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SEPTEMBRE 1995 - N° 93 - SOF ISSN 0182-0567 Fau & Riviéres de Bretagne - APPSB - 1, impasse Camille Pelletan - 56100 Lorient - CPPAP 52518 EAU & RIVIERES DE BRETAGNE : LECOLOGIE DE TERRAIN ! Fondée en 1969 par des amoureux du saumon, Eau & Riviéres a su redonner vie aux cours d’eau oubliés, envahis par la végétation et menacés par la pollution. Ses opérations Rivieres propres ont mobilisé, tout au long des années soixante- dix, des milliers de benévoles et le nettoyage des cours d'eau est rapidement devenu affaire de tous. Mais la dégradation de la qualité de Peau des sources, des rivieres, des estuaires, du littoral est due a une multitude agressions qui affectent le milieu naturel. Eau & Rivieres a done étendu son action, et sintéresse a des questions tres diverses : - aux pollutions : rejets industriels, urbains, pollutions agri- coles ; - a érosion des sols, favorisée par Varasement des talus et cer- taines méthodes de culture, qui entraine des sédiments vers les cours d'eau - a la rectification des cours d’eau qui enlaidit nos paysages, détruit la richesse des ruisseaux, des rivieres, et favorise les crues ; - Ala destruction des zones humides, qui pourtant régulari- sent le débit des cours d'eau et ralentissent les crues ; - ala multiplication des plans d’eau qui contribuent au réchauffement des eaux (pollution thermique) et aggravent les peries par évaporation ; au gaspillage de Peau, pourtant si précieuse. La pollution de eau est dangereuse pour Péconomie de la Bretagne, dangereuse aussi pour la santé des Bretons. Lefficacité et lindépendance d’Eau & Riviéres sont recon- nues de tous. En lui apportant votre soutien, vous permettez a association de poursuivre son action en totale liberté. BEC oO Editorial : Lassociation et le ministre 8 Stations d’épuration ° Alternatives : Du pore intensif au pore bio 0 Skol ar chleuziou (Pécole des talus) DOSSIER Les pesticides ® Bréves des départements ® Chantier école de Nevez ® A lire ® Lécho des marais EAU ET RIVIERES N° 93 = a a eo) E a! rT L'ASSOCIATION ET LE MINISTRE Des la formation du nouveau gouvernement, Alain Juppé et son Equipe ont manifesté l'intérét qu'ils portent au développement de la vie associative. Nouveau ministre de ! Environnement, Corinne Lepage a invité les principales associations a plancher sur les propositions du Conseil national de la vie associative (CNVA) : béné volat, financement, emploi, Europe. Le Premier ministre est évidemment attentif au réservoir que constitue le secteur associatif, qui «pese» actuellement 800 000 emplois. Il pourrait en créer encore autant pour peu qu'on lui en donne les moyens. Le gow: vernement semble favorable a une reconnaissance de 'engagement bénévole réclamé: depuis longtemps par le CNVA. Ces mesures pourraient etre inscrites dans la loi de finances pour 1996. Faut-il voir dans ce projet l'amorce d'une évolution politique et sociale majeure pour les associations ? Quelles en seront les contreparties en terme de «services» ? Réponses lors ce la prochaine session parlementaire. . Nous pressentions cette évolution depuis plusieurs années. Elle semble done se préciser et, sans doute, se précipiter. Youenn Landrein, qui a pendant sept années assumé la présidence d’'Eau & Rivieres, a eu le mérite — et le talent — de susciter et d'animer notre réflexion sur le fond et de mettre en place des réformes de structures nécessaires, Reste désormais & conduire cette mutation sans lui sacrifier lessentiel : Tesprit convivial et la connivence des «peres fondateurs», la liberté de parole et le res- pect de l'autre sans lesquels la vie sociale devient cauchemar. C'est la definition superbe de la démocratie que donne Morvan Lebesque : «Comment peut-on, parmi les autres, étre soi-meme ?> Si le ministre de l'Environnement manifeste son attention pour les associations, le lobby des industriels de Vélevage, lui, veille ses intéréts, Avec le soutien actif du préfet des Cotes d'Armor, il a su détourner a son profit la premiere visite de Corinne Lepage aux Bretons et faire publier fin juillet, dans une région sinistrée par les pollu- tions fécales de millions de cochons, la photo d'un ministre de l'Environnement flat- tant la croupe d'un porcelet. Eau & Rivieres a refusé avec force de se préter a cette mascarade Nous nous devions par contre d'étre présents a Quimper le 31 aoat, lors de sa venue en Finistere, Nous avons obtenu un accord de principe a nos demandes d'au- dience. Sa directive nitrate du 25 juillet et ses instructions aux préfets nous permettent despérer des positions claires et volontaires. Le coup darrét donne a Vextension des gros élevages dans les zones saturées en nitrates est la premi¢re manifestation de cette politique de fermeté. Nous consacrons ici un important dossier aux pesticides. Depuis longtemps les voyants d'alarme sont au rouge en Cotes d'Armor, en Hle-et-Vilaine, sur les bassins versants du Couesnon, de I'Arguenon, du Gouessant, de la Vilaine et de la Seiche. La rade de Brest est touchée par cette pollution. Les normes européennes sont bafouées Des produits toxiques s'accumulent dans l'environnement, dans nos drganismes, pro- voquiant a long terme des maladies graves. Et, comme nombre de parasites apprennent a résister aux pesticides existants, l'industrie chimique en produit de nouveaux, plus toxiques encore, et pousse les agriculteurs a les epandre en plus grandes quantites. Depuis plus de vingt ans, une poignée de scientifiques rigoureux alertent l'opi- nion mondiale sur ce fléau, Des 1971, ils préconisaient la création d'un corps de spé- ialistes formés dans le but de prescrire insecticides et pesticides, tout comme les médecins prescrivent les médicaments. Nous savons bien, a Eau & Riviéres, que les administrations ne se résolvent & action que sous la pression des associations et des citoyens, appuyés par les élus res- ponsables. Que le gouvernement renforce les moyens de notre action, et nous pour- rons jouer pleinement notre role et contribuer a stopper enfin Ia folle politique de Vintensif a tout prix et la croissance exponentielle des élevages hors-sol. Car nous savons aussi qu'elles sont l'une et lautre porteuses a terme de la destruction non. seulement de l'environnement et de la resource en eau, mais aussi et surtout, de la ressource en hommes, beaucoup plus insidieuse celle-la et irrémédiable. Pierre Ursault | EAU ET RIVIERES N° 93, RECTIFICATIF Une erreur sest produite dans les tétes de rubriques : Page 2 et 3 : Stations d’épuration Page 4 et 5 : Alternatives Page 6 et 7: Aménagement rural Page 8 : Tribune Page 9 a 16 : Dossier Page 17 a 21 : Bréves des départements Page 22 ; Education a l'environnement Page 23: A lire Page 24 : Echo des marais Dans lencadré du haut de la page 3, il manque une ligne. Larticle se termine par: «Q‘en dit le préfet du Finistere qui a laissé faire ?» Traiter les rejets des entreprises dans les stations d' puration com- munales est techniquement possible. Est-ce la meilleure solution pour nos riviéres, quelles sont aujourd'hui les regles applicables ? Dans beaucoup de nos commun ne entreprise industrielle est percu sionnelle, animation qui en résulte pour la com- mune, personne n'est insensible aux aspects posi- tifs de telles implantations. Bien souvent, les col- EAU ET RIVIERES N° 93 La station d'épuration de Saint-Nicolas du Pelenn. iP lectivités locales multiplient les offres alléchantes pour séduire les industriels : mise a disposition de terrains, primes diverses, et parfois possibillité de ‘ordement des rejets de Ventreprise sur la station ration communale dep lees WUE Dans un rapport du 16 mars 1995, la Chambre régionale des comptes critique trés sévérement la ‘Guerlesquin. Elle observe que «depuis 1983, la S.A. Tilly (abattoir de volailles) gére et occupe la ‘station sans convention, et qu'elle a obtenu gratui- tement la disposition d'un ouvrage qu'elle aurait di faire construire a ses frais en tant qu'indus- ‘riel». Qu’en dit le préfet du Finistére qui a laissé Dans le meilleur des cas, station performan- te, capacité de traitement suffisante, convention signée et respectée entre la commune et l'indus- tel pour limiter le flux polluant apport par len- ueprise, tout va bien, Hélas, cette situation idyllique n'est pas générale, et notre associaion connait des dizaines de cas edlifficiles» : convention non respectée par Vindustriel, auquel le maire hésite a faire le moindre reproche pour ne pas subir un chantage a l'emploi, extension de la production et de la pollution produite par l'entreprise qui surcharge la station communale, mauvaise gestion technique de la station par la commune qui ne dispose pas de personnel qualifié... Dans tous les cas, c'est la riviere qui trinque | Jusqu'en 1993, une simple circulaire — du 24/01/84 — indiquait que les stations commu- nales pouvaient recevoir des effluents industriels, a condition que ceux-ci ne soient pas majoritaires par rapport aux elfluents domestiques. Mais, comme dans notre beau pays, la principale qualité dune circulaire (qui n'a pas de valeur juridique) est qu’on peut sasseoir dessus, les administrations ont autorisé a peu prés n'importe quoi. Depuis un arrété ministériel du ler mars 1993, le raccorde- ment deffluents industviels & une station commu- nale doit respecter deux conditions - «la charge polluante en DCO apportée par le rac- condement reste inférieure a la moitié de la charge en DCO recue par la station; - la charge en DCO apportée par ensemble des rejets en provenance d installations classées reste infericure a 70 % de la charge en DCO recue par la station d'épuration urbaine» Cette restriction a été opportunement defen- due par ancien ministre de Environnement. ‘gestion de la station d'épuration de la commune de | Dans unc réponse a la question écrite d'un parle- mentaire, M. Barnier indiquait : «Les risques encourus par une commune sont importants : en particulier si une entreprise pour laquelle l'extension de capacité de station a été réalisée disparait avant 1a fin du remboursement des emprunts contractés par la commune, celle-ci privée des redevances nécessaires a ce remboursement peut étre confrontéc 4 une situation critique. En outre elle peut se retrou- ver avec une station totalement disproportionnée avec le volume des effluents effectivement recus et de ce fait devenir Cotalement inefficace, ingérable tech- Aniquement et financierement. Enfin, conformement aux principes de responsabilité en matiere de dom- mages causés aux tiers par les ouvrages publics, la responsabilité de la commune se trouve engagée de plein droit, notamment en cas de pollution des eaux Si celle-ci constitue une infraction, la responsabilité pénale du maize, et dans certains cas, de la commune en tant que personne morale peut étre recherchée» ! M. Barnier s'appuyait notamment sur un arrét du Conseil d'Etat 2 quia annulé la déclaration d'utili- té publique d'une extension de station d'épuration communale devant accueillir des effluents indus- triels, au motif qu’ eil appartenait aux auteurs du projet industriel de créer les installations nécessaires sa realisation dans le cadre des procédures qui leur sont applicables» Aujourd'hui, il est donc clair, que les stations depuration communales ne peuvent traiter des rejets industriels qu'accessoirement. Tant mieux peut étre pour les finances publiques, tant micux certainement pour nos rivieres, mt 1 }.0. du 21 novembre 1994 - Debats Assemblée Nationale 2 19 janvier 1994 - Requetes 112 868 et 112 898 | LE.CAS NEGOBEUREUF | ‘’& PONTRIEUX (22) | Installée depuis 1966 a Pontriewx, la laiterie Negobeureuf était raccordée & la station d’épur tion communate concue pour recevoir, ouire les 300 m3 d'effluents domestiques, le millier de nm eaux usées rejeté chaque jour par Ventreprise. Tout va bien jusqu’en 1991, date d laquelle les activités de cette laiterie sont transférées vers Guingamp. Conséquences : le SIVOM de la Rive doit assumer, sans autre ressources que celles pro- venant des usagers domestiques, le remboursement des emprunts contractés pour construire et aména- | ger une station d'une capacité quatre fois supérieu- red la pollution recue a présent... Pire, la collecti- vité va devoir investir @ nouveau 600 000 F pour restructurer la station afin d'améliorer son efficaci- 16 pour le traitement des 300 m* qui lui restent— | aujourd'hui @ épurer ! EAU ET RIVIERES N95 ECHO DES MARAIS Une génétique unique en Bretagne Yon Tanné et sa famille sont installés depuis 1987 sur 25 ha (31 ha de surface totale). Des Vinstallation, le pore est choisi comme production principale d'abord en hors-sol intensif (multipli- cateur) jusquen 1993 puis en pore biologique depuis cette date. Actuellement, les 23 truies Large White croisées Pore Blane de Ouest et les deux verrats Duroc et Pore Blane de l'Ouest pro- duisent un peu plus de 400 porcelets/an, futurs pores charcutiers. Alors que le caractere Large White apporte la prolilicité, les races moins connues comme le Pore Blane de l'Ouest (en voie de disparition) et le Duroc sont reconnus pour leur qualité de viande et un bon pourcentage de muscle. Yvon Tanné insiste beaucoup sur le type de schema génétique pour expliquer la qualité de la viande produite dans son élevage. Les parties naissage, gestante et engraissement se font en plein air integral. Seul le post sevrage est sur paille. Lélevage d'Yeon Tanne de 23 truies Large White croisées Pore Blanc DU PORC INTENSIF AU PORC BIO... Un éleveur de porcs finistérien qui décide de diminuer son nombre d'animaux de 70 truies naisseur-engraisseur 4 25 truies naisseur-engraisseur pour mieux gagner sa vie, voila qui est suffisamment inhabituel dans notre région pour que Eau & Riviéres de Bretagne s'y intéresse de pres. Autant dire que les conseils d'extension de cheptel prodigués dans cet élevage par le groupement de producteurs (Prestor) n'ont pas été particuliérement suivis ! Une alimentation saine et écologique Le chargement global sur lannée est de une truie et sa suite (18 pores charcutiers en 2 bandes), cet équivaut a un apport de 90 kg d'azote orga- nique par hectare, chiffre comparer avec les hormes européennes de 170 kg d'azote/ha consi- dérées comme draconiennes par la profession agricole ! Lialimentation des truies et pores a l'en- grais est composee de chicorée (eh oui, la salade) en paturage et daliments biologiques (farine de céréales biologiques). Un des objectifs d'Yvon est dintroduire du topinambour dans Vassolement des parcelles pour augmenter la valeur énergé- tique de la ration de base, afin de faire des écono- mies d'aliments, Elever du pore biologique en plein air avec un bon paturage permet de diviser les coats alimentaires par deux. Les animaux ne restent jamais plus de 6 mois dans la meme par- celle pour éviter une trop forte degradation du. sol A chaque stade physiologique de l'animal, les techniques agrobiologiques produisent un pore plus lourd et plus age : ‘levage hors sal | elevage biologique intensi| lin ar age au sevrage a) poids au sevrage tke | ke Age sortie post sevrage oC 120) Poids sore post sevrage| 30kg— | «ke, age vente 16) | 220 poids vente 80-85) 100-110 La difference de poids et dage a tous les stades de croissance permet l'éleveur d'obtenir des animaux de santé robuste, sans traitement antibiotique. En outre, un pore de 8 mois (au liew de 6 en élevage hors-sol) développe une viande plus gottée et plus ferme. Cependant Vallonge- ment de la durée dengraissement, conjuguée a un besoin supplémentaire en énergie pour lutter ‘EAU ET RIVIERES N° 93 ECHO DES MARAIS contre le froid, double le coat alimentaire de pro- duction du porcelet, qui passe de 250 F a 500 F Des prix de vente satisfaisants pour l'éleveur comme pour le consommateur Dans ce systéme spécifique de production, le prix de revient du pore charcutier suit la méme tendance, puisqu'il avoisine les 15 F/kg de car- casses (contre 8 F 30 en hors-sol intensif). Les produits se répartissent entre la vente de carcasses a-des bouchers bios (60 %), la vente a des firmes de surgelés de la région lorientaise (20 %) et la vente directe sous forme de charcuterie (satt- cisses, chipolatas) ou de conserve (cotes, rotis). Yoon Tanné estime que si les bouchers bios jouent Ie jew sur ka maitrise du prix de vente, il n’en va pas cle méme pour les grossistes. Leur coefficient multiplicateur voisin de 1,6 leur assure une marge plus importante que sur les produits de moins bonne qualité Pratiquée par l'éleveur, la vente directe des produits élaborés (conserve et charcuterie) per- met de tenir le meme niveau de prix qu’en super- marché : consommer du porc bio n'est pas forcé- ment une affaire d'argent. Les bénéfices de la ferme varient entre 1 F/kg de pore pour la vente de carcasses, a 13 F/kg pour Ja vente de charcuterie et conserve. Des la deuxié- me année de reconversion, la production de pores bios assure un benefice estimé & 130000 F pour la rémunération d'un temps plein (Yvon Tanné).. Une partie de cet excédent sert a rembourser les frais financiers et dettes accumulées pendant les cing ans de production intensive hors-sol. Progres- Michele Jaouen développe le voles pédageigque. sivement, la santé économique de la ferine, mise & mal pendant la phase intensive, s'améliore. ‘Ala lumiere de son expérience, l'éleveur esti- me que le systéme pore bio plein air permet de rémungérer, grace A la transformation locale des produits, une personne pour 10 truies contre une pour 25 truies dans le systéme intensif classique. En outre, ce type d'emploi est particuligrement bien adapté aux petites communes rurales et contribue & laménagement du territoire. Education des de l'eau unes et qualité Mais le pore biologique n'est pas unique activité de la ferme de Guérroué. Soucieuse comme son compagnon d'une ouverture vers le monde rural et citadin, et préoceupée par la trans- mission d'un patrimoine aux générations futures, Michele Jaouen, propose la visite de la ferme a des classes cle primaire. Intégrée dans un réseau de neuf fermes-écoles et en relation avec le CDDP et l'inspection académique du Finistére, la ferme a developpé une veritable activité educative autour des cochons, des volailles, des moutons et des chevres. Voila qui nous change agréablement des campagnes de communication du syndicalisme FNSEA autour des «Fermes ouvertes». La demarche a été jugee suflisamment sérieuse pour que Eau & Rivigres de Bretagne s'y associe afin de montrer la relation vitale entre une agriculture de qualité, des produits de consomma- tion sains et la qualité de Veau Une expérience qui met en exergue léduca- tion des jeunes sur des bases qui respectent les sols, les paysages, V'eau et les hommes. a o BAU ET AVERES IS Depuis des siécles, le Breton a construit des talus. Chaque paysan, dans sa vie, a apporté son aide a ]'édification de notre bocage, et ce en construisant quelques centaines de metres durant les quelques dizaines d’années qu’il a passé a aimer et a travailler cette terre bretonne. Mon pere me racontait, qu’a peine resté a la ferme apres le certificat, on le mit a construire un premier talus de 100 men 1928. Meme chose en 1929, en 1935, en 1943. A Fepoque il y avait pas mal de «gwerny, terres non travaillées ott Ton envoyait les vaches boire a Theure de midi. Ce n'est qu'ensuite qu’on a pris Vhabitude de séparer par un talus la partie humide (pour en faire un «foenneg nevez» — prairie neuve) de la partie seche, ainsi la lan dever agwaremm» (champ a tere légere). Les der- niers talus quill a construits a la maison sur une grande lon- gueur ont été faits en mai 1961 (100 m le long d'un champ alors que la route le longeant fut élargie) et en 1964 (15 m). Ce furent mes premieres écoles du talus, a la béche, quatre ‘a cing personnes par jour sur une petite semaine en plus du tra- vail de la ferme. A Tepoque, les journées de travail etaient plus raisonnables qu’aujour- hui. Selon ses dires, avril-mai étaient les mois idéaux pour la construction manuelle des talus dans le Léon. Apres 1964, on a encore construit quelques morceaux de talus a la main (pour faire un passage pour la moissonneuse par exemple). Mais il faut reconnaitre que comme pour beaucoup de choses (avec Farrivée:des trac- EAU ET RIVIERES N° 95 Saig Jestin SKOL AR C’HLEUZIOU A VECOLE DES TALUS UN See LER 1a jaquete de couverture du fascicute réalisé par Saig Jestin teurs et des voitures) les méthodes manuelles ont été remplacées par la mécanique. La trayeuse a remplacé la traite & la main, la pompe électrique le seaut du puits, ete. Pour les talus ¢a a été la méme chose. Ainsi fai vu construire plus de 30 ker de talus neufs mecaniquement a Plouarzel pat MM. Causcur et Talarmin lors des echanges de terre, Quand je vais de Saint-Renan a Plouarzel, jaime tou. jours regarder ces talus tres bien cons- truits mécaniquement si ces ouvriers «meca- niques» sont des anciens paysans, ils mettent aussi les moties ou autres liants sur les bords et de la terre noire au milieu et ils tassent au fur et a mesure. Voila pour- quoi ces talus sont solides et relativement verticaux. En fait les techniques dites manuelles ou méca- niques peuvent etre és voisines pour ne pas dire identiques sur le fond, et donner les memes résultats, sauf pour le prix. La manuelle restant tou- jours plus coateuse. Paimais aussi les agouzeller» ow les adicharzher», été comme hiver. Pour moi, les talus et la langue bretonne, c‘était et cest la fierté pour la Bretagne... malgré toutes les miséres que la betise jacobine parisienne leur ont fait et leur font encore subir. ECHO DES MARAIS A mon arrivée dans le Trégor dans-les années 80, la destruction du bocage continuait (Trezeni, Koatreven, Langoad...). Cest la que je me suis dit quill fallait faire quelque chose a plus grande échelle 1, Ca et la, on voyait se consiruire, plutot manuellement, quelques centaines de metres de talus, Dans le Leon, quelques agriculteurs ou non le firent : Fanch Gwegen a Sant-Nouga, Mikael Madeg a Sant-Tonan, L. ar Rouz a Plouvien... Des opportunites s'étant présentées a l'école 'agricul- ture de Penn-ar-Choad en Pommerit-Jaudy, mon lieu de travail, nous avons done construit des talus mécaniquement, et gratuitement. Car len- treprise qui construisait tune route, ca larrangeait, a lui coatait moins cher de construire des talus sur place plutot que de payer des camions & trans- porter la terre je ne sais out (malheureusement trop souvent dans des estuaires ow des zones humides). Un atout pour l'agriculture et pour l'environnement Les talus qui, ily a trente ans, étaient décrits comme une géne pour agriculture, ont en fait beaucoup davantages que nvont pas les haies & ‘meme le sol que malheurcusement on a tendance a vulgariser et généraliser un peu partout. Les santages des talus sont de plusieurs sortes. Du point de vue de Tagriculture, les talus sont d'excellents moyens pour freiner l’érosion, surtout en sols nus — méme en faible pente. Or ‘on sait que la Bretagne est une succession de petites collines a faible pente mais tres exposées a erosion, due aussi aux fagons culturales. Ils sont aussi d'excellents abris pour nos cultures et nos animaux. Quand une vache a fini de brouter, son reflexe est de se mettre au pied du talus (lorsquil en ya). Lhomme fait de meme. Quoi de plus nor- mal quand on sait qu’il faut fournir de Vénergie « pour utter contre les intempeéries (Iroid, vent...) ? Enfin, ils servent de cloture naturelle pour delimi- ter les propriétés ou les exploitations. Du point de vue de l'environnement, les talus aident a résoudre les problemes de eau aussi bien quantitativement que qualitativement. Quantitativement, car les talus forment de mul- Liples petits barrages et chicanes qui freinent écoulement des eaux, done ponderent les inon- dations, mais aussi obligent une partie de Peau a Sinfiltrer dans le sol afin d’alimenter nos sources qui vont, elles, pondérer les éventuelles séche- resses, Contrairement a ce que pensent certains, les talus sont aussi utiles en zone plate qu’en ter rain en pente. En effet, en cas de fortes pluies, un talus d’egale hauteur retiendra un plus grand volume d’eau dans un champ plat que dans un champ en pente. La chose était facile & observer en fevrier 1995 dans le bassin de PAulne. Je me suis dit que les quelques talus restant ont évité le pire pour Chateaulin ou Quimperlé, Cette obser vation est un moyen pour convaincre les respon- sables d'études quil faut genéraliser le talus (y compris en zone faible pente) en Bretagne, et non la haie brise-vent a meme le sol Sur le plan qualitatif, on sait que Peau s re en partie en sinfiltrant dans les sols et les sous- sols. Ces derniers sont des filtres naturels, done des stations depuration a bon marché. Des plus Jes matidres en suspension sont retenues lors de cette infiltration. Aussi Thomme et notre agricul- ture, pour lesquels l'eau est vitale, ont intéret tout faire pour éviter les sols pollués. Ta pose marelte des mates det Les talus sont de riches refuges pour la faune et la flore. On y trouve une multitude de fleurs dont la floraison s‘étale sur plusieurs mois. Ainsi ils sont agréables a Feeil, is permettent de confec- tionner des bouquets. Ce sont de splendides jar- dins naturels, et ils codtent beaucoup moins cher a la collectivité que les jardins publics. Toutes sortes danimaux (oiseaux, insectes, mammiferes carni- vores ow herbivores...) y vivent en harmonie, Ces animaux font vivre nos talus, permettent un équi- libre des milieux. Nous verrons dans la suite de ce dossier qu'il est possible de réapprendre la construction des talus selon les méthodes traditionnelles, mais aussi avec Taide de techniques modernes. Francois Jestin 1 Payfois je souris quand jentens dire sPommeritest la 1° ecole dd tase. I audrat dine la «1 ecole du renouveat di talus» car Tole di talus, de plus par apprenissage, toujours existe dans histone de la Breage a EAU ET RIVIERES N° 93, ECHO DES MARAIS La logique, dailleurs, conduit lexpert dans une recherche de plus en plus pointue mais, & Vimage d'un instrument d'optique, pour pousser en profondeur ses investigations, il lui faut sans cesse réduire son angle de vision... Ce qui a amené un humoriste a definir Vexpert idéal comme «le spécialiste qui connait tout — vraiment tout — mais... sur rien ou presque» ! Image limite, bien sur, mais finalement fort juste En confiant a des «experts» dont on ne sait dailleurs sur quels criteres ils ont été designés, le soin de décider la reprise des essais nucléaires, le Président de la République s'est inscrit dans la logique d'un modele fasciné par la technique et de moins en moins capable d'apprécier THomme et la société dans leur globalité, leur complexi- t€ et leur sensibilite. Ine nous appartient pas| dans le cadre de cette revue de traiter des problemes de la défense nationale, mais com- ment ne pas étre interpellés par le mépris dans lequel sont tenus les représentants de la Nation alors que sont en cause les relations interna- tionales dans notre pays, sa place au sein du Monde, son role, son image, la conscienc quil a de lui-meme, sa conception de la civilisa- tion. Des «experts» nucléaires et de surcroit experts en armement ne pouvaient que conclure a la nécessité d'en savoir encore davantage pour perfectionner leurs engins; les imagine-t-on «arré tant le progres» ? Ce n'est pas seulement pres de ces experts mais a la limite prés d'un conseil de sages compo- sé de militaires, de diplomates, d'économistes, de sociologues, de juristes, de psychologues, de moralistes, que le Président devait prendre avis. Cette aflaire met en relief la derive technicienne de notre societé, dérive dont les consequences ont L'EXPERT ET LE CITOYEN Aux yeux de l'opinion publique, l'expert passe pour étre un spécia- liste qui connait un sujet en profondeur. Son domaine de connais- sance est étroit, mais 4 l'intérieur de ce créneau son savoir est jugé immense et fait autorité. &1é appréhendées par des penseurs comme Bernard Charbonneau, Jacques Ellul, Patrick Lagadec, Lewis Mumford, Rene Girard, René Dubost, Hans Jonas... Elle met en lumiére la nécessité de resituer la science et la technique dans une vision plus globale, plus systemique celle d'un développement harmonicux réellement au service de Uhumanite. Elle nous conduit aussi a repenser le role des citoyens de plus en plus depossédes de leurs pou- voirs, inorganisés, abusés par des moyens et des méthodes de «communication» qui échappent & leur controle comme diailleurs a celui de leurs lus. Faire face a ces défis constitue un enjeu capital Nul bien sar n'a la solution. mais pour notre part, nous avons ati moins une certitu- de : quels que soient leur conscience et leur mérite, les individus isolés n'ont acune chance de peser efficacement sur les choix qui engagent le fuuuur. A Eau & Riviéres de Bretagne nous avons la modestie de relativiser notre influence, mais nous avons aussi la certitude de contri- buer a la défense du «Bien Commun». Nous faisons quelquefois ian réve : celui dletre dix fois plus nombreux sachant que nous serions alors cent fois plus efficaces pour contrer les «experts», tenants du productivisme qui ici continuent de détruire l'eau, les sols, les paysages, et au-dela toute une civilisation rurale. Ce réve, aidez-nous a le réaliser, nous serons ensemble, cent fois plus utiles au bien de la Region, et au-dela a celui de notre «Terre-Mere», puisqu'il convient pour la servir avec respect et discernement de penser globalement et dlagit localement. mt Jean-Claude Pierre "EAU ET RIVIERES N° 93 ECHO DES MARAIS Llaaffairer des pesticides ne date pas d'hier. En France ou ailleurs dans le monde, depuis le début de la commercialisation a grande échelle des pesticides, des réactions d'hostilité se sont manifestees. Et a bien y réfléchir, entre «affaire» cet «scandale», le pas peut-étre vite franchi. Voici quelques chiffre-clés pour fixer les idées : - 25% des pesticides vendus sur le marché américain sont cancérigenes, - «en dépit d'un usage décuple des pesticides entre 1947 et 1974, les pertes dues aux autres insectes et autres nuisibles n'ont pas diminué...» - pour année 1993, sur le bassin versant de la rade de Brest, il a été montré que les particu- liers sont les plus grands consommateurs non agricoles de pesticides. Ces chiffres «bruts de décoffrage», nous ame- nent a plusieurs réflexions. Tout d'abord, les pes- ticides sont présents de fagon importante sur la PESTICIDES : LA BOMBE Les produits phytosanitaires et autres que l'on nomme couramment pesticides (mot que l'on pourrait étymologiquement traduire par «tueurs d'hétes indésirables») déferlent depuis la fin de la deuxiéme guerre mondiale dans notre environnement. Méme s'ils ont collaboré a augmenter les rendements des cultures en luttant notamment contre les ravageurs, leur impact environnemental est l'un des plus dramatiques et l'un’des plus insidieux qu'ait connu l'humanité jusqu'a nos jours. planéte depuis deja un demi-siecle, la contamina- tion est done tres avancée Diautre part le dossier «Pesticides» est un. sujet complexe oit il faut se méfier des idées recues. Vient done inéluctablement la nécessité davoir une introduction scientifique de base. Ceest ce que nous vous proposons de découvrir dans ce numéro d'Eau & Rivieres. Une contamination planétaire Des milliers et des milliers de tonnes de pes- ticides se sont déversées dans la nature depuis l'in- dustrialisation de leur chimie. Ces produits, pour la plupart représentés par des molécules de syn- these, ont contribue lourdement a modifier notre environnement et par voie de consequence, les especes vivantes que lon y trouve. Au premier rang de ces espéces : !Homme. EAU ET RIVIERES N° 93 EC Quid des responsabilités ? Bien évidemment les agricultcurs et notamment les techniques de culture intensive, sont incriminées. Mais parvienclra-t-on cependant a poser le probléme de facon raisonnée ? Parviendra-t-on sensibiliser les particuliers sur les flux de pollution quills engendrent en exigeant que Vherbe folle soit annie de nos cites ? Parviendra-t-on a mettre en cause, haut et fort, le lobby criminel de la chimie ? A titre dlexemple la encore, les pesticides tuent chaque année 20 000 personnes dans le _ Mais ET PESTICIDES ] | | | Si la culture du mais concerne 25 % des surfaces | | agricoles de Bretagne, Vétude pesticides-eau | | potable réalisée par TAgence de Yeau monire que | | | | ‘est cette culture qui fait peser le plus important risque de pollution (54 % des prises d'eau), devant les céréales (37 %) et les légumes frais- pomunes de terre (24 %). Aucune amélioration durable de la situation ne pourra éire obtenue ‘sans une réduction des surfaces en mais, véri- | table catastrophe écologique pour notre région. | Cest a partir de 1990 seulement qu'a été recherchée de facon réguliére la présence éventuel- Ie de pesticides dans les eaux bretonnes. Sous Vegide de la Corpep (Cellule @’ORientation pour la Protection des Eaux contre les Pesticides) se met alors en place un programme régional de suivi de cing rivieres : !Aven, !Arguenon, !Oust, la Vilaine, la Seiche. Vingt et un pesticides différents — sur cin- quante-quatre recherchés — ont été détectés dans les eaux bretonnes. Ce chiffre, déja important, est a comparer au nombre de matieres actives autorisées en France : 480. Le coat des analyses — supporté par les consommateurs ou les contribuables — se monte a plus de mille francs par échantillon et par famille de pesticides, et explique le nombre relati- vement faible de pesticides recherchés. Une pollu- tion généralisée des eaux bretonnes par certains pesticides est déja avérée. Pollution notamment par Vatrazine, un herbicide utilisé sur mais, qui dépasse Ja norme de 0,1 pg/l, dans 90 % des échantillons La présence simultanée de plusieurs pesticides dans un méme prélevement est réguliérement rele- ‘vee : dans 75% des cas, la norme réglementaire de 0,5 ug/l pour le cumul des substances est dépassée. Le record absolu est pour linstant détenu par la DES MARAIS Tiers-Monde, pendant que 25. millions dlouvriers agricoles sont gravement empoisonnés. Eh oui ! Certaines bombes sont silencieuses. Les pesticides : un sujet pointu Face au cri d'alarme que nous langons aujourdhhui, il faut toutefois garder la téte froide. Les articles qui vont suivre proviennent tous de scientifiques et de techniciens a la pointe de la connaissance actuelle du probleme dans les domaines de la chimie, de la médecine, du droit. Sachant que pour lutte, il faut connaitre. L'ETAT DES LIEUX Seiche, un affluent de la Vilaine, sur lequel en juin 1993 le total des molécules dépassait 30 pg/l, c'est a dire soixante fois la norme... La situation est donc extremement grave, Elle a pour origine des usages agricoles (4000 tonnes/an) mais également l'utilisation de pesticides sur les zones non cultivées (voiries routieres et ferro- viaires, espaces urbains, jardins : environ 50 tonnes/an). Ainsi la présence de diuron, herbicide anon agricole», est observée réguliérement a des concentrations élevées. Le role de fontaines de nos rivieres est remis en cause puisque, selon une étude récente de agence de l'eau et du conseil régional, soixante-seize stations de pompage sur cent-quatre sont soumises & une contamination importante Une réglementation inadaptée La réglementation sur l'utilisation des pesti- cides soufire d'un retard considérable : elle per- met d’épandre des produits hautement toxiques en bordure immediate des cours d'eau et des zones de transfert (fossés, douves, saignées...). Si veritablement on veut limiter la destruction insi- dieuse de nos cours dieau, il faut d'urgence inter- dire tout traitement chimique, quill sagisse de parcelles agricoles ou de surfaces urbanisées & proximité des cours d'eau. Le pesticide balladeur Pour etre commercialisé et utilisé en France, tout pesticide doit d'abord etre officiellement homolo- gué, ce qui selon les firmes chimiques, est long et coftteux. Mais, comme I'uranium des pays de VEst, il est des pesticides qui franchissent clandes- tinement les frontiéres. Ainsi le buturon, matiere active de la famille des urées substituées, jamais homologue en France, a quand meme été retrouvé dans les eaux de la Vilaine, du Couesnon, et de TAven. Qui dit mieux ? ‘EAU ET RIVIERES N° 95 ECHO DES MARAIS Les pesticides sont classés selon leur utilisa- tion, générale : herbicides, insecticides, acaricides, fongicides, ou plus spécifique : molluscicides (contre les limaces), aphicides (contre les puce- rons), nématicides (contre les nématodes), rodon- ticides (contre les rats, souris et petits rongeurs). Pour chaque utilisation, il y a encore des divisions par familles chimiques. On parlera d'insecticides, organophosphorés ou organochlorés, de carba- Be MODE D'ACTION | DES PESTICIDES | | Organophosphorés : ils agissent par contact, par | ingestion sur le systéme nerveux des ravagews | Aryloacides : ils sont absorbés par le feuillage, | puis véhiculés dans la séve des plantes a détruire | (2,4 D, dichlorprop...) | Urées substituées : ils pénétrent par la racine, et | ‘sont véhiculées par la seve pour inhiber la photo- | | synthese. | Tricine ils sont absorbés par la racine tis | | | | | | bloquent la photosynthese (atrazine...) Amides : ils inhibent la synthese des lipides & longues chaines (alachlore...) Ammonium quaternaires : ils ont une grande rapidité d'action = le diquat et le paraquat agissent sur le proces- sus de photosynthése des végétaux et sont non sélectifs; | = le difenzoquat agit sur la croissance et est | Toluidines : ils bloquent la division cellulaire | (trifluraline...) | Triazoles : représentés par 'aminotriazole qui | | agit par voie systémique dans ta plante dont il perturbe la physiologie en inhibant la synthése des caroténes Amino-phosphates : sont des herbicides de contact, non sélectifs (glyphosate) Dérivés de Vacide benzoique : ils agissent de facon systémique, et sont de faible sélectivité. Aryloxyphenoxy propionates : ils inhibent la synthase des lipides (diclofop methyl...) LES PESTICIDES : COMPRENDRE LEUR ACTION, CONNAITRE LEUR CLASSIFICATION L'appellation de pesticides désigne les produits chimiques employés contre les parasites animaux et végétaux des cultures. Ils appartien- nent 4 la grande famille des produits phytosanitaires (relatifs aux soins 4 donner aux végétaux), qui englobe plus largement les pesticides et d'autres produits chimiques ou naturels. mates, caractérisés par un mode d'action propre a leur famille chimique. Les organophosphorés, par exemple, agissent sur le systeme nerveux des ravageurs, par contact et/ou par ingestion. Les herbicides ont différents modes dlaction. Ils agis- sent sur la perméabilisation des membranes cellu- laires (colorants nitrés : dinoterbe...) ; par contact, ils bloquent la photosynthése (bromoxynil).. ‘Chaque famille agit sur les insectes, les plantes de maniere différente et plus ou moins sélective (voir encadre). L'agent de diffusion, hydrosoluble ou liposoluble, est partieuli¢rement important. Les pesticides, solubles dans les graisses, traversent la carapace de l'insecte (poison par contact). Sinon Vabsorption se fait lors de la digestion (poison par ingestion), ou lors de la respiration (poison par inhalation). Un usage non agricole sous-évalué Une autre classification est utilisée pour les pesticides : usage agricole ou non agricole. + Tusage agricole : c'est usage le plus connu, celui qui, en quantité, utilise le plus fort tonnage de matieres actives. Les produits phytosanitaires ont eu un role trés important dans l'intensifica- tion de l'agriculture depuis plusieurs années, ils ‘ont permis dlaméliorer la qualité et les rende- ments des cultures. Leur role économique n'est plus a démontrer : sans protection des plantes, 40 a 60 % des récoltes mondiales seraient la proie des ravageuts. + Tusage non agricole : généralement sous-6va- Iué en raison des volumes utilisés en agriculture, il concerne surtout le désherbage des domaines public et privés. Cet usage n'est pas a négliger car les pesticides sont épandus sur des zones souvent imperméables (bordures...) et done par ruisselle- ‘ment, trés rapidement, parviennent aux rivigres et au milieu marin. es pollutions accidentelles causées par les pesticides peuvent étre de véritables catastrophes EAU ET RIVIERES N° 93 elem WUE écologiques, comme la contamination du littoral de locéan Pacifique par les usines de Montrose, par du DDT dans les années 70 ; ou comme la pollution dans le Rhin due a un incendie des usines Sandoz a Bale en 1986. Plus proches de nous, & une autre échelle, des déversements acci- dentels de cuves, bidons, etc, se produisent dans les rivieres. Des analyses coiteuses et complexes existe de plus une pollution chronique dans les rivieres et certaines nappes phréatiques : des controles montrent Ia présence de matieres actives et de produits de dégradation pour de nombreux prélevements. La qualité des eaux est suivie a différents niveaux et sur différents para- metres généralement pour un usage spécial (eau potable, eau de baignade...). La Direction Dépar- tementale des Affaires Sanitaires et Sociales (DDASS) effectue des contréles sur la qualité de Veau brute et leau traitée de distribution. C'est uniquement l'eau traitée qui fait l'objet de normes (décret du 3 janvier 1989), La concentration d'un. pesticide ou produit apparenté doit etre inférieure 0,1 pg/let la somme de plusieurs pesticides ne doit pas dépasser 0,5 ng/l. Cependant, Organisation Mondiale de la Santé (OMS) emet des recommandations concer- nant la toxicité des pesticides, Ces recommanda- tions se trouvent & des seuils supérieurs : 2 pg/l pour l'atrazine, 2 pg/l pour la simazine. Ces concentrations varient en fonction de chaque pes- ticide. Pour environnement, il n'existe pas de normes réglementaires. Le suivi des pesticides au niveau de lenvi- ronnement est complexe : d'une part cela deman- de des techniques d'analyses spécifiques et assez coliteuses, d'autre part, il existe une grande diver- sité de matieres actives, nécessitant des capacités analytiques tres différentes. Certaines matieres actives sont rts difficiles a analyser car elles ont des caractéristiques physico-chimiques qui ren- dent leur extraction ou leur détection difficile. Le probleme devient encore plus complexe si on s'in- teresse a l'analyse des produits de dégradation Les controles effectués ont permis de voir qu'en Bretagne, la qualité des eaux superficielles est menacée réguligrement par l'utilisation des pesti- cides. Lagriculture est intensive, principalement avec la culture du mais qui utilise Vatrazine comme herbicide majoritaire. Cette molécule se retrouve ensuite dans de nombreuses rivieres et arrive a atteindre des concentrations élevées aprés des episodes phivieux. Certains effets de ces pro- ‘Une saton de mesure dans le cadre de Fespériencepllote “Agriciitures du conta de Bate de la Rade de Brest. duits phytosanitaires sont connus dans le milieu eau douce» car au vu de la législation et des enjeux liés a Yeau potable, des études ont été menees pour certaines matieres actives. Par contre, dans les miliewx westuarien» et «marin», trés peu d'études ont été réalisées sur la flore et la faune La matiére active peut étre transformée par Torganisme en des composés encore plus toxiques: activation) ou moins toxiques (detoxication). Dans toutes les populations de parasites, on a observé une diminution des effets des pesticides utilisés pendant longtemps : il s'établit une résis- tance du ravageur. La particularité des pesticides de rester dans Vécosystéme sans transformation est appelée persistance. m Gael Durand Ingénieur chimiste, Cellule «ade de Brest. | “EXTRAIT DE L'ARRETE DU MINISTERE DE LA SANTE ET DE L'ACTION HUMANITAIRE EN DATE DU 21 DECEMBRE 1992 ‘fixant les tarifs des analyses des eaux destinées a Ta consommation humaine réalisées en applica- tion du décret n° 89-3 du 3 janvier 1989 modifié (WORF. dic 9 janvier 1993). Pesticides azotés par chromatographie en phase gazeuse avec un détecteur spécifique azote- phosphore 717,00 F Pesticides chlorés par chromatographie en phase gazeuse avec un détecteur a capture d’électrons 717.00 F Pesticides phosphorés par chromatographie en phase gazeuse avec un détecteur spécifique azote-phosphore 717,00 F Pesticides et PCB par chromatographie en phase gazeuse couplée a la spectrométrie de masse 2 761,00 F “EAU ET RIVIERES N° 93 ECHO DES MARAIS Leurs effets a long terme sur la santé sont dif- ficiles a évaluer, principalement en raison d'une multi-exposition constante, mais aussi de la pré- sence de produité associés dont la nocivité propre est & prendre en compte. Certains pesticides posent un probleme de toxicité du fait de leur persistance dans l'environnement, induisant en particulier la contamination de l'eau, Une toxi we relativement bien connue Les pesticides pénétrent dans lorganisme principalement par la peau, Les manifestations sont le plus souvent cutanéo-muqueuses, le reste de la symptomatologie rencontrée touchant les appareils digestif, neurologique et respiratoire, Pour qu'un produit soit homologué, sa toxicité aigué est mesu- r6e de fagon normalisée par experimentation sur des animaux de laboratoire. La notion retenue est celle de la dose létale 50 (DL50) correspondant a la quantité de matiére active qui, administrée en une seule fois, par ingestion ou voie cutanée, entraine la mort de 50% des animaux traités. Plus la DL50 est basse, plus le produit est dangereux. Cependant, elle ne suflit pas pour apprécier la toxi- cité d'un produit. Outre le risque aigu, il est néces- saire de considérer également les pathologies subai- gués et chroniques, plus dilficiles a déceler. Des conséquences & long terme mal définies ‘Un cancer met environ vingt ans a se mani- fester a partir de la période d'exposition. En pre- nant comme base les données sur la mortalité agri- cole entre 1984 et 1986, une étude épidémiolo- gique menée par le Dr Viel du CHU de Besancon a retrouvé une surmortalité statistiquement signifi- cative de la population agricole par rapport & la population francaise pour Sept localisations : cancers de lestomac, du paneréas, de la prostate, du rein, du cerveau, myélome multiple et leueémie. Aux Etats-Unis, certains auteurs retrouvent une auig- ‘mentation significative du risque relatif de certains cancers (Iymphomes non hodgkiniens) en analy- sant uniquement les patients exposés de facon réguliere a des herbicides derives de lacide phé- noxyacétique, tel le 2,4D, SANTE : ALERTE AUX PESTICIDES ! Le marché francais des produits phytosanitaires a connu au cours des dix derniéres années une évolution rapide du nombre et des quantités de produits commercialisés : environ 800 matiéres actives qui composent plus de 8 000 spécialités commerciales. Recherche fondamentale et prévention du risque A la faculté de médecine de Brest, les cher- cheurs du laboratoire de pharmaco-toxicologie, en collaboration avec I'unité de médecine profession nelle du CHU, tentent d'expliquer les mécanismes de la toxicité des produits phytosanitaires. Ils ont mis au point un modele d’étude in vitro a laide de cellules souches sanguines issues de sang de cor- don ombilical humain qui figurent, avec les cel- ules hepatiques et les cellules cutanées, parmi les principales cibles des pesticides. Les travaux menés peuvent aboutir a des explications de mécanisme toxique, débouchant sur des axes de prévention et susceptibles de contribuer & une meilleure étude des produits avant leur mise sur le marché. Des résultats inquiétants... Parmi les molécules testées jusqu'a présent, deux herbicides se sont révélés toxiques pour le modele d'étude : le dinoterbe et l'alachlore, actuel- Jement employé comme produit de substitution de Vatrazine. Des résultats préliminaires montrent que le 2.4D, utilisé en quantité importante par les particuliers, stimule la prolifération de cellules surexprimant un gene implique dans la survenue de lymphomes. A suivre... = Bénédicte Sawicki Ingerne en médecine du ravall au Centre de pathologies rofesstoneles eta laorattre de pharmacotoxiolgte ig di Cente hosptlocinverstaie de Brest La sale douzaine. | En 1982, naissait a San Francisco le PA.N.* (Pesticide Action Network), groupe de pression parti en guerre contre les magnas de Vindustrie chimique. En ligne de mire 12 pesticides particuliérement toxiques commercialisés dans le monde. En France ta lupart de ces pesticides ne sont plus homologués mais posséde pour certains une rémanence de plu- sieurs dizaines dannées ! Si Ton en croit les chiffies avancées par les études de toxicité et dépidémiologie, la "sale douzaine” ou "dirty dozen” pour les angio-saxons, a bien “enflé" depuis 1982. En voici quelques-uns encore homolo- gues en France : Aldicarbe, Paraquat, Parathion, Parathion Méthyl. “PAN. Europe, 23, Beehive Place, Londres SW9 7OR, Grande Breiagne. Tel. (44.41) 274 9086, Fax. (44.71) 274 9084. a EAU ET RIVIERES N° 95

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