Documente Academic
Documente Profesional
Documente Cultură
lui offre successivement la logique, la mtaphysique, la morale, la physique. Tout cela est
trop rbarbatif, dit le bon bourgeois, il y a trop de tintamarre l-dedans, trop de
brouillamini. Que voulez-vous donc que je vous apprenne ? Apprenez-moi
lorthographe puis vous menseignerez lalmanach, pour savoir quand il y a de la lune et
quand il ny en a pas. Il y a peu de scnes aussi gaies. Celle des teneurs nest gure moins
divertissante. M. Jourdain paie les titres quon lui donne, et il met le comble au ridicule en
avouant quil les paie. Voil pour mon gentilhomme, dit-il, voil pour le monseigneur, et
voici pour ma grandeur. Ma foi, ajoute-t-il, sil va jusqu laltesse, il aura toute la bourse.
tre gentilhomme est pour M. Jourdain le comble de la flicit et il donnerait, dit-il
lui-mme, deux doigts de sa main pour avoir ce bonheur. Aussi est-il trs flatt de lamiti
que lui porte Dorante, gentilhomme de la cour qui, connaissant le faible du bonhomme, lui
soutire, titre demprunts, le plus dargent possible.
M. Jourdain sest mis dans lesprit, comme tous les grands de lpoque, de faire
laimable auprs dune dame de haut rang. Le comte Dorante lui conseille, pour sattirer les
faveurs de la dame, de lui envoyer un beau prsent ; le bon bourgeois sempresse de suivre
cet avis, et le comte, qui doit remettre le cadeau, le remet en effet, mais comme venant de lui.
Cest pour cette dame quil prie son matre de philosophie dcrire un billet tendre qui ne
soit ni en vers ni en prose, tellement il veut quil soit de bon got ; et il dcouvre avec
tonnement que depuis trente ans il fait de la prose sans le savoir.
M. Jourdain a une fille quil ne veut marier, cela va sans dire, qu un homme de
bonne maison. Il refuse un jeune homme, nomm Clonte, parce quil nest pas noble.
tes-vous gentilhomme ? Telle est !a premire question que M. Jourdain lui adresse. Il
veut que sa fille soit marquise. Pour parvenir ses fins, le prtendant se dguise et se
prsente comme le fils du grand Turc qui vient demander la fille de M. Jourdain en mariage.
Celui-ci, trop heureux dune telle alliance, consent se faire mahomtan pour avoir
lhonneur dtre le beau-pre du fils du grand Turc. Les jeunes gens se marient, et quand le
mariage est consomm, M. Jourdain saperoit quil est puni, mais trop tard, de son sot
orgueil.