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En finir avec le chômage : un choix de société !: Relancer la croissance ou réduire le temps de travail, un choix dont dépend la survie et l’avenir de
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En finir avec le chômage : un choix de société !: Relancer la croissance ou réduire le temps de travail, un choix dont dépend la survie et l’avenir de

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About this ebook

Depuis le choc pétrolier de 1973, nous sommes confrontés à une crise économique, dont l’une des principales conséquences est la hausse du chômage. Son augmentation a des répercussions économiques, politiques et sociales qui menacent notre qualité de vie et notre processus démocratique. En étudiant les causes et les conséquences du chômage, il apparaît que nous avons le choix entre deux solutions pour en finir avec ce fléau : relancer la croissance du PIB ou réduire le temps de travail.

Pour être envisageable, la solution adoptée devra nous procurer une vision de l’avenir viable, atteignable et désirable. C’est-à-dire, de créer des emplois en évitant l’effondrement, de sécuriser l’accès aux subsistances à court, moyen et long terme et de procurer les moyens de nous socialiser, de définir notre identité, de structurer le rythme de notre existence, de nourrir l’estime de soi, de nous distinguer, de nous affirmer et de nous accomplir autrement que par l’activité professionnelle et la consommation.

L’objectif de cet ouvrage est de démontrer que le choix entre la relance de la croissance du PIB ou la réduction du temps de travail n’est pas un choix économique, mais un choix de société, dont dépendent la survie et l’avenir de l’humanité.
LanguageFrançais
Release dateDec 18, 2019
ISBN9782312071091
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    En finir avec le chômage - Jean-Christophe Giuliani

    cover.jpg

    En finir avec le chômage : un choix de société !

    Jean-Christophe Giuliani

    En finir avec le chômage :

    un choix de société !

    Relancer la croissance ou réduire le temps de travail,

    un choix dont dépend la survie et l’avenir de l’humanité

    LES ÉDITIONS DU NET

    126, rue du Landy 93400 St Ouen

    Du même auteur

    Le travail, et après ? aux éditions Ecosociété, 2017

    Satisfaire nos besoins : un choix de société ! aux Éditions du Net, à paraître

    © Les Éditions du Net, 2019

    ISBN : 978-2-312-07109-1

    « Tous les hommes se divisent, et en tout temps et de nos jours, en esclaves et libres ; car celui qui n’a pas les deux tiers de sa journée pour lui-même est esclave, qu’il soit d’ailleurs ce qu’il veut : politique, marchand, fonctionnaire, érudit. »

    Friedrich Nietzsche{1}

    « Ce que nous avons devant nous, c’est la perspective d’une société de travailleurs sans travail, c’est-à-dire privés de la seule activité qui leur reste. On ne peut rien imaginer de pire. »

    Hannah Arendt{2}

    « C’est une société de travailleurs que l’on va délivrer des chaînes du travail, et cette société ne sait plus rien des activités plus hautes et plus enrichissantes pour lesquelles il vaudrait la peine de gagner cette liberté. »

    Hannah Arendt{3}

    « Or les travailleurs ne découvrirons les limites de la rationalité économique que si leur vie n’est pas entièrement occupée et leur esprit préoccupé par le travail ; si, en d’autres termes, un espace suffisamment ample de temps libre s’ouvre à eux pour qu’ils puissent découvrir une sphère de valeurs non quantifiable, celle du temps de vivre, de la souveraineté existentielle. »

    André Gorz{4}

    Introduction

    Le choc pétrolier de 1973 a provoqué une crise économique, dont la conséquence directe fut la hausse du chômage. Étant donné que l’augmentation du nombre de demandeurs d’emploi a des répercussions économiques, politiques et sociales qui menacent notre qualité de vie et notre processus démocratique, depuis le début de cette crise, qui n’en finit plus, tous les gouvernements qui se sont succédé au pouvoir ont eu l’objectif d’en finir avec ce « fléau ».

    En fonction de leurs orientations idéologiques, des économistes, des politiques et des experts proposent de multiples solutions. Ceux qui adhèrent à la doctrine ultralibérale défendent une politique de l’offre. Puisque pour eux, la hausse du chômage est due aux rigidités qui pèsent sur la compétitivité des entreprises, pour créer des emplois, ils proposent de supprimer le Smic et les charges patronales, de baisser les salaires, d’alléger le Code du travail, de distribuer le revenu de base, de libérer les prix, de privatiser les services publics, etc. Ceux qui défendent une politique de la demande proposent de mettre en œuvre les 32 heures, de renforcer le Code du travail, de relocaliser l’industrie, et de relancer la croissance du PIB en augmentant la consommation des ménages et de l’État. Pour financer la relance et les investissements, ils proposent d’augmenter les salaires, les dépenses publiques, l’impôt des contribuables aisés, etc.

    Tandis que certaines de ces propositions relèvent d’une conception idéologique, d’autres méritent d’être approfondies et prises en considération.

    Même si certaines de ces propositions ouvrent de nouvelles perspectives, comme l’avait déjà fait remarquer le sociologue et psychanalyste Erich Fromm, les réponses à cette crise, qui est désormais systémique (économique, politique, sociale, écologique, climatique et sanitaire), ne relèvent pas seulement de propositions d’ordre économique.

    « Pour la première fois dans l’histoire, la survie physique de la race humaine dépend d’un changement radical du cœur humain. Mais ce changement n’est possible que dans la mesure où interviennent des changements économiques et sociaux rigoureux capables de donner au cœur humain la chance de changer et le courage et l’envie d’accomplir ce changement. »{5}

    Autrement dit, pour être envisageables, les solutions adoptées pour en finir avec le chômage devront être en mesure de donner une vision de l’avenir viable, atteignable et désirable capable de mobiliser les énergies individuelles et collectives. Pour être viables, ces solutions devront assurer les subsistances, apporter un minimum de confort matériel et préserver la survie de l’humanité à court, moyen et long terme. Pour qu’elles soient atteignables, ces solutions devront s’appuyer sur les infrastructures économiques et sociales existantes. Pour être désirables, ils devront procurer aux membres des couches populaires et de la classe moyenne, ainsi qu’aux cadres, aux chefs d’entreprises, aux entrepreneurs, aux membres des professions libérales, aux agriculteurs, aux artisans et aux commerçants les moyens de changer le rapport qu’ils tissent avec eux-mêmes et les autres. C’est-à-dire se socialiser, définir son identité, structurer le rythme de son existence, nourrir l’estime de soi, se distinguer, s’affirmer et s’accomplir autrement que par l’activité professionnelle et la consommation.

    Avant de proposer des solutions qui soient viables, atteignables et désirables, il m’apparaît important d’identifier les causes de la hausse du chômage. Les décideurs économiques et politiques affirment que sa principale cause est la faiblesse de la croissance du PIB. Pour en finir avec ce fléau, il suffirait donc de relancer la croissance. Les questions qu’il m’apparaît nécessaire de poser sont les suivantes : est-ce que c’est réellement la faiblesse de la croissance qui est responsable de la hausse du chômage ? Si c’est sa faiblesse, quel est le taux qui permettrait de l’enrayer ? Quels seraient les moyens de la relancer ? Est-ce qu’une croissance infinie dans un monde aux ressources finies est viable à moyen et long terme ? Pour terminer, est-ce qu’il y aurait d’autres solutions pour créer des emplois sans relancer la croissance ?

    Afin de répondre à ces questions, dans la première partie de cet essai, j’aborderai les causes et conséquences du chômage. Pour cela, je commencerai par quantifier le nombre de demandeur d’emploi et d’actifs sans emploi. Je poursuivrai en étudiant les conséquences économiques et sociales du chômage, ainsi que son impact sur le budget de l’État. Pour en comprendre les causes, j’étudierai celles qui sont couramment avancées par le Medef et les ultralibéraux. Je terminerai en étudiant les causes et conséquences des gains de productivité et les enjeux du partage des bénéfices générés par ces gains. Ce diagnostic fait apparaître deux solutions : relancer la croissance du PIB ou réduire le temps de travail. Afin d’envisager la plus appropriée, je consacrerai les secondes et troisièmes parties à les étudier.

    Depuis le milieu des années 70, la relance de la croissance du PIB est présentée par les économistes et les politiques comme la seule solution envisageable pour inverser la courbe du chômage. Je consacrerai donc la seconde partie à étudier la viabilité de cette solution à moyen et long terme. Pour cela, je commencerai, d’une part, par calculer le taux de croissance qui permettra d’en finir avec le chômage, et, d’autre part, par proposer des solutions pour la relancer. La croissance étant présentée comme la condition du progrès social, je poursuivrai ce travail en tentant de confirmer ou de réfuter cette affirmation. Pour être envisageable, cette solution doit également être viable à moyen et long terme. Autrement dit, elle ne doit pas provoquer l’effondrement de la civilisation. Je terminerai donc en évaluant l’impact de la croissance sur le climat, les stocks de matières premières, les ressources naturelles et la biodiversité.

    Après avoir étudié la solution de la croissance, j’aborderai celle de la réduction du temps de travail. Pour cela, je commencerai par expliquer pourquoi le rapport au temps est un facteur de changement de mode de vie sur le plan individuel et de transformation sociale sur le plan collectif. Il est important de préciser que je n’aborderai pas le rapport au temps à partir d’une conception physique, métaphysique ou philosophique, mais à partir du temps qui organise le rythme des existences individuelles et collectives au quotidien. C’est-à-dire le temps de l’horloge, du calendrier et de l’emploi du temps. Sur le plan individuel, je tenterai de montrer que le mode de vie et la qualité de vie d’un individu, ainsi que les moyens qu’il utilise pour se socialiser, définir son identité, structurer le rythme de son existence, nourrir l’estime de soi, se distinguer et s’accomplir sont déterminés par le temps libre dont il dispose et son emploi du temps professionnel.

    Sur le plan collectif, puisqu’une société se caractérise par un certain rapport au temps, les enjeux de son contrôle et de son aménagement n’apparaissent pas comme un choix économique, mais comme un choix de société. En effet, celui qui contrôle le temps impose ses valeurs, son mode de production et sa catégorie sociale dominante. En m’appuyant sur les caractéristiques du temps social dominant et de la dynamique des temps sociaux, je relèverai le défi de décrire les processus économiques, sociaux et temporels qui ont provoqué le déclin de l’ordre religieux au profit de l’ordre économique. En m’appuyant sur cette dynamique et un historique des lois sur la réduction du temps de travail, je tenterai ensuite de décrire les étapes de la conquête du temps libre qui ont provoqué une révolution silencieuse du rapport au temps qui est toujours d’actualité aujourd’hui. Non seulement, cette dynamique explique les révoltes de mai 1968 et la crise que subit la France depuis 1973, mais surtout, elle offre les moyens d’en sortir. Ayant montré que la réduction du temps de travail allait dans le sens de l’histoire, je calculerai la durée légale du temps de travail qui permettra d’en finir avec le chômage.

    Puisque la réduction du temps de travail provoquera une baisse du pouvoir d’achat, je proposerai les moyens de le préserver sans pénaliser les entreprises. Pour cela, je commencerai par étudier les dépenses et la part du Smic allouées à l’alimentation et au logement. Ayant étudié séparément les causes de la hausse de ces dépenses, je proposerai des solutions concrètes pour en réduire la part. Après avoir, d’une part, identifié les enjeux de l’intégration sociale et du sens de la vie, et, d’autre part, quantifié le temps libre et proposé un nouvel emploi du temps collectif, je présenterai les activités qui permettront d’organiser le rythme de la société, de se socialiser, de nourrir l’estime de soi et de s’accomplir sur le mode « être ». Ces nouvelles pratiques favoriseront un changement des relations familiales et affectives, ainsi que l’émergence de la démocratie participative.

    La vocation de cet essai est de démontrer que le choix entre la relance de la croissance du PIB ou la réduction du temps de travail n’est pas un choix économique, mais un choix de société, dont dépendent la survie et l’avenir de l’humanité.

    Causes et conséquences du chômage

    Depuis le milieu des années 70, la France et l’ensemble des pays industrialisés sont confrontés à une crise, dont l’une des principales conséquences est la hausse du chômage. Étant donné que les économistes, les industriels et les politiques ultralibéraux affirment que les principales causes du chômage sont la faiblesse de la croissance du PIB et le manque de compétitivité des entreprises françaises, pour créer des emplois, il suffirait donc de la relancer et de supprimer tous les freins à la compétitivité. Afin de confirmer ou de réfuter ces affirmations, il m’apparaît nécessaire de commencer par identifier et par analyser les causes et conséquences du chômage.

    Avant d’aborder les conséquences économiques et sociales du chômage, je commencerai par étudier les modes de calcul officiels des demandeurs d’emploi. Puisque les chiffres officiels ne prennent pas en compte tous les actifs, je proposerai un nouveau mode de calcul des actifs sans emploi. À partir de cette équation, il sera possible de calculer, de suivre et de comparer l’évolution du nombre d’actifs sans emploi sur une longue période. Les conséquences du chômage sont multiples et ne concernent pas que les demandeurs d’emploi. En effet, après avoir montré les conséquences du chômage pour ceux qui n’ont pas la « chance d’avoir un emploi », je présenterai ensuite celles qui concernent les salariés en poste, les chefs d’entreprises et la compétitivité des entreprises. Pour terminer, je tenterai d’évaluer le montant des coûts directs et indirects du chômage sur le budget de l’État.

    Se contenter d’étudier les conséquences du chômage sans en comprendre les causes ne permet pas de proposer des solutions capables d’en finir avec lui. Afin d’en appréhender les causes, je commencerai par étudier celles qui sont couramment avancées par le Medef et les ultralibéraux. En m’inspirant de John Maynard Keynes, je poursuivrai ce travail en étudiant les causes et conséquences de la productivité horaire. En m’appuyant sur les données statistiques de l’Insee, je terminerai en présentant les enjeux du partage des bénéfices générés par les gains de productivité.

    Ayant identifiés les enjeux et les causes du chômage, je serai en mesure de proposer des solutions adéquates pour en finir avec ce fléau.

    QUELLES SONT LES CONSÉQUENCES DU CHÔMAGE ?

    Le chômage est un fléau économique, politique et social qui concerne toutes les catégories socioprofessionnelles. Ces conséquences directes et indirectes concernent les demandeurs d’emploi, ainsi que les salariés en poste, les chefs d’entreprises et la compétitivité des entreprises. Les surcoûts financiers générés par le chômage et la peur du chômage contribuent également à creuser la dette publique de l’État et le déficit de la caisse d’assurance maladie. Avant d’aborder ses conséquences, il m’est apparu nécessaire d’étudier les modes de calcul officiels du chômage et de proposer une autre manière de calculer le nombre d’actifs sans emploi.

    Combien y a-t-il de chômeurs ?

    Chaque mois, l’Insee et Pôle emploi publient les chiffres officiels du chômage. Même s’ils quantifient le nombre de demandeurs d’emploi, ils ne dénombrent pas tous les actifs sans emploi. Afin de les prendre tous en compte, je propose une nouvelle manière de les quantifier.

    Les modes de calcul officiels du chômage

    En France, les chiffres officiels du chômage sont calculés par l’Insee à partir d’une enquête confidentielle réalisée auprès de 100 000 personnes{6}. Selon l’Insee, de 1974 à 2013, tandis que le taux de chômage officiel de la France passait de 3,3 % à 9,8 % de la population active, le nombre de demandeurs d’emploi passait de 734 000 à plus de 2,8 millions de personnes, soit une hausse de 282 %{7} sur 39 ans. Les critères, qui permettent à l’Insee d’identifier un chômeur, reposent sur la définition du bureau international du travail (BIT). Depuis 1982, le BIT propose des critères pour identifier, calculer et comparer le nombre de chômeurs au niveau international. Selon la définition du BIT, un individu peu entrer dans la catégorie de chômeur s’il répond aux critères suivants : être en âge de travailler, ne pas avoir travaillé au cours de la semaine de l’enquête, être disponible pour travailler dans les deux semaines à venir, avoir entrepris une démarche de recherche d’emploi au cours des quatre dernières semaines (répondre à une annonce, s’inscrire dans une agence d’intérim, etc.) ou avoir trouvé un emploi qui commence dans moins de trois mois. Ne correspondant pas aux critères de la définition du BIT, ceux qui sont à temps partiel « subi », en formation, en arrêt maladie ou en congé maternité n’apparaissent donc pas dans les chiffres du chômage de l’Insee. Afin d’obtenir un chiffre plus proche de la réalité, il m’apparaît préférable de s’appuyer sur le mode de calcul de Pôle emploi.

    Les chiffres de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) ne reposent pas sur des enquêtes, mais sur les inscriptions à Pôle emploi. Ces chiffres regroupent les demandeurs d’emploi en cinq catégories.

    -– Catégorie A : demandeurs d’emploi tenus d’accomplir des actes positifs de recherche d’emploi quel que soit le type de contrat (CDD, CDI, temps plein, temps partiel, temporaire ou saisonnier)

    -– Catégorie B : demandeurs d’emploi ayant exercé une activité réduite de 78 heures maximum par mois, tenus d’accomplir des actes positifs de recherche d’emploi

    -– Catégorie C : demandeurs d’emploi ayant exercé une activité réduite de plus de 78 heures par mois, tenus d’accomplir des actes positifs de recherche d’emploi

    -– Catégorie D : demandeurs d’emploi, non immédiatement disponible, non tenus d’accomplir des actes positifs de recherche d’emploi (formation, arrêt maladie, congé maternité, etc.), ainsi que les demandeurs d’emploi en convention de reclassement personnalisé (CRP) et en contrat de transition professionnelle (CTP), sans emploi.

    -– Catégorie E : demandeurs d’emploi non tenus d’accomplir des actes de recherche d’emploi (par exemple : bénéficiaires de contrats aidés, créateur d’entreprise, etc.).

    En intégrant ces cinq catégories, en 2013, le nombre de demandeurs d’emploi de la France métropolitaine comprenait 5,5 millions de personnes, soit 2 fois plus que l’Insee : 3,3 millions de catégorie A, 649 800 de catégorie B, 949 200 de catégorie C, 278 300 de catégorie D et 381 500 de catégorie E{8}. Les 2,7 millions de personnes, que ne prenait pas en compte l’Insee, comprenaient 500 000 demandeurs d’emploi de catégorie A, 1,6 million de salariés à temps partiel subi de catégories B et C, ainsi que 659 800 personnes de catégorie D et E (formation, reclassement, arrêt maladie, congé maternité, contrats aidés, création d’entreprises, etc.).

    Puisque les chiffres de la DARES comptabilisent uniquement les personnes inscrites à Pôle emploi, ils ne prennent pas en compte tous les actifs sans emploi. En effet, une personne en âge de travailler qui n’a pas d’emploi, n’en recherche pas et n’est pas inscrite à « Pôle emploi » n’apparaît dans aucun chiffre officiel du chômage. Afin de les prendre tous en compte, je propose une nouvelle manière de comptabiliser le nombre d’actifs sans emploi.

    Faudrait-il calculer autrement le nombre d’actifs sans emploi ?

    Selon la définition de l’Insee, la population totale comprend la population active et inactive{9}. En m’inspirant de cette définition, j’ai créé une équation qui permet de calculer autrement le nombre d’actifs sans emploi. Selon cette définition, un chômeur est un membre de la population active qui n’a pas d’emploi. Tandis que la population active englobe les personnes qui exercent une activité professionnelle rémunérée et les demandeurs d’emploi, la population inactive comprend les enfants de moins de 16 ans, les élèves du secondaire en second cycle, les étudiants, les femmes au foyer et les personnes à la retraite de plus de 60 ans. N’ayant pas trouvé de statistiques officielles sur le nombre de femmes réellement au foyer (femme au foyer par volonté et non par dépit), j’ai intégré toutes les femmes de 16 à 59 ans à la population active.

    Le statut d’actif étant lié à une activité rémunérée, tandis que la femme au foyer qui fait son ménage est inactive, l’assistante ménagère payée pour le faire à sa place est considérée comme active. Qualifier « d’actif » uniquement ceux qui exercent une activité professionnelle rémunérée ou recherchent un emploi relève d’une imposture idéologique. Cette définition exclut les personnes en âge de travailler qui n’ont pas d’emploi, n’en recherchent pas et ne sont pas inscrites à « Pôle emploi ». Afin d’en finir avec l’exclusion sociale provoquée par cette définition arbitraire, je considère que toutes les personnes âgées de 16 à 59 ans qui ne sont pas des élèves en second cycle ou étudiants font partie de la population active.

    Chaque année, l’Insee publie les données statistiques suivantes : la population totale, l’estimation de la population par sexe et groupes d’âge, les effectifs d’élèves et d’étudiants et le nombre d’emplois à temps plein par branche. Je propose donc d’utiliser ces données pour quantifier la population active sans emploi à partir de l’équation ci-dessous :

    img1.jpg

    – Soit, Pop est la population totale : 65 899 406 hab{10}.

    – « , TPa est le taux population comprise entre 15 et 59 ans : 57,57 %{11}.

    – « , E est le nombre élèves second cycle et étudiants : 5 317 800{12}.

    – « , PAe est la population active emploi temps plein : 25 589 589{13}.

    – « , PAc est la population active sans emploi.

    En 2013, étant donné que la population moyenne de la France (France métropolitaine + DOM){14} comprenait 65,8 millions d’habitants et que les personnes âgées de 15 à 59 ans représentaient 57,5 % de la population, 38 millions d’actifs étaient en âge de travailler. Comme elle avait 5,3 millions d’élèves en second cycle et d’étudiants et 25,5 millions de salariés occupant un emploi à temps plein, sa PAc s’élevait à 7 millions, soit 21,6 % de la population active. Les tableaux ci-dessous décomposent le calcul de la population active sans emploi en 2013.

    img2.jpg

    En 2013, comme l’Ordonnance n°82-270 du 26 mars 1982 était encore vigueur, un salarié avait légalement le droit de prendre sa retraite à 60 ans{15}. L’âge légal du départ à la retraite étant fixé à 60 ans, les 23,8 % de la population de 60 ans et plus représentaient 15,7 millions de retraités. Grâce à l’Ordonnance n°59-45 du 6 janvier 1959, l’instruction est obligatoire jusqu’à l’âge de 16 ans{16}. Représentant 18,6 % de la population, les jeunes de moins de 16 ans comprenaient 12,2 millions d’inactifs. Puisque les 42,4 % de retraités et de jeunes de moins de 16 ans représentaient 27,9 millions de personnes, la population de 16 à 59 ans en âge de travailler comprenait 38 millions d’actifs, soit 57,6 %. Comme 8,1 % des jeunes en âge de travailler avaient choisi de poursuivre leurs études, 5,3 millions de lycéens et d’étudiants n’étaient pas disponibles pour rechercher un emploi. Étant donné que la population active comprenait 32,6 millions de personnes et que 25,5 millions exerçaient un emploi à temps plein, 7 millions d’actifs, soit 21,6 % de la population active n’avaient pas d’emploi ou avaient un emploi à temps partiel subi. Le tableau ci-dessous identifie la population active sans emploi de 2013.

    img3.jpg

    - – Sources 5 et 6 : Dares, Demandeurs d’emploi inscrits et offres collectées par Pôle emploi en décembre 2013, Indicateur de janvier 2014 n°006{17}.

    Ce tableau permet d’identifier et de quantifier les actifs qui ne sont pas pris en compte par l’Insee et Pôle emploi. En reprenant les données de la DARES, j’ai pu identifier ces 7 millions d’actifs sans emploi. Ces actifs comprennent 5,5 millions de demandeurs d’emploi de catégorie A, B, C, D et E et 268 000 de catégorie A, B et C des DOM, soit 18 % de la population active. À ce chiffre, il faut ajouter 1,1 million d’actifs non identifiés de la France métropolitaine et des DOM, soit 3,5 % de la population active. Ces actifs comprennent, d’une part, des demandeurs d’emploi de catégories D et E des DOM, et, d’autre part, des personnes au RSA, des handicapés, des femmes ou des hommes au foyer, des personnes rayées des listes de Pôle emploi, des détenus, des SDF, des rentiers, etc. qui ne recherchent pas ou plus d’emploi et ne sont pas inscrit à Pôle emploi.

    En 2013, il n’y avait donc pas 2,8 millions de chômeurs ou 5,5 millions de demandeurs d’emploi, mais 7 millions d’actifs sans emploi. Puisque les chiffres officiels de l’Insee ne prennent pas en compte tous les actifs, même si le gouvernement parvenait à créer 2,8 millions d’emplois, il resterait encore une armée de réserve de 4,2 millions d’actifs sans emploi. Si tous les chômeurs de catégorie A trouvaient un emploi, les salariés précaires à temps partiel « subis » de catégories B et C, les demandeurs d’emploi de catégorie D et E et les personnes au RSA non inscrites à Pôle emploi exerceraient toujours une pression sur les salariés en poste.

    Comme elle permet de tracer une courbe, l’équation qui calcule le nombre d’actifs sans emploi donne les moyens d’analyser son évolution sur une longue période.

    L’évolution du nombre d’actifs sans emplois depuis 1980

    La courbe de la population active sans emploi permet de suivre et de comparer son évolution sur une longue période. J’aurai souhaité étudier cette évolution sur la période de 1949 à 2013, mais, comme je n’ai pas trouvé de données statistiques d’élèves de second cycle et d’étudiants pour la période de 1949 à 1980, j’ai dû me limiter à la période de 1980 à 2013. Tandis que le graphique ci-dessous de gauche compare l’évolution de la population active sans emploi avec celle qui occupe un emploi équivalent temps plein, celui de droite compare l’évolution de la population de 16 à 59 ans avec celle des élèves de second cycle et des étudiants de 1980 à 2013.

    img4.jpg

    - – Source : Insee, 6.209, Emploi intérieur total par branche en nombre d’équivalents temps plein, Op. Cit.

    - – Source : Insee, Population par sexe et groupes d’âges depuis 1946, Op. Cit.

    - – Source : Ministère de l’Éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, Op. Cit. N’ayant que des sources fragmentées des effectifs d’élèves et d’étudiants de 1980 à 2002, une partie de ces données reposent sur une estimation.

    Contrairement aux idées reçues, le nombre d’actifs sans emploi n’a pas augmenté, mais diminué. En effet, de 1986 à 2013, le nombre d’actifs sans emplois a diminué de 1,5 million de personnes, soit une baisse de 17,6 %. Pourtant, sur la période de 1980 à 2013, la population âgée 16 et 59 ans a augmenté de 4,6 millions, soit une hausse de 13,8 %. Comme les entreprises ont seulement créé 3,6 millions d’emplois à temps plein, soit une hausse de 16,8 %, le nombre d’actifs sans emploi aurait dû augmenter de 1 million de personnes. Or, cela n’a pas été le cas. Quelles sont donc les causes qui pourraient expliquer la diminution du nombre d’actifs sans emploi ?

    La première cause pourrait être la loi Aubry sur les 35 heures. Devant appliquer les 35 heures, pour assurer la continuité de leur activité, les entreprises de plus de 20 salariés ont dû augmenter leurs effectifs. À cause de cette contrainte, de 1998 à 2002, elles ont créé plus de 1,8 million d’emplois à temps plein, soit une hausse de 7,8 % sur 4 ans. Il est donc possible d’attribuer à cette loi 50 % des emplois créés entre 1986 et 2013. En permettant de diminuer le nombre d’actifs sans emploi de plus de 800 000 personnes sur 4 ans, les 35 heures en ont permis une baisse de 9,8 %. N’en déplaise au Medef et aux ultralibéraux, la réduction de la durée légale du temps de travail apparaît donc comme une solution efficace pour enrayer la hausse du chômage.

    La seconde cause pourrait être le départ à la retraite de la population active issue du baby-boum. En effet, en 2006, les enfants nés en 1945 avaient 60 ans. L’âge du départ à la retraite étant fixé à 60 ans, de 2006 à 2013, la population active est passée de 38,5 à 37,9 millions, soit une baisse de 1,6 %{18}. Puisqu’après le baby boum, la courbe de la natalité n’a pas été aussi soutenue, le nombre d’actifs âgés de 16 à 59 ans continuera de diminuer. À terme, cette baisse va contribuer à réduire progressivement le nombre d’actifs sans emploi et, donc, de demandeurs d’emploi.

    La troisième est due à l’augmentation des effectifs des élèves de second cycle et des étudiants. De 1980 à 2013, ces effectifs ont augmenté de 1,6 million. Tandis qu’entre 1980 à 1995, ils ont augmenté de 1,3 million, soit une hausse de 37,7 %, de 1996 à 2013, ils ont augmenté de 234 000, soit une hausse de 4,6 %. La hausse de 37,7 % est en partie due à la volonté du gouvernement socialiste de faire accéder 80 % d’une classe d’âge au bac. Puisqu’un étudiant ne fait pas partie de la population active, cette généreuse ambition pourrait apparaître comme un moyen déguisé de faire baisser les chiffres du chômage.

    Après avoir quantifié le nombre d’actifs sans emploi, il apparaît nécessaire d’appréhender les conséquences économiques et sociales du chômage.

    Les conséquences économiques et sociales du chômage

    La hausse du chômage de masse a des conséquences économiques et sociales directes et indirectes. Les conséquences directes sont l’endettement des ménages, la rupture des liens sociaux et la perte de santé des demandeurs d’emploi. Les indirectes sont la hausse de la délinquance, de l’insécurité des salariés en poste, des dépenses de santé et de la dette publique.

    Les conséquences directes du chômage

    La première conséquence du chômage est la perte du pouvoir d’achat. En se retrouvant au chômage, le salarié perd 25 % de son revenu, qui décroît en fonction de sa durée. En fin de droit, le chômeur ne perçoit plus que le RSA (revenue de solidarité active). S’il a souscrit un emprunt immobilier ou des crédits à la consommation, cette perte de revenu peut conduire au surendettement. La cessation de payement des traites et des crédits déclenche une procédure de recouvrement, la saisie des biens et, à terme, l’expulsion du logement.

    La seconde est la perte du lien social. L’entreprise étant le principal lieu de socialisation du salarié, la perte d’un emploi s’accompagne de la perte du réseau et des liens professionnels qui permettent de se socialiser. La dévalorisation du statut de chômeur influence profondément l’image et l’estime que l’individu a de lui. Malgré le temps libre dont il dispose, le chômeur ne se sent pas digne d’en profiter pour expérimenter de nouvelles activités qui lui permettraient de créer de nouveaux liens sociaux. La honte qu’il ressent l’incite à s’isoler de sa famille et de ses amis. En se repliant sur lui, le chômeur perturbe l’équilibre de sa vie de famille. En 1987, Serge Paugam faisait apparaître que 43,5 % des hommes au chômage depuis 2 ans avaient vécu une rupture conjugale, contre 18,9 % pour ceux qui étaient actifs{19}. Pour toutes ces raisons, le chômage de longue durée apparaît comme l’une des principales causes de l’exclusion sociale.

    La troisième concerne la santé physique et psychique du chômeur. L’identité, le statut social et le sens de la vie d’un individu étant étroitement liés à la pratique quotidienne d’une activité professionnelle, le chômage de longue durée risque de provoquer un effondrement de sa personnalité et de son équilibre psychique. Ne disposant plus de repères temporels pour structurer son emploi du temps et le rythme de sa vie, le chômeur est confronté au désœuvrement, à l’angoisse et au vide existentiel. La discrimination associée au statut de chômeur peut également provoquer une dévalorisation de soi et, donc, une perte d’estime de soi. La honte et la culpabilité qu’elle provoque s’accompagnent souvent d’un état de stress durable que l’individu ne peut pas éviter ou affronter. La fuite de ce vide et de cet état de stress peut conduire à des comportements violents ou compensatoires : la consommation d’alcool ou de drogue ou des addictions (jeux vidéo, télévision, Internet, sexe, etc.). En se prolongeant, cet état stressant et anxiogène peut provoquer des maladies plus ou moins graves, telles que l’insomnie, la dépression, le cancer, etc., et, parfois, conduire au suicide. Une étude de 1997 a montré qu’une augmentation de 3 % du taux de chômage pouvait provoquer une hausse du taux de suicide de 4,4 %{20}. Étant davantage soumis aux maladies cardio-vasculaires et rénales (+50 %), le taux de mortalité d’un chômeur augmente en moyenne de 75 % par rapport à celui d’un actif{21}. Michel Lagrave cite une étude britannique qui affirme qu’une hausse de 1 million de chômeurs sur 5 ans provoque 50 000 décès et 60 000 cas de maladies mentales supplémentaires{22}. Ces conséquences incitent davantage les chômeurs à retrouver rapidement un emploi qu’à profiter des allocations chômages et du temps libre.

    Après avoir présenté les conséquences directes, il est nécessaire de présenter les indirectes.

    Les conséquences indirectes du chômage

    La première conséquence indirecte concerne la hausse de la délinquance et de la criminalité. La plupart des condamnés pour vols, trafics ou violences cumulent la précarité et l’exclusion sociale liées au chômage. Une étude publiée en 2000 montrait qu’un détenu sur sept n’a jamais exercé d’activité professionnelle et qu’un sur deux est ou a été ouvrier, contre un sur trois dans l’ensemble de la population{23}. Confronté à la difficulté de trouver un emploi, un jeune issu de milieux défavorisés peut donc facilement basculer dans la délinquance. Il existerait également une corrélation entre la hausse du chômage et celle de la délinquance. Aux États-Unis, une étude a montré qu’une hausse de 10 % du chômage provoque une hausse de 4 % des arrestations, de 6 % des incarcérations, de 3,4 % des crimes économiques et de 0,8 % des crimes violents. Une hausse de 1 million de chômeurs sur 5 ans est à l’origine de 14 000 condamnations pénales supplémentaires{24}. Le chômage étant la principale cause de la délinquance, au lieu d’augmenter le nombre de prisons, les pouvoirs publics devraient plutôt enrayer la hausse du chômage.

    La seconde conséquence concerne l’impact du chômage sur les salariés en poste. Il n’y a pas que les chômeurs qui sont concernés par la hausse du chômage. Elle concerne également tous les salariés qui ont « la chance d’avoir un emploi ». La hausse du chômage entretient un climat d’insécurité dans l’esprit des salariés qui ont peur de perdre leurs emplois. Pour éviter de se retrouver au chômage, en fonction de son niveau hiérarchique, le salarié peut utiliser de multiples stratégies d’évitement : se soumettre aux ordres, contribuer au « sale boulot »{25}, accepter la dégradation de ses conditions de travail, entrer en compétition avec ses collègues et ne pas s’impliquer dans des revendications sociales collectives. La peur du chômage empêche les mouvements sociaux de se mobiliser pour lutter contre la dégradation des conditions de travail : la stagnation des salaires, la flexibilité, la réforme du Code du travail, la casse du système social, etc.

    Ce comportement de soumission provoque un état de stress qui a des répercussions sur la santé physique et psychique des salariés. En acceptant de contribuer au « sale boulot », d’intensifier son rythme de travail, l’insécurité d’un emploi précaire, le harcèlement d’un petit chef, la flexibilité, des objectifs inatteignables, des horaires irréguliers et imprévisibles incompatibles avec une vie sociale et familiale, etc., les salariés s’exposent à des situations de stress et à des risques psychosociaux. En reprenant les quatrième et sixième enquêtes européennes sur les conditions de travail dans l’Union européenne, un rapport de l’Organisation internationale du Travail (OIT) estimait que 40 millions de personnes étaient affectées par le stress lié au travail{26}. Tandis que 36 % déclaraient travailler dans des délais très courts, 33 % déclaraient travailler à une cadence élevée. Ce même rapport indiquait, d’une part, qu’un travailleur sur six, soit 16 %, avait été confronté à un comportement social hostile (violence physique, harcèlement sexuel et harcèlement), et, d’autre part, que 80 % des cadres s’inquiétaient du stress lié au travail, et que près d’un sur cinq considéraient la violence et le harcèlement comme un problème majeur.

    Quels que soient leurs niveaux hiérarchiques, à cause du stress lié au travail, de plus en plus de salariés sont sujets à des fatigues, à des maux de tête ou d’estomac, à des troubles du sommeil et de l’humeur, à des comportements addictifs (alcool, drogues, jeux, shopping, sexe, surtravail, etc.) et à des états anormaux d’agitation et d’angoisse accompagnés d’une diminution de la lucidité et d’un rétrécissement de la pensée. En se prolongeant dans le temps, l’exposition à un état de stress durable provoque des problèmes de santé physique (maladies cardio-vasculaires, accident vasculaire cérébral (AVC), troubles musculo-squelettiques (TMS), hypertension artérielle, ulcères, cancers, etc.) et psychique (anxiété, fatigue chronique, dépression, Burn-out, tentatives de suicide, etc.). Les troubles musculo-squelettiques et psychiques constituent les pathologies à caractère professionnelles les plus fréquentes. À eux seuls, les TMS, qui ont augmenté de 17 % par an en dix ans, représentaient 74 % des déclarations des maladies professionnelles en 2008{27}. Afin d’aider les salariés à poursuivre leur travail, les médecins généralistes prescrivent toujours plus d’antidépresseurs. En 2000, 24,5 % de la population française a bénéficié du remboursement d’un médicament psychotrope{28}. La hausse de la consommation de psychotropes est le révélateur d’un malaise social profond qui ne cesse de progresser. Au lieu d’en prescrire toujours plus, il serait plus judicieux d’en finir avec le chômage qui est la principale cause du stress au travail. Les problèmes de santé physique et psychique concernent également les dirigeants d’entreprises. Une étude, réalisée en 2010 par TNS Sofres auprès de 800 dirigeants de PME, révélait que 63 % déclaraient être stressés et que 34 % d’entre eux souffraient de problèmes de santé liés au travail{29}.

    La troisième conséquence concerne la compétitivité des entreprises. L’absentéisme, la rotation du personnel et la baisse de la productivité liés au stress au travail ont également des répercussions sur la performance des entreprises. En 2001, une étude estimait que 30 % des arrêts maladie étaient directement liés au stress{30}. Aux États-Unis, l’absentéisme est responsable de plus de la moitié des 550 millions d’heures de travail perdues dans le secteur privé{31}. Une étude de 2013 financée par l’Union européenne estimait que le coût du stress lié au travail s’élevait à 514 milliards € par an pour les entreprises européennes : l’absentéisme et le présentéisme représentaient 272 milliards € et la perte de productivité était estimée à 242 milliards €{32}. En France, le coût du stress était estimé entre 1,9 et 3 milliards € pour les entreprises en 2007{33}. Une étude britannique réalisée en 2007 par le Sainsbury Centre for Mental health estimait que le coût du stress, de l’anxiété et de la dépression s’élevait pour les employeurs à 1 220 € par employé et par an : 710 € était imputable au présentéisme, 400 € à l’absentéisme et 110 € à la rotation du personnel{34}. À ces coûts, il faut ajouter les risques psychosociaux liés au manque de perspective d’évolution, à l’accroissement des tensions interpersonnelles, ainsi qu’à l’absence d’implication et de communication au sein des équipes de travail, qui ont également un impact sur la performance des entreprises. Au lieu d’attribuer la perte de compétitivité des entreprises au coût trop élevé du travail, à la rigidité du

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