Documente Academic
Documente Profesional
Documente Cultură
OBJETS BIZARRES
Note sur l’imaginaire scientifique
Bernard Pasobrola
Même s’il prétend ne plus croire aux mythes et légendes ou cosmologies antiques,
notre monde est de plus en plus soumis aux pouvoirs des fées en blouse blanche
oeuvrant au sein des laboratoires. Clones, OGM, embryons congelés, animaux
transgéniques, êtres hybrides, biopuces, nanoparticules, des objets bizarres,
inclassables, aux frontières du réel et de l’imaginaire, de l’animé et de
l’inanimé, envahissent notre monde de représentations et notre monde
physique, alimentent notre curiosité et aussi notre inquiétude.
La biologiste Evelyn Fox Keller note qu’il est impossible de séparer un énoncé scientifique de la façon
dont nous structurons et construisons notre monde social et matériel. (Le rôle des métaphores dans le
développement de la biologie, ed. Les empêcheurs de penser en rond, 1989). On ne peut pas non plus
séparer l’évolution des sciences de l’univers métaphorique dont elles sont issues et qu’elles cherchent,
en quelque sorte, à réaliser. Dans L’origine des espèces, Darwin parle de la sélection naturelle comme
d’une puissance toujours prête à l’action, qui repousse, accumule, travaille, scrute, favorise, rejette.
Bref il prête des intentions ou une volonté humaines
à une loi naturelle. Pour les besoins de son exposé, il
a recours à la personnification de la force qu’il
nomme sélection naturelle. Il s’en explique :
« Chacun sait ce que signifient, ce qu’impliquent ces
expressions métaphoriques nécessaires à la clarté
de la discussion… Qui donc critique un auteur
lorsqu’il parle de l’attraction ou de la gravitation,
comme régissant les mouvements des planètes ? »
1
Mais nous ne sommes généralement pas conscients des métaphores par lesquelles nous pensons. D’où
l’intérêt de se pencher sur la pensée métaphorique inconsciente qui est réfléchie dans le langage et qui
peut être étudiée grâce à lui.
2
sociétés néo-libérales, la logique d’entreprise envahit massivement la
symbolique du corps. On parle de plus en plus de commerce d’ovules,
de projet parental, de mères porteuses, d’ embryons surnuméraires, de
sous-produits du corps humain, etc.