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Indépendance professionnelle réalités et imaginaire Louis Calisti* Jean-Francois Rey ** Question aujourd’hui fondamentale, Elle ne touche pas seulement le médecin, Je professionnel de la médecine, voire de la santé. Elle affecte directement le patient, le malade, Ia population. lle nous fait saisir de plein fouet tous les éléments qui composent une situation globate. Elle démontre que la crise de la médecine est reflet et aussi témoin dela crise dela société. Mais cette question capitale ne peut se situer sur un plan seulement théorique. Elie ne peut demeu- rer abstraite parce qu'elle souléve tout de suite deux interrogations concrétes, L'indépendance professionnelle du médecin vis-d-vis de qui ? Est-ce que dans s2 pratique, quelle qu’elle sot, le médecin doit limiter son interrogation & son indépendance vis-A-vis d'un individu, d’un employeur 7 Ne convient-il pas de examiner d'abord par rapport & ceux qui sont supposés maltriser les dépen- ses de santé, en fait qui instaurent la limitation de Paccession aux soins, aux soins de qualité ? Mais, l'indépendance professionnelle pour quoi faire ? Sim- plement pour continuer la médecine traditionnelle de la Tin du XIX: siéele,libé- tale dans son organisation économique, limitée au diagnostic et la thérapeu- tique dans son organisation professionnelle ? Les soins constitueraientcils tow. jours tout le champ de la santé ? Ces deux questions nous amenent & nous demander quelles sont aujourd'hui, dans le contexte de 1981, les possibilités laissées aux médecins pour soigner en fonction des données scientifiques et techniques et comme ils sont tenus de le faire depuis le serment d’ Hippocrate, toujours « en leur ame et conscience » ? « Je promets ej le jure, au nom de Eire Supréme, d’étre fid2le aux lois de honneur et de fa probité dans l'exer- ice de la médecine (..) que les hommes m'accordent leur estime si je suis Fidele & mes promesses... » Comme ils sont tenus de le faire parla loi de notre ;pays qui leur fait une « obligation de moyens », Ceci, quelle que soit la strue- ture dans Iaquelle ils exercent ? + Président de union régionale de ta mutualté, région Provence-Alpes-Cétedt‘Azur ; président de la fedération nationale des mulls de travailleurs ** Médecn généraliste, directeur des centres médleeus de 'union départementate de le mutuallté des travellers, Bouehes-du-Rhne, 23 Une approche de l’indépendance professionnelle traditionnelle Analyser Pindépendance professionnelle d’un individu, quelle que soit son activité, ou d’un groupe, c'est analyser en fait les rapports sociaux que cet individu ou ce groupe noue, nécessairement, avec Pensemble de la société cenvisagée & 'échelle individuelle ou dans sa totalité. Indépendance profession nelle n'est pas synonyme d'isolement. Qui parlerait de Pindépendance d’un individu, seul, sur une fle ? Personne n’a épilogué sur « "indépendance » de Robinson Crusoe ! Indépendance professionnelle signifie donc modalité @Péchange, de relation, mais envisagée avec toute la charge culturelle, idéolo- sigue et économique di x1X: sidce, le sidcle précisément du « libre-échange ». Les deux couples de termes, indépendance professionnelle et libre-fchange, tant finalement complémentaires et non en opposition comme cela pourrait ers une analyse superficielle, Cette indépendance profession- se concrétise et se développe dans sa relation avec ses mala des, pris isolément ou envisagés globalement A travers le systéme de couver- ture sociale dont tous font partie. Mais elle se manifeste aussi, en positif ou en négatif, avec les confréres qui exercent dans le méme environnement, D'abord, vis-i-vis du malade. Celui-ci doit pouvoir disposer du libre choix de son médecin, Mais cette démarche n’est possible que dans la mesure ot, pré& sément, le médecin est indépendant. Ainsi dans une situation dobligation (ela existe et se manifeste dans un certain nombre de secteurs publics en France, par exemple & la S.N.C.F.) le malade ne dispose pas du libre choix du médecin, Celui-ci est donc « tenu », méme contre sa volonté, de l'examiner et de lui formuler des prescriptions. Pour autant, comment définir, quel que soit son statut, cette situation « d’indépendance » par rapport au malade ? Que ecouvre vraiment cette indépendance ? En fait et dans tous les cas, nous découvrons une ambiguité sémantique. Le médecin est en effet doublement « dépendant » de son patient. C'est en exergant sa profession qu'il realise sa vocation ; som identité sociale, il la découvre et la développe au fil des jours dans son exercice professionnel. Le docteur Goust écrit excellemment : « En exercant sa profession, le médecin peut donner @ son existence personnelle sa signification la plus compléte!. » Mais aujourd'hui, cette pratique médicale ct sa signification tendent & se modifier — nous dirons a s'enrichir — dans la ‘mesure it les usagers veulent, de fagon de plus en plus insistante, savoir. Ainsi, son identification traditionnelle & celle de chaman, voire de sorcier, tend de plus en plus & évoluer vers celle dun homme de science, un homme possédant un savoir. Ceci apparalt déja a des degrés divers suivant le niveau socio-culturel du malade, Et cette situation n’est pas sans inquiéter cert praticiens : ne voient-ils pas, dans la volonté de savoir du malade, du pe lune atteinte & leur prestige, & leur indépendance professionnelle, alors qu'elle est le plus souvent quéte, recherche de connaissances ? Mais si, par sa prati- gue, le médecin peut donner toute sa dimension & sa personnalité, résultat direct de son échange avec son malade, il dépend directement de celui-ci d’un point cle vue matériel. Le médecin qui n'a pas d’employeur, au sens juridique du terme, dépend en fait d'un nombre indéfini de clients qui peuvent étre dautant plus exigeants en période de cris. 1, Docteur F, GOUST, Médecine ef Urbanisation, Bditions ouvetres, Paris, 1968, page 11), 24 ‘Nous percevons ainsi que l'indépendance professionnelle du médecin a une double composante : celle d'un statut social et celle d’une pratique profes- sionnelle. L’un ct autre s'entremélent inexorablement quand, au-dela de individu malade, le médecin se trouve confronté avec les systémes de couver- ture sociale. Dans notre pays, jusqu’ici, se présente un paradoxe : d’une part, il existe une couverture collective — certains disent : socialisée — de l'ensem- ble de la population et dautre part, une pratique médicale privée, indivi- duelle, A chaque consultation, le praticien se retrouve confronté avec cette situation. Eile est d’autant plus difficile & assumer pour les médecins (envisa- gés d’une fagon globale formant le corps médical ou envisagés & Péchelon individuel) qu’ils se sont opposés farouchement et longtemps aux systémes de couverture sociale : les assurances sociales en 1930, 'instauration du régime de sécurité sociale en 1945. Les conventions départementales datent de 1960 et, Ia convention nationale seulement de 1971. Et aujourd’hui, pour leurs hono- raires, la quasi-totalité des médecins « dépendent » des différents régimes de sécurité sociale. Mais émerge une série de questions. Peu aprés la mise en place de Ia sécurité sociale en 1945, le Journal officiel publiait en 1947 le code de déonto- logic, dont les grands principes étaient ainsi formulés : libre choix du médecin par le malade ; liberté de prescription par le médecin ; entente directe entre le malade et Je médecin en matiére d’honoraires ; paiement direct des honoraires par le malade au médecin ; secret médical. On voit bien 1a, fixées, les modali- ‘és de rémunération, reprises par le docteur Portes dans son livre, A la Recher che d'une éthique médicale. Mais un médecin qui ne discute plus, au cours du. colloque singulier, du montant de ses honoraires, pratique-t-il encore de fagon, indépendante ? N’y a-til pas eu confusion permanente, consciente ou non, entre indépendance professionnelle et médecine libérale, entre médecine libé- rale et modalités de rémunération ? Ambiguités & Vorigine certainement G'innombrables conflits, et toujours entretenues. Vis-a-vis des confréres, Si chaque médecin exergait et exerce comme entrepre- neur particulier et indépendant, ses confréres dans une situation analogue ne seraient pas et ne sont pas dabord des collaborateurs, mais des concurrents. Chaque « indépendance professionnelle » rencontre donc inévitablement les autres « indépendances professionnelles » dans cette situation concurren- tielle. Celle-ci Pest d’aurtant plus que le nombre des médecins est plus impor- tant et Ia solvabilité des malades plus restreinte. Alors, comment définir, comment apprécier Pindépendance de chacun par rapport a celle de tous Jes autres ? Question certes toujours éludée, mais néanmoins sous-jacente aux décisions prises par chaque médecin vis-a-vis de « ses » malades. Dans la mesure oi cette situation concurrentielle se pérennise, peut-on dire que ces décisions sont prises librement ? L'indépendance ne’ passe-telle pas, & ce niveau professionnel, précisément parla fin de cet état de concurrence ? Ques- tion d’autant plus & Pordre du jour depuis létablissement de tableaux statisti ques, de « profils », @’enveloppe globale, qui viennent bousculer Ia situation traditionnelle dans laquelle chacun arrivait peu ou prow a s'adapter ? Nous sommes done déja amenés, sur la simple lecture d’une situation tradi- tionnelle, 8 reposer de facon fondamentale la question de T'indépendance pro- fessionnelle du médgcin. Est-ce que les points de repéres définis dans la 25

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