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L e Q uo t i d i e n
d es Mu n i c i p al es 2 0 0 8
r é a l i s é p a r l e s é t ud i a n t s
d e l ’ É c o l e s u p é r i e ur e d e
jo u r n al i s m e d e L i l l e
de mars N um é r o 9
Lu n d i 1 7 m a r s 2 0 0 8
Photo : GA
Le maire sortant
Jacky Hénin,
hier lors du
dépouillement.
Sa concurrente
UMP Natacha
Bouchard lui
a ravi la plus
grande ville
communiste
de France.
O
L’ É V É N E M E N T
Giflés
«
La po li tiq ue e st u ne b a ga r re.
Les éch auff ourée s munici -
pa le s d éb ou che nt s ur d es
b on n es pa ire s d e cla qu es .
Les comm u ni ste s on t été g i-
flfléé s à C a l a i s , s o u s l e u r p a -
Par Joël Bronner
tro na g e de pui s 1971 et tom -
b ée d an s l ’ esc arce ll e d e la
d roi te. L es “ bo urge ois ” re -
pre nn en t l es cl és d e C al ai s.
A vec en pl us l a ch u te de
n l’a fait ce truc ! », mâ- de l’ambiance de victoire. « Je veux un travail, je veux
Mo ntre ui l l a b an l ie us ard e d e
choires et poing serrés, que ça change à Calais. C’est pour ça que j’ai voté pour
Sei ne-Sai nt-Deni s, p as sée
sourire victorieux aux lè- Natacha Bouchart et que je suis venue ce soir. »
d an s l es m ai ns ver te s de
vres, Philippe Blet, nu- À l’heure de la victoire, une centaine de personnes est
D o m i n i q u e Vo y n e t , l a d é l i -
méro deux de la liste rassemblée dans la petite salle du QG de campagne de
qu es cen ce d u P CF au ni -
d’ouverture, n’a plus qu’une phrase à la bouche. Nata- Natacha Bouchart. Au milieu de la foule compacte, les
ve au na tio na l s e pou rs ui t au
cha Bouchart et son colistier déboulent devant les mili- deux têtes de liste sont chaudement félicitées. Les em-
niv eau local, mêm e si
tants pour célébrer la victoire. Le résultat d’une dizaine brassades succèdent aux encouragements émus. « Beau
Di epp e repa ss e sous dra -
de bureaux manque encore à l’appel mais les dés sont je- travail ! » les félicite-t-on.
pe au r ou ge .
tés. « C’est Calais qui a gagné ! » s’exclame-t-elle aux À 18 h30, la salle était pourtant presque vide, l’ambiance
P lu s i mpor ta n te vil l e d e
anges. Un tonnerre d’applaudissement lui répond. inexistante et les militants absents. Hormis une caméra,
g au ch e rav ie pa r la d ro ite,
C al ai s es t le s eu l m oti f de
« Après trente-sept ans de municipalité communiste, on les médias n’avaient pas parié sur la victoire de la liste
s a t i s f a c t i o n p o u r l ’ U M P. L e
avait besoin de respirer. Ce soir, nous sommes fiers d’être d’ouverture. Une heure et quart plus tard, c’est la cohue :
pa r ti de l a m ajo rité a reçu
Calaisiens. » les mouches ont changé d’âne.
u n e cla qu e. À L il le co mm e
Pour Philippe Blet, dissident so- D’abord une vingtaine, la foule des
a i l l e u r s , i l l a s e n t a i t v e n i r, t e l
cialiste qui a rallié la liste dite militants grossit progressivement.
« HÉNIN DEHORS ! »
l ’e nf an t qu i a f ai t u n e gr oss e
d’ouverture, « c’est un grand mo- Au fur et à mesure des résultats,
bêti se . Mini stre s et poli -
ment. J’avais appelé cette liste In- l’exaltation monte d’un cran. Les
ti que s éti qu etés UMP o nt
on a eu l’intelligence et le courage de rassembler des scores avec une anxiété teintée d’optimisme. Les pre-
g ie r d er ri ère u n t au x d’ a bs -
sensibilités différentes. Nous avons suscité un grand es- miers résultats positifs sont accompagnés par des ap-
tenti on p our t ant p as plus
poir et nous avons maintenant une grande responsabi- plaudissements nombreux mais timides. On n’ose pas en-
él ev é qu ’i l y a s ept an s , l e
ra z-de-ma rée s oci alis te an-
lité face aux électeurs. » Puis il se félicite en tant core y croire. Un bureau qui échappe à la liste et on
n o n c é a d é f e r l é . To u l o u s e ,
qu’homme de gauche d’avoir su rassembler les Calai- relativise : « Delaroche, c’est communiste de toute fa-
S t r a sb o u rg , P é r i g ue ux ,
siens grâce à une liste d’union. çon », lâche-t-on dans les rangs.
Rei ms o n t b as cu lé à ga u che .
Dans les rangs des militants, on a encore du mal à réali- 19 h45 : le QG fait maintenant salle comble. « Hénin
Ni col a s Sark ozy po ur ra se
ser. « Je n’arrive toujours pas à y croire. La dernière se- dehors ! » Une fois la moitié des bureaux dépouillés,
co ns ol er av ec l e ba sti on
maine de campagne a été particulièrement stressante. Et Bouchart fait la course en tête avec 53 %. Les poings se
ma rs eillai s et la défa ite de
là, ce soir, jusqu’au bout, on n’était pas sûrs de l’em- lèvent, les rires fusent. On le sait, la victoire est acquise.
Fr a n ç o i s B a y r o u à Pa u , l ’ a r -
porter », raconte Joëlle Lannoy, tête de liste numéro 29, Au milieu des sourires, un militant se lâche : « Vivement
r o se u r ar r o sé . Lu i q u i av ai t
les joues rougies par l’excitation. Accompagnée par deux qu’on puisse chanter la Marseillaise à la mairie, parce
g i flfléé u n e n f a n t l u i f a i s a n t l e s
de ses enfants, Priscilla, 37 ans, est, elle, venue profiter que l’Internationale, on l’a assez entendue. »
p o c h e s a r e ç u u n s o u f flflee t
Le PC rend
d an s s on B éa r n n ata l.
Le vo te sa nctio n à l’encontre
d e l’ h yper prés id en t a sa ns
les clés
doute pes é. Les s oci alis tes
c o n fifirr m e n t c e p e n d a n t q u ’ i l s
pa rai ss en t plu s d ou és pou r
a dm in is trer vi l le s et col l ecti -
vi tés l oc al es qu e l ’ Éta t jaco -
b in . A près le s rég io ns et le s
d épa r teme nts , l es vil l es pe n-
chent encore un pe u plus à
Par Gaël Arcuset
g a u c h e . Pe u i m p o r t e p o u r
Fr a n ç o i s F i l l o n , q u i c o n t i -
« Je suis extrêmement attristée qu’il ne tout de même constater que la gauche
nuera à m ener les ré for me s
soit pas réélu, soupire Malika. Il a fait est bien implantée dans le Nord et le
en bon pè re de fa mille. I l es t
énormément pour la ville de Calais. » Pas-de-Calais. Quant au PCF, il ac-
d e s g i flflee s q u i l a i s s e n t p e u
Nicolas Kienast Pour les sympathisants commu- quiert Dieppe. Ce n’est pas rien »,
de trac es.
nistes, « c’est une catastrophe. Nata- nuance Jacky Hénin.
cha Bouchart s’est attaquée à un François Dubout, candidat an-
homme, en aucun cas à un parti. » ciennement Front national, est
Pour le maire sortant, ses adver- ravi : « Le livre noir du communisme
saires « ont voulu flinguer le soldat calaisien se ferme enfin, explique-t-il.
Hénin. » Avec réussite ? « Absolu- Les Calaisiens vont retrouver leur li-
LA PRESSION de mars
«J
Photo : GA
ment pas, répond le premier intéressé. berté de pouvoir donner vie à leur ville.
Je serai dans l’opposition et défendrai Les résultats de ce soir sont le fruit du
Quotidien réalisé par les étudiants de l’ESJ, de Jacky Hénin, hier, après
’assume cette défaite. » Il est pas dans l’abandon. C’est hors de tamé en 2004 », ajoute-t-il, non sans
Refermentation et maturation - Directeur
de la publication :
21 heures, les résultats du question. » Touché mais pas abattu, un cynisme certain.
Pierre Savary
second tour des élections Jacky Hénin. Aujourd’hui, Jacky Hénin ne jouit
Fermentation - Directeurs adjoints de la
Jacky Hénin (PCF), maire sortant maire de Calais (1971-2001) C’est une évidence. Pour autant,
Jacky Durand, Sylvie Larrière,
Cyril Petit et Yves Sécher
n’obtient que 45,98 % des suf- avoue être « très déçu par ce résul- pas question de remettre en cause
Houblonnage - Rédacteurs en chef :
frages. Il n’est pas reconduit dans tat. Je suis surpris. Je ne m’atten- la place du Parti communiste au
Marc-Antoine Barreau, Nicolas Kienast,
ses fonctions. Natacha Bouchart dais vraiment pas à une défaite de sein de la municipalité. Et quand
Clémence Lambard et Flore Thomasset
(UMP), de la liste d’ouverture po- cette ampleur. L’action des adver- on demande au désormais ancien
Embouteillage - Rédacteurs en chef
pulaire et sociale, lui succède. Un saires de Jacky Hénin a finalement maire de Calais si son parti conti-
techniques :
Caroline Bozec, Florian Hervieux,
véritable bouleversement pour la porté ses fruits. On lui a tiré dessus nuera d’exister après le score du
Séverine Rouby et Guillaume Willecoq
ville de Calais. Depuis trente-sept à boulet rouge », souligne l’ancien second tour, sa réponse est sèche :
Sur le blog des municipales de l’ESJ,
ans, la cité était régie par une mu- édile. « Absolument. Il n’est pas près de
lire, écouter et regarder
nicipalité communiste. Au- Le résultat sans appel de Natacha s’éteindre. » Au vu des résultats de
les reportages des deuxièmes années :
http://chroniquesdemars.blogspot.com
jourd’hui, faucille et marteau cè- Bouchart prouve les difficultés du ce soir, les Calaisiens auraient ten-
dent leur place. PC à rester ancré à Calais. « Il faut dance à penser le contraire.
École supérieure de journalisme de Lille,
50 rue Gauthier-de-Châtillon, 59046 Lille Cedex.
Tel : 03.20.30.44.00. www.esj-lille.fr
Natacha Bouchart
peut avoir le sourire :
Photo : GA
elle vient de faire tomber
le bastion communiste
D
du score de leur candidat : pourrie. très rapidement de l’avance sur son adver- moribonds au niveau national et ne peuvent plus
guère compter que sur leur ancrage local pour conti-
saire. nuer à exister. Les municipales représentaient donc
Elle est conspuée par une partie de la foule. un enjeu de taille pour le PCF. De ce point de vue, les
imanche 16 mars. Alors que le ciel Jacky Hénin, en retrait, assiste à la scène. premiers résultats du second tour n’avaient rien de
calaisien s’assombrit, les gens se Grise mine. Il a du mal à rester en place. Ce rassurant pour le parti de Marie-George Buffet. À Ca-
lais, la défaite de Jacky Hénin face à Natacha Bouchart
pressent autour de l’Hôtel de ville. n’est pas son soir. a mis un terme à trente-sept ans de gouvernance
Non pas pour éviter les averses, mais bel et Au fil des minutes, Natacha Bouchart creuse communiste de la ville. Quelques minutes plus tard,
bien pour assister à l’annonce des résultats l’écart. Les militants communistes perdent c’était au tour de Dominique Voynet de s’imposer face
du second tour des élections. espoir. Le dépit se lit dans leur regard. Atte- au communiste Jean-Pierre Brard, maire de Montreuil
Dans le bureau de vote, Jacky Hénin (PCF), rés, ils n’osent plus lever la tête. « Quelle triste en Seine-Saint-Denis depuis plus de 20 ans. Pire en-
core, à Aubervilliers toujours en Seine-Saint-Denis,
le maire sortant, paraît plus tendu que la se- soirée », soupire l’un d’entre eux. bastion historique du Parti communiste,Pascal Beau-
maine précédente. Le dépouillement com- 20 h45. C’est officiel, Jacky Hénin ne ré- det a été battu par le socialiste Jacques Salvator. Un
mence. Plus le temps passe, plus son visage cupérera pas son siège de maire. Dans la résultat symbolique de la désunion entre le PCF et le
se crispe. Il regarde chaque bulletin de vote. salle, c’est l’effervescence. Des militants PS dans de nombreuses communes, et ce malgré les
appels répétés de Marie-George Buffet au « rassem-
Visiblement, il n’a pas le cœur à la fête. communistes fondent en larme. Certains blement de la gauche dès le premier tour ». Jusqu’en
Dès 19 h, la mairie pullule de monde. La poussent la chansonnette en l’honneur de 2001, l’appui des socialistes avait permis à de nom-
foule est là, en attente. Elle a envahi la salle leur ancien édile. Les électeurs de Natacha breux maires communistes de se maintenir, notam-
principale. Certains ont un foulard rouge au- Bouchart sont aux anges. Pour eux, l’ave- ment en Seine-Saint-Denis. Privé de ce dernier sou-
tour de leur poignet, en soutien à leur maire. nir s’éclaircit. tien, le Parti communiste pourra-t-il se maintenir
durablement ? Éric Filliastre
« Ouais Jacky », hurlent-ils. En réponse, cer- GAËL ARCUSET
L
Analyse des résultats avec le politologue Frédéric Sawicki.
Par Éric Filliastre
’dans
enjeu principal de ces élections,
la région, était la mairie
de la défaite du maire communiste sor-
tant, Jacky Hénin ?
d’Hénin-Beaumont. L’effondrement Cela prouve que la candidate de l’UMP, Nata-
du FN, qui stagne à 28 % des voix, cha Bouchart, a su rendre crédible sa liste
est-il surprenant ? d’ouverture. Elle a rallié certains poids lourds
Oui et non. On pouvait difficilement imaginer de la politique locale, comme Philippe Blet, an-
une victoire du FN au second tour. Cela dit, le cien secrétaire du PS à Calais. D’autre part, les
parti a tout de même progressé de 10 points électeurs ont sans doute exprimé une certaine
par rapport à 2001, et maintient une forte im- lassitude vis-à-vis d’un mode de gestion jugé
plantation dans les villes touchées par la désaf- trop clientéliste. D’autre part, les Calaisiens
fection du bassin minier. Plus d’un électeur sur font sans doute payer à Jacky Hénin la gestion
quatre a voté pour l’extrême-droite dans une de l’après-Sangatte, même si cela dépasse ses
commune marquée par les luttes sociales et compétences. Enfin, le retrait du FN a large-
une présence syndicale importante. C’est donc ment contribué à la victoire de Natacha Bou-
un bon score pour le FN. chart, bien que la candidate UMP s’en dé-
fende.
De son côté, Martine Aubry a été très fa-
cilement réélue avec plus de 66 % des Pourtant, la grande gagnante de ce scru-
voix… tin reste l’abstention. À Roubaix, elle a
En effet, elle a réalisé un très bon score. Cela dépassé les 60 %. Comment expliquer ce
Photo : EF
prouve que les électeurs du MoDem se sont record régional ?
Frédéric Sawicki, politologue
correctement reportés sur elle au second tour. Depuis longtemps, l’abstention est forte à Rou-
au Ceraps à Lille II
La maire sortante a su rassembler au centre et baix. Aujourd’hui, cette tendance tend à s’ac-
chez les Verts, mais a eu plus de mal à mobili- centuer. On est passé de plus de 50 % de parti- ment, l’abstention à Roubaix est symbolique du
ser les électeurs d’extrême-gauche, qui se sont cipation en 1995 à moins de 40 % aujourd’hui. malaise citoyen profond qui touche notre pays,
plutôt abstenus. Cela dit, Sébastien Huyghe ne Cela s’explique par l’arrivée massive de et qui ne s’exprime pas seulement lors des
réalise pas un mauvais résultat : il obtient plus jeunes issus de l’immigration, qui traditionnel- élections nationales. Pendant longtemps, on a
de voix au second tour que les scores cumulés lement votent peu, mais aussi par la particula- considéré que le maire était un personnage au-
du FN et de l’UMP au premier tour. rité du contexte politique local. Le candidat so- quel les électeurs étaient attachés. Les résultats
cialiste, René Vandierendonck, a d’abord été de cette année prouvent que cette tendance
Au cours d’une soirée électorale plutôt fa- élu sur une liste centriste. Cela a sans doute commence à s’inverser : plus d’un électeur sur
vorable à la gauche,Calais a basculé à brouillé les cartes et désorienté certains élec- trois ne s’était pas déplacé pour aller voter au
droite. Quels enseignements peut-on tirer teurs, qui ne se sont pas déplacés. Plus large- premier tour.
Un bureau de vote
L I L L E . Reportage dans les coulisses d’un bureau de vote
aux aurores
à Wazemmes. Loin de l’effervescence de ce quartier populaire,
les assesseurs tuent le temps dans une ambiance plutôt calme.
Par Benoist Pasteau
É
cole élémentaire Jules Michelet, travail, le tout avec un vouvoiement
Wazemmes, 7h55. Le président de rigueur.
du bureau de vote 623, Cédric
Pruvost, jeune trentenaire, arrive en Tranquille. Ils auront droit à deux
costume-cravate. Il s’occupe à la hâte pauses d’une heure : une pour aller
des dernières tâches administratives manger et une pour aller voter. « Moi
avant l’arrivée des premiers votants. j’ai fait une procuration », témoigne
Avant lui, deux employées munici- l’une des deux employées munici-
pales ont commencé le travail vers pales. Cédric Pruvost vote pour sa
6h15. Le temps de passer à la mairie part dans le bureau qu’il préside, à
chercher les bulletins de vote, d’ins- 8 h17, un quart d’heure après Yves
taller les isoloirs, les bulletins, les en- Aubry, le premier à glisser un bulletin
veloppes et l’urne. De faire du café dans l’urne de la journée. Le début de
aussi, car la journée va être longue matinée est plus que tranquille. À 9
jusqu’à 18 h. Trois minutes après le heures, au premier pointage, une pe-
président, arrive l’assesseur du bu- tite quinzaine de personnes ont voté,
reau, Yves Aubry, National Geographic soit un peu moins de 2 % des 801 ins-
sous le coude. Aucun lien de parenté crits. « Moins que la semaine dernière à la
avec Martine, d’autant qu’il est en- même heure », selon Yves Aubry. Cé-
carté UMP. « On a déjà l’habitude de se dric Pruvost a sa petite idée sur le
lever tôt en semaine, donc ça va, positive- pourquoi d’une si faible fréquentation:
t-il. Et puis on a de la lecture : la semaine « Nous sommes à Wazemmes, beaucoup
Photo: Jonathan Roux
dernière, j’ai relu Pierre et le loup », de gens viennent avant et après la messe,
Rares sont ceux plaisante l’homme aux cheveux poi- et puis d’autres après le marché ». Pour
qui vont voter vre et sel en regardant la collection de les quatre permanents, la journée se
dès l’ouverture livres pour enfants d’une des classes déroulera dans cette classe, loin de
des urnes. de l’école. Ils parlent de la pluie et du l’effervescence des dimanches à Wa-
beau temps, de leurs enfants, de leur zemmes.
«
Par Benoist Pasteau
À l’UMP,
contre
Un score historique
Sébastien Huyghe promet
mauvaise
La maire sortante annonçait un
fortune…
“score historique” au deuxième
tour. Elle réalise plus de 66 % des
suffrages face à Sébastien Huyghe,
le candidat UMP. Pierre Mauroy, in-
déboulonnable maire de Lille de
1977 à 2001, avait dû batailler face
à la droite au deuxième tour, réu-
nissant 55,43 % des suffrages en
1977, 52,82 % en 1983 et 53,85 %
Par Françoise Marmouyet en 1989. Seule l’élection de 1995,
O
une triangulaire, avait érodé ses
suffrages : 48 %.
«
« Il a toujours été convenu d’une al-
n aurait pu écrire une belle histoire, mais le cas- Photo : Françoise Marmouyet
liance avec les Verts au second tour,
ting n’était pas à la hauteur. » Ce jugement en cas de triangulaire », avait dé-
claré Martine Aubry au soir du pre-
sans appel est celui d’Honoré Benoit, un est à la mairie en compagnie de Brigitte Mauroy, la mier tour. La liste écologiste d’Eric
militant UMP. Corpulent, bonhomme, il pense déjà numéro deux. Dans la foule, un invité surprise : Quiquet pesait 11,58 % des suf-
« au bon casting pour 2014 ». Il est 19 h 30, les sympa- Etienne Forrest, le candidat du centre qui a atteint frages dimanche dernier. Voilà que
thisants savent déjà que leur candidat est loin der- péniblement les 1 % au premier tour. « Je soutiens Sé- ses voix viennent nourrir le score
rière Martine Aubry. Dans le QG, un petit local de bastien et je suis scandalisé par l’alliance Aubry-Richir. » de Martine Aubry, comme en 2001,
où celle-ci avait proposé sept
60 m2, ils se pressent, pas vraiment déçus, plutôt ré- Autour de lui, on acquiesce. postes de conseillers aux Verts.
signés et prêts à en découdre. L’abstention, qui at- Dans un coin, un groupe a allumé la télé. Il est
teint les 56 %, occupe les esprits. « Vous vous rendez 20 h 10. Sur France 3, les résultats tombent : Cette fois-ci, l’ouverture est allée
jusqu’au MoDem, qui lui a apporté
compte, ça signifie que seuls 28 % des Lillois ont voté pour 34,44 % pour Huyghe, 66,56 % pour Martine son soutien. Pourtant, Aubry n’avait
Martine Aubry », commente Jacqueline Vidal, 20e sur Aubry. Certains huent la maire sortante. Un jour- pas besoin des voix écologistes ni
la liste de Sébastien Huyghe, comme pour minimi- naliste annonce qu’elle aurait des visées de première centristes pour conserver le bef-
ser la défaite. Déjà, l’heure est au bilan. Une mili- secrétaire du PS. « Ben tiens, évidemment, Lille n’est froi. L’UMP est elle à la dérive, Sé-
bastien Huyghe, sa tête de liste,
tante UMP :« Nous avons manqué de coordination entre qu’un marchepied ! », commente un sexagénaire. bute à 33 %. Sa victoire aux législa-
les équipes sur le terrain et le staff de campagne. » « Il va Soudain, c’est l’arrivée de Sébastien Huyghe et Bri- tives semble déjà loin. Martine
falloir remobiliser les équipes et continuer à travailler », gitte Mauroy. Il serre quelques mains, distribue des Aubry a maintenant la présidence
poursuit Honoré Benoit. « Y’a toujours pas à boire ? », bises, souriant. « Je ne suis pas déçu, maintenant on va de LMCU à portée de fusil. Elle suit
lance un jeune. La député européenne Tokia Saïfi, construire une opposition », glisse-t-il. Pas de bravos. Ce le sillon tracé par Pierre Mauroy.
en quatrième position sur la liste, fait son entrée, n’est que lorsque, juché sur une table, il remercie les Frédéric Coulon
mine défaite : « On n’est pas au mieux. » Sourires de fa- militants et promet de « poursuivre le combat dans l’op-
çade. Tous attendent la tête de liste, qui, pour l’heure, position » qu’il a droit à une salve d’applaudissements.
et on recommence
Page réalisée par Gaël Cogné
RAS à Hénin-
Beaumont
H É N I N - B E A U M O N T.
Pas de surprise dans la
ville du Pas-de-Calais.
Le maire sortant PS,
De la pluie, des rues vides, une journée d’ennui. Pas
M
Gérard Dalongeville, d’excitation, pas de ferveur, pas d’angoisse. Ce se-
cond tour des élections municipales ressemble à tous
les dimanches gris que peut connaître la petite ville
l’emporte largement
(51,94 %). Le candidat du Pas-de-Calais.
16 h, au bureau de vote de la salle des fêtes. Il y a
frontiste, Steeve Briois, plus de caméras de télévision que de votants. Les
journalistes s’ennuient et papotent. Un électeur ren-
tre. Trois appareils photos et deux caméras se ruent
ne totalise que
28,83 % des votes. sur l’homme devant l’urne. Et puis s’en vont.
Un assesseur rapporte qu’on a voté « pareil qu’au pre-
mier tour ». Même constat au lycée Henri Senez (l’un
des plus gros bureaux) et à l’école maternelle Ponti-
gnie.
«
À la sortie des urnes, les jeunes trouvent que le maire
sortant n’a pas fait assez pour eux. Les actifs, que les
impôts ont trop augmenté. Les chômeurs, qu’il n’y a
pas assez de travail. Un employé de la mairie votera
pour le maire, parce qu’il lui a trouvé un appartement
Les grands vainqueurs du second tour : Marie-Noëlle
et un emploi.
Lienemann (députée socialiste européen), Annick Genty
Côté Front National, on essaie de faire bonne mine.
(PS) et Gérard Dalongeville (maire sortant PS). Photo : GC
Mais ce n’est pas facile. Des délégués ou colistiers
sont dans tous les bureaux de vote. « C’est sûr qu’on a
euh… euh…comment dire… un petit coup », lâche
Martine Fontaine qui cherche ses mots. Pour elle, « il
n’y a pas eu d’abattement ». Éric Ostrowski est plus di-
rect : « On s’attendait à plus, c’est sûr. Je n’y crois pas
tellement. Les gens sont trop laxistes. » Martine Fon-
arine, prend le TGV ! », « Ma- Au QG de Duquenne (candidat DVD), taine reprend : « Il y a même des adhérents qui ne sont
rine à Paris ! », scande la on est forcément déçu. Seulement trois pas venus voter. »
foule. La salle des fêtes s’est sièges au conseil municipal. On se Marie-Noëlle Lienmann passe dire bonjour et vérifie
que tout se passe bien. Pas de déclaration ? « Bof, je
bien remplie depuis 18 h : console en disant qu’au moins il y aura n’ai rien à signaler. »
des fidèles de Gérard Dalon- une opposition républicaine à Hénin- 18 h. Fermeture des bureaux de vote. 554 personnes
geville, maire sortant. L’hos- Beaumont. ont voté, cette fois-ci. 560 au premier tour. Jean-Pierre
tilité envers la liste du candidat Front Au Front National, on tâche de sourire, Chruszez, colistier de Gérard Dalongeville (PS), s’in-
National est palpable. Une femme souf- de se montrer positif. « Ce que l’on ne dit quiète un peu. « On a moins voté dans les bureaux, où
on a fait un bon score. Plus dans ceux où on a fait un
fle dans ses mains, stressée. Les premiers pas, c’est que le Front National fait 10 % de mauvais score. » Avec 51,94% hier soir, le maire sor-
résultats tombent, son visage s’éclaire. moyenne aux cantonales. Des élections beau- tant a balayé cette inquiétude.
Steeve Briois est à moins de 30 %, on le coup plus politiques. C’est deux fois plus
hue. Dalongeville a plus de 50 % et l’as- qu’aux législatives. Ce sont des résultats en-
sistance lui fait un triomphe. Les rares courageants », argumente Marine Le Pen,
opposants se font très discrets. sur la défensive. La foule scande « Ma-
Dans son fauteuil, le maire sortant PS rine, Marine, Marine » et se reprend « Ma-
sourit, ricane, trépigne, badine. « Bouh, rine, Steeve, Marine, Steeve ». Ce dernier
bouh », souffle-t-il contre Steeve Briois, à prend la parole : « Nous avions fait 17 %
l’écart du micro. Il goûte l’instant, rouge en 2001. Nous faisons 29 %, cette fois. Je
de plaisir. Puis il prend la parole : « C’est reste très positif. »
une grande satisfaction. Nous avons gagné Interrogé sur l’opportunité qu’une si-
sur le terrain des idées. Nous avons gagné ce tuation aussi favorable [NDLR : de
combat contre le FN. » Une femme pleure grosses dissensions au sein de la gauche]
à ses côtés. Gérard Dalongeville se sent se représente pour lui, il botte en
en verve : « Steeve Briois disait : “Si nous touche : « Je suis optimiste, nous gagnerons
ne sommes pas élus, c’est que nous sommes un jour où l'autre. Moi, je n’ai pas acheté des
des cons.” Quelque quartiers entiers. Je peux me regarder dans la
JE RESTE part, c’était un vision-
naire ! » Il n’hésite
glace », faisant allusions aux rumeurs ac-
cusant le maire sortant de clientélisme.
TRÈS POSITIF” pas à affirmer qu’il a Le candidat du Front National campe
Steeve Briois, candidat FN malheureux vécu une campagne sur ses positions : « Quand les gens auront
diffamatoire. Il se leur porte-monnaie vide à cause des impôts du
lève sur sa chaise et frappe des mains. Le maire, nous serons là. »
sourire accroché au visage. « C’est une vic- Retour dans la salle des fêtes acquise à
toire des valeurs de la République face à l’ex- Dalongeville. Ainaoui Zakia et ses
trême-droite. » sœurs sont venues acclamer le maire.
Dominique Volanti est venu montrer Elle est enchantée : « Je suis soulagée. »
qu’elle voulait « faire barrage au Front Na- Elle ajoute : « Mettez bien notre nom dans
tional ». Elle ne comprend pas que l’« on le journal, je suis employé municipale. Ça va
vote FN dans une ville minière comme me faire de la pub auprès du maire. Il se sou-
Hénin-Beaumont ». Les larmes aux yeux, viendra de moi. » On ne change pas les Au bureau de vote Henri-Senez,
elle se dit « soulagée ». bonnes vieilles habitudes.
affluence banale. Photo : GC
est ici », lâche t-il devant une centaine de sym- queur du jour de « draguer » l’électorat ma-
pathisants.Quelques minutes avant l’annonce ghrébin en indiquant « les origines juives » de
officielle des résultats, rien ne laissait présager Jacques Mellick. Une gué-guerre des clans.
un tel scénario. « Il a été confiant toute la journée, Cette victoire historique sonne le glas des as-
souligne Daniel Boys, conseiller régional (PS). pirations politiques de Jacques Mellick dans le
C’était du 50-50. Malheureusement, cela a penché Béthunois. Battu l’an passé aux législatives, il
au dernier moment. » ne joue plus aucun rôle sur la scène politique
Depuis 1977 et son élection à la tête de la ville, locale. A 67 ans, l’ancien Secrétaire d’État à la
Jacques Mellick « s’est efforcé d’unifier la ville », Défense du gouvernement Rocard a, semble-
ajoute le conseiller régional. Preuve en est, les t-il, définitivement tourné la page. Même si les
quartiers populaires ont massivement voté scores affichés dimanche ne sont pas ridicules.
pour lui. « Je ne baisserais pas les bras », glisse-t- « Il a tout de même réussi à gagner 12 à 14 points
il à ses militants. Frappé d’inéligibilité suite à dans l’électorat populaire », admet Daniel Boys.
un faux témoignage dans l’affaire VA-OM, Le front anti-Mellick a tiré son épingle du jeu.
Jacques Mellick avait réussi, en 2002, un re- « Il fallait tuer Mellick », rappelle un militant so-
tour triomphant. Chose qu’il n’a pas su réédi- cialiste. C’est désormais le cas. Et seuls huit
ter en 2008. militants du Parti socialiste siègeront au
R
Jacques Mellick
a perdu le sourire. Les projets trop ambitieux du candidat Mel- conseil municipal.
Pour lui,
lick ont-ils fait pencher la balance ? La hausse Les valeurs de Béthune se portent maintenant
le combat,
des impôts durant son dernier mandat (5,5 %) à droite. Aujourd’hui, le réveil est difficile pour
ont agacé les Béthunois. Jacques Mellick. Com-
« JE SUIS L’HOMME
à Béthune,
Étonnant « pour un ment se relever d’un tel
continue.
homme qui pensait avant échec ? « La vraie gauche,
QUI SE RELÈVE »
Photo GC
À
Par Imanol Corcostegui
« Pas de chance, on a pas de PMU dans le rire matinal. « J'ai l'habitude d'aller au
coin, explique Roselyne, assesseur du marché aux puces de bonne heure le di- venu se manifeste. Tous ont plus de « Un petit coup de ménage » pour Pa-
bureau de vote de la mairie de Rou- manche. Je préférais passer par là avant. » 40 ans. Habitués à être debout tous trice, 49 ans. « Je vais m'installer devant
baix. Dimanche dernier, il y avait beau- « Le 53 ! », clame le second assesseur. les week-ends dès la première heure, la télé », raconte Yves, gardien d'im-
coup de gens qui étaient là tôt le matin : « Non, le 63 !, rectifie Roselyne. Ah ils voient leur dimanche perturbé par meuble sexagénaire. Leurs bonnes
certains passaient avant d'embaucher, non, le 53 en effet ! » Les membres du cette tâche citoyenne et préfèrent s'en volontés ne suffiront pas à sauver les
d'autres avant de partir déjeuner en fa- bureau ont bien du mal à émerger. débarrasser au plus vite. Avant de re- meubles. Hier, à Roubaix, seuls
mille, des Français qui vivaient en Bel- Toutes les cinq minutes, un nouveau prendre leurs occupations habituelles. 40,18 % des électeurs ont voté.
finalement rose
H A L L U I N . Le scénario à suspense aura
duré jusqu’à la dernière minute.
La campagne , faite de rebondissements,
de divisions et de ralliements a profité
au maire sortant, Jean-Luc Deroo.
Dur de briser les traditions.
«
B
Par Sophie Bouillon
attendre les derniers résultats pour que les suppor- a toutefois élu le député Christian Vanneste (UMP) curité... surtout avec nos voisins belges », rappelle-t-elle
teurs de Jean-Luc Deroo puissent exploser de joie et aux dernières législatives, et avait voté à plus de devant une cliente flamande. Ce bilan en demi-teinte
brandir leur pancarte. Comme si le maire sortant 58,4 % pour Nicolas Sarkozy il y a un an. Cinq a failli coûté sa place au maire sortant. Mais le so-
avait fait exprès de garder le suspense jusqu’à la der- points au-dessus de la moyenne nationale, la tradi- cialiste Jean-Luc Deroo a bénéficié d’une droite ex-
nière minute, pour annoncer les résultats du seul bu- tion n’est pas immuable quand il s’agit de scrutins trêmement divisée tout au long de la campagne du
reau de vote où il prend une avance remarquable : nationaux. Quant aux communistes, « c’est une espèce premier tour et qui a peiné à oublier ses querelles lors
394 voix contre 227. Un sprint final pour la beauté en voie de disparition qu’il faut protéger », avoue Alain, du second tour. « L’ambiance au sein du groupe n’était
du sport. un Halluinois, fils d’immigrés espagnols qui ont fui pas favorable », consent Gustave Dassonville. Ses
C’est finalement avec 51,75 % que le maire sortant le régime de Franco. concurrents jugent l’ancien directeur de cabinet de
reconduit son titre et poursuit dans la tradition so- L’échec de la base de loisirs Flots Lys a ruiné la ville Christian Vanneste un peu trop arriviste. Et visible-
cialiste de la ville. Située sur la frontière belge, cette et pèse dans le bilan du maire sortant. « Ça a détruit les ment les tensions se ravivent face à la défaite, puisque
commune de 20 000 habitants n’a jamais connu de petits commerces de centre ville », regrette Joëlle, tenante le challenger malheureux conclut qu’il était « le seul à
mairie de droite. Surnommée “Halluin la Rouge” d’un bar-brocante. « On a besoin de dynamisme écono- pouvoir gagner dès le premier tour. Mais comme ils vou-
pour son héritage communiste d’après-guerre, la ville mique dans cette ville. Et il y a aussi des problèmes de sé- laient tous être tête de liste, on est parti divisés ».
Villeneuve-d’Ascq. Lens.
Au bureau central, Delcourt gagne le match
D L
on observe plus qu’on ne vote contre la désunion de la gauche
ans la plupart des villes, le gauche). Un drôle de second tour ens vibrait deux fois ce soir. Pour écharpe du club sur les épaules, le sup-
bureau central est l’un de qui a fait office de baptême de la la réélection de Guy Delcourt, le porter ne peut s’empêcher de mêler
ceux où l’on vote le plus. citoyenneté pour beaucoup de Vil- maire socialiste. Et pour son analyses sportive et politique : « C’était
Pourtant, à la mairie de Ville- leneuvois venus glaner les pre- équipe de foot qui affrontait l’Olym- sûr que Lens resterait un bastion de gauche
neuve-d’Ascq, seuls 464 électeurs mières estimations. « Je suis venue pique de Marseille au stade Bollaert. et c’est tant mieux. » Sandwich à la main,
se sont déplacés hier. Dix de dépouiller pour avoir les résultats Premier coup d’envoi : 20 h. Le match Guillaume est prêt pour aller au
moins qu’au premier tour. La par- avant tout le monde. Bien sûr, on voit des municipales est enfin terminé. match. Ce soir, « c’est pour toute l’équipe
ticipation a péniblement atteint certaines mines se défaire au fur et à « Merci d’être venus surtout en ce soir de que je vote et non pas pour un joueur en
40 %, contre plus de 58 % sur l’en- mesure », affirme Noura Chouarra, match important », lance Guy Delcourt, particulier ».
semble de la commune. « Ici, c’est qui a dépouillé pour la première maire PS sortant. Une petite référence Les candidats battus se prennent éga-
un des bureaux de vote où on participe fois le 9 mars. à la rencontre Lens-Marseille avant de lement au jeu du commentaire poli-
le moins, et ce ne sont pas les mêmes Les supporters de Gérard Cau- célébrer sa victoire. Malgré un passage tico-footballistique. Annie Saint-Ar-
électeurs que la semaine dernière qui dron n’ont pas eu à attendre bien obligé par le second tour – une pre- noult, la candidate Divers gauche
sont venus », explique Lahnissa longtemps pour saluer leur cham- mière dans l’histoire de la gauche len- (DVG), a obtenu 11,97 % des suf-
Madi, conseillère municipale sor- pion : avant même l’annonce des soise –, le maire sortant est finalement frages. « On est comme une petite équipe
tante et présidente du bureau de résultats définitifs par le maire reconduit avec 48,37 % des voix. de foot contre une grosse cylindrée de
vote. sortant, il s’est félicité de son Avec un taux d’abstention de 50,73 %, Ligue 1 », rétorque-t-elle.
Le bureau de vote s’est subitement score. « Ça n’est pas une victoire, jugé « inquiétant » par le maire, les Len- Deuxième coup d’envoi : 21 h. Au
rempli un peu avant 18 h. L’objet c’est un raz-de-marée », a-t-il lancé, sois se sentaient beaucoup plus concer- stade Félix Bollaert, le match Lens-
de la convoitise de ces centaines fort d’avoir obtenu 58,83 % des nés par la rencontre footballistique que Marseille commence. Louisette, la sup-
de Villeneuvois : l’écran géant qui voix contre 27,22 % pour son ad- par le combat électoral. On s’aggluti- portrice la plus connue du Racing club,
affichait en temps réel les résultats. versaire. Didier Plancke (UMP) nait plus devant le stade Bollaert que préférait l’ancien maire de Lens,
L’enjeu était de taille : trois listes n’a obtenu que 13,95 %. « Un devant la mairie. André Delelis, même si elle habite
s’affrontaient, dont deux étique- maire sortant, même si on n’est pas Dans la salle Richart, au deuxième Beuvry. Les résultats des élections,
tées à gauche et menées par deux d’accord avec ce qu’il a fait, mérite le étage de la mairie, ce n’est pas les sup- c’est dans les tribunes qu’elle les vivra.
anciens maires arrivés en tête au respect lié à sa fonction », a lancé porters lensois qui se sont réunis mais « Mes gosses m’enverront un SMS. » Un
premier tour. Jean-Michel Stieve- Gérard Caudron, sobre, avant de ceux du maire socialiste. Pour Guil- message que beaucoup de supporters
nard, maire sortant socialiste, avait préciser que Jean-Michel Stieve- laume, 20 ans, fan du Racing club recevront ce soir dans les gradins pour
obtenu un peu plus de 27 % des nard n’aurait pas de poste dans avant tout, il n’y a pas de surprise. Son apprendre le nom de leur nouveau
voix contre 42 % pour son adver- son équipe. maillot “Sang et Or” sur le dos et son maire.
saire Gérard Caudron (Divers Séverine Fiévet Mélanie Carnot
Le jour
le plus long
D
Par Delphine Lacroix
imanche, jour d’élection, c’est maire sortant, paraît détendu : « On attend tran- décisif. » Le candidat sait de quoi il parle : depuis
pour beaucoup le marathon. Pas- quillement les résultats, pour savoir quel nombre de treize ans, il est conseiller de l’opposition.
ser d’un bureau de vote à l’autre, sièges nous aurons dans l’opposition. » Il manquait 18 heures : horaire de fermeture. Les derniers
vérifier que tout se déroule pour seulement neuf voix au maire sortant Bruno Fou- électeurs ont accompli leur devoir. Déjà, on met
le mieux. Michel Desmazières est sur la brèche cart pour passer dès le premier tour. Alors tout est en place les tables pour le moment crucial. « Cela
depuis 7 h 30. Maire sortant de Gondecourt, il d’ores et déjà joué. Malgré tout, l’intéressé s’est fait deux nuits que je ne dors plus, confie Daniel Top,
brigue un nouveau mandat. « Je veille au bon dé- levé très tôt : « J’étais debout à 6 heures, pour ouvrir mais je pense que c’est pareil pour tous les candidats
roulement du scrutin, explique t-il. C’est ce qui prime le bureau de vote. Et j’ai voté à 8 heures. » Après, il de France ce soir. » Une de ses colistières ajoute :
pour moi aujourd’hui. » Michel Desmazières jette faut bien que la journée se passe : « C’est la journée « Il carbure aux somnifères pourtant… » Il a les yeux
des coups d’œil à droite et à gauche. D’un côté, la plus longue de la campagne... », confie Sylvie Fi- cernés de fatigue mais ne manque rien du dé-
les électeurs votent pour les municipales. De gard, les traits tirés. Elle représente la troisème pouillement. Quelle que soit la commune, les
l’autre, pour les cantonales. L’homme se pré- liste en lice à Houplin-Ancoisne. En attendant, les candidats reçoivent les encouragements des élec-
sente également pour le candidats font le tour des teurs. Et les portables sonnent sans arrêt.
second scrutin. « J’ai pu
m’absenter de la salle poly-
« C’EST LA JOURNÉE bureaux de vote, pour of-
frir le café aux assesseurs
18 h 30. C’est l’effervescence dans la salle poly-
valente de Gondecourt. Une centaine d’habi-
valente pour voir comment LA PLUS LONGUE et leur amener de quoi se tants, mêlés à quelques candidats, assistent au dé-
cela se passait dans les com- restaurer. « Et puis de temps pouillement. Quelques visages souriants, mais la
munes environnantes », ex- DE LA CAMPAGNE... » en temps, on va boire un plupart sont tendus. Avant même le verdict, on
plique-t-il. L’air fatigué coup... », sourit Jacques pense déjà au lendemain : « Si on ne remporte pas
par une campagne de deux semaines, il dit se Bocquillon. Sylvie Figard est interpellée par un l’élection, on va créer une association pour défendre les
tenir en retrait : « Je ne peux pas mélanger les genres. habitant : « Finalement, tu es allée manger ou pas ? » intérêts de la ville », prévoit le numéro 4 de la liste
Je suis ici pour veiller à ce que tout soit bien préparé. » « Oui, quand même », répond-elle. Elle s’est laissée de Michel Desmazières. Les chuchotements font
Le portable collé à l’oreille, la main sur l’urne, il quelques minutes de répit à 13 h 30. peu à peu place au brouhaha. L’ambiance se
répond à son interlocuteur. Une conversation Mais la journée est loin d’être terminée. Direc- tend. L’annonce des résultats se fait attendre,
entrecoupée des traditionnels « a voté ! » qui in- tion Meurchin, dans le Pas-de-Calais. Autour de mais personne n’en perd une miette. 19 h 40 :
combent à tout assesseur. Daniel Top, deux de ses colistières et quelques « Chut ! » réclame un assesseur. Le silence règne,
Quelques kilomètres plus loin, l’angoisse est membres de sa famille. Il navigue depuis le matin on entendrait les mouches voler. « Les résultats
moindre. Jacques Bocquillon, qui se présente sur entre les bureaux de vote 1 et 2. « Je suis plus tendu pour la commune de Gondecourt… » Fin d’une jour-
la commune de Houplin-Ancoisne contre le que lors du premier tour, lâche-t-il. C’est un scrutin née éreintante pour tous les candidats.
Un dimanche
au bureau
Hier à Lille. Jour de pluie mais aussi jour
d’élection... Peu de monde dans les bureaux
de vote, et au final une victoire écrasante
de Martine Aubry.
On s’essaye au vote
Les soldes sont terminées depuis quelques temps et les cabines d’essayages
sont désertés... Ah non pardon, ce sont les élections... et l’abstention est élevée.
Lille Roubaix
Martine Aubry
dans un fauteuil
4 66,56 % Aubry (PS)
1 2ème tour
le 16 mars 2008
Photo : Jonathan Roux Martine Aubry a été plebiscitée dimanche
Villeneuve d’Ascq
48,06 % Vandierendonck (PS)
5,37 % Merlevede (LCR)
19,01 % Pick (UMP)
2,82 % Van Engelandt (MNR)
8,94 % Cannie (FN)
2,14 % Rizoug (DVG)
42,82 % Caudron (DVG) 58,83 % Caudron (DVG) 1er tour 2
le 9 mars 2008 13,64 % Tir (Verts)
5,98 % Lecocq (Verts) 27,22 % Stievenard (PS)
9,41 % Carnois (MoDem) 13,95 % Plancke (UMP)
La passe de trois
pour Vandierendonck
4,04 % Delgrande (Ext. gauche)
27,01 % Stievenard (PS)
10,74 % Plancke (UMP) Pas de surprise à Roubaix où René Vanderien-
donck, maire socialiste depuis 1994, vient d’être
1er tour 2ème tour
le 9 mars 2008 le 16 mars 2008 réélu confortablement pour la troisième fois consé-
cutive. Avec 55,43 %, le vainqueur a disposé facile-
ment de Max-André Pick (UMP) et Slimane Tir
Raz-de-marée pour Gérard Caudron (Verts) qui n’ont récolté respectivement que
26,52 % et 18,06 % des voix. « Mieux vaut faire 55 %
avec une liste soudée que 70 % dans la confusion »,
Pas de surprise à Villeneuve-d’Ascq où deux listes de gauches et une confiait René Vandierendonck à la Voix du Nord
de droite s’affrontaient. Le sortant Jean-Michel Stievenard (PS) est lar- avant d’adresser quelques piques à destination de
gement battu par l’ancien maire Gérard Caudron (divers gauche). ses adversaires : « J’avais fait des efforts avec les
Celui-ci totalise 13 293 voix, soit 58,83 %, contre 27,27 % pour son ad- Verts mais je me suis aperçu à la moitié du mandat
versaire (6 151 voix). Le maire sortant réalise un score équivalent à son que c’était impossible car il n’y avait pas de respon-
résultat du premier tour. Le candidat UMP, qui avait totalisé 10,74 % sabilité solidaire dans l’action. Je suis content que la
des voix le 9 mars a atteint 13,95 %. Ce duel gauche-gauche a mobi- droite ait fait un score aussi faible. Et c’est une joie de
lisé 58,89 % des électeurs. C’est légèrement plus qu’au premier tour ne plus voir le Front national siéger au conseil muni-
où la participation avait atteint 58,38 %. Gérard Caudron était déjà cipal. »
donné vainqueur à l’issue du premier tour, où il avait obtenu 42,82 % Quant aux deux autres candidats, ils n’auront même
des voix. Après le scrutin, il avait affirmé qu’il n’y aurait « pas d’al- pas réussi à combler leur retard entre les deux
liance sur l’oreiller » avec son adversaire et ancien adjoint, Jean-Michel tours. À noter toutefois que la participation n’aura
Stievenard. Il s’était donc tourné vers les Verts qui avaient atteint une nouvelle fois pas été le fort des Roubaisiens
5,98 % dimanche dernier. Gérard Caudron a aussi probablement bé- puisque seuls 40,18 % des électeurs se sont dépla-
néficié d’un report des voix de la part d’une partie des électeurs du cés aux urnes.
Modem, qui avait obtenu 9,41 %. « Ce n’est pas une victoire, c’est une Photo: ESJ F. P.
raz-de-marée », s’est félicité Gérard Caudron.
S.F.
Gérard Caudron a soufflé
la mairie à son ex co-listier
Halluin Mouvaux
Deroo de justesse
C’est sur le fil que le maire sortant vient d’être
réélu à Halluin. Alors qu’il bénéficiait d’une
avance confortable face à Gustave Dassonville
42,82 % Durand (UMP) 42,25 % Durand (UMP)
à Mouvaux
Le PS conserve
la mairie d’Halluin
Douai Bergues
49,75 % Vernier (UMP) 53,48 % Vernier (UMP)
33,4 % Chéreau (PS) 46,52 % Chéreau (PS)
8,8 % Quatreboeufs (MoDem)
8,04 % Pons (SE)
Grande-Synthe
le 16 mars 2008
Hénin-Beaumont
43,09 % Dalongeville (PS) 51,94 % Dalongeville (PS)
4,25 % Fraccola (LCR) 19,23 % Duquenne (DVG)
5,49 % Bocquet (UMP) 28,83 % Briois (FN)
18,64 % Duquenne (DVG)
Photo: ESJ
Saint-Omer
42,55 % Magnier (PS) 57,76 % Magnier (PS)
40,89 % Delvaux (DVD) 42,24 % Delvaux(DVD)
16,56 % (DVD)
Photo: ESJ.
Bruno Magnier, nouveau maire PS
de Saint-Omer
Hénin-Beaumont
43,09 % Dalongeville (PS) 51,94 % Dalongeville (PS)
4,25 % Fraccola (LCR) 19,23 % Duquenne (DVG)
5,49 % Bocquet (UMP) 28,83 % Briois (FN)
18,64 % Duquenne (DVG)
Photo: ESJ
Saint-Omer
42,55 % Magnier (PS) 57,76 % Magnier (PS)
40,89 % Delvaux (DVD) 42,24 % Delvaux(DVD)
16,56 % (DVD)
Photo: ESJ.
Bruno Magnier, nouveau maire PS
de Saint-Omer
Béthune Lens
41,49 % Mellick (PS) 49,34 % Mellick (PS)
46,37 % Delcourt (PS)
12,42 % Seux (MRC) 50,66 % Saint-André (DVG)
11,66 % Vincent (MoDem)
23,74 % Gacquerre (MoDem)
18,88 % Permuy (UMP)
22,35 % Saint-André (DVG)
9,12 % Humez (PCF-LO)
11,97 % Saint-Arnoult (Verts)
1er tour 2ème tour
le 9 mars 2008 le 16 mars 2008 2ème tour
le 16 mars 2008
Harnes
est reconduit.
Calais Berck
Photo: D.R.
37,7 % Hénin (PCF) 45,9 % Hénin (PCF)
4,79 % Roussel (LCR) 54,1 % Bouchart (UMP)
12,35 % Dubout (FN)
36,36 % Bouchart (UMP)
5,37 % Bourgeois (Verts)
3,43 % Wailly (DVG)
1er tour 2ème tour
le 9 mars 2008 le 16 mars 2008
F.C.
une mairie communiste
depuis 37 ans. 2ème tour
le 16 mars 2008
Page réalisée
par Jérémy Marot
par la droite, la majorité présidentielle sera une litation, obtenant 49,5 % des suffrages, contre
minorité municipale. 47,5 % pour la droite. De quoi panser certaines
Au final, dans les villes de plus de 100 000 ha- plaies de 2007.
bitants, les victoires sont très claires pour la Cette défaite ne manquera pas non plus d’attiser
gauche (56 % à Caen, Reims et Amiens), cinq les tensions à l’UMP. Le secrétaire général Pa-
gains nets, avec Metz, après Rouen dimanche trick Devedjian a été critiqué pour sa conduite de
dernier. Elle a par ailleurs conforté ses positions la campagne, sur fond d’ambitions pour la suc-
en l’emportant à Lille, après Lyon, Nantes, Be- cession de Nicolas Sarkozy dans son ancien fief
sançon, Dijon et Limoges dès dimanche dernier. des Hauts-de-Seine. Les cafouillages de Neuilly,
Autre déception pour l’UMP, Angers, seule ville les déchirements suicidaires à Reims, les alliances
de 100 000 habitants où la droite espérait manquées avec le MoDem et les nombreuses dis-
conquérir la mairie. Christophe Béchu, le jeune sidences ont montré que derrière Nicolas Sar-
challenger de droite, n’a pas su bousculer l’ex- kozy, l’unité n’était souvent qu’une façade mas-
périmenté maire sortant Jean- quant de profondes
LE PARTI
Claude Antonini, pourtant en divergences.
ballottage. Et à Marseille, Cependant, rien ne laisse présa-
Jean-Claude Gaudin, mis en
difficulté mais réélu, peut SOCIALISTE ger une inflexion notable de la
politique de Nicolas Sarkozy.
s’éponger le front. CONFORTE Restant vague quant à un éven-
I
Conséquence, sur les plateaux tuel remaniement ministériel
Photo : DR
l’abstention, comparée
Comment expliquer que les Cette fois, la sanction est pré- aux autres pays euro-
Français votent à gauche lors coce… péens, est loin d’être
des élections locales et à C’est vrai, mais il y a une accéléra- catastrophique. Sim-
droite lors des échéances na- tion du temps politique due au plement, les commen-
tionales ? quinquennat. Avant, le pic d’opi- tateurs ont tendance à
Ce paradoxe n’est pas toujours nions défavorables intervenait se fixer sur la Prési-
vrai. Dans certains cas, comme à après deux ou trois ans de pouvoir. dentielle de 2007 qui
Photo : D.R
Bordeaux, les électeurs ont large- Désormais, la sanction tombe était exceptionnelle en
ment voté pour Ségolène Royal moins d’un an après la Présiden- terme de participation.
avant d’élire un maire de droite, en tielle.
l’occurrence Alain Juppé. Dans
l’ensemble, je citerais trois raisons Quel impact auront
expliquant ce paradoxe. Tout La droite a-t-elle raison d’invo- les Municipales sur pourra se limiter à la seule évic-
d’abord, l’absence de projet du quer l’abstention pour expli- les choix de Nicolas Sarkozy ? tion de David Martinon, son porte-
Parti socialiste au plan national. quer ses mauvais résultats ? L’UMP semble dire qu’il faut accé- parole, nommé consul à New-York.
Puis, le déficit de leader. Enfin, la Non. L’abstention est partagée lérer le rythme des réformes mais C’est un réel désaveu et il devra
théorie des élections intermé- entre la droite et la gauche. D’au- ce n’est que pur discours poli- en tirer les conséquences. Il faudra
diaires qui veut que lorsque le tant plus que les abstentionnistes tique. Cela me fait penser à cette donc surveiller les rapports qu’il
parti au pouvoir est toujours sanc- du premier tour ne sont pas les phrase de Tancrède dans le Gué- entretient avec sa majorité. On
tionné au cours de son mandat. Les mêmes que ceux du second. Cela pard de Lampedusa : « Pourvu que peut s’attendre, en toute légitimité,
électeurs en profitent pour formu- dépend du rapport de force, de tout bouge pour que rien ne à un remaniement ministériel en
ler leurs critiques. l’enjeu…Il faut aussi noter que bouge. » En tout cas, Sarkozy ne profondeur.
pour Bayrou
Photo : DR
PA U . Battu en son fief, François Bayrou
peut voir dans ce revers un coup
de la droite. Ou de la gauche.
P
Après une présidentielle flamboyante,
l’homme et son parti entrent Le président du MoDem
désormais dans une phase d’ombre. trébuche dans son Béarn
défaite est de pas avoir su endosser le costume darité régionale oblige, seul Juppé avait plaidé en
– il est vrai immense – du maire historique de faveur de Bayrou, avec toutefois quelques ré-
our moins d’un point, un avenir incer- Pau, André Labarrère, décédé d’un cancer en serves quant à la stratégie à géométrie variable
tain. L’histoire bégaie pour François 2006. L’ombre du socialiste, aux commandes du Béarnais, jugée « trop confuse ».
Bayrou, qui enchaîne les défaites en pendant trente ans, aura plané sur toute la cam- Avec une défaite de plus dans l’escarcelle, on se
forme de petites victoires. À la présidentielle, il pagne. Les Palois ont coutume de dire, en riant, demande bien à quoi va pouvoir penser Fran-
était l’invité surprise. À Pau, il a refusé la com- qu’ils seraient çois Bayrou en
« CE N’EST PAS POUR EXCUSER, matin. Difficile
promission avec l’UMP pour poursuivre son ca- prêts à voter se rasant ce
valier seul. Il n’en reste pas moins que sa défaite pour Labarrère
paloise est un échec cuisant pour lui, le Béarnais,
l’enfant du pays né non loin de là, à Bordères.
même après sa
mort. Ville de MAIS PAU EST UNE VILLE DE de légitimer des
ambitions na-
Hier soir, il ne pouvait qu’admettre la défaite.
Avec 38,81 % des voix, il est distancé par sa ri-
gauche par es-
sence, la cité
GAUCHE » Marielle de Sarnez tionales après
cette défaite
vale, la socialiste Martine Lignières-Cassou, cré- béarnaise ne dans une ville
ditée de 39,76 %. Loin derrière, en arbitre, pouvait que difficilement échoir à une person- qui lui semblait promise. Réduit à la portion
l’homme qui aura sûrement le plus contribué à nalité étiquetée à droite, quelle que soit sa sta- congrue – 3 à 4 % des voix sur toute la France –
la chute de Bayrou, Yves Urieta, maire sortant ture. « C’est une ville de gauche, Pau, ce n’est pas pour le MoDem n’a aucune échéance électorale en
ex-PS soutenu par l’UMP, qui obtient 21,42 %. excuser, mais c’est une ville de gauche », répétait vue pour rebondir. Dans ces conditions,
Au final, 342 voix sur 36 000 auront fait perdre d’ailleurs Marielle de Sarnez, chef de file du construire un « centre fort » apparaît comme une
Bayrou. Une poussière. MoDem à Paris. gageure pour un parti n’existant que par le jeu
Juste après l’annonce télévisée de sa défaite, il a Curieux de la part du parti centriste d’attribuer, des alliances. L’homme, lui, n’a plus que son
déploré « une instabilité politique » qui constitue à chaud, une partie de la responsabilité des mal- mandat de député pour faire entendre sa voix.
selon lui « un handicap pour la France ». « On as- heurs de la France – et de son parti – à la gauche. Et dans l’avion l’emmenant du Béarn à l’As-
siste à une vague de gauche énorme qui a emporté un Le jeu des alliances de l’entre-deux tours a vu le semblée nationale, il pourra méditer l’ironie de
très grand nombre de villes », a-t-il dit. Avant d’in- MoDem pencher plus à gauche qu’à droite, à la la situation, à savoir « ces coups de balancier de
voquer la nécessité de bâtir un « centre fort ». grande fureur des cadres de l’UMP qui ont main- droite à gauche » qui lui sont, à force de jouer
Au final, le plus blessant pour Bayrou dans cette tenu, en représailles, leur soutien à Urieta. Soli- avec, revenus en pleine tête.
Strasbourg. Toulouse.
Le PS passe la frontière alsacienne Une ville vraiment rose
À A
Strasbourg, l’avance du chal- d’avoir pleuré après son score du près trente-sept ans de
lenger socialiste s’est confir- premier tour. « Elle pleure, elle pleure, contrôle de la droite, Toulouse
Pierre Cohen
mée au second tour. Roland j’ai envie de lui dire : on s’en remet, re- a viré au rose. Le candidat so-
Ries est devenu hier le nouveau gardez-moi ! », avait-elle déclarée fai- cialiste Pierre Cohen aurait, selon
maire de Strasbourg en récoltant, sant référence à sa propre défaite. En une estimation TNS-Sofres à
d’après une estimation Ipsos-Dell, 2004, lors des élections régionales, 21 heures, remporté hier le second
57,2 % des suffrages, devant Fa- la déferlante rose s’était arrêtée aux tour des municipales avec 51 % des
bienne Keller (UMP). La maire sor- portes de l’Alsace. Avec la Corse, les voix contre Jean-Luc Moudenc,
tante s’est vue devancée de 15 points deux régions faisaient figure de bas- maire sortant (centriste apparenté
avec 42,8 % des voix. Au premier tion régional pour la droite. Désor- UMP, 49 %). Au premier tour, Mou-
tour, 33,93 % des électeurs avaient mais, Strasbourg est aux mains de la denc était arrivé en tête avec 42,6 %
voté pour cette dernière, 43,90 % gauche. des voix contre 39 % pour Cohen.
pour Ries. Chantal Cutajar, à la tête S’il était le challenger de cette élec- cipation était, au contraire, bien plus
Photo : DR
H.B.
du liste d’UDF-MoDem et forte de tion, le député socialiste à la tête faible qu’au premier tour, avec
5,74 % des voix, n’avait pas donné d’une liste PS-PCF-PRG-MRC-Verts, 52,81 % et sept points de moins. Un
de consignes de vote. Roland Ries, se disait « confiant » en glissant son taux explicable par un faible enjeu
63 ans, retrouve ainsi le fauteuil qu’il bulletin dans l’urne hier midi. « Je dans la plupart des communes du dé-
Photo :DR
avait perdu en 2001 face au tandem pense que la victoire est à la portée de notre partement. En perdant Toulouse, la
de l’UMP Fabienne Keller-Robert main », avait-il déclaré. À 17 h 30, le droite perd la quatrième ville de
Grossman. En 1997, Ries était sorti taux de participation à Toulouse était France et le dernier bastion de la
victorieux d’une triangulaire en bat- de 47,71 %, soit trois points de plus droite en Midi-Pyrénées. C’est désor-
tant l’ancienne ministre socialiste que dimanche dernier à la même mais tout le département de Haute-
Catherine Trautman. Cette dernière heure. Dans le reste du département Garonne qui est ancré à gauche.
avait d’ailleurs reproché à Keller Roland Ries de Haute-Garonne, le taux de parti- H.B.
en bons soldats
Reconduction
de la maire sortante
AIX (Bouches-du-Rhône). La maire sor-
tante d’Aix-en-Provence, Maryse Jois-
sains (UMP) est réélue pour un
deuxième mandat avec 44,28 % des
suffrages. Une triangulaire l’opposait au
socialiste Alexandre Medvedowsky et à
François-Xavier de Peretti (MoDem),
qui obtiennent respectivement 42,94 %
et 12,77 % des voix.
L’ancien ministre
Par Hélène Bekmezian quitte la mairie
E
(avec AFP) AMIENS (Somme). Avec un taux de
participation pourtant huit points plus
élevé qu’au premier tour, l’ancien mi-
Photo : DR
n comparaison du score national, les ministres
nistre et maire sortant Gilles de Robien
(DVD) perd ce second tour. Sa liste a
s’en sortent plutôt bien, dix-neuf d’entre eux été largement battue par celle du socia-
étant désormais maires. À Mulhouse (Haut- liste Gilles Demailly qui a remporté
Rhin), ville-symbole de l’ouverture, Jean-Marie 56,21 % des suffrages.
Bockel, secrétaire d’État à la francophonie (ex-PS
La ville mais
Rachida Dati a été élue
son adversaire Pierre Freyburger (PS) de 166 voix, une défaite qu’a connu Christine Lagarde dans ce sec- pas le département
il rempile ainsi pour un quatrième mandat mais re- teur-clef qui aurait pu faire basculer la capitale à droite.
connaît tout de même avoir « joué très gros ». « Je Hier à 22 heures, des résultats quasi-définitifs don- LE HAVRE (Seine-Maritime). La liste de
pensais l’emporter de manière serrée, peut être pas
droite emmenée par le maire UMP sor-
naient la liste UMP menée par Jean-Marie Cavada et tant Antoine Rufenacht a réuni 54,7 %
aussi serrée », a-t-il expliqué hier soir. sur laquelle se trouvait la ministre de l’Economie lar- des suffrages contre 45,3 % à celle de
Plus au sud, à Nice (Alpes-Maritimes), Christian Es- gement perdante avec 35,5 % des voix contre 64,6 % gauche conduite par le député PCF Da-
trosi, UMP, annonçait hier à 22 h 30 sa victoire avant pour la socialiste Michèle Blumenthal. Également niel Paul qui n’a pas fait le plein des
voix dans son camp. Antoine Rufenacht
la proclamation des résultats définitifs. Un peu plus candidate à Paris, dans le IVe arrondissement, la mi- va ainsi entamer un troisième mandat à
tard, le secrétaire d’État à l’Outre-mer prévenait qu’il nistre de la Culture Christine Albanel en ballottage très la tête de cette ville de 184 000 habi-
allait démissionner du gouvernement dès aujourd’hui défavorable au premier tour, était donnée battue hier tants, depuis sa victoire en 1995 contre
« pour consacrer toute (son) énergie à la ville de Nice ». Dans soir. les communistes. Si la ville reste aux
mains de la droite, la gauche conserve
l’Essonne, à Longjumeau, la secrétaire d’État à l’éco- En banlieue, Rama Yade a aussi dû faire face à une le département de Seine-Maritime
logie, Nathalie Kosciusko-Morizet, a également été défaite. Troisième sur la liste UMP de la maire sor- grâce à une majorité obtenue aux can-
élue mais les résultats finaux n’étaient toujours pas tante Nicole Goueta à Colombes (Hauts-de-Seine), tonales.
connus hier soir. Quant à la ministre du Logement elle a reconnu d’elle-même avoir perdu le scrutin, le
Christine Boutin (UMP), maire sortante de Ram-
bouillet dans les Yvelines, elle rempile pour un second
socialiste Philippe Sarre emportant la mairie à la tête
d’une large coalition de gauche avec 53,60 % des voix.
Première
mandat dans cette ville où elle était adjointe depuis À Périgueux (Dordogne), bien que battu par seule-
1983. À Paris, alors que vingt bureaux sur vingt-qua- ment 113 voix, le ministre de l’Éducation et maire sor-
Photo : DR
tre avaient été dépouillés dans le VIIe arrondissement tant Xavier Darcos a également rapidement reconnu
hier à 21 h 30, Rachida Dati était assurée de l’empor- sa défaite dès 20 h 30. « Une défaite est toujours cruelle, je
ter avec 58,4 % des voix pour sa première élection au ne cache pas ma déception. Une bataille perdue n’est pas la
suffrage universel. Candidate dans le fief de Françoise fin d’un combat », a-t-il déclaré. Michel Moyrand, son
de Panafieu, la garde des Sceaux se plaçait donc loin rival socialiste, a donc remporté la mairie avec 50,42 %
devant la socialiste Laurence Girard (26,5 %) et Véro- des suffrages. Plus de la moitié des membres du gou-
nique Delvolvé-Rosset du MoDem (15,1 %). vernement sont donc désormais maires, sans compter
Pendant ce temps-là...
Quelques arrondissements plus loin, dans le XIIe, c’est le mandat de député de certains d’entre eux.
Philippe Duron,
nouveau maire de Caen
CAEN (Calvados). La liste d’union de la
gauche menée par le socialiste Phi-
lippe Duron a remporté l’élection muni-
D
Par H.B. (avec AFP) cipale au second tour avec 56,26 % des
suffrages. Avec cette victoire, la mairie
bascule à gauche pour la première fois.
Philippe Duron, à la tête d’une liste
es maires qui se présentent L’UMP l’avait, dans un premier la liste UMP dissidente au second d’union PS-PRG-Verts-PCF, devance la
depuis leur cellule de pri- temps, investi, avant de se rendre tour pour contrer le maire sortant maire UMP sortante Brigitte Le Brethon,
son, une ville qui s’endort compte que ses cotisations n’étaient René-Paul Victoria (UMP) qui avait qui a recueilli 43,74 % des voix. « Je
sans savoir qu’elle a déjà un nou- pas à jour. Christiane Hitchoung- obtenu 34,55 % des voix au premier crois qu’il y avait une vraie envie de
changement et d’alternance » à Caen, a
veau maire : les élections munici- Thoé Finance, qui avait finalement tour. Si à Fort-de-France (Marti- dit Philippe Duron.
pales dans les Dom-Tom ont été, reçu l’investiture du parti présiden- nique), le maire sortant Serge Let-
pendant deux semaines, le théâtre
de situations les plus invraisembla-
tiel, était arrivée dernière au pre-
mier tour à Roura. En Polynésie, à
chimy (PPM, parti de gauche auto-
nomiste crée par Aimé Césaire) a La Moselle à gauche.
bles. à Roura, en Guyane, le maire Mahina, le maire sortant émile Ver- été confortablement réélu avec METZ (Moselle). À Metz, la liste
sortant de droite Claude Polony naudon se présentait également de- 82,64 % des voix au premier tour, ce d’union de la gauche (PS, PCF, Verts et
était en lice pour le second tour. puis sa cellule. sont trois candidats qui étaient pré- transfuges du MoDem) conduite par le
socialiste Dominique Gros a battu le
Fort d’un peu plus de 30 % des Rodolphe Alexandre (DVG), désor- sents pour le second tour à Pointe- maire sortant (DVD) Jean-Marie
voix face à un challenger rassem- mais maire de Cayenne (Guyane), à-Pitre (Guadeloupe). Les résultats Rausch, qui à 78 ans sollicitait un sep-
blant 40 % des suffrages, il ne par- avait obtenu plus de 50 % des voix n’étaient toujours pas connus hier tième mandat. M. Gros est devenu le
tait pas favori mais pas complète- au premier tour. Mais suite à une er- soir. Le maire sortant Henri Bangou premier maire de gauche de la capi-
tale de la Lorraine depuis l’instaura-
ment perdant. S’il n’avait pas fait reur collective sur le code électoral, (PPDG, Parti progressiste démocra- tion du suffrage universel masculin en
campagne depuis sa prison. Incar- tout le monde s’est réveillé lundi tique) est néanmoins en ballottage 1848. Il scelle la fin de trente-sept an-
céré le 31 janvier pour une affaire matin persuadé qu’il y aurait un se- favorable avec 34,36 % des voix. À nées de règne de Jean-Marie Rausch
de prise illégale d’intérêt et favori- cond tour. Situation insolite égale- Nouméa, Jean Lèques (UMP), au cours desquelles Metz a été profon-
tisme, il avait été libéré vendredi ment à Saint-Denis de la Réunion, maire depuis vingt-deux ans, a été dément transformée par l’action de
l’ancien ministre d’ouverture de Fran-
mais a finalement décidé de jeter où la liste PS de Gilbert Annette, réélu avec 49,41 % des suffrages çois Mitterrand.
l’éponge pour un second mandat. victorieuse hier, avait fusionné avec pour un cinquième mandat.
Photo JR
L I L L E . Martine Aubry refuse obstinément l’implantation
de la vidéosurveillance dans sa ville. Décision courageuse
pour certains, choix absurde pour la droite, qui dénonce
une position idéologique.
Par Éric Filliastre
J
sur le sujet : réseau sécurité ; Martine Aubry
test de vidéosurveil- SUR LA QUESTION en a fait une question
ONT ÉTÉ NOMBREUSES
lance à Wazemmes purement idéologique.
pour Étienne Forest Aucune analyse objec-
(dissident MoDem), tive n’a été effectuée, que
système élémentaire de vidéoprotection selon ce soit en termes juridiques, techniques ou finan-
Lille a fait le choix de ne pas mettre en place
Sébastien Huyghe, caméras dans les quartiers ciers. » La preuve de l’utilité du dispositif ? « La
un système de vidéosurveillance
«
difficiles pour Éric Dillies (FN)… vidéosurveillance est un outil qui se banalise de plus
e préfère des agents sur le terrain que der- Même le père spirituel supposé de la socialiste, en plus. Son efficacité a été prouvée partout et à
rière des écrans. » En une phrase, Mar- Pierre Mauroy, soutient le dispositif. Le prési- maintes reprises, dans des villes de droite comme de
tine Aubry résume sa position sur la dent de LMCU est même à l’origine de l’im- gauche : Lyon, Roubaix, Dunkerque… »
vidéosurveillance. La maire PS de plantation des premières caméras dans les Quant aux études qui remettent en question
Lille, réélue hier, n’a jamais caché son villes de la communauté urbaine, comme Rou- l’utilisation des caméras hors des espaces clos,
hostilité vis-à-vis de l’installation de baix ou Tourcoing. Quant au candidat des Christian Decocq les balaye d’un revers de la
caméras sur le territoire de la capitale du Nord, Verts, Éric Quiquet, il avouait en mai 2007 : main : « C’est un argument fallacieux pour justifier
« une mesure simpliste et inefficace », selon elle. La « Franchement je ne suis pas un fan, mais dans les une position démagogique et sectaire. »
loi Sarkozy de 2005 prévoit une extension de la transports, couplée avec les agents de prévention, la En attendant, à Lille, Big Brother est toujours
vidéosurveillance pour lutter contre le terro- vidéo a prouvé son utilité. » À Lille, les débats au- persona non grata.
Roubaix
« Lille n’est
pas Chicago »
sous surveillance
En 1998, Roubaix a été l’une des toutes
premières villes à choisir la vidéosur-
veillance. Elle devait, selon la police
municipale, « surtout sécuriser le centre-
ville. C’est une zone de développement
économique essentielle depuis la chute Propos recueillis par Éric Filliastre
de l’industrie textile. Il fallait mettre à
l’abri des possibles débordements ». À Lille, seul
Vingt-deux caméras ont donc été instal- Les caméras pour faire baisser la criminalité ?
lées dans les espaces publics, essen-
le métro est
tiellement à proximité du centre com- Un non-sens, selon le chercheur Eric équipé
mercial. Un moyen pour la mairie de de caméras.
sécuriser la population et de réduire le
Heilmann, qui défend l’usage de la
taux de délinquance. Cette mesure de vidéosurveillance dans des contextes précis.
prévention a coûté plus d’un million
d’euros à la ville de Roubaix et au Martine Aubry a-t-elle raison de refuser la vi-
Feder (Fonds européen de développe-
ment régional). déosurveillance à Lille ?
Bien qu’il soit difficile d’évaluer l’effica- C’est une décision courageuse. Actuellement, en
cité du système, puisqu’il fait partie France, 600 communes sont équipées de caméras.
d’une politique globale de sécurité du Pourtant, on peut très bien résoudre les problèmes
centre-ville, le constat est plutôt positif.
de délinquance sans en passer par des moyens tech- lance est efficace : les opérateurs ont une tâche pré-
« Le taux de délinquance a diminué mal-
niques. À Montréal, en quinze ans, la criminalité a cise à effectuer et savent où ils doivent porter leur at-
gré l’afflux d’un grand nombre de per-
sonnes en centre-ville et il y a des arres- baissé de 48 %. Les Québécois considèrent la vidéo- tention. Mais ce modèle n’est pas transposable à une
tations grâce à la vidéosurveillance », surveillance comme un dernier recours, et n’hésitent grande ville. On ne peut pas faire attention à tout.
confirme l’agent municipal responsable pas à retirer les caméras des quartiers quand la situa- À partir de quand la vidéosurveillance
de la vidéosurveillance. Soixante-dix
policiers municipaux ont été habilités à tion ne l’exige pas. Le choix de Martine Aubry me empiète-t-elle sur nos libertés ?
utiliser et piloter les caméras. Certaines semble donc judicieux, d’autant que Lille n’est pas Je considère qu’elle nuit par essence à la liberté de
images sont transférées simultanément réputée pour être un Chicago des années 1930. circuler et au droit au respect de la vie privée. Dès
à la police nationale. l’instant où l’on rentre dans l’espace public, on doit
Quant à la protection de la vie privée,
certains espaces sont interdits de vi-
Quel est l’impact réel de la vidéosurveillance abandonner toute forme d’intimité. À Ploërmel, en
déos. Selon l’agent municipal, les sur la délinquance ? Bretagne, des militants des libertés ont posé un re-
images enregistrées seraient détruites Les enquêtes menées en Grande-Bretagne prouvent cours devant le tribunal administratif et ont réussi à
dans un délai de sept jours, sauf celles que la vidéosurveillance n’a aucune influence sur les faire retirer les caméras de leur commune. Mais pour
réquisitionnées par un magistrat crimes les plus graves et les atteintes à la personne. un procès qui aboutit, 599 villes font le choix de la vi-
M.E.
À l’inverse, dans des espaces clos, elle peut avoir son déosurveillance sans que personne n’y trouve à re-
utilité. Dans un parking, par exemple, la vidéosurveil- dire. Cette situation ne me semble pas saine.
A
tres : « Les gens des fois ils mettent soit des bulletins blancs
Photo : Joël Bronner
M S
Martine, clown en chef
artine, c’est la dame qui est ébastien, c’est le monsieur qui
maire. Elle est le chef de la voulait devenir maire. Mais Sé-
ville. Avant, Martine était mi- bastien, c’est aussi le monsieur
nistre à Paris, ce qui veut dire sous- qui ne sera pas le maire de Lille. Pour
chef de la France. Quand elle était pe- devenir maire, il faut rencontrer les
tite, Martine a beaucoup travaillé. Elle gens qui habitent dans la ville. Après, il
a fait des sciences-politiques et de faut que ces gens deviennent des amis.
l’École nationale d’administration. Une fois qu’ils sont vos amis, ils vous
Puis elle a voulu que les gens se repo- donnent leur voix. Sébastien n’a pas
sent. Du coup, elle a obligé les gens à assez d’amis. Et quand on n’a pas de
ne travailler que 35 heures par se- voix, personne ne vous écoute. C’est
maine. Mais le travail, c’est quelque logique. Bon, Sébastien n’a peut-être
chose de trop agréable pour le limiter pas d’amis mais, heureusement, il a
autant. une grande famille. La famille de la
Alors la France s’est remise à travailler droite. Ce qui est beau, dans une fa-
et Martine est revenue à Lille. Les gens mille, c’est qu’on est soutenu quoi qu’il
de Lille, au début, ils trouvaient que arrive. Même quand on ne devient pas
Martine, elle faisait tout le temps la maire. Avec une famille, c’est “à la vie,
tête. Mais après, elle a fait le clown. à la mort”. Alors le jour tragique où
Lille, c’est devenu un grand cirque Sébastien disparaîtra, sa famille n’ou-
avec des éléphants indiens dans la rue. bliera pas de lui rendre hommage. Pas
Et comme les habitants ils aiment bien d’inquiétude donc, ils seront nom-
Photo : DR
Photo : DR
quand Martine sourit, ils lui font un breux, l’émotion au cœur et la larme à
cadeau : la mairie. Joël Bronner l’œil, à venir l’enterrer.
J.B.
Aux crochets
de la communauté
W A R N E T O N . Avec
178 habitants, c’est
la plus petite commune
E
de Lille-Métropole.
Une affiliation capitale
pour ce village privé
Photo : SF
d’infrastructures.
ment 178 habitants et une surface velopper. « Un dossier très bien défendu roone, qui dirige un atelier de me-
totale de moins de 5 km2, la mairie par le maire à la communauté urbaine », nuiserie.
n 1983, le dernier bistrot de Warneton mise sur la commu- précise Colette Ménérat, responsa- Les habitants, eux, voient plutôt
de Warneton, Au bon nauté urbaine pour entretenir son ble des ventes de l’entreprise. Flan- d’un bon œil l’appartenance de
coin, est devenu une mai- village. « On n’aurait jamais pu refaire dria a touché près de 200 000 euros Warneton à LMCU. Avec un siège
rie aux volets fermés cinq jours sur les routes et se mettre aux normes pour pour favoriser la création d’une tren- pour 178 habitants, autant que Bon-
sept. Le panneau à l’entrée du vil- l’assainissement. Là, on bénéficie des ex- taine d’emplois promis par l’entre- dues ou Comines qui en ont plus de
lage indique “Warneton Belgique, perts de LMCU, ça nous évite d’avoir à prise. Le budget annuel de Warne- 10 000, leur maire dispose d’une tri-
0,7 km”. Côté français, dans la com- payer un bureau d’études », explique le ton s’élève à 100 000 euros. Sans la bune pour défendre les dossiers lo-
mune du même nom, la plus petite maire, Jean-Jacques Veroone. communauté urbaine, Flandria ne caux. « Les choses se sont beaucoup
de la communauté urbaine de Lille Surtout, sans Lille- serait sans doute déjà améliorées, notamment les transports en
métropole (LMCU), les habitants
n’ont plus ni commerce de proxi-
Métrople, Warneton
n’aurait jamais pu re-
LE MÊME plus dans la com-
mune.
commun. Avant, il n’y avait qu’un bus
tôt le matin pour aller en Belgique, en-
mité, ni bar où se retrouver. Alors ils
traversent le pont, au-dessus de la
tenir une entreprise
qui génère cent qua-
POIDS QUE Seule ombre au ta-
bleau, la taxe profes-
suite il fallait attendre midi. Mainte-
nant, il y en a tous les trois quarts
Lys, qui permet de passer à Warne- tre-vingts cinq em- BONDUES sionnelle qui doit être d’heure », note Léon Gallois.
ton Belgique, 8 000 habitants. « J’y plois : Flandria alu- nivelée sur l’ensemble Le rattachement à la communauté ur-
achète mon tabac, mes médicaments, il minium. « Il y a OU COMINES des communes de baine a permis de désenclaver un peu
À LMCU
n’y plus rien ici », confie Léon Gal- quelques temps, ils vou- Lille-Métropole pour Warneton. Mais le maire mise aussi
lois, Warnetonnois depuis 1961. laient faire des aména- 2012. Warneton, dont sur la coopération transfrontalière.
« Après la Révolution, on a établi les gements, ils ont réalisé les entreprises payaient « On travaille beaucoup avec Lys Nord
frontières à partir de la Lys. Une petite une étude pour aller s’implanter en Bel- 2,8 % d’impôts avant cette mesure, se Métropole, qui comprend des communes
partie de Warneton s’est retrouvée côté gique. La communauté urbaine m’a rapproche progressivement des 22 % belges. Nous œuvrons main dans la main
français, sans aucun équipement com- aidé à faire pression », se souvient voulus par LMCU. « On atteint pour attirer les touristes sur les berges de la
munal », explique Pierre Devulder, Jean-Jacques Veroone. Par « pres- presque 10 % d’augmentation chaque Lys ». L’attraction phare ? Un par-
retraité, qui a assumé quatre man- sion », comprendre les subventions année, ça risque de décourager les entre- cours-promenade le long d’une
dats d’adjoint au maire. Avec seule- qu’a reçues l’entreprise pour se dé- prises », estime Jean-Jacques Ve- rivière... réhabilitée par LMCU.
I
Par Jérémy Marot
l a le sourire en coin mystérieux de celui qui
veut dire « vous verrez bien ». Rien que pour
que l’éléphant rose du Nord a clairement
adoubé Martine Aubry, qui « réunit toutes les Le bilan Mauroy
semer le doute. Marc-Philippe Daubresse, conditions pour devenir présidente de la LMCU ». Dix-huit années de mutations et de consensus. La prési-
député-maire de Lambersart, s’estime « toujours Daubresse mise donc plus sur le « style, la per- dence Mauroy aura profondément imprimé sa marque
sur la métropole… et sur les équilibres au sein de la
en lice » pour la présidence de la communauté ur- sonnalité », que sur « l’idéologie », pour diriger communauté urbaine. Élu à la tête de LMCU en 1989, le
baine de Lille (LMCU). « Je suis très serein sur cette institution « technique ». Il ne serait pas de maire de Lille est d’abord l’homme des grands projets.
l’état des lieux communautaire », dit-il. Donné per- bon ton d’afficher ses couleurs UMP pour bri- Le quartier Euralille est conçu comme une « turbine ter-
dant, vu la défaite de la droite dans la métropole guer la tête de la LMCU. En particulier lorsqu’il tiaire » : un pôle économique et commercial, dopé par
lilloise, Daubresse ne baisse pas les bras. Mais, s’agit de discuter avec Henri Ségard, président la gare TGV décrochée lorsque Pierre Mauroy était à
Matignon. Autres avancées : la seconde ligne du métro,
quoiqu’il en dise, ses arguments restent faibles. de l’influent groupe des maires sans étiquette, reliant le centre de Lille à Roubaix et Tourcoing, ou la
Le premier d’entre eux est de souligner l’absence représentant 28 % des voix. « Henri Ségard est un rénovation du tramway, le fameux “Mongy”. Des pro-
de programme de sa rivale, Martine Aubry. « On homme pour qui j’ai beaucoup d’affection », susurre- jets entérinés grâce au “style” Mauroy, bonhomme et
ne sait toujours pas ce qu’a Mme Aubry dans son t-il. Évidemment. Avant de rappeler, comme ça, consensuel : l’ex-Premier ministre parvient à fédérer
autour de lui les “grands maires” de la métropole, indé-
programme, raille-t-il. Elle sort une feuille de sa au passage, que Ségard a été par deux fois pré- pendamment de leur couleur politique, et à gérer une
serviette, dit “c’est mon programme” et le rentre sident de son comité de soutien. Ce dernier a ce- communauté urbaine où près de la moitié des 85 com-
immédiatement. » pendant déclaré en janvier dernier que « le prési- munes comptent moins de 5 000 habitants – soit une
À la hussarde, Marc-Philippe Daubresse ose. dent de LMCU doit être le maire de Lille ou son plus bonne part de maires sans étiquette. Son dernier man-
Lui, l’ancien UDF converti UMP, revendique proche allié ». Ségard saura aussi sûrement se sou- dat (2001-2008) en subit le contrecoup : « consensus
mou », « gestion opaque »… Si l’idée d’une Eurométro-
aussi l’héritage de Pierre Mauroy – qui appré- venir à temps que lorsque lui-même briguait la pole franco-belge est sur les rails, les choix pour le
ciera. « Je suis le seul à pouvoir représenter la conti- tête de la LMCU face à Mauroy, Daubresse projet de Grand stade pourraient être remis en cause
nuité avec Pierre Mauroy, à savoir cette capacité à dis- avait choisi, à l’époque, de mettre de côté son après le départ du patriarche. Jean Décotte
cuter avec tout le monde. » Il n’en reste pas moins “affection” pour choisir Mauroy…
C
Texte : Imanol Corcostegui ’est l’histoire de cent vingt journalistes. Enfin,
Photos : Jonathan Roux et Alexandra Nawawi pas des vrais, pas des professionnels de l’infor-
mation, mais plutôt des étudiants en cours de
formation. De ceux qui rappellent leurs interlocuteurs
une demi-heure après leur avoir laissé un message,
de ceux qui maladroitement se postent devant les ca-
méras de M6 en pleine conférence de presse et qui,
du coup, pourrissent leurs images, de ceux, encore,
qui prennent des photos floues où les gens ressem-
blent à des lapins atteints de myxomatose.
Mais à côté de ces petites bourdes, les trente-trois
squatteurs de la salle PAO 1 de l’ESJ, ceux qui ont
consacré ces deux dernières semaines à La Pression
de mars, ont payé de leur personne. Ils en ont passé
des soirées à l’école à guetter les chips qui traînaient
tout en cherchant un titre de Une. Ils en ont trouvé des
astuces pour braver les coupures intempestives
d’électricité et les pannes d’Internet. Ils en ont couru
des meetings, comme celui de Villeneuve-d’Ascq où
il fallait traquer la petite phrase pour écrire une
brève de 500 signes. Et le tout sous le regard avisé de
leurs intervenants :Yves Sécher, l’homme qui comp-
tait en cadratin ; Cyril Petit qui vous refait une page
en cinq minutes, quand vous avez passé deux heures
à vous obstiner sur les espaces insécables. Et les re-
lectures attentives des coaches PHR, Laurent Brunel et
Sylvie Larrière, et des deux journalistes de Libération,
Fabrice Tassel et Jacky Durand.
Dans la salle d’à côté, vivent les onze bloggeurs.
Silence de cathédrale et concentration maximale. Et
puis toujours une page Facebook ouverte pour jouer
à Risk en réseau. De vrais geeks, qui débattent sur la
fonctionnalité de Tweeter et vérifient toutes les dix
secondes le nombre de leurs visiteurs. Surtout, des
spécialistes de l’info en temps réel, toujours prêts à
partager leurs tuyaux.
Après quatorze jours passés ensemble, La Pression de
mars est donc finie. Mais pas de dépôt de bilan pour
autant. L’an prochain, nos successeurs s’attaqueront
La Pression de mars
ils notre titre trouvé dans la douleur alcoolisée, pour
en faire La Pression de juin.
Les Deuz :
Hélène Bekmezian
Sophie Bouillon
Caroline Bozec
Madjiasra Nako
Joël Bronner
Gaël Cogné
Séverine Fiévet
Imanol Corcostegui
Jean Décotte
Nicolas Kienast
Alexandra Nawawi
Françoise Marmouyet
Jérémy Marot
Séverine Rouby
Flore Thomasset
Les PHR :
15 h : Les bloggeurs sont tous déjà connectés Gaël Arcuset 17 h : fin de la réunion.
sur Facebook et Tweeter. Marc-Antoine Barreau Prochaine conf’ de rédac à 17h15 !
Mélanie Carnot
Guillaume Carré
Frédéric Coulon
Julien Damien
Meak Em
Éric Filliastre
Florian Hervieux
Camille Janik
Delphine Lacroix
Clémence Lambard
Jeffrey Martin
Benoist Pasteau
Florian Pottiez
Jonathan Roux
Guillaume Willecoq
Les intervenants :
Laurent Brunel
Jacky Durand
Sylvie Larrière
Cyril Petit
Yves Sécher
Fabrice Tassel
19 h : Jacky Durand ne va pas tarder 0 h 45 : Le bouclage approche.
à faire changer l’événement du jour. « Quelqu’un peut se déconnecter du serveur ? »