Sunteți pe pagina 1din 10

Robert Devereux

En italien Roberto Devereux (Le titre complet est Roberto Devereux, Conte di Essex.)

Opéra en trois actes.

Livret de Salvatore Cammarano, d’après la tragédie de F. Ancelot, Élisabeth d'Angleterre.

Musique de Gaetano Donizetti.

Création : 29 octobre 1837, à Naples.

Personnages

Elizabeth, reine d’Angleterre (soprano coloratura) - Le Duc de Nottingham (baryton) - Sara, duchesse
de Nottingham (mezzo-soprano)- Roberto Devereux, comte d’Essex (ténor) - Lord Cecil (ténor) - Sir
Walter Raleigh (basse) - Deux petits rôles et chœur.

Le compositeur

Donizetti (Bergame, 1797-Bergame, 1848) fut l’élève de Simon Mayr (auteur de soixante-dix opéras)
et du père Mattei — le maître de Rossini —, à Bologne. Après ses premiers succès sur différentes
scènes italiennes, il s’établit en 1827 à Naples, où il devint professeur et fit représenter en moyenne
trois nouveaux opéras par an! Il s’installa à Paris en 1838; les dernières années de sa vie furent
assombries par des troubles mentaux qui nécessitèrent son internement en 1846.

Son incroyable rapidité de travail (certains ouvrages furent composés en quinze jours), sa
débordante activité (Donizetti était souvent le metteur en scène de ses spectacles) n’ont pas permis
au musicien d’édifier une œuvre homogène : le talent mélodique est souvent affaibli par la platitude
de l’harmonie et de l’instrumentation. Soixante-quinze opéras constituent sa production lyrique —
parmi lesquels Anna Bolena, L'Elisir d'amore (1832), Lucrezia Borgia (1833), Lucia di Lammermoor
(1835), Roberto Devereux (1837), la Fille du régiment (1840), la Favorite (même année), Linda di
Chamounix (1842), Don Pasquale (1843), Maria di Rohan (même année), Caterina Cornaro (1844).
Donizetti écrivit également de la musique sacrée, vingt-huit cantates, quinze symphonies, de la
musique de chambre..., œuvre prolifique qui, sauf la douzaine d'opéras mentionnés ci-dessus (la
plupart commentés par la suite), est totalement oubliée aujourd’hui.

L’œuvre

Ce cinquante-septième opéra de Donizetti constitue le dernier volet d’une trilogie qui prend sa
source d’inspiration dans l’histoire de l’Angleterre au XVIe siècle (v. Anna Bolena et Maria Stuarda). Il
fut accueilli avec succès, et joué régulièrement jusque vers 1880; mais la première reprise moderne
n’eut lieu qu’en 1964, dans une version remaniée (la partition d’orchestre ayant été détruite lors de
la Seconde Guerre mondiale).

L’œuvre ne manque pas de qualités, essentiellement dramatiques (le deuxième acte : Elizabeth
découvre la trahison d’Essex, et prononce sa condamnation). Elle laisse cependant l’auditeur
insatisfait : Donizetti, certes, alterne avec son habileté coutumière les passages élégiaques,
d’abandon extatique (l’air d’Essex, au troisième acte, « Corne uno spirto angelico »), et des scènes de
tension qui atteignent le paroxysme (le dialogue d’Elizabeth et d’Essex, au premier acte, le finale
tourmenté du deuxième acte). Mais il semble que l’inspiration mélodique s’appauvrisse et, par
moments, soit presque tarie ; les redoutables « morceaux de bravoure » d’Elizabeth n’échappent pas
aux conventions d’un bel canto sans imagination ni sincérité, et la ligne de chant n’a pas cette
originalité ni, parfois, cette pureté bellinienne qu’on rencontrait dans nombre d’ouvrages antérieurs,
et qu’on retrouvera bientôt dans les derniers opéras du compositeur.

**********************************************************************************

Roberto Devereux

Opera séria en 3 actes

Livret : Salvatore Cammarano

CRÉATION : Naples, Teatro San Carlo, 29 octobre

1837

Elisabetta I : Giuseppina Ronzi de Begnis, soprano; Roberto Devereux: Giovanni Basaaonna, ténor;
Nottingham : Paul Barroilhet, baryton; Sara : Almerinda Granchi, mezzo-soprano; Cecil : Timoleone
Barattini, ténor; Gualtiero Raleigh : Anafesto Rossi, basse; Un page : alto; Un serviteur de Nottingham
: Giuseppe Benedetti, basse

ARGUMENT

Acte I

Premier tableau. Roberto Devereux, comte d’Essex, favori de la reine Elizabeth, est accusé de haute
trahison pour avoir soutenu une rébellion en Irlande. Sara, duchesse de Nottingham, l’aime en
secret. Les dames de la cour commentent sa tristesse, alors qu’elle lit l’histoire de Rosamond
[Rosmonda d’Inghilterra, évidemment], maîtresse du roi Henry II (« All’afflitto »). La reine Elizabeth
consent à revoir Roberto, bien qu’elle le soupçonne d’un crime pire que la haute trahison : celui de
lui être infidèle! (« L’amor suo mi fe’ beata »). Lord Cecil demande à la reine de rendre son verdict,
mais Élisabeth hésite encore (« Ah! Ritorna quai ti spero »). Roberto reste seul avec sa reine qui lui
reproche sa froideur. Dans le courant de la conversation, Devereux se trahit un instant, si bien que la
reine en tire la conclusion qui s’impose : il en aime une autre. Elle s’en va, furieuse (duo : « Un tenero
core »). Arrive Nottingham qui confie à son ami Roberto ses craintes au sujet de son épouse, Sara,
qu’il a surprise en larmes, en train de broder une écharpe (« Torse in quel cor »). Lord Cecil vient
convoquer Nottingham : la reine serait prête à rendre son verdict. Nottingham jure de sauver
Roberto.

Second tableau. Roberto s’introduit dans les appartements de Sara et lui reproche son infidélité. Sara
explique qu’en son absence la reine lui a fait épouser Nottingham; elle le supplie de partir pour
toujours. Il lui jette l’anneau reçu de la reine; elle lui offre l’écharpe qu’elle avait brodée pour lui; ils
se séparent (duo : « Da che tornasti »).

Acte II

Le tribunal a prononcé la mort du traître. Raleigh tend à la reine une écharpe brodée d’or, trouvée
sur Devereux lors de son arrestation. Nottingham vient demander à la reine sa signature sur la fatale
sentence, tout en la suppliant de gracier le coupable. Comment le pourrait-elle, alors que cette nuit-
même il la trompait avec une rivale? (duo : « Non venni mai »). On amène Roberto à qui la reine
brandit la preuve de son crime : l’écharpe. Nottingham la reconnaît instantané- ment (trio : « Ecco
l’indegno »). Puisque Devereux refuse de livrer le nom de sa maîtresse, et que Nottingham a soudain
cessé de le défendre, la sentence est confirmée (« Va! La morte sul capo ti pende »).
Acte III.

Sara reçoit de Roberto une lettre, la suppliant de remettre à la reine la bague qu’il avait laissée
auprès d’elle, et qui lui garantit la vie sauve. Mais Sara se fait surprendre par Nottingham qui, furieux
de jalousie, l’emprisonne jusqu’à ce que la sentence soit exécutée (duo : « Non sai che un nume »).
Dans la tour de Londres, Roberto attend le moment fatal, tout en espérant encore la restitution de la
bague (« A te diro »). Hélas, il est trop tard, Cecil vient le traîner au supplice. Elizabeth, qui n’a pas
non plus oublié la bague, attend toujours ce signe la part de Roberto, d’autant qu’elle lui a déjà
pardonné (« Vivi, ingrato »). Soudain, Sara pénètre dans ses appartements, avoue sa faute et remet à
la reine la bague fatidique. Hélas, au même moment le coup de canon retentit; Nottingham annonce
la mort de Roberto. Elizabeth accuse Sara, mais son époux admet avoir agi par jalousie. Il ne reste
plus à la reine que la fureur du désespoir (« Quel sangue versato »). Elle déclare abdiquer en faveur
de James Ier.

HISTOIRE.

Les circonstances qui entourent Roberto Devereux sont dramatiques pour Donizetti : en juin, sa
femme donne naissance à son second fils qui meurt aussitôt, avant de le rejoindre dans la tombe le
30 juillet, à l’âge de 29 ans. Le compositeur se jette à corps perdu dans le travail, ayant à satisfaire
une commande du San Carlo pour l’ouverture de la saison à l’automne. Cammarano adapte pour lui
la pièce de François Ancelot Élisabeth d'Angleterre (Paris, 1832) en utilisant un livret de Romani écrit
pour Mercadante (Il Conte d’Essex, Milan 1833) et basé sur la même pièce. La censure va retarder les
répétitions, objectant de la fin tragique, mais l’opéra remporte un succès immédiat et durable. Les
reprises se multiplient à travers le monde, allant jusqu’à New York (1849). Pour la création française,
au Théâtre-Italien, Donizetti compose une nouvelle ouverture. Pour autant, Roberto Devereux n’aura
pas échappé à l’éclipse qui affecta, à de rares exceptions près, toute l’œuvre de son auteur. Ses
productions cessèrent au début des années 1880, avant de reprendre en 1964, lorsque San Carlo
présenta l’opéra à nouveau, avec Leyla Gencer dans le rôle d’Elizabeth, bientôt suivie de Montserrat
Caballé (Carnegie Hall, 1965), de Beverly Sills (New York City Opéra, 1970) et d’Edita Gruberova. Le
nombre et la fréquence des productions successives permettent d’affirmer que l’opéra a repris pied
au répertoire. En 1953, Benjamin Britten mettra en musique les mêmes héros dans Gloriana.

OEUVRE.

Quelle que soit la source littéraire, le titre ou le compositeur, Elisabetta, regina d’Inghilterra de
Rossini, Elisabetta al castello de Kenilworth de Donizetti, ou Roberto Devereux, nous retrouvons à
peu près la même trame : la reine, son favori, et l’« autre femme». [Le cinéma s’emparera du sujet
en 1939, dans The Private Lives of Elizabeth and Essex, avec Bette Davis et Erroll Flynn, dirigés par
Michael Curtiz, et accompagnés par la musique d’Erich Wolfgang Korngold. Le scénario est
l’adaptation d’une pièce de Maxwell Anderson.]

La différence, et elle marque l’époque, est dans la fin : heureuse dans les œuvres plus anciennes, elle
est ici tragique. Le véritable Robert Devereux, 2e comte d’Essex, fut décapité en 1601 non pas pour
son mariage secret (avec la veuve de Sir Philip Sidney, en 1590), ni pour ses maladresses en Irlande
(1598), mais pour sédition. Inutile de dire qu’Elizabeth n’en a pas abdiqué pour autant; James Ier, fils
de Marie Stuart, lui succéda naturellement, après sa mort en 1603. L’opéra la représente sous les
traits d’une femme fière, outragée, ballottée entre les passions personnelles et les devoirs publics;
parmi les trois opéras que Donizetti lui consacra, Roberto présente le portrait le plus complet de la
reine-vierge, fût-il éloigné de la vérité historique. On l’a souvent comparé à Norma de Bellini, tant
l’écriture est à la fois virtuose, dramatique et singulièrement posée, comme en témoigne son air final
(« Vivi, ingrato »), alors que la vaste scène finale qui lui fait suite, d’une exceptionnelle intensité
dramatique, semble transgresser le simple schéma tempo di mezzo-cabalette, bien qu’elle en
observe les règles. Donizetti y retrouve la liberté qui fit la gloire de la dernière scène d’Anna Bolena.
Le tempérament infernal et le désir de vengeance d’Elizabeth explose dans la magistrale séquence
des événements au IIe acte, que termine un trio furibond (avec participation, dans la stretta, de Cecil,
Raleigh et le chœur) où l’exaspération de la reine s’exprime à travers de vastes inter- valles. Son bel
air d’entrée, tout comme son premier duo avec Essex, ne font qu’annoncer discrètement de tels
ouragans. Le héros eponyme s’affirme davantage dans son duo passionné avec Sara, et surtout dans
la mélancolique scène de prison, qu’ouvre un prélude souvent comparé à la scène analogue de
Fidelio, alors qu’il signale plutôt l’origine de quelques ambiances verdiennes, Rigoletto ou la scène
d’Ulrica dans Un bal masqué. La cabalette - d’un caractère trop jovial pour la circonstance –
deviendra un des thèmes de l’ouverture que Donizetti ajoutera pour Paris (l’autre étant... « God save
the Queen », qui date en réalité de 1740). Sara et Nottingham trouvent leur moment suprême dans
leur affrontement du dernier acte. Roberto Devereux est une des découvertes les plus précieuses de
la « renaissance donizettienne ».

ENREGISTREMENTS : Sills, Ilosfalvy, Wolff, Glossop, dir. Mackerras (Westminster 1970) Gruberova,
Bernardini, Ziegler, Kim, dir. Haider (Nightingale 1994)

Benvenuto Cellini
Opéra en trois actes (quatre tableaux).

Livret de Léon de Wailly et Auguste Barbier, d'après les Mémoires de B. Cellini.

Musique d'Hector Berlioz.

Création

Version originale en deux actes : 10 septembre 1838, à l’Opéra de Paris (ce fut un échec : vingt-neuf
répétitions furent nécessaires, il n’y eut que sept représentations). Version remaniée (et définitive)
en trois actes : 20 mars 1852, à Weimar (sous la direction de Liszt, qui défendit vigoureusement
l’ouvrage).

Personnages

Benvenuto Cellini, orfèvre (ténor) - Fieramosca, sculpteur du pape et rival de Cellini (baryton) -
Giacomo Balducci, trésorier papal (basse) - Teresa, sa fille (soprano) - Ascanio, élève de Cellini (rôle
travesti : mezzo-soprano) - Le cardinal Salviati (primitivement le pape Clément VII : le rôle fut
transformé par exigence de la censure parisienne, et devint celui de légat du pape; il a été
récemment rétabli) (basse) - Francesco, apprenti de Cellini (ténor) - Bernardino, apprenti de Cellini
(basse) - Pompeo, un spadassin (baryton) - Petits rôles, chœur.

Argument

L’action est située en 1532 à Rome, durant le Carnaval.

Premier acte. En l’absence de son père, le trésorier papal Balducci, Teresa accueille Cellini, le célèbre
fondeur et ciseleur florentin; tous deux décident de fuir ensemble, à la faveur des déguisements du
Mardi gras.

Deuxième acte (deux tableaux). Un des élèves de Cellini, Ascanio, lui remet un sac de ducats de la
part du pape, à la condition que la statue de Persée soit fondue dès le lendemain; Fieramosca, rival
de Cellini, se dispose, pour sa part, à enlever Teresa. Le second tableau de cet acte présente l’image
colorée du Carnaval sur la place Colonna : Cellini se prépare à enlever Teresa, mais Fieramosca se
présente; Cellini tue le spadassin engagé par Fieramosca et prend la fuite, tandis qu’Ascanio emmène
promptement Teresa.

Troisième acte. Cellini se dispose à quitter Rome avec Teresa; sur- viennent Balducci et le légat du
pape : Cellini aura la vie sauve et pourra épouser Teresa s’il fond sur l’heure la fameuse statue. Dans
son atelier, Cellini réussit ce prodige.

Le compositeur

Berlioz (La Côte-Saint-André, Isère, 1803-Paris, 1869) fut d’abord un autodidacte de la musique, puis
entra au Conservatoire de Paris en 1826, où il fut l’élève de Lesueur (le compositeur des Bardes) et
de Reicha; il n’obtint le Grand Prix de Rome qu’après trois échecs successifs. Mais il était déjà
l’auteur de la Symphonie fantastique, qui fut accueillie avec enthousiasme. Il commença en 1830 une
très brillante carrière de critique musical, puis devint en 1839 conservateur de la bibliothèque du
Conservatoire.

Presque toute la musique de Berlioz est conçue dans un esprit dramatique; mais l’indifférence du
public à l’égard de son œuvre théâtrale, après l’échec de Benvenuto Cellini, lui barra l’accès à une
forme musicale vers laquelle ses dons le portaient naturellement : lorsque, après la Damnation de
Faust (1846) et Béatrice et Benedict (1862), il entreprit de faire représenter ses Troyens dans la
forme originale, il réussit seulement à faire jouer la seconde partie de ce diptyque, les Troyens à
Carthage (1863), et mourut sans avoir assisté à la représentation complète de son chef-d’œuvre.

L’œuvre

Tiré des truculents Mémoires de Cellini, l’opéra de Berlioz apparaît aujourd’hui comme un
magnifique essai manqué : le compositeur, en effet, tente d’adapter ses conceptions de musique
représentative — réalisées avec succès dans la Symphonie fantastique, par exemple — à celles de
l'opéra classique de son temps.

Mais l’audacieux Berlioz demeure prisonnier de ses modèles : il lui faut plaire, et son opéra emprunte
autant à Gluck qu’à Spontini, voire à Rossini et à Meyerbeer; d’où le disparate du langage où, par
exemple, des airs aux vocalises conventionnelles voisinent avec d’autres, d’un lyrisme sobre; où des
récitatifs tragiques succèdent au tourbillon du Carnaval; où la Rome de la Renaissance n’est évoquée
que par touches pittoresques mêlées au style de l’opéra traditionnel : Berlioz « fait de l’illustration là
où Shakespeare, Wagner ou Verdi créeraient un climat » (J. Lonchampt).
Cependant, les réussites de détail abondent dans cette partition brouillonne, maladroite, mais
extraordinairement vivante et gaie : il suffit de citer le tableau du Carnaval, dont on remarque la
verve rythmique et l’orchestration étincelante, ou l’air de Cellini, en forme de très bel andante, au
dernier acte de l’ouvrage... Œuvre hybride et luxuriante, où éclate un mouvement incessant, qu’on
ne retrouvera plus dans les opéras de la maturité.

Pour faire entendre au concert ce qui avait été refusé à l’Opéra, Berlioz a composé en 1844 une
seconde ouverture à son ouvrage, intitulée Carnaval romain : il reprend presque textuellement le
duo du premier acte entre Cellini et Teresa et le grand chœur du Carnaval; pièce orchestrale où le
génie de l’instrumentation et l’exceptionnel instinct rythmique du musicien triomphent.

Discographie

Un enregistrement intégral disponible.

N. Gedda (Cellini), C. Eda-Pierre (Teresa), J. Berbié (Ascanio), J. Bastin (Balducci), R. Massard


(Fieramosca), Orch. symph. BBC, dir. C. Davis (4 disques, Philips) : une grande réussite.

Benvenuto Cellini

Opéra-comique en 2 actes (4 tableaux)

LIVRET : Léon de Wailly et Auguste Barbier

CRÉATION : Opéra, salle Le Peletier, 12 septembre

1838 (Weimar, 20 mars 1852)

Benvenuto Cellini: Gilbert Duprez, ténor; Balducci : Prosper Dérivis, basse; Fieramosca : Eugène
Massol, baryton; Pape Clément VII : Jacques-Emde Serda, basse; Teresa : Julie Dorus-Gras, soprano;
Ascanio : Rosine Stoltz, mezzo-soprano; Francesco : M. Molinier, ténor; Bernardino : Louis- Emile
Wartel, basse; Pompeo : Ferdinand Prévost, basse; Cabaretier : ténor; Colombine : rôle parlé

ARGUMENT.

Acte I.
PREMIER TABLEAU : LUNDI GRAS.

Messer Balducci, trésorier du Pape, interdit à sa fille Teresa de regarder par la fenêtre, source de
tous les ennuis. Il est furieux de devoir sortir, d’autant que le Pape le convoque pour accorder des
crédits à ce vaurien de Cellini; à quoi bon, du moment que l’on possède à son service le sculpteur
Fieramosca? En éloignant Teresa de la fenêtre, il reçoit en pleine figure une poignée de dragées
blanches qui lui tachent le costume; c’est encore Cellini et son engeance. Plutôt mourir que de lui
accorder la main de Teresa. Celle-ci, en revanche, ne rêve que du beau Florentin (« Entre l’amour et
le devoir »). Leur rencontre est surprise par Fieramosca (trio : « O Teresa, vous que j’aime ») qui,
caché dans la chambre de la jeune fille, entend les détails du rendez-vous que Cellini fixe à Teresa
pour le lendemain, où il compte l’enlever. Au retour de Balducci, Cellini se cache derrière la porte;
afin de favoriser sa fuite, Teresa envoie son père dans sa chambre, où un homme se serait faufilé. Le
temps que Cellini s’éclipse, Balducci ramène Fieramosca par la peau du cou. Ignorant ses accusations
contre Cellini, il avertit le voisinage, et le livre à la bastonnade.
DEUXIEME TABLEAU : MARDI GRAS.
Place Colonne, Cellini attend Teresa (« Une heure encor » - « La gloire était ma seule idole »). Il est
rejoint par ses amis, maîtres ciseleurs, qui boivent et chantent la gloire de leur métier (chœur : « Si la
terre aux beaux jours »).

Confrontés à la facture du Cabaretier, ils sont sauvés par Ascanio qui apporte à Cellini l’avance sur la
plus belle statue que l’Italie ait jamais vue, et qui doit être prête pour le lendemain (« Cette somme
t’est due »). Malheureusement, comme! C’est Balducci qui a calculé la somme, elle suffit à peine à
couvrir la dette. Pour se venger, Cellini demande à la troupe de Cassandro, qui va se produire sur la
place, de ridiculiser Balducci. Son plan a de nouveau été entendu par Fieramosca. Apprenant que
Cellini a l’intention d’enlever Teresa, le spadassin Pompeo, ami de Fieramosca, avance l’idée d’imiter
les déguisements prévus à cette fin par Cellini, et de lui souffler la demoiselle. Fieramosca jubile (« Ô,
Teresa! »). Le spectacle commence; la troupe de Cassandro représente l’histoire du roi Midas aux
oreilles d’âne. Au milieu de la foule en délire (Carnaval romain), nous voyons Balducci et Teresa, ainsi
que Cellini avec Ascanio, déguisés en moine blanc et capucin brun. Ils sont bientôt rejoints par
Fieramosca et Pompeo, affublés à l’identique. Dès le début de la représentation, tout le monde
reconnaît dans Midas le trésorier du Pape, Messer Balducci qui, furieux, se précipite sur scène, armé
de sa canne. Dans la cohue, deux couples de moines abordent Teresa; fâché de la concurrence,
Cellini croise l’épée avec Pompeo, qui tombe mort. Le sculpteur est aussitôt arrêté par les sbires
(«Assassiner un capucin!»). Le canon de Saint-Ange annonce la fin du carnaval; dans l'obscurité
soudaine, Cellini se sauve, tandis qu’Ascanio emporte Teresa. Pour comble de malheur, Fieramosca,
ayant gardé son costume de moine blanc, se fait arrêter pour le meurtre de Pompeo.

Acte II
TROISIÈME TABLEAU : MERCREDI DES CENDRES.

Au centre de l’atelier de Cellini se dresse le modèle en plâtre de la statue de Persée. Ascanio


introduit Teresa, morte d’inquiétude; reprenant le chant des moines qui passent dans la rue, ils
prient ensemble pour le salut de Cellini (« Rosa purpurea »). Le sculpteur revient, portant toujours sa
robe de moine ensanglantée (« Ma dague en main »). Désormais, seule la fuite peut sauver les
amants (duo: «Ah!, le ciel, cher époux»). L’arrivée intempestive de Balducci et de Fieramosca
interrompt les préparatifs (sextuor : « Ah ! Je te trouve enfin! »). Cellini dégaine à nouveau avant de
tomber nez à nez avec le pape Clément VII accompagné de sa suite (« À tous péchés pleine
indulgence »). Le Saint-Père semble davantage préoccupé par les progrès du travail sur la statue que
par les accusations contre Cellini; apprenant toutefois que l’œuvre n’est pas encore fondue, il décide
de confier le travail à un autre artiste, et ordonne d’arrêter Cellini qui menace de détruire le modèle.
Devenu aussitôt plus clément, le pape demande au sculpteur ce qu’il exige pour achever son travail.
La réponse fuse : le pardon de toutes les fautes, la main de Teresa, et un seul jour de plus. L’amour
de l’art triomphe : le lendemain, à la même heure, le Saint-Père viendra assister à la fonte, mais si
elle n’a pas lieu, Cellini sera pendu haut et court (concertato : « Ah! main- tenant de sa folle
impudence »).
QUATRIEME TABLEAU

Seul dans l’atelier de fonderie, Ascanio laisse libre cours à son angoisse (« Tra la la la la... Mais qu’ai-
je donc ? »). Cellini, pas plus rassuré, regrette de ne pas avoir choisi un autre métier (« Sur les monts
les plus sauvages »). La chanson des fondeurs retentit dans l’atelier comme un sombre présage.
Soudain, Fieramosca y fait irruption avec deux gardes armés, demandant satisfaction à Cellini. Ne
pouvant s’y soustraire, Cellini saisit son rapière et suit Fieramosca, ce qui provoque la colère des
fondeurs, prêts à abandonner leurs postes. Voyant revenir Fieramosca, Ascanio et Teresa en
concluent à la mort de Cellini, mais tel n’est pas le sens de la scène : le duel n’était qu’une diversion
pour écarter Cellini, le temps de soudoyer ses ouvriers. Cellini rentre à temps pour sauver son
ennemi que les fondeurs s’apprêtaient à jeter dans la chaudière. Il ne reste à Fieramosca qu’à enfiler
le tablier pour les aider (chœur: «Peuple ouvrier»). Au moment suprême, le pape fait son entrée.
Hélas, le métal vient à manquer et la fonte se fige, menaçant l’entreprise. N’ayant plus rien à fondre,
Cellini décide de sacrifier toutes ses autres œuvres. Le couvercle de la chaudière saute, laissant
couler le métal brûlant dans la terre. En un instant, l’artiste victorieux n’a plus que des amis, une
épouse aimante, au un nouveau chef-d’œuvre à mettre sur son compte.

HISTOIRE.

C’est en 1834 que Berlioz conçut le projet d’un opéra-comique adapté des Mémoires de Cellini. Il en
confia le livret à Auguste Barbier et Léon de Wailly, qui se firent aider par Alfred de Vigny dont le rôle
dans l’élaboration du projet fut capital : non seulement incita-t-il Berlioz à lire les Mémoires, mais
encore contribua-t-il de nombreuses lignes au livret. Avant même de soumettre le texte à la direction
de l’Opéra-comique, Berlioz composa le chant des maîtres ciseleurs. Une fois le livret rejeté, on
procéda à des modifications en vue de le proposer à l’Opéra, en remplaçant les dialogues parlés par
des récitatifs. Pour cela, il fallut attendre le remplacement de Louis Véron, ennemi juré de la musique
de Berlioz, par Charles Duponchel, qui intervint en août 1835, ouvrant de nouvelles perspectives.
Sans contrat, mais plein d’espoir, Berlioz s’attela à la composition qui lui prit deux ans, entre 1836 et
1837, et où il mit à profit ses œuvres antérieures (dont l’opéra refusé, et finalement détruit, Les
Francs- Juges), si bien que Cellini put entrer en répétitions le 15 mars 1838. Par ailleurs, la censure
intervint aussitôt, faisant remplacer le Pape par le cardinal Salviati, tandis que Berlioz ajoutait deux
numéros : l’air d’Ascanio « Mais qu’ai-je donc » et celui de Cellini « La gloire était ma seule idole ». La
création valut au compositeur une « chute éclatante », selon son propre mot; Duprez alla jusqu’à
décliner le rôle après la troisième, provoquant l’annulation des autres représentations. Une
quatrième eut lieu le 11 janvier 1839, avec un autre ténor, à la suite de quoi on donna trois fois le Ier
acte, associé à un ballet. En 1844, Berlioz utilisa la musique du 2e tableau dans l’ouverture du
Carnaval romain qui poursuivit depuis la carrière que l’on sait. C’est un an après avoir créé Lohengrin
(1850), que Liszt se précipita au secours de son collègue français, lui proposant de reprendre l’opéra
à Weimar, ce qui eut lieu en mars 1852; trouvant l’œuvre trop longue, Liszt abrégea ensuite les
scènes finales, coupures acceptées par le compositeur. Cellini, en trois actes, fut ainsi repris quatre
fois en novembre. Le 25 juin 1853, après d’autres retouches, il ne fit que traverser la scène de Covent
Garden à Londres, où une cabale du « parti italien » empêcha d’autres représentations. Les deux
dernières du vivant de Berlioz eurent lieu à nouveau à Weimar, en 1856. Le projet de reprendre
l’opéra au Théâtre-Lyrique ayant échoué, quelques rares reprises posthumes (Prague, 1894; Berlin,
1896; Vienne, 1911) rappelaient sporadiquement son existence au public. En 1913, Felix Weingartner
en dirigea une production pour l’inauguration du Théâtre des Champs-Élysées. C’est seulement dans
les années 1960, en Grande-Bretagne, qu’on tenta de revenir à l’original (Covent Garden, 1966, et
enregistrement Philips, 1972), sans résoudre cependant toutes les questions que pose la partition.
Paris l’entendit en 1958, 1969 et 1979, dans le cadre des saisons lyriques de Radio-France, ainsi qu’à
l’Opéra en 1972, et à la Bastille en 1993 (avec Chris Merritt, dir. Myung-Whun Chung). Benvenuto
Cellini demeure une œuvre problématique et difficile, exigeant de sérieux efforts de la part des
théâtres qui l’entreprennent.

ŒUVRE.

L’orfèvre Benvenuto Cellini écrivit ses Mémoires (La Vita) entre 1558 et 1566; il fallut plus d’un siècle
et demi avant d’en voir la première publication (1728), peu authentique mais traduite en plusieurs
langues. Berlioz n’ignorait probablement ni l’édition française de 1822, ni la réédition du texte
original et complet (1829), il semblerait cependant qu’il n’ait lu que la nouvelle traduction française
de cette dernière, parue en 1833. Le livret reprend plusieurs éléments des Mémoires : les prénoms
des amis de Cellini (qui furent bien plus que ça…)Ascanio dei Mari et Bernardino, l’inimitié d’un
trésorier papal nommé Balducci, l’assassinat d’un certain Pompeo, d’ailleurs orfèvre lui-même, la
grâce papale, qui fut accordée par Paul III; d’autres sont modifiés : Persée fut achevé à Florence sur
commande de Cosme Ier de Médicis, et non du pape (Cellini approchait alors de la cinquantaine, et
n’était plus guère qualifié pour jouer les Céladons); d’autres enfin relèvent de la fiction : Balducci en
père- fouettard, Teresa, Fieramosca (une sorte de Beckmesser - soupirant malchanceux des Maîtres
chanteurs de Wagner' - avant la lettre), les péripéties du 2e tableau, le sacrifice de toutes les œuvres
anciennes pour donner naissance à la statue. Le livret qu’en façonnent les trois auteurs (si l'on met
Vigny sur la liste) glorifie - est il besoin de le préciser? - le triomphe de l’artiste sur les philistins; bien
qu’il souffre d’un ramollissement au IIe acte, qui traîne en longueur et retarde le dénouement, et en
dépit. D’une qualité poétique suspecte, il brille dans la production lyrique de son époque autant par
une logique interne solide, que par la variété des situations, avec deux grands tableaux (carnaval,
théâtre dans le théâtre et mouvements de foule au Ier acte, ainsi que la scène finale) d’une
incontestable originalité. Nous sommes d’ores et déjà dans l’univers du grand opéra, nonobstant les
alibis comiques du scénario. Reste à savoir si celui-ci s’accorde bien avec les inclinations naturelles de
Berlioz, ce dont le fruit est une partition inégale, si riche en satisfactions. On ne s’étendra pas sur
l’ouverture, chef-d’œuvre d’imagination rythmique et orchestrale, où s’impose d’emblée le « thème
d’amour », tandis que ses pages frénétiques, propres à la nature de l’opéra, tendent la main à la
scène du carnaval. Quant à cette dernière, on conçoit la terreur des chœurs de l’Opéra confrontés à
une écriture virtuose qui, sous sa forme orchestrale, nargue depuis les ressources des meilleurs
ensembles du monde. Berlioz adopte avec obéissance les formes consacrées, sans s’empêcher d’être
Berlioz (ce qui peut produire d’excellents effets), parvenant à pasticher le style comique hérité des
Italiens, surtout de Rossini, mais sans dissimuler un certain abattement à l’égard des servitudes du
genre, et sans toujours maîtriser la durée. Ainsi, si l’Allegro du trio Teresa/Cellini//Fieramosca au Ier
acte, dont la partie lente déploie le dit « thème d’amour », est une merveille de construction
musicale et d’adéquation dramatique, où Fieramosca s’efforce de saisir les mots que Cellini souffle à
Teresa (Verdi s’en souviendra- t-il au IIIe acte d'Otello ?), sa reprise frôle la redondance. Encore
s’agit-il d’un ensemble brillant, riche en idées, qu’on ne rechigne pas davantage à réentendre que la
reprise du duo Almaviva/Figaro au 1er acte du Barbier de Rossini (sans oublier celle du quintette de
Carmen, autre analogie frappante). Il n’en sera pas de même du grand concertato du Ier acte, dont la
complexité provoque davantage l’admiration que l'adhésion. Ce grand finale contient cependant
assez de pages merveilleuses (dont le concours de chant « muet », aux couleurs instrumentales
irrésistibles), pour se faire pardonner ses longueurs. Teresa chantera, au Ier acte, un air de coupe
italienne (qui remplace une très belle romance «Ah! que l’amour», transformée ensuite en Rêverie et
caprice pour violon et orchestre), où la cabalette manifeste une heureuse synthèse entre les
exigences de la forme et la « farta » rythmique berliozienne. Le IIe acte s’ouvre sur une reprise aux
cuivres, sinistre présage, de la formidable « chanson des maîtres ciseleurs », autre joyau du Ier acte.
La prière d’Ascanio et de Teresa sur fond du chœur des moines est une de ces magiques pages «
nocturnes » que nous trouverons dans les opéras ultérieurs, tandis que le second duo Cellini/ Teresa,
privé de point d’appui dans l’andante (coupé à Weimar), éclate dans l’Allegro d’une irrésistible et
optimiste énergie. L’entrée du Pape est splendide, si les ensembles qui s’enchaînent ensuite
semblent décliner les figures théâtrales imposées, sans toujours trouver l’expression musicale idoine.
Curieusement, c’est le lyrisme de type romantique qui semble poser des difficultés à Berlioz, comme
en témoigne l’air de Cellini au IIe acte (« Sur les monts »), où le texte vaut le thème, et où seul
l’orchestre, avec ses effets délicieux aux vents, sauve la situation. L’air est intercalé entre la
tarentelle joyeuse aux effets comiques d’Ascanio, une des pages les plus populaires de la partition, et
le chœur des fondeurs, à nouveau admirablement coloré par l’instrumentation. L’agitation et le
pathos des scènes finales, portées par un dialogue fébrile ponctué d’instants de suspension, mais
surtout par la splendeur inépuisable de l’orchestre, nous mènent bon train vers l’apothéose qui
reprend « la chanson des ciseleurs ».

Si l’affection de Berlioz à l’égard de cette partition foisonnante est compréhensible, c’est dans l’opéra
suivant qu’il aura trouvé un sujet, mais surtout un souffle dramatique, faisant défaut à Cellini.

(1 ) On souligne parfois des analogies entre l’opéra de Berlioz et celui de Wagner (Jean-Michel
Brèque développe brillamment le sujet dans le numéro 142 de la revue L’Avant-Scène Opéra
consacré à Cellini). Or, selon Ernest Newman, le plus célèbre biographe du compositeur allemand, il
est « pratiquement certain » que ce dernier ne connaissait ni la partition, ni le livret de Benvenuto
Cellini (et il est doublement certain qu’il n’a pu voir l’œuvre sur scène). Cela ne l’a pas empêché de se
faire une opinion négative à son sujet à partir de deux articles de Hans von Bülow publiés dans la
Nette Zeitschrift für Musik, en avril 1852, après les spectacles de mars. S’il est notoire que Wagner
passa sous silence de nombreuses sources et influences, cette fois nous sommes toutefois réduits
aux conjectures : Wagner arrive pour la première fois à Paris en septembre 1839; le premier scénario
des Maîtres est ébauché en 1845; l’édition Litolff de Cellini paraît en 1856; Wagner revient aux
Maîtres en 1861; la partition vocale de Choudens de Cellini paraît en 1863; Wagner achève les
Maîtres en 1867. S’est-il ou ne s’est-il pas donné la peine d’étudier l’opéra d’un confrère dont il avait
tant admiré Roméo et Juliette lors de sa création de 1839? Mystère.

ENREGISTREMENT : Gedda, Eda-Pierre, Bastin, Berbié, Massard, Soyer, dir. Davis (Philips 1972)

S-ar putea să vă placă și