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ASSASSINATS,ARMES QUASI EN VENTE LIBRE ET BLOCAGE DE LA SITUATION

POLITIQUE EN TOILE DE FOND DE LA VISITE DE M. DELCROIX

BRAECKMAN,COLETTE

Samedi 12 mars 1994

Assassinats, armes quasi en vente libre et blocage de la situation politique en toile de fond de la
visite de M. Delcroix

Révision de la mission de l'ONU au Rwanda?

KIGALI

De notre envoyée spéciale

La sérénité affichée par le contingent belge de la Minuar (la force de paix de l'ONU chargée de
garantir l'application des accords d'Arusha) à l'occasion de la visite du ministre de la Défense Léo
Delcroix est avant tout une façade. Une volonté plus qu'une réalité. Car la situation à Kigali est
plus tendue que jamais et l'avenir de l'intervention onusienne est compromis.

Trois semaines après l'assassinat du président du parti social démocrate et celui du leader des
CDR, crimes politiques qui avaient déclenché une nouvelle vague de règlements de compte se
soldant par une quarantaine de morts, Kigali est à nouveau envahie par la peur. Des rumeurs
assurent que le match de football qui opposera dimanche l'équipe nationale à son homologue
zaïroise sera l'occasion de nouvelles violences qui pourraient être imputées au Front patriotique
alors qu'en réalité elles seraient le fait de provocateurs ayant revêtu l'uniforme des anciens
rebelles! À nouveau, il est question d'escadrons de la mort, de listes de personnalités à éliminer
et certains se réfugient déjà dans les hôtels pour raison de sécurité.

«SPECTRE DE GUERRE CIVILE»

Cette atmosphère délétère qui accompagne le blocage persistant de la situation politique a incité
le représentant du secrétaire général des Nations unies, le diplomate camerounais Jacques-
Roger Booh-Booh, à frapper une nouvelle fois sur la table comme l'avait fait le ministre Willy
Claes voici trois semaines. La famine fait des ravages, la situation économique et sociale se
dégrade, l'insécurité augmente et pendant ce temps les partis politiques rwandais n'honorent pas
les engagements pris devant leur peuple. Le spectre de la guerre civile plane sur le Rwanda.

M. Booh-Booh a déploré l'absence de volonté politique de mettre en oeuvre les accords


prévoyant la constitution du gouvernement de transition, clé du déblocage. Bientôt, a-t-il dit, le
secrétaire général de l'ONU devra comparaître devant le Conseil de sécurité et comparer le coût
de l'opération avec les résultats déjà obtenus. En janvier dernier déjà, M. Boutros-Ghali avait
obtenu un sursis de trois mois. D'ici le 4 ou le 5 avril prochain, ce nouveau délai viendra à
expiration. Il faudra alors décider ou non de la prolongation de la présence onusienne pour six
nouveaux mois.

M. Booh-Booh s'est fait l'interprète de la lassitude des donateurs: Cette opération coûte très cher,
on n'en voit pas le résultat. Et les bailleurs de fonds (dont la Belgique en premier lieu) ne cessent
d'être sollicités, qu'il s'agisse des Casques bleus, des réfugiés, de la sécheresse... Il serait temps
que les Rwandais eux-mêmes prennent leurs responsabilités. Que les partis d'opposition, le
MDR (Mouvement démocratique républicain) et surtout le Parti libéral, surmontent leur division, et
les clivages d'ordre ethnique qui les divisent.

DES CASQUES BLEUS AMERS


Les témoignages des Casques bleus belges confirment l'amertume du représentant de l'ONU: la
force de paix se trouve actuellement dans l'impasse. Son mandat n'est pas - comme en Somalie -
d'imposer la paix, au besoin contre le gré des intéressés, mais de garantir l'application d'accords
conclus par les Rwandais eux-mêmes et qui prévoient le partage du pouvoir. Or, garantir la paix
interdit toute initiative d'action, toute offensive. Les Casques bleus ne pourraient qu'assister la
gendarmerie locale si cette dernière devait décider de saisir les armes qui sont pratiquement en
vente libre (au marché, une grenade ne vaut guère plus de 100 FB).

On est loin du compte. Pour l'instant, les Casques bleus ne peuvent que multiplier les patrouilles
dans Kigali, escorter certaines personnalités: il n'est pas question de faire la paix en lieu et place
des Rwandais eux-mêmes.

M. Booh-Booh, maniant très diplomatiquement la carotte et le bâton, laisse entendre que le


Conseil de sécurité pourrait être amené début avril à revoir le mandat des Casques bleus: soit
décider carrément la fin de l'opération - ce qui laisserait le Rwanda seul face à ses démons - soit
redéfinir la nature de l'engagement en le rendant plus volontariste. Dans ce cas, les Casques
bleus ne se contenteraient plus d'assister presque passivement aux violences et de mener des
enquêtes à postériori. Ils seraient activement chargés d'imposer la paix.

M. Booh-Booh est persuadé que la population aspire à la sécurité, à la réconciliation: C'est pour
les gens qui se trouvent dans les blindés, ces huttes de branchages qui abritent les réfugiés, que
nous sommes ici. Pour qu'ils puissent enfin regagner leur terre et la cultiver. Le ministre belge de
la Défense, qui rencontrera samedi matin le président de la République, ne dira sans doute pas
autre chose que M. Claes voici quelques jours. Militairement, économiquement, la Belgique se
trouve aux côtés du Rwanda, mais la patience a des limites.

COLETTE BRAECKMAN

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