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B 249
Hospitalisation à la demande
d’un tiers et hospitalisation
d’office, tutelle, curatelle,
sauvegarde de justice
Principes d’application et principes d’utilisation
PR Jean-Louis SENON, DR Nicolas LAFAY
Service hospitalo-universitaire de psychiatrie et de psychologie médicale, CHU et CHHL 86021 Poitiers.
que le préfet peut ordonner l’exécution immédiate – droit de saisir la commission départementale des
d’un isolement d’un ou plusieurs malades en milieu hospitalisations psychiatriques (CDHP). Celle-ci doit
hospitalier ; étudier toute demande d’hospitalisation à la demande
– en alcoologie, la loi du 15 avril 1954, reprise dans d’un tiers et hospitalisation d’office ;
les articles du code de la santé publique, avait prévu – droit de prendre le conseil d’un médecin ou d’un avocat
la désintoxication, la rééducation et l’isolement des de son choix ;
alcooliques qui constituent un danger pour eux- – droit d’émettre ou de recevoir des courriers ;
mêmes et autrui. Cette loi n’est en pratique pas – droit de consulter le règlement intérieur de l’établisse-
appliquée ; ment ;
– en matière de toxicomanie, la loi du 31 décembre 1970, – droit d’exercer son droit de vote ;
prolongée par les décrets de 1971 et 1977, prévoit – droit de se livrer aux activités religieuses ou philoso-
l’hospitalisation éventuelle des toxicomanes placés phiques de son choix.
sous le régime de l’injonction thérapeutique. Il s’agit, Sont garants de la liberté individuelle et amenés à visiter
là aussi, d’une mesure peu appliquée. sans publicité les établissements accueillant des malades
mentaux et à recevoir de ceux-ci toute réclamation et
1. Principes généraux de la loi information :
L’hospitalisation libre est la règle, l’hospitalisation sous – le préfet du département ;
la contrainte l’exception. – le juge du tribunal d’instance ;
Pour ce qui concerne la psychiatrie, la loi du 30 juin 1990 – le président du tribunal de grande instance ;
« relative aux droits et à la protection des personnes – le maire de la commune ;
hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs – le procureur de la République ;
conditions d’hospitalisation » prévoit 2 régimes d’hospi- – la commission départementale des hospitalisations
talisation sous la contrainte : l’hospitalisation à la psychiatriques qui dans chaque département « examine
demande d’un tiers (HDT) et l’hospitalisation d’office la situation des personnes hospitalisées en raison de
(HO). La loi est précisée par les circulaires d’application troubles mentaux » (décret du 25 septembre 1991).
du 5 septembre 1990 et du 13 mai 1991. Le décret du Il est rappelé que :
25 septembre 1991 décrit l’organisation et le fonction- – le droit au libre choix du médecin est un principe de
nement de la commission départementale des hospitali- base du droit sanitaire français : le malade ou sa famille
sations psychiatriques qui contrôle dans chaque départe- « dispose du droit de s’adresser au praticien ou à
ment les hospitalisations sous la contrainte. l’équipe de santé mentale, publique ou privée de son
Pour la loi du 30 juin 1990, l’hospitalisation libre est la choix, à l’intérieur ou à l’extérieur du secteur psychia-
règle : elle s’applique pour tout malade consentant aux trique » (article L. 3211-1 du CSP) ;
soins ; dans son esprit, tout doit être fait par les soignants – la sectorisation, principe d’organisation de la psychia-
et l’entourage pour obtenir le consentement aux soins du trie publique depuis la circulaire du 15 mars 1960
patient. confirmée par la loi du 25 juillet 1985, ne doit pas
La loi du 30 juin 1990 est consacrée en grande partie à la s’opposer au libre choix du malade ou de sa famille en
détermination des droits de la personne hospitalisée : il dehors des hospitalisations d’office où le choix de
s’agit bien pour elle de rendre exceptionnelle l’hospitali- l’établissement relève de l’autorité préfectorale. Dans
sation sous la contrainte et de limiter tout risque d’hospita- la pratique, ce droit au libre choix est difficilement
lisation ou « d’internement » arbitraire. La loi est reprise appliqué dans les institutions psychiatriques publiques.
par le code de la santé publique aux articles L. 3211 à L. 3214.
Lorsqu’une personne est hospitalisée sans son consente-
ment, les restrictions à l’exercice de ses libertés indivi- Hospitalisation libre
duelles doivent être limitées à celles rendues nécessaires
par son état de santé et la mise en œuvre de son traitement. L’hospitalisation libre est le régime habituel d’hospitali-
La personne hospitalisée sous la contrainte doit être sation dans les hôpitaux généraux publics. C’est le seul
informée dès l’admission, et par la suite à sa demande, régime d’hospitalisation dans les cliniques psychiatriques
de sa situation juridique (article L. 3211-3 du CSP). privées. L’état de santé du patient justifie des soins en
hospitalisation. Le malade est consentant aux soins, il
2. Droits du malade hospitalisé signe lui-même son admission à l’entrée à l’hôpital et
Ces droits sont réaffirmés. donne l’autorisation éclairée de soins. Le consentement
La personne hospitalisée conserve des droits expressément du malade est recevable car l’altération éventuelle de ses
prévus par la loi (article L. 3211-3 du CSP) : capacités mentales n’altère pas son libre arbitre. Il peut
– droit de communiquer avec les autorités : préfet, juge comprendre les soins proposés et l’information donnée
du tribunal d’instance, président du tribunal de grande sur sa maladie. Le médecin généraliste rédige éventuel-
instance, maire de la commune, procureur de la lement un certificat médical préconisant l’hospitalisa-
République (article L. 3222-4 du CSP). Aucun cour- tion et présentant la pathologie du patient : c’est là une
rier, et aucun appel téléphonique ne doit être intercepté pratique confraternelle souhaitable mais qui n’est pas
vis-à-vis de ces autorités ; obligatoire pour une hospitalisation libre.
Le malade sort du service hospitalier sur décision du d’une prise en charge en milieu hospitalier. Ces certificats
médecin ou quand il le souhaite, en signant sa demande. ont une validité de 15 j. Leur rédaction suppose que les
Si le médecin estime que le malade court un risque, il médecins ont effectivement et personnellement examiné
demande au malade de signer une décharge avec une le malade. Il s’agit d’actes réalisés en dérogation légale
sortie contre avis médical ; si le malade refuse de signer au secret professionnel. Les 2 certificats médicaux et la
sa sortie, ce refus est constaté par 2 témoins qui peuvent demande du tiers sont remis au bureau des entrées de
appartenir au personnel soignant. Toute personne hospi- l’établissement hospitalier. C’est le directeur de celui-ci
talisée, même en hospitalisation libre, dispose des qui prononce l’hospitalisation après en avoir vérifié la
mêmes droits que ceux prévus par la loi du 27 juin 1990 légalité et la conformité.
et repris par l’article 3211-3 du code de la santé En cas de péril imminent (article L. 3212-3 du CSP), le
publique. directeur de l’établissement hospitalier peut prononcer
l’admission d’un malade au vu d’un seul certificat
auquel s’adjoint la demande du tiers. Dans ce seul cas,
Hospitalisation à la demande le médecin certificateur peut exercer dans l’établis-
d’un tiers sement d’accueil. Le certificat unique doit justifier,
de façon implicite, le péril imminent (v. Certificat péril
L’hospitalisation à la demande d’un tiers (HDT) s’ap- imminent).
plique quand le malade n’est pas consentant aux soins ou Un certificat « immédiat » est rédigé dans les 24 h par un
n’a pas les capacités pour y consentir. Elle est justifiée psychiatre de l’établissement. Les certificats « de quin-
quand les troubles mentaux du patient rendent son zaine » confirment la nécessité du maintien de l’hospita-
consentement impossible et quand son état rend indis- lisation. La sortie du malade est prononcée par le méde-
pensables des soins immédiats avec surveillance en cin constatant que les conditions de l’hospitalisation à la
milieu hospitalier. Dans ce cas, un tiers signe la demande demande d’un tiers ne sont plus justifiées ; elle est aussi
manuscrite d’admission. Le tiers peut être un membre acquise en l’absence des certificats réglementaires.
de la famille, un proche ou une personne agissant dans
son intérêt (à l’exclusion des personnels soignants ou de
la direction de l’établissement hospitalier). En revanche,
l’assistante sociale peut être acceptée comme tiers.
Hospitalisation d’office
Dans le cas d’un mineur, la procédure d’hospitalisation
L’hospitalisation d’office (HO) concerne les malades
à la demande d’un tiers n’a pas de support légal :
mentaux compromettant l’ordre public et la sécurité des
il appartient au titulaire de l’autorité parentale de
personnes. Il s’agit alors d’une mesure administrative
prendre la responsabilité de l’hospitalisation. La
prise par le préfet du département (préfet de police à
demande d’hospitalisation doit comporter les nom,
Paris). Deux procédures sont possibles :
prénoms, âge, profession, et domicile du tiers ainsi que
son degré de parenté (en pratique, la photocopie de – dans la procédure courante le médecin rédige un
la carte d’identité est demandée) ; il n’est pas nécessaire certificat médical circonstancié et le préfet prononce,
que le tiers motive la demande (v. Demande du tiers). au vu de celui-ci, l’hospitalisation d’office. Un méde-
Si le demandeur est le tuteur ou curateur, celui-ci cin de l’établissement ne peut pas être certificateur
fournit un extrait du jugement de mise sous tutelle. (v. Certificat d’hospitalisation d’office) ;
Cette demande est valide pendant 15 j. – dans la procédure d’urgence, en cas de danger immi-
Cette demande d’hospitalisation à la demande d’un tiers nent, pour la sûreté des personnes, le médecin atteste
doit être accompagnée de 2 certificats médicaux établis de la dangerosité du patient et le maire peut alors
par des médecins inscrits au conseil de l’Ordre, datant prendre des mesures d’urgence.
de moins de 15 j : Le maire de la commune et les commissaires de police
– le 1er certificat doit être rédigé par un médecin n’exer- des grandes métropoles signent un arrêté provisoire sur
çant pas dans l’établissement hospitalier ; lequel le préfet statue sous 24 h. Faute de confirmation
– le 2e certificat est établi par un médecin qui peut préfectorale, l’arrêté provisoire du maire ou du commis-
exercer dans cet établissement (v. Certificat d’hospita- saire de police est caduc au bout de 48 h.
lisation à la demande d’un tiers). Un certificat immédiat est établi dans les 24 h par le
Comme certificateurs, sont exclus les médecins non psychiatre de l’établissement hospitalier, constatant la
thésés et donc non inscrits sur la liste du conseil de pathologie et justifiant l’hospitalisation ; un certificat
l’Ordre, les médecins exerçant dans l’établissement confirme la nécessité du placement tous les 15 j.
hospitalier d’accueil (pour le 1er certificat), les médecins La sortie est prononcée après arrêté préfectoral abro-
parents ou alliés au 4e degré du tiers demandeur, du geant l’hospitalisation d’office.
malade ou des directeurs de l’établissement. Une forme particulière de celle-ci est celle qui découle
Les 2 certificats constatent l’état mental du patient (sans d’un non-lieu judiciaire après application de l’article
nécessairement donner le diagnostic), précisent l’évolu- 122-1 du code pénal qui établit l’irresponsabilité pénale.
tion de sa maladie en attestant que le consentement est Dans ce cas, la sortie ne peut être prononcée par le préfet
impossible, qu’il y a nécessité de soins immédiats et qu’après 2 expertises indépendantes et convergentes.
TABLEAU I
Certificat Simple certificat 2 certificats médicaux Un seul certificat médical Un certificat médical
médical confirmant le péril
imminent
Permissions Autorisées par le directeur Nécessité d’un certificat Nécessité d’un certificat Sur autorisation
après avis du médecin de situation transmis de situation transmis du préfet
au préfet au préfet
Libertés Celles de tout citoyen Limitées à celles Limitées à celles Limitées à celles
générales rendues nécessaires rendues nécessaires rendues nécessaires
au traitement au traitement au traitement
Sortie Sur avis du médecin Sur avis du médecin Sur avis du médecin Par arrêté préfectoral en
contre avis médical en l’absence des certificats en l’absence des certificats l’absence des certificats
réglementaires réglementaires réglementaires
Sur demande du tiers ou Sur demande du tiers ou Sur décision du préfet
des personnes mentionnées des personnes mentionnées après avis
par l’art L. 3212-9 par l’art L. 3212-9 de la commission
Sur décision du préfet Sur décision du préfet départementale
après avis après avis Après expertise
de la commission de la commission de 2 psychiatres
départementale départementale Sur décision judiciaire
Sur décision du président Sur décision du président
du tribunal de grande du tribunal de grande
instance instance
Je, soussigné(e)…… (nom, prénom et nom de jeune fille s’il y a lieu) 1 e r certificat médical : médecin extérieur à l’établisse-
domicilié(e) à …… ment d’accueil
né(e) le …… à …… e t 2e certificat : médecin extérieur ou de l'établisse-
profession …… ment
degré de parenté avec le malade ……
nature des relations avec le malade ……
demande l’admission en hospitalisation à la demande d’un tiers Je, soussigné(e) Docteur ……
dans le service de psychiatrie de …… certifie avoir examiné ce jour M ou Mme ……
de M ou Mme …… né(e) le ……
né(e) le …… à …… domicilié(e) à ……
fils de …… et de …… (nom de jeune fille de la mère) et avoir constaté les troubles suivants : ……
domicilié(e) à ……
profession …… (décrire l’état mental du malade et son comportement, agitation,
suivant le certificat médical délivré par M …… délire, idées de suicide… en insistant sur les éléments cliniques
à …… le …… préoccupants qui permettent aussi d’apprécier les raisons de
l’absence de consentement et l’urgence des soins appropriés ;
Signature il n’est pas obligatoire de mentionner le diagnostic)
Pièce d’identité du malade : Pièce d’identité du demandeur : Ces troubles rendent impossible son consentement.
carte nationale d’identité* carte nationale d’identité* Son état impose des soins immédiats et une surveillance constante en
permis de conduire* permis de conduire* milieu hospitalier.
passeport* passeport* En conséquence, cela justifie son hospitalisation sur demande d'un
tiers dans un établissement mentionné aux articles L. 3222-1 du code
* délivré le …… *délivré le …… de la santé publique en vertu de la loi du 27 juin 1990.
à …… à ……
N° …… N° …… Date et signature :
Date et signature
Date et signature
Ce patient nécessite d’être représenté d’une manière continue dans Ce patient nécessite d’être représenté d’une manière continue dans
les actes de la vie civile. Pour cette raison, l’ouverture d’une tutelle les actes de la vie civile. Pour cette raison, l’ouverture d’une curatelle
paraît justifiée. paraît justifiée.
Le malade peut être entendu par le juge des tutelles sans que cela Le malade peut être entendu par le juge des tutelles sans que cela
porte préjudice à sa santé. porte préjudice à sa santé.
(ou : ... ne peut être entendu ; ou : ... peut être entendu à l’hôpital). (ou : ... ne peut être entendu ; ou : ... peut être entendu à l’hôpital).
Signature Signature
TABLEAU II
Comparaison entre les différentes mesures de protection de l’incapable majeur
Avantages Mesure immédiate, simplicité Régime souple, intermédiaire entre Régime de protection complet
Ne porte pas atteinte sauvegarde de justice et tutelle et durable
à la capacité civile Mesure modulable
(art. 501 du code civil)
Inconvénients Mesure temporaire (pas de privation des droits civiques) Privation des droits civiques
Indications Pathologie ou handicap temporaires Pathologie ou handicap durables chez Pathologie ou handicap durables
un patient ayant besoin d’être protégé chez un patient ayant besoin d'être
de façon durable mais adaptée et souple protégé de façon durable
Procédure Déclaration au procureur Demande du malade, du conjoint, Demande du malade, du conjoint,
d’ouverture de la République associée de la famille, du curateur, du procureur de la famille, du curateur,
à un certificat de spécialiste de la République ou du juge du procureur de la République
si le malade n’est pas hospitalisé Demande destinée au juge des tutelles ou du juge
Le juge des tutelles peut prononcer Certificat médical constatant Demande destinée au juge des tutelles
la sauvegarde de justice s’il est l’altération des facultés établi par un Certificat médical constatant
saisi d’une demande de tutelle psychiatre figurant sur la liste spéciale l’altération des facultés établi par un
ou curatelle du procureur de la République psychiatre figurant sur la liste spéciale
du procureur de la République
Durée Deux mois renouvelables Mesure durable Mesure durable
éventuellement 6 mois
La sauvegarde de justice prononcée
par le juge peut se prolonger
jusqu’à l’ouverture de la tutelle
Conséquences Conservation des droits civils Incapacité civile partielle : autonomie Perte de la capacité civile : actes
et civiques possible pour les actes conservatoires, postérieurs à l’ouverture nuls
Protection par la possibilité possibilités d’action en nullité de droit, actes passés pouvant être
d’action en nullité et en réduction annulés, la nullité éventuellement
ou en réduction pour excès Perte partielle des droits civils prononcée dans l'intérêt du malade
Obligation pour les proches et politiques Perte des droits civiques
de faire des actes conservatoires Le droit de vote est conservé et politiques : perte du droit de vote,
Mariage et donation avec l’accord le mariage, le testament sont soumis
du curateur à l’autorisation du conseil de famille
Le testament est possible, Mesure modulable : certains actes
si un certificat médical atteste peuvent être maintenus par le juge
que la personne est saine d’esprit
Cessation Automatique en cas de non- Mêmes formalités Mêmes formalités
renouvellement par un nouveau que pour l’ouverture que pour l’ouverture
certificat médical attestant que l’état Jugement de mainlevée Jugement de mainlevée
antérieur a cessé par radiation
par le procureur de la République
Publicité Aucune communication possible Variable Par le moyen de l’état civil : mention
aux autorités judiciaires, avocats, RC (Répertoire civil) en marge
notaires avoués de l’acte de naissance
Information des notaires, avoués…
Recours Par le patient auprès du procureur Possible par toute personne qui aurait Possible par toute personne qui aurait
de la République pu demander l’ouverture de la curatelle pu demander l’ouverture de la tutelle
Mandataire La personne protégée peut désigner Mandat du curateur variable Mandat du tuteur variable
un mandataire selon le type de tutelle
Le juge peut désigner
un mandataire spécial
Catégories Mandataire spécial article 491-5 Curatelle spéciale (art. 512) : le curateur Tutelle complète
particulières du code civil a des pouvoirs comparables à celui Administration légale tutelle d’État
du tuteur (curatelle aggravée) Tutelle aux prestations sociales
mêmes actions peuvent être diligentées par les héritiers. de la République qui constate la récupération des fonc-
Les tribunaux saisis d’une demande en annulation ou en tions intellectuelles est transmis au juge des tutelles.
réduction d’un acte civil ayant lésé le protégé décident Celui-ci ouvre une procédure de mainlevée avec audition
en prenant en compte les biens matériels en cause, et du protégé, du tuteur, du conseil de famille, et éventuelle
surtout la bonne foi de ceux qui ont traité avec le protégé enquête sociale. Sur l’ensemble de ces éléments le juge
et qui peuvent l’avoir abusé. des tutelles peut lever la mesure contestée. Le recours se
Par contre, la sauvegarde de justice n’a pas de consé- fait auprès du juge des tutelles par le protégé ou toute
quences pour les droits civils ou civiques du protégé. personne habilitée à demander l’ouverture de la tutelle.
Une mesure proche est celle de l’institution d’un man- Il doit s’appuyer sur un certificat médical circonstancié
dataire spécial conformément à l’article 491-5 du code d’un spécialiste inscrit sur la liste spéciale du procureur
civil. Celui-ci est désigné par le juge des tutelles et peut de la République.
faire les actes de la vie civile d’administration néces-
saires à une protection d’urgence du malade. Comme la 3. Conséquences
sauvegarde de justice, cette mesure peut être appliquée
d’urgence si l’état du malade justifie cette aide. L’avis Le protégé est totalement privé de ses capacités
sur la nécessité de la nomination d’un mandataire spé- civiles, civiques et juridiques : il ne peut voter et n’est
cial peut émaner de tout intéressé, comme par exemple pas éligible. Il doit être en toutes circonstances de
du service social de l’hôpital. Le médecin peut aussi être sa vie civile représenté par son tuteur. Les actes posté-
à l’origine de la mesure. Le mandataire peut être un rieurs à l’ouverture de la tutelle sont nuls en droit, les
proche ou un professionnel. actes passés peuvent être annulés, en particulier si une
sauvegarde de justice à été enregistrée antérieurement.
Tout testament, toute donation ne peuvent se faire
Tutelle qu’avec l’accord du conseil de famille et ne concernent
que le conjoint ou un descendant. Le mariage nécessite
1. Indications et procédure la consultation du conseil de famille et (ou) des parents.
D’après l’article 501 du code civil, le juge peut
La tutelle s’adresse à un majeur présentant une patho- énumérer certains actes que la personne aura la
logie ou un handicap confirmés et durable, ayant besoin possibilité de réaliser elle-même soit seule, soit avec
d’être représenté de façon continue pour tous les actes l’assistance du tuteur.
de la vie civile. En psychiatrie elle s’applique donc par Différents types de tutelles peuvent être diligentés par le
exemple aux pathologie déficitaires durables : psychoses juge :
schizophréniques, démences, insuffisances intellectuelles – dans la tutelle complète, le tuteur gère les biens à la
profondes… La demande émane du malade, du conjoint, place du protégé et fait seul les actes conservatoires
de la famille, du curateur, des proches, du procureur de dans l'intérêt de celui-ci ; le tuteur de plein droit est le
la République ou du juge des tutelles lui-même. Cette conjoint sauf si le juge l’interdit. Le conseil de famille
demande est destinée au juge des tutelles du tribunal occupe une place importante auprès du tuteur ; il
d’instance dont relève le domicile du patient. Le certificat est présidé par le juge des tutelles et comporte 4 à
médical constatant l’altération des facultés est établi par 6 membres nommés par celui-ci. Le subrogé-tuteur
un psychiatre figurant sur la liste spéciale du procureur surveille la gestion du tuteur ;
de la République du tribunal de grande instance. Ce – l’administration légale est une tutelle allégée et admi-
certificat médical constate l’altération des facultés nistrative sans conseil de famille ni subrogé-tuteur.
intellectuelles et physiques et démontre l’incidence de L’administrateur légal gère les biens. Le gérant de
la maladie ou du handicap sur les actes de la vie civile tutelle reçoit les revenus et assure avec ceux-ci la vie
(v. Certificat de tutelle). L’instruction préalable fait que matérielle du protégé ;
l’intéressé est obligatoirement entendu. Une enquête – la tutelle d’État est une tutelle simplifiée où le tuteur
sociale, l’avis du conseil éventuel, la réunion du conseil assure sa mission sans intervention de subrogé-tuteur
de famille sont diligentés par le juge des tutelles. ni du conseil de famille. La tutelle est confiée au
Le tuteur peut être le conjoint, un enfant, ou toute autre préfet qui délègue cette mission au directeur de l’action
personne physique ou morale (associations) nommée sanitaire et sociale. Les délégués à la tutelle d’état
par le juge des tutelles. Le tuteur administre légalement sont nommés sur une liste établie par le procureur de
le patrimoine du protégé sous le contrôle du juge des la République, après avis du préfet ;
tutelles à qui il rend compte. – dans la tutelle aux prestations sociales, le tuteur reçoit
les prestations sociales du protégé et effectue les
2. Durée, cessation et recours règlements des dépenses de première nécessité. C’est
une forme de tutelle qui s’adresse aux malades ayant
Il s’agit d’une mesure durable qui persiste jusqu’à une un handicap modéré et n’ayant comme seule res-
mainlevée qui obéit à la même procédure. La cessation sources que des prestations sociales : revenu mini-
obéit aux mêmes formalités que l’ouverture. Un certificat mum d’insertion (RMI), allocation adulte handicapé
médical d’un psychiatre appartenant à la liste du procureur (AAH), allocation logement (AL)…