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Messieurs Alain Trautman et Henri Audier


« Sauvons la Recherche »

Messieurs,
J’ai bien reçu les correspondances que m’ont adressées plusieurs chercheurs
membres de votre association me demandant ma position sur la loi de
programmation et d’orientation de la recherche (LOPR) actuellement en
débat devant le Parlement.
J’ai suivi ces débats et les propositions de votre association et tiens, avant toute
chose, vous remercier pour cette contribution civique au débat public sur un
enjeu national pour l’avenir de la nation.
Notre système de recherche, ce que j’appellerai le « système français de
recherche et d’innovation » (SFRI) souffre d’une double carence.
Elle est tout d’abord quantitative : le général de Gaulle nous avait laissé une
France devenue quatrième puissance industrielle du monde grâce à un effort
de recherche représentant 6% du PIB. De renoncements en renoncements,
sous tous les gouvernements, la préférence pour le facile et l’immédiat, le
sacrifice du long terme ont mené où nous en sommes.
Mais un effort budgétaire, aussi impératif qu’il soit, n’aurait que peu d’impact
sans une réforme profonde du système lui-même pour l’adapter aux défis de
la III° révolution industrielle qui ne sont plus les mêmes que ceux de la II°
pour laquelle il a été conçu.
Vous soulignez à juste titre que la recherche fondamentale ne doit pas être
soumise à l’impératif de priorité aux applications prévisibles. Le grand
philosophe libéral David Hume soulignait que la production de connaissance
fondamentale est un geste gratuit, pour l’amour de l’art. Nos compétiteurs
américains, dans les débats préalables à la mise en place du GPRA –
l’équivalent de notre LOLF – ont souligné que l’affectation d’indicateurs
quantitatifs à la recherche fondamentale aurait eu pour effet que l’on
découvrît jamais l’électricité ou la fission nucléaire.
Mais, bien sûr, cela doit être compensé par deux exigences :
• l’une qualitative d’évaluation de l’activité de recherche qui la maintienne
au plus haut niveau international, soit une revue par les pairs, constante
et d’un niveau d’ouverture et de variété suffisant pour compenser les
tendances inhérentes au conservatisme d’une communauté qui se
refermerait sur elle-même.
• L’autre est celle de la diffusion rapide vers le milieu socio-économique.
Je regrette à cet égard l’opposition qui est apparue dans les débats de
« sauvons la recherche » entre recherche et innovation. « L’innovation
est une invention qui a trouvé son marché » nous enseignait
Schumpeter, et une politique publique de la science ne peut avoir pour
objet le seul amour de l’art mais doit produire, à un terme qui n’est pas
toujours immédiat, des actifs technologiques tangibles.
Vos critiques essentielles vont à la création de l’Agence nationale pour la
Recherche (ANR). Je ne suis pas hostile par principe à la création de cette
agence. Il est nécessaire que l’Etat dispose d’une agence de programme qui
oriente la recherche vers les grands enjeux à long terme : les sources
d’énergie qui remplaceront le pétrole, les remèdes aux grandes pandémies,
l’évolution des technologies de l’information… Vous le savez, notre
recherche, déjà structurellement déficitaire, l’est encore plus lorsque l’on
regarde ses domaines, avec un sous-investissement dramatique dans le
secteur des technologies de l’information comme technologie générique, qui
est l’une des causes – malheureusement pas la seule – de notre décrochage
industriel.
Une ANR pertinente devrait avoir deux rôles en tant qu’agence de programme :
permettre un pilotage stratégique à long terme et transversal des grands
enjeux, et, par ce même fait, stimuler un décloisonnement de l’activité des
organismes de recherche, qui peuvent être emmenés par la pente naturelle
de l’entropie organisationnelle à se refermer sur eux-mêmes et à perdre en
efficacité. De même la création de l’Agence d’Evaluation de la Recherche
(AER) doit avoir pour objectif de maintenir la qualité de la production
scientifique dans tous les domaines, sans oublier les Sciences Humaines et
Sociales, cruellement absentes dans ce dispositif, au meilleur niveau de l’état
de l’art mondial et, bien sûr, de contribuer à son progrès.
Une autre de vos critiques, que j’approuve totalement, concerne le manque de
lisibilité du système, qui est le fruit du conservatisme de notre technocratie
qui empile les structures sans vouloir et savoir en supprimer aucune. Je serai
ici très clair : les organisations publiques qui ne sont pas, par nature,
soumises à la pression du marché, doivent se soumettre à des impératifs de
performance interne concernant la qualité de la production des laboratoires,
de la réalisation des thèses, de l’alignement des objectifs des organismes sur
la politique publique nationale de la recherche votés par la représentation
nationale. Beaucoup d’efforts, je le sais, sont réalisés actuellement au sein
des organismes, et je note avec satisfaction que le CEA, entre autres, s’est
doté d’une démarche qualité. Et bien sûr, comme vous le dites fort justement,
quand un organisme est devenu obsolète, il faut avoir le courage politique de
le réformer radicalement, voire de le supprimer, et non de le faire dépérir en
implantant un organisme parallèle.
Les premières des réformes à entreprendre sont celles des administrations
centrales des ministères de l’Education nationale et de la recherche qui n’ont
pas les capacités nécessaires et légitimes de pilotage d’une politique publique
de la recherche et font peser sur ses opérateurs une charge bureaucratique
préjudiciable.
Ces points de convergence étant soulignés, je tiens à marquer mon désaccord
avec vos propositions en ce qui concerne le refus du lien entre politique de la
recherche, politique de l’innovation et politique industrielle.
Autant la performance d’une politique de la science ne doit pas dépendre
d’objectifs de performance économique à court terme, autant la performance
globale du développement économique et social national dépend de la rapidité
et de la qualité de la diffusion des produits de la recherche vers l’économie et la
société tout entière.
Cette diffusion de la science vers l’innovation passe par deux canaux : le
soutien aux PME basées sur la science et le partenariat avec les grandes
entreprises.
• Le manque de soutien au développement des PME basées sur la
science est criant dans notre pays. La politique de l’OSEO – ANVAR est
très timide au regard du dynamisme de nos grands compétiteurs en ce
domaine. Une politique intelligente de pôles de compétitivité serait de
valider la cohérence interne de ces pôles par la présence des trois
composantes d’un système d’innovation : la recherche universitaire, un
bassin industriel disposant d’atouts technologiques (connaissance tacite
héritée des points forts de l’industrie existante ou en déclin) et une
capacité de financement adaptée à la prise de risque par des
innovateurs qui n’ont, par définition, par de visibilité marchande.
• La faible implication des grandes entreprises dans le dispositif de
recherche. La financiarisation de l’économie et la dictature de
l’actionnaire privilégient les investissements à court terme, rendant non
pertinents les investissements en R&D. L’entreprise française a un
budget moyen de R&D inférieur à celui de l’entreprise moyenne
européenne ou allemande et l’intensité de sa recherche industrielle est
une des plus basses des pays occidentaux (3,1% contre 4,2% au Japon,
4,3% en Allemagne, 4,9 aux USA, 6,5% en Suisse et 7,9% en
Finlande !). En outre, il est regrettable que des préventions héritées
entre secteur public et secteur privé ne permettent pas une plus grande
collaboration : les entreprises ne sous-traitent que 1,3% de leur R&D aux
universités et organismes de recherche qui n’en tirent que 2,5 de leurs
ressources.
Je voudrais clore cette revue des points clés d’une politique de la science et de
l’innovation par la question, que vous jugez à juste titre cruciale, du
financement.
Nonobstant ces réformes structurelles, organisationnelles et culturelles
indispensables, l’effort financier qui doit être fait pour rester dans la
compétition mondiale est considérable.
La situation de notre pays devient maintenant dramatique : aucun budget n,’a
été voté en équilibre depuis 1974, sans que cela ait contribué à
l’accroissement de nos actifs scientifiques et technologiques. Chaque
Français a maintenant une dette envers l’Etat de 17 500 euros, un Etat
boursouflé, sans stratégie, dont la charge bureaucratique pèse sur l’activité
de chacun alors que nous avons besoin d’un Etat fort et stratège.
Aussi, je formulerai quatre propositions :
• Sortir les dépenses de recherche des funestes critères du pacte de
stabilité, afin de permettre une politique contracyclique d’investissement
dans la science et la constitution d’actifs technologiques.
• Compte tenu de la réduction de nos marges de manoeuvre budgétaires
et pour sortir de la chappe bureaucratique du PCRD, de lancer un grand
emprunt entre pays d’Europe ayant des enjeux communs :
développement durable, politique de l’énergie, infrastructures, R&D
partagée…
• Installer une politique de financement des PME basées sur la science
par une affectation d’un pourcentage des achats des administrations (à
l’image des small business innovation research programmes
américains), ce qui nous est actuellement interdit par la politique des
marchés publics imposée par l’Organisation de Bruxelles.
• Affecter à la recherche les gains de productivité interne réalisés par les
administrations publiques, dont j’évalue le montant au minimum à 20%
des 100 milliards des frais de structure du budget de l’Etat.
Quoi qu’il en soit, c’est avec l’ensemble des acteurs de la politique de la
recherche et de l’innovation, dont votre association, que cet enjeu national et
les conditions pratiques de sa mise en œuvre doivent être discutés. Je profite
de l’opportunité que vous m’offrez pour m’élever contre l’expulsion
ignomineuse du mathématicien Laurent Lafforgue du Haut Conseil sur
l’Ecole, qui n’ira pas bien loin s’il expulse toute opinion divergente et ne
rassemble que les vassaux fidèles du processus de destruction de notre
système éducatif depuis plus de trente ans.
Aussi je vous propose d’organiser ensemble cette concertation et ce débat
public, dont je me propose de porter les enjeux au cœur du débat politique.
Je vous propose que nous nous rencontrions au plus tôt pour en définir les
modalités.

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