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Collectif coordonné par ÉHsabeth Dorier-Apprill

E DI T I O I \ S
DU T E M P S

2cco
Mexico :
les ambiguités d'une mégapole
Alain Musset
Directeurd'étudesà IEHESS,Paris

Mexico est aujourd'huile symbolede cesvilles géantesqui, partoutdansle


monde,accumulenttous les problèmesd'uneurbanisationincontrôlée:con-
gestion,pollution,dégradationdu milieu naturel,déficiencedes servicesur-
bains,accroissement desclivagessociauxet des disparitésspatiales... Sur ce
thèmela littératureest abondante,depuisle romanfameux de CarlosFuentes,
La regiôn mas transparente,publié au Mexique en 1958,jusqu'à celui de
JeanVautrin, Le roi desordures, édité chezFayarden 1997. En effet, I'un des
< héros>>du romande Vautrin n'estautrequ'unpersonnage réel, RafaelGu-
tienez, qui a utilisé sesliens privilégiésavec le parti au pouvoir au Mexique
depuis les années1920 (le Parti révolutionnaireinstitutionnelt)pour faire
fortunesur le dos despepenadore,r - cesmiséreuxchargésde trier les monta-
gnesde déchetsurbainsde la gigantesque déchargede SantaCruz Mayehual-
co, installéeaux limitesdu District fédéral.
C'est au milieu des années1980,à la suite du tremblementde terre de
1985,que cetteimagenégativede Mexico s'estimposée.Dès 1986,la revue
Autrementplaçait <<Mexico,entre espoir et damnation>.En 1987, Miguel
Messmacher publiaitMéxico,Megalopolis,une étudequi mettaiten évidence
les dysfonctionnements d'uneagglomération devenueen grandepartieincon-
trôlable.L'annéesuivante,ClaudeBataillonet Louis Panabière, en se fondant
sur les donnéesstatistiques officielleset sur de nombreuses étudesde démo-
graphieprospectiveet comparative,érigeaientla capitalemexicaineau rang
de plus grandeville du monde. 1987-1988apparaîten ce senscoffImeune
époquecharnière,car c'est aussi le moment où le prestigieuxColegio de
México publie son premierAtlas de la ciudad de Mexico et où la Revuede
Géographiede Lyon sort un numérospécialintituié < Mexico, regardssur ia
plus grandeville du monde>>,sousla directionde FrançoisThomas.Dansce
domaine.le point de vue des Nords-Américains n'a fait que confirmerl'im-
pressionde désastreimminentqui menaçaitleurs pauvresvoisins du Sud,
commele montrele livre de JonathanKandell,Thecapital. Thebiographyof
lvlexicocityz. Ce n'est donc pas un hasardsi l'action du célèbre film de

En juillet 2000,le PRI a perdul'électionprésidentielle, un véritableséisme


ce qui représente
politique.
Kandeli.I 988.
Lestrèsprandes,.'iliesà:uisle s;ioiiç:

science-fictian, Tclal Recall,débuteda;.isunevrlieap*ealypiique qrii ressem-


ble étrangement à Mexico: quand Arnold Schwarzenegger s$ii du métro.
poursuivipar sesennemis,le spectateur avertidécouvrr. qu.i le Cécornaturel
choisipar PaulVerhovenpûur iliustrersonproposn'rst auiieçue ceiuide la
stationlnslrrgentes- situéeau cæui de la capitalemexicaine.
Flus encoreque ies problèmesd'insécurité, c'estia poiiutionde !'air qui
sembledevcir caractériser < la plus grandeville du rc+ndeo. *ans s*n His-
toire de Mericot, SergeGruzinskiparle ainsi de < l-'apocalyp-"e au -jourle
jcur >. C'estaussil'opinionde Vautrin, dansLe rc! des orài;res: < L'aii raré-
fié des montagnes est immobile.Très haut,au-dessus <iesmontagnes ennei-
géesdu Popocatepetl stagneun nuagede mort recrachépar I'industriedes
hommes (p.25).Ce discoursn'estpascompiètement infanclécar la concen-
"
trationriesactivitésindustrielles2 et le développemeni de Ia circuiationauto-
mcbile,dénoncépar FedericoFernândezChristliebdansun livre au tiire ér'o-
caaeur,La.smodernasruedasde la destrucciôn,el autcmôvi!en la Ciudad de
México (Les roues modernesde la desrrucTion,I'autornobiledans la ville de
Mexico3),a entraînéune dégradation rapidede la qualitéde i'air dansun bas-
sin endaréiquesitué à 2 000 mètresd'altitudeet ferrrrépar des sommetsqui
dépassent allègrementles 5 000 mètres.La productionet les émissionsd'ozo-
ne, de dioxydede soufre,de monoxydede carbone,de plomb et de particules
en suspensiondépassentIa limite officielle de 1t0 (indice métropolitainde
qualité de I'air) plus de 300 jours par an sur I'ensembiede I'agglomération.
Bon an, mal an, environ90 jours présentent desindicesde pollutionplusrie
deux fois supérieursà la normeen vigueur(principalement au coursdesmois
d'hiver).
Cettesituations'expliqueen grandepartiepar la croissance dérnographique
et I'expansionurbainede I'agglomération. En 1970,l'espacebâti était de 650
km2.Aujourd'hui,il dépasseles I 300 kmz : il a donc doubiéen 20 ans.Au-
tour du noyaucentral(le District fédéral),s'agglutineune cûuronnede vilies
périphériques dont la gestionestassuréeen théoriepar I'Etatde Mexico, mais
qui appartiennent à une entité statistiquereconnuepar tous les acteursde la
vie politique et économiquemexicaine: l'Aire métropolitainede Mexico
(AMCM). Ce vasteensembleregroupeles 16 Délégationsdu District fédéral
(plus de 8 millions d'habitantsrecensésen 1990)et 27 municipalitésconur-
baines(presque7 millions d'habitantscomptabiliséslars du dernierrecense-
ment).Une nouvelleenquête,réaliséeen 1995,a montréque les chiffresde
1990 avaientété largementsous-estimés par le gouvernemenf. Aujourd'hui,
on estime la populationde l'Aire métropolitainede Mexico à i 8 millions
d'habitants,Ia majoritéd'entreeux vivant à I'extérieurdesfrontièresadminis-
trativesdu District fédéral.Or, les limitesde l'Aire métropolitainede Mexico
sontencorearnenées à s'étendrecar elles se fondentsur la continuitéspatiale

l. Grusinski,
1996.
Puente,
in Beaujeu-Garnier, l99l
-). FernândezChristlieb,I 991.
Mexico : les ambiguïtés d'une mégapole

du tissu urbain et sur la croissancedes relationsentretenues par les villes


périphériquesavec la zone centralede I'agglomérationl.Même si tous les
espacescomprisdanscettedéfinitionne sontpas urbanisés,ils appartiennent
directementà I'aire d'influencede Mexico et ne fonctionnentqu'en relation
étroiteavecI'ensemble desunitésurbainesqui la composent.
Pour autant,il ne faut pas se laisserprendreau vertigedes chiffresni au
piègedesmots.Trop souventprésentée coûrmeun monstredévoreurd'espace
et d'énergie,Mexico n'enrestepasmoinsune ville qui créeen permanence de
la richesseet qui n'a pas encoredigérétous les espacesruraux situéssur ses
marges- et parfois au cæur même de I'aire métropolitaine.En effet, celle-ci
couvre un peu plus de 4 600 km2, dont moins de 30 7o sont effectivement
urbanisés.Même le District fédéraln'échappepas à cette règle: sur I 500
km2,les espaces non bâtis(parcset jardins,réservesécologiques, terresculti-
vées)représentent encore4OVodu territoire.La délégationla moinsurbanisée
restecelle de Milpa Alta, situéeau sud du District fédéral,sur les flancs du
massif montagneuxde I'Ajusco.Quand on se promènedans les champsde
milpas (maïs)ou de nopales(figuiers de barbarie)qui couvrentla plus grande
partiede la délégation,on éprouvequelquesdifficultésà s'imaginerque I'on
est encoredansI'aire administrativede la capitalemexicaine,une des plus
grandesvilles du monde.La populationvit toujoursdans des villages mal
reliés au centrede I'agglomérationet la vie quotidienneresterythméepar les
contraintesdu calendrieragricole2.
Le terme de < mégalopole>, souventemployépour désignerI'aggloméra-
tion de Mexico est à cet égardimpropre.Iæ manquede continuitédu bâti,
l'éclatementdes structures, la dispersiondes activités,la faiblessedes points
nodaux(hormisla zonecentraledu District fédéral),le manquede relations
entre les pôles secondaires (Toluca,Puebla,Cuernavaca, Pachucaou même
Querétaro)font que la régiondominéepar Mexico est tout au plus une mé-
galopoleen formation3,qui ne peut pas encorerivaliseravec le gigantesque
amasde conurbationsde la côte Atlantiquedes États-Unis,le Tokaïdojapo-
naisou le grandarc métropolitaineuropéen.A lui seul,le District fédéral(qui
correspondaux limitesadministratives de la ville de Mexico, à I'exclusiondes
municipalitéspériphériques)représentenéanmoinspresque24 Vo du PIB
mexicain(en 1997)pour moinsde 10 lo de la populationtotale4.Si I'on rai-
sonneà l'échellede la mégalopoleen formationet que I'on prenden compte
les résultatsdesÉtatsvoisins(Puebla,Tiaxcala,Hidalgo,Querétaro,Morelos,
État de Mexico), les chiffres révèlent I'inégaiité des structuressocio-
économiques et démographiques de la nation: 42 Vodu PIB et un quartde la
populationsur seulementTVodu territoire.

1. C'est ainsi qu'en 1950 I'AMCM n'avait intégré qu'une seule municipalité extérieureau District
{édéral, celle de Tlalnepantla.
) Musset, in Chaléardet Dubresson(ed.), 1999.
Banzo. 1999.
A
Musset, 1996.
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d'unemégapoLe
Mexico: Lesambigui:tés

À I'intérieurmêmede l'agglomération, les disparitéssocio-spatiales sontde


plus en plus fortesentrequartiersaisés(l'ouestet le sud)et quartierspauvres
(le nord et I'est),mêmesi le partagedes territoiresurbainsn'estpas toujours
aussi clairementétabli (voir carte).Là encore,la caricaturel'emportetrop
souventsur le discoursscientifique. Si I'on découvreune bellemaisondans
une zone popuiaire, elle est automatiquement et injustementattribuéeà un
trafiquantde drogue- commesi les narcosn'étaientpascapablesde s'instal-
ler avecles autresnouveauxrichesdansl'écrinde verduredesLomasde Cha-
pultepec,et comme si les travailleursémigrésaux États-Unisn'étaientpas
capablesd'investir leurs dollars dans leur quartier d'origine pour mieux
éblourrleursanciens voisins.
De la mêmemanière,les centresde gravitéde la pauvretéurbainese sont
déplacés: Nezahualcoyotl,lûngtempsprésentéecomme le bidonville par
excellencede Mexico, estdésormaisune municipalitéconsolidée,où la majo-
rité deshabitantsdisposede tous les servicesessentiels (électricité,eau pota-
ble, drainage)et dont l'équipede foot-ball (les Toros de Neza)joue en pre-
mière division. Les quartierssous-intégrés de I'agglomérationse trouvent
désormaisplus au nord et plus à I'est.Au nord le paysageapparaîtcolrlmeune
imbricationd'agricultures résidueileset de marécages, d'usines,et de toutes
les formesd'un habitatpopulaireplus ou moinsprécaire,plus ou oins régula-
risé.Dansun cadrenaturelhostilede collinesstériles,de versantsravinés,de
lagunessaumâtres, les contrastess'accusent entreune industrieécrasantI'en-
vironnementde toutessespollutions,et les étenduesrampantesdes bidon-
vilies. Plus à I'est,vers Ecatepecet Chalco,plus de 76 Vo deslogementsne
sontpas reliésaux égoutset moins de 30 Voont un accèsdirectà I'eaupota-
ble.
Depuis le débutdes années1980,les processusde fragmentationspatiale
liés à I'apparitionde nouvellespratiquessocialeset à de nouvellesformes
d'urbanité(multiplicationdes quartiersaisésferméset des centrescommer-
ciaux intégrés)ont cependantchangéle visagede la ville, tollt en renforçant
des tendanceslourdes: les grandesgaleriescommerciales(type mall nord-
américain)ont toutesétébâtiesdansles zonesfavorisées du sudet de I'ouest
de I'agglomération, alorsque dansles quartiersmoinsaisésde I'estet du nord
ce sont les marchéstraditionnelsqui dominent.Dans cet ensemble,c'est le
çentreancien,rebaptisé<<centrehistorique>, qui a fait les frais de la moder-
nisationdesmodesde vie mexicains, en perdantunegrandepartiede sa légi-
timitésocialeet de savaleuréconomique (cf annexe).
DansLc ville et son double,Ia parabole de Mexicot,JérômeMonnet s'in-
terogeait sur les représentations ambiguësde la mégapolemexicaine,parfois
qLialifiéede ( monstruopole >>.et sur ce qu'ellessignifientau momentoù les
processus d'urbanisation, à l'échelleplanétaire, se font de manièremassiveet
simuiianée - principalement dansles pays de I'ancien< TiersMonde>>. De La

l i\{onnet, 1Ç92
:';';

..:.
Lestrèsprandesvillesdansle monde

région la plus transpqrentede I'air à Total Recall,les imagesse bousculent,


les reflets se troublent.À I'aubedu XXIe siècle,Mexico n'estpourtantdéjà
plus considéréecommela < plus grandeville du monde>. Elle est largement
dépassée par I'agglomération de Tokyo. Sur le continentlatino-américain,Sâo
Pauloa sûrementpris la relève.Mais le débatsur la taille réellede la capitale
mexicaine estassezvain.
Même si elle est moins peupléeque prévue à I'aubedu III. millénaire,
Mexico resteI'unedesplus grandesvilles du monde,commeelle l'étaitdéjà
en 1519,avecplus de 200000 habitants,quandCortésdécouvrit,émerveillé,
les splendeursde l'ancienneTenochtitlân.La ville d'aujourd'hui_, comme I'a
bien montréSergeGruzinskidans sonHistoire de Mexico, est une cité mé-
tisse qui se situe au carrefourde plusieurstraditions: indienne,espagnole,
européenne et nord-américaine. S'il ne restepresqueplus rien de la première
étape,mis à part les ruines du Templo mayor (le grand templepréhispanique)
sur le côté est de la cathédrale,Ia floraison de gratte-cielaux formes auda-
cieusesle long de I'avenueReforma(les < Champs-Elysées > locaux),montre
que, malgré la pollution, les tremblementsde terre ou les criseséconomiques
récurrentes,la mégapolemexicaineoccupe toujours une place essentielle
dansles arcanesde I'urbanismecontemporain.

Bibliographie
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