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Le terme de laïc vient du latin laicus et du grec laïkos signifiant «qui appartient au
peuple» par opposition aux organisations religieuses. Considéré par certains comme un
élément des démocraties modernes, son application reste cependant imparfaite et différente
selon les Etats à travers le monde. Il ne s’agit pourtant pas d’une idée nouvelle puisque déjà
au Ve siècle le pape Gélase Ier dans sa doctrine des deux glaives distinguait le pouvoir
temporel et l’autorité spirituelle. Le concept moderne quant à lui apparaît lorsque les Etats
tolèrent des religions différente de celle qui les identifiaient jusque là.
Les États-Unis sont une République fortement imprégnée par les valeurs chrétiennes.
Pourtant, dès l’époque de la Révolution américaine, l’idée de laïcité est un concept
incontournable en Amérique. Ainsi, la Déclaration d'indépendance américaine en 1776, fait
référence à un Dieu créateur qui légitime les droits de l’Homme. Les pères fondateurs des
États-Unis se sont prononcés en faveur de la séparation des Églises et de l’État tel Thomas
Jefferson, George Washington, James Madison, John Adams ou encore Thomas Paine pour
qui : « De toutes les tyrannies qui frappent l’humanité, la pire est la tyrannie en matière de
religion ». Officiellement, la religion est séparée de l’État par le premier amendement de la
constitution de 1787. Fait notable pour l’époque, ni la constitution ni la Déclaration des Droits
ne font référence à Dieu ou à la Providence. Ainsi, depuis la fin du XVIIIe siècle, il n’y a pas
de religion officielle dans ce pays. Pourtant, les références à Dieu sont omniprésentes dans la
pratique politique : George Washington, fut le premier président à introduire le serment sur la
Bible, alors que la constitution ne prévoyait qu’un simple serment. Contrairement à la France,
cependant, dans le système éducatif américain, l’État fédéral ne subventionne aucune école
religieuse. La définition du Dieu auquel se réfère l’État américain est pensée et vécue comme
le point commun à toutes les religions, il ne s’agit donc pas d’un Dieu précis, attaché à un
culte défini. D’une manière différente de la France, où l’État rassemble par son indifférence
aux cultes, l’État américain rassemble en créant un point commun qui est le fait de croire.
C’est la conséquence étonnante d’une laïcité tolérante : en se refusant toute ingérence étatique
dans la vie religieuse des citoyens, les fondateurs des États-Unis ont attiré dans leur pays de
nombreux immigrants très religieux, parfois brimés dans leurs pays d’origine
Depuis 1937, la constitution turque de 1921 proclame que « l’État turc est
républicain, nationaliste, populiste, étatiste, laïque et réformateur ». Il s’agit du seul Etat de
tradition musulmane à être laïc. La laïcité turque date des origines de la République fondée
par Mustafa Kemal dit « Atatürk » (« le père des turcs ») et a été imposée par la révolution
culturelle kémaliste. En effet, à partir de 1924, Mustafa Kemal fait de la laïcité le principe
fondateur de la nouvelle Turquie républicaine qui succède à l’Empire ottoman. Il s’agit de
faire en sorte que la Turquie échappe au sort réservé à l’ensemble d’un monde musulman
alors colonisé par les puissances européennes : en adoptant les valeurs des vainqueurs, il
sauve la Turquie de la domination européenne et s’imposa comme interlocuteur
incontournable. La Turquie étant un Empire pluriethnique et multiconfessionnel, l’idée s’est
très facilement concrétisée. Ainsi dans ses mêmes années un certain nombre de réformes ont
été réalisées, telles l’interdiction de la polygamie, l'obligation de prier en turc, et non plus en
arabe, l'adoption du calendrier chrétien, avec le dimanche comme jour de repos
hebdomadaire. Cependant, aujourd’hui la laïcité rencontre certaines limites. En effet, la
société turque a changé, ce qui entraîne beaucoup de tensions. Aujourd’hui, avec le
capitalisme turc et le phénomène entrepreneurial généralisé, un constat doit être fait :
l’entrepreneur turc d’aujourd’hui appartient à des tendances islamiques très conservatrices.
Par ailleurs, on assiste à la montée en puissance du nationalisme en réaction à la
reconnaissance internationale croissante du génocide arménien, ce qui entraîne une ré-
islamisation évidente de la société et de l’Etat. D’une part, on assiste ainsi à une
multiplication des incidents provoqués par le port, de plus en plus visible, présenté par les
islamistes comme protégeant "de l'agression culturelle occidentale". D’autre part, la fonction
publique, jadis fief de la laïcité, tend à être progressivement investie par des fonctionnaires
issus des facultés de théologie, ou des lycées religieux. Le ministre des Affaires étrangères
Abdullah Gul a toutes les chances d'être élu président lors d'un troisième tour se scrutin au
Parlement et son épouse âgée de 42 ans deviendrait alors la première Première dame de
Turquie à porter une tenue islamique depuis 1925. Du coup, elle emménagerait dans le palais
autrefois occupé par Mustafa Kemal Ataturk, le père de la Turquie moderne et laïque.
Enfin, d’autres Etats tels Cuba en 1959, l’Inde et le Portugal en 1976 et l’Uruguay
en 1997 adopteront des formes proches de la laïcité dans leur Constitution..
Il s’agit des pays reconnaissant aux Églises un statut spécial par rapport aux autres
associations ou dont la constitution fait référence à Dieu. La constitution de ces pays établit la
séparation de l’Église (ou plutôt des religions, au pluriel) et de l’État.
En Italie, Le pays est sous régime concordataire depuis les accords du Latran de 1929,
pour lesquels le catholicisme était la religion de l’État, et ont été incorporés dans la
constitution actuelle, de 1948, qui affirme dans son article 7 l’indépendance et la souveraineté
de l’État et de l’Église catholique, « chacun dans son ordre propre ». Suite à des problèmes
juridiques posés par la contradiction entre les accords du Latran et la constitution de 1948, en
particulier en matière matrimoniale, un nouveau Concordat fut négocié en 1984. Si celui-ci
abandonne le statut de religion d’État de l’Église catholique, il affirme en revanche que « les
principes du catholicisme font partie du patrimoine historique du peuple italien » et maintient
l’enseignement de la religion catholique dans les écoles.
Bien que n’étant pas sous régime concordataire, l’Irlande est fortement marqué par sa
tradition catholique. La constitution fait référence à la Très Sainte Trinité, et un statut
particulier est accordé à l’Église catholique, qui joue un rôle important dans le pays. La
constitution russe de 1993 pose les principes de la laïcité dans la fédération de Russie.
Pourtant, depuis la chute du régime communiste, le pays connaît un renouveau de la religion
orthodoxe et une progression de l’islam. En 2006, dans quatre régions, les cours de
civilisation orthodoxe sont obligatoires dans les écoles. Ailleurs, ils restent facultatifs. Le
patriarche de Moscou est présent aux cérémonies officielles. L’islam est enseigné dans les
républiques du Caucase.
En définitive, la laïcité prends des formes variés et progresse à travers le monde.
Cependant, les pays avec une religion d’Etat qui jouit d’un statut privilégié, sans pour autant
constituer un "État religieux" au sens où le pouvoir n’y est pas exercé "au nom de Dieu" sont
encore légion. Les pays théocratiques sont quant à eux bien moins nombreux ainsi, le Vatican,
l’Arabie saoudite, l’Iran et la République des Maldives.