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Revue de l'Occident musulman et

de la Méditerranée

Espace et pouvoir au «Maroc» à la fin du «Moyen Age»


Mohammed Kably

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Kably Mohammed. Espace et pouvoir au «Maroc» à la fin du «Moyen Age». In: Revue de l'Occident musulman et de la
Méditerranée, n°48-49, 1988. Le monde musulman à l'épreuve de la frontière. pp. 26-37;

doi : 10.3406/remmm.1988.2229

http://www.persee.fr/doc/remmm_0035-1474_1988_num_48_1_2229

Document généré le 28/08/2017


Mohamed KABLY

ESPACE ET POUVOIR
AU «MAROC» A LA FIN DU «MOYEN AGE»*

L'ÉPISODE ET LES JALONS

Dans la mesure où l'on ne saurait sans artifice cloisonner des réalités adjacentes,
on peut dire, s'agissant de la Méditerranée occidentale, que l'ensemble de ses espaces,
en dépit de chronologies dissemblables, avait connu, dans certains cas, des relais
aussi distincts que confondus. Pour le monde occidentalo-musulman, la fin du
«Moyen Age», bien que différenciée dans le détail, serait aussi valable, en tant
qu'épisode cohérent, qu'il l'a été jusque-là, en gros, pour l'autre rive. D'autre part,
dans le cas particulier du «Maroc», la même période qui serait plutôt
d'affaiblissement progressif paraît devoir débuter par là-même où commença l'ascension
inverse du mouvement de «Reconquête», soit donc par la débâcle d'al-'Uqâb,
laquelle fut essuyée par les Almohades le 14 safar 609/12 juillet 1212 à Las Navas
de Tolosa, sur le sol ibérique. Alors qu'on pourrait lui assigner pour premier terme
l'occupation par le Portugal le 21 Août 1945, de la ville de Ceuta. Puisqu'un tel
événement inédit pour la cité investie, allait annoncer pour les derniers Mérinides
des difficultés décisives, pour le pays en général des mutations de tous ordres, pour
l'Occident, enfin, une suprématie qu'on sait depuis lors irréversible. Si bien qu'à
considérer ainsi les choses, ledit épisode pourrait s'appréhender dans les deux sens
comme épisode de transition. Avec pour trait dominant une compétition sans merci,
autour et pour l'espace.
A propos de cet espace, on sait qu'il était uniformément almohade jusqu'à la

* Afin d'éviter tout anachronisme ou impropriété civilisationnelle, les termes Maroc et Moyen
Age, dans cette étude, seront mis entre guillemets.

RMMM 48-49, 1988/2-3


Le «Maroc» à la fin du «Moyen-Age» I 27

déroute d'al-'Uqâb. On sait aussi qu'il ne l'était déjà presque plus quelque demi-
siècle plus tard, avant même la disparition «physique» du pouvoir titulaire de
Marrakech. Entre ces deux situations-limites, un véritable éclatement du territoire avait
emboîté le pas, pour ainsi dire, à la régression militaire de l'État. Des réalités
souterraines, apparemment, s'étaient alors étalées au grand jour : en Andalousie, des
mouvements d'indépendance dont il n'émergea finalement qu'un émirat
minuscule — celui constitué par les Nasrides à Grenade dès 629/1232 — avaient
commencé par renouer résolument avec la tradition locale des reyes des taïfas; du côté
du territoire d'Afrique du Nord, d'autres mouvements, tribaux pour la plupart,
entendaient de leur côté, mais bien à leur manière, se passer de toute
subordination inconditionnelle, d'où qu'elle vînt, pour s'approprier effectivement leur
«mouvance» sinon même pour l'élargir. Et alors que la ville de Cordoue succombait
sous les coups de Ferdinand III de Castille et de Léon en 633/1236, les Zayyâni-
des, du côté opposé, étaient sur le point de proclamer la création de l'émirat
autonome, bien que formellement proalmohade, de Tlemcen. Cependant que
Marrakech cherchait positivement à s'assurer les services des Mérinides déjà à demeure
au nord-est, non loin de leurs cousins et rivaux zayyânides, et que lesdits
Mérinides, ne nourrissant encore, et pour longtemps, aucun projet sérieux de
substitution aux gouvernants, se comportaient alternativement en tribus rapaces ou
mercenaires. D'autre part, devançant ces communautés zénètes de l'ouest, les Hafsides,
lieutenants chargés depuis peu de la protection de PIfrîqiya, avaient préféré quant
à eux annexer cette province dès le début de 627/1229. Pour se poser bientôt comme
masmudiens proches du Mahdi fondateur en héritiers «légitimes» du califat, ce
qui signifiait d'abord, en fait comme en droit, qu'ils prétendaient au patrimoine
dans son ensemble. De telle sorte qu'à la disparition en 668/1269 du dernier calife
almohade, ledit patrimoine, amputé considérablement en Ibérie, se trouvait
partout entre les mains de puissances locales antagonistes.
Dans le cadre de ce contexte, les Mérinides, grâce à l'appui stratégiquement
indispensable des Hafsides, purent conquérir, au nom de ces Hafsides, une bonne
partie du territoire puis la capitale officielle de l'« Empire». Après quoi, dès la
maîtrise du nord et de Ceuta acquise, une nouvelle orientation se dessina aussitôt :
elle consistait en un mot à aller outre ce domaine. D'abord en poursuivant la
marche vers le nord, au nom du principe expêditif et déjà inopérant du Gihâd, ensuite
en s'engageant du côté de l'est où à force d'insistance, on avait fini, sous le règne
d'Abu-1-Hassan, par s'emparer en 737/1337 de tout l'émirat de Tlemcen. Puis ce
fut le tour du pays ifrîquiyen envahi en 748/1347 au nom, cette fois-ci, du légiti-
misme prohafside. Néanmoins, une dizaine d'années plus tard, il était devenu
évident qu'une si coûteuse expérience, bien que relancée pour un temps, ne pouvait
plus se poursuivre1.
Ce fut alors le reflux quasi définitif. Entamé avec la disparition subite d'Abù
'Inân en 759/1358, il devait annoncer le repli durable, en dépit de soubresauts
espacés, mais aussi — ce qui n'est guère moins important — une certaine atomisa-
tion interne du territoire. Associée à la multiplicité des fronts en compétition pour
le pouvoir, cette dernière attitude allait mener le Maghreb Extrême, bien avant
la perte de Ceuta, à une réelle subordination de fait, par le biais de prétendants
en exil, vis-à-vis à la fois de la Castille et de Grenade2.
D'où les questions : pourquoi cette ardeur des Mérinides, une fois installés au
Maghreb Extrême, à vouloir coûte que coûte maîtriser un espace beaucoup plus
28 / M. Kably

vaste et pourquoi le recours, à l'issue d'expéditions répétées, à ce morcellement,


tout aussi têtu, du premier pays d'accueil et de départ ? Par-delà l'incohérence plus
ou moins implicite ou les contradictions frappantes, n'y aurait-il pas, là-dessous,
quelque logique? Parce qu'elle tiendrait probablement de données interférentes
— celles, notamment, de la nature et de la fonction du pouvoir comme de l'espace
—, cette logique-là, pour apparaître, nécessiterait au préalable qu'on en examine
le support.

L'ESPACE EN QUESTION : LES MOTS ET LA CHOSE

En entreprenant d'étendre leur autorité vers le nord puis vers l'est, les Mérini-
des, d'un certain point de vue, évoluaient dans un seul et même espace. Appelé
Ma'grib par les premiers géographes moyen-orientaux des inc/ixe et ive/xe siècles,
il incluait traditionnellement, outre la Sicile et l'Andalousie alors sous autorité
umayyade, tout le nord du continent jusqu'à l'Egypte. Au niveau du détail de cette
partie du monde musulman, on note cependant que le mot «Magrib» est de
préférence affecté par les mêmes géographes à la seule portion africaine qu'ils situaient
en général entre la ville d'Alexandrie et l'Atlantique3. En clair, le Maghreb
théorique, au sens le plus courant, correspondait au début à cet ensemble incluant la
Cyrénaïque (Barqa), la Tripolitaine, l'Ifrîqiya et le reste composé d'un certain
nombre d'unités territoriales ou ethnico-territoriales et de cités-États (Tahert, Sous,
Sijilmassa, Bargwâta, etc.). Autrement dit, l'ensemble de cette région, aux yeux
du voyageur ou tout autre sujet oriental, paraît avoir constitué une unité à peu
près homogène qui n'excluait pas toutefois les nuances ni les traits sous-régionaux
particuliers.
Il va de soi qu'une telle perception est liée historiquement à la conquête, soit
à un moment où le nord-ouest africain était appelé à devenir musulman, qu'il l'était
peut-être en partie, à travers l'Ifrîqiya, et qu'il relevait militairement, en tant que
domaine global, du commandement provincial de l'Egypte. De ce fait, le mot
«Magrib», selon cette acception le destinant d'emblée à Dâr-al-Islâm, serait né
à son tour de la conquête4. Il s'en suivrait que depuis la fin du premier siècle de
l'Hégire (fînvne-début VIIIe s. ap. J.-C), tout le Maghreb, au sens limité à
l'Afrique, constituait en pratique, pour l'Islam oriental, un espace d'un seul tenant.
D'où, apparemment, la consécration unanime des premiers géographes
moyen-orientaux.
En Occident musulman, on note qu'une telle approche sera adoptée à la lettre,
le plus souvent, par la tradition historico-géographique, «médiévale». Bien plus,
elle sera accueillie en Italie, à l'orée du xe/xvie siècle, par le biais notamment de
la «Description» de Léon l'Africain, pour figurer plus tard, vers le milieu du siècle
suivant, dans «l'Afrique de Marmol»5. Seul Ibn Haldûn, que l'on sache, s'écarte
dans ses 'Ibar d'une perception si répandue et qu'il avait pourtant assez
curieusement commencé par reproduire lui-même, sans plus de nuance, en rédigeant la
partie reflexive de son œuvre, c'est-à-dire la Muqaddima6. Quoi qu'il en soit, il
est heureux que se référant à l'opinion courante parmi les habitants de ces
contrées», les 'Ibar puissent nous apprendre que le Maghreb, du côté du levant, n'excède
pas les limites de la province de Tripoli, ce qui permet du reste à l'auteur d'iden-
Le * Maroc» à la fin du «Moyen-Age» I 29

tifier cet ensemble, de son époque, avec « les régions qui formaient dans les temps
anciens le domaine des Berbères»7.
Or il se trouve que l'époque d'Ibn Haldûn, comme chacun sait, est au cœur de
la tranche chronologique qui a été définie plus haut. A moins que le présent
indéfini utilisé à l'occasion ne permette, quant à lui, de déborder cette tranche en amont,
ainsi qu'on le verra par ailleurs. En tout état de cause, la remarque formulée par
Ibn Haldûn pourrait permettre de renvoyer non plus à un espace plus ou moins
didactique et défini de l'extérieur mais plutôt à un espace saisi comme concret
cette fois-ci, au plan psychologique, et vécu collectivement comme solidaire.
D'autre part, à tenir compte du développement explicatif étayant la même
remarque, il nous faudrait préciser immédiatement que cet espace, tout en étant
solidaire, est cependant réparti en entités distinctes, lesquelles, soulignons-le, sont
d'abord définies par leurs ethnies dominantes respectives. Sans d'ailleurs que soient
négligées tout à fait les limites dites naturelles, du moins dans le cas du Maghreb
Extrême, peut-être parce que celui-ci «abrite un tel nombre de peuples que seul
leur Créateur pourrait les dénombrer»8. Alors que le Maghreb central «est en
grande partie le domaine des Zenâta» et que la division voisine, celle du «pays
de Bougie et de Constantine» est «aujourd'hui occupée par les Arabes, à
l'exception de quelques régions montagneuses d'accès difficile où on trouve encore les
résidus» des premiers occupants «Zwâwa, Ketâma, 'Ajîsa et Huwâra»9. Alors aussi
que «toute l'Ifrîquiya jusqu'à Tripoli... est devenue de nos jours un terrain de
parcours pour les tribus arabes Sulaym», après avoir été autrefois la demeure des
«Nefzâwa, des B. Ifren, des Neffûsa et d'innombrables autres tribus berbères»10.
Autrement dit, la distribution de l'espace, au Maghreb médiéval, est surtout
d'ordre ethnique. Pour l'individu sans aucun doute et en tout cas pour la
documentation qui demeure assez près du «terrain» (relations de voyage, recueils
hagiographiques, nawâzil ou cas d'espèce juridiques), la référence, à travers la région
tout entière, renvoie couramment à la population résidente, plutôt ou en même
temps qu'à la localité même de résidence11. Quant aux désignations territoriales
signalées à l'instant d'après le texte des 'Ibar, on remarque qu'elles
n'interviennent que comme repères cardinaux et qu'à part le nom antique d'Ifrîquiya, les
autres appellations, à scruter les descriptions successives du voyage, seraient de
date assez récente.
De fait, trahissant un début d'existence propre et partant une certaine conscience
de communauté territoriale associée d'évidence au développement phagocytaire
de l'État, la nouvelle nomenclature, s'appliquant à des domaines malgré tout encore
mouvants, serait apparue, selon toute vraisemblance, à l'époque zîrîdo-hammâdido-
almoravide, c'est-à-dire probablement aux alentours du milieu du ve/xie siècle. Dans
le cas d'al-Magrib-al-Aqsâ ou Maghreb Extrême en tout cas, la chose est à peu
près sûre. Puisque ce nom, en tant que terme appliqué à une division territoriale,
est mentionné pour la première fois, semble-t-il, ainsi d'ailleurs que celui d'a/-
Magrib-Azosat (Maghreb central), dans le texte bien connu de la Nuzhat d'al-
Idrîsî12. Mais alors que le Magrib-Awsat n'y apparaît qu'à un seul endroit et pour
s'appliquer à cette époque au domaine de Bougie — ce qui signifierait que cet espace
aurait «glissé» à l'ouest, vers l'émirat de Tlemcen, à l'époque d'Ibn Haldûn13 —
l'autre appellation — celle d'al-Magrib-Aqsâ — y est à ce point fréquente qu'elle
ne saurait être fortuite. En d'autres termes, et comme la composition de la Nuzhat
a été achevée en 548/1154, alors que s'installaient les Almohades au «Maroc»,
30 / M. Kably

cette fréquence dénoterait non point une innovation originale mais plutôt un usage
vraisemblablement courant, lequel, a priori, serait apparu par suite de la première
expérience de centralisation étatique essayée dans cette partie du Maghreb, celle,
bien entendu, des émirs almoravides14.
Est-ce à dire cependant que l'État «phagocy taire» ainsi apparu au Maghreb et
appelé Makhzen de fort bonne heure au Maroc15 a essayé depuis lors, de même
que son homologue en Occident, de s'identifier peu à peu à une «nation»
subrégionale devenue sienne et qui se démarque, le temps aidant, par rapport aux
«nations» avoisinantes? Rien, assurément, ne permet de le soutenir. Non point
pour cette raison non négligeable d'appartenance à la 'Umma de l'Islam —
puisque le facteur parallèle de Respublica Christiana, par rapport à l'Occident, ne fut
aucunement déterminant, à cet égard16 —, mais surtout parce que le ressort d'un
tel État, Ibn Haldûn l'a bien vu, est d'abord, là aussi, d'ordre ethnique. Car pour
un État centralisateur qui se veut en principe unitaire, un tel ressort, quoi qu'on
fasse, ne saurait être qu'antinomique. D'où les heurts incessants, comme en témoigne
toute la chronique, entre État et territoire, c'est-à-dire entre quelques divisions
rivales mais dominantes et un ensemble de 'asabiyya-s subjuguées et
alternativement insoumises. D'où aussi, en conséquence, le caractère « a-national », pourrait-
on dire, à la fois du territoire et de l'Etat. D'autant que l'existence de parentés
ethniques — même fictives17 — , ne milite pas, à l'échelle de la région, en faveur
de la notion exclusive de frontière. Ce qui explique qu'il n'en est guère question,
à généralement parler, qu'au niveau de l'écrit savant ou de la tradition officieuse.
Sur le terrain au contraire, il ne s'agit, le plus souvent, que de limite. Étant
associée à l'origine de l'habitant, cette limite, au surplus, n'est jamais tout à fait non-
intangible. De là son caractère multidirectionnel, discontinu et plutôt éphémère18.
De là aussi, sinon surtout, la nécessité pour nous de réajuster notre approche quant
à la nature de la confrontation du dominant maghrébin, quel qu'en soit le point
de départ, avec l'espace au «Moyen Age».

LE POUVOIR MERIIMIDE FACE A L'ESPACE

Dans cet espace à la fois un et multiple, on note que l'évolution du groupement


mérinide avait suivi la même courbe, en gros, que l'ensemble des 'asabiyya-s
maghrébines parvenues également à la dignité de l'État. En effet, bien que variable dans
le détail, cette courbe — qu'il s'agisse des Zîrîdo-hammâdides, des Almoravides,
des Zayyânides contemporains ou des Hafsides — est d'une allure à peu près
identique. Ponctuée des mêmes césures, elle dénote quelque continuité dans la
logique dudit espace. En ce sens qu'avec l'édification d'un micro-territoire-plate-forme,
l'on s'attache, aussitôt ou en même temps, à se mêler de trafic pour disposer
progressivement de réseaux et de nœuds subrégionaux. Une fois maîtrisés les centres
et les débouchés de la «mouvance», l'horizon du pouvoir naissant est orienté
immédiatement dans un sens beaucoup plus vaste, impliquant simultanément et le Détroit
et l'Ibérie et la totalité du Maghreb. Aussi, est-ce dans le cadre de ce schéma
général que s'expliquent, semble-t-il, les particularités les plus déterminantes par
rapport à chaque système. Par exemple ce contraste déjà relevé dans le
comportement mérinide face à l'espace, lequel comportement, on s'en souvient, oscilla entre
le remembrement par à-coups, sous la tutelle de Fès, de tout le reste ou d'une
Le a Maroc» à la fin du «Moyen-Age» I 31

partie du Maghreb et l'atomisation persistante, en contrepoint, du domaine plus


réduit du Maghreb Extrême. Ainsi, pour appréhender à présent cette dualité de
l'intérieur, il serait temps, justement, d'examiner les articulations principales du
schéma évoqué. En suivant, pour plus de clarté, leur apparition successive dans
le temps :
1. — Depuis son apparition en 610/1213 dans le pays de la Moulouya vers le
Rif, le mouvement des pasteurs mérinides, pendant au moins un quart de siècle,
se comporta en simple mouvement tribal que n'attiraient manifestement que le
butin, le tribut et le parcours. De même que les Arabes Ma'qil qui nomadisaient
au départ non loin d'eux, au sud-est du Maghreb Extrême. Dans ce cas comme
dans l'autre, aucun projet étatique n'était en vue. Seulement, à l'inverse des
incursions arabes, celles des Mérinides s'orientèrent assez tôt selon la ligne de
pénétration traditionnelle menant au Gharb actuel réputé pour ses riches pâturages. Bien
que fort contrariée dans l'immédiat, une telle orientation, à la longue, allait
s'avérer payante puisque le califat almohade, malgré un court redressement qui s'était
répercuté jusque dans le nord, avait fini, aux alentours de 633/1235, par intégrer
à son service les tribus intruses pour en canaliser la virulence. Et c'est sans doute
à cause de cette nouvelle dimension, du moins en partie, que les Hafsides, de leur
côté, auraient cherché à attirer les mêmes tribus, peu après 640/1232, dans leur
camp opposé depuis déjà longtemps à Marrakech. Si bien que forts de l'appui de
Tunis et saisissant la défaite en 644/1248, non loin de Tlemcen, d'as-Sa'îd l'Almo-
hade qui voulait précisément en finir avec les immixions multiformes du Hafside,
les Banû Marîn devaient réussir, entre cette date et l'année 656/1258, à se doter
comme leurs rivaux zayyânides d'un domaine-plate-forme cohérent : à la province
du Gharb médiéval19, à celles de la Moulouya et du Rif oriental, on adjoignit le
Fâzâz, dans le Moyen Atlas, et le Tadla; aux cités prestigieuses de Taza, Fès et
Meknès, on ajouta notamment un port, celui de Salé, un centre minier opulent,
celui du Ma'den du Fâzâz, et la ville de Sijilmassa. Autrement dit, un pont
caravanier et un pays d'accueil; des entrepôts de premier ordre et une fenêtre sur la
mer, le tout réalisé en marge de l'autorité officielle de Marrakech et contre elle,
sous l'égide reconnue, bien qu'occultée par la suite, du califat lointain de Tunis.
Faut-il ajouter à ce propos que les Banû Marîn, à cette époque, étaient non point
en relation exclusive avec un micro-territoire situé géographiquement au
Maghreb Extrême mais plutôt en rapport, au sujet même de ce micro-territoire, avec
des enjeux régionaux qui les dépassaient et dont l'impact, dans l'immédiat comme
plus tard, ne pouvait être que décisif.
Pour en revenir à la première réalisation stable des Mérinides, notons qu'Abù
Yahyâ, initiateur de la conquête, avait entrepris, à y regarder de près, une
démarche qui l'imprégna d'un caractère particulier. S 'insérant dans la stratégie du «
suzerain» de Tunis, cette réalisation, en tant que telle, devait impliquer pour les
tribus conquérantes une mutation. Politique sous ce rapport, cette mutation, à ce
qu'il semble, se réalisa d'une manière peu adéquate. Selon la description qu'on
en donne, la démarche qui en assura l'exécution et qui avait été comme
instinctivement retenue se ramenait au fond, et pour cause, à une simple tradition
pastorale. De fait, évoquant la répartition ancestrale des parcours, le geste qui fonda
la politique mérinide de l'espace fut un geste de partage. Puisque l'émir Abu Yahyâ,
annonçant le premier pas vers le pouvoir, avait commencé par répartir les
provinces à conquérir, avant même que ne fût entamée la conquête : chaque grande famille
32 / M. Kably

ou division tribale en avait reçu ainsi sa part «en pâture», ce qui revient, en un
mot, à une véritable invitation à la ruée20.
2. — Dès qu'il eut exécuté ce dessein dans l'éclatement fondateur ainsi décrit,
le mouvement mérinide envahit peu à peu tout l'espace atlantique environnant
pour ne s'arrêter en 660/1262 qu'à la limite «naturelle» de l'Oum Rbia. Jusqu'à
l'année 668/1269, date d'occupation de la capitale, le Maghreb Extrême sera donc
coupé en deux, par rapport à cette rivière, et partagé en fait, par conséquent, entre
Mérinides et Almohades21. D'autre part, sur le flanc oriental, il semble que le
nouvel occupant ait entrepris, dès le début, d'éloigner les anciens compagnons
Ma'qil qui durent alors se replier vers le sud —- du côté du Drâa comme en
direction du Sous dissident des Banû Idder —, sans pour autant abandonner
complètement le pays du nord extérieur. Pour arriver à cette fin, les Banû Marîn, précisons-le,
eurent recours à des populations locales de la même 'asabiyya zénète, tels les Mik-
nâsa, les Banû Waritân, les Banû Wangâs et les Banû Yerniyân et s'en servirent
pour protéger les voies de passage menant vers les plaines occidentales. De même
qu'ils veillèrent à renforcer cette protection en s'alliant aux Hiladiens Suwayd venus
de l'est, lesquels, au surplus, étaient réputés ennemis à la fois des Ma'qil et des
maîtres de Tlemcen.
Or, à tenir compte de ces détails, on ne peut s'empêcher de conclure à un
certain pragmatisme nuancé de la part des Mérinides en ascension vers le pouvoir,
face à l'espace. Car de même qu'ils savaient cohabiter avec l'autre et «se résigner»
au partage, de même s'attachaient-ils, dans ce partage, à monopoliser au mieux,
en fin de compte, les positions centrales déjà acquises. Et puis il y a le dernier
épisode — très complexe parce que de clôture — qui peut se lire sous ce même
angle. Puisque les Ma'qil, une fois repoussés au loin, avaient les uns rejoint le
Sous alors que d'autres, les Munabbât, s'étant d'abord emparés de Sijilmassa, mirent
aussitôt ses possibilités et avantages à la disposition des Zayyânides. Pour
redresser la situation à leur profit dans ces contrées méridionales, les nouveaux
dominants du nord et du Gharb n'hésitèrent pas, en 665/1266, à installer cyniquement
à Marrakech un émir muminide dévoué à leur cause. Escomptant ainsi pouvoir
drainer le trafic et le tribut promis vers leur domaine, les Banû Marîn, devant
l'habileté et le sérieux inattendus, semble-t-il, du partenaire almohade, ne
tardèrent pas à se déclarer «trahis» par ce calife surnommé Abu Dabbûs. D'où le siège
final de la capitale et la substitution pure et simple au partenaire22. Au nom,
rappelons-le, du califat de Tunis.
3. — Étant limitée au centre du Maghreb Extrême pour ne concerner vers le
sud que Marrakech et alentour, cette substitution, aux yeux sans doute des
intéressés eux-mêmes, était à l'évidence insuffisante. Du fait que le Maghreb Extrême,
en tant qu'espace, avait déjà acquis une orientation telle, au niveau de l'État, que
nul système ne saurait s'y passer du grand commerce subsaharien. Or celui-ci relevait
non seulement des réseaux d'acheminement du Centre mais d'abord des points
d'accueil méridionaux, lesquels, étant situés dans le Sous et dans le Drâa, étaient
alors soit autonomes soit soumis à la volonté des adversaires ma'qiliens.
• Pour neutraliser ces facteurs et ériger réellement un pouvoir efficace au «Maroc»,
les Mérinides, dès l'occupation de Marrakech, entreprirent une action militaire
aussi intense que soutenue. Après la première défaite cuisante de Tlemcen, en
670/1272, le Sous rentra dans l'ordre l'année suivante mais Sijilmassa dut tenir
bon, malgré tout, jusqu'au milieu de 673/septembre 1274. Du coup, l'émir Abu
Le «Maroc» à la fin du « Moyen-Age» I 33

Yûsuf, véritable artisan de cette action élargie, songea à l'étendre au débouché


septentrional de Ceuta. Il faut dire qu'il avait pris le soin, alors même qu'il donnait
la priorité au Sous et au Drâa, d'isoler cette ville complètement autonome en
occupant l'extrême nord du Maghreb Extrême. Pour atteindre son objectif et s'assurer
la maîtrise de la cité récalcitrante, il passa un accord secret, à présent qu'il avait
les mains libres du côté du continent, avec Jacques le Conquérant d'Aragon. Grâce
à quoi, il l'occupa sans coup férir vers la fin de 673/1274 et lança aussitôt un appel
à «la guerre sainte»!
4. — Par-delà les prétextes et les subtilités édifiantes du discours, commence
alors l'expérience régionale des Mérinides. Différente de la chevauchée almora-
vide ou de «l'épopée» almohade, une telle expérience, quant au fond, s'inscrit
cependant dans un schéma identique. Sous-tendue par les mêmes réalités de voisinage,
elle ne saurait être réductible, du côté nord, au combat islamo-chrétien mis en
avant. Pas plus qu'elle ne saurait se ramener au seul souci, du côté est, d'assurer
la sécurité au «pèlerin» par le pouvoir23. Ceci dit, l'on note que ce pouvoir ne
tarda pas à décider de lui-même, dès la fin du premier règne, en 685/1286, de
se détourner pratiquement de l'Andalousie versatile pour s'occuper d'abord de
l'ennemi impénitent de Tlemcen. Tout en veillant à demeurer partie prenante,
bien entendu, vis-à-vis des partenaires d'Ibérie, notamment, semble-t-il, à propos
du contrôle du Détroit24.
A vrai dire, ce semi-retrait des Mérinides est lié à la défaillance, voire à l'absence,
tout au début, de leur flotte. Pour pallier cet handicap demeuré persistant, en dépit
d'efforts ultérieurs, surtout sous Abu-1-Hasan, il semble que les maîtres de Sijil-
massa et Ceuta aient découvert, peu à peu, qu'il leur fallait disposer de l'ensemble
des débouchés du Maghreb. Ce qu'ils tentèrent de faire, tout en se réclamant, au
Maghreb Central, de l'unification des Zénètes majoritaires, particulièrement des
Maghrâwa et Toujine du littoral, ainsi d'ailleurs que du califat d'Occident vis-à-
vis de Bougie, de Constantine, de Tunis et même de Tripoli qu'Abû 'Inân, en
755/1355, va jusqu'à racheter à prix d'or à ses ravisseurs pirates25.
5. — Comparées à celles qui avaient été engagées par les prédécesseurs almora-
vides et almohades, les poussées vers l'est des Mérinides, par rapport à leur système,
furent sans doute les plus fatales. D'une part parce que les expéditions qui les
sous-tendent étaient de loin plus nombreuses et qu'elles traînaient le plus souvent,
d'autre part, en longueur. Impopulaires parmi la troupe, les campagnes, semble-t-
il, étaient plutôt subies par des chaikhs traités a priori, de par leur statut initial,
comme pairs. De ce fait, qu'on ait fomenté systématiquement des complots de
l'intérieur contre les sultans promoteurs d'expansion vers l'est — tels Abu Yaqûb, Abu-
1-Hasan, Abu 'Inân et même Abu Fâris — était chose tout à fait conséquente. Le
premier de ces sultans, on le sait, fut assassiné à al-Mansûra en 706/1305, face
à Tlemcen, au bout de huit années de siège26, alors qu'Abû 'Inân, quelque demi-
siècle plus tard, ne devait échapper à une première conjuration déjouée
manifestement en Ifrîqiya-même, en 758/1357, que pour expirer dans l'ambiguïté à Fès l'année
suivante. Quant à Abu-1-Hasan, il est à peine besoin de rappeler que ce sont des
cheikhs parmi les siens qui, se liguant autour du ci-devant Abu 'Inân, son propre
fils et lieutenant, le condamnèrent à la destitution comme à l'errance jusqu'à la
mort27. Enfin, et bien que plus épargné grâce à sa méfiance, Abu Fâris, son autre
fils et dernier grand souverain «unitaire», n'échappa pas, après sa mort survenue
34 / M. Kably

à Tlemcen en 774/1372, à ce même sort déjà infligé dans des conditions similaires
aux réalisations d'Abû 'Inân.
Pourquoi donc cet acharnement de la communauté des cheikhs à vouloir
«dramatiser» ainsi les choses, cependant que le pouvoir, quels qu'en fussent les défauts,
ne les tenait point à l'écart et que l'élargissement de l'espace, après tout, ne
pouvait en principe que renforcer leur prestige et celui de leur État ? A en croire la
réaction répétitive des opposants, le problème, à ce qu'il semble, ne se posait
nullement en ces termes. A leurs yeux, l'expansion de l'État, par rapport aux
privilèges d'usage, ne constituait qu'une menace et un défi. Par la mobilisation durable
qu'elle implique et la domestication subséquente qu'elle entraîne, à l'avantage des
sultans, cette expansion, du point de vue des cheikhs, va à rencontre du principe
fondateur du pouvoir puisque celui-ci, à sa naissance, avait d'abord eu à œuvrer
pour l'équilibre et l'arbitrage, dans une optique de distribution et non point de
concentration de l'espace28.
D'où d'ailleurs, de la part des conjurés successifs, la restitution régulière et
immédiate, au bénéfice d'émirs associés de Tlemcen, de Bougie-Constantine ou de Tunis,
de l'ensemble des contrées à peine acquises. D'où aussi, s'agissant du Maghreb
Extrême, la pulvérisation parallèle, à chaque reprise, du territoire. Dans le but
manifeste de contrarier le penchant «pan-maghrébin» de l'institution sultanienne,
de l'acculer à l'intérieur à une paralysie consentante, de dresser sur son chemin,
à l'extérieur, des obstacles aménagés par avance. Devant la récidive périodique
des souverains attirés irrésistiblement, quant à eux, par les charmes du prestige
liés au monopole des débouchés et réseaux, les contribuables jaloux de leur
autonomie respective auraient décidé finalement d'y mettre un terme. Dès la
disparition équivoque d'Abû 'Inân, une tendance se dessina nettement qui devait se
confirmer au lendemain du sursaut d'Abû Fâris et consistait en bref à traiter
politiquement le domaine-tremplin du Maghreb Extrême en espace tripartite : à côté du
territoire du nord, celui de Fès, il y avait désormais l'émirat de Marrakech et celui
de Sijilmassa. Dans les faits, tout cet espace, quelque compartimenté qu'il fût,
était pratiquement livré à lui-même. Car par-delà les clans compétiteurs et leurs
princes, étaient intéressés au «Maroc», non seulement les Andalous Nasrides dégagés
à présent de la pression de Fès et du joug de leurs Guzât Banû Marîn, mais aussi
les Castillans qui avaient également leur «réserve» de candidats de rechange29.
Au même moment, les anciens compétiteurs ma 'qiliens devaient commencer à
entreprendre d'ouvrir des brèches menant au Centre, au Gharb et dans le nord.
Tout en se posant en dominants absolus à travers le Sous et le Drâa, dans l'attente
de pouvoir entrer en conflit, ou en rapport, avec à la fois les Wattâsides, les Sa
'adiens et les envahisseurs portugais.
Ainsi donc, l'attitude de référence, vis-à-vis du territoire, se situerait
différemment, au sein du système mérinide, selon qu'il s'agit de tribus composantes ou
d'instance étatique personnifiée exclusivement par le monarque. Plus ouverte parce
que dépendant, dès l'origine, des rivalités de voisinage et d'outre-mer, cette
instance paraît privilégier la dimension régionale, autant que faire se peut, pour
arriver réellement à se présenter comme autorité suprême à l'intérieur auprès de tous.
Alors que les contribules, de leur côté, ne voudraient retenir, au premier chef,
que le geste qui dispensa les «domaines», dès l'origine également, et partant l'autorité
privative et quasi-absolue. D'autre part, cette attitude binaire, de la part des
associés mérinides, a sa réplique, au niveau de l'espace, et s'appuie sur une opposition
Le «Maroc» à la fin du «Moyen-Age» I 35

encore plus évidente, semble-t-il, entre l'individualisation de chacune des parties


composant le Maghreb et la solidarité pluridimensionnelle que ces parties
cultivent et qui seule pourrait structurer objectivement l'évolution expansionniste de
l'État. Sans qu'il ne puisse jamais être question, de même que pour toute
expansion étatique au Maghreb «médiéval», que de simple volonté de leadership
doublée de rivalisme inter-ethnique. Aucunement en tout cas, ne serait-ce qu'à cause
de la mobilité des groupes et la discontinuité connexe des limites, de ce qui
pourrait passer, en d'autres lieux, pour une «idée impériale» persistante.
Cela étant, on ne se dissimule pas qu'il n'a été surtout question ici que d'espace
conquis, à quelque échelle que ce fut, ou destiné de toute manière à l'agression.
Vécu ou abordé simplement par le scribe, cet espace-là, par conséquent, est d'abord
une réalité à caractère politique. Il renvoie donc à la perception des officiels, des
officieux et de l'opinion élitaire. Quant à l'espace connoté affectivement et reconnu
watan vers la fin de l'époque qui nous concerne, notamment par l'autochtone
sédentaire attaché au terroir30, on ne pouvait, hélas, l'effleurer que de très loin, en dépit
de son impact ultérieur, par souci de négliger de mentionner que cet espace intime
est déjà fortement vécu et que seul le marabout, à ce qu'il semble, aura su le
récupérer assez tôt, avant même l'installation des Mérinides, pour pouvoir galvaniser
la sensibilité locale et épouser fermement «la différence».
En résumé, il semble que l'espace au «Maroc», à la fin du «Moyen Age», ait
suscité dans l'ensemble plusieurs modes d'attachement, partant de motivations
diverses reposant, de la part du système composite des Mérinides, soit sur le fisc et
l'extension des réseaux soit sur l'exploitation pulvérisante du territoire.
Parallèlement, l'habitant investi ne manquait pas d'entretenir avec son propre espace exigu
une relation allant de la revendication ethnique à la simple affectivité silencieuse.
De cette configuration complexe, de multiples fidélités et alliances devaient découler
par conséquent, lesquelles, prenant en compte la dimension fondamentale de l'ethnie
particularisante, ne pouvaient naturellement que promouvoir une pluralité quasi-
infinie d'appartenances. A un moment où l'Occident voisin, ajoutons-le, se déployait
dans un sens diamétralement opposé, essayant de ramener pour sa part des
mosaïques d'ethnies, de provinces et de domaines à des entités réductrices articulées
chacune, peu à peu, autour d'une loyauté uniforme envers l'État, la communauté
d'origine et l'unité du territoire.

NOTES

1. Sur l'allure et le contexte global de ce double mouvement, voir notamment R. Arié R., 1973,
63-71, et R. Brunschvig, 1940, 148-149, 162-171, 176-179.
2. M. Kably, 1986, 199-216.
3. A titre indicatif, voir Ibn al-Faqîh, 1885, 78-84; Muqaddasî, 1906, 215-216; Ibn Hawqal,
1938, 64 (trad., 1964, 1, 57); Istakhrî, 1927, 1 1-12 et d'une façon générale la bibliographie
mentionnée par G. Yver in E.I.2.', V, 1174.
4. Courant à l'époque d'Ibn 'Abd-al-Hakam (182/798-257/871), le mot est assez fréquemment
employé à propos des incidents relatés dans le récit rédigé par cet auteur — le plus ancien qui
nous soit parvenu — sur la conquête de l'Egypte et l'Afrique du Nord; voir Ibn 'Abd al-Hakam,
1942, 30, 36, 52, 56, 60, 72, 82.
5. J. Léon l'Africain, 1956, 3-4; Marmol, 1667, I, 9.
6. Ibn Haldun, 1957, 278 (trad. V. Monteil, 1967-8, 93). A comparer avec le texte des 'Ibar,
1959, VI, 201 (trad. A. Cheddadi, 1986, vol. 2, 478 ou De Slane, 1968, I, 194).
36 / M. Kably

7. A. Cheddadi, 1986, vol. 2, 478.


8. Id., 478-. 479.
9. Id., 480.
10. Id, 481.
11. Un aperçu peut en être donné par la liste des populations berbères donnée au ive/xe siècle
par Ibn Hawqal, 1938, 104-107 (trad. 1964, 1, 102-104). De même que par les index, lorsqu'ils
existent, des récits de voyage, des recueils de manâqib et d'ouvrages de nawâzil; voir par
exemple Bekri, 1965, 371-405; at. Tâdilî, 1984, 509; al-Bâdisî, 1926, 233-236 al-Wansarîsî, 1981,
vol. XIII.
12. Al-Idrîsî, 1983, 73, 79, 81, 85, 93, 180. Il est à noter que la même appellation est utilisée
par az-Zuhrî qui rédigea son ouvrage entre 549/1 154 et 556/1 161, alors qu'al-Idrîsî venait d'achever
le sien; voir az-Zuhrî, 1968, 194 (trad. 113).
13. Al-Idrîsî, 1983, 116-123.
14. A. Laroui, 1970, 152-154; Ch. A. Julien, 1952, 81-82; G. Yver, E.T. 2, V, 1179.
15. On note effectivement que le terme «Makhzen», au sens technique du mot, serait
contemporain, au «Maroc» même, de l'expression «al-Magrib al-Aqsâ» désignant le territoire.
Figurant dans la hiérarchie primitive du groupement almohade, son usage effectif pourrait bien
remonter également à l'époque almoravide; voir E. Lévi-Provençal, 1928, 46 (trad., 70). Sur
l'historique de l'institution, M. Buret, E.I.2., VI, 131-135.
16. Sur l'essentiel de la question considérée par rapport à l'Occident, voir J. R. Strayer, 1979,
passim-, M. Mollat, 1977, 113-131 ; R. Fédou, 1971, 1971, 137-151 ; B. Guenée, «État et nation
en France au Moyen Age», Revue historique, CCXXXVII, 1967, 17-30.
17. J. Berque, «Qu'est-ce qu'une tribu nord-africaine?», in Maghreb, histoire et sociétés, S.N.E.D.,
1974, 22-34, notamment 26 sq.
18. Sur la notion de frontière dans le schéma islamique en général, A. Miquel, 1975, II, 533-540;
M. Kably, 1987, 10-11.
19. Sur le Gharb médiéval, J. Léon l'Africain, op. cit., 250 et 254; Michaux-Bellaire, 1913, 5,
13 et 61; R. Le Tourneau, E.I.2., II, 1032.
20. Ibn Haldûn, 1959, VII, 352-353 (trad. 1986, vol. 2, 563-4 ou 1969, IV, 33-34).
21. Id., VII, 367-369 (trad. 1969, IV, 48-50).
22. M. Kably, 1986, 59-68.
23. Sur ces justifications officielles, M. Kably, 1986, notamment 80-81 et 135-140.
24. Ch. E. Dufourcq, 1966, 208-237 et 377-406.
25. Ibn Battûta, 1968, IV, 350-351; Mas Latrie, 1886, 384-386 et 407-411.
26. Ibn Haldûn, 1959, VII, 594 et 612 (trad. 1969, IV, 288 et 307-8).
29. M. Kably, 1986, 199-217.
30. J. Berque, 1978, 35-42.

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