Documente Academic
Documente Profesional
Documente Cultură
Nous allons tout d’abord montrer que passer de la notion au concept consiste à
affiner, à préciser une définition ; à progresser d’une perception vague à une
caractérisation rigoureuse.
Nous pouvons par conséquent se demander au nom de quoi nous voulons passer de
la notion au concept. Ce ne peut être comme nous l’avons sous-entendu qu’au nom
d’un idéal de la connaissance, autrement dit, d’une volonté d’accéder à un niveau
supérieur de vérité. On peut alors supposer que ce qui conduit à ce progrès de la
connaissance, c’est ce que Platon appelait l’Idée du Vrai. En effet, selon le principe
grec, une connaissance vraie ne saurait être que belle et bonne. Selon Platon, un
discours philosophique, pour être reçu, doit avoir du répondant dans le réel c’est à
dire qu’il s’appuie sur quelque chose de consistant. C ‘est de là que naît l’hypothèse
des Idées : la philosophie doit toujours se nourrir de matériaux extérieurs (comme
par exemple les mathématiques pour les Grecs pour Descartes).
Pour Platon, le monde des Idées, réalité essentielle, demeure immuable alors que
les apparences ne cessent de changer au fil du temps. Le monde des Idées est
stable et transparent. De ce fait, le point de départ de toute philosophie est la
reconnaissance de la nécessité de ce détour par le monde stable et construit contre
le monde des apparences. Ainsi défini, le monde des Idées est un monde clair et
intelligible, comme le serait l’univers mathématique.
Bien sûr à l’hypothèse des Idées il faudrait en rajouter une autre, celle qu’il y a en
l’homme une faculté qui lui permet de saisir cette réalité : il faut donc supposer que
l’homme possède, en même temps qu’un corps plongé dans les apparences un
esprit capable de saisir les Idées à travers la construction du discours.
Et, c’est parce que l’esprit fonctionne selon une volonté de connaître parfaitement,
selon un idéal, que ce qui nous fait passer de la notion au concept n’est pas le
concept lui-même mais l’Idée platonicienne comme horizon de perfection du savoir.
Les concepts sont des créations voire des procréations de l’esprit, en vue d’atteindre
un objectif précis. Ils s’ajoutent donc en quelque sorte à ce qui est perçu
immédiatement à savoir les notions. En cela, les notions peuvent être vues comme
des intuitions individuelles alors qu’au contraire, les concepts sont des constructions
mentales qui constituent les fondements de l’univers intellectuel de l’être humain.
Ainsi, la notion est une représentation du monde telle qu’elle nous intéresse ; le
concept permet d’abstraire c’est à dire de briser une réalité trop entachée d’erreurs
et de sentiments, afin d’en extraire uniquement les caractères pertinents. Ceci
constitue donc bien un pas effectué sur le chemin de la connaissance dans le sens
où nous passons d’une affirmation individuelle à une vérité stable et générale.
Ainsi comme nous l’avons vu dans cette première partie la seule différence qui
existe entre concept de notion et notion de concept, à savoir un degré différent
d’exactitude, nous permet de saisir pourquoi il est nécessaire de passer de l’un à
l’autre.
Nous avons traité ici de l’idéal de connaissance comme moteur de cette translation.
Nous allons désormais nous attarder sur le rôle joué par la conceptualisation dans la
mise en place et dans la construction de théories, en montrant que les concepts
peuvent être utilisés à la fois comme des moyens de justifier une position, de réfuter
une théorie ou d’en créer une nouvelle.
Dans l’élaboration des théories, les concepts n’occupent pas toujours la même
place. Les chercheurs peuvent outrepasser les notions et utiliser des concepts pour
différentes raisons qui dépendent de la portée qu’ils veulent donner à leurs propos.
Conceptualiser peut en effet permettre de fonder une théorie, de la purifier, de la
réfuter…
Pour illustrer les différentes utilisations des concepts, nous nous
appuierons sur trois exemples issus des sciences économiques. Nous montrerons
donc qu’ils peuvent servir à l’élaboration d’une théorie (c’est le cas du concept
d’Homo Œconomicus), à la légitimation d’une idéologie (l’aliénation chez Marx), et à
la critique (la demande effective chez Keynes).
Dans cette seconde partie, nous avons donc mis en évidence le premier rôle
du concept dans la théorisation et le cheminement de la pensée scientifique. Comme
pour les autres sciences, le passage de la notion au concept est primordial et est
grandement impliqué dans l’histoire de la pensée économique et dans la succession
des différentes théories.
CONCLUSION
Lorsque l’on utilise un terme, un signe verbal quelconque, et que l’on veut lui
apporter un surcroît de valeur, on le baptise concept.
En effet, nous nous sommes ici attachées à montrer que la différence entre notion de
concept et concept de notion est à rechercher autour d’un différent degré de
précision. Au nom d’un idéal de la connaissance, il est nécessaire d’évoluer d’une
idée vague, fluctuante, à une définition précise qui servira de fondement, de principe
ou d’idée explicative.
On comprend alors pourquoi la conceptualisation, c’est à dire le passage de la notion
au concept, est une étape essentielle lors de la théorisation.
Nous avons choisi de nous orienter vers cette dernière spécificité du concept
qui semble être en adéquation avec notre approche épistémologique de l’économie.
Toutefois nous sommes bien conscientes que nous aurions pu aborder ce sujet sous
d’autres angles, par exemple celui d’une réflexion entre linguistique et pensée
(Saussure).
Bibliographie
Bachelard:la formation de l'esprit scientifique
Marx:le capital