Sunteți pe pagina 1din 24
EMPIRE OTTOMAN. MONASTERES GRECS EN TURQUIE. LE MONT ATHOS. ~ LES METEORES. Les monastéres étaient si nombreux autrefois dans la Grace turque que lon y rencontrait, au dired’un voyageur, plus de cleres que de laiques. Dans la Bulgarie, le Thrace, fa Macédoine, la Thessalie, la Morée, les Cyclades, ils se comptaient par millicrs. La guerre de l'indépendance en détruisit un grand nombre. D'autres, qui jouissaient une grande réputation, comme ceux de Saint-Cyriani, pres d’Athenes, de Saint-Luc, en Béotie, de Megaspileon, de Saint-Georges, sur le mont Chalmos, en Areadie, font aujourd’hui partie des Etats du roi Othon. Parmi ceux qui sont demeurés sur le sol ottoman, les seuls qui méritent d'etre signalés sont les monastéres du mont Athos, du mont Sinai ct des iles des Princes. Les Grees désignent sous le nom de mont Athos, ou la Sainte-Montagne (agion ores), non seulement le pic méme de TAthos, mais toute I’étendue dela presquwile située & Vextrémité orientale de la Macédoine entre les golfes de Contessa ct de Monte-Santo, et joinfe au continent par un isthme de pew de Jargeur, le méme que Nereés entre- prit de percer, afin d’ouvrir un passage & sa flotie. La longueur totale de la péninsule est de quarante milles ; elle en a neuf d plus grande largour. L’Athos, qui sdlove au milieu & une hauteur de plus de 2,000 Metres, a environ 150 milles de circontérence a la base. En mor, par un temps clair, on apercoit son sommet & Vingt-cing lieues de distance. De vastes enceintes fermeées de hautes murailles erénelées et semblables & de petites Villes, couronnent les hauteurs de la montagne ou sont. adossces a ses flancs, Ce sont les demeures des moines, MV. Pee, : hee Mind? « — 386 — ou caloyers, nom générique des religieux de I'Eglise Orient. Chaque monastére communique avec la mer par un chemin qui descend par une multitude de dé- tours vers le rivage, ol il aboutit a une petite erique servant d’échelle au couvent. On cn compte vingt & vingt-quatre, outre les cellules (Kellia) et les sh villages composés de maisons (parses, ne renfermant pas moins de trois cents ézlises ou chapelles. Deux de ces monastires, le monastire de Zographus , situé sur le cdté occidental de Ja presqu'lle, et celui de Chilandar, prés du cap du méme nom, fondé par le roi serbe Etienne Nemuania { au 12” siécle, sont occupés par des moines bulgares, et c¢lébrent Vollice en langue slave. Un troisidme, désigné sous lenom de Joussikon, fut fondé par Vimpératrice Catherine pour des moines russes. Tous les autres sont Grecs. Ca et li, sur les pics les plus inabordables et dans les gorges les plus profondes, ap- paraissent des ermitages avec Jew oratoire surmonté Wune petite croix. Des anachorétes, appelés philérémes par les Grecs, peuplent ces retraites, dont le nombre s’dléve a plus de cent cinquante. La population totale de l'Athos est d’environ trois mille cing cents & six mille religieux. La métropole (to Protaton), au centre de la montagne, est appelée Karia, ou UOssuaire, en commeé- moration du massacre d’un grand nombre de Peres, en 1285, par Michel Paléologue. La plupart des grands mouastires de P Athos furent fon- dés par des princes ou des princesses de l'empire de By- zance, Constantin, Théodosc, Manuel et Alexis Comnene, Andronique I, Nicephore, les impératrices Pulchérie et Théophanie, femme de Romano. C’est la que les ambitieux mécontents de la cour de Byzance, les favoris en disgrtees quelquefvis de simples particuliers qu’une grande infor- tuncavait frappés, venaient attendre, les uns la mort, qut termine tous les maux, les autres un retour dela faveut du maitre. La conrquéte ne changea presque rien aa situa es, BAMENIITHMION KPHTHY — 387 — tion de la Montagne. Mohammed If ¢pargna les solitaires, les protégea méme en leur imposant un léger_tribut 4. Leurs monastéres demeurerent debout, autant par suite du systéme de tolérance pratiqué envers les raias, que par un effet du respect que les musulmans professent pour tous les ordres religicux, & quelque secte qu’iis appartien- nent, bien que Je monachisme soit en Opposition avec le dogme fondamental de Vislamisme. Tels ils étaient lors- quils furent visités pour la premiére fois par le célébre Voyageur et naturaliste Belon, vers 1545, mois d'un sidcle aprés la conqucte, tels ils nous apparaissent encore aujourd'hui. On dirait que la vie des caloyers participe de Vimmobilité des rochers sur lesquels leurs demeures sont assises, Un seule regle, celle de Saint-Basile, régit ees mo- nastéres, comme tous ceux de VEglise d'Orient en Tur- quie, en Gréce, en Russie. Quelques-uns cependant, dans le Liban ct au mont Sinai, suivent la régle de Saint- Antoine. On les distingue en ecnobies, ou communautes ordinaires, et en idiorithmes, peuplées Vanachorttes qui juangent isolément dans leurs cellules, excepté les jours de {Gte, ott ily prennent leur repas en commun, Chaque honastére a son higownéne (pricur) ou ses épitropes, le premier’ nommé a vie, les autres élus chaque année par la communauté, Ces dignitaires ont la direction & la fois spirituelle et temporelle ducouvent, et correspondent avec les freres envoyés pour administrer les biens des couvents en Turquie, en Valachic ou en Russie. Parmi ces derniers, quelques-uns portent le titred’archimandrite, qui est la dignité la plus voisine de l'évéque, et exige la nomination du patriarche. Les religieux se distinguent cn moines ordinaires, Monachoi, et en moines consacrés, ieromonachui. Ceux- * Pendunt omnia monasteria, ne ullam molestiam ‘Turew inferant , MUotannis duo millia aleorum, (Crusié Turco-Grecia, p. 355.) — 388 — ci sont en général les plus instruits. Les novices, qui portent habit noir simple, sont distribués entre les religieux de chaque monastére. Chacun deux a son pére, comme il Pappelle, qui se sert de lui comme d@un do- mestique et lui enseigne en retour Ja lecture, un peu décriture ct le plain-chant. La vie des religieux se partage entre les exercices de piété et les travaux manuels. Les uns cultivent la vigne, récoltent les olives ct en extraient lhuile, ont le soin du bétail, s’emploient a la poche dans la Méditerranée; les autres vaquent aux travaux de lintérieur, et fabriquent deg croix, des chapelets et d'autres menus onyrages en bois sculpté qu’ils vendent aux touristes étrangers, OU qwils distribuent aux fiddles en retour de leurs aumdnes. Par intervalles, le retentissement d'me plaque de bois ou @airain, sur laquelle on frappe a Jentrée des mo- teres (car Fusage des cloches est interdit dans toutes Jes églises chrétiennes de la Turquie), marque Ie passage du travail & la priére. A ce bruit répété Wun couvent a autre, et qui s’entend de toutes les parties de la mon- tagne, vous voyez tous les religieux tomber & genoux, se relever, se prosterner de nouveau en se frappant la poitrine et en psalmodiant des cantiques. Ces chants entonnés dune voix nasillarde, ces melanoiai ou génu- flexions répétées jusqu’a trois cents fois de suite, lastricte observance des jetines, si fréquents et si rigides dans VEglise grecque, constituent toute la dévotion et toutes Jes pratiques religieuses des caloyers. Leur science ne va gnere au-dela. « Entre tous les six mille caloyers, qui gont par la montaigne en si grande multitude, écrit Belon dans son vicux langage, & peine en pourroit-on trouver deux ou trois de chaque monastire qui sachent Jire et escrire; car les prélats de PEglise grecque et les pa- triarches, ennem de la philosophic, excommunioient tous les prestres et religieux qui ticndroient livres et en escri- Toient ou lirvient autres que en théologie, et donnoient a“ GR es & entendre aux autres hommes qu'il n‘étoit licite aux chrestiens destudier en poésie et philosophic. » Un rapport récent, adressé au ministére de l'instruction publique, par un Gree meéme, confirme pleinement le témoignage de Belon. Néanmoins, chaque monastere posstde une ou plusieurs bibliotheques, riches surtout en manuscrits anciens et du moyen-ige. Le savant pre- fesscur Athanase de Paros, qui enscignait I’Gloquence au collége de Chio @ la fin du sidele dernier, parle des biblio- theques de Sainte-Laure ct d'Ibiros, sur l’Athos, comme des plus considérables qui existassent en Groce 2 cette époque. Mais bientot la révolution de 1821 leur causa des dommages irréparables. Les Tures, ayant occupé & plusieurs reprises les couvents de I'Athos, déehirerent: les manuscrits pour en fabriquer des cartouches, et dégra- devent les marbres ainsi que la plupart des fresques qui décoraient les églises. Lignorance et la barbarie des moines le disputérent & celle des Turcs. Les Seolies dHomeére Jeur servaient a faire des amorees pour le péche ; ils calfoutraicnt leurs portes et leurs fenétres avec les Vies des hommes illustres. Pouqueville parle, dans son Voyage, d'un frere servant des Météores, chargé du soin de la boulangerie, qui avait brilé petit a petit, pour allumer son four, une quanttté considérable de manuscrits conservés dans une salle du monastére. Au- jourWhui encore, état @abandon des bibliothoques de lAthos, les volumes jetés pele-méle, pourris par lhumi- dité, couverts @immondices, témoignent assez du peu de cas que font les caloyers des richesses liftéraires quwils posscdent!, Elles cussent entidrement. péri si Pat- tention du monde savant, excitée par les récits de quel- ques voyageurs, n’etit commencé a se porter vers les SC * Je nvexagire rien : témoin eet extrait du Journal a la main de M. Mynoide Mynas, pendant son séjour au mont Mhos en 186, «Thy ay dit-il, dans te convent de Lawra, a mont Athos, deux bibliothiques, Une petite et une grande. La premidre contient des manuserits tout a = 390 - hibliotheques de l’Athos. Elles furcnt explorées a diverses reprises, mais imparfaitement, par Jes savants de France ot d’Allemague. En 1843, M. Mynoide Mynas, chargé par M. Villemain, alors ministre de instruction publique, Wune mission scientifique en Orient, rapporta quarante- un manuscrits et quelques marbres, recucillis la plupart dans le monastiére de Sainte-Laure, et relatify a des ouvrages de littérature, histoire, de philosophie, de droit, de médecine, de liturgie, ete. Le précieux ma- nuscrit des Mables d’Esope mises en vers coliambiques par Babrius, qui servit & Pédition princeps de cet auteur par M. Boissonade (184), faisait partie de cette collection. On peut encore citer, an nombre des découvertes im- portantes faites au mont Athos, le Guide de la peinture, Maprés Ie manuscrit dun moine aghioritedu 15° oudu 46° siecle, copié sur les licux memes par M. Didron, et dont il donna une traduction francaise en 18454. Entin tout le monde se rappelic les beaux dessins de Papety exécutés apres les fresqies du couvent de Sainte-Laure, qui figurérent & exposition de 1847. Le bruit que firent dans le temps ces découvertes, on ¢clairant les moines sur fa valeur de leurs (résors, les a rendus soupgonneux, et ils se montrent trés-difliciles aujourd hui & permettre Pacces de Jeurs bibliothoques aux étrangers. Leur hospitalite méme s’en est ressentic, ct plus d’un voyageur, venu fail abandonnés et jet¢s péle-méle, la plupart pourris par Phumidité eb Jes ordures des animaux... Je travaillai dans ectte bibliothique quinze jours, accompagné dun diacre nomme Gabriel, en fevilletant tous Tes qmanuserits, que j'ai nettoyés autaut qu'il m’était_ possible, Hy avait un plancher qui oceupait Ja moitié du parterre de la bibliotbeque, en forme un sofa. Les planches d'au-dessus Glaient mouvantes, ct le devant du plancher ouvert; Pau-dessus était plein de poussiére et des ordures Cani- Inaux, Ayant examiné tous les manuserits, je me suis fourré sous le plancber, malgré la résistance des moines. Hs me disaient qu'il ay avait Tien et que je me salirais inutilement, Copendant jen ai extrait quinze Tanuscrits. » 1 Cette traduction porte le litre fort inexact de Manuel d'icono- graphie chrétienne grecque et latine. ~1n-8, 1845. imprimerie royale: — 34 — pour visiter en détail les monastéres de l’Athos, a dd devancer I’époque de son départ, parce que Thigouméne, irompé par quelque indiscréte question, avait cru recon- naitre en lui un de ces missionnaires envoyés d’An- gleterre ou de France pour leur ravir leurs inutiles trésors. Chaque monastére nomme tous les ans, au mois de mai, un déléguéa lassemblée générate (synodon), qui se tient & Karia. Ces délégués, a leur tour, élisent quatre chels nommés épistates, investis du gouvernement général de la Montagne, ct dont le président doit toujours appar- tenir & Pun des cing grands couvents de Laura, de Vato- peédion, AIphiron, de Chilandar et de Saint-Denys. L'autorité turque est représentée & Karia par un mute- cellim sous les ordres duquel sont placés une vingtaine de zabtiyés (soldats de police.) Cette bourgade forme un des onze kazas, ou districts, de la province (iva) do Salo- nique. Le tribut imposé sur fa totalité des monastéres est pergu directement par le defterdar, ou receveur des fi- nances, de cette derniére ville. Les monastéres de I’Athos, comme tout le clergé ré- gulier et séculier en Turquie, sont exemptés du paiement da kharadj, ou capitation due par tous les sujets non muisulmans du Grand-Scigneur. Leurs revenus se tirent en grande partie des terres que les religieux possedent dang la montagne, ct qu'ils cultivent eux-mémes. Ces terres leur fournissent en abondance les divers objets de consommation, Ic blé, le vin, Jes olives, les legumes, les fruits. La Méditerranée, qui dessine autour de la pres- qu'lle une quantité de petites baies, les approvisionne de poisson. La laine de leurs moutons les habille. Quant au laitage, ils le tirent de leurs fermes (metochia) du conti- nent et des iles, out ils entreticnnent de nombreux trou- Peaux de vaches ct de brebis, la régle qui interdit lap- proche de la sainte montagne a toute créature du sexe fGminin s’étendant aux femelles memes des animaux. Cette interdiction, particuliére aux monastéres de — 30 L’Athos, ott elle existe de temps immémorial, parait tenir de la superstition autant que du désir de maintenir la sévérité de la rdgle, la plupart des moines de I'Athos ré- vérant, leur demeure comme un licu sanctifié par un grand nombre de miracles, et qui serait souillé par la présence d’un étre féminin. Les habitants de Pile de Saint- Senan ont une superstition semblable. Quoi qu’! en soit, la régle subsiste encore aujourd’hui dans toute sa rigueur. Vous pouvez parcourir d’un bout a lautre la péninsule sans rencontrer une brebis, une oie, unc poule. Tout étre femelle, animal domestique ou femme, est maintenu & distance dans les villages limi- trophes , ott les ouvriers, employés par les monasttres, sont autorisés & aller séjourner pendant quelques jours, aA certaine Gpoque de l'année. On parle cependant de deux belles ladies qu’un yacht amena, il y a quelques années, le long de la cote, ct qui regurent durant plusieurs jours Phospitalité des bons moines, cachécs sous un déguisc- ment. Mais les marins de} Archipela qui l’on conte lanec- dote la traitent de fable. C’est une croyance regue parmi ceux que toute femme qui, méme sans le voulvir, touche le rivage dela péninsule, menrt inévitablement dans Vannée. D’aprés cela, il n’est pas rare, dit M. Ferguson Bowen, dans la relation de son Voyage de Constantinople a Corfou, publi¢e année dernidre & Londres, « de rencoutrer des caloyers, arrivés presque au terme de leur carrié pour qui la plus belle partic de la erdation est purement un étre de raison, produit, moitié par leur imagination, en partie par oui-dire (hearsay). Coux-la seuls, qui sont arrivés sur Athos & un age un peu plus avaneé, ont une réminiscence plus ou moins vive du phénoméne. » Un jour, raconte Ja tradition, un jeune novice, Glevé de- puis son enfance dans un des couvents de l'Athos, en sortit & lage de dix-huit ang, pour voyager avec sop pere-moine. Apercevant une jeune fille qui puisait de Yeau & une fontaine, il s’arréta surpris ct charmé 4 le rey — 398 — fois, et demanda & son compagnon ce ‘que e’était que cet animal. Mais le moine fronca les sourcils, et lui ré- pondit d'un ton de colére: « Malheureux! tais-toi, ne vois-tu pas que c’est le diable? — Dis-tu vrai, mon pore? répliqua le jeune homme; alors, je te prie, achetons ce joli petit diable et conduisons-lo dans notre couvent. » Les aumdnes et les offrandes des fidéles forment une autre branche de revenus des monastéres de I’Athos. Yous rencontrez & chaque pas, non seulement & Con- stantinople, & Smyrne et dans les grandes échelles, mais jusque dans les moindres villages de la Roumélic, de Ja Bulgaric et de ’Asie-Mineure, des hommes qu’a leur sur- tout de laine noire et au bonnet de feutre qui leur couvre les tempes, vous reconnaissez sans peine pour des ca- loyers, tenant wn baton d'une main, de l'autre une espdce de tronc orné d’une petite image de saint. Ce sont les pandoques, ou moines quéteurs de I'Athos. En vain lar- tisan ou le villageois cherche-t-il & éviter leur approche ; ils s’attachent ses pas, pénétrent de foree dans sa de- mneure, et il est rare qu"‘ls en sortent sans quelques pa~ ras arrachés & son épargne. Chemin faisant, ils vendent de petites croix, confessent, distribuent des indulgences. Sur les six mille caloyers qui peuplent les monasteres de Athos, un tiers environ est constamment occupé a ces quétes qui se renouvellent deux fois l'an, On en trouve Jusqu’en Géorgie et dans les cyalets qui avoisinent la Perse. Au retour, celui qui rapporte la plus grosse somme court la chance d’étre élu higouméne de son monastére. Tl faut joindre au produit de ces quétes les offrandes que les églises orthodoxes de Gréce et de Russie en- voient chaque année 2 la sainte montagne, ainsi que la part qu'elle préléve dans les revenus des monastéres deé- dis de la Valachie et de la Moldavie. L’origine de cette dédieace, qui constitue un des points les plus importants et les plus deélicats de la question économique des prin- Cipautés, nécessite une courte digression. Lors de lar- — 396 = rivée desFanariotes dans les principautés, au commence- ment du 18° sidcle, cclles-ci possédaient un grand nombre de monastéres fondés anciennement, soit par les princes, soit par les boyards indigenes. Les immenses domaines qui relevaient de ces mo tires leur avaient été concé- dés, dans le principe, & la charge par cux Wen appliquer le revenu, ou une part du revenu, a des couvres de cha- rité ou Wutilité publique, comme de fonder une école ou un hospice attenant au monastire, de nourrir un certain nombre de familles indigentes du pays, de doter annuel- loment un nombre déterminé de jeunes filles orphe- lines, etc. Quelques-unes de ces clauses, que l’on trouve exprimées formellement dans les actes de donation, étaient déji tombées en désuctude sous Vadministration des princes indigines: ce fut bien pis lorsque les prin- cipautés furent livrées au Fanariotes. Ceux-ci firent d paraitre en grande partie les titres originaux ct les rem- placerent par des chrysohulles qui dédiaient (en langue roumaine, inchinare, incliner ) une partic des monastéres du pays aux communautés grecques du Saint-Sépulere , du mont Sinai ou du mont Athos’. Dans le principe, la dédicace apparait, ainsi que son nom Pindique, comme un simple hommage, tendant & établir la suprématic de la race grecque sur la race indigine, mais Wimpliquant nullement la possession réclle, ni méme Vusufruit des biens des monastéres. Gewx-ci prélevaient chaque an- néo sur leurs revenus les sommes nécessaires aux éta- Dlissements ct aux cguvres de bienfaisance locale, & Vac- quittement des impositions envers PEtat, aux frais du culte et & Pentretien de la communauté; une portion de Vexcédant, s'il y en avait, était envoyée, a titre Woffrande, soit, au Saint-Sépulcre, soit au mont Athos. Mais, lorsque Jes communautés grecques curent obtenu des princes fa- "Le nombre de ces manastires slave i 59 pour fa Valachio et 45 pour ta Moldavie, en tout 102, dont 28 sont dédiés au mont Athos. — 30 — nariotes lautorisation d'avoir dans les principautés des higouménes pour les représenter ct gérer en leur nom les monastires dédiés du pays, Vhommage dégénéra promp- tement en servitude: d’un simple droit 4 Vassistance sur le superflu les abbés grees firent un droit de possession absolue. Non sculement ils s’appropritrent en entier les revenus des monastéres, mais ils prétendirent méme disposer du fonds. Les divans princiers, et plus tard les assemblées nationales, ne cesstrent de réclamer contre cette spoliation qui faisait passer & des Gtrangers plus dun cinquiéme de Ia propriété foncitre dans les pays roumains. La question, cent fois agitée, ne fut jamais ré- solue délinitivement. En 1822, le gouvernement des deux provinces ayant été rendu aux princes indigtnes, un fir- man de la Porte débouta les moines grecs de leurs pré- tentions, et restitua les biens des monastéres a leurs possesscurs légitimes. Ils en farent dépouiliés de nou- veau par le réglement organique de 1831, au profit des communautés greeques, mais ala charge par celles-ci de payer sur le revenu une redevance annuelle de deux mil- Jions de piastres valaques (environ 700,000 fr.) qui fu- rent alloués a la caisse des écoles 4. Or, l'on se fera une idée de larichesse des monastéres ainsi aliénés, si l'on songe que ces deux millions de piastres représentent tout au plus le dixiéme de leurs reyenus actuels, pour la Valachie seulement. Le gouvernement provisoire de 18 48 déeréta l’6mancipation des monastéres soumis, ct nomma une commission a Veflet de fixer 'indemnité annnelle qui serait allouée aux Lieux Saints a titre d'oflvande. Mais les travaux de la commission furent arrétés trois mois apres par la chute du gouvernement provisoire, et les choses revinrent & Pancien état; de telle sorte que l'on "NH convient de défalquer de cette somme 500,000 piastres, qui furent alltibuées au patriareat de Constantinople , & titre de subvention, pour Ventretien des écoles grecques de la Turquie, oo 896 peut évaluer, encore aujourd’hui, 2 dix millions de frances au moins la totalité du tribut que les deux principautés réunics paient chaque année aux monastéres grecs si- tuds hors du pays. Sur cette somme, les monastéres de Athos figurent approximativement pour un quart. Le monastére du mont Sinai y entre également pour une portion, mais moins considérable. C’est ce monastire si célébre, fondé par Justinien au pied méme delamontagne oi’ Diew parlaa Moise, et dont Ie supéricur prend le titre Warchevéyue et chef du mont Sinai. I estnommé a ’élec- tion, mais regoit investiture du patriarche de Jérusalem. Les monastvres des iles des Princes comptaient au- trefois parmi les plus florissants de la Turquie. On ap- pelle ainsi un petit archipel de la mer de Marmara, Fentrée du golle de Nicomédic, composé de cing éeucils of de quatre les habitées, Proti, Antigoni, Khalki et Prin- kipo. Cette dernidre, ainsi appelée, dit-on, parce qu'elle servait de lieu d’exil aux princes de la famille impériale , a donné son nom au groupe. Les monastéres de ces Iles, devenus le rendez-vous habituel, durant la belle saison, des négociants grecs et européens de Constantinople, sont aujourd’hui presque ent ierent abandonnés. Quelques inoines au teint bave, errant sous leurs cloitres déserts, parfois un Cx: patriarche, accompagné de quelques prétres lideles & sa disgrace, semblent les revenants plutot que les hotes ordinaires de ces licux jadis si peuplés. Quel- ques-uns ont entidrement changé de destination. Le mo- nastére d’Ayia Triada (Sainte-Trinite), dans Vile de Khalki, a été transformé en we école dépendant du patriarcat; celui de Saint-Georges, a Prinkipo , sert hospice pour les aliénés ; un autre, dans la méme ile, dont j'ai oublié Je nom, est la résidence dete du pa- triarche de Jérusalem. U me reste a parler des Météores, ou convents grecs de la Thessalie, situés dans la contrée la plus sau edu Pinde, au sommet de rochers, dont quelques-uns s’éle- — 397 — Vent jusqu’a trois cents pieds, et tellement & pic, que Von ne peut y monter qu’ l'aide d’échelles ou de filets en corde que l'on hisse au moyen d'une poulic. Ils ne sont plus qu’au nombre de sept, le monastire de Weétéo- ron, rebati en partie, en 1371, par Jean Paléologue, qui Je placa sous invocation de Josaphat ; de la Sainte-Tri- nite, qui doit sa fondation & Maric Paléologue (1436); de Varlaam (1536), aunord-est de celui de Météoron, qui ser- vit de prison sous Ali, pacha de Janina: de Saint-Nicolas, de Rosaria, de Saint-Etienne et de la Trinité. Jadis on en comptait un plus grand nombre; mais plusieurs ont été détruits par Peffet du temps, des guerres, et par la décomposition méme des rochers qui leur servent de base. Ces chartrouses, comme suspendues entre le ciel ct la terre, et habitées par une soixantaine de religieux, vouds ala vie la plus austére, ont été décrites avee beaucoup exactitude par M, Bowen, dans son Journal de Voyage: « Nous afteignimes, en une demi-heure , le rebord d'un rocher qui s’6léve, en ligne perpendiculaire, & une hau- tour (environ trois cents picds. Sur sa cime est con- struitle monastove de la Sainte-Trinité; les pies voisins supportent les couvents de Météoron, ainsi appelé, par excellence, comme le plus grand de tous, de Barlaam, un des saints du calendricr grec, de Saint-Etienne ct de trois autres moins importants. « Je me décidai & monter jusqu’a la Trinité, comme étant le plus élevé de tous, ef en méme temps, le plus rapproché du village. Les monas' sont accessibles, soit au moyen de filets (nets), soit & Faide d'échelles de hois et de corde, établies de distance en distance, La nuit, oule jour, quand elles ne sont pas nécessaires, on retire ces échelles, et les moines demeurent sans communication aucune avec le monde des vivants. Cette voie est la plus périlleuse, soif pour la montée, Soit pour la descente, parce que ’échelle étant parfai- « tement perpendiculaire, se balance dans Pair au moin- RR RRA AR RRR R — 398 — dre souffle du vent. Un moine, opérant cette ascension, semble une grosse mouche noire au-dessus du préci- pice. Je préférai le filet, auquel cas, on n’a qua s’a- bandonner entitrement & Ja sollicitude des bons pres, tandis qu’avec les échelles , vous devez compter sur votre vigueur ct votre agilité. Voulez-vous vous en fier a l’Eglise ou & votre propre jugement? Toute Ja ques- tion est la. — Je tirai un coup de pistolet afin d’attirer Pattention des moines ; le son répété par tous les échos des pics cnvironnants n’avait point encore expiré dans le Pinde, quand deux ou trois (étes encapuchonnées se montrérent sous la plate-forme qui garnit le sommet du rocher. Apres une reconnaissance de quelques in- stants, ct jugeant que nous n’étions pas gens a en- lever Je couvent par un coup de main, les moines je- terent quelque chose qui parut un filet ayant la forme dun chou, et laissérent couler, en méme temps, Wa cable terminé par un croc en fer et mis en mouve- ment au moyen d’unc poulie cb Wun cabestan. Mon guide étendit le filet, et je m’y assis les jambes croi- sévs. II reprit ensuite toutes les mailles qui étaient au- dessus de ma téte et les passa dans le croc. Les moines virérent alors aucabestan, et en trois minutes et demic, j'attvignis le sommet, Glevé de deux outrois cents pieds, ballotté dans espace, ct tournant comme une pidce de bovuf qui rdtit lentement devant le feu. tl serait aisé du reste, deremédicr acct inconvenient aumoyen dune corde tenue par une personne qui reste ch bas, comme cela se pratique dans les puits des mines mais ce pro- eédé a Ja facon de Cornouailles (Cornish luxury) n'est pas encore venu a esprit des bons péres. Au départ, mon filet se ferma par le poids de mon corps, au point que mes genoux touchcrent mon menton , et je tus roulé en boule, comme un heérisson. Le guide me dit de fermer les yeux de crainte du vertige; mais je tes rouvris aussitdt cn me sentant rudement froissé contre — 3 « une des aspérités du rocher; un mouvement convulsif « des genoux m’en Cloigna. Ty a, en effet, de quoi don- « ner le vertige: car, je ne pus longtemps apercevoir « nile rebord étroit ot je m’étais arrété, ni le sentier « tortueux qui y conduit; mais, je découvrais au-dessous « de moi les plaines de la Thessalie dans une circon- « férence de plus de mille pieds. Durant Paseension, le « cable glisse quelquefois d’un rayon a Vautre du cabes- « tan, alors vous retombez comme un plomb quelques « pieds plus bas, ce qui vous fait éprouver une secousse « fort peu agréable. Parvenu au niveau de la plate- « forme, vous restez une demi-minute suspendu au— « dessus de labime, jusqu’a ce que les moines ayant « laché le cabestan vous harponnent avec une perche « semblable & une gaffe. Vous gisez pendant quelque « temps & terre comme un vrai ballot, puis on retire le « croc des mailles du filet, on vous déroule et Von vous « aide a vous dresser sur vos pieds 4. » Les couvents des Météores servent en méme temps de pénitencicrs ow de maisons de correction, soit pour les ecelésiastiques qui ont encour quelque peine de Varche- véque, soit pour les fils de famille qu“une faute grave ou des désordres de jeunesse y ont fait exiler en vertud’une sen- tence décerncée par le patriarche, & larequéte des parents. Les monasté::s de femmes existent en trés- grand nombre dans la Muldo-Valachie. Dans la Turquie propre- ment dite, leseul amentionner est celui de Kid (Ghenlik, sur la mer de Marmara, Ces monasttres appartionnent également & Pordve de Saint-Basile; la supéricure, clue par Ja communauté ef confirmée par te meétropolitain, porte le titre Mhigoumenissa; un moine, (un age canoni- que ef logé hors da couvent, est chargé de la célebration de Pollice divin, A. Unicast. ssaly, and Epirus: @ Diary of a Journey froni ! Mount-Athos, Th 1. By George Ferguson Bowen. Constantinople to Cor LES VILLES DU BAS-DANUBE’. Apres avoir recu le Timok, qui sépare la Servie de la Bulgarie, le Danube coule dans une vaste plaine avec un cours rapide, mais paisible; son lit est assez large pour que de la rive droite on distingue a peine la rive gauche; il forme de nombreuses tles boisées, mais il ne donne pas encore de grandes dérivations, et son lit est dis- tinctement encaissé, surtout sur la rive gauche, qui commande presque constamment la rive droite jusqu’d la fin méme du fleuve. Celui-ci arrive air Viddin, ville de 25,000 habitants et quia aujourd'hui une garnison de 8,000 hommes. (est Pune des trois grandes places de la ligne militaire du Danube; elle couvre les approches de la Servic, observe la petite Valachie et les delilés de la Tansyl- vanie, enfin, tient Ie débouché extréme de la route qui ya par Nissa ct Sophia sur Andrinople. Elle a la forme un pentagone irrégulier, est réguligvement bastionnée, a un chateau-fort ct deux ouvrages détachés dans les 4les du fleuve; enfin, elle est environnée de marais. Sous ses murs s’est livrée, en 1689, une bataille ott les Tures furent défaits par les Impériaux. C'est sous la protection de ses canons qu'un corps de Tarmée ottomane a effee- tué dernigrement son passage & Walafal, située sur fe rive gauche, pour envahir la petite Valachie. Apres Viddin, le fleuve arrose sur lavive droite Argoul- Grad, Lom, Zibrou-Palanka, Rulord ou Orona; co sont des villes palanquées qui sont situces at confluent. des cours Mean descendant du Veliki-Balkan, c'est-d-dire aux points oit la rive droite venant & s'abaisser, cesse de commander la rive gauche; cvs villes ne sont capables 1 Nous empruntons & un article récent de M. Th. Lavallee publié parle Moniteur de Varmée, cette interessante notice sur le theatre actuel de I guerre, (Note dela rédaction.) — Hi - que de géner les passages de Venncmi. Puis le Danube arrive & Nicopoli, ville forte, fondée par Trajan et qui fait un commerce trés-actif. Elle est trés-importante par sa position au confluent de l'Oswa et presque en face du confluent de I’'Alouta. Elle a 10,000 habitants et une garnison actuclle de 2,000 hommes. La ville n’avait plus derniérement pour défense que son chateau-fort, mais on vient de rétablir son enceinte etd'y ajouter de nouveaux ouvrages. Vis-a-vis d’elle, se trouve la petite ville de Toure qui lui servait de téte de pont et quia été demantelce aprés Ja guerre de 1828. Par cette téte de pont, les Tures pénétraient dans la grande vallée de V’Alouta, pendant que Nicopoli gardait le débouché extréme de Ja route des Balkans qui passe par le détilé de Gabrova. Nicopoli a été prise par les Russes en 1810 et presque entiérement ruinée; elle a encore été prise par cux en 1829. Ses environs ont été le théadtre de plusicurs batailles + la principale est celle qui fut gagnée par les Tures sur les chrétiens et ott Jean-sans-Peur fut fait prisonnier avec unc foule de chevaliers francais. Apros Nicopoli, qui peut ¢tre appeléc, moins par sa force que par sa position, & joucr un grand role dans la guerre actuclle, le fleave passe a Sistowa, ott sa largeur est telle que les vaisseaun de 600 tonncaux Ie sillonnent 2 pleines voiles. Cette ville a 12,000 habitants, des ma- nufactures florissantes, ane eneeinte ianquée de tours et un vieux chatean. Son importance militaire est secon- daire; elle a (6 prise et détruite par Jes Russes en AS10. Apres Sistowa, Ie Danube, qui depuis Viddin avait coulé de louest & Pest sans grandes inflexions, com- mence & tourner vers le nord; il arrive ainsi & Rouls- chowk, Vune des trois grandes places turques du Danube; elle est située au confluent du Kara-Lom, au débouché de la grande route de Russie & Constantinople par lassy et Bucharest, ct des deux, principales routes des Balkans, celles de Gabrova et de Schumla, dont nous MY. we — 402 — parlerons plus tard. Routschouk a un chateau trés- fort qui commande la ville et le fleuve, et on lui a fait récemment des fortifications modernes; elle renferme 30,000 habitants et a dans ce moment une garnison de 5,000 hommes. En face d’clle, sur la rive gauche, se trouve Giurgevo, ville valaque qui était la téte de pont de Routschouk et qui a jou un réle de premier ordre dans toutes les guerres entre Jes Russes ct les ‘Turcs; elle a été démantelée aprés la guerre de 1828. Les Russcs se sont emparés de Routschouk en 1810, apres un trés- long siége, plusicurs assauts ct une bataille gagnéo par eux a Baitin ou Cervena, village situé au-dessus de la ville, sur le Danube. Au-dessous de Routschouk, le fleuve, qui avait coulé jusque-ld dans un lit unique et parsemé d’iles, commence & former de grandes dérivations qui vont inonder le pays & 15 ou 20 kil. de distance; la rive gauche con- tinue & commander la rive droite; 1a premiére est bordée par les derniers gradins des montagnes de Bulgaric; la deuxiéme est bordée de terres basses, marécagcuses, occupées par des bras secondaires ou des flaques d’eau stagnantes, semées d’iles boisées ou couvertes de Troscaux gigantcsques. Le Danube reprend ensuite un seul lit et arrive ainsi & Tourtoukai, petite ville située en face du confluent de l’Ardjich, qui n’était autrefois que palanquée, mais qui vient d’étre fortifiée régulidre- ment 4 cause de sa position remarquable; elle lie en effet les deux grandes places de Routschouk et de Silistria, et elle se trouve au scul endroit ot, entre ces deux villes, les deux rives soicnt également basses et présentent des points de passage faciles. Vis-d-vis d’elle, et & 2 kil. de la rive gauche, est le village valaque d’Olte- nitza. C’est la qu’en 1810 et en 1829 les Russes ont passé le Danube; au début de la guerre actuelle, ils s’claient encore établis en force au méme village; c’est 12 que les Turcs viennent de passer le fleuve et de les battre. — 403 — Le Danube arrive ensuite a Silistria, l'une des trois grandes places turques de ce fleuve, au débouché de la route principale des Balkans par Schumla; elle a 20,000 habitants, de vastes fortifications, un chateau-fort, de grandes casernes, et elle fait un commerce considérable; sa garnison est aujourd’hui de 6,000 hommes. Elle a été vainement attaquée par les Russes en 1773 et 1809, et prise par eux aprés un long siége en 1829, Un com- bat s’est livré dans ses environs, Tartaritza, en 1809. Routschouk, Silistria ct Schumla sont les sommets d'un triangle remarquable qui est en quelque sorte la citadelle de la Turquie cn avant des Balkans. Nous en reparle- rons. Aprés Silistria, Ie fleuve continue a se diriger vers le nord, ct ses dérivationsrecommencent. La plus considé- rable est la Berchicha, qui longe le vrai Danube pendant plus de 100 kil., estdistante de lui de 30 4 40 kil., et s’unit accidentellement lui par de grands bras formant des files marécageuses; toute Ja rive gauche jusqu’d Hirs- chova est impraticable. Le fleuve passe ainsi & Ras petite ville fortifiée, en face de laquelle sont dables marais. II paratt que, dans des temps trés-reculés, le Danube, arrivé la, continuait directement sa course de Pouest & lest, pour se jeter dans Ja mer & Kustendjé, dont il n'est éloigné que de quinze licues ; mais des ensa- blements accumulés ont fermé cette voic, et le fleuve coule directement vers le nord pour aller finir & plus de 80 lieues de son embouchure naturelle. Du temps des Romains, on avait arrété les invasions des Daces de ce cdté, au moyen d'une muraille et Wun fossé qui allaient de Rassova & Ja mer : c’était le Vallum Trajani, dont il reste encore quelques traces. Dans les temps modernes, On a projeté de rendre au Danube son embouchure au Moyen d'un canal; mais ce travail, qui aurait de si grands résultats, surtout depuis que les bouches du Acuve appartiennent aux Russes, n’a pas ¢té cniamé, — AL — Aujourd’hui, il est question de lui substituer un chemin de fer, et de faire de Rassova le port de station de tous les batiments qui descendent le Danube. Aprés Rassova, le fleuve descend directement au nord, en trainant ses eaux dans un terrain bas, plat, oll ses divers bras n’ont pas de lit distinct et forment dinextri- cables marais; il arrive ainsi 4 Mirschova, ville défendus par un chateau-fort et dont la garnison est aujourd’hui de 4,500 hommes; elle a é prise par Jes Russes en 4809 et 1828. Son importance est assez grande, parce quelle se trouve pros de Fendroit ott finit 1a Berchicha et out le Danube reprend un seul lit; elle garde done les passages, qui pourraicnt s’effectuer de ce cdté dans la Dobroutscha. — La Dobroutscha est la presqu’ile rec- tangulaire qui se trouve comprise entre le Danube, de Rassova a Pembouchure de Kilia, le fossé de Trajan et Ta mer. C'est un pays presque entidrement inondé, rempli de fertiles paturages, nourrissant des chevaux estimés et pabité par une population de Tartares pasteurs; quand Je Danube est passé, il ouvre les routes de Varna et de Schumla sur Constantinople. Apres avoir repris wn scul lit prés de Hirschova, le Danube recommence ses grandes dérivations ; il arrive ainsi & Matkhin, ville défendue par une encvinte et deux chateaux, ct dont la garnison est aujourd’hui de 3,500 hommes; elle a été prise par les Russes en 1809 ef en 4828. Son importance était alors tris-grande, parce quelle avait vis-a-vis delle, mais en étant séparée par quatre & cing bras ayant plus de 8 210 kil. de largeur, la forte place de Brahilow ou Braila, ville valaque qui lui servait de téte de pont et qui a été démantelé apres 1a guerre de 4828. Par elle on tournait toute Ja Valachie, on pénétrait dans la Moldavie et l'on gardait tout le bas Danube ef la Dobroutscha. Ele a subi de nombreux sigges. car les Russes ne pouvaient s’aventurer au-deladu Danube sans étre maitres de cette place avancée sur leurs fa -~ derriéres. Ce n’est plus aujourd’hui que le principal port de commerce de la Yalachic. Aprés Brahilow, le Danube reprend un seul lit et passe a Galatz, sur la rive gauche et prés du confluent du Sereth; e’est le seul port que la Moldayie ait sur le fleuve. Puis il recommence ses dérivations et arrive & Reni, ot il cesse de couler vers Je nord pour reprendre la direction de Poucst & lest. I traverse alors un pays tellement inondé, que la terre semble disparaitre sous les caux; les cours d’eau qui viennent le joindre ne peuvent effectuer leur confluent qu’a travers de vastes lacs. Néanmoins, il n’a plus & peu prés qu'un seul lit lorsqu’il passe & Isukehi ou Fsatcha, bourg défendu par un chiteau-fort quia, dit-on, aujourd'hui une garnison de 1,500 hommes, et qui vient d’étre récomment attaqué par les Russes; ce n’est qu’un poste d’observation pour les embouchures du feuve. fen est de meme de Toulteha, derniére forteresse des Turcs sur le Danube et qui a aujourd'hui une garnison 1,200 honimes. Cette ville était autrefois trés-importante, quand elle se liait & travers les sept ou huit bras du Danube 4 la forte place d'Ismail, dont nous allons parler. Au dessus de' Foultcha, le fleuve se partage en un ‘grand nombre de bras, dont trois principaux, qui embrassent un vaste delta appartenant en grande partic a la Russie. Le premicr partage se fait & Pile de Tchatal, ot le Danube se divise en deux grandes branches : Ja premitre, dite la Kilia, se dirige au nord, passe a Zsmail et & Kilia, deux places enlevées par les Tures aux Russes et qui commandent aujourd’ hui tout le delta du Danube. Ismail avait autrefois pour les Tures la méme importance que Brahilow; elle a subi de nombreux sidges et fut prise dassaut en 1790 par Suwarow, qui y fit massacrer toute Ja population de 35,000 ames. La Kilia, qui se subdivise en un grand nombre d’autres bras, est diflicilement navigable et n'a 4 son embouchure qu'un 4 deux métres w— 406 de profondeur. La deuxidme branche est la Soulina, qui coule au sud-est ct se subdivise en bras de Saint-Georges et bras de Dounavetze, le plus méridional, et qui se jette dans le lac maritime de Rassim. La Soulina est assez facilement navigable; elle a une largeur de 2 & 300 métres, une profondeur de 6 a 7 metres et elle se jette & la mer par un scul lit; le Saint- Georges a une profondeur de 10 métres, mais son entrée est presque entitrement ensablée; le Dounavetze n’est pas navigable. Le littoral occupé par les bouches du Danube est de 138 kil. Le delta se compose des tles Tchatal ct Léti, entre la Kilia et la Soulina; de I’fle Saint-Georges, entre la Soulina ct le Saint-Georges; de Vile Portitza, entre Saint-Georges ct le Douvanetze. Cette derniére partic est la seule qui appartienne au- jourd’hui @ la Turquie; tout lc reste est a la Russie, qui, soit par calcul, soit par négligence, a laissé s’ensabler derniérement la Soulina et menace de ruiner la navigation du fleuve le plus important de Europe. Néanmoins elle entretient sur le fleuve une flottille de chaloupes canon- niéres qui n’ont qu’un faible tirant d’eau et portent une ou deyx pitces de gros calibre. Tout le delta, quoique inondé une partie de l’année, est bien peuplé ct bien cultivé, excepté l’ile de Portitza, composée de sable et infertile. Le passage du Danube, dans son quatriéme bassin, est une opération difficile, 4 cause de la multitude des tles, de la nature marécageuse du sol, des crues subites et fréquentes qui inondent les deux rives; mais elle réussit presque toujours, & cause de la longue étendue de rives que Vadversaire doit garder. Le passage est surtout diflicile de la rive gauche & la rive droite, celle- la étant dominée presque partout par celle-ci, et n’ayant ni places fortes ni tétes de pont pour couvrir les opéra- tions. Les Russes ont néanmoins indiqué comme lieux de passage avantagcux : Braova, pros du confluent du — 407 — Timok; les environs de Viddin; le confluent du Schyl; Islas, prés du confluent de VAlouta ; Mamounda, pros de Nicopoli, les environs de Giurgevo et de Hirschova; enfin, Braila, Galatz ct Isatcha. Leurs passages ont presque toujours réu mais ils n'ont jamais osé s’aventurer dans Ja Bulgaric et les Balkans sans étre maittres des places du Danube, et celles-ci ont toujours fait de Jongues ct terribles résistances. Quant aux Turcs, quand ils avaient les tétes de pont de Tourna, de Giurgevo, de Brahilow, d'Ismail, ils domi- naient sans peine toute la rive gauche du Danube, sans cess ouverte a leurs armes, ct Je fleuve, garni de dix- huit places fortes, protégé en avant par le Dniester et le Pruth, appuyéen arridre par les Balkans et les forteresses quien gardent les défilés, formait l'une des lignes nilitaires les plus redoutables de (Europe; ¢c’était sur- tout une ligne offensive. Aujourd’hui, cette ligne est tellement Gbréchée par le déinantélement des tétes de pont que nous venons de nommer, par Ja cession des bouches du fleuve a la Russie, par la position semi- indépendante de la Valachie et de la Moldavie, qu’elle nest. plus qu'une ligne défensive. Aussi les Tures se sont-ils efloreés, dis le début de la guerre actuelle, et grace aux places nombreuses qui assurent leur retraite, de rendre au flewve son ancienne importance, en re- prenant possession des deux rives par les passages quills ont surpris, & Kalafat, prés de Viddin, & Grurgevo ct a Olienitsa. Leur plan actuel d'invasion de Ja rive gauche semble indiqué par la nature des licux, le cours méme du Danube et ses diverses inflexions; c'est celui qu’ils essaydrent dans la guerre de 1810. Nous décrirons prochainement les affluents du Da- Rube, avec sa ceinture orographique, et nous dirons Pétat politique et militaire des pays qui composent son quatrigme bassin. Tu. LavALLEE. DEFENSE DE CONSTANTINOPLE EN 1807. Vénergie que la Porte.vient de déployer au début de sa lutte avec lo czar, et quia opéré un revirement subit de Vopinion publique en sa faveur, m’a remis en mé- moire un événement analogue, dont Constantinople fut le théatre il y a pres d’un demi-sitcle, et qui prouve que cette vigueur dont on s’étonne, en l’admirant, n’est pas un fait nouveau dans histoire contemporaine de la Tur- quie. C’était au commencement de Pannée 1807. A cette époque, I’Angleterre et la Russie coalisées contre la France (autres temps, autres alliances) , cherchaient a entrainer la Porte dans leur parti et agissaient depuis plusicurs mois auprés du divan en yue dobtenir le renvoi de Constantinople de la légation francaise , a la téte de laquelle sc trouvait alors le général Sébastiani. A la fin, irrité du peu de suceés de ses démarches, et désespérant de rompre les rapports d’intimité qui ve- naicnt de s’établir entre le sultan Sélim ct Napoléon, Vambassadeur d’Angleterre, M. Arbuthnot, s’était em- barqué sur le vaisscau I’ Endymion, lc 29 janvier, et avait quitté précipitamment Constantinople, apros avoir me- nacé ie divan de Varrivée prochaine d’une flotte anglaise sous ies murs de la capitale. Cette retraite, considérée par les Turcs comme une déclaration de guerre, les d6- termina & mettre un embargo sur les batiments anglais dans les ports ottomans, et 4 consigner les marchandises appartenant au commerce britannique. Le 2 février, on apprit effectivement qu’une escadre

S-ar putea să vă placă și