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Cette crise de l’été 2007, née aux Etats Unis, suscite un certain nombre de questions
relatives à :
4) la politique monétaire
La « crise » :
A : Identifier, nommer, cerner la nature de cette crise c’est en quelque sorte en fixer
l’ampleur : il y a évidemment à ce sujet plusieurs « écoles » : selon Mathilde LEMOINE
(Directrice de la Stratégie Marchés chez HSBC) la « crise subprime » est loin d’être
finie, les difficultés du marché « subprime » font planer la menace d’une crise sur le
système financier » ; pour Olivier PASTRE (Professeur d’économie à Paris VIII)
l’analyse est différente : « il y a une crise mais sur un marché précis qui n’est qu’un sous
segment du marché immobilier américain. L’environnement général reste marqué par
une abondance de ressources financières. En abaissant les taux on risque de provoquer
un accident cardiaque ».
A ce stade ce débat d’analyse est bien normal : il ne porte d’ailleurs pas sur
l’identification de la crise mais sur son ampleur et ses éventuelles conséquences.
Mais il faut bien reconnaître que les éléments d’appréciation font actuellement défaut
pour fonder une appréciation aussi exacte que possible. Toutefois la BDF dans son
bulletin de juillet note : « que le volume global des prêts subprime octroyés aux Etats
Unis représenterait environ 13% de l’encours global des prêts de ce pays ». Ce
pourcentage somme toute limité semble venir en appui de la thèse PASTRE cependant
- peser sur une croissance déjà faible en France (prévision de 0,3% pour le
deuxième trimestre) avec en plus la perspective d’un resserrement budgétaire en
2008 (voir interview de COURSON - JDD du 19 août)
- une attitude désormais plus prudente des banques dans l’octroi des crédits (voir
interview de FILLON dans « Le Monde » du 22 août)
- les incertitudes sur les niveaux des taux d’intérêt
- les répercussions éventuelles de la crise sur un certain nombre de secteurs
d’activité : logement, bâtiment
La finance – « poumon de l’économie »- apporte, une nouvelle fois la preuve que son
rythme cardiaque n’est pas régulier : les crises de nature diverses se répètent de plus en
plus souvent : crises de change (du SME en 1992 / 1993), crise Thaïlandaise (juillet 1997
qui s’étend aux autres pays du Sud -Est Asiatique) puis crise Russe (1998) laquelle
s’étend au Brésil (1998 ) crise en Turquie (fin 2000) en Argentine (2001) au Brésil (2002).
Crise de l’immobilier de la fin des années 90 avec ses répercussions dans bon nombre de
systèmes bancaires de pays de l’OCDE.
A ces crises s’en ajoutent d’autres plus spécifiquement financières : LTCM (1998),
effondrement boursier lié à la « Net-Economie » (2000) et crise actuelle des
« subprime ».
Ou bien encore des crises que l’on peut qualifier de crises de « gouvernance » : outre
LTCM (1998) – Crédit Lyonnais (les années 90 / 2000) – ENRON / ANDERSEN ;
WORLDCOM (2002) – AHOLD (2003) – PARMELAT (2004)
Qualifier des faits avec un vocable nouveau ne peut pourtant suffire à fonder une action
publique face à des déraillements répétés de l’économie financière. Surtout c’est oublier
les victimes des crises thaïlandaises, indonésiennes (en 1997 / 1999) ou encore les
victimes de « Bénéfic » en France (FCP de la Poste qui, en 1999 / 2000, n’avait pas
imaginé des baisses de cours aussi importantes (40/ 50%) liées à « la crise de
l’Internet ») alors que le filet de garantie prévu contre les baisses de cours était fixé à
30%.
Ce n’est donc pas le principe du risque qui est en cause mais le fait que pour des raisons
de rendement (de rentabilité, de revenus) les opérations financières réalisées conduisent
à ne plus identifier ce risque, à ne plus le couvrir (par une « contrepartie », par des
fonds propres). Le risque se dilue, il se perd dans une « tuyauterie » sans fin, plus
personne dans la « chaîne financière » n’étant vraiment responsable.
Tout ceci accrédite l’idée d’une économie pas simplement fondée sur l’immatériel mais
surtout d’une économie financière déconnectée de l’économie réelle.
Ce point concernant la gestion, la maîtrise et le transfert des risques peut être développé
à l’infini. Les autorités cherchent d’ailleurs à ce que les banques et les assurances
maîtrisent au mieux ces risques (« Bâle 2 » ; « Sovabilité 2 » ; normes comptables) mais
les surprises sont toujours là : n’est-ce pas le Directeur Général de BNPPARIBAS qui
déclarait (le 24 août dans le Journal « Les Echos ») « aucun acteur de la Place n’avait
fait d’un tel enchaînement –de risques d’illiquidités - son scénario central ».
Comme la crise des « subprime » en cours le démontre les acteurs financiers (banques-
assurances – fonds d’investissement-agences de notation- banques centrales) ne sont pas
neutres ils ont – pour un certain nombre-, à des titres divers, été parties prenantes de
cette crise.
On a ainsi pu constater que divers établissements financiers dans plusieurs pays ont été
touchés par cette crise :
- Aux USA : la situation née des « subprime » était connu depuis fin 2006 avec les
difficultés d’établissements spécialisés dans la distribution des crédits immobiliers à
risque.
Selon certaines informations (citées par le Journal Le Monde du 23 août) la crise des
subprimes aurait déjà provoquée 84 faillites ou fermetures de sociétés de crédit tandis
que la réputation d’un établissement comme Bear Stearn a été entachée.
- En France : plusieurs fonds souvent de type OPCVM monétaires liés aux groupes
BNPP, AXA et à la banque ODDO ont été gelés ou fermés provisoirement. Il en a été de
même au Luxembourg bien que l’information fasse défaut à ce sujet.
L’évolution des cours boursiers de ces établissements (et de quelques autres dont la SG,
NATIXIS) ont, à cette occasion, été « bousculés » et, il y a fort à parier que les résultats
des banques devraient en ressentir les effets pour le second semestre.
D’ailleurs certaines estimations font état d’une perte de 150 milliards de $ pour les fonds
d’investissement dont certains sont des filiales de banques européennes sans oublier les
assurés détenteurs de contrats multi supports, de Sicav ou fonds communs qui ont été
souvent dopés avec des produits à risques.
Enfin il faut noter le rôle ambigu des agences de notation avec leur fonction d’aide à la
structuration des produits financiers et de notateur de ces derniers. Leurs délais de
réaction et l’opacité de leurs méthodes ayant d’ailleurs fait l’objet de nombreuses
critiques.
Ces débats ne sont pas prêts de s’éteindre : dans cette crise la coordination (à observer
la chronologie des interventions) entre les instituts de la zone euro, de la FED, de la
Banque du Japon semble avoir fonctionné correctement.
Il reste que la masse des liquidités introduites a été massive et a, en quelques jours,
dépassé les 300 milliards d’euros.
Alors que l’inflation est basse, il reste à savoir maintenant quel va être le rôle de cet
afflux –temporaire ?- de liquidités dans une économie mondiale qui pourtant n’en
manque pas (ARTUS). Cette situation peut de plus encourager les plus intrépides à
prendre de nouveaux risques puisqu’ils savent que les Banques Centrales seront là pour
leur éviter des « corner ».
Il reste également à savoir comment vont évoluer, à court et moyen terme, les politiques
monétaires de la BCE ainsi que celles de la FED : hausse – baisse ou statut quo : là aussi
les prescriptions des économistes varient.
Enfin, il faut remarquer que dans cette crise, il existe une grande absente de marque de
la coordination monétaire : la Chine laquelle pourtant ne manque pas d’épargne
puisqu’elle contribue assez largement à financer les déficits publics américains !
Bref si la finance est le poumon de l’économie, l’économie est dans le social (et
réciproquement) et le social dans la politique : pour autant il ne s’agit pas au nom de
cette « globalité » de tout globaliser par une espèce de fuite mais de bien identifier
l’enchaînement des causes et des effets sinon toute action de correction ou / et de
régulation s’avèrera impossible.
La régulation :
Voilà un vocable « valise » qui peut être source de convergences comme d’ambiguïtés
puisque peuvent à la fois s’y référer les partisans d’une « intervention (plus ou moins
discrète) de l’Etat » comme les partisans d’un « accompagnement de la libéralisation ».
Mais quittons ce terrain quelque peu idéologique et sans être naïfs sur les intentions
observons les faits : la régulation se cherche car elle court bien souvent après
l’innovation financière. D’autant que l’innovation financière s’inscrit dans un
environnement concurrentiel fort, peu à même de contraindre à priori, des acteurs
financiers dont l’activité à haute valeur ajoutée est de plus délocalisable.
Le thème de la régulation, comme à chaque crise, revient donc en force mais comme
pour toute situation la volonté partagée d’aboutir à des améliorations est indispensable.
Ainsi la nécessité de transparence soulignée par Nicolas SARKOZY dans son courrier à
Angela MERKEL (celle-ci ayant pourtant été bien seule lors du G7 du Printemps visant
à restreindre le laisser faire anglo-saxon sur les hedge funds) est bien nécessaire mais,
cela n’est pas à la hauteur des enjeux car tout le monde n’a pas intérêt à cette
transparence sinon pourquoi la quasi-totalité des hedge funds ont-ils leur siège dans des
paradis fiscaux ! ?
De même la mise en cause actuelle des seules agences de notation masque le fait que la
chaîne des responsabilités et des acteurs est beaucoup plus vaste et couvre également : les
banques, assurances, fonds d’investissement ; les opérateurs de marché ; les analystes
Il faut aussi être attentif à ne pas faire porter des risques financiers accrus sur les
ménages impliquant des effets dépressifs sur les économies réelles voir sur les banques et
les assurances lesquelles doivent continuer à remplir leurs missions de financement de
l’économie.
Pour conclure (provisoirement) il se peut bien que d’ici quelques mois cette crise ne soit
plus qu’un mauvais souvenir : une remontée des marchés financiers après correction, une
politique monétaire ajustée et concertée (entre les différentes zones géographiques) venant,
après ces crises à répétition, éloigner les difficultés et renforcer cette impression de déjà vu.
En rester là n’est, à l’évidence, pas suffisant : la question se pose donc de savoir comment
réduire les risques de cette « nouvelle finance » sans pour autant se priver de ses apports
( ?) Comment être « outillé » aujourd’hui pour faire face demain à la prochaine crise ( ?)
Car ne rien faire, serait une attitude coupable de la part des « acteurs publics » si du moins
on partage le souci de l’intérêt général, aussi bien que les liens (causes / effets) qui existent
entre la sphère de l’économie réelle et celle de l’économie financière et d’une façon
générale entre l’économique et le social.
a) il ne semble pas que les nouvelles normes comptables et celles de « Bâle 2 » -bien que
récentes- soient aujourd’hui d’un grand secours pour juguler les excès de la crise des
« subprime ». Il ne semble pas non plus que le « contrôle indirect » (effectué à partir des
banques sur les fonds) prôné notamment par la Commission Bancaire pour contrôler les
hedge funds soit également suffisant.
3 : Sélection bibliographique
Le 19 : Réunion de la FED.
- crédits immobiliers « mortgage » : type de crédit immobilier (surtout utilisé dans les
pays anglo-saxons) dont le bien acheté à crédit est hypothéqué. Propriété du créancier,
le bien constitue une garantie qui permet au ménage de souscrire d’autres crédits
(généralement à la consommation)
- liquidités : la liquidité d’un actif mesure son caractère aisément négociable (à l’achat
ou à la vente).
- valeur liquidative : estimation de la valeur d’un fonds obtenue en divisant son actif net
par le nombre de parts qui le compose.
- crise de liquidité : cette crise survient si des agents économiques ayant besoin de
ressources liquides doivent vendre prématurément des actifs peu liquides dont alors le
prix chute.
- fonds d’investissement : ces sociétés ont pour objet d’investir sur différents marchés
avec des degrés de risques financiers variés. Parmi eux les « hedge funds » (fonds
spéculatifs) sont spécialisés dans les investissements risqués (dont le marché des
« subprime »)
- titrisation : il s’agit d’une technique financière qui permet de transformer des actifs
illiquides en titres liquides (obligations ou autres). Cette technique permet de sortir du
bilan des actifs, d’accéder ainsi à de nouvelles sources de financement, de transférer des
risques à des investisseurs : voilà pour les avantages habituellement reconnus à cette
technique financière ; l’inconvénient majeur étant une dilution des risques.
- « Les 100 mots de la fiance » : Bertrand JACQUILLAT (2006 – PUF : Que Sais je ?)