Documente Academic
Documente Profesional
Documente Cultură
Note de cours
Cours de Jean Delmotte et Goulven Rubin
iii
TABLE DES MATIÈRES TABLE DES MATIÈRES
5 Socialistes et institutionalistes 27
5.1 Les premiers socialistes : réformer la société pour la rendre meilleure . . . . . . . 27
5.1.1 Saint-Simon (1760-1825) : le technocrate . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
5.1.2 Charles Fourier (1772-1837) : le rêveur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
5.1.3 Pierre Joseph Proudhon (1820-1862) : l’anarchiste libertaire . . . . . . . . 28
5.2 L’hétérodoxie et l’institutionalisme de Jean-Charles Sismondi (1773-1842) . . . . 29
5.2.1 La pensée de Jean-Baptiste Say et des classiques . . . . . . . . . . . . . . 29
5.2.2 La critique de Sismondi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
5.2.3 La répartition des revenus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
5.3 Karl Marx : le socialisme scientifique, de la réforme à la révolution . . . . . . . . 30
5.3.1 Le matérialisme historique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
5.3.2 Théorie de la répartition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
5.3.3 Théorie de la valeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
5.3.4 La plus-value et l’exploitation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
5.3.5 Les limites des théories marxistes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
5.4 Thorstein Bund Veblen (1857-1929) et l’essor de l’institutionalisme américain . . 33
5.4.1 Contexte historique et idéologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
5.4.2 Les institutions dans l’histoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
5.4.3 Des institutions qui règentent la société . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
5.4.4 Le monde des affaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
5.4.5 Dynamique des institutions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
iv ENSAE B.Dufour–Jules
TABLE DES MATIÈRES TABLE DES MATIÈRES
v ENSAE B.Dufour–Jules
TABLE DES MATIÈRES TABLE DES MATIÈRES
vi ENSAE B.Dufour–Jules
Chapitre 1
La légitimité du commerce :
Aristote et Saint Thomas d’Aquin
1.1 Aristote
1.1.1 Contexe historique et idéologique
Aristote a vécu au IV ème siècle avant JC, au moment du déclin d’Athènes et du règne de
Périclès. Une épidémie ravage Athènes entre -430 et -426 faisant plusieurs dizaine milliers de
morts. La défaite contre Sparte lors des guerres du Péloponèse entre -431 et -404 achève de faire
perdre à Athènes sa splendeur d’antan. Le régime politique est une démocartie directe, réservée
à la minorité citoyenne. Pour accéder à la citoyenneté, il faut remplir les conditions suivantes :
1. être fils de citoyen
2. avoir effectué son service militaire
Ils ne représentent que 10 à 20% des habitants d’Athènes. En -451, les conditions d’accès à la
citoyenneté ont été restreintes. Le reste de la société se compose des esclaves, qui sont assimilés
à des biens, des femmes qui sont considérées comme mineures toute leur vie et enfin les mé-
tèques qui sont des étrangers libres. L’économie athénienne est basée sur l’esclavage. À l’époque
la conception de la société est holiste : le tout prime sur la somme des parties, le collectif l’em-
porte sur l’individu. Aujourd’hui, notre société est individualiste. Aristote développe deux points
essentiels qui demeurent important pour notre société :
1. L’Homme est un animal politique
1
CHAPITRE 1. LA LÉGITIMITÉ DU COMMERCE : ARISTOTE ET SAINT THOMAS
1.1. ARISTOTE D’AQUIN
2. La cité est naturelle
Pour Aristote, il est impossible de penser l’Homme en dehors de la cité, sinon Dieu ou les
sous-hommes. Ainsi, Aristote et ses disciples s’opposent à l’idée défendue plus tard par Épicure
défendant l’état de nature selon laquelle l’Homme est autonome. La question qui se pose dès
lors est : l’Homme est-il autonome physiquement et moralement ou a-t-il besoin d’autrui ? Pour
Aristote, la science de l’Homme, la praxis, se sécompose en 3 parties :
1. politique : activité collective
2. économique : activité domestique
3. éthique : activité individuelle, morale
L’économie, eco-nomia désigne la gestion du foyer : elle est liée à la politique, la morale, la phi-
losophie. Pour Aristote, la politique (archi-techtonique) domine. Aristote n’a pas écrit d’ouvrage
spécialisé sur l’économie.
1.1.3 Chrematistique
Aristote distingue une bonne et une mauvaise chremastistique. L’économie désigne l’art d’ad-
ministrer la maison, l’acquisition des biens (chrematistique). La bonne désigne l’art de l’acquisi-
tion naturelle des biens pour satisfaire les besoins naturels de la famille. Plusieurs méthodes sont
possibles :
1. ceuillette, chasse, pêche
2. guerre
3. rapine
4. échange (troc, monétaire)
Les échanges nécessitent la monnaie car c’est une mesure de la valeur facile à transporter. Mais
la monnaie mène à la mauvaise chrematistique, contre nature, art artificiel qui est une activité
commerciale dont le but est d’accumuler des richesse pour elle-même. Or pour Aristote :
— toute activité doit avoir une fin définie, or l’enrichissement est infini
— confusion entre fin et moyens, la monnaie devient le but de l’échange et son principe
2 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 1. LA LÉGITIMITÉ DU COMMERCE : ARISTOTE ET SAINT THOMAS
D’AQUIN 1.2. SAINT THOMAS D’AQUIN : LA PENSÉE SCOLASTIQUE
Le commerce corrompt la vertue et est donc interdit aux citoyens : elle est réservée aux métèques
car hors nature. Cette condamnation radicale inclue celle du commerce extérieur, le prêt à intérêt
et le travail salarié (forme de commerce dont le terme est l’argent). La solution pour Aristote est
l’esclavage pour éviter le salariat : "si les navettes avançaient toute seule, on aurait pas besoin
d’esclave". Les esclaves sont gagnés lors des geurres et est justifié par des arguments utilitaristes :
le travail est pénible, contre la fin du citoyen qui doit éviter les tâches dégradantes pour méditer
et philosopher. Mais le citoyen ne saurait être heureux sans disposer du nécessaire. Chacun à sa
place, la cité se développe. La nature implique une hierarchie naturelle entre les Hommes : les
citoyens ont un corps peu adapté aux tâches physiques alors que les barbares, esclavages à l’esprit
faible sont fait pour cela. Mais la nature peut engendrer des accidents, des barbares peuvent avoir
l’esprit et le corps d’un citoyen : dans ce cas, Aristote recommande au maitre d’affranchir cet
esclave.
3 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 1. LA LÉGITIMITÉ DU COMMERCE : ARISTOTE ET SAINT THOMAS
1.2. SAINT THOMAS D’AQUIN : LA PENSÉE SCOLASTIQUE D’AQUIN
— distributive
— réciproque
Thomas simplifie cette théorie en deux formes de justice : la justice générale qui est de l’ordre
de la loi (lex), règle favorable au droit commun qui s’impose à tous (code de la route). De l’autre
la justice particulière : le droit (jus) accorde à chacun ce à quoi il a droit. la justice distributive
désigne la relation de l’individu à la société, d’une partie au tout. La justice commutative désigne
la relation d’un individu à autrui, entre les parties. Ces formes de justice n’ont pas le même objet :
— commutative : échanges bilatéraux
— distributive : répartition d’un bien commun entre des ayants droits
Ces 2 types de relations économiques impliquent la théorie de la valeur. La justice commuta-
tive postule l’égalité des parties, l’absence de hierarchie. On cherche à égaliser les biens, pas
les personnes, on recherche le prix de manière arithmétique. La justice distributive prend en
compte la hierarchie, distribue les honneurs, récompense, valeur. Elle est géométrique et reflète
la hierarchie. La justice commutative inclus la justice pénale.
article 1
On suppose qu’on connaît le juste prix, au dessus duquel il ne faut pas vendre, sauf exception.
Vendre au dessus du juste prix c’est tromper son prochain, or il ne faut pas faut pas faire à autrui
ce qu’on ne veut pas qu’on nous fasse. Ceci est vrai pour l’acheteur comme pour le vendeur. La
règle qui régit l’exception est celle du préjudice : l’écart au juste prix peut couvrir le préjudice
que la vente représente pour le vendeur. Il s’agit de trouver un équilibre entre les parties de
l’échange. Cet état d’esprit révèle une pensée moderne qui anticipe les classiques : en effet,
Thomas considère l’échange comme un jeu à somme positive. Quelques siècles plus tard, les
mercantilistes s’opposeront à cette idée, car pour eux l’échange est un jeu à somme nulle : cela
justifie que la guerre commerciale (ou territoriale) soit un mode d’acquisition juste, ainsi que la
création de monopole pour conquérir des marchés extérieurs. Les mercantilistes considèrent que
l’accumulation d’or est le but du commerce.
4 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 1. LA LÉGITIMITÉ DU COMMERCE : ARISTOTE ET SAINT THOMAS
D’AQUIN 1.2. SAINT THOMAS D’AQUIN : LA PENSÉE SCOLASTIQUE
le vendeur. Mais le cas où le vendeur connait les défauts, Thomas anticipe la notion moderne
d’asymétrie d’information entrainant des comportements opportunistes et de l’anti-sélection.
Quelques siècles plus tard l’économiste Georg Akerlof étudie dans un article publié en 1970 le
marché des voitures d’occasion aux États-Unis (prix nobel 2002).
article 4 : est-il permis de vendre une chose plus cher qu’on ne l’a acheté
Thomas reprend la distinction entre bonne et mauvaise chrêmatistique et semble arriver aux
mêmes conclusion qu’Aristote : "Le négoce a quelque chose de honteux". Le régime de l’exception
permet là encore de nuancer la réponse. Il existe 3 cas d’exceptions où le gain est honnête et
licite :
— gains modérés pour soutenir sa famillle
— gains pour la chérité
— l’activité du commerçant favorise l’utilité sociale
Subvenir les besoins de sa famille rejoint le cadre de la bonne chrêmastique, la charité est une
preuve de la vertue chrétienne et l’utilité sociale rejoint la justice distributive. Ces 3 exceptions
s’articulent autour de la bonne intention : en général le commerce n’est pas une bonne intention,
sauf dans les exceptions ci-avant. Le commerce de luxe n’entre pas à priori dans les 3 exceptions,
sauf dans le cas des épices qui servent à conserver les aliments.
La pensée de Thomas amende la pensée d’Aristote sur la question du commerce. Le contexete
d’écriture est celui d’une décadence intellectuelle : retrait sur les sujets politiques et économiques.
Le commerce a perduré et se développe au XIII ème siècle : il est nécessaire d’évoluer face à
l’émergence des foires et des marchés. Il faut le justifier pour maintenir la perspective holiste,
légitimer quelque chose d’utile.
La pensée scolastique condamne l’usure, mais Thomas introduit des exceptions, compensation du
5 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 1. LA LÉGITIMITÉ DU COMMERCE : ARISTOTE ET SAINT THOMAS
1.2. SAINT THOMAS D’AQUIN : LA PENSÉE SCOLASTIQUE D’AQUIN
préjudice en se privant de la somme prêtée. Ainsi l’usure et le commerce finiront par se développer
en Occident.
6 ENSAE B.Dufour–Jules
Chapitre 2
Le XVII ème siècle marque le passage d’une société holiste à une société individualiste (Gro-
tius) avec l’avènement de la protection des droits individuels : liberté, égalité, fraternité. On
constate une opposition entre marchés et contrats avec une remise en cause de l’Ancien Régime,
la hierarchie et la monarchie absolue de droit divin. Il devient nécessaire de repenser la question
de l’obéissance au pouvoir. Le monde devient moins transcendant : Dieu n’est plus le respon-
sable. À partir du XVII ème siècle, le contrat est considéré comme le régulateur de la société :
elle existe et s’assemble par contrat, mais n’explique pas la régulation et la subsistance. Or c’est
un contrat tacite. Les économisteq émergent dans ce manque avec les écoles écossaises et physio-
crates incarnées par Hume, Smith, Quesnay. L’Homme est incomplet et satisfait ses besoins par
l’échange qui est l’essence du lien social et par le commerce qui est une instance de pacification.
Montesquieu développe la théorie du doux commerce dans L’esprit des lois : il adoucit les moeurs
et évite les geurres. Le commerce désigne ici l’activité lucrative aussi bien que l’échange. Hobbes
et Locke symbolise le passage de la domination de la politique sur l’économie à la domination
de l’économie sur la politique. À cette époque, l’influence de la religion décroit, les marchés et
le prêt à intérêt se développent. En France, le jansénisme et le cercle de Gournay représente
l’émergence de ce nouveau courant de pensée.
7
CHAPITRE 2. LA THÉORIE DU CONTRAT SOCIAL : THOMAS HOBBES ET JOHN
2.1. THOMAS HOBBES : ÉTAT DE NATURE ET ÉTAT DE GUERRE LOCKE
8 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 2. LA THÉORIE DU CONTRAT SOCIAL : THOMAS HOBBES ET JOHN
LOCKE 2.2. JOHN LOCKE : LA PROPRIÉTÉ PRIVÉE EST UN DROIT NATUREL
9 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 2. LA THÉORIE DU CONTRAT SOCIAL : THOMAS HOBBES ET JOHN
2.2. JOHN LOCKE : LA PROPRIÉTÉ PRIVÉE EST UN DROIT NATUREL LOCKE
Un évènement important secoue l’Angleterre avec le mouvement des enclosures : des terres au-
pavarant communes (commons) que chacun pouvait cultiver comme il le voulait sont données
à la propriété privée. En effet, à la fin du XVème siècle, des capitalistes plantent des barrières
(enclosures) et s’approprient ces champs pour produire de la laine britanique pour l’exporter,
car très recherchée à l’époque. Dans L’Utopie, Thomas Moore dénonce ces enclosures.
En 1642, la guerre civile ravage l’Angleterre sur fond de querelles religieuses et de mouvements
contestataires proto-communistes : les levelers et les diggers. Locke écrit en 1690 et cherche
à légitimer les enclosures sauvages, qui le seront plus tard par la loi, essentiellement par les
enclosures acts de 1774 et 1801. Ces furent possibles car la chambre des communes et la chambre
des Lords étaient constituées de propriétaires.
Mais Locke reconnait une limite à son raisonnement : en effet, chacun peut s’approprier ce qu’il
veut sans limites (on rappelle que Locke considère que la terre, à l’image du mythe de l’époque
est comme l’Amérique, c’est à dire qu’il y abondance de terres et de biens). Locke pose ainsi le
gaspillage comme limite à la propriété privée dans l’état de nature. En effet, Locke considère que
la loi de nature prévaut dès le début de l’Histoire : elle permet la propriété privée mais pose des
limites. Celui qui gâche des biens de nature passe les bornes de la modération et enfreint les lois
de nature : une telle appropriation est illégitime.
10 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 2. LA THÉORIE DU CONTRAT SOCIAL : THOMAS HOBBES ET JOHN
LOCKE 2.2. JOHN LOCKE : LA PROPRIÉTÉ PRIVÉE EST UN DROIT NATUREL
Locke applique le même raisonnement pour justifier la propriété des terres et non plus seule-
ment de ses fruits. Transformer une terre en friche en terre arable reveient à la soustraire de
l’état de nature qui est un stock commun. Locke donne une justification supplémentaire sur ce
point : celui qui travaille une terre auparavant en friche ne prive personne, tant qu’il n’y a pas
de gaspillage, mais permet d’en augmenter les rendements : elle produit plus de fruits qu’avant,
c’est donc un bienfaiteur de l’humanité (Locke ne soulève pas ici la question de la rétrocession du
supplément produit par rapport au moment où la terre était en friche). Il n’y a pas de problèmes,
car il y a abondances des terres.
La finalité de la société est de garantir la paix pour Hobbes : les Hommes abandonnent leurs
droits, que le souverain redistribue. Locke au contraire, pense que la société cherche à garantir
la propriété privée et les droits individuels (individualisme possesif). Chez Hobbes, il s’agit d’un
pacte de sujetion, alors que pour Locke, c’est un pacte d’association (on cède certains droits
naturels pour renforcer les autres). Mais dans les deux cas, le pacte est volontaire. De son côté,
Hobbes est favorable à la monarchie, alors que Locke est favorable à la séparation des pouvoirs
et une monarchie parlementaire (il inspirera Montesquieu à ce sujet). De plus, Locke prône la
fin de l’hérédité des magistratures. Enfin, Hobbes considère que Droit et loi sont deux notions
séparées, alors que pour Locke elles sont équivalentes.
11 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 2. LA THÉORIE DU CONTRAT SOCIAL : THOMAS HOBBES ET JOHN
2.2. JOHN LOCKE : LA PROPRIÉTÉ PRIVÉE EST UN DROIT NATUREL LOCKE
que le choix d’une institution pose problème, car elle avantage toujours une certaine catégorie
de personne.
Dès lors, comment choisir des institutions pourtant nécessaires à la vie en société. Le plus petit
nombre peut rester basé sur les notions de droit naturel. Rawls rejette les thèses utilitaristes, qu’il
considère comme sacrificielles et réfléchit à la bonne procédure pour amener les individus à avoir
un choix objectif et unanime. Rawls utilise la fiction méthodologique de la position originelle :
les individus sont sous un voile d’ignorance, oublient toutes leurs caractéristiques propres, pour
ne pas pouvoir connaître leur position dans les institutions qu’ils auront choisit. Ne sachant pas
leur position future, leur choix sera objectif. D’après Rawls, dans cette situation, par rationnalité
des individus et aversion pour le risque, ils adoptent une aversion pour le risque et cherche à
minimiser leur désavantage (critère minimax), on maximise la position des plus mal loti. Ceci
peut aboutir à la création d’un revenu universel et l’application des théories sociales libérales.
La conclusion de Rawls est que dans la position originelle, les institutions actuelles auraient été
choisies.
2.2.6 Conclusion
Quid d’une institution dans l’état de nature sans pouvoir commun ? Ceci est d’autant plus
vrai pour la monnaie qui repose sur un consentement mutuel, un sentiment de confiance. On a
un risque de conflit sur la valeur de la monnaie, qui doit être garantie par une autorité supra-
individuelle. Si elle fait défaut, les gens ne veulent plus de monnaie et reviennent au troc (hy-
perflation en Allemagne dans les années 1930). Locke cherche dans ce contexte à démontrer
que :
1. la propriété privée est un droit naturel
2. l’inégalité dûe à la possesion est naturelle
3. le but de la société est de garantir la propriété
Tout ceci se déroulant dans un contexte d’enclosures sauvages et de colonisation. Pour Locke, le
travail est le fondement de la valeur des marchandises. Cette idée est déjà présente en 1662 dans
Le traité des taxes du mercantiliste Petty.
Enfin, Hobbes et Locke se différencie par l’inversion du rapport de force entre politique et
économique. En effet chez Locke, l’économie commence à s’émanciper de la politique. Chez
Hobbes, il n’y a pas d’économie sans politique, alors que c’est l’inverse chez Locke. Pour Hobbes,
l’activité économique est impossible dans l’état de nature, alors que chez Locke l’échange et la
propriété précèdent l’état social.
12 ENSAE B.Dufour–Jules
Chapitre 3
Mais un jour, les abeilles ont peur du jugement dernier et deviennent vertueuses, mais la ruche
dépérit. Ainsi, la morale privée n’a rien à faire dans la réflexion économique. Smith reprend cette
analyse sur la sidtinction en terme de séparation de la morale et de l’éonomie dans le champ de
la pensée. En effet, la pensée économique ne doit pas mettre en jeu de jugement de valeur. Mais
Smith parle de "système licencieux du débauché Mandeville", car de dernier nie la différence
entre vice et vertue, qui n’est qu’un instrument de domination. Smith distingue à ce sujet le
désir d’éloge en soi er le désir d’être digne d’éloge.
13
3.2. LES OPPOSANTS D’ADAM SMITH : LES PHYSIOCRATES ET LES
MERCANTILISTES CHAPITRE 3. ADAM SMITH : L’ÉCONOMIE FACE À LA MORALE
Adam Smith est un philosophe des lumières, spécialisé dans la morale. À l’époque, il n’y a pas de
distinctions entre philosophie, physique et sciences sociales. Smith n’a jamais enseigné l’économie,
il était professeur de logique et de droit. Son ouvrage majeur est La richesse des nations. Il a été
caricaturé en philosophe de l’égoïsme, ce qui est faux : dans La théorie des sentiments moraux
vise à contredire le rationalisme et l’égoïsme. Smith est un sentimentaliste (école écossaise) comme
Hutlhelson et Hume, pour eux le jugement moral est immédiat sans réflexions. Smith utilise le
principe de sympathie : le sens moral se construit dans l’interraction que nous avons avec les
autres : on se projette dans l’autre pour imaginer les sentiments que l’on ressentirait à sa place.
Il introduit le spectateur impartial, anticipation de la notion de surmoi freudien : on juge les
autres qui nous juge aussi. Sa philosophie n’est donc pas égoïste : à partir de ces différentes
considérations, il explique la propriété privée et le droit contractuel. Contrairement aux clichés,
Smith ne défend pas les capitalistes, rentiers qui avec les commerçants recherchent les monopoles.
La concurrence fait baisser les prix, ce qui est bon pour la société. De plus Smith ne veut pas
d’un État minimal, il ne le cantonne pas aux fonctions régaliennes.
14 ENSAE B.Dufour–Jules
3.3. LA PENSÉE ÉCONOMIQUE D’ADAM SMITH : LIBÉRALISME, ÉTAT, MAIN
CHAPITRE 3. ADAM SMITH : L’ÉCONOMIE FACE À LA MORALE INIVISIBLE
15 ENSAE B.Dufour–Jules
3.3. LA PENSÉE ÉCONOMIQUE D’ADAM SMITH : LIBÉRALISME, ÉTAT, MAIN
INIVISIBLE CHAPITRE 3. ADAM SMITH : L’ÉCONOMIE FACE À LA MORALE
Les infrastructures qui favorise le commerce : routes, parts ... Smith se méfiants des capitalistes,
il préfère que l’État entretiennent les infrastructures. En minimisant les coûts, les capitalistes
risquent de rendre moins performantes ces infrastructures. Les travaux d’Élodie Bertrand portent
sur les phares britanniques privatisés : ils étaient soit mal entretenus, soit utilisé pour faire échouer
les bateaux et les pillier. Ceci est une remise en cause du théorème de Coase. Cette défnition de
Smith des "services publics" est très vaste et peut inclure la culture et la santé. Smith n’est pas
dogmatique et il est libéral (social-libéral). La liberté n’est pas une fin en soi, c’est un moyen
d’atteindre le plus grand bonheur du plus grand nombre. Si la liberté menace cet objectif, il faut
la restreindre.
Dans son article "Adam Smith et le laisser faire", Jacob Viner décrit en 50 pages les différentes
exceptions à la liberté chez Smith (pragmatique) :
— monopole provisoire, encourager les investissements risqués.
— impôts sélectifs : vision paternaliste, taxer le whisky, mauvais pour les travailleurs, sub-
ventionner le hareng et la bière qui nourissent les travailleurs, orienter les comportements
de consommation.
— restriction de la liberté d’émission de billet de banque, suite au fiasco de l’expérience
française.
— maximum légal du taux d’intérêt : débat avec Jérémie Bentham. Chez Smith, il n’y a
pas d’individus rationnel, il étudie les caractères. Chez les investisseurs il y a différents
caractères : les plus prudents et les faiseurs de projet (risque). Les faiseurs de projet sont
ambitieux, veulent s’enrichir vite et prennent des risques. Le banquier prête toujours au
plus grand taux (celui des faiseurs de projet) qui risque d’évincé les plus prudents. Certes,
grâce aux faiseurs de projet changent le monde, mais ces projets font souvent faillites. Il
faut continuer de prêter à ceux qui font tourner l’économie courante.
— impôt progressif : les marchands profitent plus des infrastructures, ils doivent donc payer
plus. L’État est au service, ils doivent donc payer plus.
16 ENSAE B.Dufour–Jules
3.4. LA THÉORIE DE LA VALEUR CHEZ ADAM SMITH : MESURE ET
CHAPITRE 3. ADAM SMITH : L’ÉCONOMIE FACE À LA MORALE DÉTERMINANTS
17 ENSAE B.Dufour–Jules
3.4. LA THÉORIE DE LA VALEUR CHEZ ADAM SMITH : MESURE ET
DÉTERMINANTS CHAPITRE 3. ADAM SMITH : L’ÉCONOMIE FACE À LA MORALE
moyen terme est le travail. C’est la mesure de la valeur réelle (la valeur nominale se mesure en
monnaie), le travail a le même coût (effort de travail) invariant dans le temps. Cette vision sera
celle des classiques, sauf pour Jean-Baptiste Say.
Dans l’État avancé, il y a une appropriétion des terres et du capital : c’est l’accumulation
primitive. Smith ne se prononce pas sur les causes de cette accumulation. La société est composée
de 3 classes :
— travailleurs , L
— capitalistes , K
— propriétaires , terre
Il y a désormais 3 facteurs de production. Le produit du travail ne revient plus en entier aux
travailleurs : double prélèvement du produit du travail au profit de la rente et du profit. Ainsi, il
n’est plus possible d’explique la valeur par le travail, c’est la théorie de la composante additive
des prix, il y a 3 déterminants :
— w , le salaire
— π , le profit
— la rente
sont les causes de la valeur :
V = w + π + rente
La mesure de la valeur reste le travail commandé.
Smith État primitif État avancé
Mesure de Valeur Travail commandé Travail commandé
Causes de la valeur Travail incorporé 3 composantes du prix : w + π + rente
La rente est l’autre prélèvement fait sur le travail des travailleurs. C’est un revenu déconnecté
du travail, il est destiné à la classe oisive des rentiers selon l’expression de Smith. Il considère la
propriété privée comme un état de fait et ne cherche pas à en trouver les causes ou la justifier :
il faut lui demander l’autorisation et lui rétrocéder en échange de l’utilisation de son bien une
partie de son tavail : c’est la rente.
18 ENSAE B.Dufour–Jules
3.4. LA THÉORIE DE LA VALEUR CHEZ ADAM SMITH : MESURE ET
CHAPITRE 3. ADAM SMITH : L’ÉCONOMIE FACE À LA MORALE DÉTERMINANTS
Smith considère les trois classes comme étant interdépendantes : il adopte un point de vue
subversif pour l’époque en faisant une très nette distinction entre possédants et non possédants.
Pour chaque revenu, il y a un taux naturel (normal) τ de salaire, profit et de rente :
C’est le prix en valeur naturel de la théorie classique. Ricardo justifiera plus tard ce taux de profiy
par la concurrence (théorie de la convergence des prix naturels. Adam Smith est plus méfiants vis
à vis des capitalistes : en effet il considère que ce sont des comploteurs qui cherchent à faire baisser
le taux de salaire. On constate alors, que si τ (w) augmentent alors V augmente : l’ensemble des
prix de l’économie augmente : c’est le phénomène de l’inflation.Si seule les quantités varient alors
seul le prix du bien considéré change. Smith considère que les revenus entre chaque partie sont
indépendants.
Adam Smith s’intéresse au sort des ouvriers et dénonce les rapports de force dont ils sont
victimes et l’origine du profit et des rentes (prélèvement sur le travail des ouvriers), mais il reste
optimiste. La période durant laquelle écrit Smith est une péridode de progrès technique et de
progrès des libertés. Pour Smith, on passe d’un état primitif où les individus sont égaux à une
situation d’état avancé où apparaissent les inégalités (on passe d’une société juste à une société
injuste) mais c’est un mal pour un bien. En effet, dans l’état avancé, il y a des inégalités, mais
tout le monde ou presque est riche : " le travailleur le plus pauvre de Grand-Bretagne est dans
un plus grand confort que le plus puissant des rois africains qui a droit de vie ou de mort sur
ses sujets". Pour Smith, le plus pauvre de l’état avancé est plus riche que le plus riche de l’état
primitif. Une société inégalitaire permet de produire plus de richesse qu’une société égalitaire.
19 ENSAE B.Dufour–Jules
3.4. LA THÉORIE DE LA VALEUR CHEZ ADAM SMITH : MESURE ET
DÉTERMINANTS CHAPITRE 3. ADAM SMITH : L’ÉCONOMIE FACE À LA MORALE
20 ENSAE B.Dufour–Jules
Chapitre 4
À l’inverse de Smith, Ricardo défend les capitalistes, mais combat comme lui les rentiers. Il
pense que les travailleurs et les capitalistes peuvent avoir des intérêts communs lors des phases
de croissance de l’économie. Ricardo commence par remettre en cause la théorie de la valeur de
Smith, car elle est circulaire :
K f ixe = L indirect
21
CHAPITRE 4. DAVID RICARDO : THÉORIES DE LA VALEUR ET DE LA
4.2. CONVERGENCE DES PRIX NATURELS RÉPARTITION
Dans l’état primitif il y a déjà des travailleurs et des capitalistes, donc des classes sociales. L’état
pimitif est confondu avec l’état avancé, la théorie de la valeur est donc la même dans les deux
cas. Le capitaliste a travaillé et épargné prudemment en capital plutôt que de tout consommer.
En tout temps et en tout lieu, Ricardo considère que la valeur est déterminée et mesurée par la
somme des quantités de travail direct et indirect incorporé dans leur production et leur transport
sur le lieu de vente. À l’inverse de Smith qui considère que le capital est une avance indissociable
du temps, Ricardo assimile le capital à du travail (déconnecté du temps).
Ricardo illustre son propos avec l’exemple des bas de cotton on se projettant dans un état
encore plus avancé que celui dans lequel il vit (marquant une certaine ironie vis à vis des consi-
dérations smithiennes). On ne doit pas compter tout le travail indirect émanant du capital, car
celui ci peut reservir. Il y a tellement d’information à connaître, qu’il est impossible en pratique
dans cette théorie de connaître la valeur exacte d’une marchidise. On ne peut en connaître qu’une
valeur approchée, on ne peut pas calculer de prix absolu. Ricardo s’inscrit dans une perspective
Newtonienne et s’intéresse à la question des prix relatifs :
p1
ef f et : cause : différence de travail apporté
p2
Ainsi, Rocardo renonce à l’explication du profit de Smith et se ramène à du travail passé, c’est
une vision idyllique, sans rapport de force entre travailleurs et capitalistes.
22 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 4. DAVID RICARDO : THÉORIES DE LA VALEUR ET DE LA
RÉPARTITION 4.3. LA THÉORIE DE LA RÉPARTITION
On a une uniformisation des taux de profits entre les deux secteurs. Le prix naturel ne varie
que si les conditions de production varie. Avec la concurrence il y a convergence vers la valeur
fondamentale, c’est une analyse dynamique, vision plus réaliste que l’analyse contemporaine.
Smith est un empiriste alors que Ricardo est plus abstrait. Mais combien de temps est nécessaire ?
Ricardo suppose que PN est constant ce qui est vrai à court terme. À moyen terme, PN bouge
car la technologie et la division du travail change.
Les agents influent sur les prix, mais doivent croire qu’ils niont aucune influence dessus. De plus,
le déplacement de capital n’implique pas la notion de libre entrée. Les acteurs ne changent pas
de production, donc de machines. Les firmes ajustant avec l’intermédiation bancaire au niveau
global. Aucun capitaliste ne change de secteur, les capitaux globalement, les uns empruntent
moins car ils produisent moins et d’autres qui ont plus de débouchés que les autres. Ce chapitre
est fondamental, il illustre 3 vertues de la concurrence :
— la concurrence assure la convergence vers la valeur fondamentale
— uniformisation des taux de profits, s’il rémunère un risque, il doit y avoir un même taux
— le marché assure l’adéquation de l’offre globale aux chocs de demande, choc endogénéisé
par le marché, théorie du consommateur roi, le marché adapte l’offre aux changements
des goûts des consommateurs.
23 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 4. DAVID RICARDO : THÉORIES DE LA VALEUR ET DE LA
4.4. DYNAMIQUE DE L’ÉTAT STATIONNAIRE RÉPARTITION
2. La polulation augmente. On doit exploiter toutes les terres de rang 1 T 1 et une partie des
terres de rang inférieur T 2 :
La rente assure l’uniformité des τx (π) dans l’agriculture. Cette théorie de la rente se résume
en trois points :
— jamais de rente sur les terres les mains fertiles (marginales)
— le prix naturel du blé est le coût de production sur les terres marginales
— la rente est la différence entre prix naturel et coût de production sur cette terre
Le salaire est le prix du travail, déterminé par son coût de production, il faut produire un
travailleur : entretenir l’espèce, subsistance de la famille du travailleur. Les salaires sont versés
en premier, le profit est un résidu, car le salarié est démuni et doit manger. Il n’y a pas de théorie
du profit chez Ricardo car c’est un résidu qui s’uniformise.
24 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 4. DAVID RICARDO : THÉORIES DE LA VALEUR ET DE LA
RÉPARTITION 4.4. DYNAMIQUE DE L’ÉTAT STATIONNAIRE
25 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 4. DAVID RICARDO : THÉORIES DE LA VALEUR ET DE LA
4.4. DYNAMIQUE DE L’ÉTAT STATIONNAIRE RÉPARTITION
26 ENSAE B.Dufour–Jules
Chapitre 5
Socialistes et institutionalistes
27
5.1. LES PREMIERS SOCIALISTES : RÉFORMER LA SOCIÉTÉ POUR LA RENDRE
MEILLEURE CHAPITRE 5. SOCIALISTES ET INSTITUTIONALISTES
28 ENSAE B.Dufour–Jules
5.2. L’HÉTÉRODOXIE ET L’INSTITUTIONALISME DE JEAN-CHARLES SISMONDI
CHAPITRE 5. SOCIALISTES ET INSTITUTIONALISTES (1773-1842)
29 ENSAE B.Dufour–Jules
5.3. KARL MARX : LE SOCIALISME SCIENTIFIQUE, DE LA RÉFORME À LA
RÉVOLUTION CHAPITRE 5. SOCIALISTES ET INSTITUTIONALISTES
30 ENSAE B.Dufour–Jules
5.3. KARL MARX : LE SOCIALISME SCIENTIFIQUE, DE LA RÉFORME À LA
CHAPITRE 5. SOCIALISTES ET INSTITUTIONALISTES RÉVOLUTION
A −→ M −→ A0 , A0 > A
31 ENSAE B.Dufour–Jules
5.3. KARL MARX : LE SOCIALISME SCIENTIFIQUE, DE LA RÉFORME À LA
RÉVOLUTION CHAPITRE 5. SOCIALISTES ET INSTITUTIONALISTES
pl
e=
v
le capitaliste cherche à maximiser e, c’est l’exploitation capitaliste marxiste. Il n’y a pas de
vol, v est payé à sa juste valeur. Il y a une contradiction entre les intérêts des ouvriers et des
capitalistes. L’ouvrier a besoin de travailler pour sa subsistance, pas au delà. Le patron le paie
pour sa subsistance mais veut le faire travailler plus. Les conditions logiques de l’exploitation sont
une concentration des moyens de production d’un côté et de l’autre des ouvriers (pas des esclaves),
sans moyens de production. Les ouvriers doivent alors se salarier, il n’y a pas d’arbitrage travail-
loisir comme en microéconomie. Historiquement, Marx réfute la thèse de la vertue d’épargne. Il
y a eu un coup de la part de certains, il fait référence aux enclosures, c’est la naissance de la
pauvreté. Il distingue trois formes de plus-value :
— absolue : durée, intensité du travail
— extra : innovation
— relative : baisse du coût du travail
Marx cherche à comprendre le fonctionnement de l’entreprise. À long terme, le système est en crise
et finit par s’écrouler. Marx s’oppose à la loi des débouchés. Théorie de la croissance endogène,
le progrès technique vient de la concurrence, résultat de sa logique. Mais l’innovation génère la
crise, contradictions.
— innovation : baisse des profits. π vient de l’emploi des ouvriers, si on les remplace par
des machines, π diminue, on tue la poule aux oeufs d’or. Fin de l’investissement, crise de
surproduction.
— la croissance économique l’accumulation des richesses et du capital implique une hausse
des salaires, donc une baisse des profits. Le système crée les conditions de la crise (idée
déjà présente chez Smith). Mais le système génère aussi la solution : si l’investissement
diminue, alors la firme peut licencier. Le chômage, bien que Marx n’emploie pas ce terme
à l’époque mais parle plutôt d’armée de réserve du capitalisme, relache la pression sur les
salaires et permet au système de fonctionner. Il y a une tendance endogène à l’innovation,
donc à la baisse des salaires. En effet, le progrès technique permet d’utiliser moins de
travail en le substituant par du capital.
— baisse naturelle du taux profits :
pl
r=
c+v
— l’armée de réserve est une critique de Malthus et de la surpopulation absolue, cette surpo-
pulation est relative : elle est à la base du chômage qui est nécessaire pour faire pression
à la baisse sur les salaires et permettre au système de tenir.
— polarisation de la société entre différentes classes sociales : ouvriers, petite bourgeoisie,...,
grande bourgeoisie. Marx pense qu’à terme le système fait disparaitre les classes intermé-
diaires. Les firmes les plus riches rachètent les plus petites, grossissent par accumulation
du capital : le capitaliste propriétaire de l’entreprise rachétée se retrouve ouvrier (il doit
nourrir sa famille) ce qui mène à la disparition des classes intermédiaires.
— paupérisation de la classe ouvrière : les salaires baissent et les ouvriers sont toujours plus
nombreux.
— accumulation du capital : l’innovation, les rendements croissants rendent les firmes tou-
jours plus grosses.
32 ENSAE B.Dufour–Jules
5.4. THORSTEIN BUND VEBLEN (1857-1929) ET L’ESSOR DE L’INSTITUTIONALISME
CHAPITRE 5. SOCIALISTES ET INSTITUTIONALISTES AMÉRICAIN
On finit alors dans un affrontement entre une masse d’ouvriers et les quelques capitalistes restant
(voire un seul).
33 ENSAE B.Dufour–Jules
5.4. THORSTEIN BUND VEBLEN (1857-1929) ET L’ESSOR DE L’INSTITUTIONALISME
AMÉRICAIN CHAPITRE 5. SOCIALISTES ET INSTITUTIONALISTES
Il rejette Marx pour sa vision de l’histoire orientée vers une fin idéale : le communisme. Veblen
rejette cette approche animiste, tout comme il rejette la notion d’équilibre des classiques et des
néo-classiques qui là encore est un horizon idéal.
Objectifs de Veblen
Veblen assimile la société à un individu. Il veut montrer que l’économie est structurée par
des institutions opaques et très complexes. On arrive difficilemment à comprendre leur logique.
Il faut retracer l’évolution des institutions et faire de l’histoire. Il s’inspire de la démarche dar-
wienne : Veblen rejette l’approche physique et préfère une approche biologique de l’économie (il
ne fait pas du darwinisme social cependant), il adopte une approche évolutionnaire, pas évolutio-
niste. Ici, l’institution est l’espèce à étudier : il définit l’institution comme une habitude mentale
prédominante dont il étudie les aspects temporels suivants :
— transmission des caractéristiques
— variation, comment évolue-t-elle
— sélection
34 ENSAE B.Dufour–Jules
5.4. THORSTEIN BUND VEBLEN (1857-1929) ET L’ESSOR DE L’INSTITUTIONALISME
CHAPITRE 5. SOCIALISTES ET INSTITUTIONALISTES AMÉRICAIN
Veblen, la rivalité corrompt la nature humaine. La curiosité gratuite permet de produire plus
que nos besoins (pas de pénurie chez Veblen). Larareté est crée par l’organisation de la société.
Il y a une rivalité pour le surplus, culture fondée sur la propriété. La société est animée par une
culture de l’exploit, l’objectif est de dominer les forces animées : tuer un ours, piller ses voisins.
Ces activités sont supérieures au fait de tanner la peau de l’ours qui est une activité relevant du
travail. Le travail consiste à dominer l’inanimé, ce qui s’oppose à la domiantion de l’animé qui
est plus valorisé.
La mode
Veblen étudie des institutions très différentes de notre société comme la mode, le sport ou
l’université. La mode est un signal de consommation et de loisir : le corset empêche de faire le
moindre effort utile : il incite au loisir, mais il coûte cher, il relève donc aussi de la consommation,
la consommation déléguée à la femme (car c’est elle qui porte le corset). La mode reflète la
distinction entre les sexes au coeur de l’institution. Le corset est une mutilation alors que l’homme
est dans la symbolique du guerrier. Le sport est vecteur des formes archaïques de l’institution :
fraude, triche, aggressivité, volonté de détruire l’adversaire. La mode insulte l’instinct du travail
efficient : c’est pour ça qu’elle change.
35 ENSAE B.Dufour–Jules
5.4. THORSTEIN BUND VEBLEN (1857-1929) ET L’ESSOR DE L’INSTITUTIONALISME
AMÉRICAIN CHAPITRE 5. SOCIALISTES ET INSTITUTIONALISTES
Le socialisme de Veblen
Veblen est un socialiste, il se dit scientifique et rejette les jugements de valeurs. Le stade
pacifique est désirable mais anéanti par la culture de la propriété privée. Mais peut-on y revenir ?
Il trace des pistes, il pense que la grande bourgeoise et le féminisme ou une révolution menée
par les ingénieurs peuvent permettre de faitre évoluer les institutions. Les ingénieurs sont en
charge de la production, ils savent rendre la machine efficace par l’instinct du travail efficient.
Ils rejettent les valeurs des propriétaires, ce qui résultent en des conflits et donnera naissance à
des soviets d’ingénieurs. Veblen reconnait que ce n’est qu’une supposition et qu’il est possible
qu’elle ne se réalise pas, car ils sont soumis aux institutions de la propriété. Le New Deal n’est
pas mené par les keynésiens, mais par les institutionalistes héritiés de Veblen.
Veblen ne milite pas dans une Internationale, il mène une critique du système et construit,
pense une alternative. Veblen inspire une génaration d’économiste scientifique qui s’opposent
aux néo-classiques qui ne se basent pas sur les faits concrets et développent une théorie trop
abstraite. Veblen veut reconstruire une pensée basée sur la psychologie et les faits. Le courant
institutionaliste a une forte influence aux États-unis jusqu’en 1940 : il est le premier courant à
étudier les fluctuations et les cycles économiques avec Mitchell et le New Deal. La révolution
keynésienne et le développement de l’économétrie dans les années 1940 donneront tort à ce
courant et lui feront perdre de l’influence.
36 ENSAE B.Dufour–Jules
Chapitre 6
Marshall et Walras aborde l’économie différemment. À la fin du XIX ème siècle, Jevons,
Menger et Walras découvrent simultanément le lien entre utilité marginale et prix. La question
centrale de l’économie change et Walras est un des penseurs essentiels de cette école de pensée.
Les précurseurs
La rupture n’est pas totale avec leurs prédécesseurs. L’idéee de la connexion entre le plaisir
que procure une marchandise et son prix n’est pas nouvelle. Jérémie Bentham développe déjà
l’idée que l’individu est un calculateur des peines et des plaisirs.
37
CHAPITRE 6. LES NÉOCLASSIQUES : LA RÉVOLUTION MARGINALISTE ET LE
6.1. LA RARETÉ ET LE MARCHÉ DÉVELOPPEMENT DE LA MICROÉCONOMIE
Ces précursuers n’utilisent pas encore les mathématiques. Condorcet, Cournot, Gossen et Thunen
essaient d’introduire les mathématiques en économie. Cournot développe la première théorie de
la concurrence imparfaite (il introduit des notions se rapprochan de l’équilibre de Nash). Dupuis
s’intéresse aux péages des pont et à l’utilité des travaux publics et développe la notion de surokus.
Walras sera inspiré par Cournot qui était un ami de son père.
L’école autichienne
Menger rejette les mathématiques et préfère une approhe plus philosophique de l’économie : il
étudie les discontinuités de l’économie. Or, les dicontinuités sont des phénomènes qui ne peuvent
être étudiés par le calcul différentiel ! Menger étudie également la théorie de l’information, peu
développée à l’époque, les institutions et le marché : il échaffaude une théorie de la naissance
de la monnaie. Au départ, les membres de l’école autrichienne n’était pas toujours libéraux.
Mais avec le temps, elle devint le temple de l’ultralibéralisme. Hayek et Mises furent les pères
du néo-libéralisme moderne. Schumpeter s’oppose au New Deal et développe une analyse très
sophistiquée. Ce sont des penseurs hétérodoxes, car il rejette les mathématiques qui étaient l’école
de pensée dominante à l’époque.
L’école anglaise
Il y a des oppositions très fortes chez les descendants de Marshall. Kaldor et Robinson sont très
à gauche, parfois proches de Karl Marx. Knight et Viner vont eux former les membres de l’école
de Chicago. Avec Hayek, les membres de cette école refonde le libéralisme après la domination
keynésienne. Ce sont des marchalliens de droite, notamment avec le courant monétariste.
L’école de Lausanne
L’approche Walrasienne est centrée sur les mathématiques.
38 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 6. LES NÉOCLASSIQUES : LA RÉVOLUTION MARGINALISTE ET LE
DÉVELOPPEMENT DE LA MICROÉCONOMIE 6.2. ALFRED MARSHALL (1842-1924)
Deux raisons explique ce rapport complexe aux mathématiques : Marshall veut s’adresser à
un large public qui ne connaît pas toujours les mathématiques qu’il utilise. De plus, et surtout,
les mathématiques réduisent la complexité du réel (les mathématiques de l’époque sont issuent
du développement de la mécanique classique). Elles doivent être utilisées comme une première
approximation, qui risque de faire oublier cette complexité. L’équilibre général est une notion
stérile pour Marshall, les équations de Walras sont trop simplificatrices, cette théorie est beaucoup
réductrice pour Marshall. Les mathématiques sont restreint à un usage privé de recherche. Sa
pensée mathématiques est résumée dans un appendice de 20 pages. La source d’inspiration est
Darwin : sur le marché il y a une sélection sur les firmes, certains se dévellopent et d’autres
meurent. Keynes et Friedman reprendront cette analyse.
39 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 6. LES NÉOCLASSIQUES : LA RÉVOLUTION MARGINALISTE ET LE
6.2. ALFRED MARSHALL (1842-1924) DÉVELOPPEMENT DE LA MICROÉCONOMIE
ne peut pas rendre compte de toute la complexité du marché. Marshall conçoit la possibilité de
l’équilibre général (il le développe dans le cadre du commerce international), mais il considère de
telles théories comme trop abstraites, loin des réalités. Marshall étudie des marchés indépendants
les uns après les autres. Chaque marché a ses propres spécifités, ses propres caractéristiques,
on peut donc les regarder séparemment. Le rapport aux faits et aux données statistiques est
essentiel : on s’intéresse aux industries.
Autre outils
Marshall recourt également aux notions maintenat bien inscrite dans le cadre microécono-
mique :
— élasticité
— surplus du consommateur (introduit par Dupuis)
— analyse dynamique : jour de marché, court et long terme
— courbe de coûts (théorie de la firme)
L’approche Marshallienne / Friedmanienne de la microéconomie est à la base de l’approche de
Mankiw dans son manuel Principes de l’économie.
Chaque agent fait ce raisonnement de détermination des courbes d’offre, de demande et du prix
d’équilibre. Si tout le monde anticipe correctement, seul le prix d’équilibre apparaît dans les
échanges sur le marché : £ 36 dans l’exemple de Marshall, sinon il n’y a pas d’offreur ou de
40 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 6. LES NÉOCLASSIQUES : LA RÉVOLUTION MARGINALISTE ET LE
DÉVELOPPEMENT DE LA MICROÉCONOMIE 6.2. ALFRED MARSHALL (1842-1924)
demandeur sur le marché. On atteint l’équilibre où personne n’a pas intérêt de changer son
comportement.
41 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 6. LES NÉOCLASSIQUES : LA RÉVOLUTION MARGINALISTE ET LE
6.3. LÉON WALRAS (1834-1910) DÉVELOPPEMENT DE LA MICROÉCONOMIE
Le rôle de l’État
L’État a un rôle majeur car il garantit l’égalité des chances au départ. Deux interventions
majeures doivent guider l’action de l’État. Tout d’abord, Walras prône la nationalisation des
terres (idée du père de Walras). La Terre n’est pas le fruit du travail, elle ne se fabrique pas.
L’État les loue aux particuliers : l’État en retire une rente lui permettant de supprimer les
impôts. Walras se revendique socialiste : s’il n’y a plus d’impôts, les plus pauvres accèdent à
l’épargne donc au capital. Ainsi, la séparation entre capital et travail qui avait cours avant n’a
plus lieu d’être. L’autre domaine d’intervention de l’État est l’éducation, qui doit être gratuite
et obligatoire pour tous : chacun doit recevoir une dotation identique en matière d’éducation.
Un cadre idéal
La course démarre, chacun produit et échange des biens pour vivre. Le marché résout le
problème entre offre et besoin. Walras veut montrer que le marché est neutre : il ne créer ni ne
fait baisser les inégalités. Jaffé, le traducteur de Walras en anglais parle d’une "utopie réaliste".
Il décrit un cadre idéal jamais observé, modèles décrivant une économie juste et parfaite. Les
concepts de base de l’économie parfaite se déduisent de l’observation du réel, puis on reconstruit
l’économie parfaite. Walras va à la Bourse de Paris : "vaste clameur", "chaos" mais elle est
pourtant régie par des principes, la loi de l’offre et de la demande, la variation des prix.
42 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 6. LES NÉOCLASSIQUES : LA RÉVOLUTION MARGINALISTE ET LE
DÉVELOPPEMENT DE LA MICROÉCONOMIE 6.3. LÉON WALRAS (1834-1910)
Marshall confronte la théorie au réel, chez Walras, le test empirique d’une théorie n’a pas de
sens. La théorie n’est pas descriptive chez Walras. Le modèle IS/LM est marshalien (Keynes) car
il veut décrire la réalité. L’équilibre général décrit une situation idéale qui ne correspond pas au
réel. La concurrence imparfaite nécessite une autorité de la concurrence pour tendre de nouveau
vers le cadre parfait dans l’approche walrasienne.
Pour affronter la complexité du réel, Walras regarde un système de marchés et leurs inter-
dépendances. L’économie est un système de marchés non indépendants. Pour simplifier, l’idée
est de prendre un système de marchés à deux biens, le plus simple, où on échange ces deux
marchandises : c’est une économie de troc. Chez Walras :
Chez Marshall la monnaie est déjà présente (volonté de réalisme) : on échange des biens contre
de la monnaie. Chez Walras, on introduit la monnaie à la fin du raisonnement.
Oa = Db pb
Da Db = Oa Ob
43 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 6. LES NÉOCLASSIQUES : LA RÉVOLUTION MARGINALISTE ET LE
6.3. LÉON WALRAS (1834-1910) DÉVELOPPEMENT DE LA MICROÉCONOMIE
(
Ob < Db ⇒ pb &⇒ Db %, Ob ?
Oa < Da
Au delà de deux marchandises, Walras ne démontrera aucun résultat. Le défi pour ses succes-
seurs a été de démontrer l’existence d’un équilibre pour plus de deux biens. Mais on n’a pas
nécessairement unicité de l’équilibre :
44 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 6. LES NÉOCLASSIQUES : LA RÉVOLUTION MARGINALISTE ET LE
DÉVELOPPEMENT DE LA MICROÉCONOMIE 6.3. LÉON WALRAS (1834-1910)
En effet, plusieurs équilibres sont possibles : ils peuvent impliquer des fluctuations et les cylcles
macroéconomique, mais ils ne sont pas pratique pour réaliser une étude statique et même dyna-
mique. Plusieurs équilibre implique qu’il a nécessairement des équilibres instables, l’équilibre B
sur le schéma. Walras pense cependant que plus il y a de marchandises, moins on peut rencontrer
d’équilibre multiple.
Le tâtonement walrasien
Le processus qui mène à l’équilibre est le tâtonement walrasien. Walras s’inspire de la Bourse :
l’échange est suspendu avant l’équilibre général, avant l’accord sur le prix d’équilibre. Il suppose
l’existence d’intermédiaires (courtiers), les crieurs fixent les prix selon les ordres qu’ils reçoivent.
C’est l’idée du commissaire priseur walrasien qui joue le rôle d’intermédiaires entre vendeurs
et acheteurs. Pour trouver l’équilibre, le commissaire priseur énonce les prix. Selon les prix, les
consommateurs et les entreprises expriment l’offre et la demande au commissaire priseur qui
ajuste les prix. On recommence plusieurs fois et on obtient un ajustement graduel des prix,
mais cela effece-t-il les déséquilibres ? On pourrait y voir une contradiction avec le modèle de
spéculation boursière sur lequel se base Walras, car les prix y changent en permanence sans
jamais atteindre un équilibre. Le facteur important dans ce cas et qui justifie la théorie idéale de
Walras est l’évolution de l’information des agents au cours du temps.
45 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 6. LES NÉOCLASSIQUES : LA RÉVOLUTION MARGINALISTE ET LE
6.3. LÉON WALRAS (1834-1910) DÉVELOPPEMENT DE LA MICROÉCONOMIE
L’autre réussite de la recherche walrasienne est d’avoir montrer qu’un équilibre walrasien est un
optimum de Pareto, situation optimale à l’équilibre où les agents n’ont plus intérêt à échanger.
En effet si ils le fassaient, l’un des agents perdrait de l’utilité.
L’échec des théories walrasien réside dans l’incapacité d’établir la stabilité de l’équilibre. Avec
le développement de l’étude des systèmes d’équations différentielles , Herbet Scarff simule des
modèles walrasien et trouve des contre-exemples.
Entre 1973 et 1974, Sonnenschein, Mantel et Debreu ont montré que dans le cas d’une offre
et d’une demande agrégée quelconque, en général l’équilibre était instable (équilibres multiples
stables et non stables). Le problème était déjà identifié par Walras dans le système à deux biens,
en raison des effets revenus et substitutions, car l’effet revenu cause des portions décroissante.
46 ENSAE B.Dufour–Jules
Chapitre 7
Le keynésianisme se développe dans les années 1930 sous l’impulsion de John Maynard
Keynes.
La crise de 1929 débute en août avec une baisse des prix industriels puis s’aggrave evec une chute
des cours de bourse. 4 années de récession s’en suivront avec des niveaux records de 10 %. À titre
de comparaison, la récession française de 2009 n’a atteint un niveau que de -2,9 % seulement. La
crise de 29 fut aggravée par par des faillites bancaires contagieuses et un chômage de 20 %. La
crise devient mondiale, il faut attendre 1942 pour sortir de la crise et revenir à la tendance aux
47
CHAPITRE 7. JOHN MAYNARD KEYNES : LA RÉVOLUTION KEYNÉSIENNE ET LE
7.1. LA GRANDE DÉPRESION DÉVELOPPEMENT DE LA MACROÉCONOMIE
États-Unis, en raison d’une rechute en 1937. Hoover et la FED décide de ne pas intervenir, ou
de mal intervenir. Ils pensent que le gouvernement coordonne l’action des entreprises. Il double
les dépenses publques, qui étaient à 2 % du PIB en 1932 : mais en voulant rester à l’équilibre
budgétaire, il augmente les impôts.
Lors de son élection, Roosevelt reproche à Hoover d’avoir laissé filer le déficit budgétaire : il
souhaite revenir à l’équilibre budgétaire. En fait, il continue de faire du déficit, mais créer des
impôts nouveaux avec hausse des taux d’intérêts, provoquant une nouvelle récession en 1937.
Avant 1937, le new deal de Roosevelt n’est pas keynésien mais d’inspiration institutionaliste.
Le véritable plan de relance américain sera la seconde guerre mondiale : la course à l’armement
permet la sortie de crise et la relance de l’économie. Hansen et Samuelson utilise la théorie
keynésienne pour critiquer la politique de Roosevelt et défendent la politique de dette publique
(école de Harvard). En Allemagne, la politique d’austérité budgétaire aggrave la crise et mène à
l’arrivée des nazis au pouvoir en 1933. En 1936, le Front populaire arrive au pouvoir en France.
De plus, l’union soviétique semble relativement épargnée par la crise économique : ces différents
évènements peuvent faire penser que la fin du capitalisme est proche...
Un autre clivage important dans la théorie des cycles est le clivage entre réel (innovation) et
monétaire, fonctionnement des marchés financiers (ce clivage est persiste encore aujourd’hui).
48 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 7. JOHN MAYNARD KEYNES : LA RÉVOLUTION KEYNÉSIENNE ET LE
DÉVELOPPEMENT DE LA MACROÉCONOMIE 7.1. LA GRANDE DÉPRESION
On constate également des différences de méthodes. Stanley Jevons (1875-1882) remarque une
coincidence entre les cycles des tâches solaire et les cycles économiques :
Knut Wicksell (1906) instaure la théorie du processus cumulatif. Dans une économie sans mon-
naie, le marché du capital est équilibré par le taux d’intérêt naturel, l’investissement et l’épargne
sont coordonnées. Sinon, on a un risque de surporduction. Mais dans le réel, il y a de la monnaie
et des banques commerciales qui fixent le taux d’intérêt monétaire, pas le réel. Une innovation
relève la rentabilité du capital, le taux naturel monte. Les banques n’ont pas cette information,
elles n’ajustent pas le taux. Les entrepreneurs s’endettent à 4 % et le capital rapporte 8 %. Cette
différence entre les taux déclenche un boom économique, une forte création de monnaie et de
l’inflation. Si il n’y a que des banques et de la monnaie de crédit, l’inflation peut être infinie.
Mais avec la convertibilité or, les gens veulent plus d’or. Les banques ont des réserves d’or qui
s’épuisent à cause de l’inflation, donc elles relèvent leurs taux, provoquant une récession et un
retour à l’équilibre. Et ainsi de suite...
Joseph Aloïs Schumpeter (1911) est inspirée par Marx, Darwin et Walras et développe la notion
de destruction créatrice (des produits, des firmes se créent par l’innovation et l’action risquée
des entrepreneurs) et la Théorie de l’évolution économique : il est classé parmis les économistes
hétérodoxes. Il crée un surhomme génétique, l’entrepreneur et cherche à expliquer l’emboîtement
des cycles Kitchin (4 ans), Juglar (10 ans) et Kondratieff (50 ans). Il explique la croissance
économique par les cycles et l’innovation : à l’inverse des néoclassiques, il considère nécessaire le
déséquilibre à la base des cycles
49 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 7. JOHN MAYNARD KEYNES : LA RÉVOLUTION KEYNÉSIENNE ET LE
7.1. LA GRANDE DÉPRESION DÉVELOPPEMENT DE LA MACROÉCONOMIE
D’autres théories sont dévéloppées par Aftalion (accroissement de la demande de biens d’inves-
tissement plus rapide que celui de biens de consommation), Pigou, Robertson, Mitchell. Mais
des économistes comme Iving Fischer refuse et réfute la notion de cycle, il préfère la notions de
fluctuations aléatoires de l’offre de monnaie.
Aujourd’hui, un compromis a été trouvé entre les positions de Mitchell et Fischer avec les cycles
stochastiques. Le comportement est régulier, pas la durée des cycles. Seuls les hétérodoxes schum-
pétérien consacre encore une importance aussi importante aux cycles (Kondratieff).
La question du laisser-faire est au coeur des débats. Schumpeter considère que la récession est
causée par la fin des 3 cycles (analogie avec les battements de coeur), la dépression fait partie
du processus. En 1934, il proteste contre l’interventionisme de Roosevelt. Schumpeter n’est pas
favorable au laisser-faire absolu, il considère qu’il existe des récessions pathologiques : dans ce
cas, le recours aux travaux publics est bénéfique. Cependant, il ne développe pas de théories
permettant de distinguer une récession nécessaire d’une récession pathologique.
Friedrich Hayek est encore plus radical : la crise est causée par une mauvaise politique monétaire
avec des taux d’intérêt trop bas et un excès d’investissement. La production excède la demande
et la crise ne fait que révéler ce déséquilibre. La relance prolonge un peu plus ce boom artidiciel et
prépare une crise encore plus grande. Il faut laisser la purge se faire. D’autres critique la rigidité
du travail, le système d’allocations chômage et le refus des baisses de salaires. Arthur Cecil Pigou
propose la suppression du système d’allocations tel qu’il est pour laisser les syndicats l’organiser,
alors que Rueff est pour leur suppression définitive.
50 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 7. JOHN MAYNARD KEYNES : LA RÉVOLUTION KEYNÉSIENNE ET LE
DÉVELOPPEMENT DE LA MACROÉCONOMIE 7.2. LA VISION DE KEYNES
Mais les gouvernements décident finalement d’intervenir et Keynes va alors chercher à justifier
théoriquement cet interventionisme.
« Comment pourrais-je faire mien un credo [le marxisme] qui, préférant la vase aux poissons,
exalte le prolétariat grossier au- dessus des bourgeois et de l’intelligentsia qui, quelles que soient
leurs fautes, incarnent le bien vivre et portent en eux les germes des progrès futurs de l’humanité ?
» (« Un aperçu de la Russie », 1925).
Keynes est libéral, car il défend l’économie de marché, il la critique mais il n’y a pas de
meilleure alternative. On s’appuie dessus pour atteindre ensuite un idéal. C’est un anti marxiste
qui compare le prolétariat à la vase et associe les élites au progrès. Une révolution violente ne
peut rien améliorer pour lui.
« Si nous choisissons délibérément l’appauvrissement de l’Europe centrale, j’ose le dire, la
revanche ne traînera pas. Rien ne pourra retarder plus longtemps la guerre civile finale entre les
forces de la réaction et les convulsions désespérées de la révolution, devant lesquelles les horreurs
de la dernière guerre s’évanouiront dans un néant qui détruira, quel qu’en soit le vainqueur, la
civilisation et les progrès de notre génération » (Les conséquence économique de la paix, 1919).
51 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 7. JOHN MAYNARD KEYNES : LA RÉVOLUTION KEYNÉSIENNE ET LE
7.3. LA THÉORIE GÉNÉRALE DÉVELOPPEMENT DE LA MACROÉCONOMIE
Mais il pense que le système de marché a des défauts qui lui sont inhérents : l’harmonisation des
intérêts n’est pas vrai. L’État intervient pour corriger certains écarts. On sauve le capitalisme
de ses propres défauts : "J’introduis l’État, j’abandonne le laisser-faire".
«Cette vieille idée, selon laquelle l’intérêt personnel des individus agissant sans entrave
produira toujours le meilleur résultat est fausse» (1923).
52 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 7. JOHN MAYNARD KEYNES : LA RÉVOLUTION KEYNÉSIENNE ET LE
DÉVELOPPEMENT DE LA MACROÉCONOMIE 7.3. LA THÉORIE GÉNÉRALE
Les classiques postulent le plein emploi. La théorie générale une infinité de situation de sous-
emploi, pas un seul cas particulier. Le chômage au plein emploi peut être frictionnel (mobilité
professionel, Beveridge) ou volontaire (blocage des salaires).
Les classiques expliquent le chômage part des imperfections du marché du travail. Keynes ajoute
une catégorie qui s’ajoute, le chômage involontaire, il n’est pas causé par la rigidité du salaire et
les imperfections du marché du travail. Paradoxalement, Keynes introduit la rigidité des salaires
pour raisonner. Il considère que c’est une bonne chose, la flexibilisation des salaires ne permettrait
pas d’améliorer la situation. Les salariés maitrisent le salaire monétaire, pas le salaire réel. Pour
Keynes, une baisse du salaire nominal ne résout pas le problème du chômage. Mais le prix dépend
du salaire. Si le salaire baisse, les prix aussi, donc le salaire réel ne bouge pas :
w&
= cst
P %
53 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 7. JOHN MAYNARD KEYNES : LA RÉVOLUTION KEYNÉSIENNE ET LE
7.3. LA THÉORIE GÉNÉRALE DÉVELOPPEMENT DE LA MACROÉCONOMIE
Ceci impose que l’investissement est donné ce qui est une opposition avec les classiques. Pour
Keynes, la production diminue au lieu du taux dintérêt. Mais il lui manque une théorie de l’in-
vestissement. Keynes parle de prix flexibles dans la théorie générale, c’est une approche marshal-
lienne du marché du travail. On atteint l’équilibre car les entrepreneurs anticipent parfaitement
l’offre et la demande. On constate ainsi une première tentative de micro-fondation de la macroé-
conomie. Il n’y a pas de surproduction, les anticipations concernent le court terme et malgré de
bonnes anticipations, il y a du chômage.
Comment fait-t-on ? Au début du capitalisme, des individus ayant le goût du risque et d’entre-
prendre décidèrent d’investir, à l’instar du capitalisme idéal d’Adam Smith (esprits animaux).
Aujourd’hui, on passe par les marchés financiers qui évaluent les investissements. La théorie de
l’efficience des marchés financiers développée dans les années 1960-1970 considère que les marchés
abosrbe les fondamentaux et le prix de l’action reflète ces informations, la viabilité. Pour Keynes,
il est à l’inverse impossible d’absorber les fondamentaux et de connaître la rentabilité future.
« Mais les réévaluations journalières de la bourse (...) exerce inévitablement une influence
décisive sur le montant d’investissement courant ». « Dans la pratique nous supposons, en
vertu d’une véritable convention, que l’évaluation actuelle du marché, de quelque façon qu’elle
ait été formée, est la seule correcte... ».
54 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 7. JOHN MAYNARD KEYNES : LA RÉVOLUTION KEYNÉSIENNE ET LE
DÉVELOPPEMENT DE LA MACROÉCONOMIE 7.3. LA THÉORIE GÉNÉRALE
La rasion de cette impossibilité est la notion de croyances partagées, des conventions. La dimen-
sion psychologique des marchés est une théorie intuitive et des travaux sont encore menés sur
cette question aujourd’hui, notamment par André Orléans.
L’évaluation des investissements n’a pas de bases objectives, il est sujet à des oscillations car la
convention bouge selon les flux d’informations présentent, pourtant sans impacts sur le futur,
l’équilibre est donc très précaire sur ces marchés, même si’ls présentent l’avantage de la liquidité.
« Mais il ne faut pas s’étonner qu’une convention, si arbitraire d’un point de vue absolu, ait ses
faiblesses. C’est de sa précarité que proviennent une grande partie des difficultés que l’on
éprouve aujourd’hui pour maintenir un volume suffisant d’investissement » « Lorsque dans un
pays le développement du capital devient le sous produit d’un casino, il risque de s’accomplir
dans des conditions défectueuse »
« Il est probable que nos décisions de faire quelque chose de positif dont les conséquences
s’échelonneront sur de nombreux jours ne peuvent pour la plupart être prises que sous la
poussée d’un dynamisme naturel [animal spirits] –d’un besoin spontané d’agir plutôt que de ne
rien faire – et non en conséquence d’une moyenne pondérée de bénéfice quantitatifs multipliés
par des probabilités quantitatives » (p. 176). « La création d’une lourde taxe d ’Etat frappant
toutes les transactions » (p. 174) « Nous nous attendons à voir l’Etat, qui est en mesure de
calculer l’efficacité marginale des biens capitaux avec des vues lointaines et sur la base de
l’intérêt général de la communauté, prendre une responsabilité sans cesse croissante dans
l’organisation directe de l’investissement. » (p. 178)
M = L1 (Y ) + L2 (r)
55 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 7. JOHN MAYNARD KEYNES : LA RÉVOLUTION KEYNÉSIENNE ET LE
7.3. LA THÉORIE GÉNÉRALE DÉVELOPPEMENT DE LA MACROÉCONOMIE
Mais le taux d’intérêt peut osciller pendant des décennies autour d’un niveau chroniquement
trop élevé pour permettre le plein emploi, surtout si l’opinion dominante croit que le taux
d’intérêt s’ajuste automatiquement, de sorte que le niveau établi par la convention est considéré
comme ancré en des fondements objectifs beaucoup plus résistants qu’une convention... »
(1936 : 214)
Z = D1 + D2
dY w = dCw + dIw
M = L1 (Y ) + L2 (r)
Il ajoute pour compléter son modèle une interraction entre le marché de la monnaie et le marché
des biens.
« Cela aurait été un avantage si les effets d’un variation des salaires monétaires avait pu être
discutés dans un chapitre antérieur. Car la théorie classique fait reposer l’affirmation du
caractère auto-régulateur du système économique sur une hypothèse de fluidité des salaires
monétaires ; et lorsqu’il y a une rigidité, elle lui impute les défauts d’ajustement » (p. 257).
La conclusion de Keynes est que la rigidité des salaires n’est pas la source du chôamge : au
contraire, elle stabilise l’économie, ce qui est nécessaire.
56 ENSAE B.Dufour–Jules
CHAPITRE 7. JOHN MAYNARD KEYNES : LA RÉVOLUTION KEYNÉSIENNE ET LE
DÉVELOPPEMENT DE LA MACROÉCONOMIE 7.3. LA THÉORIE GÉNÉRALE
« Le but de notre analyse n’est pas de fournir une machine automatique (...) mais de nous
munir d’une méthode rationnelle et ordonnée pour résoudre les problèmes particuliers. (...) Les
méthodes mathématiques, comme celle que nous décrirons dans la section VI, ont le grave
défaut de supposer expressément l’indépendance rigoureuse des facteurs dont elles traitent et de
perdre leur force et leur autorité lorsque cette hypothèse n’est pas valable. (...) Trop de récentes
‘économies mathématiques’ ne sont que pures spéculations ; aussi imprécises que leurs
hypothèses initiales, elles permettent aux auteurs d’oublier dans le dédale des symboles vains et
prétentieux les complexités et les interdépendances du monde réel » (1936 : 300-1).
57 ENSAE B.Dufour–Jules