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3 LA CAUSE 7 DU DESIR DU CONCEPT DANS LA CLINIQUE NAVARIN, EDITEUR Un arrachement du réel Hél’ne Bonnaud Ma vie sest nouée ala psychanalyse, & la nécessicé de la psychanalyse. Trois analystes ont éxé mis & lépreuve de ma recherche insatiable de la cause de mes sympémes, Cette uurgence & savoir, au plus prés du réel, comment fonctionne Fate méme qui consiste& ¢ana- lyser, n'a trouvé & sapaiser que dans ma derniére analyse. Auparavant, je nai eu de cesse de chercher une correspondance entre mon expérience propre et la théorie de la fin de Pana- lyse. Cette recherche d'une logique a fait le naeud de mon transfert ala cause analytique. La séparation est le S, de mon existence. Elle est nouée au drame de ma naissance. Elle sest répétdé dans mon histoire eta fait le lit de ma névrose infantile. Sila elation 4 lamére a été d’emblée marquée du ravage, le pére, lui, a pris la position du pére sauveur dans Fimaginaire de l'enfant. La maladie a été le symptéme récurrent de la petite enfance. Jappelais a étre aimeée, et c'est le corps qui le formulaic, Il confrontait mes parents au réel de la perte, un enfant va mouri. La premitre analyse : comment Pinterdit se répete Mon premier analyste est AME de rFP, Cette analyse a été thérapeutique, méme si jes- Pétais quelle me ménerat au devenir analyse, alors frappé d’interdit. « Ou mére ou analyte », telleérat Paliénation de ma position. Lanalyse se termina par un acting out. Je parts en Courant, ayant rencontré dans une interprétation de Panalyste la répécition d'un interdit ‘concernant mon désir de le devenir. Il avait chaussé la voix du pére : « Sois mére et tais-ol», La deuxitme analyse : du devenir analyste au réel du symptéme En 1985, un événement de corps me plonge dans 'angoisse de la maladie, II me fait beaucoup parler. Je l'interpréte comme une punition, ou comme le résultat du désir mortifére de ma mére inscrit dans ma chair. Lanalyste que j'ai choisi est at de Ecole. Je lui préte un sayoir sur la fin de Vanalyse. Le fantasme dérre abandonnée scr dans la cure. Les féves de perte en témoignent. $idline Bonnaud ext psychanalyse, membre de TEC, AE en exerci. 2 Heélene Bonnaud Un arrachement du réel Lenfant présentifie l'objet a, celui qui chute, qui disparait, qu'on oublie, qu’on perd. Le symptdme est ’écho direct du fantasme. Car, bien malgré moi, je m’emploie & disparaitre. Cette identification a l'objet disparu perturbe mon existence. objet voix y est plus spécialement convoqué, comme la mise en abime de ce qui ne me porte pas, fout le camp, réitérant ma plainte de ne pas étre entendue de l’Autre. Crest alors que j'apprends ma désignation comme passeur. Lévénement mengage dans Ecole sous ce signifiant, et me met au travail de la passe et de la transmission. Le travail analyse opére un virage au moment oit écrit pour moi une nouvelle version du trauma- tisme maternel. La parole mauvaise de la mere est indexée & sa jouissance propre. Je ne suis plus la cause de sa douleur. Cela éclaire considérablement opacité de mon rapport au savoir. Quelques années aprés, 'arrét des associations me met aux prises avec le réel de inertie. Une interprétation de l'analyste avait souligné cette jouissance d'échec en blanc, jouant sur 'équivoque du signifiant cheque en blane que j'attendais bétement du pére. Un réve parle d'un liquide blanc qui se trouve dans ma gorge et qu'il faut prélever avec une “seringue. Le blanc présentifie aussi bien I'évidence d'une présence mortelle dans le corps que la jouissance de l’échec adressé au pére. Deux téves d'une autre écriture viennent alors se découper. Dans le premier, je prends des ciseaux et, avec rage, me coupe les cheveux n'importe comment. Le résultat est atroce. Se présente alors une perruque 3 la coiffure impeccable. Je me réveille, angoissée. Dans autre, une femme a la belle chevelure brune souléve quelques mches sur le dessus de la téte, laissant alors se dévoiler un trou blanc dans son crane. Leffroi me réveille. En fait, lenoir et le blanc sont les signifiants de mes origines doubles. Une mére juive polonaise, un pere juif pied-noir. Le nord et le sud, la tristesse de ma méze et le désir du pére. Lanalyste fait porter Pinterprétation sur la fausseté du sujet. Le noir et le blanc sont en effet, des faux-semblants. Ils méraphorisent I'impossible du rapport sexuel. Ils di gnent la vérité menteuse du savoir. La cure s'éternise. Us réve Vient éclairer son point de finirude : je suis dans un ascenseur, tout coup le plancher s‘ouvre et mon sac tombe. (Pour une fois, personne ne meurt !) Je I'apergois alors trés loin, sur le toit d'un immeuble. Il est irrécupérable. En séance, je conclus sur le fait que maintenant, méme sielle est inaccessible, je sais ott se trouve mon analyse. «J'ai perdu mon analyse » est ma formule pour dire mon désarroi. Elle est détachée de moi, objet décher, vidé de sa substance. Un dernier réve indique V'irréversible : il consiste en I'écriture du mot EJECTE qui s'affiche en lettres lumineuses. Cette identi- fication & objet perdu ne m'apparait pas alors comme la conséquence de la traversée du fantasme au moment de la destitution de 'analyste. La oit Panalyste chute, cest ma propre chute qui se déchaine. La sortie d’analyse réitére une fixation de jouissance & objet chu de l'analyse, d’ott la dépression qui sensuit. La perte est trop réelle. La derniére analyse : quand le réel se démontre Ne supportant plus ma position de silence, jen parle A mon contréleur qui deviendra mon dernier analyste. Un autre réve de cheveux vient vérifier, en y glissant mes doigts, La Cause du désir n°80 113, La passe — quil y'a bien deux trous dans mon crine, L’analyste me coupe et die : « I y aune publi- cité comme ga... Omo est la et la saleté sen va », Je quitte son bureau en riant. Mon rire se transforme en grimace. Linterprétation a touché a ’horreur méme du savoir insu. Il it de la saleté, signifiant paternel renvoyant au nom du pére, son nom de juif pied- 5 et T'insulte quil n’aura cessé de redouter, sale juif’ Comme le réve Vindiquait, sous le noir, le trou de V’étre, de 'étre juive & soi-féme plus exactement, dans la honte et Pétranger en soi quill recéle, Mais étrangére au monde du judaisme moqué par mes Parents, incroyants, et éprouvant leur judéité comme un réel qu'il ne fallait pas trans- mettre. Cette interprétation me permit de sortir de ma position de fille cachée et fautive. Pourtant, jfavais cru savoir y faire en épousant un homme dont le nom donnait & entendre le signifié bon, a Vinverse de celui du pére dont la lettre m redoublait celle entendue dans la chute de mon prénom. Cachée sous arbre de son nom, je me sentais AT abri de cette lettre mortelle. Malgré cela, tous mes féves de poursuite se terminent dans tun wagon. Je reste une déportée. Le train de la mort est mon cauchemar récurrent. Ce réel finit par faire partie de moi. En 2008, un événement de corps me surprend. Un point du corps est ciblé. La méde- ccine Va détecté. Il a une forme et un nom. Pendant le temps de la maladie, je cherche & savoir quoi faire de cet événement de corps. D'abord ne pas linterpréter. Contrairement a la fois précédente, les signifiants rfont pas volé en éclats. Le sens n’a pas fait retourAucun réve n'y a suppléé) Ce temps de Panalyse fut un moment de travail rigoureux sur Te rel du corps et ses effets dans ma vie. Une fois la maladie traité, je me sens beaucoup plus vivante et désirante. Malgré cela, pendant mon exposé aux 39° Journées de ECF. ma voix seffandre au moment oit je Prononce la phrase de ma premitre fin d’analyse :« je suis partie en courant ». Moment de vacillement fulgurant. En racontant la scéne & mon analyste, il me dit : « Vous avez vu Inglourious Basterds' ? — Oui. Eh bien, me divi, la jeune fille qui court, cest vous. » Je fuyais donc la persécution nazie, comme ma mere. Cette identification & sa fuite était é¥idente : elle-méme avait raconté la scine traumatique de sa course & travers champs aprés qu'un officier allemand lui en a intimé ordre. Seul son pére fut arrété ce jour-la et ne revint pas des camps de concentration, Toute sa vie, ma mére sien voulut d’en avoir réchappé. Addenda : la fin de analyse arrive sur le mode de la surprise Reprenant une phrase de Lacan — avant que Venfant ne parle, il est parlé par l'Autre? —, je mentends dire, comme en voix aff; que mes parents n’ont pas parlé de moi avant ma naissance. Lanalyste arréte la séance sur cette affirmation, Je reviens en séance en disant qu évidemment, c'est faux, et en riant je poursuis : « Ainsi mon pére a dit & ma sccur : “Si Cest une fille, on la jettera par la fenétre” ». C’est alors que l'analyste se léve et me fait face : « Ila dit ga ? Ila donc bien parlé avant votre naissance ? » Er il feve la séance. 1. Quentin Tarantino, gourious Basted, 2008. 2 Cf Lacan J, « Postion de Vinconscient », Exits, Pais, Seuil, 1966, p. 835. 114 Héléne Bonnaud Un arrachement du séel Je suis troublée. Pourquoi l'analyste a-tilisolé cette remarque du pére ? Pourquoi cette phrase est-elle restée impossible & dire pendant plus de trente ans d’analyse ? Elle Gait pourtant pas refoulée. Ce qui sest écrit est resté hors cadre du savoir, comme un isolat qui ne servait & rien. En revanche, cet énoncé s'entend comme une interprétation sur mon mode de jouissance, isolant le S, jeter. Se faire jeter correspond a la phrase du fantasme dans le registre du réel. Le moment de cette découverte a une réalité singu- ligre, inoue. La phrase inclut le corps qui tombe, élément essentiel de mon analyse, rencontré dans mes réves. C'est cette chute, lninterprétable du sinthome, ce qui ne chan- gta pas, n'a pas de sens et se répete. C'est lila réitération du mode de jouissance, noyau. qui dénude la conjonetion de l'Un et du corps. Le trajet de la pulsion se jeter, se faire jeter démontre quill sagit de Vorigine de ce vacillement qui mhabite. « Er il faut toujours que je men arrache, c'est un combat permanent », dis-je 4 mon analyste. C'est alors quill Enonga, lentement, en marquant son dire d'un ton de gravité : « Tout est un arrachement pour contrer I’éjection et tout est un arrachement de Péjection ». La formulation est puissante. Je découvre alors quill ne s'agit pas seulement d'une lutte contre, mais de 'arrachement de I’Gection elle-méme, du laiser tomber du sinthome ga écrit et qui est resté hors sens. Le symptéme de vacillement continu dont je n'ai cessé de mientretenir pendant route mon analyse a trouvé sa racine pulsionnelle. Cette Evidence me traverse. Elles écrit comme 'écho dans le corps du fait quily a un dire’, selon Ja formule de Lacan. Cette interprétation touche & la fagon dont le corps a percuté ce S,, on la jettera par la fonétre, resté tout seul, séparé, produisant cette jouissance intime de vertige, de chute. Une lumigre éclaire alors tout mon parcours analytique. I me restera den tirer les conséquences quant 3 ma place dans ma famille, 4 mon sexe, mais aussi & ‘mon trajet analytique lui-méme. Un réve vient attester du franchissement. Je suis perdue. Je demande oit se trouve la station de métro la plus proche. Il faut aller « Porte dorée », Je trouve la station. J'inter- préte en séance qu’apres tout, Cest IA que j’en suis. La porte dorée, cest le nom della passe, Un deuxiéme réve a lieu juste aprés la mort de ma mére, en février dernier. Jattends le métro avec mon mari. Arrive un énorme TGV tout noir portant le nom de Wagon-lit «que je suis seule & voir. Le train file tout droit. Il init par Sarréter dans une zone loin de la ville. Mais je ne suis pas inquiéte. Je laisse ma mére dans le wagon-lit de la mort. Je trouve la sortie. Je rentre chez moi avec homme de mon réve. Ma décision de passe reste entitre, Elle outrepasse le deuil : je ne me suis pas enfuie en courant... 3. Lacan J, Le Séminaire, livre Xx, Le smthome, Pats, Seuil, 2005, p17. 5

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