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1. HISTORIQUE
Le Grand viaduc de Millau a été imaginé et conçu dans le courant des années 1990 par
Michel Virlogeux et un groupement de bureaux d'études français en collaboration avec
l'architecte anglais Sir Norman Foster. A l'origine, il s'agissait d'un ouvrage multi-haubané
dont les piles, le tablier et les pylônes étaient entièrement réalisés en béton. Une variante à
tablier métallique avait bien fait l'objet d'une étude parallèle mais nul ne la croyait
concurrentielle.
Les capacités, reconnues outre-Quiévrain, du bureau d'études Greisch dans le domaine
des ponts à haubans et des ouvrages métalliques ont à plusieurs reprises interpellé l'OTUA,
Office Technique français de promotion pour l'Utilisation de l'Acier. En effet, ces dernières
années, le bureau liégeois a souvent collaboré avec des entreprises belges et françaises
pour la construction d'ouvrages d'art prestigieux sur la ligne ferroviaire à grande vitesse
Lyon-Marseille-Montpellier, sur la Loire à Orléans ou plus modestement sur la Meuse à
Chooz.
Aussi, dès 1999 dans le cadre du viaduc de Millau, le même office, s'est chargé de consulter
le bureau greisch pour étudier de manière plus approfondie la faisabilité d'un tablier en acier
et de développer une méthode de construction qui rendrait cette solution concurrentielle. Un
comité d'accompagnement auquel prenaient part les 4 plus grands constructeurs métalliques
français était "chargé" de vérifier l'adéquation des études réalisées aux moyens à mettre en
œuvre. Face à l'audace de la proposition, seule une des entreprises, Eiffel Construction
Métallique était prête à relever le défi et prit l'engagement de s'associer le bureau greisch
pour préparer l'offre le moment venu.
2. PRÉSENTATION GÉNÉRALE
En France, l'autoroute A75, qui relie Clermont-
Ferrand à Béziers, constitue un des plus beaux
tronçons d'une des deux liaisons rapides entre
Paris et la Méditerranée. (Fig. 1)
Le viaduc de Millau, ouvrage d'art le plus
important et le plus prestigieux de cette autoroute,
lui permettra de franchir la vallée du Tarn,
5 kilomètres à l'ouest de la ville de Millau.
L'ouvrage fait l'objet d'une concession de
financement, conception, construction et
exploitation confiée par l'Etat français à la
Compagnie Eiffage du viaduc de Millau pour une
durée de 78 années.
Sa construction est actuellement en cours et se
déroulera dans un délai record de 39 mois !
Fig. 1 – Situation de l'autoroute A75
3. DESCRIPTION DE L'OUVRAGE
La hauteur des piles en béton varie de 78 mètres pour la pile P7 à 245 mètres pour la pile
P2, lui conférant le titre de pile la plus haute du monde.
Large de 32 mètres, le tablier est entièrement métallique. Il est suspendu au moyen de 154
haubans à 7 pylônes en acier, d'une hauteur de 87 mètres chacun.
Actuellement ouvrage phare français, il joue la vedette dans différents colloques
internationaux spécialisés.
Les pylônes présentent une forme de V inversé. Leur hauteur totale est de 87 mètres, bien
que leur hauteur strictement nécessaire structurellement soit de 70 mètres (point
d'accrochage du hauban le plus haut).
Pour réduire les délais de construction de l'ouvrage, les pylônes sont réalisés en acier ce qui
leur permet d'être préfabriqués et montés d'une pièce sur le tablier très rapidement.
C'est cette deuxième méthode qui est mise en œuvre sur le viaduc de Millau et qui justifie la
dimension longitudinale accrue des pylônes (15,50 m) et la forme en V inversé.
Les piles ont des hauteurs variables en fonction de la topographie du site et du profil en long
de l’ouvrage, de 77,60 à 244.80 mètres.
Leurs fûts sont dimensionnés pour résister :
§ aux charges verticales apportées par le tablier,
§ aux déplacements de leur tête sous les effets de dilatation du tablier d'origine thermique,
§ aux effets transversaux et longitudinaux du vent,
en exploitation comme en construction.
Les piles, monolithiques en base, présentent un dédoublement des fûts 90 m sous le niveau
du tablier. Loin d'être une fantaisie architecturale, cette particularité trouve son origine dans
le fonctionnement statique de l'ouvrage.
Comme nous l'avons expliqué plus haut, les pylônes sont encastrés sur les piles afin
d'assurer une rigidité suffisante à l'ouvrage. Les tractions aux appuis nous ont conduits à
clouer le tablier sur les piles, n'autorisant aucun déplacement relatif entre la tête des piles et
le tablier. Ce dernier, continu sur toute sa longueur, ne dispose de joints de dilatation qu'en
ses deux extrémités.
Les dilatations du tablier, d'origine thermique, imposent des déplacements de plus de 40 cm
en tête de piles et par conséquent des efforts proportionnels à leur rigidité intrinsèque.
Le dédoublement du fût a permis de diminuer cette rigidité, tout en maintenant l'efficacité de
l'encastrement du pylône.
3.6.3 Fondations
Les fondations de toutes les piles sont constituées de quatre puits de grand diamètre (4.5 m
et 5.0 m), de 10 à 14 m de longueur, creusés dans les horizons rocheux et d'une semelle de
répartition de 3 à 5 mètres d'épaisseur.
4. LA CONSTRUCTION DE L'OUVRAGE
Le caisson central d'une part et les éléments latéraux d'autre part sont assemblés dans 2
usines de construction métallique et transportés sur le site d'assemblage par des convois
routiers exceptionnels. La longueur des éléments ne dépasse généralement pas 25 mètres,
tandis que leur poids peut atteindre 90 tonnes.
Deux ateliers forains d'assemblage sont installés sur les plates-formes situées en arrière de
chacune des culées, avec tout le matériel nécessaire (grues, portiques de manutention,
bancs de soudage, cabine de peinture).
Chacun des ateliers comporte trois zones de travail de 171 m (Fig.17) avec pour chacune
ses activités spécifiques :
§ une première zone, la plus éloignée de la culée, sert au raboutage des caissons centraux
§ une deuxième zone où est réalisé l'assemblage des autres éléments du tablier et leur
raboutage au caisson central
Il s'est rapidement avéré que le dimensionnement du tablier serait conditionné par les
opérations de lançage. Une travée de 171 m, à
franchir avec un caisson de 4,20 mètres correspond
à un élancement (rapport travée/hauteur) de 41,
valeur très élevée qui, usuellement, est comprise
entre 25 et 30.
Par ailleurs, les efforts très importants à transmettre
au niveau des appuis de lançage nous ont incité à
dédoubler ces appuis pour éviter à l'âme du caisson
d'être trop sollicitée. En écartant de manière
optimale les appuis ainsi dédoublés, il a été
possible de réduire sensiblement les effets de
flexion du tablier.
Fig. 21 – Chevêtre en tête de pile
Le grand viaduc de Millau Page 11
4.2.4 Le pylône et les haubans de lançage
Au moyen d'un dispositif mis au point par Eiffel, tous les translateurs sont pilotés par une
unité centrale qui assure la commande et le contrôle de toutes les opérations. Chaque cycle
dure environ 4 minutes et l’avancement moyen est de 7 à 10 mètres par heure. Pendant le
mouvement il est de 25 à 30 m/heure ou 7 à 8 mm à la seconde.
4.2.6 Le lançage
Après 5 semaines d'assemblage, l'opération de lançage peut avoir lieu.
Une analyse scrupuleuse des prévisions météorologiques pour les 3 journées à venir permet
de donner l'ordre de lancer. En effet, cette manœuvre délicate doit s'opérer sous des vents
inférieurs à 85 km/h au niveau du tablier.
Après avoir été dégagé de ses équipements de mise en sécurité, le tablier est lancé sur
171 mètres. Une passerelle de 50 mètres de longueur (en rouge à l'extrémité du tablier sur
les photos) permet d'accéder à l'appui suivant avant la fin du lançage afin de procéder à la
mise en route des équipements de translation sur l'appui à accoster.
A l'issue du lançage, le pylône aura atteint un nouvel appui et le porte-à-faux l'appui suivant.
L'ouvrage sera à nouveau mis en sécurité.
5. ETUDES ET ESSAIS
Le calcul du tablier pendant le lançage est conduit au moyen d'un modèle évolutif sur FinelG,
simulant l'avancement du tablier par pas de 4 à 5 mètres.
Le modèle prend en compte les décollements d'appuis éventuels et les accostages. Il permet
de simuler des mouvements d'appuis imposés ou des réglages d'efforts dans les haubans.
Enfin, il utilise le comportement non linéaire des câbles pour simuler les tensions et
détensions des haubans en fonction de l'avancement.
La confrontation des résultats du calcul au comportement réel de l'ouvrage a été jusqu'ici
excellente.
Les effets du vent sur l’ouvrage sont étudiés dans un grand nombre de configurations
(exploitation, construction, lançage).
On sait que la plus grande partie d'énergie amenée par le vent et susceptible de faire "vibrer"
le viaduc se situe dans un domaine de fréquence compris entre 0,1 Hz et 1,0 Hz.
D'autre part, il s'avère ses premières fréquences propres de vibration sont les suivantes :
§ En flexion transversale : 0,175 Hz
§ En flexion longitudinale : 0,200 Hz
§ Le quarantième mode a une fréquence de 0,94 Hz.