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L’œuvre de la critique

Formulations méthodologiques pour une métacritique

Sergio Moyinedo

1.Observateurs

Par rapport à n’importe quel phénomène, nous pouvons présupposer deux

instances d’observation que Niklas Luhmann1 distingue comme « observation

de premier ordre » et « observation de deuxième ordre ». Pour chaque position

d’observation correspond une figure, celle de l’observateur, qui représente un

ensemble d’opérations régulant le lien observationnel. La distinction entre

l’observateur de premier ordre et l’observateur de deuxième ordre correspond à

deux hypothèses de comportements qu’une même personne peut

éventuellement assumer. L’observateur de premier ordre habite un monde

transparent, il se lie aux choses sans médiation ou plutôt, reste aveugle aux

opérations qui régulent son rapport aux choses, il peut tout observer sauf son

propre rapport d’observation, c’est-à-dire, qu’il y a toujours quelque chose qui

lui échappe. L’observateur de premier ordre ignore alors l’improbabilité de son

observation et reste dans un angle mort, condition nécessaire à toute référence

objective sur le monde. Un exemple de cette position d’observation dans le

milieu des phénomènes artistiques pourrait être celui représenté par la figure du

spectateur ou, comme nous le verrons plus tard, par la figure du critique d’art.

1
Luhmann, Niklas. 2005. El arte de la sociedad. México, Herder. (Cap. II “Observación de
primer orden y observación de segundo orden” – selección)

1
Pour sa part, l’observateur de deuxième ordre est un observateur

d’observations, situation qui pourrait être décrite comme une relation

d’intersection avec l’observation de premier ordre. Les opérations qui

déterminent l’observation de premier ordre deviennent visibles pour ce

deuxième observateur et c’est seulement à partir de cette nouvelle position que

l’improbabilité inhérente à toute observation de premier ordre est devenue

évidente. Disons qu’il n’est possible de postuler le caractère contingent,

historique, de toute représentation qu’à partir de la position d’observation de

deuxième ordre. Celle-ci correspondrait à une métaposition analytique.

Mais Luhmann précise que l’observateur de deuxième ordre est à la fois un

observateur de premier ordre et que comme tel il est aveugle aux improbabilités

de sa propre métaposition analytique, éventualité qu’il ne peut admettre sans

provoquer l’effondrement de la vraisemblance de ses représentations.

La distinction entre les positions d’observation implique une distinction entre les

objets correspondants et donc une différence dans la configuration

spatiotemporelle de chacun. Par exemple, si nous parlons de l’œuvre d’art nous

pourrions supposer au moins deux temporalités; et la manière de prendre en

compte le fonctionnement temporel de l’œuvre dépend de la position

d’observation.

2. Généalogies de l’œuvre d’art

L’observateur de premier ordre habite un monde de temporalité irréversible.

Dans celui-ci, pouvant être celui du spectateur o du critique par exemple,

l’œuvre d’art coïncide avec sa manifestation matérielle. Autrement dit, l’œuvre

2
« consiste » en cette manifestation matérielle dans laquelle elle semble

s’incarner de façon définitive. Et n’importe quelle représentation de cette

œuvre, est réalisée à partir d’un horizon de pratiques mimétiques. En termes du

présent de l’activité spectatorielle ou critique, l’œuvre est ce qu’elle est en tant

que produit d’un processus irréversible et n’importe quelle chose à laquelle on

se réfère à son sujet, présuppose d’une nature stable et définitive qui

correspond à son aspect matériel. Dans cette première généalogie, l’œuvre

d’art se situe à la fin d’un processus causal qui a défini une bonne fois pour

toutes non seulement la nature artistique d’une manifestation matérielle, mais

aussi, par exemple, son emplacement sur une échelle de valeurs. Le

spectateur, en tant que personne- de même pour le critique- croit en la valeur

immanente des choses, entre autres son propre passé, qu’il ne peut pas

considérer autrement qu’un univers fini d’événements. Parmi ces événements,

on trouve l’origine de l’œuvre d’art à laquelle il s’affronte éventuellement et de

laquelle il peut présupposer une paternité sous le nom d’un artiste.

Mais la généalogie de l’œuvre d’art se dédouble si nous prenons en compte la

deuxième position d’observation. A partir d’une métaposition analytique, par

exemple celle du métacritique, des entités empiriques comme le spectateur ou

le critique deviennent des entités théoriques, signes d’un processus productif,

représentations des opérations qui régulent l’origine et le but de l’œuvre

déterminant ses modes de circulation sociale2. Pour ce métaobservateur,

l’improbabilité des représentations de l’observateur de premier ordre devient

visible. L’œuvre d’art perd alors de sa stabilité ontologique, c’est-à-dire qu’en se

séparant de sa manifestation matérielle, elle se révèle comme le résultat d’un

2
Verón, Eliseo. 1987. La semiosis social. Fragmentos de una teoría de la discursividad. Buenos
Aires, Gedisa.

3
processus dont l’histoire compromet non seulement les déterminations de son

origine mais aussi celles de son but. Le statut artistique d’une chose se définira

donc non seulement en rapport avec l’histoire de sa production mais aussi avec

l’histoire de ses effets ou lectures3. Depuis cette position d’observation, l’œuvre

d’art est un état qui résulte de la relation éventuelle entre deux ensembles

d’opérations, celles de production et celles de reconnaissance. Il s’opère alors,

par rapport à la première généalogie de l’œuvre d’art, une sorte de réversibilité

temporelle, l’idée d’une origine absolue s’évanouissant. Maintenant et à partir

de cette métaposition, l’œuvre émerge d’un système de double détermination

entre l’origine et le but. À cette nouvelle façon de concevoir l’origine de l’œuvre,

autant l’artiste que le spectateur - ou le critique, ou l’historien- y participent,

mais maintenant comme des figures qui représentent des opérations

productives. Ce qui nous amène directement à prendre en compte le caractère

productif des lectures, c’est-à-dire, la lecture spectatorielle, critique ou

historique déterminent éventuellement, en lien avec ce qui a été fait, l’origine de

l’œuvre depuis son futur. Et dans la mesure où les lectures peuvent se produire

possiblement et infiniment, la double économie relationnelle, qui détermine la

circulation d’une chose comme une œuvre, va définir un statut d’œuvre

essentiellement instable.

De son côté, le métaobservateur analytique reste au bord du paradoxe quand il

présente sa propre représentation de l’improbabilité des observations de

premier ordre comme un absolu. Le caractère de figure du métaobservateur

analytique n’est accessible que d’une position d’observation de troisième ordre,

dans laquelle j’essaierai de me situer par la suite.

3
Ibidem.

4
3. Critique et métacritique

La temporalité de la critique n’est pas la même que celle de la métacritique, les

objets en étant différents et pour cela les positions pragmatiques correspondant

à chacune de ces pratiques sont, elles aussi, différentes. L’objet du critique est

l’œuvre d’art, évidemment pas sous tous ses aspects, car l’histoire, la

sociologie ou la philosophie de l’art, parmi d’autres disciplines, ont pour objet

l’art comme univers phénoménique. L’ensemble d’opérations qui détermine

l’observation critique et qui la distingue des autres, pourrait être une articulation

entre « description, interprétation, appréciation » 4


si on prend en compte les

fonctions attribuées à la critique par Gérard Genette. A chaque lecture, le

critique met en marche cet ensemble d’opérations qui le définit génériquement

comme tel et mène de l’avant son observation -décrivant, interprétant et

appréciant- sur le donné sans pouvoir percevoir, à ce moment-là, la valeur

performatrice de son activité. La possibilité de rendre compte du pouvoir

performatif du travail critique est réservé au métacritique. Sous le regard

métacritique, le critique devient un signe des opérations mentionnées avant

comme génératrices de la critique. L’objet du métacritique n’est pas l’œuvre

d’art, mais l’œuvre du critique. L’observation métacritique « opacifie » la

transparence mimétique de l’observation critique et dévoile le caractère

improbable de ses représentations. Sous le regard métacritique, le critique perd

de sa consistance empirique et devient une hypothèse d’opérations de

reconnaissance du phénomène artistique. C’est une tâche du métacritique que

de circonscrire l’ensemble opérationnel qui détermine les limites génériques de

4
Por ejemplo, las operaciones que determinan el objeto, la función y el estatuto genérico de la
crítica. Genette, Gérard. 2002. Figures V. Paris. Du Seuil. P. 8

5
la pratique critique ou de distinguer des styles critiques, par exemple, à partir de

différentes manières d’articuler les composants descriptifs, interprétatifs et

évaluatifs.

La double voie descriptive et performative5, base de la constitution de l’objet par

la critique, n’est visible que pour quelqu’un éventuellement situé en position

d’observation de deuxième ordre qui dans notre cas correspond à la position

métacritique.

4. l’œuvre de la critique ou le pouvoir de la critique

La critique d’art est effet et cause de l’œuvre. Selon cette proposition,

paradoxale en apparence, le critique d’art est non seulement présent dans le

but de l’œuvre d’art- ce qui tombe sous le sens- mais aussi dans son origine.

Cette proposition ne peut être énoncée que d’une position métacritique.

Comme nous l’avons vu, à partir de cette position, l’œuvre se constitue comme

un état de double jeu de relations impliquant autant l’histoire de sa production

que l’histoire de ses lectures ou effets discursifs. Faisant partie de ce double jeu

de déterminations, l’univers des lectures de l’œuvre, qui ont été faites et qui

pourront l’être, détermineront rétrospectivement son mode de circulation

sociale. Ledit univers de lecture est constitué par un ensemble complexe de

pratiques de reconnaissance en lien aux phénomènes artistiques : l’histoire et

la philosophie de l’art, le marché, les comportements spectatoriels, les

stratégies d’exposition, les politiques culturelles gouvernementales, le

merchandising, etc., et bien sûr la critique d’art.

5
Heinich, N. et Schaeffer, J-M, op. cit.

6
La critique représente l’œuvre, ce que croient le critique et le lecteur de la

critique, mais aussi l’œuvre d’art est œuvre de la critique, son résultat, cela

n’étant observable que par le métacritique. Par conséquent, la critique se trouve

dans une relation de productivité avec ce qu’elle propose de représenter. La

dimension performative de toute représentation confère à l’écriture critique un

pouvoir de détermination sur ce qui à la fois constitue son objet de référence.

Bien sûr que la critique n’est pas la seule a arboré ce pouvoir productif, l’histoire

de l’art ou n’importe quelle instance de détermination en reconnaissance

pourrait aussi le faire. On distingue la critique d’art des autres pratiques par les

opérations qui permettent la constitution de son objet générique. Nous

pourrions penser que sa spécificité en lien au discours historique se base sur

une certaine idée d’immédiateté de la lecture de l’œuvre de même que sur le

caractère de jugement de ses représentations- hypothèse toujours à vérifier-

alors que l’histoire mesestime les énoncés de jugement comme centre de sa

pratique pour se concentrer sur une représentation de l’œuvre en vertu de son

emplacement au sein d’une séquence temporelle, entre autres choses.

On pourrait penser que le désir de l’artiste d’être mentionné- voire flatté- par la

critique se base sur l’intuition de son pouvoir performatif, et il fait bien car la

postérité n’est pas une propriété stable de certaines choses, mais le résultat

d’un état contingent d’ensembles d’opérations productives dont la critique fait

partie. Mais ce pouvoir de la critique dépasse n’importe quelle conscience ou

intentionnalité de la personne qui éventuellement incarne la figure du critique.

Le pouvoir performatif de l’écriture critique est un pouvoir partagé par la totalité

du système complexe de lecture des phénomènes artistiques. Tout comme la

postérité d’une œuvre ne dépend pas des désirs de l’artiste ni de ceux du

7
spectateur, elle ne dépend pas non plus des désirs du critique qui, au moment

d’exercer son œuvre, ignore le pouvoir productif de son écriture, ignorance d’où

provient la vraisemblance représentative de la critique.

Pourtant, cette transparence de l’écriture sera rattrapée par son « tournant

linguistique »; la séparation définitive entre deux pratiques de nature

absolument diverse, perdra de sa clarté cristalline quand la contemporanéité

critique mettra en fonctionnement d’éventuelles opérations d’autoréférence.

Nous pourrions penser que la condition postcritique de la critique d’art, exhibe

des zones d’opacité dans le propre champ disciplinaire, à partir d’opérations

d’autoreprésentation du critique6 ou dans des cas plus extrêmes de

déclarations de la critique même sur sa propre improbabilité.

5. Morts et résurrections de la critique

La définition suivante de la postcritique, extraite du vocA.B.O.lario d’Achille

Bonito Oliva, sert aussi de certificat de décès de la critique d’art version

classique:

«Position critique qui présuppose de la part du critique d’avoir conscience de

l’inutilité de sa propre fonction. Selon ce point de vue, le critique perd son rôle

traditionnel de médiateur entre l’art et le public, devient irresponsable, perd

toute certitude et rigueur de l’idéologie. Son mouvement est un voyage en

6
Correbo, N; Gustavino, B. Moyinedo, S. y Suárez Guerrini, F. “La auto-representación del
crítico” (2008). VI Jornadas de Investigación en Arte y en Arquitectura. Instituto de Investigación
de Historia del Arte Argentino y Americano. La Plata,
Facultad de Bellas Artes. UNLP.

8
syntonie avec l’œuvre qui se fonde sur une relation d’échanges intenses, et son

regard n’est pas celui d’un scrutateur mais d’un participant et qui a un impact

intense sur la matière de l’art »7

Selon cette description de la condition postcritique, s’évanouit n’importe quel

espoir d’une représentation critique en termes de mimétisme classique. De la

même discursivité critique on assume une conscience métacritique, c’est-à-dire

qu’on postule explicitement le pouvoir productif, « créatif », de la critique d’art.

Les temporalités de la critique et de la métacritique se confondent, la capacité

représentative de la critique reste en suspens quand un composant réflexif

émerge comme une menace d’anéantissement. Comment la critique pourrait-

elle survivre à la conscience de sa propre improbabilité représentative sans

tomber sous le coup d’un paradoxe évident? Serait-elle destinée à une éternelle

circularité déconstructive? Un seul exemple me vient à l’esprit pour illustrer la

définition de Bonito Oliva: Cartouches de Jacques Derrida8, ni description, ni

interprétation, ni évaluation, et tout à la fois, c’est-à-dire, référence et

autoréférence dans les limites d’un même texte.

Mais la critique ne pourrait pas demeurer trop long temps dans un état

d’indécision en rapport à sa validité représentative ; face à la menace de

tomber sous le joug d’une poétique, la pratique critique récupère la distance

avec son objet. La référence retourne au centre de l’activité critique, le

7
Bonito Oliva, A., en: http://www.achillebonitoliva.com/articritica/vocabolario.htm “Postcritica
posizione critica che ha come presupposto la coscienza da parte del critico dell'inutilità della
propria funzione. Secondo questo punto di vista il critico perde il ruolo tradizionale di mediatore
tra arte e pubblico, diviene irresponsabile, perde ogni certezza e il rigore dell'ideologia. Il suo
movimento è un viaggio in sintonia con l'opera fondato su un rapporto d'intenso scambio, e il
suo sguardo non è scrutatore ma partecipe e intensamente calato nella materia dell'arte.”
8
Ulmer. G. 1986. “El objeto de la poscrítica” en Foster, H. 1986. La Posmodernidad. Barcelona,
Kairós

9
paradoxe- d’observer et de s’observer soi-même en train d’observer- est

neutralisé, critiques et métacritiques reprennent leurs positions de chaque côté

de la frontière qui garantit la performance représentative de chaque niveau. Le

terme postcritique9 demeure alors, et jusqu’à aujourd’hui, comme un terme

pouvant décrire autant une condition d’époque de la productivité critique

comme un style particulier, qu’une écriture qui réplique en elle-même le

fonctionnement poétique de ce que devrait être son objet.

9
Quelque chose dans le même style survient, selon Danto, avec le terme postmoderne.

10

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