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ROUÉ
CAPA-SH OPTION G
Session 2007
UN PATIENT SUJET
Accueillir un patient, entendre un sujet,
accompagner un élève…
FREUD S. L’analyse sans fin, l'analyse avec fin. Paris : Fayard, 1994
1
Centre Médico Psycho Pédagogique
TABLE DES MATIÈRES
A.Introduction_________________________________________3
B.Présentation________________________________________5
C.L’aide à dominante rééducative proposée en CMPP_________5
1.La notion de soin________________________________5
a) Un accueil médicalisé___________________________5
b) Une éthique professionnelle commune______________7
(1) Le consultant : l’enfant et la famille___________7
(a)La liberté du consultant................................................................................................ 7
(b)Le respect du consultant............................................................................................... 7
A. Introduction
Je suis nommée depuis septembre 2006 sur un poste d’enseignant
spécialisé chargé des aides à dominante rééducative au sein du CMPP de
Pontivy. Outre la mutation que m’oblige à opérer la construction de cette
nouvelle identité professionnelle, le cadre même de l’exercice de mes fonctions
appelle une adaptation qui n’est pas sans soulever de nombreuses questions.
L’aide à dominante rééducative proposée à l’enfant au CMPP apparaît, en effet,
de nature sensiblement différente de celle dont peut bénéficier l’élève de la part
du RASED. Il n’y est pas accueilli de la même façon, la demande d’aide
n’émane pas et n’est pas reçue par les mêmes interlocuteurs. Je me propose ici
d’évoquer ces différences et de tenter de répondre à certaines questions que
ma pratique a fait émerger au contact des enfants qui m’ont été confiés et
lorsqu’elle s’est trouvée confrontée aux apports théoriques de la formation au
CAPA-SH option G.
B. Présentation
Un Centre Médico-Psycho-Pédagogique est un établissement de soins
accueillant des enfants et adolescents de 0 à 20 ans qui viennent en
consultation parce qu’ils connaissent des moments difficiles ou qu’ils sont en
souffrance dans leur vie quotidienne et/ou dans leur scolarité. Le consultant est
reçu en cure ambulatoire, c’est-à-dire sur rendez-vous réguliers de manière à
perturber le moins possible son quotidien.
a) Un accueil médicalisé
Le CMPP a la volonté :
Le CMPP est en accord avec les valeurs de référence des PEP (laïcité,
solidarité…).
2. La demande d’aide
a) L’enfant-patient
Le fait qu’en premier lieu l’enfant soit accueilli par le médecin n’induit-il
pas d’emblée, de la part des consultants, une représentation significative qui le
place dans un statut de “malade” ? Cette position particulière de “patient” n’est-
- 9-
b) L’enfant-sujet
j’emprunte ici cette idée à Philippe LECORPS1 — sera “de rétablir le patient
comme sujet de droit”. Accueillir l’enfant dans sa singularité en ne sachant rien
à priori est, me semble-t-il, la seule attitude possible à adopter.
1
Enseignant chercheur à l’École nationale de la santé publique, in PÉDAGOGIE MÉDICALE -
Mai 2004 - Volume 5 - Numéro 2 - Tribune
2
H. Arendt, L’impérialisme. Paris - Fayard, 1982.
- 11
-
D. L’enfant-élève
1. Les relations avec l’école
1
J. DUVAL HÉRAUDET, Une difficulté si ordinaire Ed EaP- 2001 – p.87
2
Y. DE LA MONNERAYE, La parole rééducatrice 2e édition Ed DUNOD – 1991 p.117
- 13
-
1
2 Y. de L.M. Ibidem p. 112
Y. de L.M. Ibidem p. 111
3
Y. de L.M. Ibidem p. 113
- 14
-
b) Le secret médical
1
J.DUVAL HÉRAUDET, op. cit. p.88
- 15
-
indispensable que le sujet donne son accord avant toute rencontre avec son
enseignant, et qu’un rapport le plus fidèle possible lui en soit systématiquement
rendu.
On voit bien ainsi, que ce qui se joue dans la rencontre avec l’enseignant
n’est pas de l’ordre du recueil d’informations, mais bien de la triangulation, qui
permet à l’enfant d’exister en tant que sujet désirant dans le discours des
adultes se rencontrant à son propos. Sans cette condition, la relation de
confiance indispensable à toute rééducation, la prise en compte de cette qualité
de sujet désirant, ne peut se réaliser et voue à l’échec toute entreprise d’aide à
l’enfant en difficulté.
b) La demande de l’élève
Nous verrons à quel point cette difficulté particulière revêt bien le statut
de symptôme et par quel détour il est possible d’envisager une aide pour
Marion.
Lorsque j’ai rencontré Théo (7 ans, CE1) pour la première fois, il était
convenu que nous ferions le point sur ses difficultés. Je lui ai donc proposé des
épreuves extraites de l’“Évaluation des Compétences Scolaires” (cycle II) de
Abdelhamid Khomsi. Très vite, il a manifesté de l’agitation (et de l’anxiété ?)
face aux épreuves de lecture. Il s’est mis alors à pleurnicher, soupirer, geindre.
Quitte à fausser les résultats du test, je suis intervenue et l’ai sollicité tout en lui
proposant de l’aide. Théo a, de cette façon, réussi à lire les phrases proposées,
ce qu’il ne parvenait pas à faire seul. Sa difficulté ne tenait pas tant dans la
maîtrise de l'acte de lire, que dans le rapport difficile qu'il entretenait avec la
lecture. Techniquement, il était opérant, pratiquement, il ne pouvait pas lire.
Ainsi, même si le maintien en CP ne se justifiait pas, Théo se trouvait
cependant en grande difficulté en CE1.
mère qui se substitue à elle auprès du fiancé en question. Pour Aurore, la place
de chacun ne semble pas clairement établie, elle semble dans la confusion-
fusion des générations, ce qui n’est pas sans évoquer la configuration
œdipienne.
Marion, nous l’avons vu, commet des erreurs répétées en conjugaison, lit
les verbes de manière erronée en modifiant improprement les temps auxquels
ils sont écrits. Le travail proposé en rééducation ne peut porter sur la
conjugaison car alors, il tenterait de s’attaquer au symptôme plutôt qu’à sa
signification (cf. J. LACAN, le Symptôme parle du et à la place du Sujet). Si,
1
Serge BOIMARE, L’enfant et la peur d’apprendre Ed DUNOD (1999)
2
On peut voir ici une interprétation à deux niveaux, celui du “conscient“, où le rééducateur se
place ostensiblement en position d’attente, d’accueil, dans le respect du “contrat,“ de
“l’engagement“ rééducatif (cadre, parole protégée, liberté d’expression assurée) et celui de
“l’inconscient“ dans lequel le rééducateur ne peut se prévaloir d’aucun savoir à priori et où la
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-
Écrire une ou des histoires lui permettra peut-être de rejouer ce qui s’est
mal passé pour elle, des éléments de son expérience qu’elle n’a pas réussi à
s’approprier pour se construire des repères identitaires sur lesquels appuyer sa
compréhension du monde, en particulier temporelle et sa capacité à se projeter
dans l’avenir.
Solène est en CM1, elle aura 12 ans au mois d’août prochain. Elle a été
placée avec sa sœur jumelle en famille d’accueil, suite à des événements
graves commis par leurs parents à leur encontre.
1
Colette LATERRASSE & Odette LESCARRET, La construction de l’horizon temporel chez l’enfant,
Temporalistes n° 14 pp. 13-20. Les auteures mettent en évidence le lien entre l'évolution des
temporalités et la construction de la personne saisie à travers les activités de références et les
choix identificatoires.
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l’encourage alors à compléter sa formule, même si elle ne sait pas, pour « faire
semblant ».
2 6 0 3
Je demeure un peu interdite, et lui 24
demande à quoi servent les divisions.
6 18 0
Comme Solène semble n’en avoir aucune idée, je lui propose de jouer avec
des jetons magnétiques. Je lui pose la division (27 : 3) et lui soumets le
problème suivant :
« Une mamie rend visite à ses trois petites filles. En partant, elle fouille
dans son porte-monnaie et leur donne 27 € à se partager en parts égales. Elle
a 2 billets de 10 €, 1 billet de 5 €, et 2 pièces de 1 €. »
1
http://fr.wikipedia.org/wiki/Phobie
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-
1
http://fr.wikipedia.org/wiki/Psychanalyse
2
J. DURANDEAUX, Des langues et des discours dans la psychanalyse, Ed SEUIL
3
H. GARREL et D. CALIN , Les apports de l’ordinateur en rééducation, in Éduquer n° 672/3,
L’Harmattan, Paris, 09/2002
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-
1
Serge BOIMARE, L’enfant et la peur d’apprendre, Ed DUNOD
2
Bruno BETTELHEIM, Psychanalyse des contes de fées, Ed Robert LAFFONT p.52
3
B.B. Ibidem p.53
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-
Maxence est en 5e. C’est un garçon calme et discret qui éprouve des
difficultés à trouver sa place au collège.
Il choisit le jeu “La légende de Kyrandia” dans lequel le héros est aux
prises avec un personnage malveillant qu’il doit vaincre pour accomplir sa
quête. Plongé au cœur d’un labyrinthe peuplé de monstres, Maxence laisse
échapper : “ Ça doit faire peur aux petits ! ”
Que veut-il dire par là ? Qu’il se rend compte qu’il est lui-même envahi
par la peur ou qu’il réalise qu’il est capable de la tenir à distance ?
L’engouement qu’il manifeste pour ce jeu, la quasi-jubilation et le soulagement
qu’il éprouve lorsqu’il réussit une épreuve ne me paraissent pas tellement
virtuels et pas si éloignés des émotions ressenties dans la vie réelle. N’est-on
pas directement dans le “faire semblant” ?
1
B.B. Ibidem p.17
2
V. Propp, Morphologie du conte, Seuil, 1965
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E. Conclusion
Le travail en CMPP, bien qu’il diffère quelque peu de celui en RASED du
fait du cadre et des publics auxquels il s’adresse, n’en adopte pas moins les
principes et la philosophie.
Entraînant les adultes qui gravitent autour de lui dans sa difficulté, il est
impératif, en-deçà et au-delà de la seule prise en charge du Sujet, de rétablir la
nécessaire triangulation entre les différents acteurs (parents, enseignants,
institution scolaire) pour autoriser une évolution favorable et un retour de
l’investissement dans les apprentissages scolaires.
BIBLIOGRAPHIE