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Pallas

Revue d'études antiques

84 | 2010 :
Vivre en Gaule Narbonnaise - Isis au Capitole
Varia

Œdipe Roi : le tragique et le


texte théâtral
Oedipus Rex : the tragic and the text for the stage

MICHEL FARTZOFF
p. 299-309

Résumés
Français English
Alors que l’analyse aristotélicienne dans la Poétique privilégie une approche poétique de la
Tragédie distincte de nos approches contemporaines le plus souvent marquées par les
philosophies du tragique, l’examen porte sur les éléments relevant de la poétique du texte et de
la composition de l’action dramatique pour montrer comment ceux-ci suscitent chez le
spectateur le sentiment d’une nécessité tragique de nature religieuse ; le travail poétique et
dramatique de Sophocle a ainsi un effet de nature « métaphysique » sur la réception de la
pièce.

Whereas the Aristotelian analysis in The Poetics favours a poetic approach of Tragedy distinct
from our contemporary approaches influenced in most cases by the philosophies of the tragic,
the present enquiry bears on the elements relative to the poetics of the text and the building up
of the drama in order to show how they arouse in the spectator a sense of tragic necessity of a
religious order. Sophocles’poetic and dramatic work has therefore an impact of a
“metaphysical” order on the reception of the play.

Entrées d’index
Mots-clés : Sophocle, Œdipe, Œdipe Roi, Aristote, la Poétique, poétique, tragédie tragique,
philosophies du tragique, nécessité, destin, fatalité, action dramatique, ironie tragique, texte
dramatique, réception
Keywords : Sophocles, Oedipus, Oedipus Rex, Aristotle, The Poetics, poetic, tragic tragedy,
philosophies of the tragic, necessity, destiny, fate, drama, tragic irony, dramatic text, reception

Texte intégral
1 On sait que la notion de tragique telle que nous la concevons, même confusément,
n’est pas contemporaine des Tragiques grecs. Ainsi que le souligne Pierre Judet de La
Combe, si nous sommes en grande partie tributaires d’une approche philosophique du
tragique, qui se constitue à la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle, et qui interprète la
tragédie comme l’affrontement de la liberté et de la nécessité1, la vulgate
aristotélicienne reste essentiellement poétique, et s’appuie sur une analyse des
éléments de la Tragédie. Entre ces deux approches, subsiste le plus souvent un hiatus :
on chercherait en vain dans la Poétique la notion d’une « ​nécessité​ » de caractère
métaphysique : la catégorie du « ​nécessaire​ » (τὸ ἀναγκαῖον), associée à celle du
« ​vraisemblable​ » (τὸ εἰκός), porte sur l’enchaînement des événements qui constituent
« ​l’histoire​ » tragique, un enchaînement qui obéit à une logique causale, et non à une
simple succession chronologique2 : tout doit découler de l’agencement de l’action et
« ​survenir comme conséquence des événements antérieurs, et se produire par nécessité
ou selon la vraisemblance3​ » : ἐκ τῶν προγεγενηµένων συµβαίνειν ἢ ἐξ ἀνάγκης ἢ κατὰ
τὸ εἰκὸς γίγνεσθαι ταῦτα. La notion de destin est ainsi seulement suggérée comme une
conséquence de la réception par le spectateur de l’agencement nécessaire et
vraisemblable des actions : de même, dans la vie véritable, l’exigence de rationalité fait
qu’un événement survenu par hasard peut sembler, selon le vraisemblable, survenu « ​à
dessein​ » (ἐπίτηδες) ; Aristote prend ici l’exemple de la statue de Mitys à Argos qui,
descellée, tomba par hasard sur le meurtrier de Mitys pendant un spectacle : « ​la
vraisemblance exclut que de tels événements soient dus au hasard aveugle​ » (ἔοικε γὰρ
τὰ τοιαῦτα οὐκ εἰκῇ γενέσθαι) ; et Aristote ajoute, comme s’il s’agissait là d’une
« ​histoire​ » tragique (µῦθος), et non d’un exemple appuyé sur un événement réel (Poet.
9, 52a 7-114) : « ​Aussi les histoires de ce genre sont-elles nécessairement les plus
belles​ » : ὥστε ἀνάγκη τοὺς τοιούτους εἶναι καλλίους µύθους (Poet. 9, 52a10s.). Le
Stagirite abolit ici la distance entre muthos tragique et événement exemplaire tiré de la
vie réelle car il s’intéresse dans les deux cas à la réception par le spectateur : il est sans
doute significatif que l’incident survienne lors d’un spectacle, alors que le meurtrier est
lui-même en train de regarder (θεωροῦντι), comme si le spectacle changeait de lieu et
se portait soudain sur la victime dont le sort obéissait de manière vraisemblable, pour
les témoins, à une justice divine immanente5 ; le meurtrier tué par la statue de sa
victime devient ici un exemple comparable aux événements d’un muthos tragique
réussi. Pourtant, un tel exemple peut contribuer à réduire le hiatus entre approche
poétique et approche « ​philosophique​ » du tragique, en soulignant l’effet produit par la
« ​poétique​ » du texte dramatique, semblable à l’exemple de Mitys ici évoqué par
Aristote : par sa construction même, l’action peut donner le sentiment d’une nécessité
tragique à l’œuvre, en représentant des faits qui « ​paraissent se produire par nécessité
ou par vraisemblance​ »6.
2 De ce point de vue, l’Œdipe Roi constitue un cas intéressant. Considérée par Aristote
comme un modèle tragique particulièrement réussi, la pièce est abordée par lui en
relation avec une étude des moyens les plus aptes à créer « ​l’effet propre de la
tragédie7​ » : susciter la frayeur et la pitié ; mais on ne trouve pas de considérations sur
le destin et la fatalité qui semblent frapper Œdipe, alors que ces aspects sont pour nous
des effets essentiels de la pièce, où l’action du héros et le déroulement voulu par le dieu
semblent se superposer ou se confondre. Or la « ​poétique​ » du texte contribue bien à
créer cet effet tragique d’une nécessité à l’œuvre ; nous essaierons donc d’aborder la
pièce d’un point de vue « ​poétique​ », dans une sorte d’essai partiel de « ​génétique​ »
dramatique8, pour saisir la manière dont le texte tragique vise à donner le sentiment au
spectateur d’une nécessité tragique. Plus précisément, nous tenterons de saisir par
quels moyens Sophocle, dans l’enchaînement d’actions qu’il bâtit à partir d’une cause
finale9, comme dans l’agencement des péripéties, et dans le choix de notations précises,
notamment temporelles, cherche à rendre sensible au spectateur, dans la linéarité
apparente des actes accomplis sur la scène, la réalisation de cette cause : nous nous
attacherons à mettre en relief des éléments qui, dans la pièce, permettent à l’auteur de
rendre perceptible la marche d’un destin, et nous limiterons l’analyse à des indices
textuels précis inscrits dans la « ​poétique​ » du texte que nous voulons ici mettre au
jour10.
3 Dès le début de la pièce, Sophocle souligne tout d’abord le rôle de l’oracle dans les
paroles mêmes d’Œdipe. Le roi, qui a envoyé Créon interroger l’Apollon de Delphes,
affirme qu’il serait criminel de ne pas faire ce que le dieu manifestera : ἐγὼ κακὸς µὴ
δρῶν ἂν εἴην πάνθ᾿ ὅσ᾿ ἂν δηλοῖ θεός (76s). On sait qu’Œdipe se lie ainsi à l’oracle11,
mais il est notable que la phrase, selon une redoutable ironie tragique inconsciente12,
est une sorte de description par avance de toute l’action qui va avoir lieu : non
seulement le verbe δρᾶν évoque l’action tragique que conduira Œdipe, mais dans la
relative au subjonctif éventuel exprimant le futur, le verbe δηλόω ne désigne pas
seulement l’oracle que le dieu va faire connaître au souverain ; accomplir tout ce que le
dieu « ​manifestera​ » ou « ​rendra visible​ » (πάνθ᾿ ὅσ᾿ ἂν δηλοῖ θεός) prend une double
portée : dans la logique interne du personnage d’Œdipe, les mots renvoient à la
prescription divine que Créon va rapporter ; mais pour le spectateur, ils revêtent aussi
un sens plus large en anticipant sur le déroulement même du drame : « ​tout ce que le
dieu va manifester​ » n’est pas seulement, comme le croit le personnage, l’indication de
trouver le meurtrier de Laïos – le sens immédiat du message –, mais l’ensemble du
spectacle tragique auquel va assister le spectateur : l’expression constitue ainsi une
désignation anticipée du terme de l’action dramatique que le dieu va véritablement
« ​manifester​ » « ​montrer​ » (δηλοῦν). A la fin de la pièce, le verbe est repris
lorsqu’Œdipe crie que l’on « ​montre​ » le criminel qu’il est à tous les Cadméens (δηλοῦν
v. 1287) ; il dit que « ​toute la parole​ » du dieu (ἥ γ᾿ ἐκείνου πᾶσ[α] [...] φάτις) a été
« ​dévoilée​ » contre le criminel (ἐδηλώθη v. 1440)13.
4 Si l’action est enclenchée par le roi, qui fait consulter l’oracle et s’en rend tributaire,
Sophocle fait ainsi sentir au spectateur l’articulation de deux temporalités : celle de
l’action dramatique, un temps dramatique qui se déroule de manière linéaire dans le
temps scénique, et par rapport à laquelle les paroles des personnages prennent un sens
obvie en rapport avec la situation immédiate qu’ils sont censés vivre – cette temporalité
correspond aux étapes de l’action accomplie et vécue par Œdipe14 ; et un temps des
dieux, ou plutôt une a-temporalité, qui surplombe l’ensemble de l’action en lui
assignant son terme, et qui est rendue sensible par la double portée donnée aux mots
employés, qui ne pouvait échapper à un public connaisseur des traits essentiels de
l’histoire représentée. Selon une conception qui remonte au VIe siècle, le temps est en
effet un témoin qui découvre tout15.
5 De même, le jeu des temps16 contribue parfois à faire sentir un double sens qui révèle
l’implication des dieux dans le temps des hommes et le temps dramatique. Tandis que
le devin Tirésias annonce au futur ce qui attend Œdipe (v. 438), et le malheur qui va
frapper le meurtrier de Laïos (v. 453-460), inscrivant ainsi pleinement sa menace dans
le temps dramatique des relations entre les personnages, dans le stasimon qui suit cet
affrontement, c’est au présent que le chœur imagine la fuite du mystérieux meurtrier de
Laïos poursuivi par la colère divine (v. 463-482). Pour le chœur, il s’agit d’exprimer sa
confiance inébranlable en Œdipe : si le meurtrier est introuvable, c’est qu’il doit être en
fuite, et le présent utilisé renvoie à cette fuite supposée ; le chœur l’affirme en effet :
« ​tant que je n’aurai pas vu se vérifier les dires de ses accusateurs, je me refuse à les
admettre​ » (v. 504ss.)17. Mais là encore, Sophocle use de l’ironie tragique, qui permet
aux mots de signifier plus pour le spectateur18. Dans sa généralité, le propos peut en
effet s’appliquer tout aussi bien à Œdipe. Le chœur souligne en effet que c’est
« ​l’heure​ » pour le meurtrier de s’enfuir (v. 467​ὥρα) ; l’emploi d’ὥρα au singulier, rare
dans le théâtre conservé de Sophocle19, attire l’attention sur un moment particulier
dans l’action ; de même il souligne le début d’un processus nouveau en rappelant que la
parole issue du Parnasse neigeux vient de briller « ​à l’instant​ » en pleine lumière :
ἔλαµψε τοῦ νιφόεντος ἀρτίως φανεῖσα φήµα Παρνασοῦ (v. 473-475). Ce moment
singulier qui introduit un changement dans l’action dépend étroitement des deux
scènes de l’épisode précédent : il répond naturellement à la première scène (v. 216-299)
où Œdipe a informé le chœur du contenu de l’oracle et a fait sa proclamation, mais
aussi à la seconde (v. 300-462), où Tirésias a accusé Œdipe. La fuite supposée du
meurtrier, décrite au présent, prend ainsi un tour général qui, pour le spectateur, peut
s’appliquer au souverain. Le chœur emploie en effet une série de verbes d’action au
présent : le coupable s’enfuit, car le fils de Zeus « ​s’élance en armes contre lui​ »
(ἔνοπλος γὰρ ἐπ᾿ αὐτὸν ἐπενθρῴσκει v. 469) ; le chœur songe donc qu’à présent le
coupable « ​erre​ » (φοιτᾷ v.​477) mais les oracles auxquels il tente d’échapper « ​volent
autour de lui toujours vivaces​ » : τὰ δ᾿ ἀεὶ ζῶντα περιποτᾶται (v. 481s.). Le présent
général évoque un espace virtuel extra-scénique où le coupable tente vainement
d’échapper à l’efficience de la parole divine ; mais le spectateur, après la scène entre
Œdipe et Tirésias, peut saisir dans ce présent un rapport avec le déroulement même de
la pièce, où Œdipe, qui vient de se retirer, tente vainement d’échapper à l’actualisation
de l’oracle : la parole divine, dont le chœur sait qu’elle est « ​immortelle​ » (v. 157 :
ἄµβροτε Φάµα), intervient dans le temps dramatique et en décrit le déroulement en en
faisant celui de la justice divine désormais à la poursuite du meurtrier, quel qu’il soit.
6 Dans le deuxième épisode, c’est un autre procédé qui permet à Sophocle de faire
correspondre l’échange dialogué et le déroulement de la parole divine. La tirade
fameuse où Jocaste tente de rassurer Œdipe (v. 707-725) est présentée de manière à
traduire elle aussi cette actualisation de la parole divine dans les propos des
personnages.
7 L’action se situe dans une scène essentielle où se rencontrent plusieurs oracles : après
celui que vient de rapporter Créon, sur la nécessité de rechercher le meurtrier de Laïos,
et qui est directement lié au temps de l’action représentée, Jocaste est conduite à
raconter à Œdipe l’oracle plus ancien fait à Laïos, et qui le contraignit à abandonner son
fils (v. 707ss.), tout comme Œdipe va de son côté narrer l’oracle ancien lui prédisant
son destin (v. 772ss.). Cette rencontre de paroles oraculaires convergentes souligne
pour le public le chemin unique suivi par le dieu dans un temps qui excède celui de la
pièce, puisqu’il remonte loin dans le passé des deux personnages, mais dont la
réalisation a bien lieu dans le drame lui-même : le temps du dieu se confond alors, sans
qu’ils en aient encore conscience, avec le temps de la parole et de l’action humaines.
8 Or cette scène ne met plus seulement en œuvre des propos qui désignent le
déroulement de l’action à l’insu des personnages : les paroles de Jocaste expriment et
réalisent véritablement la parole divine, dans un jeu subtil d’ironie tragique dont la
portée est religieuse. Pour prouver à Œdipe la fausseté des interprétations données aux
oracles, la reine affirme en effet qu’elle va lui donner des « ​preuves​ » ou des « ​signes​ »
(σηµεῖα v. 710) : l’emploi de ce terme, qui désignera plus tard dans la bouche d’Œdipe
les indices de sa naissance (v. 1059)20, peut également désigner des signes divins21. De
fait, la reine va bien donner des signes oraculaires sans en avoir conscience ; on sait
qu’en voulant rassurer Œdipe par le récit de la mort de Laïos elle fournit
inconsciemment un détail qui va paradoxalement provoquer son inquiétude. Mais
Sophocle en fait plus qu’une simple révélation qui aurait lieu au cours d’un quiproquo
théâtral : les propos par lesquels la reine achève sa tirade soulignent pour le spectateur
qu’à son insu, le dieu a parlé avec ses mots. Elle conclut en effet sa tirade ainsi : « ​ce
dont le dieu recherche l’utilité (χρείαν ἐρευνᾷ), il le révélera facilement lui-même​ » (ὧν
γὰρ ἂν θεὸς / χρείαν ἐρευνᾷ ῥᾳδίως αὐτὸς φανεῖ 724s.)22. Cet emploi étrange de χρεία,
« ​l’utilité​ » ou « ​l’usage​ », qui n’est d’ailleurs peut-être pas sans rappeler le terme
χρησµός pour désigner la réponse oraculaire faite à Laïos au début de la tirade (v.
711)23, est un moyen pour Sophocle d’attirer l’attention du public sur « ​l’utilité​ » de la
tirade même de Jocaste : le dieu en fait précisément « ​usage​ » pour révéler sa parole à
travers celle de la reine ; les paroles de Jocaste sont en quelque sorte auto-référentielles
et réalisent ce qu’elles évoquent : le dieu exprime effectivement la vérité de sa parole à
l’insu de la reine, et grâce à Jocaste la parole du dieu se fait action, comme le prouve
aussitôt la réaction d’Œdipe (v. 726s.). Sophocle souligne ainsi l’intervention divine
dans le texte même qu’il attribue au personnage.
9 Mais ce n’est pas là le seul procédé par lequel Sophocle suscite ici l’impression d’un
destin à l’œuvre. Œdipe évoque en effet aussitôt son inquiétude en parlant de ce qu’il
vient d’entendre « ​à l’instant​ » ; l’adverbe employé, ἀρτίως, n’est pas anodin : il
n’évoque pas seulement le fait que le roi vient d’entendre quelque chose qui l’inquiète ;
cet adverbe, dérivé de ἄρτιος, a pour son sens originel, comme ἄρτι, « ​justement, d’une
manière qui tombe juste​ », et il se rattache précisément à la racine de ἀραρίσκω
« ​adapter, ajuster​ »24 : Œdipe vient « ​justement​ » d’entendre un fait qui l’inquiète au
moment où Jocaste évoque la manière dont le dieu réalisera son oracle à sa guise ;
Sophocle souligne ainsi une coïncidence qui prend la forme d’un destin. De fait, cet
adverbe, par ailleurs fréquent dans le théâtre de Sophocle, est dans la pièce le plus
souvent utilisé pour souligner des articulations signifiantes de l’action dramatique,
contribuant ainsi à l’assimiler à la marche de la fatalité : c’est Créon, qui arrive « ​à
propos​ » alors qu’Œdipe l’attend (v. 78) ; le roi l’emploie également à deux reprises au
moment où il se lie lui-même à la malédiction publique qu’il profère : il veut que le
meurtrier soit chassé comme l’oracle vient « ​justement​ » de le proclamer (v. 243), et
s’inclut dans la malédiction qu’il vient « ​justement​ » de lancer (v. 251) ; après les
paroles de Jocaste, il fait écho à ce passage : il craint d’être victime des malédictions
qu’il vient « ​justement​ » de proférer (v. 745)25. Lorsqu’Œdipe souhaite voir celui qui
donna l’enfant au berger corinthien, le chœur lui fait remarquer une coïncidence : cet
homme est précisément le témoin de la mort de Laïos qu’il désirait voir (v. 767ss.), et
Œdipe souligne la chose en disant à Jocaste que c’est l’homme qu’il désirait voir « ​à
l’instant​ » (v. 1054). L’adverbe, en mettant en relief pour le public la composition
temporelle de l’action, permet donc de souligner des séries de coïncidences
convergentes bâties par Sophocle pour que leur agencement évoque la marche
souterraine d’un destin, et il les rend sensibles ; ces procédés « ​poétiques​ » soulignent
la marche de l’oracle à travers l’action représentée.
10 Il est révélateur que ce soit précisément après ce second épisode, où le dieu est
intervenu à travers les mots du personnage, que la notion de contrainte ou de nécessité,
qui est pour nous tellement associée à la définition « ​philosophique​ » du tragique, soit
pour la première fois évoquée en relation avec le sort du héros. C’est en effet au
moment où Jocaste a ainsi inquiété Œdipe que celui-ci, rappelant l’oracle qui lui fut fait
autrefois, évoque la parole oraculaire lui prédisant qu’il lui faudrait s’unir à sa mère
(λέγων ὡς µητρὶ µὲν χρείη µε µιχθῆναι κτλ. v.​790s.). Il s’inquiète alors d’être impur s’il
lui faut (χρή) s’enfuir, ou s’il lui faut (δεῖ) s’unir à sa mère (v. 823-5). La nécessité
tragique, jusque-là absente, s’introduit dans le texte, et Jocaste tente d’y échapper en
critiquant, non plus simplement les interprètes des dieux, mais le dieu lui-même (v.
848-858). De fait, dans le second stasimon, nous n’avons plus seulement les verbes χρή
ou δεῖ, mais le mot même d’ἀνάγκη : le chœur fustige en effet le scepticisme envers le
dieu, en invoquant pour la première fois dans la pièce la notion de nécessité, d’ἀνάγκη :
l’hybris, une fois montée au sommet, s’abîme « ​dans la nécessité​ » : ὤρουσεν εἰς
ἀνάγκαν (v. 877)26. L’anankè, contrainte exercée par les dieux, est ici l’équivalent du
malheur27, présenté comme un gouffre, selon la métaphore fréquente de la chute28.
Mais cette phrase décrit précisément le déroulement de l’action qui vient d’avoir lieu :
la nécessité ne s’exerce pas de l’extérieur sur le coupable29 ; l’hybris des deux
personnages, par leurs actions et leurs paroles, se précipite elle-même « ​dans​ » la
nécessité : elle la réalise, tout comme l’Atride dans l’Agamemnon « ​s’est ployé sous le
harnais de l’ἀνάγκη​ » (Ag. v.​218 ἀνάγκας ἔδυ λέπαδνον) ; mais ce qui relève d’un
simple récit dans l’Agamemnon, est ici action. Cet aspect explique d’ailleurs l’emploi du
verbe φυτεύειν, qui indique un processus, dans le fameux vers, à l’interprétation si
difficile et si commentée, ὕβρις φυτεύει τύραννον (v. 873)30. Le propos est général,
mais se justifie après les paroles impies de Jocaste sur l’oracle d’Apollon ; le chœur
n’accuse pas d’emblée ses souverains d’impiété ni d’hybris, mais fait ainsi sentir au
spectateur l’évolution dramatique des personnages qui les rapproche de l’impiété. Le
verbe φυτεύειν souligne la progression vers la tyrannie en rapport avec l’action
dramatique en cours que bâtit Sophocle. Parallèlement, le chœur évoque les lois
divines : en elles, réside un « ​dieu puissant​ »31 qui « ​ne vieillit pas​ » (οὐδὲ γηράσκει
v. 872) ; cette « ​éternité​ » est celle du temps des dieux, mis en œuvre par le dramaturge
dans un muthos qui réalise l’actualisation de la loi divine.
11 Il est significatif à cet égard que le terme ἀνάγκη ne soit ensuite employé qu’une
seconde fois, cette fois par Œdipe lui-même : sachant en vie à Corinthe celle qu’il croit
sa mère, il dit à Jocaste : il y a toute « ​nécessité​ » que je craigne (v. 986) ; s’il évoquait
dans le deuxième épisode l’obligation crée par l’oracle avec les verbes δεῖ ou χρή – « ​il
faut​ » –, ici dans le troisième épisode, il ressent en lui-même la contrainte d’une
nécessité qui l’oblige à craindre. Œdipe avait déjà exprimé une fois l’écart entre action
humaine et divinité à l’aide de la notion de nécessité, lorsqu’il disait au chœur,
déplorant que Phoïbos n’ait pas dénoncé le meurtrier : « ​mais contraindre les dieux à
des actes qu’ils ne veulent pas, pas un homme ne le pourrait​ » (ἀναγκάσαι θεοὺς / ἃν
µὴ θέλωσιν οὐδ᾿ <ἂν> εἷς δύναιτ᾿ ἀνήρ v. 280s.). La nécessité s’exerce désormais contre
lui ; l’anankè de l’oracle s’installe dans l’action et pèse sur le personnage d’Œdipe.
12 Par ces procédés relevant de la composition du texte dramatique, Sophocle souligne
la double pertinence des termes employés, que les personnages rattachent à un sens
obvie, tandis que le spectateur perçoit, par leur emploi marqué à un stade
soigneusement choisi de l’action dramatique, qu’ils renvoient à l’actualisation de la
parole oraculaire. A la différence des personnages, le public perçoit ainsi que la linéarité
du temps dramatique dévoile une réalité a-temporelle fixée par la parole du dieu. La
poétique du texte dramatique, en suscitant cette double perception, suggère l’emprise
du dieu sur l’action.
13 Cette emprise temporelle s’exprime aussi par une métaphore spatiale traditionnelle,
revivifiée ici par son inscription dans un déroulement dramatique qui lui redonne toute
sa portée. Dans l’épisode du berger corinthien, Œdipe affirme en effet : « ​je crains que
Phoïbos ne se révèle clairement​ » et il emploie alors le verbe ἐξέρχοµαι : ταρβῶν γε µή
µοι Φοῖβος ἐξέλθῃ σαφής (v. 1011). Cette métaphore est déjà présente dans Hésiode (Tr.
217s.), mais elle est reprise avec un autre verbe de mouvement par Œdipe quand il a
tout découvert : τὰ πάντ᾿ ἂν ἐξήκοι σαφῆ (v. 1182). L’emploi figuré de ces verbes de
mouvement assimile le déroulement temporel de l’action à une progression spatiale, et
fait du dévoilement le terme voulu par un dieu32. Il est significatif qu’à la fin de la pièce
Œdipe emploie encore la métaphore du chemin au sens figuré pour évoquer son destin,
sa moira : « ​que mon destin, à moi, suive sa route !33 » (Ἀλλ᾿ ἡ µὲν ἡµῶν µοῖρ᾿ ὅποιπερ
εἶσ᾿ ἴτω v. 1458). Le chemin de la moira s’est réalisé dans le cours du drame.
14 Mais Sophocle utilise également certaines entrées et sorties de personnages pour
exploiter le temps de l’action représentée d’une manière qui suggère la marche d’un
destin. Dans le prologue en effet, Œdipe s’étonne que le retour de Créon de Delphes se
fasse attendre beaucoup plus longtemps que prévu (v. 73-75). Il affirme que lorsque
Créon sera revenu, il fera ce que le dieu manifestera (v. 76s.). Or, le prêtre de Zeus
signale la coïncidence entre les propos du roi (σύ τ᾿ εἶπας) et les enfants qui « ​justement
(ἀρτίως) font signe​ » (σηµαίνουσι) que Créon arrive (v. 78s.)34 : c’est ἐς καλόν, « ​à
propos​ »35, qu’au moment où le roi parle, on signale l’arrivée de Créon. Le prêtre insiste
ainsi sur la coïncidence36 entre les paroles du roi, qui vient de s’étonner de la longueur
de l’absence de son beau-frère, et son arrivée : mais le roi vient aussi de dire qu’il se
conformera à ce que le dieu indiquera dans le rapport de Créon ; cette coïncidence
temporelle est donc aussi une coïncidence « ​tragique​ » : c’est l’oracle, en effet, qui va
être rapporté avec cette arrivée. Nous avons vu à cet égard l’importance de l’adverbe
ἀρτίως pour marquer nettement une adéquation dans le déroulement de l’action37. De
même, Œdipe s’étonne-t-il du temps mis par Tirésias à être conduit devant lui (v. 289),
juste avant que celui-ci n’arrive (v. 297s.) : mais cet agencement a ici un effet différent :
non suggérer une adéquation entre les paroles d’Œdipe et le déroulement de l’action
(aucun terme ne vient la souligner), mais laisser deviner les réticences du devin à se
laisser conduire devant Œdipe.
15 L’utilisation de la péripétie prend aussi une valeur religieuse, soulignée à la fois par
l’enchaînement des étapes dramatiques et par les mots choisis. Au cours de la
quatrième scène du second épisode, où Jocaste et Œdipe sont conduits à se raconter
mutuellement les oracles qui leur furent faits autrefois (v. 679-862), le roi demande que
l’on fasse venir le serviteur témoin de la mort de Laïos (v. 765) ; après qu’il a raconté à
Jocaste l’oracle qu’il reçut autrefois, les deux personnages font de cette venue du seul
témoin du drame un enjeu important de la suite de l’action : Œdipe réitère sa demande
avec anxiété (v. 836s., 859s.). Or, tandis que la reine a assuré « ​il viendra​ » (ἵξεται v.
769) – laissant ainsi attendre au spectateur la venue du vieux serviteur – Sophocle, on
le sait, ménage deux effets de surprise après le second stasimon : tout d’abord, alors que
le chant du chœur a critiqué le scepticisme impie de la reine envers les oracles, celle-ci
sort du palais avec des offrandes pour Apollon, auquel elle adresse une prière (v. 911-
923) ; ensuite, sans que son arrivée ne soit aucunement annoncée, contrairement à ce
qui se produit conventionnellement pour introduire un personnage qui arrive de
l’extérieur, ce n’est pas le vieux serviteur, mais le berger corinthien qui surgit (v. 924).
Ce double effet de surprise, qui constitue une péripétie dramatique admirée
d’Aristote38, prend une signification religieuse.
16 L’arrivée de Jocaste venant faire des offrandes aux dieux pour le salut d’Œdipe
évoque en partie celle de la reine dans les Perses venant faire des offrandes aux dieux et
à Darius pour le salut de son fils (v. 598ss.). Elle montre aussi, contrairement aux
propos du chœur sur les honneurs oubliés dus à Apollon (v. 909s.), que la reine
pratique la piété, même si elle a mis en cause les oracles et leurs interprètes. Cette scène
est surtout une scène de supplication (v. 920 : ἱκέτις ; cf. v.​912s.) qui répond à celle du
début de la pièce, où le prêtre de Zeus venait supplier Œdipe pour le salut de Thèbes ; la
progression de l’action qui se replie sur le destin privé du souverain est ainsi rendue
sensible : ce n’est plus lui que l’on prie pour la cité, mais le dieu pour son salut
personnel. Apollon devient un agent possible de l’action, alors qu’Œdipe, auparavant si
fier de ses capacités, est à présent désemparé et n’est plus ἔννους (v. 916). De fait,
Apollon est invoqué à la fois comme dieu très proche (ἄγχιστος v.​919), car c’est
l’Apollon Agyieus, près de l’entrée du palais et protecteur de la maison39, l’Apollon
guérisseur, mais aussi le dieu des oracles sur lesquels s’interroge Jocaste. Or il est
remarquable que la reine demande au dieu une « ​résolution​ » ou un « ​dénouement​ » en
employant le terme λύσις (v. 921) qu’emploiera précisément Aristote dans la Poétique
pour désigner « ​ce qui va du début (du) renversement jusqu’à la fin​ »40, comme si
l’agencement de l’Œdipe Roi lui fournissait ici un modèle41 ; le mot a cependant une
signification religieuse dans la pièce : Apollon peut apporter une solution dépourvue de
souillure (λύσιν τιν᾿[...] εὐαγῆ), « un remède contre toute souillure42​ ». Il n’en demeure
pas moins que le terme souligne ici l’emprise que le dieu a désormais sur l’action et
semble confondre dénouement divin et dénouement dramatique inscrit dans la
« ​poétique​ » du texte.
17 Et de fait, le second effet de surprise ménagé par Sophocle, l’arrivée du Corinthien
alors que le public attend le vieux serviteur – surprise d’autant plus soulignée que cette
arrivée n’est pas annoncée, contrairement aux autres arrivées de personnages dans la
pièce – est placée immédiatement après la prière au dieu, comme si Apollon exauçait la
prière de la Reine ; Sophocle use ici d’un procédé déjà utilisé par Eschyle dans les
Choéphores : celui-ci ménage un coup de théâtre à signification religieuse lorsqu’à la
prière d’Electre et du chœur pour que surgisse un vengeur, succède la découverte de la
boucle de cheveux (v. 164), comme si Agamemnon mort exauçait la prière de sa fille. De
même ici, la construction choisie par Sophocle fait que le dieu semble bien exaucer la
reine.
18 Et tout comme le terme σηµεῖον se trouvait employé par Jocaste au moment où ses
propos allaient révéler à son insu la parole divine (v. 710), des termes de la même
famille de σῆµα sont employés par Jocaste ou par Œdipe lorsqu’ils demandent au
Corinthien des « ​signes​ » destinés à les rassurer : mais comme dans les paroles de la
reine lors du second épisode, ces « ​signes​ » sont aussi bien des « ​signes​ » de l’action
divine. Lorsque le Corinthien est là en effet, les formes du verbe σηµαίνω sont
nombreuses : Jocaste veut que le nouvel arrivant explique ce qu’il veut annoncer
(σηµῆναι v. 933), Œdipe lui demande aussi : αὐτός µοι σὺ σηµήνας γενοῦ (v. 957) ; on
trouve même une variante conservée par Jebb ou par R.D. Dawe : σηµάντωρ γενοῦ43 ;
si ce nom d’agent n’est pas employé à l’époque classique avec le sens de « ​qui
annonce​ », on le trouve chez Homère avec le sens de « ​qui donne le signal​ » d’où
« ​chef​ » (Il. IV, 431, Od. XIX, 314). Le terme insisterait alors d’autant plus sur le
caractère particulier de ce personnage : s’il joue la fonction traditionnelle de messager,
il doit moins délivrer un récit que donner des « ​indications​ ». De fait, Œdipe cherche
des « ​signes​ » de son origine (σηµεῖα v. 1059). Mais ces mots s’emploient aussi pour les
signes oraculaires44. Le roi, au moment fatidique de faire venir le vieux serviteur qui
avouera tout, demande d’ailleurs au chœur où il se trouve en employant de manière
absolue l’impératif du verbe : σηµήνατ᾿ (v. 1050). Et il ajoute : « ​car c’est le moment que
cela soit révélé​ » (ὡς ὁ καιρὸς ηὑρῆσθαι τάδε v. 1050). La notion de kairos est ici
employée par Sophocle pour souligner le caractère fatidique du moment dramatique et
mêle ainsi temps intra-dramatique, et temps extra-dramatique pour le spectateur :
celui-ci perçoit l’importance d’un moment de l’action où les personnages du messager
corinthien et du vieux serviteur se font les agents du dieu, comme l’indiquent
notamment les emplois de la notion de σηµεῖον, et l’introduction de l’épisode après la
prière que Jocaste a adressée à Apollon.
19 De fait, Tirésias avait reproché à Œdipe de ne pas parler « ​à propos​ » en exigeant de
lui qu’il explique l’oracle d’Apollon (v. 325), mais à la fin de la pièce, lorsqu’Œdipe
accepte d’obéir, Créon lui dit : πάντα γὰρ καιρῷ καλά (v. 1516) : Œdipe a adapté ses
paroles au temps divin qui s’est réalisé sur scène.
20 Par l’usage de la péripétie et d’un lexique employé avec justesse, Sophocle a donc
attiré l’attention du spectateur sur des éléments suggérant l’intervention du dieu dans
l’action, et sur l’achèvement d’une temporalité dramatique qui prend une valeur
religieuse particulièrement forte, puisqu’elle correspond à un dévoilement. Après
l’horrible révélation, le chœur chante d’ailleurs : « ​Le temps, qui voit tout, malgré toi t’a
découvert​ » (ἐφηῦρέ σ᾿ ἄκονθ᾿ ὁ πάνθ᾿ ὁρῶν χρόνος v.​1213)45. Le temps divin,
personnifié, similaire à Apollon, est éternel, hors du temps qui passe, mais il a suivi un
cours diachronique, celui de l’action dramatique, pour dévoiler la vérité oraculaire. On
a le sentiment que la temps vécu par les personnages a réalisé, par leurs actes et leurs
paroles, une totalité hors du temps, celle de l’action représentée qui correspond à ce que
le dieu avait déjà fixé46.
21 Ainsi, par une série de procédés relevant de la « ​poétique​ » du texte dramatique,
Sophocle a-t-il créé des effets donnant le sentiment au spectateur d’une nécessité
tragique se réalisant dans l’action dramatique. A cet égard, le Tragique semble l’héritier
de l’auteur épique qui, grâce au savoir des Muses qui « ​partout présentes​ » savent
tout47, acquiert une sorte d’omniprésence et d’omnivoyance. De même que le narrateur
épique, par sa capacité poétique, possède une puissance d’évocation exceptionnelle,
Sophocle dramaturge, par son art poétique, rend sensible la présence divine dans le
temps de la représentation, lors du festival sacré de Dionysos.

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p. 101-131.

Notes
1 Judet de La Combe, 1999, p. 183-200, et 2010, où l’analyse est détaillée sur les philosophies
du tragique en relation avec l’approche de la Tragédie. Voir aussi Szondi, 1975.
2 Poet. 9, 51a 38 et 10, 52a20s.
3 10, 52a 19-21, trad. Lallot et Dupont-Roc, 1980.
4 Ce Mitys reste mystérieux pour nous.
5 Comme le notent J. Lallot et R. Dupont-Roc, «​l’exigence profonde d’ordre, de logique […] fait
toujours postuler l’immanence d’une justice divine​» (op. cit., p.​229).
6 Goldschmidt, 1982, p.​264. V.​Goldschmidt conclut au sujet de l’analyse aristotélicienne de la
tragédie (p.​418) : «​comme la biologie à l’égard des moindres espèces vivantes, la tragédie opère
sur la “vie” une transformation qui parvient à la dépouiller de ses apparences contingentes, peu
engageantes et irrationnelles​»
7 Poét. 13, 52b28ss. Œdipe est mentionné dans ce chapitre 13 en 53a 11ss. Voir aussi 14, 53b 7
et 31
8 Cf. Forestier, 1996.
9 Il s’agit ici du «​terme​» (τέλος), non au sens de «​fin​», mais au sens de «​terme logique d’une
action​» (Lallot, Dupont-Roc, p.​371).
10 L’action dans l’Œdipe Roi a fait en effet l’objet de très nombreuses analyses dont nous nous
inspirons et sur lesquelles nous ne reviendrons pas : voir par exemple, Kirkwood, 1958,
Machin, 1981. Voir aussi Brody, 1985, et Peradotto, 1992, p.​1-15.
11 Voir aussi v. 136s. où il endosse la cause du dieu.
12 Sur l’importance de l’ironie tragique inconsciente dans le théâtre de Sophocle pour traduire
l’action divine, voir Jouanna, 2007, p.​477 ss.
13 Et l’on sait la malédiction à laquelle Œdipe se voue lui-même sans le savoir en condamnant
le coupable (v. 249 ss.). Voir Vernant, 1972, p.​101-131.
14 Voir en particulier Ricoeur, 1991.
15 De Romilly, 1971, p.​96-98, sur l’Œdipe Roi.
16 Cf. Hutchinson, 1999, p.​47-72.
17 Trad. P.! Mazon, CUF.
18 Cf. Kamerbeek, 1967, p.​116.
19 On le trouve dans Ajax, v.​245 quand le chœur des compagnons d’Ajax a découvert ce qu’a
fait son maître et dit que c’est pour eux le moment de se couvrir la tête.
20 Cf. au sens d’indice Ant. 257, El. 24 et 886.
21 Ant. 998, où Tirésias a recueilli des signes de la colère divine, et O.C. 94. (et σήµεια 1512) où
il s’agit des signes divins de l’appel des dieux.
22 Le sens du passage est difficile : nous suivons ici l’interprétation de J. Bollack, 1990, mais
aussi Jebb, 1893, pour χρεία, auquel nous gardons le sens habituel d’«​usage, utilité​».
23 Au-delà du rappel des sonorités, il y a peut-être une relation étymologique entre les deux
termes : cf. P.! Chantraine, Dictionnaire étymologique de la langue grecque, s.v. χρησ-.
24 Chantraine, DELG, s.v. ἄρτι.
25 Voir aussi v. 474 où le chœur évoque l’oracle qui vient de briller.
26 L’aoriste a valeur gnomique : cf. Jebb, 1893, ad vers.
27 Jebb rapproche l’expression d’Eur. Phen. 1000 : εἰς ἀνάγκην δαιµόνων ἀφ ιγµένοι.
28 Voir Kamerbeek, p.​176.
29 V. Bollack, 1990, ad loc.
30 Nous n’adoptons pas la lecture de Dawe ὕβριν φυτεύει τυραννίς. Voir Dawe, 1982 ad vers.
Voir Jebb, et Kamerbeek ad vers. Pour un commentaire développé, cf. J.! Bollack, ad vers.
31 P. Mazon, CUF.
32 Voir notamment Pucci, 1992, p.​20 sq., qui renvoie à Brody, 1985. Sur la valeur de ἐξ dans
ces exemples voir Goldhill, 1984, p.​177-200.
33 Trad. P.! Mazon.
34 Dawe, 1982, p.​93 souligne que ἐς καλὸν porte à la fois sur les deux verbes qui suivent,
coordonnés par τε : σύ τ᾿ εἶπας οἵδε τ᾿ ἀρτίως... σηναίνουσί µοι.
35 Trad. P.! Mazon, CUF.
36 Voir cependant J. Bollack, 1990, ad vers.
37 V. Kamerbeek, 1967, ad vers. sur la valeur de l’adverbe ici.
38 Poet. 11, 52a25s. : seule est mentionnée la péripétéia que constitue l’arrivée du Corinthien
qui vient délivrer Œdipe de ses craintes et qui, en lui révélant son identité, fait l’inverse.
39 Dawe, 1982, p.​189 renvoie au vers 256 de l’Agamemnon où l’adjectif est employé dans un
contexte protecteur similaire, et à Pindare Pyth. IX, 64, où se trouve une comparaison à
Apollon protecteur qui veille sur les troupeaux avec la même épithète.
40 Poet. 18, 55 b28s.
41 Cf. . Dawe, 1982, p.​18.
42 Trad. P.! Mazon, CUF.
43 Voir R.C. Jebb, 1893, et Dawe, 1982, ad vers. Contra Kamerbeek, 1967 ou Bollack, 1990 ad
vers.
44 Au point que le verbe σηµαίνω en emploi absolu peut signifier chez Xénophon par exemple,
«​faire connaître l’avenir, prédire​» (Mem. I, 1, 2 etc.).
45 De Romilly, 1971, p.​97.
46 Sur la conception aristotélicienne dans la Poétique à cet égard, voir Goldschmidt, 1982, p.
416 sq.
47 Hom. Il., II, 485.

Pour citer cet article


Référence papier
Michel Fartzoff, « Œdipe Roi : le tragique et le texte théâtral », Pallas, 84 | 2010, 299-309.

Référence électronique
Michel Fartzoff, « Œdipe Roi : le tragique et le texte théâtral », Pallas [En ligne], 84 | 2010, mis
en ligne le 01 décembre 2010, consulté le 27 mars 2018. URL :
http://journals.openedition.org/pallas/3479 ; DOI : 10.4000/pallas.3479

Auteur
Michel Fartzoff
Professeur de Langues et littératures anciennes
Université de Franche-Comté
Institut des Sciences et Techniques de l’Antiquité (EA 4011)
m.fartzoff@wanadoo.fr

Droits d’auteur

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