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et des Lumières
Montserrat Cots
1 crèdit
P00/07007/00203
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 Époques classique et des Lumières
Sommaire
Introduction ............................................................................................... 5
Objectifs ...................................................................................................... 6
Résumé ........................................................................................................ 53
Activités ...................................................................................................... 57
Réponses ..................................................................................................... 59
Glossaire ..................................................................................................... 60
Bibliographie ............................................................................................ 61
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 5 Époques classique et des Lumières
Introduction
Mais il ne faut pas penser que le siècle tout entier soit “classique”. L’idéal clas-
sique a eu une lente maturation et il a été précédé d’un long travail d’épurati-
on de la langue : Vaugelas a établi dans ses Remarques sur la langue française
(1647) la charte du bon usage et ainsi la langue classique reste, à peu de chose
près, la langue littéraire actuelle.
Le grand triomphe du classicisme s’est produit au théâtre. Louis XIV l’avait an-
nexé à son prestige personnel comme il avait annexé dès 1672 l’épithète de
Magnus à son nom. Mais d’autres genres, tel le roman ou le sermon, ont brillé
aussi de leur propre éclat.
Le bon sens et la raison ont été des fondements de l’idéal classique ; la raison
a encore été un des pivots de la littérature des Lumières. Mais au XVIII è siècle
la littérature perd sa neutralité ; littérature et philosophie s’allient pour
conduire l’homme à son épanouissement sur la terre. “Le paradis terrestre est
où je suis” dit Voltaire dans Le Mondain (1736) ; encore fallait-il beaucoup lut-
ter pour l’atteindre et pour le mettre à la portée des simples citoyens.
Les Lumières en France apporteront des acquis universels pour le genre hu-
main de même que la vaste entreprise de l’Encyclopédie aspire à répandre le
savoir et à éloigner les ténèbres.
Objectifs
La doctrine classique
3. Savoir situer les grandes périodes du théâtre au XVII è siècle et pouvoir ren-
dre compte de leur évolution.
4. Être capable d’expliquer les traits essentiels qui forment l’idéologie drama-
tique des pièces de Corneille, de Molière et de Racine.
2. Savoir quels ont été les apports français aux Lumières, notamment celui de
l’Encyclopédie.
5. Savoir trouver dans les passages de Rousseau cités sur la page Web du cours
les accents de la “confession”.
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1. La doctrine classique
“Il n’ y a que l’approbation de la postérité qui puisse établir le vrai mérite des ouvrages.
Quelque éclat qu’ait fait un écrivain durant sa vie, quelques éloges qu’il ait reçus, on ne
peut pas pour cela infailliblement conclure que ses ouvrages soient excellents.”
Boileau. VII e Réflexion sur Longin ; cité par A. Bailly, L'école classique française, 1958, p. 35,
Paris: Armand Colin.
“Se llama clásicos a los libros que constituyen una riqueza para quien los ha leído y ama-
do, pero que constituyen una riqueza no menor para quien se reserva la suerte de leerlos
por primera vez en las mejores condiciones para saborearlos…Los clásicos son libros que
ejercen una influencia particular ya sea cuando se imponen por inolvidables, ya sea
cuando se esconden en los pliegues de la memoria mimetizándose con el inconsciente
colectivo o individual.”
Les auteurs du XVIIè siècle ou du “Grand Siècle” n’ont pas eu conscience d’être Rapportez-vous à la lecture du
chapitre 1 sur le romantisme dans le
des classiques. La notion de classicisme n’apparaît que tardivement, à l’épo- module 3.
L’autorité de Louis XIV, qui prend en main le pouvoir dès 1661 et renoue avec
le dessein de Richelieu de constituer un État unifié et puissant, a contribué à sau-
vegarder la gloire littéraire des écrivains; le Roi Soleil lui-même veille à ce que
la grandeur du genre tragique rejaillisse sur la splendeur de son royaume ainsi La notion de régulier est expliquée
au chapitre 2.2.1. : Le culte d’Aristo-
te et la question des règles.
qu’à ajouter à l’éclat des fêtes royales le rayonnement des lettres et des arts.
L’idéal classique a eu une lente maturation et les traits qui en ont conformé la
doctrine ont eu une élaboration très réfléchie et très remise en question par
des générations de critiques.
Différents facteurs ont contribué à ce lent processus, depuis des traités théori-
ques jusqu’aux conditions particulières à la société française de l’époque. Nous
allons les analyser afin de mieux les situer et d’en saisir les conséquences.
La question des unités a été défendue dès 1630 par Jean Chapelain (1595-
1674) dans la Lettre à Godeau ainsi que dans la Poétique de Jules de La Ménar-
dière (1610-1663) parue en 1640. Ces préoccupations parcourent le siècle car
en 1674 c’est encore ce dont traite René Rapin (1621-1687) dans ses Réflexions
sur la poétique d’Aristote et sur les ouvrages des poètes anciens et modernes.
Dans mille cent vers distribués inégalement en quatre chants, il donne des con-
seils d’ordre général sur l’art d’écrire, il examine les genres secondaires et les
grands genres pour revenir encore aux conseils généraux. Son discours critique
est élaboré sur la lecture admirative des Grecs et des Latins; dans ses vers deve-
nus très vite des maximes que l’on apprenait par cœur, Boileau a condensé en
principes vigoureux et simples la doctrine classique : la primauté de la raison,
du bon sens, de la nature, du vrai, le respect des règles et de la vraisemblance
et une sage conciliation du génie et du labeur pour devenir un vrai poète :
Si le XVIIè siècle s’est passionné pour des questions de critique littéraire, il a été
aussi féru de questions de langue et de grammaire.
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“C’est au X VIIè siècle que s’est constituée notre langue classique, qui reste, après un petit
nombre de modifications, notre langue littéraire actuelle. Mais il ne faut pas confondre
langue classique et langue du XVIIè siècle. En laissant de côté les attardés qui, en province
et à Paris même, continuaient à admirer et à imiter Ronsard, nous constatons que la lan-
gue de Corneille n’est pas celle de Racine… Les contemporains se sont rendu compte, en-
tre 1620 et 1660, d’une véritable transformation de la langue… Charles Sorel a donné du
Francion trois éditions successives, avec de nombreuses corrections de langue et de style,
“parce que le langage est devenu plus poli”… Vers 1660, la langue littéraire est fixée – dans
la mesure où peut se fixer une langue vivante.”
G. Grente (dir.). (1954). Dictionnaire des Lettres françaises, p. 576. Paris: Arthème Fayard.
Il est vrai que la volonté d’enrichir et de perfectionner la langue n’a pas été
une nouveauté du XVIIè siècle car la tradition humaniste avait fait de cette
question une de ses occupations prééminentes ; mais au XVIIè siècle les métho-
des changent et l’idée de purisme s’impose, même au niveau sociologique, la
correction linguistique étant devenue une des qualités de l’homme de cour.
Mais c’est à Vaugelas (1585-1650) que reviendra le mérite de tirer toutes les
conséquences de la réforme de Malherbe. La publication, en 1647, de ses Re-
marques sur la langue française, manuel du bon langage, dictera la norme de ce
qu’il faut dire :
“Le livre enseigne en effet, au dire de son auteur, la langue de la cour, le seul véritable
bon usage de la langue française. Car il y a désormais un bon et un mauvais usage, com-
me l’explique Vaugelas dans la préface […] l’usage du plus grand nombre va paradoxale-
ment rejoindre […] la catégorie du mauvais usage.”
D. Trudeau (1992). Les inventeurs du bon usage (1529-1647), p. 167 à 169. Paris: Les édi-
tions de Minuit.
Cette préoccupation pour la langue devient une constante tout au long du siècle :
les maîtres de Port-Royal, Lancelot et Arnauld publient en 1660 la Grammaire gé-
nérale et raisonnée ; en 1672 Ménage publie ses Observations sur la langue française
et en 1675 le Père Bouhours ses Remarques nouvelles sur la langue française. Trois
dictionnaires fixent le lexique : en 1680 le Dictionnaire de Richelet, en 1690 le Dic-
tionnaire de Furetière et en 1694 le Dictionnaire de l’Académie.
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Un cercle littéraire, qui se forme vers 1625 autour d’un jeune lettré qui s’ap-
pelle Valentin Conrart, discute régulièrement chez lui sur des questions de
langue et de littérature. Ce cercle allait devenir, sous l’impulsion du cardinal
Richelieu, la future Académie française.
J.-P. Beaumarchais ; D. Couty ; A. Rey (1984). Dictionnaire des Littératures de langue française
(I, p.3). Paris: Bordas.
“Dès qu’il l’a vu jouer, à la tête d’une troupe dont c’était la première à Paris, Louis XIV a
adopté Molière […]. La troupe dite de Monsieur est établie sur ordre du roi dans un bâti-
ment royal, la salle du Petit-Bourbon […]. Il voit très souvent la compagnie, aide à son
transfert au Palais-Royal, accordé sans loyer […]. Il fait allouer une pension d’homme de
lettres à Molière dès 1663. Il danse dans les comédies-ballets qu’il lui commande jusqu’en
1669.”
J.-P. Beaumarchais ; D. Couty ; A. Rey (1984). Dictionnaire des Littératures de langue française
(II, p. 1523). Paris: Bordas.
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Les salons étaient la partie destinée à la vie de société dans les hôtels particu-
liers de Paris. La littérature occupait une place importante dans la conversa-
tion qui était devenue à son tour l’occupation majeure de la société
aristocratique ou bourgeoise qui les fréquentait. On y faisait des lectures à hau-
te voix et les assistants participaient aux commentaires et aux observations.
“L’Hôtel de Rambouillet est donc d’abord un monde où l’on s’amuse…Il arrive même
qu’on joue la comédie…L’Hôtel de Rambouillet pratique encore d’autres jeux. Le ron-
deau en est un. Voiture lance la mode. Elle fait fureur. À ce moment, il n’est poète qui
n’ait rimé quelque rondeau. Puis, la mode passe, et les énigmes triomphent.”
A. Adam (1962). Histoire de la littérature française au XVII è siècle (I, p. 263 à 266). Paris: Del
Duca.
L’idéal humain qui présida à l’activité sociale du XVII è siècle fut l’honnête
homme. Un manuel de civilité écrit par Nicolas Faret (1596-1646) ayant le ti-
tre significatif de L’Honnête homme ou l’Art de plaire à la cour fut publié en 1630
au moment où l’Hôtel de Rambouillet brillait de tout son éclat et il ne cessa
d’être réédité, preuve de son vif succès. Faret y décrivait le portrait physique,
moral et social du gentilhomme parfait d’après les goûts de l’époque : cultivé
sans être pédant, discret, modeste, mesuré, d’un jugement avisé, doué pour la
conversation et pour la galanterie, parure soignée et propre mais un peu né-
gligée, bref, miroir accompli de perfections et d’honnêteté. Cet honnête hom-
me était censé connaître et apprécier la littérature classique.
En effet, tandis que l’Italie s’était familiarisée avec l’ouvrage dès la première
moitié du XVIè siècle, la France en avait une connaissance beaucoup plus limi-
tée et quand les doctes du XVII è siècle ont recouru à lui pour soutenir l’édifice
théorique d’une réforme littéraire c’est à travers les éditions des commenta-
teurs italiens qu’ils l’ont fait.
Aristote, beaucoup plus qu’Horace, se trouve à la base des principes et des rè-
gles classiques, bien que très souvent sa connaissance ne soit pas directe mais
à travers les interprétations italiennes.
Les auteurs se sont pliés progressivement aux règles mais Corneille a toujours
gardé une certaine indépendance de même que de grands classiques tels que
Molière ou La Fontaine ont toujours soutenu que la grande règle de toutes les
règles était de plaire au public.
J. Racine. Bérénice, Préface, Œuvres complètes (p. 466). Paris : Gallimard, Pléiade, 1950.
“le caractère normal des jeune gens, des jeune filles, des vieillards, etc. était codifié depuis
l’Antiquité dans le cadre des traités de rhétorique qui cherchaient à élaborer une typolo-
gie des comportements vraisemblables. Ainsi, pour en rester au Cid, on a condamné aussi
son entorse à la bienséance : Chimène ayant été introduite dans la pièce comme une jeu-
ne fille bien née et soumise à son père, il est contraire à la bienséance de la faire agir en-
suite comme Corneille la fait agir, c’est-à-dire de lui faire poursuivre le châtiment de
Rodrigue tout en lui faisant avouer qu’elle ne peut cesser de l’aimer, et en lui faisant
même souhaiter de ne pouvoir obtenir sa mort.”
G. Forestier (1993). Introduction à l'analyse des textes classiques (p. 12). Paris: Nathan.
1) Le rationalisme classique
“Il est le plus profond et le plus solide des fondements de l’esthétique classique. La raison
détermine la mission sociale du poète, guide le génie, légitime la règle et dicte les
préceptes: c’est la pièce maîtresse de l’édifice.”
R. Bray (1966). La formation de la doctrine classique en France (p. 114). Paris: Nizet.
La raison s’identifie souvent au bon sens car, comme disait Descartes au début
du Discours de la méthode :
“Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée […] cela témoigne que la puissance
de bien juger, et distinguer le vrai d’avec le faux, qui est proprement ce qu’on nomme le
bon sens ou la raison, est naturellement égale en tous les hommes…”
Descartes. Discours de la méthode, Œuvres et Lettres (p. 126). Paris: Gallimard, Pléiade, 1953.
Les grands auteurs sont d’accord sur ce point: le théâtre de Molière fourmille
de leçons et d’exemples de bon sens, Boileau le recommande de façon catégo-
rique (“Tout doit tendre au bon sens”), Corneille s’en remet à lui comme à un
précepte certain:
“Cette pièce fut mon coup d’essai, et elle n’a garde d’être dans les règles, puisque je ne
savais pas alors qu’il y en eût. Je n’avais pour guide qu’un peu de sens commun.”
Corneille. Examen de Mélite, Œuvres complètes, (I, p. 5). Paris: Gallimard, Pléiade, 1980.
“ici le X VIIè siècle ne doit rien qu’à lui-même […]. Le classicisme est européen, son ber-
ceau n’est même pas en France, mais c’est en France qu’il a reçu sa forme définitive, qu’il
s’est organisé en système cohérent, qu’il a reçu la consécration des chefs d’œuvre. Et le
classicisme, c’est la doctrine de la raison.”
R. Bray (1966). La formation de la doctrine classique en France (p. 114). Paris: Nizet.
Horace dans son Art Poétique (v. 361) avait résumé la comparaison qui était tra-
ditionnelle depuis Aristote de la poésie avec la peinture: “Ut pictura poesis”,
“il en est d’une poésie comme d’une peinture”; par là il voulait signifier que
la poésie et la peinture sont une représentation des choses naturelles, qu’elles
imitent la nature.
Ce principe fut adopté par la doctrine classique qui s’était fixée pour l’œuvre
d’art et pour tous les genres poétiques, tragédie incluse, le modèle idéal de la
nature. Boileau proclame ce principe:
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Et les contemporains ont admiré les personnages des comédies de Molière par-
ce qu’ils étaient des portraits de la nature, c’est-à-dire, de ce qu’ils pouvaient
voir sous leurs yeux tous les jours.
“La principale règle est de plaire et de toucher. Toutes les autres ne sont faites que pour
parvenir à cette première.”
Racine. Préface de Bérénice, Œuvres complètes (I, p. 467). Paris: Gallimard, 1950.
L’imitation n’est point sentie comme une chose honteuse ou un manque de génie
car les Anciens méritent le respect, comme dit Racine en s’appuyant sur Quintilien ;
lui-même revendique l’imitation avec fierté dans la préface de sa Phèdre :
“Voici encore une tragédie dont le sujet est pris d’Euripide. Quoique j’aie suivi une route
un peu différente de celle de cet auteur pour la conduite de l’action, je n’ai pas laissé d’en-
richir ma pièce de tout ce qui m’a paru plus éclatant dans la sienne.”
Racine. Préface de Phèdre, Œuvres complètes (I, p. 745). Paris: Gallimard, Pléiade, 1950.
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L’autorité d’Horace avait mis au premier plan l’idée de l’utilité morale de l’art.
La formule “docere cum delectatione”, “enseigner avec délectation”, avait mis
en relief que le poète peut aussi enseigner. Entre 1630 et 1640 cette question
se pose chez les théoriciens du classicisme pour en conclure que la littérature
doit poursuivre des fins morales. Racine nous le résume très bien quand il ex-
plicite la leçon morale de Phèdre, malgré ce que l’aspect scabreux et inces-
tueux du sujet pourrait laisser supposer :
“Ce que je puis assurer, c’est que je n’en ai point fait où la vertu soit plus mise en jour
que dans celle-ci. Les moindres fautes y sont sévèrement punies. La seule pensée du crime
y est regardée avec autant d’horreur que le crime même. Les faiblesses de l’amour y pas-
sent pour de vraies faiblesses. Les passions n’y sont présentées aux yeux que pour mon-
trer tout le désordre dont elles sont cause ; et le vice y est peint partout avec des couleurs
qui en font connaître et haïr la difformité. C’est là proprement le but que tout homme
qui travaille pour le public doit se proposer.”
Racine. Préface de Phèdre, Œuvres complètes (I, p. 747). Paris : Gallimard, Pléiade, 1950.
5) L’importance de la rhétorique
Les savantes études du professeur Marc Fumaroli ont mis en évidence que l’un des
fondements essentiels de l’esthétique classique était la rhétorique. Elle assure la
beauté de la littérature et de l’esthétique classique en même temps qu’elle en as-
sure la survie. Un seul vers de Corneille, parmi des milliers d’exemples possibles,
en offre un exemple à travers l’emploi de l’oxymore :
Corneille. Le Cid, Œuvres complètes (I, p. 758). Paris : Gallimard, Pléiade, 1980.
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Mais au début du siècle, à partir de 1620, les conditions sociales sont favora-
bles à l’activité théâtrale à Paris et en province.
Dans la première moitié du siècle, on peut considérer Pierre Corneille (1605- Lecture recommandée
1684) comme le grand rénovateur du théâtre: il commence sa carrière théâ- Consultez pour avoir une vue
générale de la production de
trale avec des comédies (Mélite,1629 ; La Veuve,1632 ; l’Illusion comique, 1635)
ces auteurs J.-P. Beau-
pour donner en 1637 la pièce à grand succès qui marque l’intronisation du marchais, D. Couty, A. Rey
(1984). Dictionnaire des Litté-
théâtre à Paris: Le Cid , avec le sous-titre de tragi-comédie, remplacé par celui de ratures de langue française.
Paris: Bordas.
tragédie dans l’édition de 1648. Le charme que la pièce a exercé sur le public
parisien est signalé par une lettre de l’auteur Mondory, créateur du rôle de Ro-
drigue au théâtre du Marais:
“Il est si beau qu’il a donné de l’amour aux dames les plus continentes, dont la passion
a même plusieurs fois éclaté au théâtre public. On a vu seoir en corps aux bancs de ses
loges ceux qu’on ne voit d’ordinaire que dans la Chambre dorée et sur le siège des fleurs
de lys.”
Le succès de cette pièce a déclenché la Querelle du Cid car Corneille usait Voyez dans le chapitre 1
concernant la doctrine classique le
d’une grande liberté dans l’application des règles; des critiques et l’Académie passage 1.2.1., consacré aux règles.
française sont intervenus pour condamner ses écarts vis-à-vis des préceptes
aristotéliciens. Après cette querelle, le théâtre dit régulier s’imposa décidé-
ment à Paris.
Corneille a été un homme de théâtre, un homme de métier qui savait par ins-
tinct ce que le public aimait. Cette maîtrise du métier se retrouve à son point
culminant chez Molière (1622-1673) qui incarne la perfection classique dans
le domaine du comique. Acteur de théâtre lui-même et convaincu que “la
grande règle de toutes les règles est de plaire au public”, Molière a excellé dans
les registres comiques les plus divers, depuis la farce jusqu’à la comédie pleine
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La redécouverte de la tragédie est liée au travail des humanistes qui avaient di-
vulgué l’aristotélisme dramatique moyennant les éditions et les commentaires
de la Poétique et aussi grâce à leur effort pour faire pénétrer la tragédie gréco-
latine sur la scène. Aux traductions des œuvres vont suivre les premières tra-
gédies françaises originales.
J. de La Ménardière. Poétique, chapitre III; cité par J. Morel (1964). La tragédie (p. 103).
Paris: Armand Colin.
La comédie a aussi ses origines dans la Grèce antique et elle s’épanouira ensui-
te à Rome. Elle apparaît sur la scène française au XVIè siècle rattachée au mou-
vement humaniste qui essayait de la démarquer de la tradition de la farce sans
trop de succès. Dans les premières décennies du XVIIè siècle, la farce triomphe
encore à Paris ainsi que les procédés de la “commedia dell’arte” et trois acteurs
de ces registres enthousiasment le public: Turlupin, Gros-Guillaume et Gaul-
tier-Garguille.
Dès la fin du XVIè siècle, les caractères essentiels de la comédie étaient fixés. M.
Gilot et J. Serroy les résument ainsi:
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“la comédie, genre moins élevé que la tragédie mais qui se distingue aussi des genres su-
balternes comme la farce, met en scène des personnages de condition moyenne ou peti-
te, animés de sentiments communs, dans un cadre quotidien, et vivant une intrigue dont
le dénouement est forcément heureux. L’expression est adaptée aux personnages, et re-
lève donc du registre familier. Quant au rire, s’il est bien une donnée du “comique”, il
n’en est pas l’élément premier…il peut utiliser une large gamme d’effets…jouant ainsi
une fonction morale efficace, selon le précepte du “castigat ridendo mores”
M. Gilot; J. Serroy (1997). La comédie à l'âge classique (p. 76-77). Paris, Belin.
Parmi les différentes formes de comédie au XVII è siècle (la comédie imitée de
l’antique, la comédie imitée de l’italien, la comédie imitée de l’espagnol, la co- Voyez cette préoccupation
morale dans la préface
médie de Corneille), la comédie de Molière se propose de peindre l’homme de Tartuffe.
dans sa complexité. Le héros n’est plus un type figé mais un individu qui évo-
lue et qui ne fait pas seulement rire mais qui est aussi capable d’émouvoir. Mo-
lière affirme la fonction morale de la comédie mais cela ne l’empêche pas de
recourir à la farce quand il juge nécessaire d’étendre ou de varier les registres
du comique.
Alexandre Hardy (1572 ?- 1632 ?), auteur très fécond (six cents ou sept cents
poèmes dramatiques) qui travaille à gages pour les troupes et qui est lui-même
acteur de théâtre, domine cette période. Il restaure la tragédie de la Renaissan-
ce en cinq actes et en vers alexandrins mais il la transforme en l’adaptant aux
goûts du public: ainsi les chœurs sont réduits ou parfois supprimés. Hardy es-
saie de garder l’unité d’action sans trop se soucier de celles de lieu et de temps.
Il a écrit aussi beaucoup de tragi-comédies et des pastorales, sans doute pour
mieux s’adapter aux goûts du public.
L’œuvre de Hardy a été le premier modèle pour les auteurs qui aspiraient à
écrire du théâtre vers 1630 ; Corneille dans l’Examen de Mélite déclare qu’il a
pour guides “les exemples de feu Hardy”.
sistance des auteurs partisans de la liberté sera vaincue. Les modèles de théâtre
espagnols seront éliminés, considérés trop irréguliers.
• Une tragédie où l’intrigue doit être bien ajustée et où les règles tendent à la
renforcer. À un moment de sa carrière théâtrale, se manifeste chez lui un
goût marqué pour les intrigues compliquées.
“la volonté suivant la raison, fondant des résolutions sur des jugements clairs et vrais,
considérant sa liberté et la maîtrise de soi comme les biens suprêmes, incapable de repen-
tir comme de crainte…”
G. Lanson (1954). Esquisse d'une histoire de la tragédie française (p. 81). Paris: H. Cham-
pion.
• Une tragédie dont les sujets historiques constituent très souvent la source,
Corneille considérant que l’amour est une passion trop faible pour en faire
l’inspiration centrale d’une tragédie. Il avait un penchant pour les sujets
nouveaux, l’inconnu étant, selon lui, une bonne formule pour susciter la
curiosité et la surprise.
Pendant ces années assombries par les conspirations, les cabales et les jalou-
sies, Molière a créé son œuvre la plus achevée, le Misanthrope (1666), la pièce
préférée de Boileau. Le Misanthrope est une comédie pleine de “sérieux” dans
laquelle Molière reflète le théâtre mondain; le héros, Alceste, est un gentil-
homme loyal qui supporte mal les conventions sociales et qui refuse de s’y
adapter; il choque tout le monde et, même en ayant raison, il devient ridicule.
Il doit quitter la société pour laquelle il n’est pas fait. Rousseau se reconnaissait
dans ce personnage et il avait accusé Molière d’avoir ridiculisé la vertu en le
ridiculisant. En fait, la leçon de Molière est multiple et nuancée.
À partir de 1668, l’activité créatrice de Molière touche tous les genres: des co-
médies, des comédies-ballets, des pastorales, des farces… La cour, installée à
Versailles, est avide de nouveaux divertissements et elle demande de grands
spectacles; Lully triomphe avec l’opéra dont Louis XIV est devenu amateur. Le
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Voyons quels sont les caractères que Racine présente dans son œuvre:
Racine. Phèdre, Œuvres complètes (I, p. 771). Paris: Gallimard, Pléiade, 1950.
“Il y avait longtemps que je voulais essayer si je pourrais faire une tragédie avec cette sim-
plicité d’action qui a été si fort du goût des Anciens. Car c’est un des premiers préceptes
qu’ils nous ont laissés.”
Racine. Préface de Bérénice, Œuvres complètes (I, p. 465). Paris: Gallimard, Pléiade, 1950.
“Ce n’est point une nécessité qu’il y ait du sang et des morts dans une tragédie ; il suffit
que…tout s’y ressente de cette tristesse majestueuse qui fait tout le plaisir de la tragédie.”
Racine. Préface de Bérénice, Œuvres complètes (I, p. 465). Paris: Gallimard, Pléiade, 1950.
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• Des diverses passions que Racine a mises dans le cœur de ses personna-
ges c’est l’amour qui l’a le plus intéressé. La violence du sentiment
amoureux saisit le héros et l’empêche de se servir de la raison. Il existe
évidemment des couples heureux dans le théâtre de Racine mais on di-
rait que leur rôle est de servir de contrepoint à la passion fatale et mal-
heureuse du héros.
• Racine déclare que le héros de la tragédie doit toujours avoir quelque im-
perfection, c’est-à-dire, avoir une vertu capable de faiblesse ; aussi peut-il
éveiller la sympathie et la commisération.
Parmi les écrits théoriques importants parce qu’ils nous transmettent les
points essentiels de la dramaturgie, il faut citer La Pratique du théâtre (paru en
1657), véritable histoire du théâtre français de 1630 à 1660, écrite par l’abbé
d’Aubignac et les Trois discours sur le Poème dramatique (1660) de Corneille qui
forment un des plus beaux traités de “technique” écrit par un homme de mé-
tier ; cet ouvrage nous montre la façon dont il opérait et ses justifications rai-
sonnées aux reproches qu’on lui avait faits.
Du point de vue interne, une pièce classique est composée des éléments
suivants:
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1) L’exposition
2) Le nœud
Le nœud était en fait assimilé à l’intrigue de la pièce. Le nœud est formé par
les événements qui, se mêlant aux différents intérêts des personnages, prolon-
gent l’action et éloignent le dénouement. L’essentiel du nœud est constitué
par l’obstacle, c’est-à-dire le personnage ou les événements qui s’opposent à
la réalisation du bonheur du héros.
Les obstacles pouvaient être de deux sortes : extérieurs, quand les parents, la
différence de rang social, de fortune, de religion, etc. empêchaient le bonheur
amoureux du héros ; et intérieurs, beaucoup plus complexes, quand le héros les
trouve dans son for intérieur, c’est-à-dire, au fond de soi-même.
“Un obstacle n’est intérieur que si l’on veut bien qu’il le soit, et pour qu’un obstacle ex-
térieur devienne intérieur, il suffit que le héros en admette la légitimité et accepte de s’y
soumettre ou de lutter contre lui, au lieu de se dérober en donnant à ses désirs un autre
objectif ou en fuyant. Rodrigue et Chimène sont séparés par la mort du Comte, qui ré-
sulte elle-même de l’attitude arrogante de ce père; mais il n’y a de drame que parce que
les jeunes gens acceptent cette situation, avec tous les déchirements qu’elle implique
pour leur amour; d’extérieur, l’obstacle devient intérieur.”
Observons encore avec Schérer qu’un obstacle imaginaire peut fournir les mê-
mes avantages dramatiques qu’un obstacle réel. Il y a aussi les faux obstacles
que le héros prend pour des vrais et à ce moment-là naissent les malentendus
ou quiproquos, conséquence des méprises du héros : ainsi Chimène se trompe
quand don Sanche lui apporte l’épée de Rodrigue et elle en déduit qu’il est
mort.
En plus des obstacles, le nœud est aussi constitué par les péripéties.
Les péripéties (du mot grec “peripeteia”, événement imprévu) étaient des
changements subits de la situation qui la modifiaient; ces événements amè-
nent la crise d’où découle le dénouement ; ces revirements de fortune impré-
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 29 Époques classique et des Lumières
vus étaient considérés positifs parce qu’ils entraînaient des effets de surprise
agréables pour les spectateurs.
Les péripéties pouvaient être uniques ou multiples . Dans le premier cas elles
amenaient le dénouement ; dans le deuxième, elles étaient assimilées à des
coups de théâtre.
3) Le dénouement
Le nœud d’une pièce devait être “dénoué” à la fin de celle-ci: les complica-
tions du nœud ou de l’intrigue devaient être démêlées ou résolues et acquérir
un état stable au dernier moment de la pièce.
Le dénouement est donc un événement qui tranche le fil de l’action, par la dis-
parition des “périls” ou des obstacles, ou par la consommation du malheur.
4) Les règles
1) L’acte
L’acte est une partie d’une pièce de théâtre composée de scènes. Le nombre
avait été fixé à cinq, bien qu’on trouve des comédies à trois actes et même à
un acte. La coupure des actes ne pouvait répondre à une division arbitraire car
l’acte devait avoir sa propre individualité et former un ensemble cohérent.
“s’il y a trop peu de scènes, l’acte ne sera pas assez varié ; s’il y en a trop, il y aura beau-
coup d’agitation, il y aura peu de discours, c’est-à-dire beaucoup de confusion…”
2) L’entracte
Racine. Phèdre, Œuvres complètes (I, p. 782). Paris: Gallimard, Pléiade, 1950.
Dans le Cid, la bataille de Rodrigue contre les Maures se passe encore dans l’en-
tracte précédant l’acte IV, bon recours pour échapper aux illogismes inhérents
à l’unité de temps:
Chimène
N’est-ce point un faux bruit ? le sais-tu bien, Elvire ?
Elvire
Vous ne croiriez jamais comme chacun l’admire,
Et porte jusqu’au Ciel d’une commune voix
De ce jeune Héros les glorieux exploits.
Corneille. Le Cid, Œuvres complètes (I, p. 752). Paris: Gallimard, Pléiade, 1980.
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 31 Époques classique et des Lumières
Naturellement, ce qui se passe dans l’entracte doit être annoncé dans l’acte
précédent ou repris à l’acte suivant.
3) Les scènes
La scène est la partie d’un acte déterminée par le changement des acteurs. “Il
y a changement de scène chaque fois qu’entre ou sort un nouveau personna-
ge” (Schérer, p. 215).
• l’aparté: Il consiste à faire parler un acteur “à part soi” devant d’autres ac-
teurs qui sont censés ne pas entendre.
L’aparté sert souvent à faire connaître aux spectateurs des choses que le
personnage, obligé de dissimuler, ne peut pas exprimer à haute voix. Ses
possibilités comiques sont exploitées dans la comédie de Molière.
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 32 Époques classique et des Lumières
“L’alexandrin classique, celui de Racine […] obéit à des règles métriques fortes. Principa-
lement il doit être composé de deux unités (hémistiches) égales, soudées entre elles ; les
6e et 12e syllabes, fortement marquées, […] sont constituées par la dernière voyelle plei-
ne d’un mot lexical (verbe, nom, adjectif, adverbe) ou d’un segment de phrase; la rime
plate est la disposition majoritaire, deux rimes consécutives devant être d’espèces diffé-
rentes (masculine et féminine en alternance); doit être observée la concordance entre
mètre et syntaxe (d’où, par exemple, proscription d’enjambement).”
J.-P. Beaumarchais ; D. Couty ; A. Rey (1984). Dictionnaire des littératures de langue françai-
se (III, p. 2418). Paris: Bordas.
Racine. Phèdre, Œuvres complètes (I, p. 767). Paris : Gallimard, Pléiade, 1950.
4) Les répétitions.
Parmi les figures de rhétorique les plus employées, les auteurs classiques ont uti-
lisé les répétitions; au début du vers elles renforçaient la musicalité des vers:
Les goûts du public pour tout ce qui était “spectacle” et “pompe” se heurtaient
aux exigences des théoriciens de tenir l’unité de lieu, peut-être la plus négligée
des trois unités et qui appauvrissait les changements de décor. Rappelons que
le rideau était tout à fait exceptionnel au XVIIè siècle.
Après cet aperçu, citons en conclusion l’opinion de Jacques Schérer sur la dra-
maturgie classique:
“Il s’est répandu depuis un temps un esprit philosophique presque tout nouveau, une lu-
mière qui n’avait guère éclairé nos ancêtres”
Fontenelle (1732). Éloge funèbre de La Motte ; cité par R. Mortier (1969). Clartés et ombres
du siècle des Lumières (p. 114). Genève: Droz.
D’Alembert (1759). Essai sur les Éléments de Philosophie ; cité par E. Cassirer (1966). La phi-
losophie des Lumières (p. 41). Paris: Fayard.
L’image fondatrice du siècle est celle de “lumière”, associée aux valeurs positi-
ves, par opposition aux “ténèbres”. Immanuel Kant tenta de définir les “lu-
mières” (“Aufklärung”, substantif formé sur “aufklären”, éclairer) dans un
article publié dans la Berlinische Monatsschrift en 1783 où il en souligna avec
force les composantes essentielles:
“Les Lumières, c’est pour l’homme sortir d’une minorité qui n’est imputable qu’à lui. La
minorité, c’est l’incapacité de se servir de son entendement sans la tutelle d’un autre.
C’est à lui seul qu’est imputable cette minorité, dès lors qu’elle ne procède pas du man-
que d’entendement, mais du manque de résolution et de courage nécessaires pour se ser-
vir de son entendement sans la tutelle d’autrui. Sapere aude ! Aie le courage de te servir de
ton propre entendement: telle est donc la devise des Lumières”
I. Kant. Qu'est-ce que les Lumières ? Traduction, préfaces et notes par J. Mondot (p. 73).
Saint-Étienne: Université de Saint-Étienne, 1991.
Jean Mondot souligne dans son commentaire à cette définition les concepts
essentiels qui s’en dégagent :
En France, les Lumières ont brillé de leur propre éclat et avec un caractère
Lecture recommandée
propre: le mouvement encyclopédiste et une élite de philosophes et d’écri-
Consultez dans le
vains en ont assuré la cohérence; parmi les plus notables citons Montesquieu Dictionnaire des Littératures de
(1689-1755), Voltaire (1694-1778), La Mettrie (1709-1751), Rousseau (1712- Langue française les articles
consacrés à ces auteurs.
1778), Diderot (1713-1784), Condillac (1714-1780), Helvétius (1715-1771),
D’Alembert (1717-1783), D’Holbach (1723-1789) et le marquis de Sade (1740-
1814), qui s’inscrivait encore dans le sillage des Lumières.
Nous avons vu que Kant citait dans son texte un vers d’Horace comme devise
des Lumières:
Mais cette devise n’était pas la seule: En 1743, Dumarsais, académicien et phi-
lologue, donnait une définition du mot “philosophe” en s’appuyant sur un
vers de Térence qui peut aussi valoir comme devise des Lumières:
“Homo sum, humani nihil a me alienum puto : Je suis homme et rien de ce qui est hu-
main ne m’est étranger.”
“Les autres hommes sont déterminés à agir sans sentir, ni connaître les causes qui les font
mouvoir, sans même songer qu’il y en ait. Le philosophe au contraire démêle les causes
autant qu’il est en lui, et souvent même les prévient, et se livre à elles avec connaissance
[…]. La grâce détermine le chrétien à agir ; la raison détermine le philosophe [...]
Les autres hommes sont emportés par leurs passions, sans que les actions qu’ils font so-
ient précédées de la réflexion: ce sont des hommes qui marchent dans les ténèbres; au
lieu que le philosophe dans ses passions mêmes, n’agit qu’après la réflexion; il marche
la nuit, mais il est précédé d’un flambeau.
Le philosophe forme ses principes sur une infinité d’observations particulières […]
L’esprit philosophique est donc un esprit d’observation et de justesse, qui rapporte tout
à ses véritables principes; mais ce n’est pas l’esprit seul que le philosophe cultive, il porte
plus loin son attention et ses soins […]
Notre philosophe ne se croit pas en exil dans ce monde; il ne croit point être en pays
ennemi; il veut jouir en sage économe des biens que la nature lui offre; il veut trouver
du plaisir avec les autres; et pour en trouver, il faut en faire: ainsi il cherche à convenir
à ceux avec qui le hasard ou son choix, le font vivre; et il trouve en même temps ce qui
lui convient: c’est un honnête homme qui veut plaire et se rendre utile.”
Cité par Charpentier, J. et M. (1967). Encyclopédie. Extraits (p. 142 à 145). Paris: Bordas.
L’esprit des Lumières était doublé d’un but pédagogique: il fallait procéder à
la diffusion des connaissances et donner une dimension sociale au savoir.
Ainsi a pris forme la vaste entreprise de l’Encyclopédie qui a rallié les efforts
éclairés d’une génération et qui a dynamisé autour d’elle le “parti” des philo-
sophes, devenu désormais une force autonome. À la tête du projet, Diderot et
D’Alembert, aidés d’une excellente équipe de collaborateurs, ont assuré la ré-
daction de l’ouvrage. Parmi les collaborateurs citons notamment : Dumarsais,
qui s’occupait de la partie grammaticale; d’Holbach, avec des articles sur la
métallurgie, la minéralogie et la géologie; Jaucourt, rédacteur d’articles très
divers; Marmontel, s’occupant de la critique littéraire et de la morale; Rous-
seau, collaborateur pour la partie musicale; Saint-Lambert, etc. Voltaire y
avait collaboré aussi, bien qu’au début il se soit tenu à l’écart.
Le projet initial, promu par le libraire Le Breton, était de donner une version
française de l’encyclopédie d’E. Chambers, Cyclopaedia or Universal Dictionary
of the Arts and Sciences, publié en 1728, mais ce projet ayant échoué, un nou-
veau contrat fut signé en 1747 et Diderot et D’Alembert devinrent les respon-
sables de la publication.
Le premier volume est publié le 28 juin 1751. Dans le titre on voyait déjà per-
cer des éléments significatifs de la conception de l’ouvrage: Encyclopédie ou
Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, recueilli des meilleurs au-
teurs et particulièrement des dictionnaires anglois de Chambers, d’Harris, de Dyche,
par une société de gens de lettres, mis en ordre et publié par M. Diderot, et quant à
la partie mathématique par M. D’Alembert.
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 36 Époques classique et des Lumières
“J’ose dire que ce discours, applaudi de toute l’Europe, est supérieur à la Méthode de Des-
cartes et égal à tout ce que l’illustre chancelier Bacon a écrit de mieux.”
Voyez un extrait de ce
Cité dans l’article Encyclopédie, P. Larousse (1870). Grand Dictionnaire Universel du X IX è Discours préliminaire.
3.3.1. Le roman
“Jamais fille chaste n’a lu de romans, et j’ai mis à celui-ci un titre assez décidé pour qu’en
l’ouvrant on sût à quoi s’en tenir. Celle qui, malgré ce titre, en osera lire une seule page
est une fille perdue ; mais qu’elle n’impute point sa perte à ce livre, le mal était fait
d’avance.”
Rousseau. Préface à Julie ou La Nouvelle Héloïse (p. 4). Paris: Garnier, 1960.
“Outre le plaisir d’une lecture agréable, on y trouvera peu d’événements qui ne puissent
servir à l’instruction des mœurs; et c’est rendre, à mon avis, un service considérable au
public, que de l’instruire en l’amusant.”
Prévost. Histoire du Chevalier des Grieux et de Manon Lescaut (p. 5). Paris: Garnier, 1990.
“Avant que de donner cette histoire au public, il faut lui apprendre comment je l’ai trou-
vée.
Il y a six mois que j’achetai une maison de campagne […] dans une armoire pratiquée
dans l’enfoncement d’un mur, on y a trouvé un manuscrit en plusieurs cahiers contenant
l’histoire qu’on va lire…”
“C’est le défaut des romans ; l’auteur se bat les flancs pour s’échauffer, et le lecteur reste
froid. Héloïse est le seul qu’on en puisse excepter.”
“L’impossibilité d’atteindre aux êtres réels me jeta dans le pays des chimères, et ne voyant
rien d’existant qui fut digne de mon délire, je le nourris dans un monde idéal que mon
imagination créatrice eut bientôt peuplé d’êtres selon mon cœur”
La forme épistolaire donne encore son dernier chef d’œuvre avec Les Liaisons
dangereuses de Laclos, roman par lettres “polyphonique” où des correspon-
Voyez la lettre de rupture
écrite par Valmont à Mme
dants divers entrecroisent des lettres gardant chacun un style qui lui est pro- de Tourvel, exemple de
méchanceté extrême.
pre. La lettre devient ici partie intégrante de la stratégie libertine car elle sert à
séduire la victime (Mme de Tourvel) et à perdre la vertu de l’honnête femme
qui sera en plus bafouée et outragée.
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 39 Époques classique et des Lumières
“Il me semble au moins que c’est rendre un service aux mœurs, que de dévoiler les
moyens qu’emploient ceux qui en ont de mauvaises pour corrompre ceux qui en ont de
bonnes, et je crois que ces Lettres pourront concourir efficacement à ce but.”
Laclos. Les Liaisons dangereuses dans Œuvres complètes (p. 7). Paris: Gallimard, Pléiade,
1979.
Dernier grand exemple de technique romanesque très savante est Jacques le Fa-
taliste et son maître (1792 en version allemande et 1796 en français) de Diderot. Voyez un exemple
de la technique anti-
Ouvrage doublé d’intention philosophique, Diderot y expose des arguments en romanesque de Jacques
le Fataliste
faveur de la doctrine déterministe ou fataliste qu’il ne pouvait développer
ailleurs pour des raisons de prudence; Diderot transpose les principes de cette
doctrine dans la structure de la composition du roman, en niant l’autorité du
narrateur sur le récit: l’autonomie de l’événement signifie le refus du roman tra-
Lecture recommandée
ditionnel, procédé qui est souvent rappelé au lecteur; ainsi, Jacques le Fataliste
Consultez dans le
se présente comme un anti-roman où l’auteur joue constamment avec les per- Dictionnaire des Littératures de
sonnages et avec le lecteur. Ce roman a donc une importance historique comme Langue française les synopsis
de tous les romans qui ont
expérience littéraire et comme préfiguration des techniques littéraires du ving- été commentés dans cette
tième siècle. partie.
Dans la seconde moitié du siècle, une série d’écrits théoriques vont essayer de
définir la théorie du drame bourgeois ; les plus importants sont:
• 1757 : Diderot, Entretiens avec Dorval sur Le Fils naturel (qui fait suite au
drame Le Fils naturel).
• 1758 : Diderot, Discours sur la poésie dramatique (qui fait suite au drame Le
Père de famille).
• 1767 : Beaumarchais, Essai sur le genre dramatique sérieux (qui accompagne
son drame Eugénie ).
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 40 Époques classique et des Lumières
Parmi les pièces les plus représentatives de ce nouveau genre citons: Le Fils na-
turel (1757) et Le Père de famille (1758) de Diderot ; Eugénie (1767), Les Deux Amis
(1770), La Mère coupable (1792) de Beaumarchais et La Brouette du Vinaigrier
(1775) de Louis Sébastien Mercier.
Le drame bourgeois a préparé la voie au drame romantique: de ce point de vue, Voyez le drame romantique dans la
leçon Le romantisme en France:
Unité didactique 3, chapitre 1.
sa postérité a été extraordinaire et son apport à l’évolution du théâtre français
essentiel. Son choix décidé pour la prose,- car c’était le langage des hommes tels
qu’ils sont,- l’a situé comme le prédécesseur immédiat du théâtre moderne.
3.3.3. Le conte
Le XVIIIè siècle a beaucoup aimé les contes, ce dont témoignent les nombreux
recueils qui y sont consacrés: le succès des huit contes en prose de Perrault en
1697 (La Belle au bois dormant, le Petit Chaperon Rouge, La Barbe-bleue, le Chat-
botté, les Fées, Cendrillon ou la Petite Pantoufle de verre, Riquet à la houppe, le Petit
Poucet) a été sans égal et ce succès a assuré la mode du “merveilleux” pendant
très longtemps.
En 1704, l’accueil que le public fit à la traduction française de Les Mille et une
nuits mit à la mode les contes orientaux: Les Mille et un jours, Les mille et un
quarts d’heure….
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 41 Époques classique et des Lumières
Mais aucun succès ne fut égal aux contes philosophiques, genre dans lequel
Voltaire excellera, et à celui des contes moraux, bien qu’en moindre mesure.
Des différents contes de Voltaire (Le monde comme il va, Memnon, Histoire des
voyages de Scarmentado, Micromégas, L’Ingénu, L’homme aux quarante écus…)
aucun n’a connu le retentissement de Candide ou l’Optimisme, publié simulta-
nément en 1759 à Paris, Londres et Amsterdam.
Candide a été très diversement interprété car, sous une apparence limpide,
transparente, il a un complexe caractère symbolique et les personnages ont
des idées philosophiques, voire métaphysiques. Mais il ne faut pas lui faire
dire plus que l’auteur n’a dit.
“Je sais aussi, dit Candide, qu’il faut cultiver notre jardin–- Vous avez raison, dit Pangloss ;
car quand l’homme fut mis dans le jardin d’Éden, il y fut mis ut operaretur eum, pour qu’il
travaillât : ce qui prouve que l’homme n’est pas né pour le repos. –Travaillons sans rai-
sonner, dit Martin ; c’est le seul moyen de rendre la vie supportable”
Les leçons de Candide exposent les grandes thèses voltairiennes: le mal existe et
Dieu l’a permis, la métaphysique sert à peu de chose, la religion se ramène à une
religion du travail mais deux vertus civiles se révèlent comme positives: le tra-
vail et la tolérance (Voltaire publie un Traité sur la tolérance en 1763). Il faut
donc être utile à la société et essayer d’être heureux, tout en travaillant pour
améliorer les conditions de l’existence. Ainsi fait Voltaire de son côté dans la pé-
riode de sa vie qu’il passe à Ferney (1760-1778) où il essaie d’améliorer les con-
ditions des terres qui lui appartiennent et il devient le défenseur des victimes de
l’intolérance et du fanatisme (l’affaire Calas, l’affaire Sirven, l’affaire du Cheva-
lier de La Barre…) en adoptant la devise “Écrasez l’Infâme”.
Mais la leçon n’aurait pas été si efficace si Voltaire n’avait pas déployé dans le
conte son art d’écrivain: le comique atteint son but qui est celui de faire rire;
Voyez un exemple
d’antiphrase dans le
l’ironie et l’antiphrase nous font garder les yeux ouverts sur les vraies inten- chapitre III de Candide.
Le genre des contes moraux est surtout représenté par l’ouvrage du même ti-
tre, Contes moraux de Marmontel, publiés de 1755 à 1759 et qui ont connu un
succès prodigieux. Marmontel, comme Voltaire, veut aussi donner une leçon
quoique cette fois-ci elle soit de moindre envergure.
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 43 Époques classique et des Lumières
“L’une des traditions de l’humanisme d’Occident trouve son point d’origine avec le com-
mandement gravé dans le marbre de Delphes : “Connais-toi toi-même” […] l’homme est
proposé ou imposé à lui-même comme une tâche, un domaine à explorer et à conquérir.”
G. Gusdorf (1991). Les écritures du moi (p. 29). Paris: Editions Odile Jacob.
• Soit l’individu veut se justifier et il aspire à se faire connaître tel qu’il est en
détruisant une image fausse qu’on s’est faite de lui; dans ce cas, une inten-
tion apologétique de soi-même pourrait être à la base de son projet :
“Qui que vous soyez […] je vous conjure par mes malheurs, par mes entrailles, et au nom
de toute l’espèce humaine de ne pas anéantir un ouvrage unique et utile […] et de ne pas
ôter à l’honneur de ma mémoire le seul monument sûr de mon caractère qui n’ait pas été
défiguré par mes ennemis. Enfin fussiez-vous vous-même un de ces ennemis implacables,
cessez de l’être envers ma cendre”
Rousseau. Les Confessions (p. 3). Paris: Gallimard, Pléiade, 1959. (Cette note sans titre se
trouve dans le manuscrit de Genève.)
“Je veux, avant de mourir, remonter vers mes belles années, expliquer mon inexplicable
cœur, voir enfin ce que je pourrai dire lorsque ma plume sans contrainte s’abandonnera
à tous mes souvenirs”
“Le moi est haïssable […] En un mot, le moi a deux qualités: il est injuste en soi, en ce
qu’il se fait centre du tout; il est incommode aux autres, en ce qu’il les veut asservir: car
chaque moi est l’ennemi et voudrait être le tyran de tous les autres.”
Pascal. Pensées, Brunswick 455, dans Œuvres complètes (p. 1126). Paris: Gallimard, Pléiade,
1954.
Bien qu’on puisse soutenir que toute littérature soit écriture de soi ou à partir
de soi, il est nécessaire de délimiter un espace littéraire où le moi s’exprimerait
en se posant lui-même comme objet. Ainsi, une littérature qu’on a appelée
“intime”, regrouperait plusieurs genres ou sous-genres ayant comme points de
départ les différentes formulations du moi; parmi ceux-ci, l’autobiographie,
les mémoires, le journal intime et le roman autobiographique. Encore fau-
drait-il y ajouter l’autoportrait, la lettre autobiographique et l’essai tel que
Montaigne l’a modelé dans ses Essais : la forme ouverte de l’essai est pour lui
l’outil idéal qui va lui permettre, moyennant des juxtapositions ou des tou-
ches successives, de parvenir au but de se peindre:
“Je veus qu’on m’y voie en ma façon simple, naturelle et ordinaire, sans contention et
artifice: car c’est moy que je peins…Ainsi, lecteur, je suis moy-mesmes la matière de mon
livre.”
Pour faire une première approche afin de fixer les caractères des modalités lit-
téraires énumérées, au moins des plus significatives, nous allons recourir à
Philippe Lejeune, spécialiste en littérature du moi.
“nous appelons autobiographie le récit rétrospectif en prose que quelqu’un fait de sa pro-
pre existence, quand il met l’accent principal sur sa vie individuelle, en particulier sur
l’histoire de sa personnalité.
Cette définition met en jeu des éléments qui appartiennent à trois catégories différentes :
1. La forme du langage : a) récit ; b) en prose. 2. Le sujet traité : vie individuelle, histoire
d’une personnalité. 3. La situation de l’auteur : a) identité de l’auteur, du narrateur et du
personnage; b) perspective rétrospective du récit.”
Ph. Lejeune (1998). L'autobiographie en France (p. 10). Paris: Armand Colin.
À son tour, le journal intime serait “une écriture quasi contemporaine et mor-
celée, qui n’a aucune forme fixe” (op. cit., p. 24) et le roman autobiographique
serait défini par le fait que l’auteur n’affirme pas que c’est exactement son his-
toire personnelle qu’il raconte, en plus des éléments de fiction qui détermi-
nent la perspective romanesque du récit.
...”La littérature du moi n’a pas attendu pour s’affirmer les décrets des censeurs, ni même
le mot “autobiographie”
...”ne s’introduit dans la langue française qu’après 1830, bien qu’attesté en allemand dès
1795, et en anglais en 1804.”
J. Voisine (1980). “De la terminologie dans l’étude des littératures autour de 1800”, dans
Thèmes et figures du siècle des Lumières. Mélanges offerts à Roland Mortier (p. 322). Genève:
Droz. Et d’autres citations à l’appui.
“Quiero acordarme ahora de mis fealdades pasadas y de las carnales torpezas de mi alma.
Y lo hago, no porque ame estos pecados, sino para amarte a ti, Dios mío. Por amor de tu
amor hago esto, trayendo a la memoria mis caminos torcidos con gran amargura.”
“Que la trompette du jugement dernier sonne quand elle voudra ; je viendrai ce livre à
la main me présenter devant le souverain juge.”
Et dans cette même direction, G. Gusdorf rappelle (op. cit., p. 74) que Rous-
seau, par ses origines helvétiques et protestantes et par son penchant vers une
religion de cœur, appartenait à un grand mouvement spirituel piétiste répan-
du en Europe dès la fin du XVII è siècle.
• Son éditeur, Marc Michel Rey, établi à Amsterdam, lui demandait, dès 1761 :
“Une chose que j’ambitionne depuis longtemps […]ce serait votre vie”.
Rappelons à ce sujet que le roman à la première personne connaît un re - Voyez la partie 3.3.1. consacrée au
roman dans le chapitre 3.3 sur les
gain de succès au XVIIIè siècle, romans que les auteurs essaient de faire pas- Lumières dans ce même module.
“En méditant mon traité de l’éducation, je sentis que j’avais négligé des devoirs dont rien
ne pouvait me dispenser. Le remords enfin devint si vif qu’il m’arracha presque l’aveu
public de ma faute…”
Préambule de Neuchâtel ; cité dans le Dictionnaire de J.-J. Rousseau (p. 159). Paris: Champi-
on, 1996.
• Plus en général, n’oublions pas les considérations faites par Maria Zambra-
no à propos de la confession:
“La confesión surge de ciertas situaciones. Porque hay situaciones en que la vida ha lle-
gado al extremo de confusión y de dispersión…Precisamente cuando el hombre ha sido
demasiado humillado, cuando se ha cerrado en el rencor, cuando sólo siente sobre sí “el
peso de la existencia”, necesita entonces que su propia vida se le revele. Y para lograrlo,
ejecuta el doble movimiento propio de la confesión: el de la huida de sí, y el de buscar
algo que le sostenga y aclare.”
María Zambrano (1988). La confesión: género literario (p. 18-19). Madrid: Mondadori.
Être d’exception lui-même, Rousseau se montre, dès le début des Confessions , très
fier de la singularité de son entreprise et très sûr de l’originalité de son projet:
“Je forme une entreprise qui n’eut jamais d’exemple, et dont l’exécution n’aura point
d’imitateur. Je veux montrer à mes semblables un homme dans toute la vérité de la
nature; et cet homme, ce sera moi.”
“Dans l’entreprise que j’ai faite de me montrer tout entier au public, il faut que rien de
moi ne lui reste obscur ou caché…”
“Ma première partie a été toute écrite de mémoire et j’y ai dû faire beaucoup d’erreurs.”
“Je n’ai qu’un guide fidèle sur lequel je puisse compter ; c’est la chaîne des sentiments
qui ont marqué la succession de mon être, et par eux celle des événements qui en ont été
la cause ou l’effet…je ne puis me tromper sur ce que j’ai senti, ni sur ce que mes senti-
ments m’ont fait faire.”
La sincérité de Rousseau est bien une sincérité du cœur et des sentiments qui
repose sur une évidence intérieure; elle découlerait de la nature et montrerait
par là la supériorité de celle-ci sur la société des hommes.
Les Confessions , en douze livres, ont paru en 1782 (livres I à VI ) et en 1789 (li-
vres VII à XII). Par volonté expresse de l’auteur, elles devaient être un ouvrage
posthume, Rousseau étant décédé en 1778.
Dans la première partie, une place de choix est accordée aux souvenirs
d’enfance:
“Su descubrimiento capital será la recuperación de la infancia como espacio clave del ori-
gen de la personalidad y sin la que difícilmente puede darse una autobiografía sólida-
mente cimentada. Por primera vez, adelantándose más de un siglo a Freud, las
Confesiones abordaban aspectos claves hasta entonces desatendidos, como la sexualidad
infantil o el auto-erotismo.”
J. del Prado ; J. Bravo ; M.D. Picazo (1994). Autobiografía y modernidad literaria (p. 235 à
236). Publicaciones de la Universidad de Castilla-La Mancha.
Le livre VII s’ouvre sur un ton sombre qui préside désormais le récit car les derniers
livres évoquent les malheurs et les perfidies dont il sera la victime, convaincu de
l’existence d’un complot universel contre lui. Le dessein de la seconde partie n’est
plus seulement de faire connaître son moi intime mais d’élucider des faits et de
fausses accusations. À la mémoire qui alimente la première partie, des documents
seront utilisés dans la seconde pour éviter les erreurs.
La fatalité qui pèse sur sa destinée constitue le leitmotiv des derniers livres et la fin
du livre XII qui nous transmet une de ses lectures publiques des Confessions, se clôt
sur l’affirmation de sa sincérité et sur la réitération de son honnêteté.
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 49 Époques classique et des Lumières
Les Confessions vont au-delà du simple récit d’une vie mais elles sont aussi un
excellent guide pour connaître le périple humain de Rousseau et pour connaî-
tre, depuis une position privilégiée, les coulisses des Lumières et de l’aventure
de l’Encyclopédie.
Une formation musicale lui permet de gagner sa vie comme maître de musi-
que tandis que son éducation autodidacte se poursuit aux côtés de Mme de
Warens dont il deviendra l’amant ; Claude Anet habite avec eux en partageant
aussi les faveurs de Mme de Warens et à la mort de celui-ci, ils vont habiter
aux Charmettes:
“Ici commence le court bonheur de ma vie ; ici viennent les paisibles mais rapides mo-
ments qui m’ont donné le droit de dire que j’ai vécu […]. Je me levais avec le soleil et
j’étais heureux; je me promenais et j’étais heureux, je voyais maman et j’étais heureux
[…] le bonheur me suivait partout.”
Rousseau part ensuite pour Paris où il va entrer en rapport avec l’élite intellec-
tuelle du moment et aussi la musicale: Voltaire, Diderot, Grimm, Condillac,
Rameau... Il commence une liaison avec une servante d’auberge, Thérèse Le-
vasseur, dont il aura cinq enfants.
En 1749, D’Alembert fait appel à lui pour rédiger les articles de musique de
l’Encyclopédie. Diderot étant emprisonné à Vincennes, Rousseau va le voir et
en cours de route, il éprouve une “illumination” en lisant le sujet du concours
de l’Académie de Dijon; un système de pensée et de philosophie commence
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 50 Époques classique et des Lumières
à se définir chez lui et il se décide à écrire le Discours sur les sciences et les arts
(1750), premier prix de ce concours et origine de son succès mondain.
“Que fis-je en cette occasion? […]. L’impossibilité d’atteindre aux êtres réels me jeta dans
le pays des chimères, et ne voyant rien d’existant qui fut digne de mon délire, je le nour-
ris dans un monde idéal que mon imagination créatrice eut bientôt peuplé d’êtres selon
mon cœur.”
“À minuit j’entendis un grand bruit dans la galerie qui régnait sur le derrière de la mai-
son. Une grêle de cailloux lancés contre la fenêtre et la porte qui donnaient sur cette ga-
lerie y tombèrent avec tant de fracas, que mon chien se tut de frayeur.”
...”représentent une œuvre à peu près unique par les circonstances de leur composition,
par leur forme, leur contenu et leur écriture. Dictées par la hantise de la maladie et de la
mort, par l’angoisse due aux retards de la publication de l’Émile et à la crainte que le texte
soit défiguré, elles sont un des écrits les plus étincelants de Rousseau […] elles sont con-
sacrées à travers leur raccourci à brosser le portrait intérieur de son moi et destinées à
prendre la place du projet de ses Mémoires, que la mort, qu’il croit imminente, l’empêche
d’écrire. Il s’agit pour lui de justifier la singularité de sa nature, de tracer de lui-même, en
quelques pages, une image conforme à la vérité de son être.”
“Lorsque Rousseau commence les Dialogues, en 1772, il se sent entouré par un monde
absurde, il est envahi par une impression d’étrangeté, mais il ne s’abandonne pas au
désespoir…travaillant pour sa mémoire, il découvre alors que son avenir terrestre est so-
lidaire de celui de l’humanité.”
Les Rêveries ont été écrites pendant les deux dernières années de la vie de Rous-
seau (1776-1778). Il y reprend l’étude de son moi:
“je ne dois ni ne veux plus m’occuper que de moi. C’est dans cet état que je reprends la
suite de l’examen sévère et sincère que j’appelai jadis mes Confessions . Je consacre mes
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 52 Époques classique et des Lumières
“Depuis quatre ou cinq ans je goûtais habituellement ces délices internes que trouvent
dans la contemplation les âmes aimantes et douces. Ces ravissements, ces extases que
j’éprouvais quelquefois en me promenant ainsi seul étaient des jouissances que je devais
à mes persécuteurs.”
La solitude et les promenades dans les prés et dans les bois lui permettent la
reconquête de son moi dans un monde devenu accueillant. La rêverie (vaga-
bondage, extase, parfois méditation) se double d’images charmantes et l’ima-
gination qui lui avait permis de peupler un monde “d’êtres selon mon cœur”,
efface maintenant la séparation du réel et de la fiction:
“à l’attrait d’une rêverie abstraite et monotone je joins des images charmantes qui la vi-
vifient. Leurs objets échappaient souvent à mes sens dans mes extases, et maintenant
plus ma rêverie est profonde plus elle me les peint vivement. Je suis souvent plus au mi-
lieu d’eux et plus agréablement encore que quand j’y étais réellement.”
“Tel est l’état où je me suis trouvé souvent à l’île Saint Pierre dans mes rêveries solitai-
res…De quoi jouit-on dans une pareille situation ? De rien d’extérieur à soi, de rien sinon
de soi-même et de sa propre existence, tant que cet état dure on se suffit à soi-même com-
me Dieu.”
Résumé
Vers 1660, se généralise en France un courant littéraire inspiré des modèles des
Anciens et qui a comme idéals esthétiques essentiels: la raison, l’imitation de
la nature et la soumission aux règles, principalement celles des trois unités, de
la vraisemblance et des bienséances. Ces notions s’appuyaient sur la Poétique
d’Aristote que les théoriciens du classicisme avaient connue à travers les com-
mentateurs italiens de la Renaissance.
Le triomphe de cet idéal esthétique a été possible parce que toute une série de
conditions préalables étaient réunies: la réforme de Malherbe, le désir généra-
lisé d’améliorer et d’épurer la langue, l’influence des doctes et des critiques
qui ont réussi à imposer leurs points de vue, l’existence d’un climat social qui
favorisait le goût de la conversation, de l’honnêteté et de la littérature.
Louis XIV a annexé à son prestige personnel et aux fastes de la cour la produc-
tion littéraire des grands auteurs classiques: Molière a été son comédien à ga-
ges, Racine a été un courtisan intime du roi dont il deviendra, avec Boileau,
l’historiographe.
Le théâtre a été au XVII è siècle l’axe central de la production littéraire et s’y est
concentré, à partir de 1660, l’expression de la doctrine classique.
Au début du siècle, le théâtre était encore une activité très rudimentaire qui se
développait dans des conditions difficiles ; mais cette situation se modifie au
fur et à mesure qu’un public bourgeois prend goût aux représentations théâ-
trales. À cette atmosphère d’encouragement il faut ajouter la forte protection
de Louis XIV ainsi que de la société aristocratique de l’époque.
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 54 Époques classique et des Lumières
Pendant les premières décennies du siècle, une lutte esthétique se produit entre
les tendances qu’on peut qualifier de baroques et les tendances classiques ; le
théâtre baroque aime la tragi-comédie et la pastorale, le classicisme, lui, opte
pour la tragédie et pour la comédie. Ce sont finalement les tendances classiques
qui triomphent et qui vont s’imposer vers 1640, bien que le classicisme épuré
ne donne ses chefs-d’œuvre qu’à partir de 1660. Le triomphe du classicisme as-
sure à son tour le triomphe du théâtre dit régulier, c’est-à-dire, soumis à des rè-
gles et à des préceptes nombreux; il aura une longue vie jusqu’à l’avènement
du romantisme.
Corneille, même s’il n’est pas un vrai “régulier”, assure par sa condition
d’homme de métier, l’intronisation sociale de l’activité théâtrale mais c’est à
Racine que revient le mérite d’avoir fondé la tragédie classique avec une for-
mule opposée à celle de la tragédie cornélienne : une action simple soutenue
par la force des passions.
L’homme qui incarnera l’idéal des Lumières est le philosophe: “Le vrai philo-
sophe est donc un honnête homme qui agit en tout par raison, et qui joint à
un esprit de réflexion et de justesse les mœurs et les qualités sociales” (Dumar-
sais, article philosophe dans l’Encyclopédie.) Ce philosophe s’appuie aussi sur
l’observation et sur l’expérience suivant l’exemple de Newton, très admiré par
les philosophes des Lumières.
Le siècle se laïcise bien que, à quelques rares exceptions près, la plupart des
philosophes restent déistes. Une nouvelle morale conduit l’homme à son épa-
nouissement terrestre; le bonheur et le plaisir sont revendiqués mais Rous-
seau apportera sa vision personnelle: il n’y a pas de bonheur si l’on s’éloigne
de la voie de la vertu.
la censure dont elle est la cible nous en dit long sur l’effort cyclopéen de la ré-
daction de l’ouvrage.
Si, au dire de Georges Gusdorf, Rousseau n’a pas inventé le genre autobiogra-
phique, il est certain que l’entreprise rousseauiste de se raconter a rompu les
schémas classiques précédents; le moi, loin d’être “haïssable” (Pascal), est de-
venu le point central de l’écriture littéraire.
“Ce qui est premier, dans les Confessions de Jean-Jacques, ce n’est pas le rapport à Dieu,
la recherche du typique ou le témoignage sur l’histoire; c’est, au contraire, la peinture
de l’individu dans sa différence […] le “dire tout” individuel de Rousseau, concurrem-
ment au “dire tout” collectif de l'Encyclopédie, inaugure un âge nouveau dans les lettres.”
J-P. Beaumarchais ; D. Couty ; A. Rey. Dictionnaire des Littératures de langue française. Paris :
Bordas, 1984, III, p. 2035.
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 57 Époques classique et des Lumières
Activités
La doctrine classique
1 . Prenez la définition que donne Aristote de la tragédie (Poétique, VI) et dégagez-en les com-
posantes, tout en essayant de les expliquer. Aidez-vous d’une édition commentée.
2 . Lisez attentivement la préface de Phèdre. Commentez les observations de Racine qui relè- Vous trouverez la préface
de Phèdre sur le web du
vent de la doctrine classique. cours.
1 . Essayez de déterminer dans chaque acte du Cid quelles sont les scènes principales, en es-
sayant de le justifier. Analysez encore le pathétisme de certaines situations ainsi que les
grands effets théâtraux qui relèvent de la bonne technique dramatique de Corneille.
2. Étudiez les éléments comiques de l’admiration et de la fixité imperturbable d’Orgon vis-à-
vis de Tartuffe (observations des autres personnages, les jeux des symétries, les répliques, les
faux-fuyants, etc.). Étudiez aussi l’importance des gestes dans la scène de séduction d’Elmire
par Tartuffe ( scène trois de l’acte III).
3 . Faites l’analyse psychologique de la passion et des sentiments de Phèdre dans son aveu à Hyp-
polyte (acte II, scène cinq: “Ah ! cruel, tu m’as trop entendue…prête-moi ton épée. Donne”)
1 . Prenez “l’Avis au Lecteur” de Manon Lescaut de l’abbé Prévost. Montrez comment s’y ex-
prime l’idée horatienne d’un art utilitaire ayant pour but l’instruction morale.
2 . Explicitez les sentiments qui s’expriment dans l’extrait de Le Paysan parvenu de Marivaux
et mettez-les en rapport avec la technique narrative de la double perspective du récit (l’hom-
me adulte/ le jeune paysan).
3 . Commentez les effets de l’ironie dans l’extrait de Candide de Voltaire.
1 . Suite aux initiatives pédagogiques de Philippe Lejeune pratiquées à l’Université de Paris Vous trouverez le texte
Nord, rédigez votre autobiographie. Essayez de vous peindre “intus, et in cute.” préambule des
Confessions sur le web
2 . Prenez le texte-préambule des Confessions et dégagez-en les idées maîtresses. du cours.
La doctrine classique
1. En France quel critique a défini pour la première fois la notion d’auteur classique?
2. Résumez les points essentiels de la réforme de Malherbe.
3. Qu’a représenté la Querelle du Cid dans l’histoire du classicisme?
4. Quel ouvrage théorique peut-il être considéré comme le manifeste de la doctrine classique?
5. Quel personnage politique a-t-il eu une influence directe sur l’instauration de l’Académie
française?
6. Quel a été l’idéal humain adopté par le XV IIè siècle français?
7. Parmi les règles des trois unités, lesquelles figuraient déjà dans la Poétique d’Aristote?
8. Pourquoi le vraisemblable était-il préféré au vrai?
9. Quel principe Corneille a-t-il transgressé quand, dans le Cid (début de l’acte III), il fait que
Rodrigue rende visite à Chimène chez elle le jour même où il a tué son père?
10. Peut-on identifier cartésianisme et rationalisme classique?
1. Pourquoi, d’après Aristote, la tragédie devait-elle être une imitation des malheurs et des
souffrances humaines?
2. Est-ce que le rire est l’objectif qui définit la comédie?
3. Que faut-il comprendre quand on appelle la tragédie de Corneille “tragédie héroïque”?
4. Citez les causes possibles du grand succès du Cid en 1637.
5. Donnez un exemple de comédie de mœurs chez Molière et justifiez-le.
6. Résumez les traits essentiels de la comédie de Molière.
7. Quels avantages Racine avait-il su tirer de l’adaptation de sujets des tragédies grecques?
8. Quelle était la fonction de l’exposition dans une pièce classique?
9. Quels éléments caractérisent les obstacles intérieurs?
10. Quelles qualités jugeait-on nécessaires à un bon dénouement?
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 58 Époques classique et des Lumières
Réponses
La doctrine classique
Glossaire
deus ex machina
Locution latine qui fait allusion à la solution parfois employée dans la tragédie ancienne de
faire intervenir une divinité, suspendue dans l’air par des moyens mécaniques, afin de faci-
liter le dénouement ou de résoudre un conflit. Les règles du dénouement classique la jugea-
ient une mauvaise solution.
hémistiche
Moitié d’un vers et plus spécialement de l’alexandrin, marquée par un repos ou césure.
jansénisme
Courant doctrinal et théologique inspiré de l’ouvrage de Jansénius (Corneille Jansen, 1585-
1638) Augustinus, publié en 1640 et qui renferme la base théologique du jansénisme: en
partant d’une interprétation outrée de Saint Augustin, Jansénius y défendait une doctrine
de la grâce déterministe, c’est-à-dire Dieu la donne à qui il veut, il ne la doit à personne;
il y a des prédestinés, des élus; ils le sont en vertu d’un décret mystérieux du Tout-Puissant.
Cette doctrine avait été considérée hérétique par l’orthodoxie romaine. En France, à Paris,
la doctrine s’est répandue grâce à un collaborateur de Jansénius, l’abbé de Saint-Cyran et à
sa mort par Antoine Arnauld; l’abbaye de Port-Royal (Port-Royal de Paris et Port-Royal des
Champs) a adhéré à cette doctrine et l’a diffusée dans les milieux intellectuels qui lui éta-
ient attachés. La doctrine a séduit des couches importantes de la société parisienne en plus
de notables écrivains de l’époque (Pascal, Mme de Sévigné…) et par son rigorisme moral
radical elle a fixé une vision du monde dont les empreintes se retrouvent dans des œuvres
de l’époque. Le jeune Racine avait été écolier aux Petites Écoles de Port-Royal.
Leibniz (1646-1716)
Philosophe allemand représentant de la doctrine optimiste qui soutenait que notre monde,
en tant que créé par Dieu, était le meilleur des mondes possibles, thèse que Voltaire va railler
dans Candide.
libertin
À l’époque classique, synonyme de libre penseur.
Universitat Oberta de Catalunya • P00/07007/00203 61 Époques classique et des Lumières
misanthrope
Celui qui manifeste de la haine, de l’aversion pour le genre humain. Molière avait donné ce
titre significatif à une de ses comédies sur ce sujet.
péripétie
Revirement de fortune imprévu qui modifie la situation.
piétisme
Mouvement spirituel qui remonte à la Réforme. Certains docteurs protestants éprouvèrent le
besoin de fournir une pâture religieuse à cet esprit dévot que les catholiques appellent piété.
Ces efforts devaient aboutir au protestantisme dévot, c’est-à-dire, au piétisme; ce fut Phi-
lippe-Jacques Spener qui l’inaugura; il fut accusé de mysticisme. Le nom de piétistes fut em-
ployé pour la première fois en 1689.
quiproquo
En terminologie théâtrale, se dit pour malentendu.
Wolff (1679-1754)
Philosophe allemand, disciple de Leibniz dont il mit en ordre la pensée.
Bibliographie
La doctrine classique
Bibliographie essentielle
Bibliographie complémentaire
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