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B 365
Lithiase vésiculaire
Épidémiologie, physiopathologie, diagnostic, traitement
Dr Victor de LÉDINGHEN, Dr François MAGNIEN, Pr Patrice COUZIGOU
Service d’hépato-gastro-entérologie, hôpital du Haut-Lévêque, 33604 Pessac cedex
Points Forts à comprendre lestérol autour d’un centre sombre formé de sels biliaires
et de cholestérol, polyédriques.
• Dans les pays occidentaux, 80 % des calculs 2. Formation d’un calcul de cholestérol
biliaires sont cholestéroliques et 20 % sont • Sécrétion par le foie de bile sursaturée en cholestérol :
pigmentaires. Le cholestérol est insoluble dans les principaux constituants de la bile sont l’eau, le choles-
l’eau. Il est solubilisé dans la bile, intégré dans térol, les phospholipides et les sels biliaires. À l’état nor-
des micelles ou dans des vésicules phospholipidiques. mal, le cholestérol sécrété par les hépatocytes est solubi-
Si la capacité de solubilisation du cholestérol est lisé dans la bile sous forme de micelles. Les micelles sont
dépassée, il y a sursaturation en cholestérol. des agrégats polymoléculaires comprenant les sels biliaires,
La nucléation (ou formation de cristaux les phospholipides et le cholestérol. La bile est dite sursa-
de cholestérol) se produit par fusion des vésicules turée ou lithogénique lorsque la concentration de choles-
phospholipidiques. térol dépasse les capacités de solubilisation micellaire.
• L’histoire naturelle de la lithiase vésiculaire est L’excès de cholestérol se trouve alors incorporé dans des
mal connue. En l’absence de traitement, vésicules constituées d’une double couche de phospholi-
l’évolution va se faire vers la répétition des crises, pides. La sursaturation, première condition de la lithogé-
la persistance de la symptomatologie ou la nèse, résulte soit d’une sécrétion hépatique excessive de
survenue de complications. La probabilité d’avoir cholestérol, soit d’une sécrétion insuffisante de sels
une complication d’une lithiase biliaire après la biliaires.
découverte d’un calcul est d’environ 10 % à 5 ans, La sursaturation de la bile en cholestérol est l’anomalie ini-
15 % à 10 ans et 18 % à 20 ans. tiale nécessaire à la formation de la lithiase mais la sursa-
turation de la bile en cholestérol n’est pas suffisante pour
le développement d’une lithiase.
• Cristallisation (ou nucléation) du cholestérol en excès :
la nucléation ou cristallisation, deuxième phase de la for-
Épidémiologie mation des calculs de cholestérol, se déroule dans la vési-
cule biliaire. Entraînées dans le mouvement provoqué par
La lithiase vésiculaire (présence de calculs dans la vési- l’absorption d’eau, micelles et vésicules lipidiques se
cule biliaire) est la plus fréquente des affections biliaires. concentrent dans la couche de mucus au contact de l’épi-
Sa prévalence est difficile à préciser car la majorité des thélium. Les vésicules de phospholipides et de cholestérol
sujets restent asymptomatiques. En Europe, on l’estime à se déshydratent et s’agglomèrent en gouttelettes appelées
environ 15 % des sujets adultes. Environ un tiers des liposomes. Les phospholipides se solubilisent dans les
malades qui ont une lithiase vésiculaire symptomatique micelles, les cristaux de monohydrate de cholestérol se
auront une complication de la maladie. détachent. C’est la cristallisation. Ces microcristaux, enfer-
més dans le gel de mucus, constituent avec celui-ci les élé-
ments de base d’un sédiment macroscopiquement visible
Physiopathologie appelé sludge.
• Agglomération des cristaux en calculs : l’élaboration et
Lithiase cholestérolique la croissance des calculs s’effectuent à partir des cristaux
C’est la plus fréquente en Occident : 80 % des cas. conglomérés dans la matrice glycoprotéique du mucus.
Cette agglomération nécessite une stase de la bile ou au
1. Composition chimique moins une hypomotilité de la vésicule biliaire.
Il existe 2 types de lithiase cholestérolique :
• calculs de cholestérol pur : 20 % des cas, de structure Lithiase pigmentaire
cristalline, souvent uniques ; En Occident, elle représente 15 à 20 % des lithiases. Les
• calculs mixtes : 80 % des cas, jaunâtres, constitués de calculs pigmentaires, par définition, contiennent moins de
couches concentriques de bilirubinate de calcium et de cho- 25 % de cholestérol. On les sépare en 2 groupes :
mentations de pression brusques et répétées. Plusieurs mil- • Ethnie et facteurs génétiques : la prévalence de la lithiase biliaire est
liers de coups et plusieurs séances sont nécessaires pour maximale dans certaines tribus indiennes américaines et minimale au
Japon. Elle est moyenne en Europe de l’Ouest et en Amérique du Nord.
obtenir des fragments de moins de 5 mm. Les chances de • Médicaments : certains médicaments augmentent le risque de lithiase
réussite sont plus élevées pour un calcul unique d’un dia- biliaire. Certains médicaments hypolipémiants (Clofibrate) qui mobili-
mètre inférieur à 1 cm. La lithotritie est associée à un trai- sent le cholestérol total et augmentent sa captation hépatique, contracep-
tement dissolvant afin de dissoudre les calculs avant leur tifs oraux riches en œstrogènes, octréotide (analogue de la somatostatine).
• Cirrhose du foie : la lithiase survient 3 fois plus souvent chez les malades
évacuation par le canal cystique. Les rares complications ayant une cirrhose.
de cette technique sont souvent secondaires à la migration • Maladie ou résection iléale : les résections iléales interrompent le cycle
de fragments calculeux : colique hépatique, cholécystite entéro-hépatique des acides biliaires et augmentent donc la saturation de
aiguë, pancréatite aiguë, pétéchies sur la zone cible de la la bile en cholestérol.
face antérieure de l’abdomen. Les indications de la litho- • Hémolyse : les calculs noirs sont plus fréquents chez les malades ayant
une maladie hémolytique chronique.
tritie se limitent aux calculs susceptibles d’être dissous par • Nutrition parentérale totale : elle peut provoquer l’accumulation de
les acides biliaires (calculs cholestéroliques situés dans une sludge et favoriser la formation de calculs biliaires.
vésicule fonctionnelle). La place de la lithotritie associée • Jeûne : le jeûne prolongé favorise la lithiase biliaire.
aux acides biliaires dans le traitement de la lithiase vési-
culaire est donc très limitée. Les calculs radiotransparents 2 / La microlithiase biliaire
au nombre de 1 à 3 et de moins de 20 mm de diamètre en
constituent l’indication idéale si un geste chirurgical est La microlithiase biliaire est une entité anatomo-clinique. Il s’agit de cal-
culs dont la taille est théoriquement inférieure ou égale à 3 mm, non déce-
contre-indiqué. lables échographiquement ou radiologiquement, qui se développent au
sein d’une bile lithogène et sont responsables de manifestations cliniques
3. Indications du traitement bilio-pancréatiques.
Chez le sujet jeune, le traitement médical est contre-indi- Les épisodes de migration des petits calculs rentrant dans le cadre de la
qué dans la mesure où il n’est jamais définitif. La cholé- microlithiase sont responsables de manifestations cliniques souvent inau-
gurales à type de colique hépatique, d’angiocholite et surtout de pan-
cystectomie est nécessaire en cas de colique hépatique ou créatites aiguës récidivantes. Le développement de l’échoendoscopie a
d’apparition de complications. permis d’obtenir une visualisation échographique précise et de haute réso-
Chez le sujet très âgé et (ou) à risque opératoire élevé, un lution de la vésicule biliaire permettant de résoudre certains diagnostics
traitement médical ou l’abstention thérapeutique se discu- difficiles de lithiase symptomatique. Le prélèvement de bile vésiculaire
tent. ■ peut être effectué par duodénoscopie ou par tubage duodénal après sti-
mulation de la contraction vésiculaire par un analogue de la cholécysto-
kinine. La bile est ensuite examinée en microscopie optique (lumière
directe et polarisée) à la recherche de microcristaux de cholestérol ou de
granules de bilirubinate de calcium avec une sensibilité de 85 % et une
spécificité de 97 à 100 % dans le diagnostic de lithiase biliaire.
Points Forts à retenir
3 / Cholécystectomie laparoscopique
• Une lithiase biliaire peut être asympatomatique, La cholécystectomie par cœlioscopie s’effectue sous anesthésie générale
se manifester par des accès douloureux dans les conditions de préparation et de stérilité requises pour une inter-
ou des complications : cholécystite, angiocholite, vention chirurgicale. Si la dissection s’avère trop difficile ou dangeureuse
pancréatite aiguë… (suite par exemple à des adhérences ou à une position inadéquate de la
vésicule, à une hémorragie…), l’intervention peut se poursuivre par lapa-
• Le plus souvent, l’échographie abdominale rotomie classique. Cette conversion est peu fréquente (2 à 6 % des cas),
montre les calculs ; en cas de microlithiase, le malade doit être informé de ce risque avant l’intervention. L’explora-
l’échoendoscopie est très utile et permet l’examen tion peropératoire de la voie biliaire principale est indispensable au cours
du cholédoque. du geste chirurgical (laparoscopique ou non). Elle se réalise par l’intro-
duction transcystique d’un cathéter et par perfusion d’un produit de
• La cholécystectomie par voie cœlioscopique contraste (pour examen radiologique) ou d’un cholédoscope de fin calibre
est le traitement idéal de la lithiase vésiculaire (pour examen visuel).
symptomatique.
POUR APPROFONDIR
POUR EN SAVOIR PLUS
1 / Facteurs favorisant la lithogénèse Belghiti J. Résultats de la cholécystectomie par cœlioscopie. Gas-
• Âge : la prévalence de la lithiase biliaire augmente avec l’âge.
troenterol Clin Biol 1994 ; 18 : 1000-4.
• Sexe : en Occident, les calculs surviennent 2 à 3 fois plus fréquemment
chez la femme. Les hormones sexuelles féminines augmenteraient le Dowling RH, Mc Intyre N. Lithiase vésiculaire. In : Benhamou JP,
risque de formation de calcul. Borcher J, McIntyre N, Rizetto M, Rodés (eds). Hépatologie cli-
• Grossesse : la grossesse augmente le risque relatif d’apparition de lithiase nique. Paris, Flammarion, 1993 : 1107-34.
vésiculaire. Cependant ce phénomène est réversible : le sludge disparaît Johnston DE, Kaplan MM. Pathogenesis and treatment of gall-
après l’accouchement. stones. N Engl J Med 1993 ; 328 : 412-21.
• Poids : les calculs sont plus fréquents chez les sujets obèses, indépen-
demment du taux de cholestérol sérique.