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« Du bon usage de la torture ou comment les démocraties justifient l’injustifiable »

De Michel Terestchenko

« la torture constitue une sorte de suicide politique de l’Etat qui la pratique, conduisant
inévitablement le pouvoir, voire le régime tout entier , à la ruine »

Michel Terestchenko, philosophe, maître de conférence à l’université de Reims, est l’auteur


de plusieurs ouvrage de philosophie morale et politique dont « un si fragile vernis d’humanité.
Banalité du mal, banalité du bien » salué comme l’un des essais les plus importants de l’année
2005, s’intéresse à la conduite effective des individus.Ce qui l’intéresse c’est de comprendre
pourquoi à un moment donné , dans des circonstances données (fussent-elles exceptionnelles)
tel individu va observer tel comportement.
Or il a constaté qu’en dépit de la prohibition légale de la torture , aussi bien par des textes
internationaux que par les textes internes de toutes les démocraties , certains Etats
démocratiques mettent en place de véritables systèmes juridiques qualifiés
d’ « exceptionnels » leur permettant d’y avoir recours, instaurant ainsi une torture d’Etat.
Pire, une véritable légitimation de la torture par d’éminents juristes et philosophes américains
ainsi que par les plus hauts fonctionnaires du gouvernement américain (à cet égard voir les
déclarations du vice-président Dick CHENEY il y a quelques jours), au premier rang desquels
le président des EU , Georges W. Bush lui-même s’est faite jour au lendemain des
évènements traumatiques du 11 septembre 2001. Cela a donné lieu outre-Atlantique à un
véritable débat, relativement ignoré en Europe, sur la nécessité de recourir ou non à la torture
en situation d’exception. Reprenant les termes de ce débat , il s’interroge sur ce qui réellement
pose problème : peut-on justifier l’usage de la torture par l’urgence d’une situation
exceptionnelle ?
Toute sa thèse consiste en la démonstration implacable que « la torture est politiquement
ruineuse , juridiquement condamnable et moralement inadmissible ».
Ainsi l’auteur commence sa démonstration en replaçant dans son contexte historique la
politique de torture mise en place par les Etats-Unis dès les années 50 afin de partir de
données concrètes et de préciser le contexte dans lequel ce débat intervient.
Il commence par exposer les principales techniques de nature psychologiques développées
dans le cadre d’un grand programme secret qui a mobilisé des chercheurs, des médecins et
des universitaires parmi les plus prestigieux pour le compte de la CIA (il souligne le rôle
particulièrement important joué par les chercheurs en psychologie) et mises en place par la
CIA et les services de renseignements américains dès les années 50 .
Il décrit alors deux techniques principales destructrices de la personnalité, de contrôle de
l’esprit : la « désorientation sensorielle » et la « souffrance auto-infligée » . Comme le
souligne Michel Terestchenko , ces dernières présentent l’avantage non négligeable de ne
laisser aucunes traces visibles.
Donc dès cette époque une décision politique a légitimé l’usage de la torture et d’actes qui lui
sont assimilés dont la mise en application « sur le terrain » a été confié aux services de
renseignements américains. Ainsi, l’auteur nous explique comment les services de
renseignements américains ont développé un véritable « savoir faire de la torture »
notamment durant la guerre froide , et en partie grâce à l’aide d’anciens militaires français de
la guerre d’Algérie .
On comprend alors que les EU étaient déjà engagés dans une politique criminelle d’Etat, qui
se confirma au lendemain des attentats de septembre 2001, lorsqu’apparut un nouvel ennemi
faisant peser de nouvelles menaces. Ce seront alors ces techniques de destruction de la
personnalité (entre autres) qui vont être réutilisées en Afghanistan , à Guantanamo et en Irak
notamment mais pas seulement puisque c’est tout un « archipel américain de la torture » qui
va être organisé comme nous l’explique l’auteur , par le recours à des transferts
extrajudiciaires secrets et totalement illégaux dans d’autres Etats tels le Pakistan ,l’Egypte , le
Maroc , la Jordanie…. Et contrairement à ce que l’on pourrait penser , l’auteur nous explique
que le premier problème que pose cette question de la pratique effective aujourd’hui de la
torture ou des « techniques d’interrogatoire coercitives » comme se plaise à l’appeler avec
euphémisme ces praticiens et défenseurs , est avant tout celui de la transgression de l’interdit
juridique pourtant clairement énoncé , affirmé ,accepté par toutes les démocraties , au
fondement même de leurs principes les plus essentiels et non celui de l’interdit définitif et
absolu à priori édicté par la morale.
Or cet interdit n’a pas représenter une barrière infranchissable pour les éminents juristes au
service du gouvernement américains qui l’ont contourné par un travail de réinterprétation
minutieux des textes internationaux et même nationaux pour ainsi faire échec à toutes les
règles protectrices édictées dans l’intérêt des prisonniers de guerre et dans le même temps
prémunir les « interrogateurs » de futures poursuites judiciaires.
Ainsi le droit tient une place centrale dans cet essai (point sur lequel nous reviendrons
ultérieurement) nourri par une importante réflexion sur sa place et son rôle puisque c’est ce
travail des juristes qui est à l’origine de cette légitimation de la torture d’état , pas supérieur
franchit dans le degré de violation des droits de l’homme.
Le philosophe entre ensuite dans les termes du débat à proprement parlé et aborde alors
l’aspect moral de cette question de l’usage de la torture en situation d’exception dans une
démocratie en présentant les arguments et justifications des philosophes et intellectuels
américains qui se sont fait les défenseurs modérés de la torture.

C’est là que la démonstration de l’auteur prend toute sa force , il adopte les arguments
pragmatiques des défenseurs de la torture pour mieux montrer leur invraisemblance et
l’irréalisme qui les sous-tend. Michel Terestchenko base son étude sur deux justifications qui
s’appuient toutes deux sur la notion de situation d’exception et en particulier sur le paradigme
de la « bombe à retardement ». Cette « idéologie libérale de la torture » jusque là inédite
considère donc la torture comme un « mal nécessaire » et un « choix désespéré » mais justifié
par les circonstances exceptionnelles.. L’une, «réaliste», défendu par le philosophe Michael
Walzer et repris en 2007 par Slavoj Zizek, voit la torture comme un mal sans doute
«inévitable». Ce qui ne veut pas dire que l’on doit lever sa condamnation et absoudre le
« bourreau », mais admettre qu’elle peut répondre exceptionnellement à un état de nécessité.
La charge revient aux tortionnaires de justifier leurs actes, et d’en subir les conséquences.
L’acte du tortionnaire noble qui se sacrifie conserve ainsi toute sa criminalité et sa malignité
L’autre posture, «utilitariste», considère une reconnaissance plus franche du fait que torturer
peut amener à sauver des vies, donc à un «bien». Selon le professeur de droit et ardent
défenseur des libertés civiques Alan Dershowitz, si ce bien existe, il doit être strictement
encadré par la justice, qui dira dans quels cas on peut ou non torturer, et comment, en
délivrant des « mandats de torture » . Ce qui suppose qu’on légalise les pratiques. Ces
positions sont-elles recevables? Non, affirme Michel Terestchenko, car l’hypothèse de la
bombe à retardement est une fable sur mesure qui n’a jamais trouvé de cas concret
d’application. En réalité, la violence ne produit de renseignements qu’appliquée
systématiquement et aveuglément.

Or, la torture de masse a un prix politique: elle institue le crime à l’intérieur de l’État,
corrompt les rapports sociaux et suscite la haine, entraînant une dérive sécuritaire et la
gangrène de toute la société. Le bilan de cet examen est assez facile à tirer: la torture n’a de
sens qu’appliquée massivement ; elle est très marginalement productive ;elle criminalise les
États qui s’y livrent. Comment soutenir, dans ces conditions, qu’elle est utile? En fait, ajoute
Michel Terestchenko, son efficacité existe, mais n’est pas celle de la fable: la torture sert
moins à obtenir des aveux qu’à terroriser l’ennemi, éventuellement la population dans son
ensemble. Son usage « chirurgical», tel que l’envisagent les penseurs utilitaristes, est «un
leurre», et comme l’ont montré les tragiques exemples du passé elle conduit toujours à
l’instauration d’un système institutionnel au service d’une torture d’Etat et de masse , avec
cses procédures , ses institutions , ses professionnels formés pour être rendu apte à l’usage
d’une telle pratique qui comme le souligne Michel Teretschenko ,sur la base de résultats
scientifiques , n’est pas sans incidence loin de là sur le « bourreau » , en particulier sur sa
propre dignité.

Il invite donc à s’en tenir à une ferme position de principe, et à exclure toute doctrine de
légitimation de la torture, psychologique comme physique. Il ajoute que la torture est une
subversion de l’idée d’État démocratique: on ne peut torturer sans déshumaniser ses victimes
et nier la fonction protectrice de l’État. « Aucune pratique d’État ne produit d’effet aussi
puissamment destructeur de nos principes et de nos institutions que la torture.»

Nous ne reviendrons pas sur la partie plus descriptive de cet ouvrage bien que fort instructive ,
qui vise à replacer dans un contexte historique, politique et juridique le débat qui a
actuellement court aux Etats-Unis excepté sur un point.
Nous avons en effet déjà souligner l’importance du rôle du droit dans cet ouvrage , central à
maints égards.
La dimension juridique de la question de l’usage par une démocratie libérale d’une véritable
torture d’Etat est particulièrement intéressante puisqu’elle est à l’origine même du fait que
l’on puisse simplement se poser la question de l’usage (de surcroît légitimé) de la torture dans
un Etat de droit. En effet, l’émergence de ce débat a été permise par le travail des juristes au
service du gouvernement américain. Comment peut on accepter qu’un Etat démocratique
puisse contourner les textes internationaux et nationaux( notamment la convention de Genève
de 1949 sur les prisonniers de guerre , la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme des
Nations unies de 1948 , la convention contre la torture et autres traitement inhumains et
dégradants des Nations unies adopté en 1984 , ratifiée en 1994 avec des réserves plus
qu’importantes par les Etats-Unis) auxquels il est soumis par une simple réinterprétation
minutieuse et restrictive de ces mêmes textes ayant pour résultat d’en contourner
complètement les interdits ? Cela ne démontre-t-il pas une emprise d’une politique sur le
législatif ?
De fait ,il s’agit ici d’une véritable dérive législative puisque le Congrès américain a ratifié
des lois autorisant (sans le dire) le recours aux techniques de tortures psychologique, dont des
chercheurs britanniques du King’s college de Londres ont prouvé que la douleur et la détresse
qu’elles faisaient ressentir au détenu « interrogé » avaient la même intensité que celles
causées par la torture de nature physique. Pire encore, le Congrès américain a voté en 2006
une véritable « loi de la torture ».
Un rempart apparaît heureusement qui se dresse comme l’ultime défenseur des principes
fondamentaux du droit, ce sont les juges constitutionnels des régimes démocratiques. C’est ce
que montre l’arrêt rendu par la cour suprême des Etats-Unis en juin 2008 qui a estimé illégal
le régime spécial appliqué aux « combattants illégaux » pour les soustraire aux bénéfices de
toutes les dispositions protectrices concernant les prisonniers de guerre ainsi qu’au droit
commun américain et aux garanties constitutionnelles et donc permis de mettre un terme aux
graves violations constitutionnelles permises par cette loi. On peut aussi citer à cet égard
l’arrêt rendu par la Haute Cour de justice israélienne en 1999 qui montre comment un Etat de
droit « doit affronter le défi terroriste et trouver la juste mesure entre la nécessaire défense de
sa sécurité et le respect des principes inhérents à la démocratie » . Elle a ainsi interdit en les
jugeant illégales plusieurs méthodes d’interrogatoire coercitives utilisées par les services de
sécurité israéliens qu’elle était vivement pressée de valider par le gouvernement. On voit ici
l’équilibre finalement fragile des démocraties libérales où le législateur peut être parfois
sensible à la pression exercée par le pouvoir exécutif .Le juge constitutionnel, plus
indépendant, semble être moins vulnérable. Mais alors ces évènements poussent à
s’interroger sur l’effectivité de la notion d’Etat de droit.
Un Etat de droit , est selon la définition qu’en donne le vocabulaire de Gérard Cornu, la
situation résultant, pour une société, de sa soumission à un ordre juridique, c’est-à-dire
l’ensemble des règles de droit qui gouverne un Etat( excluant l’anarchie et la justice privée) .
Or aussi bien dans le cas des Etats-Unis que dans la logique utilitariste qui justifie un usage
modéré de la torture, c’est la loi qui se soumet à la pratique de l’Etat et non , comme le veut le
respect des principes d’un Etat de droit, l’Etat qui respecte la loi. Dans ces hypothèses , c’est
parce que le législateur n’est réduit qu’à un simple rôle d’encadrement d’une pratique
préexistante illégale qu’il vient légitimer à postériori. Un Etat qui légalise et légitime la
pratique de la torture se nie purement et simplement en tant qu’Etat de droit.
C’est là que la thèse de l’auteur prend tout son sens et que l’on comprend mieux ce qu’il veut
dire quand il énonce que la « torture un prix politique très élevé » qui dégénère
nécessairement en une politique de masse « se développant comme une véritable gangrène qui
corrompt la société toute entière ».
Et en effet , ce n’est pas le rôle du droit que « d’ouvrir la porte à sa propre
transgression ».C’est pour cela qu’il convient d’adopter une position normative ferme du type
de celle de Kant (qui est celle de l’ONU , d’Amnesty international…) qu’approuve l’auteur, et
d’adopter à priori un impératif catégorique, une logique déontologique dans laquelle la
prohibition de la torture est inconditionnelle.
Mais l’intelligence de Michel Terestchenko est de ne pas avoir enfermé ses arguments et sa
démonstration dans une justification purement moraliste. Il n’énonce pas une vérité absolue
( et c’est là la conduite à suivre pour tout juriste) , mais éprouve sa thèse en vérifiant le
caractère réaliste ou pas des justifications qui s’y oppose. Cela pose la question du rapport de
la morale et du droit , sur laquelle se penche d’ailleurs l’auteur. Et l’on comprend que la
morale est ici plus fragile que le droit , ce parce qu’elle relève du choix individuel de chacun.
Le droit , c’est l’ordre du juste et de l’injuste , il se distingue en ce sens de la morale qui a
plus à voir avec ce qui est de l’ordre du vrai et du faux, et c’est cette distinction que subvertie
l’idéologie libérale de la torture. On peut adopter une position morale ou une autre mais on ne
pourra jamais trancher de façon rationnelle et définitive c'est-à-dire affirmer laquelle est vraie
absolument. L’on peut aussi bien penser que la morale est une fidélité à des principes
inconditionnels indépendamment des circonstances ou au contraire qu’elle doit tenir compte
de la réalité effective et mesurer les conséquences concrètes.
Entre les deux , et se confondant parfois avec l’un ou l’autre on trouve l’éthique. C’est le
dilemme de Max Weber qu’évoque Michel Terestchenko entre l’éthique de conviction et
l’éthique de la responsabilité (le dilemme de tout dirigeant d’un Etat démocratique). Il
explique fort bien le problème que pose la rencontre des deux. Ainsi il énonce qu’ « il est des
règles fondamentales dans notre droit occidental, constituant des garde-fous qui ne sauraient
être franchis, quelles que soient les circonstances. Et leur vocation est tout à la fois de
structurer le droit et de définir des limites à l’action politique. Le problème, cependant , c’est
qu’il existe une marge, un espace d’indétermination entre l’action politique juste et l’action
politique qui convient, certaines circonstances exceptionnelles pouvant induire une sorte de
jeu qui empêche d’ajuster strictement morale et nécessité. C’est dans cet espace que s’est
introduite l’épineuse justification libérale de la torture ».
Cet ouvrage se trouve au carrefour entre le droit , l’éthique et la morale. C’est ce qui fait toute
sa richesse et qui permet d’emporter l’adhésion du lecteur, ce qui n’aurait sans doute pas été
le cas s’il n’avait abordée cette épineuse question que sur un plan moral.
En effet, l’auteur adopte les arguments pragmatiques des défenseurs modérés de la torture ,
les étudie et (c’est là la puissance de sa démonstration) , toute la justification perverse et
irréaliste qu’ils soutenaient s’écroule d’elle-même. Cette fable perverse ne vise qu’à la
manipulation de l’opinion pour emporter l’adhésion à un scénario invraisemblable et
dangereux en ce qu’il apparaît sans le recul nécessaire comme réaliste, et qu’il fait appel aux
réactions instinctives , émotionnelles , suscitées par la peur d’une menace qui peut se réaliser
n’importe quand sous les traits de n’importe qui puisque l’ennemi est « invisible ».
C’est exactement à cette dérive sécuritaire qu’encourage les scénarios de la série 24H dont le
héros « sacrificiel » représente le noble tortionnaire voulu par l’idéologie libérale de la torture.
Cette idéologie, qui est celle des défenseurs modérés ou pragmatiques de la torture , est basée
sur la justification par le principe de l’état de nécessité. L’adage « nécessité fait loi »
appartient au savoir juridique et il est commun à toutes ses branches, privées ou publiques : ce
que la nécessité commande est conforme au droit, en dépit des obligations et interdictions du
droit positif ordinaire. Cela signifie , en droit pénal, que la nécessité justifie ce qui est
apparemment une infraction. Mais le droit ne peut concéder à ce fait justificatif , et c’est en
tant que tel qu’il est invoqué par les défenseurs de l’idéologie libérale de la torture, qu’un rôle
exceptionnel, de peur qu’étant invoqué à tout propos ils permettent la conduite de
comportements amenant inévitablement à l’anarchie..
Précisément, en raison de son interprétation plus que restrictive par la plupart des juges
nationaux où il est admis , ce principe apparaît davantage comme « le dernier recours » ,
l’argument « de la dernière chance » et de ce fait perd toute consistance, et dessert même la
thèse au soutient de laquelle il est invoqué.
Un autre coup fatal est porté à la justification de la torture en situation d’exception par
l’argument on ne peut plus décisif de son inefficacité (sauf pratiquée de manière systématique
et à très grande échelle où elle finit nécessairement par conduire à l’obtention de quelques
renseignements significatifs). Ce n’est pas là un argument nouveau avancé par Michel
Terestchenko , qui le justifie empiriquement puisqu’il était déjà avancé par Aristote en son
temps. Cependant il convient de préciser que l’inefficacité de la torture n’est que relative. En
effet , son autre objectif qui comme l’indiquait déjà Beccaria est un but politique , à savoir la
terreur qu’elle inspire aux autres hommes. Jean-Paul Sartre qui fut particulièrement sensibilisé
au problème de la torture énonce que « le but de la question n’est pas seulement de
contraindre à parler, à trahir : il faut que la victime se désigne elle-même, par ses cris et par sa
soumission, comme une bête humaine. Aux yeux de tous et à ses propres yeux. Il faut que sa
trahison la brise et débarrasse à jamais d’elle. Celui qui cède à la question, on n’a pas
seulement voulu le contraindre à parler ; on lui a pour toujours imposé un statut : celui de
sous-homme. ». Ce traitement de sous-homme réservé à tous les détenus « interrogés » est
accompli précisément dans le but de le désaffilier du groupe d’hommes auquel il appartient.
C’est ce que Terestchenko appel « la fonction symbolique de la torture » et ce qui permet peut
être d’apporter un élément de réponse à la question de savoir pourquoi les Etats , même
démocratiques parviennent difficilement à renoncer à cette pratique « barbare » selon
Beccaria, que même les Romains « réservaient aux esclaves », et ont travaillés tout au long du
XXe siècle à en raffiner les techniques , au point d’en brouiller les limites. Un autre élément
de réponse pourrait être la dimension punitive que semble parfois prendre la torture et que
n’évoque pas ici l’auteur. Elle apparaît parfois en effet comme une réponse instinctive face à
une attaque traumatisante (ce qui fut le cas des évènements du 11 septembre) et semble une
mise en œuvre indigne d’une démocratie, fondée sur le respect des droits de l’homme dont
l’un des plus fondamental est le respect de la dignité de chacun ,de la loi du Talion .
Concernant le trop large problème de la définition de la torture qui ne sera donc que très
succinctement évoqué ici,il semble qu’il faille adopter la position du professeur de science
politique Darius Rejali qui veut que « la torture ne doit pas être abordée à partir de sa
définition, mais selon ses effets » .C’est d’ailleurs en ce sens que va la méthode adoptée par la
convention des Nations unies contre la torture de 1984.

Enfin il est à signaler que l’on pourrait se poser la question des moyens éventuels de lutte
contre la torture, qui n’est pas ici envisagée par l’auteur. Un début de réponse peut être
apportée par l’action d’Amnesty international qui fait pression sur les gouvernements afin
qu’ils prennent des mesures pour lutter contre la torture et les mauvais traitements, en
ordonnant aussi rapidement que possible l’ouverture d’enquêtes impartiales et efficaces sur
les allégations de torture et en traduisant en justice les tortionnaires.

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