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Ce travail repose sur une enquete par questionnaires et par entretiens (rdalis~e dans le
cadre du Centre de Sociologic Europenne a la demande de la DGRST) visant a ressaisir
les attitudes des scientifiques h 1egard de la vulgarisation. Cettc enquete qui sest d6roul6c
aux mois de janvier et fdvrier 1967 a portd sur un dchantillon de 200 scientifiques, 103 physi-
ciens et 97 biologistes appartenant a la recherche et A 1enseignement sup6ricur a Paris et
dans la region parisienne; il sagissait essentiellement de scientifiques attach6s A des labora-
toires du secteur public dependant des Facult6s des Sciences de Paris et dOrsay ou des orga-
nismes suivants : Centre National de la Recherche Scientifique, Coll~ge de France, Ecole
Normale Supdrieure, cole Polytechnique, Institut Pasteur, Museum National dHistoire
Naturelle, etc. Cet echantillon a dt6 obtenu par tirage au hasard a partir de la liste des ilec-
teurs du Comitd National de la Recherche Scientifique (publie dans le Bulletin officiel de
1Education Nationale de novembre 1966) qui regroupe tous les enseignants de facult6s et
tous les chercheurs du secteur public (repartis en 34 sections en fonction de la discipline).
11 dtait repr6sentatif de la population-mere sous le rapport de 1activite dominante (ensei-
gnement ou recherche), de la position dans la hi6rarchie professionnelle (attach6 de recherche
1. Ainsi rien ne sopposerait, en principe, à ce quun même écrit soit attribué à ces deux
catégories à la fois sil a été publié conjointement, par exemple, dans une revue spécialisée
et dans un hebdomadaire à grand tirage.
PP.
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2. Toute autre démarche et particulièrement la démarche inverse qui consisterait à ne consi-
dérer la vulgarisation que dans ses caractéristiques substantielles ne ferait sans doute appa-
raitre que les aspects les plus contingents et les plus arbitraires de la vulgarisation, et laisse-
rait échapper Ie principe unificateur qui gouverne des activités présentées habituellement
(particulièrement par ceux qui les exercent) dans leur diversité irréductible.
3. Ce travail sappuie sur la théorie du champ intellectuel développée par P. Bourdieu
notamment dans "Champ intellectuel et projet créateur", Les temps modernes, novembre
1966, pp. 866-906, et (en collaboration avec J.-C. Passeron) dans La reproduction, Paris,
Éd. de Minuit, 1970 (Coll. "Le sens commun").
4. Cf. P. Bourdieu et J.C. Passeron, La reproduction, 1 re partie, "Fondements dune
théorie de la violence symbolique", proposition 4, scolie 2.
5. Cf. G. Canguilhem, "Nécessité de la diffusion scientifique", Revue de lenseignement
supérieur 3, 1961, pp. 5-16.
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plus forte chez les scientifiques situds au centre du champ intellectual, cest-
a-dire ceux dont la production 6sot6rique est 6galement la plus forte, qui
bnficient dun haut niveau de formation universitaire et occupent les grades
les plus 6lev6s de la hierarchic universitaire: ainsi, chez les enseignants, la
part des vulgarisateurs passe de 4,5 % pour les assistants A 33,5 % pour les
maltres-assistants, A 50 % pour les maitres de conf6rences, 4 85 % pour les
professeurs et, chez les chercheurs, de 22 % pour les attaches de recherche et
les charges de recherche, A 50 % pour les maitres de recherche, h 69 % pour
les directeurs de recherche. On ne peut attribuer ces variations a un simple
accroissement des chances de pratiquer la vulgarisation ~ mesure que saccrolt
la duree de la vie professionnelle si lon sait quh age equivalent la part des
vulgarisateurs est toujours plus forte parmi les scientifiques appartenant au
college A que parmi ceux qui appartiennent au college B 6. Ainsi, par exemple,
36 % des scientifiques ayant entre 35 et 40 ans qui appartiennent au college A
pratiquent la vulgarisation contre seulement 25 % de ceux qui, aux m8mes ages,
appartiennent au col]6ge B. L6cart saccroit encore aprds 40 ans, ceux des
scientifiques qui, pass6 cet age, appartiennent toujours au college B ne vulga-
risant que dans 33 % des cas contre 70 % pour ceux qui appartiennent au
6. Le collège A comprend les directeurs et les maîtres de recherche pour Ie CNRS, les
professeurs et les maîtres de conférences pour les Facultés des Sciences; de la meme façon,
le collège B est constitué par les attachés et les chargés de recherche dunc part, les assistants
et les maîtres-assistants dautre part. Pour certains grands établissements de recherche et
denseignement supérieur qui disposent de leur hiérarchie propre, différente de celle du
CNRS ou des facultés, on a respecté lors du codage des données le système déquivalences
retenu par ladministration du CNRS pour constituer la liste des électeurs du Comité National
de la Recherche Scientinque : par exemple, les directeurs, sous-directeurs, maîtres-assistants
et assistants au Museum ont été codés respectivement cn directeurs de recherche, maitres
de recherche, chargés de recherche, attachés de recherche. La distinction entre les deux collèges
est une distinction administrative mais elle correspond, semble-t-il, à des clivages réels à
lintérieur de la population des scientifiques, de sorte quil na pas paru inutile de la reprendre
pour simplifier lexposé des résultats.
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college A agr6g6s ou anciens 61~ves dune grande 6cole A 24 % pour ceux qui,
h leur entr6c dans 1enseignement superieur, navaient pas d6pass6 Ie niveau
de la licence; 1ecart est plus fort encore a lint6rieur du college B puisque 12%
des membres du college B d6tenteurs des diplmes les plus 6lev6s d6clarent
quils ont refus6 de vulgariser contre 29,5 % des licenci6s. De la meme fagon,
les membres du college A licenci6s expriment moins souvent lintention de
vulgariser que ceux dont le cursus universitaire a 6t6 plus prestigieux, 59,5 %
des premiers d6clarant, par exemple, quils accepteraient de participer a une
emission de radio ou de t6l6vision contre 66,5 % des seconds.
Si la pratique de la vulgarisation est dautant plus fr6quente quon s616ve
dans la hi6rarchie professionnelle, cest peut-etre que la vulgarisation constitue
une activit6 d6pourvue de lgitimit 10 parce quelle oblige celui qui 1exerce
a soumettre sa production aux jugements du public externe. En effet, tout
scientifique qui publie sa production proprement scientifique, sil la rend
publique en apparence, ne fait que la soumettre aux jugements de ses pairs
et b~n6ficie toujours, lors meme quil occupe, par son age et par ses titres,
une position excentrique dans le champ intellectuel, du soutien de 1institution
dans laquelle il est ins6r6 et dont il nest que le porte-parole (a la condition
toutefois que sa pratique scientifique soit, conformement aux normes en
vigueur dans la cite savante, accord6e a son rang) 11; bref, il jouit lorsquil
exerce son activit6 proprement scientifique de I ... autorit6 pr6alable et perma-
nente&dquo; qui lui est d6l6gu6c par linstitution scientifique 12 du seul fait de son
appartenance 16galement reconnue au corps des professionnels de la science.
A linverse, le scientifique qui vulgarise doit operer en son nom propre ou,
si lon pr6fdre, a ses risques et p6rits, puisquil nest, pour ce faire, ni delegue
ni mandat6 par Iinstitution scientifique; ainsi la vulgarisation 6chappant
au contrble direct de linstitution scientifique ne regoit sa signification que
de ceux qui la pratiquent et ne tire sa 16gitimit6 que de leur legitimite. Mais
les scientifiques qui vulgarisent engagent.neanmoins par leur acte linstitution
scientifique tout enti6re aux yeux du public ext6rieur. Il sensuit premirement
que seuls les scientifiques les plus consacrds, d6tenteurs dune sorte &dquo;dautorit6
pedagogique permanente&dquo; 13 saccordent le droit et le privilege de vulgariser
et acceptent dassumer les risques inhdrcnts ~ toute entreprise de vulgarisation
et, deuxi8mement, que linstitution universitaire d6l6gue objectivement pour
la representer a 1ext6ricur les plus consacres, les plus prestigieux et les mieux
int6grds de ses membres, ceux sur lesquels elle fait peser Ie plus fortement son
10. Sur lutilisation qui est faite ici du concept de légitimité, cf. P. Bourdieu, Un art moyen,
Paris, Éd. de Minuit, 1965, pp. 134-138 (Coll. "Le sens commun").
11. On pourrait sans doute montrer, sans trop de difficultés, que dans la cité savante
comme ailleurs, chaque âge a ses plaisirs, et quil est un temps pour les micro-études empi-
riques sur un sujet étroitement défini et un autre pour les grandes synthèses théoriques.
12. Cf. Bourdieu et Passeron, op. cit., 1 re partie, "Fondements dune théorie de la violence
symbolique", propositions 2 sq.
13. Ibid.
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contr6le, qui incarnent Ie plus fortement ses valeurs et qui sont le plus fortement
assujettis h ses normes. Ainsi, si la pratique de la vulgarisation est nettement
plus forte chez les scientifiques d6tenteurs du doctorat detat (52 % dentre
eux ayant vulgarise contre 24 % de ceux qui nont pas soutenu leur th6se)
cest, notamment, que la these marque une 6tape decisive de la carri~re scienti-
fique celle of le scientifique regoit la cons6cration du groupe tout entier -
-
dans la mesureof elle constitue une sorte de rite de passage grace h quoi le
scientifique, faisant reconnaitre de ses pairs, acquiert une existence offi-
en se
cielle au sein de la communautd scientifique qui lui donne le droit, cest-h-dire
la possibilite, a la fois objective et subjective, de vulgariser !~.
Cest dans la m8mc logique quil faut interprdter la demande s6lective des
organismes de vulgarisation qui, incapables par eux-memes de conf6rer une
autorit6 et une legitimite quelconques aux savoirs quils diffusent et divulguent,
cherchent h sassurer la collaboration des &dquo;scientifiques confirmes&dquo; par6s des
titres universitaires les plus prestigieux et pourvus dune autorit6 personnelle
incontestable. En effet, la &dquo;valeur&dquo; du scientifique dont on sest assure la
collaboration (mesur6e a sa position dans la carri~re) garantit aupras du public
la qualite de linformation transmise et, par Ih meme, le serieux de lorga-
nisme qui la transmet et de ceux qui en sont responsables; coinme le declare
le r6dacteur dune importante revue de vulgarisation: &dquo;Les articles de fond
sont toujours commands des collaborateurs ext6ricurs qui sont toujours
des spdcialistes confirm6s, des gens qui ont une connaissance de premi6re
main de ce dont ils traitent. Les articles de fond sont faits par des patrons, par
exemple des maitres de recherche ou des directeurs de recherche au CNRS...
Je me suis rendu compte quil fallait des scientifiques confirmds dans la carri6re
scientifique pour plaire au public que je voulais toucher&dquo;.
La nature extra-professionnelle de la vulgarisation et son caract6re ill6gitime
napparaissent jamais aussi bien aux yeux des scientifiques que lorsquune
r6mun6ration leur est propos6e. Sil en est ainsi, cest peut-Etre que le salariat
ou, mieux, le fonctionnariat constituent les signes ext6rieurs les plus dvidents
du lien qui attache lindividu a linstitution qui lui ddl~gue son autorite :
la perception r6guliare dun salaire dont limportance ne depend ni de la quan-
tit6 ni de la qualit6 du travail fourni (il est perqu, par exemple, durant les
pdriodes dinactivit6 ou de vacances) et qui augmente rdguli6rement au cours
de la vie sans que le travail fourni saccroisse pour autant, conduit en effet
les scientifiques (et plus g6n6ralement les universitaires) a scotomiser la rela-
tion entre leur activite intellectuelle et leurs gains si bien que leur salaire est
souvent perqu comme une sorte de rente ou de pension que leur conc6derait
14. Un jeune scientifique déclare ainsi : "Je publierais dans Atomes et Sciences et avenir
si javais la qualification nécessaire. Ceux qui y publient ont une qualification bien supé-
rieure à la mienne. Si javais le doctorat je serais moins hésitant" (physicien, assistant.
35 ans).
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exot6rique de ce produit qui, simple valeur d6change, doit Etre offert sur un
march6 et consomme par un public 16. Pour ces differentes raisons, lintention
de faire de la vulgarisation b6n6vole, de pr6f6rence A lusage dun public popu-
laire, est dautant plus forte quon descend dans la hi6rarchie scientifique
ou, si lon prefere, quon s61oigne du centre du champ intellectuel 117, comme si
lexercice dune vulgarisation b6n6vole et altruiste att6nuait aux yeux des scien-
tifiques les moins 16gitim6s A vulgariser le caract6re ill6gitime de la vulgari-
sation : on declare ainsi ne pas etre &dquo;tellement habitu6 h travailler pour de
1argent, mais a travailler gratuitement dans les neuf dixi6mes des cas&dquo; ou
encore que &dquo;cela ne vaut pas la peine de faire de la vulgarisation pour de 1ar-
gent&dquo;..
15. Tout se passe comme si la communauté scientifique (et peut-être plus généralement
la communauté intellectuelle) évacuait, au moins symboliquement, la question de la valeur
économique des produits de lactivité intellectuelle dont la divulgation, ou la distribution,
nest jamais assimilée à la simple mise en vente dun produit sur un marché. Aussi nest-il
peut-être pas exagéré de voir dans le type de relation que les intellectuels entrctiennent
avec la monnaie — soit, pour aller vite, dans lensemble des comportements et des attitudes
qui se réclament de léthique du désintéressement —
un indicateur privilégié de ce qui
constitue la spécificité du champ intellectuel et de ce par quoi il se distingue des champs
économiques. administratifs ou politiques.
16. Parce que la vulgarisation se définit essentiellement par la relation entre ceux qui la
produisent et ceux qui-la consomment, lanalyse de la production de vulgarisation ne pourra
être menée à terme que lorsquelle sera prolongée par une étude (actuellement en cours de
réalisation) du marché de la vulgarisation.
17. Lintention de faire de la vulgarisation bénévole passe de 12,5 % pour les membres du
collège A qui ont une formation dagrégés ou de diplômés de grandes écoles à 25 % pour les
membres du collège A licenciés, à 31 % pour les membres du collège B qui ont une forma-
tion supérieure à la licence, enfin, à 43,5 % pour les membres du collège B licenciés.
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dont les titulaires sont de moins en moins nombreux a mesure quon seleve
dans la hi6rarchie professionnelle, si bien quil peut etre represente sous la
forme dune ascension sur une double 6chelle 6chelle continue (si lon
-
raient a mesure que Ion passe des 6chelons infdrieurs aux echelons sup6rieurs.
Cette ascension, corr6lative dun mouvement de translation dans le champ
intellectuel des marges vers le centre (lo sommet de 1echelle des grades uni-
versitaires coincidant avec le centre du champ), exige que Ion conqui8re des
groupes dont les membres sont dautant plus fortement s6lectionn6s quon
seIeve dans la hi6rarchie professionnelle (A linversc de I&dquo;acteur, par exemple,
dont la r6ussite procede de la conquete dun public de plus en plus 6tendu).
Elle doit, en outre, se faire &dquo;dans les temps&dquo;, la duree de chacun des parcours
6tant r6gie par des normes strictes comme si les scientifiques r6glaient le d6rou-
lement de leur carriere en cherchant soit a Iacc6l6rer soit a la freiner et ajus-
taient la perception quils ont des cursus professionnels de leurs collegues par
reference implicite a une sorte de d6finition sociales fortement int6rioris6c de la
&dquo;bonne carriere&dquo; 19 ou, si lon pr6f6re, de la carri6re normale cest--dire
modale; aussi chaque individu se doit-il de parcourir les 6tapes de la carri6re
scientifique a une allure dfinie qui depend essentiellement de 1acceleration
18. Pour toute cette partie et, particulièrement, pour ce qui conceme les mécanismes de
la carrière universitaire, cf. P. Bourdieu, L. Boltanski, Y. Delsaut et M. de Saint Martin,
Facteurs de changement et forces dinertie dans le systeme scolaire, Paris, Centre de Socio-
logic Européenne, 1970 (cahier ronéotypé).
19. Comme lont montré H.S. Becker et A.L. Strauss, dans la plupart des organisations,
la carrière la plus rapide nest pas nécessairement la plus désirable. Il existe, en effet, le plus
souvent, des normes concernant le rythme auquel les étapes de la carrière doivent etre par-
courues et des moments particuliers auxquels il est préférable dabandonner une position
pour une autre : "limportance accordée à la mobilité ascendante dans le système de valeurs
américain
—
écrivent Becker et Strauss
—
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que lui ont fournie a 1entr6e dans la vie professionnelle son type de formation
et le niveau dinstruction quil a atteint 20.
On comprend, dans ces conditions, que 1exercice dactivit6s exot6riques et,
plus pr6cis6ment, la production dœuvres intellectuelles a usage externe cest-h-
dire soumises au jugement dun large public etranger a la cite savante ne serve
en rien les int6r8ts professionnels dun jeune scientifique parce quelle naccroit
20. Les scientifiques qui ont le niveau de formation le plus élevé sont favorisés dans leur
carrière dans Ia mesure meme où ils bénéficient dune promotion professionnelle plus rapide :
ils sont, à statut professionnel équivalent, beaucoup plus jeunes que ceux qui ont un niveau
de formation égal à la licence. Ainsi, dans le collège A, 21 % des licenciés ont un âge infé-
rieur à 41 ans pour 43,5 % des agrégés et diplômés des grandes écoles. De même, dans le
collège B, 43,5 % des premiers ont moins de 30 ans pour 65 % des seconds. La formation
universitaire détermine donc des types de carrières qui ne sont pas identiques pour tous
les scientifiques et qui sont définis par des trajectoires différant tant par leur durée propre
que par les étapes quelles empruntent. Ainsi, plus précisément, alors que 82,5 % des attachés
de recherche agrégés ou anciens élèves dune grande école sont âgés de moins de 30 ans,
ce nest Ie cas que de 58,5 % des attachés de recherche titulaires de la licence au moment de
leur entrée dans la recherche. De la même façon, alors que 6 % seulement des attachés de
recherche qui ont un niveau de formation supérieur à la licence ont plus de 35 ans, cest le
cas de 22 % des attachés de recherche licenciés.
21. "Le fait décrire des articles ou des ouvrages de vulgarisation scientifique na aucune
influence sur le cours de la carrière universitaire dun scientifique; car la vulgarisation nest
pas considérée sérieusement par ses collègues; quil fasse de la vulgarisation ou quil joue
au bridge, cest la même chose pour eux; de toutes façons Ie jugement universitaire porte
sur les recherches effectives, non sur les ouvrages de vulgarisation" (physicien, professeur,
ancien élève de lÉcole Polytechnique, doctorat, 41 ans).
22. Étudiant les comportements professionnels des chimistes et, plus particulièrement,
leurs attitudes à légard de la carrière, A.L. Strauss et L. Rainwater ont montré que les
promotions professionnelles sont fortement valorisées et apportent à ceux qui en bénéficient
dimportantes gratifications lorsquelles apparaissent aux yeux de la communauté scienti-
fique comme la consécration des qualités scientifiques et de la réussite professionnelle
mesurée, par exemple, au nombre et à limportance des publications. Au contraire, la promo-
tion professionnelle apporte peu de gratifications à celui qui en bénéficie lorsque le groupe
des pairs la tient pour le resultat direct de lintrigue et de la manipulation ou, plus générale-
ment, dun effort délibéré et systématique (cf. A.L. Strauss et L. Rainwater, The professional
scientist, a study of American chemists, Chicago, Ill., Aldine, 1962, pp. 116-123).
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trouve cela abominable. Ainsi jh6site vulgariser dans ces conditions&dquo; (biolo-
giste, maitre de recherche, 53 ans) 23. II sensuit que la part de son temps
(n6cessairement limit6) et de ses efforts quun scientifique peut consacrer A
son activite exot6rique est une fonction de sa raretd (ou, ce qui revient au
23. Les scientifiques du collège B, lorsquils vulgarisent, reçoivent moins souvent lappro-
bation de leurs pairs que les membres du collège A : alors que Ie jugement des collègues
est favorable dans 46 % des cas pour les scientifiques du collège A, il ne lest que dans 33,5 %
des cas pour les membres du collège B.
24. Ainsi, 38 % des membres du collège A agrégés ou diplômés dune grande école ont
vulgarisé pour la prcmière fois entre 25 et 29 ans contre 17,5 % seulement des membres du
collège A licenciés.
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que le type id6al du scientifique de haut rang h forte activite exotdrique sin-
carnerait dans le personnage du &dquo;prix Nobel&dquo; dont 1excellence scientifique
est incontest6e et dont les travaux sont aussi les plus largement divulgu6S 26.
Ces activit6s externes visent toujours, en derni6re analyse, pour un scienti-
fique de haut rang, a accroitre sa raret6 relative en 6tendant sa renommde au-
del des limites du champ intellectuel, bref a faire la conquete de nouvtaux
publics. Ces nouveaux publics peuvent 8tre compos6s dindividus de plus
en plus rares mais par rEfErence dautres champs: tel est le cas, par exemple,
5. Sur les relations, à lintérieur des classes dominantes, entre les professions proprement
2
intellectuelles et les professions entraînant la détention dune part du pouvoir économique,
administratif ou politique, cf. P. Bourdieu, Y. Delsaut et M. de Saint Martin, Les fonctions
du système denseignement, classes préparatoires et facultés, Paris, Centre de Sociologie
Européenne. 1970, pp. 7-29 (cahier ronéotypé).
26. Une enquête américaine auprès des scientifiques lauréats du prix Nobel met ainsi
en évidence les conséquences quimplique la notoriété pour les lauréats de ce prix dont
lactivité scientifique décroît au profit dactivités purement sociales qui peuvent être aussi
bien la participation à des cérémonies à caractère mondain — telles que diners, signatures
dautographes les interviews pour les journaux, la radio, la télévision, la rédaction dar-
—
ticles de vulgarisation ou même de récits autobiographiques que la participation à des activités
et des décisions politiques importantes (cf. sur ce point, H. Zuckerman, "Nobel laureates
in science : Patterns of productivity, collaboration and authorship", American socio-
logical review 32 (3), juin 1967, pp. 391-403).
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la diffusion ou, si lon pr6f~re, la divulgation des travaux qui ont fait leur
reputation. Un scientifique declare ainsi : &dquo;Jai toujours fait de la vulgari-
sation sur des sujets sur lesquels javais, au moins en partie, travaiII6, qui
avaient toujours un rapport direct avec mon travail de recherche; je nai
jamais fait de la vulgarisation pour faire de la vulgarisation&dquo; (biologiste,
27. Une étude actuellement en cours de réalisation sur les publics de différents organes
de vulgarisation scientifique et notamment sur le public de la revue Science et vie montre
que ce sont principalement les membres des classes moyennes et en particulier les techniciens
qui manifestent Ie plus dintérêt pour la vulgarisation scientifique.
28. "Si je publie dans Sciences, cest pour ma publicité personnelle, ce nest pas pour faire
une communication scientifique originale, mais cest parce que je pense quil est utile de le
faire pour obtenir des crédits de recherche [...] Jaccepterais de participer à une emission de
vulgarisation scientifique à la radio comme à la télévision, à condition que ce soit mon
domaine et que je dispose de suffisamment de temps pour me faire de la publicité et obtenir
ainsi des crédits. Cela ne viserait pas le pauvre téléspectateur, mais linspecteur des Finances
[...]Ce nest pas de linformation, cest de la politique" (physicien, professeur, ancien élève
de lÉcole Normale Superieure, 34 ans).
Invités à choisir sur une liste les quotidiens et les hebdomadaires auxquels ils accepteraient
daccorder une interview, les scientifiques touchés par lenquête mentionnent le Monde
dans 92 % des cas, le Nouvel Observateur dans 69 % des cas, lExpress dans 50 % des cas,
Paris-Match dans 30 % des cas, et enfin France-Soir et le Parisien Libéré dans respectivement
18 % et 6,5 % des cas. Sans prétendre établir un lien direct de cause à effet, on notera que ces
différents journaux se hiérarchisent de façon identique si lon considère la part relative des
membres des classes supérieures dans leur public. Ainsi, une enquête réalisée en 1968 par
le Centre dÉtude des Supports de Publicité montre que la part des lecteurs originaires des
classes supérieures passe de 36,9 % pour Ie Monde à 33,1 % pour le Nouvel Observateur, à
30,5 % pour lExpress, à 15,1 % pour à 13,8 % pour France-Soir, enfin à 5,1 %
Paris-Match,
pour le Parisien Libéré. Tout se passe comme si les scientifiques, lors même quils invoquent
en priorité, pour justifier leurs choix, Ie niveau, la qualité et le souci dexactitude des diffé-
rents organes de presse, mettaient en œuvre une sorte de connaissance intuitive des publics
quils ont intérêt à toucher et à conquérir.
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29. "Jai refusé pour des questions dencombrement. Jai essayé de me décharger sur les
plus jeunes, sans beaucoup de succès. Par exemple, jai refusé de ré-écrire un Que sais-je
sur [...]; jai quand même trouvé quelquun pour Ie faire à ma place" (biologiste, professeur,
61 ans). Les patrons ont tendance à confier un travail de vulgarisation de préférence aux
jeunes scientifiques qui sont passés par la même école queux. De même certaines "piges"
passent de main en main selon Ie meme principe des affiliations scolaires : ainsi, il semble
que les Normaliens soient particulièrement nombreux à avoir publié dans la revue Nucléus
ou à avoir été sollicités pour Ie faire.
30. Il existe sans doute toute une série de procédés subtils, dont lutilisation est dautant
plus fréquente quon occupe un rang plus élevé dans la hiérarchie scientifique, qui visent à
attirer Iattention des journalistes sur sa personne sans transgresser en apparence les normes
de la cité savante ni manquer aux règles de la bienséance universitaire : "Il marrive souvent
déclare un journaliste scientifique
— —
davoir des appels du pied dun centre scientifique
ou dun hôpital. Il faut beaucoup de discernement pour juger si cest ou non valable. La
publicité peut se faire de façon subtile. Par exemple il y a un congrès international de cher-
cheurs qui a lieu tous les trois ans. Cette année, il est à Paris; les scientifiques français ont
intrigué pour que ça se passe chez eux; ça leur fait de la publicité. On invite alors toute la
presse. Si cest très spécialisé, on invite seulement les journalistes scientifiques sérieux : une
demi-douzaine, ou deux, ou trois. Les gens invités sont flattés, doù préjugé favorable à
légard de celui qui invite" (Ingénieur faisant du journalisme).
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31. Ce thème revient très fréquemment dans le discours des scientifiques qui ne peuvent,
semble-t-il, évoquer la vulgarisation sans réactiver du même coup les normes sociales qui
règlent et limitent son exercice : "Écrire un ou deux articles de vulgarisation, cest très bon.
En écrire tous les mois, cest négatif, en écrire beaucoup est négatif. Si jen écris un dans la
revue de la Faculté des Sciences, on se dit : Ce pauvre X sest laissé taper dun article.
Si jen écris régulièrement, on dit : Ce pauvre type ne fait que ça (physicien, professeur,
34 ans). "Si le type qui écrit na pas de situation très assise, il y aura des gens pour le couvrir
de sarcasmes. Sil est bien installé, les sarcasmes seront muets ou ce seront les clins dœil :
Ah! il se fait de la pubticite !Si cest un jeune chargé de recherche qui se fait interviewer
à la télévision, on fera des réflexions; si cest un patron, on les gardera pour soi" (biologiste,
directeur de recherche, 45 ans).
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parfois, plusieurs pseudonymes. Cest aussi dans la meme logique que les
membres du coll8ge B ddarent quils pr6f6reraient, sils devaient vulgariser,
le faire sans que soient divulgu6s leur nom ou celui de leur laboratoire (34%
dentre eux contre 26% des membres du college A). Lexclusion hors
du champ intellectuel est redout6c car elle ne peut, dans la grande majorite
des cas, quentrainer une perte brutale de raret6 ccst-h-dire de valeur. En
effet, la valeur acquise par reference au champ intellectuel nest pas automa-
tiquement ni n6cessairemcnt transposable dans un autre champ parce que le
champ intellectuel occupe lui-meme une position p6ripb6rique a lint6ricur
des classes dominantes, la rentabilit6 sociale des activit6s exot6riques 6tant
dautant plus forte que lon poss6de une valeur pr6alable dans un champ
autre que le champ intellectuel, pour le moins un capital de relations sociales:
on comprend, dans ces conditions que, parmi les scientifiques confirm6s, lag
part de ceux qui ont vulgarise soit dautant plus forte que leur origine sociale
est plus forte puisquelle passe (dans le coll6ge A) dc 50% pour ceux qui sont
originaires des classes populaires a 60% pour ceux qui sont originaires des
classes moyennes, a 70% pour ceux qui sont issus des classes sup6ricures.
La situation des scientifiques que des activit6s exot6riques d6placdes, 6tant
donn6 leur rang, ont relegues aux marges du champ intellectuel, porte temoi-
gnage de la perte de valeur quengendre de tels manquements aux normes de Ia
communaut6 scientifique. Les scientifiques touch6s par 1enquete chez qui
on observe une activit6 de vulgarisation intense, sinon reguli8re, tendant m8me
parfois a 6galer celle des vulgarisateurs professionnels sont, pour la plupart,
d6savou6s par la communaut6 scientifique sans avoir acquis pour autant une
grande notoridt6 ou un grand prestige externe. II sagit habituellement de scien-
tifiques qui ne b6n6ficient pas dun niveau de formation lev qui, quoique
relativement ages, appartiennent encore au college B et nont que de faibles
chances dacceder un jour au college A, mais aussi parfois de scientifiques
appartenant au college A (ils sont par exemple maitres de recherche au CNRS)
qui, ayant atteint la position la plus 6lev6c a laquelle ils pouvaient pr6tendre
apr6s une carri6re lente, ont abandonn6 la recherche scientifique pour devenir
des sortes dadministrateurs ou meme de semi-vulgarisateurs 32. On peut se
32. On citera, par exemple, Ie cas dun biologiste, maitre de recherche, âgé de 47 ans,
dont lactivité de vulgarisation est à peine différente de celle des professionnels tant par sa
fréquence et sa régularité que dans ses modalités et ses fins explicites : invité à indiquer
lensemble de sa production en matière de vulgarisation scientifique, il fait état également
de sa production ésotérique sans chercher à la distinguer de sa production exotérique ("187
publications dont 66 pour le CNRS") et précise quil écrit pour Ie grand public (France-
Soir, La vie des bêtes, Points de vue - images du monde, Naturalia, Science et nature), publiant
même régulièrement dans plusieurs de ces revues. Il déclare en outre faire des reportages
comparables, par la qualité, à ceux dun reporter photographe professionnel et se vante
dêtre apte à traiter de sujets variés, de la zoologie à lastronomie en passant par les techniques
photographiques et cinématographiques. Contrairement encore aux autres scientifiques,
il a proposé sa collaboration la première fois quil a fait de la vulgarisation (à lâge de 28 ans)
et il insiste sur limportance de la rémunération : "Je refuse quand cest mal payé; je ne
marche pas pour un texte payé 3 000 francs ".
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riques de ses membres, il nen reste pas moins que son action ne seierce
jamais directement et explicitement de fagon institutionnelle et sous forme
de sanctions professionnelles positives ou n6gatives mais tire au contraire
1essentiel de sa force de ce quelle se realise par linterm6diaire des repr6sen-
tations et des jugements sur la vulgarisation et des opinions que les scientifiques
ont deux-m6mes et de. leurs coll6gues. En effet, les prises de position les plus
libres en apparence sur Ies vulgarisateurs et la vulgarisation scientifique,
meme et surtout lorsquelles sexpriment a travers un discours dinspiration
6thique et .prtendant luniversaIit, sont strictement dtermines par la posi-
tion de ceux qui les expriment dans Ie champ intellectuel et retraduisent, en
les transf6rmant au -niveau de lid6ologie, leurs int6r8ts professionnels 33.
On voit ainsi que le rapport des scientifiques a la vulgarisation (qui nest peut-
Etre quune dimension parmi dautres du rapport quils entretiennent avec leur
role professionnel) tend a sinverser lorsque lon passe de la p6riph6ric au
centre du champ intellectuel et que saccroissent corr6lativement la frequence
et lintensit6 des pratiques exotdriques. Les scientifiques qui occupent les
6chelons inferieurs de la hi6rarchic (et dautant plus que leur niveau de forma-
tion est plus bas) sen tiennent a une d6finition austere de la vulgarisation et
adh6rent avec le z~le du n6ophyte aux repr6sentations les plus rigoristes de la
morale scientifique comme sils cherchaient toujours dans leur discours sur
la vulgarisation se disculper des vis6es 6goistes que les autres scientifiques
pourraient leur pr8ter; au contraire les scientifiques qui occupent une position
6lov6e semblent vouloir prendre leurs distances avec les repr6sentations les
plus traditionnelles de la science et de la communaut6 scientifique, font
montre dun rapport affranchi et d6gag6 a la vulgarisation et se plaisent, par
exemple, a justifier leurs activit6s de vulgarisation en invoquant les raisons qui
sont les plus d6savou6es par la communaut6 scientifique comme 1appat du
gain ou la recherche brutale de la publicite. Plus pr6cis6ment 1616vation dans la
33. Sur les relations entre intérêts objectifs et idéologies dans linstitution universitaire,
cf. Bourdieu, Boltanski, Delsaut et Saint Martin, op. cit.
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34. On transpose ici les descriptions des attitudes de "bonne volonté culturelle" et de
"ressentiment moraliste" telles quon peut les observer, par exemple, chez les membres des
classes moyennes en situation de mobilité sociale, attitudes qui, selon toutes apparences,
réapparaissent dans tous les groupes qui opèrent une ascension sociale. Cf. sur ce point,
P. Bourdieu, "Condition de classe et position de classe", Archives européennes de sociologie 7,
1966, pp. 207-209.
35. Sur le concept de distance au rôle, voir, par exemple, J. Ford, D. Young et S. Box,
"Functional autonomy, role distance and social class", British journal of sociology 18 (4).
décembrc 1967.
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36. Cette "distance au rôle" constitue, par exemple, la condition de possibilité du livre
de J.D. Watson, La double hélice (Paris, R. Laffont, 1968), très révélateur des règles de la
communauté scientifique et qui peut être tenu pour le substitut dun document cthnologique.
Il nen rcste pas moins que la mise à distance de lobjet, parce quelle nest ici que le résultat
des règles qui gouvernent lorganisation de lobjet, plus précisément, de la place quoccupe
lauteur dans la hiérarchie scientifique et non celui dune entreprise délibérée et contrôlée
de rupture avec la sociologie spontanée de la science nest ni systématique ni dénuée de fonc-
tions idéologiques si bien que le style même de louvrage peut être tenu pour aussi riche
denseignements que son contenu.
37. Parce que la communauté scientifique est, comme la cellule, un "système dordre, de
"
structures et de fonctions qui ne peut se garder en vie qua la condition de maintenir et
de protéger son organisation interne tout en régularisant ses relations avec le milieu externe
(ici les champs qui circonscrivent le champ intellectuel), son étude appelle en quelque sorte
delle-même lanalogie organiciste. Cf. A. Lwoff, Lordre biologique, Paris, R. Laffont
1970, pp. 82-99 et p. 178.
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net se r6alise peut-8tre que par la m6diation des conflits entre les diffrents
groupes de scientifiques qui composent ce que lon a coutume dappeler la
&dquo;communaute&dquo; scientifique et qui sont porteurs - dint6r8ts diffrents parce
que leurs membres sont differemment situ6s dans Ie champ intellectuel ou,
si lon prdf~re, occupent des positions dinerentes dans la hi6rarchie scienti-
fique. Mais tout se passe comme si la pression que chacun des groupes de
scientifiques faisait peser sur tous les autres, op6rait comme un syst~me de
contr6les crois6s dont la fonction serait de .proteger 1autonomie du monde
savant, cest-h-dire de conserver a. 1institution scientifique son pouvoir de
juridiction sur les individus qui nest autre que le pouvoir de d6terminer
leur rarctd ou encore celui de fixer leur valeur.
Luc Boltanski, Maitre Assistant à lÉcole Pratique des Hautes Études, VI e Section, et
Pascale Maldidier sont chercheurs au Centre de Sociologie de lÉducation et de la Culture.
Ils procèdent à une série détudes sur la diffusion des connaissances scientifiques et médicales.
Luc Boltanski a publié sur ce sujet : Prime éducation et morale de classe (1969).
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