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conserver s'il peut devenir un instrument utile aux autres pour la manifestation de sa
gloire et de son amour. »1
Le 8 mai 1808, elle meurt des suites d'une couche difficile, à l'âge de trente-six ans. Les registres
d'état-civil font état d'un enfant « mort-né », déclaré le 29 avril 1808 (Lyon mairie unique 1802-
1812 - division du midi, 2E153). Marie Willermoz laisse un veuf inconsolable et un fils de trois
ans. À soixante-dix-huit ans, Jean- Baptiste Willermoz doit faire face à l'éducation d'un enfant.
Si la vivacité de ce fils réchauffe ses vieux jours, son grand âge ne lui laisse cependant guère
d'espoir de le voir atteindre l'âge d'homme. « C'est là l'épine qui souvent fatigue mon cœur »,
dit-il à Charles de Hesse.2
Sans doute inquiet à l'idée de ne pouvoir lui transmettre des connaissances acquises dans le
secret des loges, Jean-Baptiste Willermoz entreprend d'écrire des textes dans lesquels il
reprendra la doctrine martiniste telle qu'il l'a adaptée pour le Régime rectifié. L'un de ces
cahiers s'intitule Instruction particulière et secrète à mon fils pour lui être communiquée lorsqu'il aura
atteint l'âge de parfaite virilité, si alors il se montre digne de la recevoir Il écrit dans le Cahier D. 1 :
" Celui qui lit au fond des cœurs sait que je lui ai demandé longtemps un fils préparé
dans sa miséricorde, auquel je pus remettre un jour sans danger pour lui, et sans
indiscrétion de ma part le dépôt qui m'a été confié en son nom. Je vois avec
reconnaissance éclore aujourd'hui l'aurore de ce jour désiré, puissiez-vous remplir un
jour mes espérances, et mériter de plus en plus que ce précieux dépôt s'accroisse dans
vos mains lorsque le temps sera venu qu'il y parvienne. »
Hélas, Jean-Baptiste François de Salle Claude meurt le 24 octobre 1812, quelques semaines
après avoir fêté son septième anniversaire. Pour Willermoz, ce deuil vient s'ajouter à celui
occasionné deux ans plus tôt par la mort de sa sœur marie Thérèse. Dans un éloge consacré à
Willermoz, M. Terme relate ces événements douloureux :
« Le seul fils qui lui resta, son unique espérance, celui qui devait fermer ses paupières
appesanties par les années, expira dans les bras de son père au moment où il semblait
promette de douces consolations à sa vieillesse. C'est surtout dans cette cruelle
circonstance que nous avons admiré le courage de M. Willermoz ; nous l'avons vu au
milieu de la longue et cruelle agonie de son fils, se précipiter au pied du Christ, et,
nouvel Abraham, lui offrir en sacrifice ce qu'il avait de plus cher. »3
Si Jean Baptiste François de Salle Claude n'eut pas l'occasion de lire les cahiers composés par
son père, ces textes ne furent pas pour autant perdus, car ils connaîtront d'autres lecteurs. Le
26 octobre 1820, Jean- Baptiste Willermoz expédie une copie de ces documents à son ami Jean
de Turckheim. L’ensemble regroupe plusieurs textes dont il donne la description suivante 4:
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LES CAHIERS D’INSTRUCTION D1 À D9. PRÉSENTATION
" Le paquet se compose de deux parties dont l'un contient trois cahiers S. 1. 2. 3. La
lettre S indique que ce sont des extraits très rares et importants des sommeils d'une
haute espèce. L'autre contient cinq cahiers D. n° 1. 2. 3. 4. et 5. Le D. initial du mot
Doctrine indique, surtout les trois derniers n°, que ce sont des extraits de la doctrine de
Moïse, dans laquelle vous reconnaitrez facilement celle des Grands Profès qui en
provient. »
Et Jean-Baptiste Willermoz de préciser :
" Le cahier D. N° 1 est le commencement du travail étendu que j'avais projeté de faire
pour l'instruction de mon fils qui était alors enfant et [que] la mort m'enleva en 1812. »
Tous les cahiers envoyés à Jean de Turckheim ne sont donc pas des textes qu'il destinait à son
fils. En dehors du D. 1, dont le titre indique lui-même la fonction, le cahier D. 3, intitulé Traité
des deux natures divine et humaine réunies indivisiblement pour /éternité [...], l'était probablement
aussi. C'est ce que laissait entendre Jean-Baptiste Willermoz quelques années plus tôt dans une
lettre envoyée à Rodolphe Salzmann en mai 1812. Dans cette correspondance, il évoquait un
document « que je réserve à mon jeune fils après moi s'il atteint l'âge d'en profiter et se montre
digne de la connaître. Ce morceau est une explication assez claire sur le double nature de J.C.
Dieu et homme, fils de Dieu et fils de l'homme impassible comme dieu [...]5
La copie des cahiers de Willermoz
Le 21 novembre 1949, Georg Franz Burkhard Kloss (1787-1854), médecin et historien allemand
de la franc- maçonnerie, a copié les cahiers envoyés par Willermoz à Jean de Turckheim. Cette
copie fut conservée mais une copie faite par Andreas Schleiermacher (1787-1858), à qui l'on
doit la reproduction de plusieurs documents de ce fonds (comme le Traité de la réintégration des
êtres).6
Gérard van Rijnberk eu l'occasion de les consulter. Il donne les titres de ces cahiers, ainsi que
quelques extraits, dans Épisodes de la vie ésotérique 1780-1824 (Lyon, Librairie Astro-ésotérique,
1948, chap. VIII, p. 139-142). Il dénombre neuf cahiers D 1 à D 9. Le nombre de ces cahiers ne
coïncide pas avec celui annoncé par Willermoz dans sa lettre, qui n'en présente que cinq dans
la série D. (pour Doctrine) ! Il est donc possible que la copie utilisée par Kloss ait été
recomposée et que les différences que nous constaterons dans les copies présentées dans cet
article proviennent de compilations faites par leurs copistes successifs, à moins, comme le
pensait René Désaguliers, qu'avec le temps Willermoz ait recomposé et assemblé
différemment ces cahiers doctrinaux.
Voici les titres des documents décrits par Gérard van Rijnberk :
D. 1 : Instruction particulière et secrète à mon fils pour lui être communiquée lorsqu'il
aura atteint l'âge de parfaite virilité, si alors il se montre digne de la recevoir.
D. 4 : Dialogue après la réception d'un Frère Grand Profès entre le chef initiateur et le
nouveau reçu, servant d'introduction aux explications demandées sur l'instruction qu'il
a reçue et aux développements désirés de la doctrine secrète de l'Ordre pour compléter
son initiation.
D. 5 : Ce cahier se compose de plusieurs textes. Ces derniers ne sont pas numérotés, c'est
nous qui les dénombrons pour faciliter la description.
• D. 5.3 : Les vrais moyens de parvenir à la connaissance de Dieu, soit par l'étude
des traditions religieuses écrites, et de celles non écrites, soit par un examen
approfondi de la propre nature de l'homme, considéré comme image et
ressemblance de son créateur
• D. 5.6 : Des êtres spirituels émanés dans l'immensité divine en quatre classes distinctes
d'action et d'opération.
D. 6 : Du libre arbitre de tous les Êtres spirituels émanés et des intelligences humaines,
et de la grande et importante différence entre leur état d’émanation et leur état
d'émancipation.
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LES CAHIERS D’INSTRUCTION D1 À D9. PRÉSENTATION
Barthélémy Lajard 7 en 1818, soit six ans après la mort du fils de Willermoz. Le D. 4, qui est un
Dialogue après la réception d'un Frère Grand Profès, ne lui était sans doute pas non plus destiné.
Notons que parmi les textes présentés par Gérard van Rijnberk, seuls trois subsistent dans le
fonds Willermoz conservé à la bibliothèque de la Part- Dieu à Lyon :
• Le titre général est : De l'existence de Dieu. Preuves et ancienneté des traditions orales.
• De Dieu considéré dans son unité et dans la trinité de ses puissances créatrices.
• Examen du premier chapitre de la Genèse, explication générale de l'œuvre des six jours.
• Explication de l'exposition.
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LES CAHIERS D’INSTRUCTION D1 À D9. PRÉSENTATION
5e cahier E :
• Le titre général est : Création de l'univers et ses lois d'ordre. Émanation, puissance et
destination de l'homme.
• Le titre général est : De la double nature de Jésus-Christ. Dieu homme et homme Dieu.
« On indique enfin qu'il devait encore y avoir six feuilles sans titres particuliers », ajoute Paul
Vulliaud à la fin de cette énumération.
Parmi les « Pièces justificatives » qui précèdent la liste des cahiers figure un texte intitulé «
Dialogue après la réception d'un Frère Grand Profès entre le Chef initiateur et le nouveau reçu,
servant d'introduction aux explications demandées, sur l'instruction qu'il a reçue et aux
développements désirés de la Doctrine secrète de l'Ordre pour compléter son initiation ».10 Il
correspond au cahier D. 4 de La Haye qui porte d'ailleurs le même titre.
Paul Vulliaud fait également suivre la liste des six cahiers par un texte intitulé « Résumé
général de la doctrine ». Or ce dernier correspond, à la fois par son titre et par son contenu (à
part un mot qu'il n'a pas réussi à déchiffrer : « Lieu », p. 256), à un document conservé à la
bibliothèque municipale de Lyon sous la cote Ms 5475 (pièce 5).
Bien que Paul Vulliaud n'en précise pas l'origine, ces « Pièces justificatives » proviennent
vraisemblablement des archives de Jean-Baptiste Willermoz, découvertes par Élie Steel-Maret
en 1893.11 En effet, après avoir été vendues en 1894 à Papus — qui les utilisa pour écrire ses
ouvrages sur l'histoire du martinisme —, c'est le libraire Émile Nourry qui les racheta entre
1925 et 1926, soit quelques années après la mort du grand maître de l'ordre Martiniste (| 1918).
Il les conserva jusqu'en décembre 1934, date où elles furent achetées par la bibliothèque de la
ville de Lyon.
• De l'émanation des êtres spirituels et des quatre classes qui les composent, de leur
liberté, de leurs facultés intellectuelles et de leur émancipation
FM4 509 : 3e Cayer
12 Sur Paul Vulliaud, voir la préface et les notes de François Secret et Jean-Pierre Laurant à
l'édition posthume du livre de Paul Vulliaud, Histoire et portraits de Rose-Croix, Paris-Milan,
Arché Milano, 1987.
13 Les Rose-Croix lyonnais au XVIIIe siècle, op. cit., p. 38. Cet article très ironique à l'égard de
Papus retrace l'histoire de ces documents, que complèterons plus tard Jean Saunier puis Robert
Amadou. Voir aussi sur ce site http://www.philosophe-inconnu.com/les-archives-de-jean-
baptiste-willermoz-a-la-bibliotheque-municipale-de-lyon/
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LES CAHIERS D’INSTRUCTION D1 À D9. PRÉSENTATION
Leur comparaison avec les titres des cahiers présentés par Vulliaud fait apparaître que le 2e
cayer de la BnF porte le même titre que celui du 2e cahier B cité par Vulliaud, et le titre du 3e
cayer de la BnF est similaire à celui du 3e cahier C. Ils portent d'ailleurs les mêmes numéros,
ce qui pourrait témoigner de leur parenté.
René Désaguliers a analysé et retranscrit ces documents de la BnF dans la revue Renaissance
Traditionnelle, n° 80, octobre 1989, « Les cahiers A à G. Les cahiers D. 1 à D. 9. Découverte de
deux textes inconnus de Jean-Baptiste Willermoz », p. 241. Il montre que ces deux cahiers
présentent des textes similaires à ceux du fonds Kloss et de la bibliothèque municipale de
Lyon, et analyse leurs variantes.
Avant cette publication, Roger Dachez avait publié dans la même revue une retranscription
complète du cahier D. 3, le Traité des deux natures, d'après la copie conservée dans le fonds
Willermoz de la bibliothèque municipale de Lyon (Ms 5940-4) 14
Le Traité des deux natures a également fait l'objet d'un ouvrage publié par Diffusion
Rosicrucienne en 1999 sous le titre L'Homme-Dieu, traité des deux natures. Cette édition est basée
sur le Mc 5940 - 4 de la bibliothèque municipale de Lyon.
• D. 1 : Instruction particulière et secrète à mon fils pour lui être communiquée lorsqu'il
aura atteint l'âge de parfaite virilité, si alors il se montre digne de la recevoir.
• D. 4 : Dialogue après la réception d'un Fr Gr. Pro. entre le chef initiateur et le nouveau
reçu, servant d'introduction aux explications demandées sur l'instruction qu'il a reçue et
aux développements désirés de la doctrine secrète de l'ordre pour compléter son
initiation.
• Des vrais moyens de parvenir à la connaissance de Dieu, soit par l'étude des
traditions religieuses écrites, et de celles non écrites, soit par un examen de
l'homme considéré approfondi de la propre nature comme image et ressemblance
de son créateur
• Des êtres spirituels émanés dans l'immensité divine en quatre classes distinctes
d'action et d'opération.
• D. 6 : Du libre arbitre de tous les êtres spirituels émanés et des intelligences humaines,
et de la grande et importante différence entre leur état d'émanation et leur état
d'émancipation.
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