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L'actualité internationale en note

Passage au
critique

crible
Pour une analyse transnationaliste
de la scène mondiale
N°7 · 30 novembre 2009 · www.chaos-
international.org
Une peur mondialisée
La lutte transnationale contre la grippe A (H1N1)

Par Simon Uzenat


L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), dénombre aujourd’hui près de
8000 morts – dont 650 en Europe – dus à la grippe A (H1N1). Pour sa part, la France a
enregistré 730 000 consultations au cours de la seule période du 16 au 22 novembre
2009, soit une augmentation de 72% par rapport à la semaine précédente. Maladie
respiratoire aiguë, la grippe A (H1N1) diffère de la simple grippe saisonnière.
Similaires à ceux de cette dernière, ses symptômes sont traités – pour les cas les plus
sévères – par des médicaments antiviraux comme le tamiflu. Ce nouveau virus qui
contient des gènes d’origine porcine, aviaire ou humaine, se propage par la toux, les
éternuements et les postillons. Extrêmement contagieuse, cette affection demeure
souvent bénigne, mais sa propagation s'accélère considérablement dans le monde
entier.

Rappel historique
L’épidémie a débuté au Mexique au printemps 2009, suscitant immédiatement
l’inquiétude. Celle-ci se trouve exacerbée par le souvenir de plusieurs précédents
restés très présents dans la mémoire collective. Rappelons en premier lieu que la
grippe espagnole a tué en 1918 plusieurs dizaines de millions de personnes, à une
époque où les mouvements de population étaient pourtant moins fréquents que de
nos jours. Mentionnons ensuite les alertes mondiales provoquées par le SRAS en
2003 et la grippe aviaire depuis 2004. En outre, alors que certains pays manquent de
vaccins, le virus connaît des mutations géniques, ce qui ne fait qu’accentuer les
tensions politiques, les pressions sociales et les querelles scientifiques. Enfin, la
décision de l’OMS de passer le 11 juin 2009 au niveau d’alerte 6 – limite maximale
correspondant au seuil pandémique – a conforté davantage encore ce climat
d’angoisse, voire de panique.

Cadrage théorique
La stratégie internationale de lutte contre la première pandémie du XXIème
siècle relève de deux logiques interdépendantes qui soulignent « l'immense difficulté
de l'État-nation à prédire, organiser et contrôler le risque » , pour reprendre les
termes du sociologue allemand, Ulrich Beck.
1 La santé comme bien public mondial. Le processus de mondialisation de
l’économie de marché conduit à repenser l’échelle et les conditions de réalisation des
politiques sanitaires. Par ailleurs, l’implication d’un nombre de plus en plus important
et diversifié d’acteurs, intervenant à l’échelle internationale, exige une approche
globale d’enjeux, jusque-là circonscrits au plan national.
2 La sécurité humaine. Cette notion fait référence aux droits humains,
notamment à celui de vivre dans un environnement sanitaire qui soit protégé. Elle
implique une remise en cause de la territorialisation de la souveraineté en favorisant
un double dépassement de l’arène étatique : a) par le haut avec la nécessité de
protéger les grands équilibres globaux qui appellent une gouvernance mondiale
encore en chantier ; b) par le bas, avec une attention accordée aux individus plutôt
qu’aux États. De nos jours, la légitimation de la sécurité humaine se donne à voir

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dans le renforcement des normes juridiques et la capacité de les faire respecter.
C’est dans ce cadre que doit être abordé le rôle joué par l’OMS, mais aussi celui des
communautés épistémiques et des réseaux plus ou moins institutionnalisés de
praticiens.

Analyse
Cette épidémie témoigne du processus de mondialisation par l’intensification
de la mobilité, l’accélération des échanges et la modernisation des moyens de
communication. Marc Barthélemy, chercheur au Commissariat à l'énergie atomique
(CEA), estime ainsi que le transport aérien dicte le rythme de la propagation de la
maladie. D’une manière plus générale, le phénomène de métropolisation accélère la
propagation des maladies infectieuses. Certes, ces dernières peuvent émerger dans
les zones rurales, mais les zones urbaines restent cruciales pour leur dissémination et
leur transformation en épidémie, voire en pandémie, comme on l’a constaté à
Mexico. En effet, dans cette mégapole, on a observé plusieurs facteurs cumulatifs,
tels que l’importation massive de produits, la présence d'une population très mobile,
l’existence de bidonvilles, avec des minorités peu à même de comprendre les
messages sanitaires, et un nombre élevé de non-résidents en transit.
Quant à la crise financière qui a affaibli indistinctement les outils de prévention,
elle incite à nous interroger sur la rationalité étatique. Bernard Vallat, directeur
général de l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE), note à ce propos une
décroissance de la part des budgets publics consacrée à la santé animale, alors que,
dans le même temps, les sommes investies en faveur d'une surveillance efficace
demeurent dérisoires, au regard de celles que réclame la gestion tardive des crises
sanitaires.
La pandémie grippale met également à jour et conforte les disparités
internationales en termes de développement. Elle réactive par exemple certaines
croyances ancestrales ancrées dans les cultures nationales des pays en
développement : en Chine, le prix de gros de l'ail – plante réputée prévenir la grippe
A – a été multiplié par quinze depuis mars, devenant d’emblée la cible des
spéculateurs. Le débat sur l’intérêt de la vaccination concerne, quant à lui, surtout les
pays développés. Dans ces derniers, la bonne couverture sanitaire de la population
– institutionnalisée et financée par les autorités publiques –participe en effet d’une
réduction de la perception sociale du risque. Consciente de ces disparités, l'OMS
mobilise un répertoire d’action essentiellement symbolique, concrétisé dans la
révision en 2005 du Règlement sanitaire international, un dispositif normatif qui
définit les responsabilités et obligations des États. S’agissant des firmes
pharmaceutiques, le déclenchement du niveau d’alerte maximal a eu pour
conséquence de contraindre plusieurs d’entre elles, dont Sanofi Pasteur et
GlaxoSmithKline (GSK), à s’engager, respectivement, à faire don de 100 millions et
50 millions de doses de vaccin pour les pays pauvres. Dans cette logique, neuf pays
– dont les États-Unis, la France et le Royaume-Uni – ont, pour leur part, mis 10% de
leurs stocks de vaccins à la disposition de l'OMS.
La grippe A favorise enfin des reconfigurations stratégiques et des transferts
partiels d’autorité du secteur public vers le secteur privé. À ce titre, la réalisation
rapide des vaccins, à partir de prototypes mis au point contre le virus de la grippe
aviaire (H5N1), constitue un enjeu majeur. Rappelons à cet égard que la France a
commandé, à elle seule, 100 millions de doses, pour près d’un milliard d’euros.
Notons, en premier lieu, que des procédures accélérées ont été mises en place – tant
aux États-Unis que dans l'Union européenne – afin d'accorder dans les meilleurs
délais les autorisations aux vaccins remplissant les critères d'efficacité et de sécurité.
Compte tenu de la demande, estimée à plusieurs centaines de millions de doses, les
industriels ont exceptionnellement commencé à produire des lots de vaccin, sans
attendre le feu vert des autorités de régulation. Remarquons en second lieu combien

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la concurrence internationale dans le secteur médical se renforce désormais entre les
entreprises des pays développés et celles de pays émergents ; à telle enseigne que
l'Inde est devenue depuis peu le premier producteur mondial de vaccins. Des
laboratoires chinois ont, quant à eux, mis au point en un temps record, les premiers
vaccins contre la grippe. Les moindres exigences émises par les autorités sanitaires
servent ici un objectif avant tout national : il convient pour l’État chinois de protéger
rapidement plus d'un milliard d'individus ; d’autant plus que l'OMS a déjà prévenu
qu'il n'y aurait pas assez de vaccins pour la totalité de la population mondiale.

Références
Beck Ulrich, La Société du risque. Sur la voie d’une autre modernité, trad., Paris, Aubier,
2001.
Chiffoleau Sylvia, « Santé et inégalités Nord/Sud : la quête d’un bien public équitablement
mondial », in François Constantin (Éd.), Les Biens publics mondiaux. Un mythe légitimateur
pour l’action collective ?, Paris, L’Harmattan, 2002, pp. 245-268.
Gabas Jean-Jacques, Hugon Philippe (Éds.), Biens publics à l’échelle mondiale, Paris,
Colophon, 2001.
Kaul Inge, Grunberg Isabelle, Stern Marc A. (Eds), Global Public Goods, International
Cooperation in the 21st Century, New York, Oxford, Oxford University Press, 1999.

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