher une action spécifique
liée à l’information et à la formation des professionnels évaluateurs en management.

Présentée comme cela, l’expérience paraît simple, évidente. Dans la réalité, les choses ne s’enchaînent pas
si facilement. A chaque fois, il a fallu travailler sur le sens et la pertinence (à quoi ça sert ? pourquoi ?),
argumenter, convaincre, associer, comparer… Beaucoup d’énergie a été consacrée à ce projet. Au final, les
participants s’accordent sur l’enrichissement mutuel de tous : équipe pédagogique et professionnels ont
approfondi leurs propres compétences managériales. Une envie d’aller plus loin qui a amené à transférer
ces modalités à l’ensemble des dispositifs de formation des cadres et encadrants en formation initiale ou
continue.

L’actualité comme terrain d’application (recherche de connaissance)

Lors de ces journées appelées transversales (formation initiale), les cadres de différents corps sont réunis
(directeurs des services pénitentiaires, lieutenants pénitentiaires, chefs de services d’insertion et de probation)
dans le cadre d’exercices calqués sur les situations professionnelles et où chacun se positionne conformément
à ses fonctions. Ils travaillent ensemble à l’acquisition et à la démonstration d’une compétence managériale
(savoirs, savoirs-faire y compris relationnels). Les thèmes d’application sont choisis en lien avec l’actualité
de l’institution : transposition d’objectifs stratégiques en objectifs opérationnels (début d’année), négociation
d’objectifs (de projet, de progrès, de changement), réflexion sur les pratiques, les rapports hiérarchiques, la
mixité et leurs dérives.
Sur un même temps pédagogique, l’ENAP travaille au transfert d’une compétence qui sera partagée, donnons
la possibilité aux « jeunes » cadres et encadrants de se côtoyer, en sécurité, dans un contexte très proche du
réel et en essayant d’apporter une réponse, d’initier un projet ou une démarche utiles pour l’institution.
L’une des difficultés est de faire coïncider les temps pédagogiques de chacun. Les retours des élèves sont
très positifs et font état d’une découverte importante : quelle que soit la fonction des uns et des autres, tous
partagent les mêmes difficultés et les mêmes appréhensions quant à leur positionnement, leur rôle… Des
journées qui tendent à les rassurer …quand approche la prise de fonction !

Les difficultés

La formation au management opère des ruptures, induit des décalages par rapport aux usages établis depuis
longtemps, engendre des résistances au changement et des freins à la recherche de qualité. Elle requiert un
investissement élevé, profond et continu dans le temps, progressif et bienveillant à l’égard de la personne,
des professionnels en apprentissage.
Les délais entre les impulsions données dans l’enseignement de l’ENAP et leurs effets opérationnels sur le
terrain sont longs : les premiers retours sur investissement n’ont été mesurables qu’au bout de 4 à 5 ans.
A contrario, les réflexions et la capitalisation effectuées autour d’une formation pour un public sont
généralisables rapidement à l’ensemble des publics concernés. D’autant qu’au fur et à mesure de l’avancement
du projet, les résistances initiales se transforment en attentes des personnels vis à vis de ces évolutions, ce
qui permet des transferts de compétences plus rapides que par le passé.

Les changements s’accélèrent et se diversifient et l’ENAP doit poursuivre, en remettant sans cesse en question
ces « acquis » de l’expérience en matière de formation au management. Pour ce faire, il faut notamment ouvrir
le champ de la recherche opérationnelle au management et mettre à profit les compétences et l’expertise de la
Direction de la recherche de l’école.

58
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Pour clore ce témoignage sur la formation au management, il est indispensable de préciser que l’organisation
de la Direction des enseignements de l’ENAP, structurée par champs de compétence (droit - institutions et
politiques pénitentiaires, administration publique et management, personnes placées sous main de justice),
et ce par opposition à une organisation par filières, a fortement contribué, sinon à la réussite, du moins à la
diffusion rapide de nouvelles compétences en réponse aux besoins de l’administration pénitentiaire.

Les débats sur l’état des lieux

A la suite de ces deux témoignages, la discussion s’est engagée dans l’atelier. Plusieurs sujets ont été abordés
durant cette première demi-journée, relatifs aux thèmes suivants :

Les cibles des formations au management


La formation au management concerne aussi bien le public de formation initiale que continue.
Le public de formation initiale est souvent plus complexe : profils différents, attentes individuelles spécifiques,
méconnaissance du poste occupé après la formation, « faux internes » ou « faux externes ». Ils suivent tous
la même formation, d’où des ambiguïtés de profils et des compréhensions différentes sur le fond. Les élèves
internes montrent le plus de réticences car ils ont du mal à prendre en compte l’aspect « conceptualisation »
des externes.
En formation continue, les cadres sont déjà affectés. Ce que recherchent les écoles dans ce cas, c’est de
mettre entre parenthèses la fonction « chef de service » de l’apprenant, pour lui permettre de prendre du recul
et d’échanger avec d’autres collègues dont les métiers sont parfois complètement différents.

Le rapprochement de la formation initiale et de la formation continue


Certaines écoles ont créé un dispositif de formation initiale ouvert aux formations continues. Des réticences
sont apparues lors des échanges de pratiques notamment entre les publics interne et externe.

Les outils de la formation


Quels moyens et quelles méthodes mettre en place pour que ces publics d’élèves internes et externes se
retrouvent sur des objectifs communs ?

Certaines écoles (IRA notamment) utilisent le mémoire collectif ou rapport sur commande d’une administration,
travail de groupe mis en œuvre d’emblée dans la formation. Ces groupes de 6 personnes sont composés de
façon aléatoire et panachés entre internes, externes et troisième voie. C’est une manière d’appréhender, de
façon pratique et avec un enjeu de notation, une politique publique ou une problématique que se pose une
administration en situation réelle.

Vers une individualisation de la formation ?


Pour tenir compte de l’hétérogénéité des élèves, il faut s’orienter vers les stratégies d’individualisation de la
formation. Des référentiels de compétences peuvent servir à construire des référentiels de positionnement
qui se traduisent par des parcours de formation individualisés. Certains modules sont à alléger, d’autres
nécessitent d’être renforcés.
Au-delà des mises en œuvre initiales des formations, des stratégies de réajustement peuvent être envisagées
pendant l’année, avec les modules optionnels, même si cela conduit à des difficultés dans l’organisation de la
formation liées aux limites des traitements au cas par cas.
Il faut accompagner les tests de positionnement, compléter l’auto-évaluation par l’évaluation faite par
d’autres.
Ce peut être l’occasion de revenir sur des résultats intermédiaires avec élaboration en commun du sens des
enseignements.

59
L’ESEN a mis en place un dispositif pour l’accompagnement des stagiaires, avec un projet individuel de
professionnalisation. La difficulté consiste dans le bilan de compétences initial. Après l’élaboration du
référentiel métier des CASU, il faudrait une méthode de reconnaissance des acquis professionnels. Cela
impliquerait la gestion plus fine de l’offre de formation et peut être une augmentation des coûts.

Accompagnement individuel des élèves pour une prise en compte de la dimension émotionnelle du
management
Toutes les études montrent que les cadres sont stressés, ce qui impacte négativement la qualité et la quantité
de leur production. Le management émotionnel doit être pris en compte. La formation est un appui.
Est-il possible de définir des parcours individualisés de formation avec un accompagnement personnalisé de
type coaching pour aider le nouveau cadre à faire face aux problèmes posés lors de la prise de fonctions ?
La question est posée, car les demandes sont de plus en plus fréquentes, surtout en formation continue non
obligatoire.
La richesse de l’hétérogénéité trouve ses limites. Ce n’est pas évident d’introduire de l’individualisation dans
la formation, mais il y a un désir d’avancer.

Le tutorat
Les tuteurs sont des professionnels ayant une expérience conséquente dans la fonction, qui font un travail de
mise à distance et qui ont été spécifiquement formés pour cela.
L’EN3S pratique ce tutorat par le biais d’anciens élèves. Chaque tuteur ou référent suit environ 7 élèves
pendant les 18 mois de la formation. Ce réseau a vocation à vivre, à se renouveler. Les référents doivent avoir
une bonne connaissance des objectifs et des contenus de la formation, donc ne pas avoir quitté l’école depuis
trop longtemps. Les élèves sont satisfaits de ce dispositif car les tuteurs interviennent également comme
apport d’expérience personnelle.
La difficulté pourrait être une confusion des objectifs de ce tutorat axés sur le soutien aux apprentissages
avec un soutien socio-affectif. Il faudra tenter de débusquer cette dérive dans l’accompagnement proposé
aux accompagnateurs.
Cela étant, ce dispositif permet de détecter les élèves en difficultés. Certains élèves n’ont pas conscience de
leurs difficultés, notamment dans la gestion des équipes, les situations conflictuelles. Se pose la question de
la limite de la confidentialité dans le rapport entre le tuteur et « son élève ».

Le coaching
Certaines écoles pratiquent le coaching téléphonique au moment de la prise de fonctions sur une durée par
exemple de trois mois. C’est « chronophage », mais à l’issue de cette période, il y a un bilan au regard des
compétences managériales (capacités) attendues par l’institution et du positionnement du nouvel arrivant ; en
fin de parcours, une synthèse est restituée par le coach au cadre concerné : étonnement, ressentis, évocation
de la sphère des émotions avec une prise de recul sur la fonction, dans des cadres individuel, d’équipe et
organisationnel.

 Séquence 2 - Quels sont les avantages, l’intérêt mais aussi les problèmes, les difficultés,
les risques, les limites de ces dispositifs de formation ?

Après un temps de synthèse et de rappel des contenus de la première séquence, les participants questionnent
les ressentis de chacun et partagent un retour d’expérience. Cette séquence met l’accent sur les dispositifs
et les situations pédagogiques utilisées lors des formations. Il s’agit de formaliser les modalités de mise en
œuvre en appréciant les choix pédagogiques au regard des moyens nécessaires.

60
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Participation des employeurs au processus de formation

Bien souvent, l’employeur adopte une attitude de « consommateur » qui ne s’implique pas dans la formation
tout en désirant recruter le meilleur personnel. Parfois il ne peut s’impliquer (cas des IRA et de l’ENA qui sont
des écoles interministérielles) car le poste de première affectation n’est pas encore connu. La déconcentration
a des limites, le principe de subsidiarité aussi. La tendance générale serait d’essayer d’impliquer les
employeurs/décideurs et de les professionnaliser dans l’accompagnement de stagiaires : mise en place d’un
module à « l’accompagnement tutoriel », qui donnerait des principes fondamentaux et qui susciterait des
vocations de tuteurs.

Une meilleure prise en compte des temps de stage et du principe de l’alternance

Les écoles s’interrogent sur leur pratique en matière de stage de mise en situation professionnelle : les phases
en amont et en aval font l’objet d’attentions particulières, les écoles prodiguent aux employeurs des conseils à
propos de l’accueil des stagiaires, distribuent aux futurs stagiaires des savoirs pragmatiques et académiques
avant leur départ. La préparation peut consister en études de cas et analyses de situations professionnelles.
Mais le temps du stage reste une boîte noire que l’on peine à ouvrir. En quoi un stage est il formateur ? Les
maîtres de stage peuvent adopter trois types d’attitudes différentes : le « faire faire », le « laisser-faire » ou le
« faut faire ». L’intention pédagogique explicite existe t-elle ou pas ? De nombreuses situations pédagogiques
ne sont pas travaillées de manière rationnelle et on passe sans doute à côté de quelque chose.

Une des difficultés, lorsque nos formations sont basées sur l’alternance, est de savoir comment impulser la
démarche auprès des interlocuteurs en fonction de leurs métiers et comment s’assurer de leur adhésion.
Les maîtres de stage sont partie prenante, ils contribuent comme l’école à la réussite de la mise en situation
professionnelle et de la formation qui se doit d’être réactive.

Les débriefings de stage ne sont pas encore généralisés or ils constituent des moments pédagogiques forts
pour les stagiaires, à base d’analyse et de capitalisation. Le passage d’une logique prescriptive à une logique
analytique permettrait une autre relation avec le maître de stage.
Il faut sortir de l’enquête de satisfaction sur le stage. L’affectif dans le débriefing n’est pas l’essentiel. Il faut
se centrer sur les pratiques et ne pas se limiter à l’analyse de l’activité, au bénéfice de la professionnalisation
de l’individu.

Enfin, les enseignements dispensés à l’école permettent-ils à l’élève d’acquérir une culture professionnelle
conforme à celle qu’ils vont découvrir lors de leurs stages dans les services, avec les confrontations de
générations d’agents, etc. ?

La labellisation des lieux de stage

A l’ENAP, dans les réflexions de prospective menées, on travaille à la labellisation des lieux de stage, avec
les équipes d’accueil. Mais labelliser quoi, comment ? Que met-on derrière la labellisation ? La personne qui
accueille en stage doit être considérée comme un formateur. Grâce à la labellisation, l’école pourra être en
capacité d’énoncer ses attentes qui constituent une base d’un dialogue à instaurer préalablement avec les
partenaires du stage.
Nous sommes là dans une démarche qualité qui est une clé de l’accompagnement du processus de
changement. C’est un moyen de fortifier la légitimité d’un outil de mise en œuvre de la formation.
L’ENAP peut travailler dans cette direction pour les terrains de stage clairement identifiés des structures
relevant du ministère de la justice. Cela n’est pas le cas par exemple des IRA qui envoient leurs élèves dans
des structures d’accueil extrêmement variées et nombreuses.

61
L’évaluation de la formation initiale comme outil de repositionnement des écoles

De nombreuses écoles procèdent à l’évaluation a posteriori de la formation initiale dispensée : par voie de
questionnaires adressés aux anciens élèves, par le retour des promotions dans l’école. Ces évaluations
permettent d’apporter des modifications sur la formation en cours, mais sont également précieuses
pour appréhender les demandes nouvelles et « coller à l’actualité ». Les écoles, c’est le cas de l’ENSPo,
se saisissent de ces retours pour devenir force de proposition vis-à-vis de leur tutelle en faisant remonter
certains problèmes.

 Séquence 3 - Compte tenu de ce qui a été abordé et analysé, quelles sont les
perspectives et évolutions prévisibles et souhaitables pour ce type de formation ? Quelles
sont les bonnes pratiques «mutualisables» ?

L’intention de cette troisième séquence est de mettre l’accent sur la mutualisation des expériences, des
formations et l’identification des bonnes pratiques. Au cours des ateliers précédents, ont été pointés les
dispositifs pédagogiques utilisés dans les différents établissements en fonction d’objectifs qui leurs sont
indissociables. Selon les types de management travaillés, la nature des populations d’élèves, les moyens
mis à disposition, émergent des solutions récurrentes pouvant concerner plusieurs établissements en partie
ou en totalité. Au delà des dispositifs les plus courants, certaines innovations ou expérimentations pilotes
méritent une attention particulière.

Mettre en exergue la fonction de veille stratégique…

Développer la fonction de recherche et de communication des écoles par le biais du RESP

L’ENSP a investi du temps et de l’énergie pour participer à des colloques, ce qui a valorisé les bonnes
pratiques pédagogiques dans l’école. Pourquoi ne pas le faire dans le RESP ? Plusieurs écoles de services
publics pourraient travailler sur des sujets communs, produire de la visibilité, ce qui contribuera à positionner
le RESP comme un lieu de partenariat et d’échanges complémentaire aux autres écoles et universités. Cela
nécessite de solliciter les collègues dans d’autres écoles, d’être capables de tenir un discours en commun. Ce
serait un début de coopération renforcée. Par exemple, concernant la simulation : l’ENAP est bien placée par
ses outils, ses moyens et ses pratiques.

Il faut penser à la place du recrutement et de la formation dans le processus de gestion des emplois et des
carrières ; un certain formatage scolaire (par les outils techniques, méthodologiques) induit des profils de
jeunes cadres à leur arrivée dans les services à la sortie de l’école. Il faut envisager des suivis en formation
continue. Nous sommes malheureusement les champions du cloisonnement : quand les élèves partent, on
n’en entend plus parler. La formation permanente est souvent confiée à d’autres organismes de formation :
n’est-ce pas aussi le rôle des écoles, et pour elles, un enjeu important ?

Quelques réflexions sur la formation au management public dans dix ans ?

La culture -ensemble identitaire, de rêves, de fonctionnement, de valeurs- évolue avec la nécessité d’informer
et de former. La formation doit s’adapter aux évolutions des organismes en lien avec les acteurs en place dans
la société. Tout est en flux constant de transformation.

L’école forme des futurs agents (de police, administratifs, d’encadrement, etc.) qui vont se trouver confrontés
à un contexte et des partenaires et dans l’obligation de s’ouvrir à d’autres cultures, de se remettre en cause

62
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

et d’apprendre. Comment mieux échanger entre écoles sur cette problématique de l’insertion des élèves dans
des contextes riches et pluriels ?
La formation doit intégrer la notion d’actualité.

Trois grandes évolutions sont identifiables :


- la question de la mondialisation : le terrain de jeu est mondialisé, les barrières entre privé/public sont en
train de s’affaisser, quel est l’avantage concurrentiel que l’on va développer dans nos écoles ?
- les technologies de l’information et de la communication : intégrer les normes culturelles et techniques
en perpétuelle évolution.
- l’assurance qualité : le RESP doit contribuer à la diffusion des pratiques et susciter des échanges à
propos des impacts de ces démarches sur le fonctionnement des écoles.

Ces trois enjeux concernent également l’ingénierie de formation. Au niveau pédagogique, il y a la question
de la didactique professionnelle. Les écoles ont une discipline en construction : comment former des
professionnels à des compétences quand ils ne sont pas en situation professionnelle ? Cela doit donner lieu
à un maximum d’expérimentations.

On peut s’interroger aussi sur la place respective de la formation initiale et de la formation continue. Cela
pourrait évoluer fortement, ne serait-ce que sous l’effet financier. On peut craindre de n’avoir plus le temps,
ni les moyens d’assurer une formation initiale trop longue. L’idée d’une formation tout au long de la vie
correspondrait peut-être plus aux nécessités. Philippe Carré nomme ce phénomène « l’apprenance ».

Sur cette interrogation de la place de la formation dans 10 ans, on peut faire un parallèle avec le monde
bancaire. Il y a 20 ans, une nouvelle technologie se mettait en place qui révolutionnait les pratiques et les
fonctions. On aurait pu craindre la disparition de la formation, l’inverse s’est produit. Le rôle de la formation
s’est accentué car les changements s’accélérant, la réactivité des acteurs de formation permettait à l’institution
de survivre, d’être pérenne. Il fallait adapter les personnels, capitaliser l’expérience.

Il est difficile de faire de la formation fiction. Les écoles sont à la croisée des chemins avec les commandes
institutionnelles, les attentes des employeurs qui veulent des jeunes opérationnels dès leur sortie d’école, les
aspirations des élèves et les attentes des usagers de service public. Quelle doit-être la posture : anticipation,
ouverture, adaptabilité ? La formation permet de relever bien des défis, mais l’avenir des écoles passe aussi
par la vision qu’en auront les maîtrises d’ouvrage qui les pilotent : les ministères de tutelle.

63
ANNEXE Extrait de la fiche pédagogique élaborée par l’EN3S concernant le développement personnel

Objectif général : apprendre à mieux se connaître soi-même pour manager efficacement.


Cet objectif se traduit par un accompagnement de l’élève mettant en oeuvre deux dispositifs décrits ci-après :
le référent et l’Accompagnement au développement des potentiels (ADP).

Le référent

Objectifs :

Le référent est un interlocuteur privilégié de l’élève qui a vocation à l’aider à réfléchir :


- sur lui-même,
- sur la façon dont il appréhende la scolarité (l’aider à « apprendre à apprendre »),
- sur la façon dont il en tire profit (l’aider à transformer une situation en source d’apprentissage
maîtrisée),
- sur la façon dont il la gère dans la perspective de son projet professionnel (l’aider à définir une
trajectoire et un projet professionnel).

Calendrier :

L’accompagnement est «permanent» en ce sens que six journées sont programmées à des moments clés de
la scolarité, mais pour autant, si l’élève en éprouve le besoin, il peut contacter par téléphone ou courriel son
référent pendant la scolarité.

Les 6 journées planifiées sont :


1 journée lors de la semaine d’accueil
1 journée après les stages de découverte
1 journée à la fin d’un cycle intensif d’enseignements techniques
1 journée avant le stage d’encadrement
1 journée au retour du stage d’encadrement
1 journée à la fin de la période d’affectation.

Méthodes pédagogiques :

L’accompagnement et les échanges se déroulent à la fois en groupe (de 7 ou 8 élèves) et en entretiens


individuels.
L’apport des échanges en groupe doit être souligné, de même que la nécessaire implication des élèves dans
les échanges collectifs et/ou individuels : le référent est une personne ressource pour l’élève, il lui appartient
de «l’utiliser» au mieux. Au-delà, les journées de rencontre avec les référents se préparent donc, sans doute
de manière différente des autres enseignements, puisqu’il s’agit de faire le point soi-même, sur son projet
professionnel et la façon dont les apprentissages se déroulent durant la scolarité.

Les référents sont formés et suivis par un coordonnateur des enseignements relatifs au développement
personnel. Ils bénéficient d’un apport conceptuel et pratique sur les techniques de coaching que sont
notamment l’écoute, la reformulation, le questionnement.

Par ailleurs, le directeur de la formation initiale aide les référents à comprendre et maîtriser les enchaînements
de la scolarité afin que ceux-ci appréhendent toujours correctement le contexte de leur intervention.

64
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Intervenants :

Les référents sont des cadres dirigeants émanant de toutes les branches du régime général ou d’autres
régimes, appréciés pour leur compétence professionnelle et leurs qualités personnelles.
Outre une méthodologie adaptée et une proximité avec l’élève, la réussite de la relation de référent repose
sur le respect d’une déontologie spécifique, fondée sur la confiance entre les acteurs (élève, groupe d’élèves,
référent).

L’Accompagnement au Développement des Potentiels (ADP)

Objectifs :

La période de scolarité conduit les élèves à intégrer dans leur projet professionnel les contraintes liées aux
orientations qui engagent le moyen terme (accès aux fonctions de direction à 3/5 ans), et à une prise de
fonctions, à court terme, qui va mobiliser fortement leurs ressources (choix de l’affectation à la sortie de
l’école).
Dans cette perspective, l’ADP est un outil à la disposition de l’élève pour lui permettre de connaître ses acquis,
ses potentialités et ses aspirations. Il doit également identifier les moyens à mettre en oeuvre pour combler
l’écart entre ses compétences actuelles et celles exigées pour atteindre son objectif.
Cet accompagnement devra donc permettre à chacun de :
- Percevoir et consolider ses compétences actuelles, notamment celles acquises dans le cadre de la scolarité,
au regard des fonctions envisagées ;
- Mieux connaître ses propres potentialités, ses aptitudes notamment dans les domaines relationnel et
organisationnel ;
- Identifier ses éléments de motivation, ses priorités personnelles et professionnelles.

Il favorisera ainsi l’élaboration à la fois d’un projet professionnel concret et cohérent et du « projet de
développement » correspondant, à mettre en œuvre pour y parvenir.

Déroulement général :

Il est organisé en 3 phases principales :


- Une phase de collecte d’information sous forme d’entretiens individuels, de tests collectifs et
individuels, destinée à recueillir des informations sur les potentialités, la personnalité, les
compétences, les motivations, les cadres de référence.
- Une phase d’exploitation de ces informations, sous forme d’entretiens individuels, de confrontation
avec le terrain à l’occasion des stages, de rédaction d’écrits d’auto-positionnement.
- Une phase de synthèse au cours de laquelle sera remis un document reprenant l’ensemble des
éléments recueillis au cours de l’ADP et la synthèse des points à développer et à valoriser.

L’ADP est conçu comme une démarche d’auto-évaluation formative permettant de mettre en place une
dynamique d’analyse de la pratique et du positionnement au cours de la scolarité, mais également au cours
du parcours professionnel futur et notamment lors du premier poste.

Intervenants :

Chaque élève sera accompagné par le même consultant, tout au long du dispositif, en dehors des phases de
mise en situation et de passation de tests.
Les consultants sont pour la plupart des psychologues du travail.

65
Atelier n°3
Animateur : Franco SECCI

Rapporteurs : François MOLIN - ENSPo (Ecole nationale supérieure de la police)


Christian JEANDEMANGE - ENSOSP (Ecole nationale supérieure des officiers de
sapeurs pompiers)

Participants : Jacqueline BENEVISE (IRA de Lyon) - Christian CHAUVIGNE


(ENSP) - Sophie CHERMAT (INTEFP) - Jean Daniel CRISTOFORETTI (INTEFP)
- Bernard DURIX (ESEN) - Henri FLACH (IRA de Bastia) - Sylvie GYSBRECHT
(END) - Catherine HUBERT (INTEFP) - Jacques OLLION (ENAP) - Marie France
PEYRELONG (ENSSIB) - Christel RIMBAUD (ENTPE) - Antoine ROSSION
(ENSPo)

Les contenus
de la formation
au management public

66
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Introduction

L’objectif de cet atelier concerne les contenus des formations au management public.
Quels sont les référents pertinents dans le domaine de la formation au management public ?
Quelle est la part entre les contenus «transversaux» (applicables à toutes les situations de management public
et pouvant être mutualisés) et les contenus spécifiques (liés à un métier, à des missions, à une culture) ?
Quelle doit être la part quantitative de cette formation par rapport aux contenus «techniques» et quelle doit être
son articulation avec eux ?
Qui est légitime pour les valider ?

Démarche méthodologique

Le plan initialement proposé n’a pas été respecté au cours des débats. Les réalités des écoles ont pris le pas
sur les objectifs initiaux de cet atelier. Les écoles ont construit leur démarche par rapport à leurs propres
questionnements. Les travaux du groupe ont conduit à de nombreuses interactions avec les thèmes de certains
autres ateliers. Ceci pourrait s’expliquer par le besoin de vision globale ressenti par les participants avant de
pouvoir répondre à des questions d’actions locales.
La question centrale du contenu des formations au management sous-tend sans cesse les questions de fond
liées à la définition du management public, aux méthodes employées pour dispenser ces apprentissages et à la
définition des besoins de formation dans ce domaine particulier lié au savoir être et au  savoir devenir.

Analyse de l’existant

Cette première séquence de travail en groupe débute par un rapide tour de table de présentation des personnes
participant aux travaux du groupe de travail.
Les témoignages de deux écoles ont permis d’amorcer le débat sur les contenus existant en matière de
formation au management. La richesse des exposés, présentant également les problèmes liés à l’existant et
les perspectives d’évolutions, a rapidement conduit le groupe à se saisir de la problématique dans sa globalité
plutôt qu’en s’appuyant sur les trois temps initialement prévus des travaux d’atelier.

Témoignage École nationale supérieure de la police (ENSPo)

 Témoignage de Antoine Rossion, Directeur adjoint de l’ENSPo et Marc Labalme, professeur en management
à l’ENSPo.

Dans le cadre de la formation des commissaires de police, le contexte particulier des évolutions du cadre
d’emploi sur les vingt dernières années est présenté.
L’une des particularités du public actuel de ces formations est représentée dans la diversité des origines.
La culture du résultat prônée notamment par l’application des indicateurs de la Loi organique des lois de finances
(LOLF) a conduit -  et conduit actuellement encore - à une rationalisation des effectifs de commissaires.
Une importante réforme budgétaire a implicitement engendré une réforme non moins importante des corps
et carrières de la police nationale. On assiste actuellement à une inversion hiérarchique dans le sens où la
concentration des compétences techniques et du commandement opérationnel se situe à la base du dispositif.
La franche diminution des effectifs de commissaires induit une translation de la charge de management vers
les échelons hiérarchiques intermédiaires.
Les conséquences en termes de capacités et de compétences à acquérir en management pour les commissaires
est directe et est déclinée dans un référentiel de compétences dont les points importants sont :
- Le manager «organisateur»
- Le manager « coordinateur»
- Le manager « contrôleur»
- Le manager « développeur»
- Le manager « régulateur»
67
Dans le cadre de la formation initiale, l’accent est mis sur l’implication de l’apprenant au cœur de sa formation.
Il est responsabilisé dans le cadre de travaux de recherche dans le domaine du management.
L’apprentissage des savoirs est initié par le biais de conférences thématiques et d’interventions spécifiques
retraçant, par des témoignages, des situations concrètes et vécues, le futur professionnel proche des
apprenants. Le futur métier étant à dominante active et opérationnelle, l’apprentissage notamment par le biais
de témoignages est un mode qui semble nécessaire, sans toute fois être suffisant. Le management étant
un engagement de la personne, le témoignage d’autrui n’est pas suffisant, la mise en situation concrète est
impérative. Les travaux dirigés sont là pour cela. Les apprenants sont mis face à des situations simulées. Par
exemple, les relations syndicales sont jouées lors de ces travaux.

 Témoignage de François Molin, Directeur de la formation continue et de la recherche à l’ENSPo

En complément des éléments abordés, François Molin distingue les formations qui ont un caractère obligatoire
et réglementaire de celles suivies sur la base du volontariat.
Depuis 2006, certaines formations peuvent faire l’objet d’une forme de contractualisation du parcours de
formation.
De nombreuses formations courtes (2 ou 3 jours) sont proposées aux apprenants. Ces sessions sont basées
sur des échanges entre le « terrain » et l’école, initiant le partage d’expériences. Des simulations et des études
de cas concrets sont présentées et traitées.

Débat suite au témoignage de l’ENSPo

Le premier constat témoigne de la difficulté à présenter le détail des contenus de formations dans le domaine
du management et par conséquent, également de la difficulté à valider les référentiels de formation.
Que sait-on des modèles utilisés pour l’enseignement ? Concrètement, le groupe constate que les modèles
ne sont pas figés, ils ne sont parfois même tout simplement pas définis. Certains membres du groupe de
travail pensent qu’il serait nécessaire de définir un ou plusieurs modèles. Cela permettrait en quelque sorte de
«normaliser» les communications entre les différentes écoles de service public d’une part et de disposer d’un
cadre de référence permettant de mettre en place une démarche mesurable d’évaluation et de réduction des
écarts. Cette réflexion est renvoyée à un autre séminaire spécifique qui reste à créer.
S’il faut définir les contenus, le groupe convient qu’il faut tout d’abord savoir de quoi on parle. Qu’est-ce que le
management ? Qu’est-ce que le management public ?
Est-il possible de «typologiser» les capacités et compétences recherchées dans chaque métier ? L’objectif
serait ensuite de déterminer s’il existe, au delà de la colonne vertébrale des compétences liées à chaque
métier, des zones de recouvrement de connaissances, de capacités et de compétences communes à tous
les domaines, autour desquelles la personnalité des managers publics puisse se construire ? Quels sont les
«domaines spongieux» réalisant l’interface entre les domaines spécifiques à chaque service public ? Si l’on est
capable d’identifier ces points communs, il sera potentiellement possible de définir un cahier des charges de
formation disposant d’une trame commune aux différents services.
Un débat s’engage sur cette question.
Un constat partagé par plusieurs personnes du groupe consiste à dire qu’il y a cloisonnement entre le
commanditaire de la formation, l’école chargée de la mise en œuvre et les formateurs.
Un bon manager, c’est quoi ? C’est celui qui a la capacité à organiser le travail collectif. C’est celui qui dispose
des capacités à identifier les marges de sa collectivité.
Il est nécessaire de disposer d’un référentiel de compétences !

68
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Autres questions

Les chefs de projets de formation doivent-ils être des experts du contenu ?


Quelle est la fonction d’une école dans le domaine de la formation au management ?
Une école de service public doit-elle être différente d’une école privée en matière de formation au management ?
Quand on parle de formation, on doit évoquer l’élaboration du cahier des charges. C’est un point clé, mais
également un centre de tensions eu égard à l’indépendance pédagogique de l’intervenant.
Le débat renvoie également à la fonction de l’école :
- recherche ;
- formation stricto sensu ;
- observation des évolutions, veille ?

Pour clarifier les travaux à réaliser, il convient de distinguer les contenus de formation des compétences que
l’on veut développer.
Une autre difficulté réside dans la distinction entre ingénierie pédagogique et ingénierie de formation.
Beaucoup de personnes présentes convergent vers l’idée qu’il est délicat pour les écoles d’élaborer des cahiers
des charges dans le domaine de la formation au management en raison de la spécificité de la matière (le
management est tout ce qui n’est pas technique) et l’absence de clarification de la dimension management
chez les commanditaires.
Il est nécessaire de raisonner par rapport aux résultats (objectifs) attendus par le commanditaire.
Jusqu’où l’école doit-elle s’impliquer dans l’élaboration de la pédagogie ?
- Identification des situations problèmes ?
- Co-construction du dispositif pédagogique ?
- Elaborations d’études de cas ?...

Autres points également posés

Quelles sont les limites de la commande ? Il est nécessaire de connaître les modèles d’interprétation des
intervenants. Il faut les solliciter sur ce qu’ils savent et peuvent faire :
«Qu’est-ce que l’intervenant propose ?», «Qu’est-ce que l’intervenant peut traiter ?».
On constate que dans bien des cas, les objectifs de formation en termes de management n’étant pas réellement
définis, la qualité des enseignements est laissée à la responsabilité de l’intervenant. C’est un fonctionnement par
défaut dans lequel, au lieu de définir parfaitement une commande, on s’interroge plutôt sur les connaissances
que l’intervenant pourra transmettre. Dans ces cas, c’est l’intervenant qui décide en lieu et place de l’école quels
sont les besoins des apprenants. L’école n’intervient plus ni en tant que maître d’œuvre, ni en tant que maître
d’ouvrage des formations qu’elle dispense. Tout est délégué, sans réel contrôle. Le résultat est directement
lié à la personnalité de l’intervenant, ses compétences professionnelles (pour les mises en situations) et
pédagogiques (c’est lui qui décide des contenus, mais aussi des modes et méthodes pédagogiques).

Y aurait-il intérêt à former des consultants et formateurs en interne en associant des experts extérieurs ?

Témoignage de l’École nationale supérieure des sapeurs pompiers (ENSOSP)

 Témoignage de Christian Jeandemange, directeur adjoint du développement pédagogique de l’ENSOSP.

Un officier de sapeur pompier assure simultanément une double compétence :


- une compétence opérationnelle, nécessitant de conduire des hommes sur le terrain dans des situations
dégradées et urgentes. Il endosse la responsabilité de Commandant des Opérations de Secours ;
- une compétence technico-administrative dans le cadre de la gestion du service.

69
L’officier de sapeur pompier doit tout à la fois développer ses compétences de leader opérationnel et de
manager.
La formation fait partie intégrante du déroulement de carrière de l’officier. Dans le domaine du commandement
et du management, à chaque strate hiérarchique correspondent une compétence opérationnelle et managériale
et un cursus de formation continue ou d’adaptation à l’emploi.
Chacune de ces activités fait l’objet d’une fiche emploi déclinée en objectifs de formation professionnelle.
Dans le cadre de la formation initiale (lieutenant), l’apprenant devra acquérir les connaissances lui permettant
de développer ses compétences lorsqu’il se trouvera en situation professionnelle.

Les objectifs principaux sont les suivants :


- Compréhension du milieu hiérarchique ;
- Transversalité des outils et des modes de management ;
- Capacité à commander en opération ;
- Distinction commandement/management ;
- Capacité à s’intégrer dans un Système de management intégré (SMI) QSE et développement durable ;
- Capacité à valoriser son travail et celui de ses collaborateurs ;
- Capacités à évoluer.
La formation de lieutenant (premier grade d’entrée dans la profession pour les officiers niveau bac+3 ou issus
du rang) s’étend sur 3 domaines :
- Responsable d’équipe ;
- Management et conduite de projet ;
- Intégration dans un Système de management intégré QSE.

Ces formations ont été conçues en partenariat avec le CNFPT et le CNAM. Elles sont toujours expérimentales,
sont évaluées deux fois par an et font l’objet d’évolutions constantes, sur les contenus comme sur les
méthodes.
La formation initiale des lieutenants dure 200 jours. L’apprentissage au commandement (en sus des techniques
opérationnelles) représente environ 40 jours. La formation au management représente 20 jours.

La formation de responsable d’équipe se déroule spécifiquement sur 10 jours. Les objectifs intermédiaires sont :
- La gestion de conflits ;
- Un langage commun pour une vision commune ;
- La place de l’humain ;
- Les responsabilités.

La formation de management de projet se déroule sur 5 jours. Les objectifs intermédiaires sont :
- Analyser et comprendre l’environnement du projet ;
- Animer les acteurs et parties intéressées du projet ;
- Maîtriser la réalisation du projet.

La formation au SMI, quant à elle, est déroulée sur 5 jours. Objectifs intermédiaires :
- La non-qualité ;
- L’approche processus ;
- La maîtrise des processus ;
- La gestion des améliorations ;
- Le pilotage du progrès.
Des méthodes et outils sont déterminés pour chaque séquence par l’école.

70
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

La formation au management des chefs de groupement

Les chefs de groupements en formation sont destinés à gérer, sur les plans opérationnels et administratifs, un
ensemble de centres de secours ou de services en direction départementale.
Les contenus de formation au management sont très orientés «processus» et «développement durable».
Pour la partie opérationnelle, le chef de groupement est formé aux techniques de Gestion Opérationnelle
et Commandement de niveau 5 qui est le dernier niveau de compétence pour la gestion des moyens d’un
SDIS (Service départemental d’incendie et de secours) sur une intervention de toutes natures et de toutes
dimensions.

La formation au management des Directeurs départementaux adjoints des SDIS

Les DDASIS suivent une formation d’adaptation à l’emploi sur une année niveau bac+5. Cette formation est
mise en place dans le cadre d’un master deux professionnel (en cours de validation). Quatre entités participent
à ce master :
- l’ENSOSP comme référence professionnelle et spécialiste de la gestion de crises,
- l’Université de Haute Alsace pour la gestion des risques,
- l’Université de Montpellier 1 pour la gestion financière et le droit de la sécurité civile,
- l’Institut d’Etudes Politiques de Toulouse pour le management stratégique et l’évaluation des politiques publiques.
Les DDASIS sont formés au management stratégique des collectivités et à l’évaluation des politiques
publiques pour ce qui est de l’emploi technico-administratif. Sur le plan opérationnel, ce public est formé à la
pratique décisionnelle en domaine inter services. Le but étant de compléter les compétences opérationnelles
acquises au long de la carrière par l’acquisition de savoir faire et comportements permettant le management
et l’évitement des situations de crise.

Formations management en cours de développement

Les «marches» entre les différents emplois sont parfois hautes et les durées longues. L’ENSOSP travaille
actuellement sur la mise en place de formations continues, notamment en FOAD (Formation ouverte et à
distance) qui permettront à l’officier de développer ses capacités «à la carte», c’est à dire en fonction de son
parcours universitaire précédant son arrivée dans la profession.

Débat suite au témoignage de l’ENSOSP

L’opérationnalité des métiers d’officier de sapeur-pompier implique la rigueur de la définition des besoins
de formation. Le modèle proposé est directement lié au contexte professionnel exercé et aux exigences de
sécurité.
La part importante des outils de gestion des risques et de crises dans le travail de l’officier explique la définition
de la formation.
Il y a un intérêt opérationnel direct d’une définition claire des compétences de chaque grade.
Se pose nécessairement la question de ce que l’on peut apprendre à l’école dans le domaine du management.
On peut acquérir des savoirs, des capacités, mais les compétences ne s’acquièrent que lors de la confrontation
des capacités aux réalités professionnelles.
La distinction entre commandement et management est également liée au domaine d’activités très particulier.
Les outils sont adaptés aux contextes et spécificités (culture, métier, situations à gérer).
Il y a intérêt pour chaque école de faire du benchmarking et d’adapter les contenus et techniques aux contextes
professionnels.
Le groupe fait remarquer les besoins en encadrement pour faire une bonne formation au management qui doit
être essentiellement pratique. Il faut des ressources importantes. Il semble intéressant à tous d’approcher les
apprentissages par la résolution de problèmes et les mises en situation complexes à résoudre.
71
Se pose la question de savoir qui doit réaliser les cas concrets ? N’y a- t-il que des retours «terrain» ?
Les cas doivent-ils être construits par l’école, par des experts ? Il semble important et intéressant d’apprendre
à gérer la complexité plutôt que de la réduire.
Il est précisé par certains membres du groupe que les apprenants en formation initiale sont en manque de
recul pratique et ont parfois la sensation d’approches trop artificielles, notamment dans des séquences de
simulations de face à face syndical. La question de la pertinence du positionnement de certains apprentissages
en  tout début de cursus de formation se pose. Le référentiel d’évaluation des formations étant encours de
réalisation, l’ENSOSP n’a pas encore suffisamment de retour d’expérience quand à l’impact sur le terrain de
ces formations initiales en management. Toutefois, il semble que certaines séquences mal comprises durant
la formation à l’école soient finalement bien exploitées en situation quelques temps plus tard.
Les officiers qui reviennent ensuite en formation continue perçoivent l’intérêt d’apprentissages qu’ils ont
parfois rejetés quelques années plus tôt. On constate dans le domaine du management une réelle différence
entre l’apprentissage en FI ou en FC.
Concernant la possibilité d’apprentissage à distance, plusieurs questions émergent. Quelle place peut-on
réserver à ce type de formation dans le management ? Quelles modalités (apports, conseils personnalisés,
didacticiels) ? Il y a une cohérence à trouver entre les compétences recherchées et les méthodes pédagogiques.
Il y a nécessité de distinguer la méthode, le processus et les solutions proposées. Il est préférable d’apprendre
la méthode plutôt que la solution toute faite. Certaines écoles ont prévu de faire revenir leurs cadres issus de
formation initiale en formation complémentaire un an plus tard. D’autres proposent des formations à distance.
La formation initiale par alternance permet à l’apprenant de disposer d’une représentation professionnelle,
chose qui n’est pas vérifiée dans le cas contraire. Cette solution séduit plusieurs personnes du groupe de
travail, même si, là encore, la recette n’est pas bonne pour tous.

Enfin, est évoqué un dispositif d’individualisation de la formation, associé ou non à un tutorat (ce qui suppose
un dispositif de travail avec les tuteurs chargés de l’analyse des pratiques) comme des réponses possibles à la
spécificité de la formation des cadres au management. Quels que soient les dispositifs choisis, à tout moment
reste posée la question de la valeur ajoutée de la fonction formation. Ce questionnement peut s’inscrire en
filigrane dans le paysage de la formation.

Question de la compétence

Les échanges se sont orientés vers divers questionnements autour de cette notion.

Concernant le manager en situation :


Il conviendra préalablement de garder à l’esprit que l’on ne peut pas ne pas manager : « ne pas décider, c’est
déjà prendre une décision ». Quelqu’un qui n’a pas appris à manager assure tout de même, dès lors qu’il est en
situation, une activité de management. En conséquence, quels contenus de formation peut-on apporter pour
améliorer ce type de schéma ?

Concernant la compétence :
Le groupe s’accorde sur un constat essentiel quant à la compétence en management public : elle ne peut
s’apprécier qu’en situation. Les compétences sont ainsi définies comme des savoirs transformés dans l’action
La compétence n’a pas qu’un seul visage, il y a plusieurs façons d’agir avec compétence dans une situation
donnée et les formations structurent les compétences. Une compétence est située par rapport à une classe
de situations, c’est une conduite constante (façon de gérer des comportements) pour gérer une classe de
situations.

« …Dans une situation donnée, je dois repérer la spécificité de la situation pour agir avec pertinence.
La compétence se modifie par des processus de régulation de l’activité. »

72
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Une autre approche pour la « définition » de la compétence est proposée, qui confine à l’évaluation du résultat
de l’action du manager : savoir quand on a réussi ou échoué.

Concernant l’évaluation de la compétence au management :


Le groupe retient le principe que la différence entre un manager novice et un expert tient au nombre de paramètres
pris en compte pour ajuster son action à la situation. Les compétences -transversales et spécifiques- une fois
identifiées, il s’agira ensuite de réaliser les adaptations aux contextes professionnels.
En lien avec cette perspective, le groupe de travail relève que, en vue de faciliter les choix et la formulation
d’objectifs de formation et de garantir une meilleure définition de ses contenus, il serait nécessaire de traduire
les objectifs théoriques en modèles d’actions et de pensée.

Toutefois, le travail sur le contenu de la formation gagnerait à être associé à la recherche de modalités
pédagogiques visant à développer chez les personnes formées une intelligence des situations managériales.
Dans un tel contexte où l’ingénierie pédagogique semble encore à développer, les principales vertus du
formateur pourraient devoir être conjointement le courage et l’humilité.

Questions et problèmes liés à l’existant

L’animateur présente les objectifs de cette seconde séance d’échanges :


- Y a-t-il une manière plus efficace pour élaborer des formations au management ?
- Quels peuvent être les contenus des formations au management dans les dispositifs de formation initiale ?
- Quelle liaison entre les contenus et les méthodes pédagogiques ?

Le débat est lancé, en gardant une dominante liée aux travaux de la première séquence.

Dynamique de changement permanent et formation au management ?

Les services publics, et plus particulièrement les services publics territoriaux (mais pas seulement), sont
dans une mouvance de changement qui semble aujourd’hui s’inscrire dans la continuité. Cette dynamique,
initiée par des contraintes d’origines assez diverses (application du droit européen, évolution de la notion de
responsabilité, réorganisation structurelle,...), provoque une réelle difficulté à définir un modèle de formation
au management dans les services publics. Plus en amont encore, les mêmes causes rendent délicates les
définitions des fiches emploi, des référentiels métiers qu’il paraît improbable de pouvoir stabiliser dans le
temps. L’un des constats est la difficulté à définir des besoins en termes d’objectifs de formation. Le groupe
constate qu’il est délicat de proposer des contenus de formations alors même que les objectifs ne sont pas
stables, voire pas stabilisables. Le groupe, s’interrogeant sur la particularité du management public, constate
que les dynamiques de transformations des structures publiques se rapprochent de celles du privé. Toutefois,
les contraintes et capacités du service public ne sont pas équivalentes à celles du privé qui a des objectifs
vitaux de résultats et des capacités d’adaptation plus développées.

Quels contenus pour quelles compétences de manager public ?

Le groupe pose quelques interrogations préliminaires qui continuent de provoquer un débat :


- Quelles capacités et compétences attend-on des cadres sortant des écoles de service public ?
- Est-il imaginable de rendre compétent un apprenant en formation initiale dans le domaine du management ?
- Quels doivent être les contours des formations, si l’on admet que la définition des contenus des formations
dépend de leur définition ?

73
Les témoignages lors de la première séquence de travail posent le problème et permettent de poser les
questions suivantes :
- Comment donner les outils et les clés de décodage à des personnes n’ayant pas de pratique professionnelle ?
- Comment adapter les contenus à ces publics, pour leur permettre d’acquérir la compétence, une fois
immergés dans le contexte professionnel ?

Grands thèmes prioritaires


- Animation d’équipe.
- Conduite du changement.
- Mesure de la performance.
- Management de projet.
- Management de la crise.
- Pilotage dans la complexité.
- Pilotage des actions d’un service.
- Pilotage de la performance.
- Conduire une équipe.
- Pilotage pédagogique.

Pour la mise en place d’une formation au management…


Prenant pour exemple la situation professionnelle « animation d’équipe », le groupe de travail propose
quelques points à clarifier (liste non exhaustive) :
- Cerner le profil de l’intervenant : proche de l’institution, expérience managériale, compétences d’animation
pointues compte tenu de la nature du sujet (aspects comportementaux).
- Définir les compétences recherchées pour animer une équipe : de quoi s’agit-il ? Leur donner du sens : à quoi
sert ces compétences ? Quels enjeux ?
- Veiller à ne pas être trop ambitieux et déconnecté du travail opérationnel (référence à l’activité réelle du
cadre).
- Envisager un travail en co-animation (consultant/professionnel).

Quelques écoles proposent des illustrations :


- L’IRA de Bastia fait état du traitement de commandes opéré par des services opérationnels et une incitation
à la construction autonome de l’organisation du travail par les groupes eux-mêmes.
- L’ENTPE construit une progression sur les 3 années de formation. Première année : communication
interpersonnelle, deuxième année : gestion de groupe, troisième année : management stratégique, contrôle
de gestion.
- L’END confie à des consultants la formation de ses formateurs internes.

74
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

En guise de synthèse : quelques éléments de réflexion

Concevoir et mettre en œuvre des formations au management public suppose qu’on en intègre les
spécificités dans chaque métier et institution, en prenant en compte les éléments suivants :

Concernant le champ couvert par le management public…

- L’importance des contraintes et règles du service public (égalité, intérêt général…).


- L’importance de l’articulation avec le politique (administration territoriale).
- L’importance des cultures professionnelles spécifiques et de l’hétérogénéité des cultures professionnelles
(administratifs, techniciens, opérationnels) au sein d’un même service.
- La nécessité d’identifier et d’utiliser des grilles de lecture diverses et pertinentes pour aider à comprendre
(analyse stratégique, théorie des organisations).
- Les enjeux par rapport à l’articulation entre le sens, la stratégie et les outils (complémentarité entre les deux
niveaux).
- Les limites du management public : rapport au temps (succession des réformes, temps politique, turn-over
des dirigeants), GRH centralisée et bureaucratique.
- Les marges de manœuvre pour les managers publics.
Une réflexion sur la pertinence de la distinction entre « management public » et « management privé » au profit
de celle relative à la nature des métiers et services rendus (manager…du soin, du social, de la sécurité, etc.) ?
Dès à présent, l’ouverture européenne qui permettra la mobilité transfrontalière. Un chantier est à poursuivre :
quelles formations, quels contenus pour quels cursus étrangers ?

Concernant la mise en oeuvre et les outils de la formation…

La légitimité de la formation au management sur la nature du métier.


- Partir nécessairement des savoir-faire différents suivant les référentiels de compétences.
- Avoir une vision claire des compétences attendues et bâtir des situations pédagogiques types en s’appuyant
sur les apprenants et l’extérieur, contextualiser les savoirs et les référents.
- Provoquer, pour un impact pertinent auprès des apprenants en formation initiale, une prise de conscience
des problèmes managériaux.
- Etablir le bon niveau de partition : non entre formation initiale / formation continue mais sur la base des
situations à gérer, des postes tenus ou à tenir.
- Les apprenants en formation initiale (dont l’un des objectifs semble bien être de « déconstruire » et
« reconstruire » les représentations du métier) ont tendance à focaliser leur attention sur les aspects techniques
du métier (attitude radicalement différente en formation continue).
- La difficulté, pour certaines écoles, de transmettre le « minimum » (niveau qui reste à définir) de culture
managériale pour certains apprenants : approche de ce champ d’apprentissage avec trop d’a priori, rejet
culturel… (exemple de l’INTEFP confrontée à ces « écueils » pour la formation des inspecteurs du travail).
- Une absence éventuelle de réflexion stratégique de la part de la « haute administration » en ce qui concerne
la définition des besoins de formation (ce qui implique la nécessité pour les écoles d’utiliser les marges de
manœuvre au risque de faire « à la place de »).
- La perspective de développement de l’individualisation de la formation.

75
Atelier n°4
Animateur : Nathalie COUVERT, consultante-formatrice

Rapporteur : Pierre RAMON BALDIE - EN3S (Ecole nationale supérieure


de sécurité sociale)

Participants : Jean BARBAZA (IRA de Bastia) - Pierre CAMMARATA (ESEN)


- Maxence CHAPOUTIER (CNFE-PJJ) - Yves GIOVANNINI (ESEN) - Maïlys
KNAUB (ENA) - Dominique LACAMBRE (Fonds de solidarité) - Benoît
LEMAN (ENSPo) - Nathalie NOEL (ENAP) - Jean Yves NOISETTE (ENSOSP)
- Dominique SCHAEFER (ENAP) - Isabelle MARCHI - BARBAUX (ESEN) -
Marcel PROULX (ENAP - Quebec)

L’évaluation des effets


de la formation
au management public

76
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Contexte

L’ensemble des écoles réunies au sein du RESP recourt à des évaluations, le plus souvent des évaluations
immédiates (à l’issue d’une séquence, d’un stage, d’un cursus, d’un module, d’une intervention) fondées sur
des questionnaires relativement simples. Ces derniers relèvent davantage d’une appréciation par les stagiaires-
élèves que d’une mesure réelle et efficace des acquis en matière de management public ou d’une mesure des
effets de la formation dispensée en cette discipline.

Plus rares sont les écoles qui recourent à des évaluations différées, notamment après que les élèves-stagiaires
aient terminé leur formation. Les évaluations renseignées par les participants, leur permettent de se prononcer
sur l’impact de l’action pédagogique et les effets de la formation.
De fait, il semble encore exceptionnel, qu’il s’agisse de solliciter les anciens élèves ou les employeurs, d’aborder
les questions de la mesure de l’apport de la formation pour le « client » employeur, c’est à dire de mesurer les
effets de la formation que ce soit :
- En termes de contribution à l’efficacité collective de la structure ;
- En termes d’efficacité individuelle dans le poste occupé ;
ou de mesurer les effets du développement des compétences de la personne (au regard par exemple d’un
référentiel de compétences qui aurait préalablement nourri une définition des dispositifs et contenus de
formation ou d’un bilan de compétences personnalisé établi en début de formation).

Si les programmes de formation sont évaluables, voire même labellisables dans le cadre de démarches qualité,
il apparaît bien plus délicat d’évaluer les effets de la formation, notamment en raison de l’écueil que représentent
les qualités individuelles des personnes formées qu’il semble exclu d’évaluer.

Ce niveau et ce champ d’évaluation des effets des formations posent en effet certaines interrogations et l’atelier
se propose de répondre aux principales d’entre elles :

- Quel(s) serai(en)t le(s) préalable(s) à la mise en œuvre d’une évaluation des effets de la formation ?
- Quelle logique, quelles justifications, quelles raisons devraient fonder la mise en place d’une telle démarche
d’évaluation ?
- Que mesure-t-on exactement ?
- A quel moment évaluer ?
- Doit-on différencier une évaluation en formation initiale et en formation continue ?
- Que fait-on des résultats ? Qui en sont les destinataires (école, anciens élèves, administrations-structures
d’accueil, etc…) ?
- Quelles incidences sur les dispositifs de formation ?
- Quelle méthode utiliser pour cette démarche ? Quels outils de mesure ? Comment apprécier la part de
formation liée à l’efficacité de l’action de la personne ?
- A qui confier l’évaluation ?
- Quelles incidences sur le déroulement de carrière ?
- Quelle interférence avec la logique des classements qui incitent à l’apprentissage de type scolaire ou
académique ?

Démarche

Les travaux de l’atelier ont permis aux participants de s’interroger sur la pertinence, le sens, les modalités de
mise en œuvre d’une évaluation des effets de la formation au management public, selon un découpage en trois
séquences conduisant à aborder successivement :

77
- La présentation de dispositifs existants en matière d’évaluation des effets d’une formation au management
public ;
- Les questions posées par cette évaluation et les conditions de succès de sa mise en œuvre ;
- Les évolutions à moyen terme de cette évaluation et ses liens avec les autres dynamiques affectant la place et
le rôle des écoles de formation au management public.
Dans la mesure où l’évaluation des effets de la formation au management public renvoie aussi à l’appréciation
du client bénéficiaire (l’employeur) et pas uniquement à celle des anciens élèves, le choix a été fait (outre les
expériences de l’IRA de Bastia et de l’EN3S) de solliciter le témoignage de M. Dominique Lacambre, ancien
élève de l’ENA, Directeur du Fonds de Solidarité, et de M. Gilles Huteau, Directeur de la CPAM de Moulins,
employeur des élèves issus de l’EN3S.

La contribution du Directeur de l’école nationale d’administration publique du Québec (ENAP-Québec), M.


Marcel Proulx, a permis d’apporter un regard extérieur très utile sur les pratiques exposées ainsi que de produire
les éléments de comparaison, le Québec étant particulièrement en pointe sur les questions managériales dans
le secteur public.

 Séquence 1 Présentation de dispositifs existants en matière d’évaluation des effets d’une formation au management
public

Compte-rendu d’expérience de l’IRA de Bastia

L’IRA de Bastia présente un dispositif d’évaluation des effets de la formation initiale qu’il délivre. Il est important
de noter que l’IRA, pour les besoins de cette évaluation, fait appel à un prestataire extérieur.

Les conditions de mise en œuvre de cette évaluation sont les suivantes :

- Définition des objectifs préalables (que veut-on évaluer ?). Elle est abordée par le recensement de « capacités
à … », il s’agit ainsi d’évaluer l’apport de la formation sur l’état de compétence d’un ancien élève de l’IRA. Le
questionnement concerne l’intégralité de la formation délivrée ;
- Administration du questionnaire en différé 7 à 8 mois après la sortie de l’école ;
- Interrogation en parallèle du « N+1 » (responsable hiérarchique) et de l’ancien élève ;
- Utilisation d’un organisme extérieur indépendant pour administrer le questionnaire, l’exploiter et en restituer
les résultats. Cette pratique présente une triple garantie :
Une approche professionnelle experte de l’administration de ces questionnaires (l’organisme participe à
leur confection, à la rédaction des questions pour limiter les biais statistiques, etc) ;
Un taux de retour optimal (plus de 90 %) ;
Une transparence relative au traitement des résultats vis-à-vis des personnes interrogées mais également
de l’extérieur (grand public, tutelles…). Ce choix se traduit par un coût d’environ 15.000 TTC par an.
- Une publication des résultats sur Internet (site de l’IRA), après leur présentation au Conseil d’administration.

Cette démarche est d’autant plus pertinente que les attentes des employeurs publics, bénéficiaires des
formations, se situent clairement au niveau des capacités managériales et finalement peu au niveau des
compétences techniques.
Ces résultats sont exploités par l’IRA pour ajuster la formation initiale aux attentes des employeurs en essayant
d’introduire des séquences de formation différenciées notamment au regard des métiers proposés à la sortie.
Il faut noter que l’introduction de ces enseignements différenciés suppose de connaître le plus en amont
possible la nature des emplois offerts et la répartition des différents métiers au sein de ces emplois. Ceci afin
de mieux appréhender le futur environnement professionnel et d’être en mesure, pour une efficacité maximale,
de recenser les besoins des futurs employeurs.
78
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Les résultats des premiers questionnaires ont influencé le déroulement de la formation, notamment le rythme
des classements : il a été dédoublé et le choix des postes à la sortie a été avancé. De même, la formation
continue ultérieure devra permettre d’accompagner la mobilité fonctionnelle pour passer sans difficulté d’un
métier à l’autre en s’appuyant sur les résultats de cette évaluation.

Compte-rendu d’expérience de l’EN3S (annexe 1)

L’EN3S présente un dispositif d’évaluation en différé de la formation, couplé à une évaluation du développement
des compétences des anciens élèves.

Les conditions de mise en œuvre sont les suivantes :

- Définition des objectifs préalables autour de 4 familles de questions :


L’apport des séquences de formation initiale ;
L’efficacité individuelle de l’ancien élève ;
La contribution à l’efficacité collective ;
L’état de développement des compétences par rapport au référentiel de compétences des cadres
dirigeants du service public de Sécurité sociale.
- Administration du questionnaire un an après la sortie de l’école
- Interrogation en parallèle du « N+1 » (Responsable hiérarchique) et de l’ancien élève.
- Traitement du questionnaire en interne à l’école (confection, administration, exploitation) car il n’y a pas
d’intérêt réel à externaliser ce traitement et présence de données personnelles d’évolution des compétences
des anciens élèves. Le taux de retour est optimal (plus de 90 %).
- Pas de publication des résultats compte tenu de leur caractère nominatif.

Les résultats depuis deux ans démontrent clairement les apports de la formation initiale et permettent d’ajuster
les enseignements pour faciliter l’acquisition de compétences estimées insuffisantes (pour exemple, les
compétences de négociation ont font l’objet d’une attention particulière en formation initiale, suite à l’exploitation
de ces questionnaires).

Au-delà, un lien avec la formation continue est établi sous la forme d’un « droit de tirage », soit trois actions de
formation, non payantes pour l’organisme employeur, accompagnant le développement des compétences de
l’ancien élève dans les domaines repérés.

Par référence à la présentation de l’IRA de Bastia, il est précisé par l’EN3S que la pré-affectation des élèves
en poste se fait au mois d’avril du 3ème semestre, ce qui permet une spécialisation des enseignements
pendant deux mois liés au métier d’affectation et à son contexte. Enfin, le classement des élèves à la sortie est
symbolique et ne conditionne en aucune façon l’affectation en poste.

Le regard de deux « clients », employeurs des personnes formées


Deux employeurs, clients des personnes formées par les écoles de service public ont fait part de leur expérience.

 Le regard d’un employeur d’un ancien élève de l’EN3S (co-destinataire du questionnaire de l’EN3S : M.Gilles Huteau,
Directeur de la CPAM de Moulins

Gilles Huteau souligne trois points sur l’évaluation proposée par l’EN3S :

En premier lieu, quand le directeur évalue la progression de son collaborateur (développement des compétences),
il s’évalue un peu lui-même puisqu’il a été le décideur du recrutement du collaborateur. L’exercice n’est donc
pas tout à fait neutre, pas plus qu’aisé.
79
En second lieu, il distingue deux parties dans le questionnaire : l’évaluation en différé de la formation initiale
de l’école et l’évaluation de la performance de l’ancien élève dans le poste, un an après avoir quitté l’école,
ce deuxième aspect relevant naturellement plus d’une logique de gestion des ressources humaines en lien
avec les entretiens annuels d’évaluation et les référentiels emplois/compétences du service public de Sécurité
sociale.
En troisième lieu, il note la situation ambiguë du premier poste à la sortie de l’EN3S qui ne facilite pas l’évaluation.
De fait, les élèves sont affectés à la sortie sur un poste de cadre supérieur et ne deviennent cadre de direction
qu’à l’issue d’un délai variable de 3 à 5 ans pour un élève externe. Il s’agit donc d’évaluer un collaborateur qui
a vocation à devenir cadre dirigeant. Les conditions de l’évaluation sont donc nécessairement différentes de
celles utilisées pour les autres cadres de l’organisme de Sécurité sociale.

Ce système d’évaluation ne saurait ainsi prétendre être absolument satisfaisant dans la mesure où, même en
n+1, les élèves n’occupent pas encore l’emploi supérieur auquel l’EN3S les forme. Cette situation engage par
conséquent à ne pas survaloriser l’avis de l’employeur quant aux compétences de l’élève et aux effets de la
formation.

Au final, sous réserve de l’ajustement de certains critères du questionnaire d’évaluation, Gilles Huteau
considère que la démarche d’évaluation en différé proposée par l’EN3S est intéressante car elle permet au
« client » d’exprimer son point de vue. Toutefois, il faut veiller à ce que ce point de vue ne soit pas le seul,
et il serait à son sens préjudiciable qu’une formation initiale soit uniquement construite à partir des attentes
du « client ». Ce serait d’une part difficile compte tenu de la multiplicité des clients et des attentes exprimées
souvent antinomiques et, d’autre part, dangereux car il existe d’autres attentes exprimées par d’autres acteurs
qui doivent contribuer à l’ingénierie de formation.

Présente au cours de la séquence, Sandra Auzannet, ancienne élève de l’EN3S (sortie au 1er juillet 2004) et
recrutée par Gilles Huteau, a rempli le questionnaire en parallèle. Cet exercice a été l’occasion de s’interroger
sur les apports de la formation, de l’expérience du poste à la sortie. Elle relève la difficulté d’identifier ce qui
relève de cette formation, de ce qui relève de la pratique. Elle indique enfin qu’il serait utile de proposer un tel
questionnement tous les 3/5 ans.

 Le regard d’un employeur pour les anciens élèves d’écoles de la fonction publique (ENA, INET) a été proposé
par M. Dominique LACAMBRE.

Fort de son expérience au sein de la fonction publique d’Etat, il constate tout d’abord une évolution nette sur
une longue période de la perception des formations par les administrations bénéficiaires.

Ces dernières ne formulaient aucune demande particulière auprès des écoles de formation. Ainsi pour l’ENA,
dont le fonctionnement interne érigeait le rang de classement comme élément déterminant du choix, par le
formé, de l’administration qui deviendra son employeur ; ce choix était fait, sans corrélation entre le poste et le
type de compétences requises pour l’exercice des fonctions, et sans intervention du futur employeur dans le
processus de choix du premier poste.
Se défendait également fréquemment - et se défend encore - l’idée que la formation n’était pas utile,
particulièrement aux hauts fonctionnaires, et que le « terrain » se chargeait de développer les compétences.
L’ambiguïté longtemps persistante sur le rôle du cadre dans la fonction publique explique également l’absence
d’une culture de l’évaluation des effets de la formation au management public.

D. Lacambre constate qu’aujourd’hui les administrations se préoccupent de manière plus directe des
compétences des fonctionnaires qui les rejoignent.
Ainsi, il parait aujourd’hui admis que les cadres se forment, le débat portant moins sur la formation des cadres
que sur leur rôle. A l’observation, il considère que de nombreuses demandes de formations faites par les
80
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

administrations centrales sont trop axées sur les compétences techniques au détriment des compétences
managériales. Il relie cette situation aux référentiels d’emplois des différents ministères qui n’intègrent pas
suffisamment la dimension managériale.

Or toute la difficulté de l’évaluation des effets de la formation au management réside dans le fait qu’il est
aisément possible d’évaluer les effets d’une formation-action liée à un poste avec une dimension technique, et
qu’il est extrêmement compliqué d’évaluer les effets d’une formation dans le domaine managérial, formation
souvent transversale à plusieurs métiers (exemple du ministère de la justice associant des cadres issus
d’administrations très cloisonnées, pénitentiaire, protection judiciaire de la jeunesse et magistrature).

Enfin, il rejoint la conclusion de Gilles Huteau concernant les avis des « clients ». Il est précieux de solliciter
leur avis, mais il faut se garder des excès d’une logique consumériste, le client n’étant pas forcément toujours
le plus éclairé.

Autres expériences

Venant enrichir l’analyse de l’état des lieux en matière d’évaluation des effets de la formation au management
public, d’autres expériences sont proposées au groupe en complément de l’EN3S et de l’IRA de Bastia que l’on
peut regrouper comme suit :

- Les dispositifs d’accompagnement à la prise de fonctions (exemple de l’ENA chargée, conformément au statut
de la fonction publique, d’une formation à destination des directeurs et des sous-directeurs d’administration
centrale, dans les 6 mois de la prise de fonction) ;
- Les séminaires permettant des bilans « en différé » (bilans individuels, feedback sur les apports de la
formation (ENS Police)) ;
- Les instances de dialogue entre les administrations employeurs et les opérateurs de formation (CNFE-PJJ) ;
- Les dispositifs de gestion des parcours professionnels, organisés en liaison avec la formation continue à
chaque étape du parcours (ENTPE) ;
- Les travaux sur l’évolution des représentations des élèves sur leur monde professionnel à des moments
différents (ENAP).

À l’ENAP - Quebec, la question de l’objectif de l’évaluation des effets de la formation est première. Elle y répond
en donnant à l’évaluation l’objectif de s’améliorer, de corriger ses erreurs. Cette posture est différente de celle
qui consiste à évaluer pour rendre compte (notamment vers les tutelles), objectif pour lequel un indicateur
« simple et robuste » suffit souvent.

Deuxième question, celle du moment de l’évaluation. Pour l’ENAP-Québec, une évaluation à chaud bien
administrée permet déjà de retirer des informations précieuses pour les formateurs et les responsables de
l’ingénierie de formation des écoles. Cela passe par des questionnements simples du type « croyez-vous que
ce que vous avez appris va vous servir ? ». Au final, l’évaluation en différé de la formation peut être centrée sur
une question : « Parmi l’ensemble des cours, lesquels sont pertinents au regard de votre pratique ? ».

Enfin, il est impossible de distinguer au moment de l’évaluation en différé ce qui relève de l’apport de la
formation de ce qui relève de l’apport du monde professionnel. Malgré des tentatives plus ou moins heureuses
(techniques d’isolement des variables, pondérations, etc), il faut intégrer qu’on ne sait pas faire, en différé, la
mesure de la valeur ajoutée d’une formation.

81
 Séquence 2

Questions posées par l’évaluation des effets de la formation au management public, à partir des
expériences présentées
Deux familles de questions peuvent être recensées au regard des expériences présentées :
- Qu’attend-on de l’évaluation ?
- Quels sont les pré-requis nécessaires à la mise en place d’un tel dispositif d’évaluation ?

Réflexions préalables : pourquoi évaluer ? Evaluer : une étape d’un processus global

En premier lieu, il faut rappeler que l’évaluation des effets de la formation dans le domaine du management public n’est qu’un
élément d’un processus plus global qui commence lors du recrutement et se poursuit par les différents niveaux de formation
(initiale, continue).

Ce rappel n’est pas neutre car il oriente et détermine les conditions et la valeur ajoutée des formations. De fait,
comme le souligne l’ENAP-Québec, la sélection des meilleurs (entendu au sens des personnes en adéquation
optimale avec les profils et les compétences recherchés par les administrations) entraîne de rechercher une
valeur ajoutée différente des formations. Dans ce schéma théorique, on est forcément essentiellement sur les
regards, les analyses comparées, la prise de recul et les savoirs-faire.
En second lieu, le groupe note que la mise en place de l’évaluation des effets de la formation au management
public n’est pas systématiquement une commande claire extérieure aux opérateurs de formation que sont les
écoles.
Ce constat conduit résolument à considérer que cette absence de commande claire est, pour les écoles,
une opportunité réelle de mettre en place les dispositifs d’évaluation et connaître leurs points d’appui et de
progression dans le sens d’une logique d’amélioration.
Cela favorise également l’anticipation des actions d’évolution ainsi qu’une meilleure maîtrise de la communication
vers l’extérieur.
Mais parallèlement, il y a un risque non négligeable de passer d’une logique d’évaluation d’une formation à
la question de la légitimité de l’école, ce risque n’étant pas forcément prégnant en France où, entre elles, les
écoles de service public ne se font pas forcément concurrence (étant donné qu’elles forment chacunes à des
métiers spécifiques dans des domaines différents). Ce risque est plus réel par exemple si le « demandeur » de
l’évaluation est l’autorité qui exerce une tutelle sur l’école, ou qu’il existe un référentiel de compétences conçu
comme une obligation de résultats pour l ‘école.

Pré-requis nécessaires

En terme de pré-requis, il est admis que l’objectif poursuivi par l’évaluation des effets de la formation doit être
nécessairement affiché et partagé. On rejoint la remarque formulée par l’ENAP-Québec pour laquelle l’objectif
de l’évaluation est de « s’améliorer, de corriger ses erreurs ».
En ce sens, l’évaluation est un instrument de pilotage interne de la qualité. Il s’agit d’être vigilant sur son
utilisation à des fins de mesure de la performance ou de compte-rendu d’activités en direction de l’extérieur,
a fortiori lorsqu’il existe des tentatives de lier la question de l’évaluation à celle de la mesure des coûts de
fonctionnement.

Admettre cette définition de l’évaluation permet également de répondre à la question du rapport entre un résultat
constaté et un résultat attendu, ce dernier pouvant être formalisé au sein d’un référentiel. L’évaluation des effets
de la formation est-elle un contrôle de conformité par rapport à un référentiel (j’attends telle compétence

82
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

d’une personne formée) ou est-elle simplement un dispositif destiné à un feed-back interne ? Naturellement, la
posture évoquée conduit à répondre dans le sens du dispositif de feed-back interne.

Second pré-requis, la clarté et le partage des règles du jeu de l’évaluation.

On peut distinguer de manière simple les questions de l’évaluateur, de l’outil d’évaluation, du moment de
l’évaluation.

 L’évaluateur

L’évaluateur peut être la personne formée elle-même (auto-évaluation) ou un tiers.


L’auto-évaluation est toujours possible pour évaluer une formation, car elle offre toujours une échappatoire
pour la personne sur le mode « je n’ai rien appris car la formation n’était pas adaptée ou efficace ». En revanche,
l’auto-évaluation en termes d’effets de formation et de développement de compétences est plus problématique.
Elle doit dans ce cas nécessairement être liée à un projet professionnel appelant des compétences précises.

L’évaluation par un tiers se fait souvent à travers le questionnement du « N+1 » comme l’ont montré les
comptes-rendus d’expérience de l’IRA de Bastia et de l’EN3S. On peut s’interroger sur ce choix, car dans le
domaine du management le questionnement du « N-1 » peut être plus efficace et instructif. Dans le cas d’une
évaluation par un tiers, la déontologie impose que la personne évaluée connaisse l’existence de l’évaluation et
de son contenu. Dans le même sens, il est important que le dispositif d’évaluation soit connu et partagé de tous
les acteurs (national, local, administratifs, partenaires sociaux, etc.) ;

 L’outil d’évaluation

L’outil d’évaluation doit être simple, contenir peu d’indicateurs. Il prend souvent deux formes, non exclusives
l’une de l’autre : le questionnaire, les entretiens.
Dans les deux cas, les questions doivent être simples et appeler des réponses permettant une exploitation
ultérieure. Dans le domaine, mieux vaut privilégier la logique du pas à pas, de l’empirisme raisonnable, plutôt
que de vouloir tout aborder en détail, de manière très fine, mais au final être dans l’incapacité de définir des
actions correctives.

 Le moment de l’évaluation des effets de la formation

L’évaluation à chaud doit normalement fournir des indications utiles sur la capacité perçue à transférer de
manière opérationnelle les connaissances et savoirs-faire.

Il semble raisonnable d’envisager une évaluation régulière au bout d’un, trois, cinq et dix ans. Là encore, des
questions simples sont posées à chaque fois (qu’est- ce qui vous a servi, manqué, etc.), et les dispositifs de
formation continue veillent à être en harmonie avec la formation initiale et les parcours individuels ultérieurs.

Enfin, les spécificités des formations initiale et continue en termes de durée ne peuvent être ignorées. Sur une
durée de formation initiale (souvent comprise entre 1 et 2 ans), on peut clairement évaluer des progressions
puis des effets au moment du transfert dans le monde professionnel. Comment évaluer les effets des formations
continues d’une durée de 2/3 jours dans le domaine du management public ? Cela est quasiment impossible
sauf à confirmer la posture envisagée plus haut, c’est-à-dire un questionnement simple en différé sur ce qui a
servi et manqué afin d’ajuster le contenu de la formation.

83
 Séquence 3 : Perspectives d’évolution des dispositifs d’évaluation des effets de la formation au management

Deux familles de questions recensées :


- Évaluation des effets de la formation et nature des actions et questionnements sur l’offre de formation proposée ;
- Évaluation des effets de la formation et dynamique de gestion de carrière.

Évaluation des effets de la formation et nature des actions et questionnements sur


l’offre de formation proposée

Les formations initiale et continue peuvent sans doute être distinguées. De fait, les formations initiales
proposées dans les différentes écoles sont en situation de monopole. Les questionnements liés à ce statut
existent et ont pu être posés précédemment, en lien avec la logique d’amélioration.

La formation continue est, quant à elle, dans la plupart des cas dans une logique concurrentielle. Même lorsque
les indicateurs issus de l’évaluation paraissent satisfaisants, qu’en est-il des personnes qui ne viennent jamais
en formation continue ? Pourquoi ? Ce sont aussi des questions qui interpellent la pertinence et l’existence
des écoles.
Corrélativement, le problème de baisse de fréquentation des offres de formation continue est-il imputable à un
environnement externe ou aux offres de formation des écoles elles-mêmes ?
Il faut admettre la nécessité d’être suffisamment imaginatif pour créer l’envie de venir en formation et
surtout l’envie d’y revenir. Pour exemple, au-delà d’un certain niveau de responsabilités, le mot même de
formation est tabou. En revanche, les rencontres, les échanges paraissent un angle d’attaque admis et porteur.
L’ENAP-Québec a introduit de nouvelles formules de formations continues sous la forme de cercles de co-
développement fondés sur la rencontre de pairs où l’on échange des points de vue, où chacun apporte son
problème pour le partager avec d’autres, issus d’autres univers.
Dans ces formules, on sort naturellement de l’évaluation traditionnelle des effets de la formation pour retenir
un critère de succès, celui de la fréquentation régulière du cercle.

Autre question importante, celle de la spécificité de l’évaluation des effets d’une formation au management
public par rapport à celle des effets d’une formation technique. Des échanges, il ressort naturellement une
spécificité de l’évaluation des effets d’une formation au management. Les corrections ultérieures à apporter
ne sont pas de même nature dans le domaine du management. Cette incertitude doit être acceptée car elle
est inhérente à tous les mondes, intellectuel, de la recherche, universitaire. De plus, cette incertitude offre
l’opportunité aux écoles de contribuer directement à la définition des besoins, aux choix des méthodes et des
actions correctives.

Évaluation des effets de la formation et dynamique de gestion de carrière

Les interrogations relatives à l’évaluation des effets de la formation au management public s’accompagnent
très vite des réflexions liées aux formes d’accompagnement individuel et régulier des personnes formées.

De fait, on peut rapidement glisser de l’évaluation des effets de la formation à l’évaluation du développement
des compétences. Le dispositif présenté par l’EN3S mêle d’ailleurs les deux aspects. Les deux notions - et les
dispositifs liés- sont distinctes mais peuvent être corrélées.

84
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Cela signifie qu’on ne peut pas tirer de conclusion évidente et immédiate en matière de développement de
compétences en considérant qu’elles sont un effet d’une formation antérieure. Pour autant, envisager une
évaluation régulière du développement des compétences présente l’intérêt de re-positionner l’école comme
prescripteur de formations pour contribuer au développement ou la confortation de certaines compétences, et
donc de favoriser la gestion des parcours.

Aborder par cet angle la question des compétences et de l’évaluation de leur développement nécessiterait
d’aller plus loin et de sortir du champ d’étude du séminaire.

Conclusion

L’évaluation des effets de la formation au management public est de prime abord une question technique. Y
répondre nécessite de faire un détour afin d’exprimer les pré-requis nécessaires à sa mise en œuvre efficace,
que ces pré-requis concernent les objectifs poursuivis ou le dispositif utilisé.
Mais au-delà de cet aspect, la question de la mesure des effets de ce type de formation renvoie très vite aux
enjeux de définition des missions de l’école et de leur permanence.

85
Annexe Atelier 4 : Direction de la formation initiale
Questionnaire d’évaluation « en différé »
43ème promotion
Exemplaire Directeur de l’OSS d’affectation

Partie 1 : Données d’identification

11 - Indiquez vos Nom et Prénom .......................................................................................................................

12 - L’ancien(ne) élève est issu(e) du concours :


Interne
Externe

13 - Précisez le régime ou la branche d’affectation au 1er juillet 2005 :


Régime général
Précisez le type d’organisme
ACOSS
CAF
CNAF
CNAMTS
CNAV
CPAM
CRAM
UCANSS
UGECAM
URCAM
URSSAF
autres, à préciser ……………(Notamment si détachement)
Régime agricole
Précisez le type d’organisme
CCMSA
MSA (ou fédération)
Régime social des travailleurs indépendants
Précisez le type d’organisme
AVA
CMR
CANAM
ORGANIC
CANCAVA
ORGANIC Caisse nationale

14 - Le poste d’affectation à l’issue de la formation initiale (au 1/07/05)


Dans le cas où l’ancien(ne) élève cumule plusieurs fonctions (management, technique), cocher la case qui correspond au métier principal ou à
celui le plus proche du métier exercé
Manager
Précisez dans quel secteur :
Production / Relation de service (collecte, prestations, action sociale, ligne du public...)
Gestion du risque / Régulation
Services généraux / Administration générale (y compris organisation, informatique, budget…)
Agence comptable
Ressources humaines / Formation professionnelle
Attaché(e) de direction / chargé(e) de mission (ou toute autre appellation proche)

15 - Niveau du poste d’affectation : ................................................................................................

86
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Partie 2 : Les compétences fondamentales

Pour chacun des domaines ci-dessous, vous diriez que l’ancien(ne) élève posséde un niveau de compétences
(barème de 1 à 8 : 1 très faible, 8 très élevé) 


1 2 3 4 5 6 7 8
Les missions du service public de sécurité sociale, les enjeux des politiques
publiques sociales (item envisagé sous l’angle de votre domaine d’action :
recouvrement, dépenses de santé, politique familiale, etc)
La gestion des partenariats des OSS (Etat, collectivités locales, associations...)

Les technologies de l’information et leur utilisation à la sécurité sociale

La gestion comptable et financière d’un organisme

Le droit du travail et des conventions collectives

Le management d’équipe

Le management de projets

La communication

Partie 3 : Efficacité individuelle de l’ancien(ne) élève

Pour les domaines ci-dessous, vous diriez que l’ancien(ne) élève


(barème de 1 à 8 : 1 non pas du tout, 8 oui très fortement) 

1 2 3 4 5 6 7 8
Respecte correctement les délais et les échéances

Gère correctement les priorités

Gère correctement son espace de travail (organisation, archivage...)

Fait preuve d’initiative et d’autonomie



Partie 4 : Contribution de l’ancien(ne) élève à l’efficacité collective

Pour les domaines ci-dessous, vous diriez que l’ancien(ne) élève


(barème de 1 à 8 : 1 non pas du tout, 8 oui très fortement) 

1 2 3 4 5 6 7 8
Est particulièrement attentif à la gestion du climat social

Contribue pleinement aux performances (unités, organisme)


et à leur évaluation
Conduit avec succès des projets pour le compte de l’OSS

Favorise l’innovation au profit de l’OSS (favoriser un meilleur service


à moindre coût, améliorer l’organisation...)

87
Partie 5 : Développement des compétences de l’ancien(ne) élève

Pour compléter cette partie, se reporter au référentiel de compétences simplifié, joint au mode d’emploi.

Au regard des compétences développées au cours de la formation initiale, évaluez les domaines de
progression au cours de la première année en poste * :

Évaluation de la maîtrise au 1er /07/2005 Évaluation de la maîtrise au 1er /07/2006

1 2 3 4 5 6 7 8 1 2 3 4 5 6 7 8
Compétences entrepreneuriales

Compétences liées aux métiers


de la sécurité sociale
Compétences managériales

Compétences partenariales

* Pour la 43ème promotion, vous devez compléter les items relatifs au 1er juillet de la sortie de l’Ecole à partir de vos observations et votre
perception de la maîtrise des compétences. A partir de la 44ème promotion, l’Ecole complètera les items au 1er juillet de la sortie de l’Ecole (à
partir des cartographies des compétences), afin qu’il y ait un élément de référence permettant d’évaluer la progression un an après.

Commentaires éventuels que vous souhaitez porter à la connaissance de l’EN3S sur les qualités et
connaissances que l’ancien élève doit posséder à l’issue de la scolarité :

.....................................................................................................................................................................

.....................................................................................................................................................................

.....................................................................................................................................................................

.....................................................................................................................................................................

.....................................................................................................................................................................

88
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

89
Table ronde
Animateur : Bernard DIZAMBOURG

Participants : Dominique LACAMBRE, Directeur du fonds de solidarité


Patrick JOUBERT, Directeur de l’École nationale supérieure de police
Jean BARBAZA, Directeur de l’Institut régional d’administration de Bastia
Colonel Luc FERLEY, Directeur du service départemental d’incendie
et de secours de l’Allier

Que pourrait être


la formation
des managers
dans 10 ans ?

90
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Bernard Dizambourg

Procédons d’abord à une synthèse des propos tenus lors des ateliers de la matinée.

La première interrogation s’est portée sur la spécificité supposée du management public et, par incidence,
sur la spécificité des formations s’y rapportant. Dans un deuxième temps, les débats ont évoqué les mesures
que peuvent prendre les écoles de service public pour permettre de mieux s’adapter à ces particularités.
Enfin, la réflexion a été menée sur la teneur des contributions qu’un travail en réseau comme celui du RESP
est susceptible d’apporter.

Des préoccupations semblent être revenues avec insistance lors de chacun de ces ateliers. La première
d’entre elles concerne la permanence dans nos organisations publiques de cultures professionnelles
fortement ancrées. Ces cultures professionnelles peuvent se traduire par des résistances au changement, des
attachements aux valeurs du service public ou des conceptions spécifiques des organisations. Il est certain
que la très forte connaissance de ce contexte par les écoles doit enrichir les formations en management
même lorsqu’il est fait appel à des programmes élaborés en externe ; dans cette dernière hypothèse, les
écoles ont un rôle d’aiguillage et d’expertise à jouer pour les adapter aux problématiques du service public.

Un deuxième point à mettre en relief est la nécessité de travailler et de communiquer en interne sur la notion
de service public. Il a en effet été souligné que les particularités, la complexité voire les contradictions des
exigences de service public sont des éléments essentiels que le cadre-manager doit transmettre dans ses
actions de management. Cette dimension doit être prise en compte dès la formation initiale et interrogée
régulièrement ; il est évident que les écoles de service public ont à cet égard un rôle clé à jouer.

Troisièmement, la connaissance de la dimension évolutive des métiers par les écoles de service public a été
mise en avant.
J’aimerais souligner que lors de ces discussions, la fonction critique – au sens constructif du terme - des
écoles à l’égard des évolutions des organisations a été souvent citée. Les écoles sont fondées à analyser
les transformations organisationnelles et les aspects ambitieux, efficaces ou bureaucratiques qui peuvent
en découler. Rendre un jugement critique permet aussi d’éclairer la pratique des managers et d’améliorer le
fonctionnement des organisations.

Par ailleurs, il a souvent été fait mention de domaines où les écoles peuvent étendre, compléter ou améliorer
leur action. À cet égard, je retiendrai quatre points principaux :

- La formation initiale doit davantage insister sur les différentes situations auxquelles le cadre peut être
confronté dans l’exercice de son activité. Il est probablement nécessaire de compléter les formations de
terrain, notamment par le biais de stages.

- Il est nécessaire de procéder à des « retours terrain » auprès des anciens élèves, afin d’évaluer l’efficacité
des actions de formation en matière de management. D’une manière générale, la nécessité de mettre en
place une fonction de veille ainsi qu’une fonction de réflexion sur les développements pédagogiques dans le
domaine du management au sein des écoles a été soulignée.

- Certains ont exprimé leur souhait d’aller plus loin dans la transversalité entre les écoles. À cet effet, il a été
proposé qu’un recensement des séquences pédagogiques – à la fois sur les publics visés et sur les contenus -, et
un référentiel des métiers des cadres soient élaborés en commun. Ce dernier projet peut contribuer à définir
l’évolution de la fonction de cadre dans les organismes de service public.

91
- Il semble important qu’il y ait un discours élaboré par le réseau des écoles de service public, qui puisse, de
façon ouverte, affirmer la particularité du management de service public. Certains ont en outre suggéré de
développer le cycle de management supérieur.

D’une manière synthétique, il semble nécessaire de donner de la signification à la formation au management


public et à cet égard, les échanges lors de ces ateliers ont permis d’apporter des pistes de réflexion.

Sur ces bases, il convient de discuter au cours de cette table ronde de la question de l’évolution des
formations au management public à 10 ans et in fine de l’évolution des écoles qui les dispensent.

Dominique LACAMBRE

Lors de ma carrière, j’ai eu l’occasion de travailler dans différentes institutions et différents ministères, ce
qui me permet aujourd’hui de disposer d’une vue d’ensemble de la fonction publique. Et il apparaît que cette
dernière change profondément, à l’image des mutations qui traversent la société en général. Le rôle du cadre
est lui aussi affecté par ces phénomènes mais je rappelle que ces problématiques ne sont pas récentes. Elles
figuraient déjà en 1989 dans la circulaire sur le renouveau du service public.

En revanche, les outils, les techniques, les organisations ont considérablement évolué. Nous sommes passés
d’une culture de l’obligation de moyen à une culture de l’obligation de résultat, d’une culture de respect des
procédures à une culture de l’atteinte des objectifs, d’une culture du contrôle à une culture de l‘évaluation.

Il est demandé au cadre davantage de réactivité, d’efficacité et l’atteinte des objectifs définis. Avec l’entrée
en vigueur de la Loi organique de la loi de finances (LOLF), de plus en plus d’injonctions contradictoires
sont à gérer et il est certain que ce tableau est dans une large mesure pathogène : les anciens agents
peinent à intégrer ces nouveaux préceptes, les changements s’instaurent sans réelle planification politique
ni stratégique.

Certes, mon propos est peut-être excessivement négatif mais il est essentiel de prendre en compte la
nécessité d’accompagner les cadres dans cet environnement en pleine mutation. Je remarque par ailleurs
que si la situation du cadre en administration centrale est difficile, le cadre en administration déconcentrée est
particulièrement isolé : ce dernier doit faire face aux pressions hiérarchiques, assurer les fonctionnements
des services et affronter des syndicats particulièrement puissants et virulents en matière de gestion du
personnel.

Il est évident que des formations sont nécessaires, d’autant que le cadre aura de plus en plus à gérer des
budgets et non plus seulement des lignes budgétaires. Le cadre aujourd’hui doit être en mesure de travailler
en équipe, de déléguer, de gérer son temps, de décliner les objectifs du service. Dans certains ministères,
la rémunération à la performance fait l’objet de tentatives et je pense qu’une telle mesure, sans les moyens
adéquats, risque d’entraîner de nombreuses complications. Cette mesure révèle bien la portée des mutations
actuelles.

Les logiques de parcours professionnel intégrant les questions de ressources humaines vont être
développées. Mais les procédures de jugement par le terrain peuvent être mises en place soit de façon
raisonnée et constructive, soit de façon sauvage et ravageuse.

Quoi qu’il en soit, il semble nécessaire de donner aux cadres les moyens de mettre en œuvre leurs actions,
en développant les partenariats. Il est essentiel qu’ils disposent de moyens réels d’évaluation des agents, de
leur service et d’eux-mêmes.
92
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

J’insiste particulièrement sur ce dernier point, car je suis convaincu que les formations au management ne
seront pas des formations à l’outil, mais des formations de soi-même en situation de management. Identifier
ses défauts et ses qualités pour manager une structure qui a, elle aussi, ses défauts et ses qualités, tel est, je
crois, le défi du cadre d’aujourd’hui : «  connais-toi toi-même » pourrait être sa nouvelle exigence.

Patrick JOUBERT

Je reconnais nombre de diagnostics dans le précédent propos. On peut en effet percevoir des signes
d’évolution du management public dans les dix prochaines années.

Au sein de la police nationale, la relation avec le management est forte car l’institution est une entreprise de
main d’œuvre, fortement hiérarchisée autour de corps très ancrés ; de plus, la police nationale est un service
public qui fonctionne 24h sur 24h.

Depuis quelques années, la sécurité est devenue un enjeu pressant qui concerne à la fois le monde politique
et l’ensemble de la société civile. Ce phénomène s’est traduit par des réformes très importantes et parfois
contradictoires car la sécurité est encore un domaine où les idéologies s’affrontent. La période récente a vu
une succession de réformes très importantes ; une partie du personnel a pu être désorientée et de grands
efforts de management ont été nécessaires pour remotiver les équipes.

La police a donc mis en œuvre des réformes, dans l’esprit de la LOLF, c’est-à-dire sans engagements
financiers supplémentaires. Le management représente l’outil privilégié de réforme dans l’institution sachant
que le terme de management fait encore problème ; certains, au sein même des plus hauts degrés de la
hiérarchie, lui préférant le terme de commandement.

Au regard du débat d’aujourd’hui, il me semble important de se demander quel public est concerné par
l’évolution du management. Selon moi, il n’est pas exclusif et aura vocation à s’élargir. La réforme des
corps et carrières revalorise les corps et attribue la fonction managériale et d’encadrement jusqu’au
niveau des gradés. Il est donc nécessaire de décloisonner les formations en management et d’organiser la
transversalité.

Il s’agit aussi de préparer les fonctionnaires à la mobilité et à l’approche collective du problème de sécurité
intérieure. Les maires, qui se voient confier des responsabilités en matière de sécurité, ont recours à des
professionnels tels que des commissaires de police.

La seconde interrogation est celle du recrutement des managers. À cet égard, il est essentiel de résister aux
corporatismes en recrutant à la fois en interne et en externe. Au niveau interne, il est nécessaire d’élargir les
publics et de laisser davantage de place à l’expérience professionnelle. Nous venons d’ailleurs d’innover en
ce domaine en créant la voie d’accès professionnel pour le recrutement des commissaires de police. Une
autre priorité est de diversifier les origines des publics qui aujourd’hui ont trop tendance à se reproduire
malgré les concours. On se rend compte qu’une certaine homogénéisation doit être cassée par davantage
de diversité sociale.

Le système actuel dispose que les cadres supérieurs doivent être recrutés à un niveau national et les cadres
à des niveaux intermédiaires ; en effet, l’enracinement dans un contexte local est aussi un gage de bonne
qualité du service public.

93
Il est crucial que la formation accompagne l’ensemble de la carrière des managers et pose des passages
obligatoires lors de chaque changement de poste ; ce dispositif est introduit depuis six ans dans le schéma
directeur de la formation.
Mais au-delà, la formation doit être professionnalisante et individualisée. Elle se doit d’être moderne, c’est-
à-dire tournée vers les nouvelles technologies de l’information et partagée avec les autres institutions de
service public.

Enfin, j’affirme aussi avec insistance l’importance d’une formation qui soit liée avec le monde universitaire,
car cette dimension apporte davantage d’ouverture d’esprit à nos managers et permet de mieux comprendre
un phénomène aussi complexe et multiforme que celui de l’insécurité dans notre pays.

Certes, une partie importante de la formation de l’ENSPo est confiée à des acteurs extérieurs mais un effort
particulier est fourni pour que ces intervenants s’imprègnent de la culture et des problématiques de notre
service public.

Aujourd’hui, l’Europe a considérablement fait progresser l’ouverture des écoles de police, qui fonctionnent
désormais en réseau au sein du collège européen des écoles de police et pour lequel l’ENSPo entreprend des
actions et mène des réflexions sur des thèmes communs à tous les membres du réseau.

Jean BARBAZA

Pour un directeur d’une petite école de formation ne recevant que 130 à 140 personnes par an, il est clair
que l’action porte principalement sur le niveau opérationnel. Aujourd’hui, nous constatons des mutations
concernant les cadres intermédiaires.

L’origine de ce phénomène réside certainement dans les mutations de la politique publique d’État vers
davantage de coordinations de projets, tâches qui réclament plus de cadres que d’agents d’exécution.
Nous avons deux très fortes attentes.
D’une part, les employeurs exigent des cadres intermédiaires des compétences managériales et des
aptitudes personnelles avant même les compétences techniques.
D’autres part, les jeunes qui entrent aujourd’hui dans la fonction publique ont très tôt des attentes en matière
de responsabilités et de reconnaissance. Bien que la réalité du fonctionnement des services puisse les
décourager, c’est, je crois, cette population qui permettra de mettre en œuvre la LOLF.

Concernant la formation, je fais partie des personnes qui estiment qu’on ne peut pas réellement former
au management. La capacité à commander dépend davantage de l’histoire personnelle de chacun et des
appétences individuelles dans le domaine professionnel que d’une formation délivrée par une école. Certains
n’ont pas vocation à diriger et encadrer, préférant approfondir leur compétence dans un domaine et une
expertise. Néanmoins, il reste que les personnes évoluent et qu’il n’est pas impossible qu’elles deviennent
tout de même des cadres de qualité.

En matière de formation, il est clair que des techniques de management existent et que ces techniques
s’enseignent, comme le management de projet ou d’encadrement. Il s’agit d’ailleurs lors de ces programmes
de transmettre la spécificité du management public. Je suggère de fonctionner par co-animation, en
faisant venir un intervenant formateur privé et un fonctionnaire expérimenté dans le management public.
Ce dispositif permet de mieux faire admettre la possibilité d’appliquer les techniques managériales dans la
sphère publique.

94
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Un deuxième aspect consiste à faire comprendre aux élèves l’importance cruciale du management. Selon
moi, il faut intégrer davantage de stages aux programmes pédagogiques, car ils permettent à l’élève
d’appréhender son environnement et d’échanger avec les managers de terrain, qui transmettent leur
expérience à cette occasion. Par ailleurs, un programme a été créé, dans lequel les élèves doivent remplir
une tâche de consultant, missionné sur certains sujets spécifiques, à la demande des administrations. Ce
dispositif a donné de très bons résultats et constitue un programme efficace de formation managériale.
Enfin, il est essentiel que les écoles de service public soient exemplaires et assument pleinement leur mission
de formation des cadres. A cet effet, nous devons renoncer à une certaine infantilisation de nos élèves afin de
les préparer efficacement aux tâches qui les attendent. L’attitude des écoles envers les élèves est une façon
de transmettre les techniques de management. Il faut impliquer les élèves dans les décisions qui concernent
les écoles, sachant que les équipes de seniors ont aussi leur expérience à transmettre. Les anciens élèves se
souviennent toujours de la façon dont ils ont été considérés lors de leur passage dans les écoles.

J’estime enfin important de rappeler que la formation parfaite ne peut exister. Le réalisable doit primer sur
des projets idéalistes et c’est par une démarche empirique que l’on pourra avancer.

Colonel Luc FERLEY

Je n’interviens pas ici au titre d’expert en formation mais simplement en tant que cadre de terrain intéressé
par cette question. Mon propos est concret et s’inspire de mon expérience professionnelle. Il s’articulera en
trois phases.

La première traitera du management des hommes, des questions relationnelles et hiérarchiques. La


deuxième est axée sur le management d’institution publique impliquant une gestion financière et juridique.
Enfin, la troisième portera sur le commandement opérationnel.

Premièrement, il importe de savoir que les services de prévention incendie auxquels j’appartiens se sont
réorganisés et comptent beaucoup plus d’effectifs qu’auparavant. Dans ce contexte, le personnel réclame du
sens et des projets. Pour ce faire, des outils de management sont nécessaires. D’un point de vue relationnel,
le corps préfectoral exige beaucoup et nous devons porter les enjeux de politique publique devant les élus
locaux. D’un point de vue interne, le management est affecté d’un changement de mentalité important :
les nouveaux venus découvrent dans nos services les principes hiérarchiques et le commandement et,
désormais, nous devons les leur inculquer, ce qui n’était pas autant nécessaire il y a une dizaine d’années.

Concernant le management d’établissement public, face à la croissance des enjeux et des coûts, une véritable
planification financière est devenue à chaque fois indispensable. Les travaux portent sur les 5 ou les 10
prochaines années et ce travail est complexe. De plus, aujourd’hui, les anciens corporatismes sont dépassés
et toutes les synergies qui permettent un recentrage des activités sont opérées. Cependant, il est clair que le
lancement de politiques publiques se heurte à de nombreuses incompréhensions chez les élus de proximité
dans un département rural comme l’Allier.

Le dernier élément de mon intervention concerne le commandement opérationnel. Une formation continue
est nécessaire et il me semble que l’école de sécurité civile peut être prestataire de formation dans ce
domaine.

95
Bernard DIZAMBOURG

J’aimerais introduire une interrogation et un degré supérieur de contradiction. Certes, le cadre est responsable
de tâches diverses mais je perçois que la difficulté réside souvent dans le rapport au temps. Non seulement
les politiques publiques évoluent mais les cadres eux-mêmes changent souvent de fonctions. La rotation
rapide devient un rouage essentiel au fonctionnement des systêmes. Comment peut-on préparer les cadres
du service public ces instabilités ?

Patrick JOUBERT

En ce qui concerne les rotations et le rapport au temps, la mobilité fonctionnelle et promotionnelle est
imposée au sein du corps des commissaires de police. Ces derniers ne peuvent rester plus de 4 ans dans
leur poste, ce qui n’était pas le cas auparavant où certains pouvaient rester jusqu’à 15 ans dans leur fonction.
Cette situation était certainement catastrophique, créant de l’aigreur et de la démotivation. Les cadres ont
aujourd’hui des responsabilités de plus en plus lourdes et des métiers toujours plus complexes. L’expérience
vécue dans différents postes d’affectation améliore les performances et la rotation joue de ce point de vue
un rôle positif ; l’école ne peut répondre à toutes les situations rencontrées sur le terrain. La mobilité est une
bonne chose à condition qu’elle ne dédouane par les cadres de leur responsabilité. 5 ans me semblent être
une bonne période.

Jean BARBAZA

J’estime que la mobilité est une question relevant de la décision de chaque corps. Concernant le temps
de travail, les cadres travaillent en France beaucoup plus qu’à l’étranger. Il est nécessaire d’apprendre à
identifier les priorités et à déléguer. Par exemple, au sein de notre école, nous surchargeons volontairement
les élèves pour leur apprendre à sérier leur travail. De plus, au sein des organisations, il est évident que les
collaborateurs attendent davantage de délégation.

Dominique LACAMBRE

Le temps de rotation au sein de la fonction publique est souvent juridiquement déterminé. Tout dépend alors
de la pertinence du choix préalablement effectué ; ceci étant, il existe une alternative, qui consiste à faire
confiance à un consensus sur la mobilité. En pratique, si une réflexion collective est menée, il est toujours
possible de la modifier de la même manière. Par exemple, au ministère de l’équipement, il existe une sorte
de parcours obligé qui ne figure pas dans les dispositions statutaires. Ceci induit une course à la mobilité
interne peu constructive. Il est clair que la règle de constat partagé doit être acceptée par les cadres et les
agents ; si elle ne l’est que par une seule de ces catégories, elle devient un facteur de démotivation. De même,
la formation ne doit pas résulter de règles juridiques ; il vaut mieux qu’elle soit accordée en dialogue avec
les supérieurs. J’estime que la règle juridique est une sorte de juge de paix qui intervient dans ces matières
quand un constat partagé n’est plus possible dans l’administration.

Colonel Luc FERLEY

Le rapport au temps est aussi dépendant de la situation que l’on trouve en prenant ses fonctions. Le cas
de figure est souvent le suivant : les projets en cours doivent être finalisés avant que le nouveau cadre ait

96
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

la possibilité d’imposer sa marque. Et les projets initiés par certains sont menés à terme par d’autres. Il
est donc nécessaire que les projets de service soient formalisés et que les dirigeants d’une administration
partagent une culture commune.

Bernard DIZAMBOURG

Avez-vous le sentiment que l’on va suffisamment loin dans la formation continue dans le domaine du
management ?

Patrick JOUBERT

Il est certain que si la situation n’est pas idéale, un fossé s’est comblé ces dernières années. La police
nationale s’est dotée en 1999 d’un schéma directeur de la formation afin d’intégrer la formation dans la
carrière des policiers. Il a été plus facile de mettre en œuvre ce programme pour les commissaires, qui
sont moins nombreux et plus mobiles. Aujourd’hui, près de 900 fonctionnaires font un passage à l’ENSPo.
En outre, une initiative de retour d’expérience a été entreprise, ciblée sur une promotion particulière. Ce
programme permet d’identifier les difficultés rencontrées 2 ans après la sortie de l’école. On constate que
ces jeunes commissaires ont déjà une culture de la formation. Faire revenir ces jeunes au sein de l’école est
l’occasion pour eux d’exprimer des critiques à l’égard de l’institution. Certains lui reprochent de participer
à une atmosphère trop empreinte d’auto critique mais selon moi, l’expérience est pertinente et doit être
poursuivie.

Bernard DIZAMBOURG

Il semble tout de même que la formation continue ait peu avancé au sein des écoles et fasse l’objet de peu de
commandes de la part des institutions et des ministères. N’y a-t-il pas là un enjeu majeur pour les écoles ?

Dominique LACAMBRE

Il me paraît évident que si les écoles ont développé des réflexions pertinentes, les ministères ne ressentent
pas le besoin de lancer davantage de programmes de formation continue, notamment du fait de la surcharge
de travail. Il faut savoir aussi que la formation continue n’a aucune incidence dans l’avancement des
carrières, ce qui n’est évidemment pas un facteur de développement de ces programmes. Il est cependant
inéluctable que l’attention portée sur la compétence des agents prendra davantage en compte son efficacité
professionnelle que son niveau de diplôme. Cette évolution créera un lien naturel entre fournisseurs et
destinataires de formation. La balle est dans le camp des administrations qui ne tarderont pas à s’emparer
de cette question. De plus, la demande de compétence management est toujours plus pressante à la sortie
des écoles

Jean BARBAZA

J’espère vivement que l’on sorte du syndrome du diplôme pour passer à une époque où la formation initiale
serait plus courte et consisterait en un socle commun aux cadres de toutes les administrations – qui sont
appelés à travailler ensemble pendant leur parcours professionnel – et d’un socle spécifique délivré au sein

97
des ministères respectifs. Il est ensuite indispensable que les écoles soient en mesure de répondre aux
commandes de formation continue. Actuellement, la formation n’est ni promue ni valorisée, sachant que les
budgets formation sont majoritairement affectés aux formations initiales.

Colonel Luc FERLEY

Je vous rejoins sur la nécessité de développer la formation continue qui peut d’ailleurs être délivrée par des
acteurs externes, toujours à la disposition de l’administration.

Bernard DIZAMBOURG

J’entends ici évoquer l’importance du changement générationnel qui se prépare. Savoir qui sont ces jeunes
cadres est un enjeu crucial, ajouté à la perte de substance provoquée par le départ des anciens.

Dominique LACAMBRE

Il est certain que ce changement générationnel perçu souvent cyniquement comme la chance de se
séparer enfin des agents les plus ancrés dans les immobilismes, entraînera des pénuries et des pertes de
compétence. Malheureusement, la prise de conscience ne viendra que lorsque la situation sera critique.
Toutefois, la réforme des retraites n’étant pas encore finalisée, il est possible que les départs ne soient pas
imminents et que des transmissions d’expérience soient encore possibles.

Patrick JOUBERT

Je confirme ce dernier constat. Les fonctionnaires partent en retraite par milliers et ce phénomène représente
d’une certaine manière une chance. Après tant d’années d’immobilisme, les services publics changent et, au
même moment, les anciens qui étaient devenus une force de résistance au changement s’en vont en retraite.
Des problèmes ne manqueront pas de se poser. La gestion administrative de nos fonctionnaires reste le
plus souvent archaïque, du fait notamment du poids du phénomène syndical. L’administration doit donc
prendre des décisions courageuses pour accompagner ce phénomène de renouvellement générationnel en
modifiant les règles de gestion du personnel. Les jeunes commissaires de police doivent faire face à des
situations difficiles dès qu’ils sortent de l’école. Deux ans de formation initiale ne me semblent pas excessifs,
car le phénomène de l’insécurité a augmenté et les réformes ont provoqué la suppression de 600 postes de
commissaires de police ; ces postes étaient considérés comme des postes d’apprentissage. Aujourd’hui, les
postes proposés aux jeunes commissaires sont ceux qui étaient attribués auparavant à des fonctionnaires
ayant accomplis dix ans de carrière. Il est évident que les formations en management sont cruciales
pour résister aux pressions permanentes émanant des préfets, des maires et des syndicats. De plus, le
commissaire doit gérer le service seul : la formation initiale à cet égard ne peut donc voir sa durée réduite.

Pour faire face au changement de génération, une formation spécifique s’est mise en place pour les officiers.
Mais il sera très difficile de gérer la perte de compétence opérationnelle.

98
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Questions/réponses

De la salle
Je souhaite attirer l’attention sur les contradictions réglementaires induites par la LOLF et la solitude à
laquelle le cadre doit faire face. A cet égard, je souhaite qu’il soit possible dans les écoles de disposer de
formations individualisées permettant aux cadres de se connaître davantage et d’identifier leurs forces et
leurs faiblesses. On sent que des tabous subsistent, car cette aide est souvent perçue comme une faiblesse,
une faille dans la fonction d’autorité à exercer.

Colonel Luc FERLEY
Je rejoins cette opinion. À titre personnel, j’ai bénéficié d’un coaching au sein de petits groupes de chefs de
service qui a été très profitable.

Patrick JOUBERT
Je signale qu’une initiative a été lancée au sein de l’école. Cela nécessite des budgets ainsi que des publics
ouverts à la formation, d’autant que ces programmes n’apportent pas des résultats immédiats. Il importe
d’observer que la mise en œuvre de ce type de formation ne peut se faire sans un certain intérêt émanant
des ministères. Cependant, il s’agit certainement d’une mesure de formation amenée à se développer dans
les années à venir.

Dominique LACAMBRE
J’observe que la formation individualisée correspond aux besoins des cadres et aux contraintes de son
emploi du temps. Il est certain que sur ce point, les professionnels ont un grand service à rendre aux
administrations. Toutefois, les administrations centrales sont encore loin d’être en mesure de lancer ce type
de chantier.

De la salle
Les contextes évoluent si rapidement qu’il est nécessaire de laisser les jeunes cadres s’exprimer ;
néanmoins, le risque de perte d’expertise existe bel et bien avec le papy boom. La catastrophe annoncée à
la Sécurité sociale, en terme de perte d’expérience, a cependant été largement minorée par la Loi Fillon et la
progressivité des départs en retraite. J’observe que la transmission d’expériences fait l’objet de nombreuses
études, y compris dans le secteur privé. Je signale qu’un crédit coaching à la disposition des cadres d’un
même service existe dans les administrations publiques allemandes.

Bernard DIZAMBOURG
Je voudrais remercier les participants de la table-ronde d’avoir bien voulu se prêter à la formule et proposer
une conclusion générale de nos travaux.

99
Synthèse générale
et prospectives
Bernard DIZAMBOURG
Inspecteur général d’administration de l’Education nationale
et de la recherche

100
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

Éléments de contexte

Alors que l’on oppose parfois deux mondes, celui des entreprises qui serait en changement permanent et
celui de la sphère publique plus immuable, les agents publics (en particulier les cadres du service public) ont
souvent le sentiment de travailler et d’agir dans un contexte en transformation continue. LOLF et nouveau
pilotage budgétaire, décentralisation, modernisation de l’état, nouvelle gouvernance (par exemple à l’hôpital),
etc., toutes ces évolutions font partie désormais du quotidien du cadre en organisation publique et contribuent
à modifier sa fonction.
Si ces transformations sont souvent vécues difficilement, c’est probablement parce qu’elles exigent de
nouvelles maîtrises techniques (par exemple celles qui conditionnent la mise en œuvre du contrôle de gestion),
qu’elles font apparaître éventuellement de nouveaux cadres d’action (par exemple la territorialisation de
l’action publique qui modifie le rôle des acteurs publics ou non publics) mais surtout parce qu’elles ébranlent
parfois les fondements anciens de l’action publique. Ainsi toutes les interrogations sur la prise en compte
de la satisfaction de l’usager versus l’égalité de traitement du citoyen ou la tension État stratège versus
démembrement de l’État (par la mise en place d’agences par exemple) sont vécues de façon concrète par le
« manager » public (surtout par le management intermédiaire) sur un double plan :
- d’abord sous forme des interrogations voire des inquiétudes de la part des agents publics dont il a la
responsabilité d’animation, face aux modifications des valeurs du service public
- ensuite par confrontation à des situations « réelles » et fréquentes où les contradictions entre les différentes
façon de concevoir l’action veulent dire privilégier ou pas certains usagers, renoncer ou pas à certaines
interventions publiques, orienter préférentiellement son action en fonction de l’équilibre budgétaire ou
passer outre cette contrainte, etc.
On pourrait dire que, dans un contexte de remise en cause des missions et modes de fonctionnement des
services publics souvent assez profonde et plutôt déstabilisatrice pour une part des agents publics, l’aptitude
du cadre à vivre son propre contexte de travail sur un mode qui ne soit pas trop anxiogène est un facteur
d’équilibre de ses équipes et fait désormais partie des nouvelles aptitudes du cadre. Au fond, lorsque les
missions des organisations (voire les organisations elles-mêmes) deviennent instables, la fonction d’éclairage
du leader devient une composante essentielle de son profil d’aptitudes relationnelles. Il faut ajouter à cela
que de plus en plus d’organisations publiques peuvent être confrontées à des situations de crise imprévue,
situations exigeant des cadres à la fois une capacité à sécuriser l’action par une maîtrise de protocoles
prédéfinis et des capacités de maîtrise de soi et d’expression et de communication essentielles face à ce
type de situation.

L’amont de la formation

La définition des objectifs d’une formation en management public est considérée par les équipes pédagogiques
des Écoles de services publics comme plus difficile comparativement à des formations au contenu plus
technique. En formation continue, les Écoles n’ont le plus souvent pas de demande précise de leurs ministères
de tutelle ; en formation initiale, l’attente des ministères employeurs est souvent plus formalisée mais elle
reste cependant assez floue sur ces dimensions. Certes les référentiels métiers définissent les grandes
compétences attendues dans le domaine du management mais il reste un travail important de traduction en
objectifs d’acquisition de savoirs techniques, de connaissances plus fondamentales permettant la lecture de
ses environnements professionnels, de savoir-faire socio affectifs (pour reprendre une de formulations de
l’un des intervenants de la première journée).
Ce travail préalable à la construction des cahiers des charges de la formation nécessite de mobiliser de
multiples sources d’information : réflexions des conseils d’administration des écoles, groupes de travail avec
des employeurs, formalisation de l’information recueillie au moment des stages, association des formés à la
réflexion,etc.
Mais au-delà, les écoles doivent réfléchir à la structuration d’une fonction de veille sur les métiers et la
composante managériale de ceux-ci dans leur secteur professionnel.
101
Le processus de formation

Que veut dire former au management public ? Les échanges ont permis de montrer que pour la plupart des
écoles de service la formation au management correspondait à quatre champs :
la capacité à animer une équipe
l’aptitude à faire émerger un projet collectif, au fond une dimension plus stratégique de « mise en tension »
de l’équipe
la gestion de la performance individuelle et collective
la capacité à porter une action de transformation des modes de fonctionnement et de comportement

Chacune de ses dimensions suppose des acquisitions d’outils et de méthodes, un travail sur des dimensions
comportementales et l’acquisition de savoirs permettant de réfléchir et analyser ses propres actions.
Les différents intervenants et les échanges des ateliers ont bien évidemment souligné que les attentes et
prédispositions à recevoir ce type de formation différencient très fortement les cadres débutants, les cadres
ayant déjà quelques années de conduite d’équipes et les cadres dirigeants.
La situation la plus difficile sur le plan pédagogique est certainement celle correspondant à la formation
des débutants, l’absence de vécu demandant d’imaginer des pédagogies du « détour » s’appuyant sur des
processus simulés de conduite de projet. Cependant, pour tous les publics, y compris ceux dont l’expérience
passée prédispose le mieux à recevoir ce type de formation, enseigner le management suppose pour les
formateurs une capacité à prendre en compte les spécificités des environnements publics et rend peu
opérant tout transfert « brutal » de séquences de formation provenant des organisations privées. Cela
demande pour l’École de service public d’identifier des situations professionnelles types pour construire des
outils pédagogiques diversifiés permettant aux animateurs (par exemple des consultants) de faire un travail
d’adaptation de leurs méthodes et contenus.
Quelle place dans un enseignement de ce type pour des entrées conceptuelles de diverses disciplines
(sociologie des organisations, psychosociologie, etc.) ? Entre des séquences trop théoriques et le refus de
tout éclairage conceptualisé, le point d’équilibre formulé par le directeur de l’ENAP du Québec est apparu
le plus satisfaisant. Selon lui, il est nécessaire de transférer dans des séquences « opératoires » ce qu’il
dénomme des « savoir-faire cognitifs » ou des savoirs contextualisés qui permettront une analyse enrichie
des situations professionnelles. Cela suppose de travailler avec des chercheurs dont les terrains de recherche
recouvrent les environnements professionnels des écoles de service public et aptes par la même à tenir
un discours adapté. Cela peut aussi supposer la présence, parmi les formateurs de l’école, de personnes
capables de faire le pont avec le monde de la recherche et de jouer un rôle de reformulation des savoirs
issus de la recherche. Cela implique que les Écoles se structurent pour assurer une fonction particulière
d’intermédiation ente la recherche et leurs environnements professionnels.

Management public ?

Une interrogation s’est imposée en cours de séminaire, en particulier dans le travail d’atelier : parlons-nous
de formation au management public ou de formation au management en général ? Existe-il une approche
particulière de la formation au management dans les organisations publiques ? Interrogation qui reprenait
celle formulée par Annie Bartoli sur la réalité des spécificités du management public.
Bien évidemment, l’action publique est souvent amenée à être confrontée à une interrogation sur sa pertinence
à l’égard de l’intérêt général ou des valeurs de service public et il est certainement nécessaire de concevoir
des formations qui n’évacuent pas ces dimensions au profit d’approches trop technicistes du management
(il faut noter à ce sujet que les dimensions éthiques sont aussi souvent revendiquées comme essentielles par
les concepteurs de formation pour les manageurs privés). On peut cependant considérer que le management
public se caractérise par une dimension particulière : l’articulation souvent complexe entre l’acteur politique

102
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

et le manageur public, articulation souvent difficile dans les processus de changement organisationnel, les
formes de pilotage actuels sur objectifs qui sont au cœur des politiques de modernisation contribuant à en
révéler toutes les contradictions. Au-delà de l’affirmation de la primauté du politique, on voit bien combien
temps politique et temps administratif, sanction électorale et management sur objectifs sont souvent en
tension. La façon dont le contrat implicite (qui a souvent peu à voir avec la rationalité enseignée en matière
de conduite de projet et d’évaluation de la performance) entre le manageur politique et le manageur public
structure le management public doit être présentée dans les processus de formation.
Cette réflexion sur le caractère spécifique de la formation au management public est d’autant plus indispensable
que celui-ci n’est pas homogène et que l’exercice des fonctions d’encadrement est fortement déterminée par
des contingences propres à chaque organisation de services. Si certaines structures publiques productrices de
prestations et de services relèvent de problématiques souvent proches des organisations privées (maîtrise de
la qualité, segmentation des publics, équilibre économique par exemple), d’autres organisations interviennent
dans le champ des fonctions régaliennes de l’État et mettent en œuvre des processus de management
d’autres natures. Une intervention efficace dans le champ de la formation au management suppose d’être
d’abord capable de conceptualiser les spécificités de chaque environnement professionnel pour en permettre
une réappropriation par des formateurs. On pourrait dire que les Écoles de service public doivent être l’un
des lieux où se réfléchissent et se formalisent les caractères particuliers de chaque management, démarche
non contradictoire bien au contraire avec la recherche de transfert de méthodes et d’outils provenant d’autres
environnements. On peut penser en effet que l’on est d’autant plus apte à enrichir les pratiques de nos
organisations par des apports externes que ce travail réflexif sur nos propres pratiques aura été mené
conjointement.

Au delà quelle projection sur le long terme ?

Il est difficile d’imaginer les organisations publiques à horizon de dix ans comme nous y étions invités par la
formulation de la problématique de la table ronde. On peut cependant penser qu’elles seront de plus en plus
en sollicitées par des situations exigeant des capacités de réactions et d’ajustements rapides facilitées par de
bonnes anticipations collectives.
Le développement de ce profil d’organisation demande de travailler sur plusieurs dimensions :
une dimension technologique : la capacité à doter l’organisation de systèmes d’information permettant
l’anticipation
une dimension organisationnelle au service de la mobilisation de toutes les connaissances acquises par les
différents membres de l’organisation et supposant de privilégier la fluidité des échanges et le travail collectif
plutôt que le respect des structures formelles
une dimension culturelle qui suppose que les compétences dans le domaine de l’organisation collective du
travail soit reconnues, que le droit à l’erreur et la prise d’initiative fassent l’objet, au-delà des discours formels,
de plus de valorisation que l’absence de capacité d’initiative

Les organisations publiques (comme d’autres organisations) doivent pouvoir s’appuyer, dans la recherche de
cet « idéal » organisationnel, sur des cadres dont le « savoir relier » est l’une des premières compétences,
mélange de capacité d’analyse et de pensée critique, de capacité d’écoute et d’une aptitude à entraîner
l’adhésion des équipes. Tout cela n’est pas simplement affaire de formation mais les programmes de
formation des cadres, en particulier en formation continue, doivent intégrer ces objectifs. La diversité des
participants et le travail collectif en cours de formation doivent structurer la construction de ces programmes ;
la dimension transversale du RESP est sans aucun doute un atout devant se traduire par la construction d’une
offre commune de formation, en émergence et à développer.

103
Annexes
ANNEXE 1 : Problématique du séminaire

ANNEXE 2 : Liste des participants

104
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

ANNEXE 1 : Problématique du séminaire

Le management public en formation ?


Séminaire des formateurs du RESP
les 16, 17 et 18 octobre 2006
Saint Etienne (Centre des Congrès)

Le public :

Les responsables de formation, les formateurs et les cadres pédagogiques des écoles.

Effectif attendu :

Environ 60 personnes.

Les enjeux et la problématique :

Régulièrement proposés par le groupe PERF depuis 1998, les séminaires des formateurs offrent aux
professionnels de la formation des écoles du RESP, une opportunité de confrontation et de partage des savoirs
et des compétences sur des thèmes relevant du champ pédagogique et plus largement de la formation.
Ouvert également à la connaissance du cadre en situation de travail, le groupe PERF s’est attaché à clarifier et
enrichir les concepts et les pratiques en jeu dans les différentes écoles du réseau.
Cinq séminaires ont ainsi été organisés sur les thèmes suivants :
La professionnalisation (ESPEMEN Poitiers)
Les pédagogies adaptées à la professionnalisation (ENACT Montpellier)
La professionnalisation : individualiser/personnaliser les projets (INTEFP Marcy)
L’expérience est-elle formatrice ? (IRA Bastia)
La compétence est-elle mesurable ? (CNFE PJJ Vaucresson)

Ces 5 thèmes entrent plus ou moins en résonance avec la question de la manière dont la pratique managériale
peut être enseignée, transmissible, suscitée… par les professionnels de la formation ou appropriée par les
cadres en formation.

A l’heure où le service public français et ses formes de management sont de plus en plus directement
confrontés à des modèles sociaux, économiques, organisationnels… différents et où les écoles de formation
de ses cadres sont soumises à une régulière mise en question de leurs prérogatives et conditions d’exercice,
il semble opportun pour le RESP d’enrichir le débat sur la formation au management en mettant en
questionnement ses propres concepts et ses pratiques de formation en la matière.

105
Le management public en devenir : à la recherche des sens…

A l’instar de la question de la compétence, la notion de management est aujourd’hui largement discutée,


devenue un vaste champ d’étude et objet, selon les auteurs et les disciplines, d’analyses, de conseils pratiques,
de vade-mecum plus ou moins pertinents, développés selon de multiples perspectives : organisationnelle,
sociologique, économique…. Tous ne sont pas a priori transposables au service public, pas plus qu’aux
écoles destinées à former ses personnels d’encadrement…
Or, cette notion n’est d’évidence plus étrangère au secteur public et partant, ne peut plus le rester aux écoles
de formation du RESP. Elle doit par conséquent pouvoir utilement être soumise à la réflexion de ceux qui ont
en charge de former les gestionnaires des services publics.

… vers une identification et une identité du management public


Cette abondance de productions intellectuelles concerne, à ce jour encore, plus fortement le secteur privé que
le secteur public. Le management public se révèle pourtant un modèle d’action en mouvement constant.
Cela signifie-t-il qu’un management public n’est pas identifiable ? ou non encore formalisé ?
Est-il pertinent aujourd’hui de circonscrire le management dans deux champs opposés que seraient les
espaces privé et public, dans un esprit polémique ou concurrentiel ?
En quoi les principes du service public engagent-ils et supposent-ils un management spécifique ?
Comment se définit-il précisément ?
Quelle posture spécifique, quelles compétences spécifiques exige-t-il  de part de ses managers (par
ex. soumettre toute décision au regard de l’intérêt général ? assujettir toute démarche au respect de la
déontologie ?
Quels sont les modèles conceptuels et pragmatiques dominants du management susceptibles de fonder une
fonction managériale publique ?

….le niveau où l’on situe l’analyse


Une fois clarifié ce premier palier de la réflexion sur le management public et de sa spécificité si souvent
rappelée et, de toute évidence encore, difficilement énonçable, se pose la question des niveaux d’organisation
désignés par la notion de management
S’agit-il de la conduite
des hommes : dimension relationnelle (et là encore, à quel niveau de l’organisation considérée ?),
d’une organisation : dimension organisationnelle,
de l’action publique : dimension stratégique ? .
Il paraît utile de s’interroger sur le management dans chacune de ces dimensions et dans leur inter-action,
reconnaissant de fait que l’activité managériale s’inscrit dans des systèmes complexes.

....l’environnement du management public


Qu’est-ce qui aujourd’hui impacte le management public ?
Quels sont les paramètres susceptibles d’exercer une influence sur le management public ?
Quelle influence peuvent avoir les évolutions du service public et de ses conditions d’accomplissement
(notamment les évolutions induites par la réforme budgétaire et sa logique d’affectation des ressources
valorisant la logique de projet , une limitation des ressources tant financières qu’humaines…), l’intégration
européenne, la perméabilité des fonctions publiques dans les instances européennes et internationales, les
pratiques de l’entreprise, la logique qualitative (label de qualité, certification)…

106
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

La démarche du séminaire
4 ateliers en 3 séquences de travail

Thème 1 - De l’émergence du besoin à la décision de réaliser une formation au management public ou
comment se conçoit la décision de former au management public 
Animation : Jean-René BRUNETIERE

Thème 2 - La mise en œuvre de la formation 


Animation : Thierry GOBERT

Thème 3 - Les contenus de la formation au management public


Animation : Franco SECCHI

Thème 4 - L’évaluation des effets de la formation au management public 


Animation : Nathalie COUVERT

Animateur général du séminaire : Bernard DIZAMBOURG


Inspecteur général d’administration de l’éducation nationale et de la recherche

Les trois temps d’ateliers progresseront selon des niveaux d’analyse progressifs.
L’animation de chaque atelier sera structurée autour de la présentation par deux écoles de leur pratique en
matière de formation.
Chaque temps d’atelier sera ponctué par une assemblée plénière qui permettra de mutualiser les questions
et les réflexions de chaque atelier. Chacun de ces moments fera l’objet d’un point de clarification, d’une note
d’étonnement, d’un retour réflexif par un chercheur « fil rouge ».
Chaque participant s’inscrira à un atelier qui se déroulera en trois phases les 17 et 18 octobre.

Thème 1
De l’émergence du besoin à la réalisation d’une formation au management public ou
comment se conçoit la formation au management public 

Réflexion sur le processus d’identification des besoins en vue d’une formation en management public :
Quels sont les éléments déclencheurs de cette commande ?
Comment sont recensés les besoins de formation ? Comment est formulée cette commande et par qui ?
Quelles sont les conséquences pour les écoles d’une procédure plus ou moins aboutie ?
Quel rôle pour les écoles dans cette phase située en amont du processus de conception de la formation ?
Les cas de la formation initiale et de la formation continue seront abordés.

107
Thème 2
La mise en œuvre de la formation 

Réflexion sur
la pertinence des choix pédagogiques,
les modalités de la mise en œuvre de la formation (animation, méthodes, intérêts du présentiel
et/ou à distance, etc.),
les volumes horaires et le positionnement dans le parcours de formation.
les méthodes pédagogiques pertinentes pour ce type de formation ? (cas pratiques, simulations,
apports théoriques, réflexion critique, retour d’expérience, stage…).

Cet atelier pourra par ailleurs aborder la question de l’articulation entre la formation initiale et la formation
continue.

Thème 3
Les contenus de la formation au management public

Quels sont les référents pertinents dans le domaine de la formation au management public ?
Quelle est la part entre les contenus «transversaux» (applicables à toutes les situations et pouvant être
mutualisés) et les contenus «spécifiques» (liés à un métier, à des missions, à une culture) ?
Quel doit être la part quantitative de cette formation par rapport aux contenus «techniques» et quelle doit être
son articulation avec eux ?
Qui est légitime pour les valider ?

Thème 4
L’évaluation des effets de la formation au management public 

Réflexion sur la pertinence, le sens, les modalités de mise en œuvre d’une évaluation des effets de la formation
au management public.

108
Séminaire - EN3S - Octobre 2006

109
ANNEXE 2 : Liste des participants

Atelier 1
ENSSIB Anne Delmas
EN3S Martine Faure
ENG Béatrice Gayet
ESEN Eric Larcher
EOGN Richard Pégourie
ENSPo Didier Rosselin
ENSP Michel Louazel
Joseph Moisan
ENAP Dominique Schaefer pour la 1ère séquence.
ENTPE Marie Noëlle PAILLOUX
INET Maxence CHORVOT
Jacqueline MAGNIER

Atelier 2
ESEN Dominique PIZZINI
Alain BOUVIER
ENAP Christine CEPEDE
ENSPo Axel FAVIN
IRA Nantes Monique BARBIER
IRA de Bastia Christine CASTANY
ENG Laurent DUCHEMIN
ENTPE Catherine POIRIEUX
EN3S Céline DUBOIS-CUSIN
ENSP Marc NAGELS
ENAP Florence LOUIS
ENG Philippe GIGNOUD
INET Sandrine BONVILLAIN
ENACT Jean-Paul RIFFLE

Atelier 3
IRA de Lyon Jacqueline BENEVISE
ENSP Christian CHAUVIGNE
INTEFP Sophie CHERMAT
INTEFP Jean Daniel CRISTOFORETTI
ESEN Bernard DURIX
IRA de Bastia Henri FLACH
END Sylvie GYSBRECHT
INTEFP Catherine HUBERT
ENAP Jacques OLLION
ENSSIB Marie France PEYRELONG
ENTPE Christel RIMBAUD
ENSPo Antoine ROSSION
François MOLIN
ENSOSP Christian JEANDEMANGE

Atelier 4
EN3S Pierre RAMON BALDIE
IRA de Bastia Jean BARBAZA
ESEN Pierre CAMMARATA
CNFE-PJJ Maxence CHAPOUTIER
ESEN Yves GIOVANNINI
ENA Maïlys KNAUB
Fonds de solidarité Dominique LACAMBRE
ENSPo Benoît LEMAN (ENSPo)
ENAP Nathalie NOEL
ENSOSP Jean Yves NOISETTE
ESEN Isabelle MARCHI BARBAUX
ENAP Québec Marcel PROULX
ENAP Dominique SCHAEFER

110
Crédit photo : EyeWire
D e s informations su r le R E SP w w w.r esp - f r. o rg

S-ar putea să vă placă și