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Editorial
Sujet tabou
LE MONDE | 14.11.09 | 14h26 • Mis à jour le 14.11.09 | 14h26
Alors que le modèle de la famille à deux ou trois enfants s'impose dans le reste de l'humanité, le
foyer africain à cinq enfants reste la norme moyenne. Un tel dynamisme démographique pourrait
favoriser un développement accéléré du continent. Il est au contraire synonyme de pauvreté, de vie
écourtée (53 ans en moyenne) et de risque majeur pour les femmes (une sur vingt-deux meurt en
couche au sud du Sahara). Certes, les tendances longues contredisent le cliché d'un continent
inerte, définitivement enfoncé dans ses traditions, qui font d'une famille nombreuse la seule
assurance possible pour les vieux jours. Sans parler du Maghreb, où les deux enfants sont déjà la
norme, la fécondité baisse lentement mais sûrement en Afrique subsaharienne.
Mais, à la veille de l'ouverture d'un "sommet" de l'Organisation des Nations unies pour
l'alimentation et l'agriculture (FAO) consacré à la sécurité alimentaire, lundi 16 novembre à Rome,
il est difficile de ne pas voir dans la démographie l'un des facteurs aggravants de la malnutrition.
D'autant que, parallélisme des chiffres, ce sont aussi 1 milliard d'hommes (dont 265 millions sont
africains) qui, selon la FAO, souffrent de la faim.
Si la baisse de la natalité n'est sûrement pas une condition suffisante du développement, elle
apparaît, partout dans le monde, comme une tendance concomitante au décollage économique.
Cette vérité d'évidence est loin d'être partagée par les décideurs africains, qui regardent pourtant
avec envie l'évolution de la Chine. La procréation et la famille demeurent des sujets tabous dans
les sociétés africaines, qu'aucun responsable politique soucieux de popularité n'a intérêt à aborder.
Les bailleurs de fonds occidentaux, eux, plutôt que d'agiter l'épouvantail de l'explosion
démographique africaine, vecteur d'émigration et de terrorisme, se montreraient plus
convaincants dans leurs défense du contrôle des naissances s'ils rompaient avec leurs égoïsmes et
leurs subventions agricoles, pour aider massivement les paysans africains à nourrir tous les
enfants du continent.
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