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Le genre de la citoyenneté, ou quelle identité politique pour les femmes

pendant la Révolution française ?


Dominique Godineau
p. 315-339

1Avant d’être repris par l’histoire des femmes avec le succès que l’on sait, « le genre »
était (et est encore) utilisé en linguistique pour signaler la catégorie grammaticale à
laquelle appartiennent les noms communs, certains étant strictement masculins, d’autres
strictement féminins et d’autres possédant une double désinence, une masculine et une
féminine, selon la personne désignée. Au XVIIIe siècle, le mot citoyenneté n’existe pas1,
mais la notion est exprimée par les formules « droit de cité » ou, plus souvent, « droits
du citoyen ». Or, le genre du nom citoyen semble, si l’on peut dire, pour le moins
ambigu. En effet, à lire certains dictionnaires on pourrait croire qu’il est strictement
masculin et que la forme féminine citoyenne n’existe pas dans la langue française. Ainsi
par exemple l’Encyclopédie, qui donne une définition politique du citoyen (« membre
d’une société libre [...] qui partage les droits de cette société, et qui jouit de ses
franchises »), le qualifie-t-elle de « substantif masculin2 ». Diderot, auteur de l’article,
ajoute cependant que « on n’accorde ce titre aux femmes, aux jeunes enfants, aux
serviteurs que comme à des membres de la famille d’un citoyen proprement dit ; mais
ils ne sont pas vraiment citoyens ».

2L’Encyclopédie n’est pas une exception. Son concurrent direct, leDictionnaire de


Trévoux, présente3 également citoyen comme relevant du genre masculin (« substantif
masculin ») et du politique (« Ce mot a un rapport particulier à la société politique », et
plus précisément aux « États républicains »). Mais, alors que la qualification masculine
du nom devrait logiquement interdire l’usage de sa forme féminine, on la trouve malgré
tout dans le corps de l’article : « Voilà la Citoyenne » y lit-on, à propos d’une Spartiate
qui aurait rendu grâces aux Dieux de l’issue victorieuse d’une bataille dans laquelle
avaient pourtant péri ses cinq fils. On relève la même incohérence dans le Dictionnaire
universel de Robinet : bien que lecitoyen, « sujet libre », soit un nom masculin, le
mot citoyenne est employé dans la notice4.

3De fait, citoyenne existe bien dans la langue française, même s’il est très rarement
utilisé5. Il figure d’ailleurs, non pas subrepticement mais tout à fait officiellement, dans
les dictionnaires qui, comme celui de l’Académie française, donne au mot un sens non
pas politique mais social : « Citoyen, enne. s [ ubstantif ]. Habitant d’une Ville, d’une
Cité6 ».

4Ce détour par le genre des mots met en valeur l’ambiguïté portée par la désinence
féminine de citoyen. Elle provient en grande partie du fait que, au XVIIIe siècle, les
femmes ne sont pas pensées comme relevant de l’espace politique mais de la sphère
familiale7 (ce qu’illustre bien la définition de l’Encyclopédie). Cependant, « habitant [es]
d’une ville » (ou d’un pays), elles appartiennent aussi au corps social. Jusqu’en 1789,
celui-ci est composé de sujets du roi et la définition politique du citoyen reste donc toute
théorique. C’est la Révolution qui transforme les Français en citoyens détenant la
souveraineté et pourvus de droits politiques, garantis par laDéclaration des Droits de
l’Homme et du Citoyen (26 août 1789). Fondée sur la philosophie du droit naturel, elle
pose le principe de l’égalité des droits et assure que chaque individu a, par sa nature
même d’être humain, des droits naturels et inaliénables.

5De 1792 à 1795, tous les hommes possèdent les droits politiques du citoyen, ceux qui
définissent la citoyenneté : voter et porter les armes dans la garde nationale. Les
hommes qui en avaient été spoliés en 1789 y accèdent en effet en 1792, par l’abolition
du suffrage censitaire (août 1792, rétabli en 1795) et par la promulgation de l’égalité
politique dans les colonies entre les Blancs et les Libres de couleur (avril 1792) – et avec
l’abolition de l’esclavage en février 1794, tous les hommes « sans distinction de couleur »
peuvent jouir des droits du citoyen. Mais, on le sait, toutes les femmes en restent
exclues, du début à la fin de la Révolution.

6Pour les révolutionnaires, le modèle idéal de la femme est celui de la mère de famille
qui élève ses enfants dans l’amour de la liberté et ne se mêle pas des affaires publiques.
Faisant partie du corps social, elles sont pourtant appelées citoyennes (appellation
usuelle à partir de 1792), ce qui les inclut dans l’espace politique de la Nation. Et rejette
dans l’ombre le lien familial individuel par lequel elles étaient socialement désignées
jusque-là (Fille,Femme, Veuve). Cela dit, pour beaucoup de révolutionnaires la citoyenne
est seulement l’épouse du citoyen. Mais de nombreuses femmes donnent quant à elles
un autre sens à ce mot8, celui d’individu politique, membre du peuple souverain qui
participe à chose publique, à la res publica, même s’il ne peut exercer les droits inhérents
à la souveraineté. « Nous sommes Citoyennes » affirment des femmes à plusieurs
reprises. Et, être citoyen pendant la Révolution signifie aussi participer à toute une série
de pratiques, qui ne sont pas limitées au vote et au service dans la garde nationale :
« s’instruire » par la lecture de la presse ou l’écoute des discours, fréquenter les sociétés,
participer au débat public. Bref, comme l’écrit en 1793 la présidente du club de femmes
de Dijon : « les citoyennes qui font partie [de la République] et s’en enorgueillissent
[doivent] se rendre utiles à la chose publique9 ». C’est ainsi que, donnant vie au
motcitoyenne, des femmes agissent comme telles et font acte de citoyenneté en
intervenant dans la Révolution, ce que nous allons maintenant présenter, avant
d’examiner ensuite la question de leurs droits.

FAIRE ACTE DE CITOYENNE EN INTERVENANT DANS LA RÉVOLUTION

Des différences
7Il importe de préciser avant de poursuivre que toutes les femmes ne sont pas
intervenues de la même façon. Dans le discours tenu sur elles, les femmes sont
présentées comme un tout homogène, défini par sa seule identité de genre. Dans la
pratique, même si leur statut social et politique ne les met pas sur le même plan que les
hommes, elles sont, comme eux, séparées par de multiples différences (sociales,
culturelles, religieuses, politiques), des différences qui l’emportent sur une hypothétique
solidarité féminine, « de genre » – ce sont ainsi des marchandes de la Halle qui
demandent en 1793 l’interdiction du club parisien des Citoyennes Républicaines
Révolutionnaires, trop radical à leur goût10. On le voit, les différences concernent donc
aussi les degrés de l’engagement ou son sens.

8Si l’Histoire a retenu le nom de quelques révolutionnaires célèbres, telles Madame


Roland, Olympe de Gouges, Théroigne de Méricourt, il sera ici essentiellement question
des femmes ordinaires, des anonymes, et plus particulièrement des femmes du peuple,
blanchisseuses, ouvrières, marchandes. On se limitera également à celles favorables à
la Révolution. Pour les révolutionnaires qui le revendiquent comme pour les contre-
révolutionnaires qui le rejettent, le « titre » de citoyen (ne) est lié à l’adhésion (qui peut
d’ailleurs évoluer suivant les périodes) au nouveau régime. Il n’en reste pas moins que,
même sans s’y attarder, il faut souligner que de très nombreuses femmes se sont
mobilisées contre la Révolution, ou certains de ses aspects.

9Tandis que leurs parents masculins émigrent pour combattre la France révolutionnaire,
les femmes nobles restent souvent sur place pour s’occuper des affaires familiales :
risquant d’être arrêtées comme parentes d’émigrés, beaucoup tentent de se faire oublier,
mais d’autres jouent un rôle actif dans la contre-révolution, en donnant des informations
aux émigrés, en abritant des contre-révolutionnaires, en transférant des fonds à
l’étrange, en animant des cercles hostiles au régime.

10Plus que pour les hommes, la question religieuse a conduit de très nombreuses
femmes à rejeter la Révolution à partir du vote de la Constitution civile du clergé en
1790. Partout en France, celles-ci sont fréquemment à la tête des foules qui s’opposent
à la fermeture des couvents ou s’en prennent, avec plus ou moins de violence, aux curés
constitutionnels. Lors de la « déchristianisation », elles sont plus nombreuses que les
hommes à cacher des prêtres réfractaires et des objets liturgiques ou à assister au culte
clandestin, au risque d’être arrêtées et condamnées (quelquefois à mort) ; elles
conservent des images pieuses, font secrètement baptiser leurs enfants, les élèvent dans
la religion catholique, et les plus engagées distribuent des libelles contre-révolutionnaires
ou font circuler de fausses rumeurs11. L’attachement à la religion ne conduit cependant
pas toutes les femmes à une attitude contre-révolutionnaire : à Paris, des femmes – et
non des hommes – qui fréquentent les sociétés populaires disent par exemple prier « le
Bon Dieu » pour qu’il assure la victoire des révolutionnaires12. Et, pour les femmes
comme pour les hommes, l’hostilité à la Révolution a aussi d’autres causes : des
marchandes regrettent le départ de leur clientèle noble, des domestiques d’émigrés
protègent leurs maîtres, des bourgeoises refusent en l’an II le « règne de la canaille et
de la crapule », etc. Dans les régions soulevées, en particulier dans l’Ouest, des femmes
soutiennent les insurgés : si quelques-unes se battent dans l’Armée catholique et royale,
plus nombreuses sont celles qui espionnent pour les Blancs, les ravitaillent, transportent
des armes, cachent les blessés13.

11D’autres au contraire défendent la Révolution, en paroles et en actes. Des « femmes


artistes » qui en 1789 se disent citoyennes et offrent leurs bijoux à l’Assemblée nationale,
à l’ouvrière qui lui envoie quelques sols, elles sont nombreuses à faire des dons à la
Nation, en particulier pour soutenir l’effort de guerre. Quelques dizaines s’engagent
même comme soldats, et quelques-unes sont faites sous-officiers ; mais le 30 avril 1793
l’Assemblée décide qu’elles « seront exclues du service militaire » et que seules les
blanchisseuses et vivandières resteront aux armées-plusieurs continuent pourtant à se
battre14.

12À l’intérieur du pays, des citoyennes, que l’on peut qualifier de militantes, prennent,
surtout à partir de 1792, une part active à la vie politique régionale et nationale, à l’image
des « Monnaidières » d’Arles qui participent en 1793 aux expéditions sans-culottes et à
la résistance contre le fédéralisme15. À Paris, de nombreuses militantes sont engagées
dans le mouvement révolutionnaire, formé structurellement et pas seulement à certains
moments de deux composantes, l’une masculine et l’autre féminine, d’importance
inégale et aux pratiques parfois distinctes16, ne serait-ce que parce que hommes et
femmes n’ont pas le même statut social et politique. La sans-culotterie féminine
parisienne est composée de travailleuses, appartenant souvent à des familles de militant
(e) s. Certaines ont une pratique politique quotidienne, mais la majorité se mobilise
surtout en période de crise, politique ou frumentaire. On remarque d’ailleurs que la
fonction maternelle pèse sur l’engagement : alors que le sans-culotte « type » est un
père de famille d’une quarantaine d’années, les militantes ont au contraire le plus
souvent moins de trente ans ou plus de cinquante ans et n’ont donc pas à s’occuper de
plusieurs jeunes enfants. Leur statut politique les distingue aussi de leurs compagnons
puisqu’elles ne peuvent ni voter, ni servir dans la garde nationale, ni délibérer dans les
assemblées, ce qui n’est pas sans limiter leurs possibilités d’engagement. Elles
interviennent cependant dans la sphère politique, par différentes pratiques qui
soulignent leur volonté d’agir comme des citoyennes.

« Chaque individu a le mérite et la capacité de bien dire » : participer au débat public


13Dès 1789, des blanchisseuses marseillaises écrivent : « Toute la Nation est
actuellement exaltée, chaque individu a le mérite et la capacité de bien dire, le
Patriotisme nous embrase tous, exprimons-nous17 ».

14Comme elles, des femmes portées par l’espoir de 1789 (et par la liberté de la presse)
publient alors leurs doléances, leurs revendications ou leurs avis sur les événements et
les réformes attendues. Elles abordent tous les sujets concernant la réorganisation de la
Nation, des biens du clergé à la situation des Juifs ou des enfants naturels. Plusieurs
parlent au nom de leur sexe et demandent une meilleure éducation, des aides pour les
femmes pauvres, dénoncent la prostitution ou le sort des femmes mal mariées,
« esclaves » à vie d’époux dont elles ne peuvent divorcer, réclament l’égalité
successorale ou (rarement) leur participation aux affaires publiques. Certes, ces dizaines
de brochures féminines ne représentent qu’une infime partie des milliers de libelles
publiés, mais, qu’elles adoptent un ton assez modéré ou plus radical, elles révèlent le
souhait de leurs auteures de ne pas être exclues de la vie politique et d’apporter leur
contribution à la construction de la cité. Elles font résonner dans l’espace public le
mot citoyenne, présent dans les titres ou à longueur de pages, et ne sont ainsi
probablement pas étrangères à sa diffusion dans le langage, qui l’ignorait souvent
jusque-là, comme on l’a vu.

15Cet intérêt pour les affaires publiques est à l’origine de la création de plusieurs
périodiques qui, rédigés par des hommes ou par des femmes, s’adressent en 1790-1791
à un public spécifiquement féminin. À côté d’annonces matrimoniales et de recettes de
beauté, y sont recensés des ouvrages sur des thèmes d’actualité, y sont développés de
longs essais sur l’éducation, y sont commentés les lois et les événements récents,
certaines feuilles se voulant même entièrement politiques comme les Lettres
bougrement patriotiques de la Mère Duchêne18.

16Brochures et presse féminines sont plutôt datées des premières années de la


Révolution, mais même ensuite des femmes continuent à rendre publiques leurs opinions
dans des lettres envoyées aux journaux (qui les publient parfois), dans des Avis,
des Adresses vendues dans les rues ou placardées sur les murs (très prolixe, Olympe de
Gouges en a écrit plusieurs), et surtout dans les innombrables pétitions reçues par
l’Assemblée. S’adresser, par des pétitions (également appelées adresses), aux
représentants du peuple est une pratique citoyenne très courante pendant la Révolution.
La pétition (qui n’est pas nécessairement réclamation) peut être individuelle ou
collective, présenter un cas personnel ou donner un avis sur telle loi, tel événement,
féliciter les députés ou leur réclamer des mesures d’ordre général : elle est un des
moyens privilégiés de participer au dialogue instauré entre la Nation et ses
représentants, et les pétitions entièrement féminines ou « mixtes » soulignent que les
citoyennes ne sont pas absentes de la sphère publique démocratique en construction.

17Celle-ci est également caractérisée par une forte sociabilité politique.

« Les citoyennes des tribunes »

18Dans la continuité de la sociabilité intellectuelle et mondaine des Lumières, Germaine


de Staël, Sophie de Condorcet, Manon Roland ou Olympe de Gouges (pour ne citer que
les plus célèbres) animent des « salons » où se retrouvent députés et journalistes.
L’importante sociabilité populaire, dont les femmes étaient partie prenante avant 1789,
se politise elle aussi : à Paris, les rues sont animées par des groupes où chacun (e)
donne son avis sur la Révolution, et le soir des blanchisseuses « politiquent » au cabaret
en lisant ensemble le journal ou un discours de député. Parallèlement à ces
regroupements plus ou moins informels, ce qui distingue la Révolution est principalement
la naissance d’une sociabilité politique organisée dans les assemblées et les clubs.

19Les assemblées élues sont évidemment masculines, mais jusqu’en 1795 n’importe qui
peut venir suivre leurs débats depuis les tribunes entourant la salle des séances et
ouvertes au public. Et les témoins remarquent que, à Paris, les femmes y sont très
nombreuses ; certains, qui considèrent qu’elles n’ont rien à y faire et qu’elles feraient
mieux de s’occuper des affaires de leur ménage plutôt que de celles de la cité, leur
reprochent même parfois leur « rage de courir les assemblées19 ». Or, écouter les
députés dans une tribune publique n’est pas seulement signe d’intérêt politique : dans
la mentalité révolutionnaire, c’est aussi une façon de s’inscrire dans la sphère politique,
de faire acte de citoyenneté en exerçant un des droits du peuple souverain, celui de
contrôle des élus.

20Dans les sections (quartiers) des grandes villes, les hommes se réunissent plusieurs
fois par semaine en assemblée générale pour discuter des problèmes politiques locaux
et nationaux, lire des textes révolutionnaires, rédiger des pétitions, voter des motions :
exclues de la citoyenneté politique, les femmes n’y ont normalement pas voix délibérative
mais, installées dans les tribunes publiques, elles peuvent demander la parole et
certaines n’hésitent pas à intervenir, parfois de façon assez virulente-il peut même leur
arriver exceptionnellement d’y voter dans les moments de grande tension.

21On les retrouve avec ce même rôle de spectatrices plus ou moins actives dans les
tribunes de la majorité des clubs (ou sociétés) : quasi tous masculins, ils tiennent
cependant compte de la présence des « citoyennes des tribunes ». De plus, comme, à
la différence des assemblées générales, les sociétés relèvent du droit de réunion et non
de la citoyenneté, quelques-unes sont mixtes-on en recense actuellement une vingtaine
en province et une dizaine à Paris, sur un total de 5 500 en 1794. Dans ces cas, les
adhérentes payent leur cotisation, ont leur carte de membre, délibèrent, votent et
peuvent être élues au bureau (mais jamais comme présidente) ou au « comité
épuratoire » (qui vérifie la conduite révolutionnaire des sociétaires). Ce qui, on ne s’en
étonnera pas, déplaît infiniment à certains, offusqués de voir « la dignité de l’homme
offensée en passant sous la censure de quelques femmes » qui interrogent « sur des
questions dogmatiques et politiques les citoyens instruits20 ».

22La fréquentation des tribunes distingue donc l’engagement quotidien des militantes et
sert d’ailleurs à les désigner : elles ne sont pas appelées sans-culottes,
mais Jacobines, habituées des tribunes ou, à partir de 1795,tricoteuses car plusieurs
tricotent (en fait cousent) en écoutant les discours21. Les plus motivées s’y rendent tous
les jours et s’y font des ami (e) s ; les autres « quand il y a quelque chose de bon » ou
en période de crise et de mobilisation. Plusieurs disent y aller « pour s’instruire », pour
« y entendre la diversité des opinions ». De fait, dans les tribunes et par la lecture des
journaux, elles acquièrent une certaine culture politique et ne sont pas plus que les
hommes de leur milieu les mineures politiques « moins éclairées dans les
principes »22 décrites par des contemporains pour justifier leur exclusion. Leur présence
dans ces tribunes est aussi un moyen pour elles, qui ne peuvent exercer les droits du
citoyen, de participer à la Révolution et d’inscrire le mot citoyenne dans l’espace
politique. Mais leur possibilité d’expression y est malgré tout réduite et, afin de se faire
mieux entendre, dès 1790 des femmes créent leurs propres clubs.

Des clubs de citoyennes

23Une soixantaine de villes auraient ainsi abrité, à un moment ou à un autre, un club de


femmes, dont le nom comporte souvent à partir de 1792 le motcitoyenne. Dans les
premières années de la Révolution, s’y retrouvent surtout des parentes de notables
révolutionnaires locaux ; outre de traditionnelles tâches de bienfaisance (secours aux
malades et aux indigents, instruction des filles pauvres.), elles lisent les journaux, les
lois, débattent des événements et soutiennent le clergé constitutionnel auprès des
femmes de la ville. À partir de 1792, leur recrutement s’élargit socialement et la plupart
se radicalisent, envoient des pétitions à la Convention, se mobilisent dans les conflits
locaux.

24À Paris, deux clubs féminins se sont succédé. On sait peu de choses sur le premier
(mars 1791-1792) : la Société patriotique et de bienfaisance des Amies de la Vérité,
fondée et animée par la Hollandaise Etta Palm d’Aelders. Liée au club masculin des Amis
de la Vérité, elle s’engagea très activement pour défendre les droits des femmes : en
avril 1792, elle demandait par exemple à la Législative que les femmes soient admises
aux fonctions civiles et militaires, que l’éducation des filles soit fondée sur les mêmes
principes que celle des garçons, « qu’elles soient déclarées majeures à 21 ans, que la
liberté politique et l’égalité des droits soient communes aux deux sexes, que le divorce
soit décrété23 ».

25Le second club parisien, celui des Citoyennes Républicaines Révolutionnaires, fut créé
en mai 1793 par des militantes qui s’étaient rencontrées dans les tribunes ou dans les
sociétés mixtes et avaient déjà plusieurs actions et pétitions communes. Y adhérèrent
au moins cent soixante-dix femmes, d’origine plutôt populaire : celles que l’on connaît
(en général parce qu’elles exerçaient des fonctions dans la Société) avaient toutes une
profession-boutiquières, marchandes des rues, ouvrières en linge, blanchisseuses,
domestiques, polisseuses – ; ses deux dirigeantes les plus connues étaient l’une (Pauline
Léon, 25 ans) marchande fabricante de chocolat avec sa mère veuve, et l’autre (Claire
Lacombe, 28 ans) actrice. Leur but premier était de participer activement à la défense
de la Révolution, en armant les citoyennes pour lutter, à l’intérieur du pays, contre les
« ennemis du dedans ». L’hostilité masculine les força à renoncer à cet objectif, mais
elles eurent une importante activité politique, et formèrent pendant l’été 1793 une des
principales forces du mouvement populaire parisien, à laquelle les autorités rendirent
hommage. Hostiles aux Girondins, proches des sans-culottes et des Enragés, elles
demandèrent des mesures radicales : arrestation des suspects, destitution des nobles,
création de tribunaux révolutionnaires, levée en masse. Sans réclamer en public l’égalité
politique, elles n’étaient pas insensibles à la question : l’une, marchande mercière, assura
que « les femmes sont dignes de gouverner, presque mieux que les hommes », et une
autre, domestique, écrivit que les vrais républicains doivent renoncer à leur « despotisme
marital » car « les femmes commencent à voir qu’elles ne sont pas faites pour être plus
avilies qu’eux ». Et, soulignant que « la déclaration des droits est commune à l’un et à
l’autre sexe », des Parisiennes les remercient en juin 1793 d’avoir brisé le « préjugé »
qui « reléguait les femmes dans la sphère étroite de leurs ménages24 ». Mais à
l’automne 1793 la Société fut attaquée, pour ses positions politiques « enragées » et
parce que la majorité des révolutionnaires n’acceptait qu’avec réticence l’intervention
active de femmes. Le 30 octobre 1793, prenant prétexte d’une rixe avec des marchandes
de la Halle, la Convention l’interdit, ainsi que tous les clubs de femmes, rappelant par la
même occasion qu’elles ne peuvent exercer les droits politiques.

26Les clubs féminins furent donc dissous, mais les militantes continuèrent à fréquenter
les tribunes ou les sociétés mixtes –c’est le cas à Arles où, après la fermeture de leur
club, elles représentent plus de la moitié (57 %) des effectifs de la société populaire25.
Comme les militants, elles ne formaient qu’une minorité, à la différence de celles qui se
mobilisèrent au sein des foules, contribuant aussi de cette façon à la construction de la
citoyenneté.

Le rapport de genre en insurrection


27La Révolution est ponctuée par de nombreuses « insurrections », émeutes, « journées
révolutionnaires ». Or, même quand elles y sont moins nombreuses que les hommes,
des femmes sont dans toutes les foules insurrectionnelles, et pas seulement parce que
le pain est cher. Parfois armées, certaines participent à la prise de la Bastille le 14 juillet
1789 ou à celle des Tuileries le 10 août 1792. Une seule femme (blanchisseuse) figure
parmi les officiels « Vainqueurs de la Bastille », mais les archives révèlent d’autres
combattantes, portant éventuellement un fusil ou cherchant des bouteilles pour servir
de mitraille au canon des assiégeants26. En 1792, Théroigne de Méricourt, Claire
Lacombe et Reine Audu reçoivent une couronne civique pour leur bravoure lors de
l’attaque des Tuileries ; Pauline Léon s’apprêtait, elle aussi, à combattre avec le bataillon
de sa section, mais « à la prière de presque tous les patriotes », elle dut céder sa pique
à un homme27. Il y a de même des femmes le 17 juillet 1791 parmi les Parisiens venus
signer au Champ-de-Mars une pétition demandant la déchéance du roi, ou dans la
manifestation antiroyaliste du 20 juin 179228. On en trouve également en province et/ou
dans le camp contre-révolutionnaire : dans les foules qui en 1791 s’en prennent aux
patriotes à Montauban et Avignon, dans les émeutes religieuses où, on l’a vu, elles sont
souvent meneuses et majoritaires. Ce qui est aussi le cas dans les multiples émeutes de
subsistances.

28Dans la plupart des « journées » parisiennes, elles sont présentes comme individus
dans des foules à dominante masculine, mais, lors de quelques épisodes (octobre 1789,
printemps 1793, printemps 1795), « les femmes » se détachent dans les témoignages
comme un groupe spécifique, jouant un rôle de premier plan. En octobre 1789 elles
marchent sur Versailles, suivies peu après par la garde nationale. Les soulèvements du
printemps 1795 commencent également par des manifestations féminines : le matin du
1erprairial an III/20 mai 1795 (« la journée des femmes » selon certains témoins),
pendant que les députés font chasser à coups de fouet celles qui, dans les tribunes de
la Convention, les huent et se moquent d’eux, dans tout Paris des femmes se dirigent
vers l’Assemblée-où elles sont ensuite rejointes par les hommes. Reflet de ce rôle
moteur : après l’échec de l’insurrection de Prairial (20 au 20 mai 1795), les députés
interdisentspécifiquement aux femmes d’assister à toute assemblée politique, d’entrer
dans les tribunes de la Convention, de s’attrouper dans la rue au-dessus de cinq.

29Ces temps forts de l’action féminine présentent des formes d’action caractéristiques
du rapport de genre dans la foule. Dans les semaines précédant les insurrections de
1793 et 1795, des femmes investissent les tribunes de la Convention, d’où elles
expriment « hautement » leurs opinions. À l’automne 1789, et aux printemps 1793 et
1795, elles forment dans la rue des rassemblements ; en 1795 les policiers signalent que
dans les groupes « les femmes surtout. paraissent les plus irritées. paraissent jouer le
rôle principal. se répandent en propos et menaces. tiennent des discours violents et
séditieux. », et appellent les hommes à l’insurrection en les traitant de lâches, de
couillons, de jean-foutre de ne pas se révolter. Puis, au début des émeutes elles ont un
rôle d’incitation à l’action : des groupes de femmes sonnent le tocsin, battent le tambour,
marchent vers le siège du pouvoir (Versailles en 1789, la Convention en 1795) en forçant
les passantes à les suivre. Ce que soulignent des commissaires qui écrivent après
l’insurrection de Prairial (1795) :

Nous ne pouvons nous dissimuler que dans les moments orageux qui ont troublé cette
commune, les femmes ont joué le rôle de boutefeux29.

30Une fois rejointes par les hommes, elles passent au second rang : elles les
encouragent, mais ce sont désormais eux qui, grâce à leurs armes (piques, fusils et
canons), dirigent l’événement. Se dessine ici une distribution, non égalitaire, des rôles
sexuels lors de certains soulèvements, les femmes jouant d’abord un rôle moteur puis
secondant les hommes.

31Il s’agit là d’un rôle relativement traditionnel, que l’on peut repérer dans plusieurs
émeutes d’Ancien Régime30. Mais la Révolution, en affirmant les droits des Français
citoyens, a modifié les données, en particulier sur deux points. Ainsi, des émeutiers,
hommes et femmes, utilisent-ils, en citoyen (ne) s, le langage politique de la Révolution
et se réfèrent à leurs droits ou à la souveraineté du peuple. Au printemps 1795, des
manifestantes réclament par exemple du pain en portant la Déclaration des Droits en
tête de cortège ; en Prairial an III, parmi les femmes qui se mobilisent pour obtenir du
pain, certaines insurgées affirment « Nous sommes le Souverain ». Les problèmes
alimentaires sont à l’origine de la formation de foules féminines distinctes qui lancent le
mouvement, mais la faim n’est pas leur seule motivation : « elle voulait du pain, mais
pas au prix de la liberté », aurait dit une Parisienne le 6 octobre 1789 ; « du pain et la
Constitution de 1793 » demandaient les insurgé (e) s de 1795.

32D’autre part, les citoyens sont désormais dotés de structures politiques représentant
le peuple mais dont les femmes sont exclues. Aussi, lorsque les insurrections sont
dirigées par les assemblées générales de quartier ou la garde nationale, elles sont
repoussées à la périphérie, malgré le rôle majeur qu’elles ont parfois joué les jours
précédents. Le 31 mai 1793, bien que le comité insurrectionnel reconnaisse la part
importante prise par les Citoyennes Républicaines Révolutionnaires dans la lutte contre
la Gironde, il refuse qu’elles siègent en son sein, car il est composé des représentants
des assemblées générales. Le 5 octobre 1789 et le 1er prairial an III elles sont sur le
devant de la scène, mais passent au second plan le 6 et le 2, quand la garde nationale
devient l’acteur principal de l’événement. Ce mouvement de balancier est
particulièrement net en Prairial : omniprésentes dans les archives décrivant la journée
du 1er, elles sont quasiment absentes de celles concernant le 2, puis on les retrouve de
nouveau le 3 et le 4 dans des épisodes non organisés (faire délivrer un prisonnier par la
foule, appeler à ne pas céder, etc.). Deux types d’émeutes se côtoient donc pendant la
Révolution, période charnière : celles de foules sans organisation politique, où les
femmes tiennent leur rôle traditionnel de « boutefeux », et celles dirigées par des
citoyens organisés, où les femmes sont reléguées à l’arrière-plan-on note d’ailleurs la
même évolution lors des révolutions de 1784-1787 et de 1795 aux Pays-Bas31.

33Ne pas posséder la citoyenneté politique n’a donc pas empêché les citoyennes de
participer à la Révolution, mais a limité leurs possibilités d’intervention : la question des
pratiques est indissolublement liée à celle des droits.

LES DROITS DES CITOYENNES

34Le 21 juillet 1789, Sieyès propose à l’Assemblée nationale de distinguer deux sortes
de citoyens, les actifs, qui exercent les droits politiques du citoyen, et les passifs qui, en
fonction du principe de l’égalité civile, « peuvent jouir des avantages de la société » et
ont droit « à la protection de leur personne, de leurs propriétés, de leur liberté », mais
n’ont « pas droit à prendre une part active dans la formation des pouvoirs publics ». Et
il précise :

Les femmes, du moins dans l’état actuel, les enfants, les étrangers, ceux encore qui ne
contribueraient en rien à soutenir l’établissement public ne doivent point influer
activement sur la chose publique.

35Ainsi, les femmes sont-elles assimilées à des « citoyennes passives » – l’expression


n’est cependant jamais utilisée, ce qui permet de jouer sur l’ambiguïté du mot citoyen /
ne. Exclues de l’exercice des droits politiques, elles bénéficient cependant des
« avantages » et de la « protection » dus à tout membre du corps social, et accèdent
notamment à de nouveaux droits civils et familiaux.

Droits civils et familiaux

36Les idéaux révolutionnaires alliés au souci de construire une autre famille, régie par
les mêmes principes que la cité et formée d’individus libres de leur personne et égaux
en droits, ont provoqué une transformation radicale du statut civil et familial des femmes.
Elles étaient pendant l’Ancien Régime des mineures juridiques placées sous la puissance
du père puis du mari. Le droit révolutionnaire en fait des adultes indépendantes qui,
dotées de capacité juridique, peuvent ester en justice, passer contrat sans l’accord
marital, témoigner dans les actes d’état civil (1792)32. Les lois sur l’égalité successorale
mettent fin à l’exclusion des filles de l’héritage dans le Midi, la Normandie ou dans la
noblesse. Un projet de code civil (non achevé) prévoit d’accorder l’autorité parentale aux
deux époux, qui auraient par ailleurs un « droit égal » pour administrer leurs biens.
37Découlant des principes affirmés dans la Déclaration des Droits, cette idée législative
d’égalité entre époux se retrouve dans la loi sur le divorce. La Constitution de 1791
stipulait que « la loi ne considère le mariage que comme contrat civil », ce qui contenait
potentiellement la possibilité de rompre ce « contrat », et le divorce est finalement
autorisé par la Législative le 20 septembre 1792. Égalitaire et très libérale, cette loi fait
du divorce un acte (théoriquement) gratuit, pouvant être demandé par un homme ou
une femme pour exactement les mêmes raisons. Elle prévoit trois modes de divorce : 1)
par consentement mutuel, 2) par un des conjoints pour « incompatibilité d’humeur et de
caractère » ou 3) pour un motif déterminé-démence ; condamnation à une peine
infamante ; crimes, sévices ou injures graves ; dérèglement des mœurs (on remarque
que le terme adultère n’est pas utilisé) ; abandon depuis 2 ans, réduit à 6 mois en 1794 ;
absence sans nouvelle depuis 5 ans ; émigration ; et en 1794 séparation de fait depuis
6 mois. Les époux sont « rendus à leur entière indépendance », leurs biens sont partagés
et une pension alimentaire est versée à celui non remarié dans le besoin. Ils contribuent
tous deux à l’éducation des enfants, confiés à la mère sauf si les parents en décident
autrement. Dans les faits, la loi bénéficia surtout aux femmes, à l’origine d’environ les
deux tiers des demandes-faites d’abord par des épouses abandonnées qui, nombreuses
dans les villes du XVIIIe siècle, pouvaient ainsi régulariser leur situation et se remarier,
puis par des femmes battues.

38L’historienne Susan Desan33 a montré que des femmes firent valoir ces nouveaux
droits familiaux, dans des procès ou des pétitions qui, en appliquant le langage
révolutionnaire à la sphère domestique (critique du « despotisme » masculin),
participent à la construction de la citoyenneté et soulignent la dimension politique de
cette législation. Elle donne aux Françaises le statut le plus progressiste de l’époque,
celui de citoyennes majeures et responsables, dans la famille et la cité. Mais pas sur le
terrain politique, réservé aux hommes.

Droits politiques

39Alors que l’exclusion politique des pauvres ou des Libres de couleur provoqua de vifs
débats à l’Assemblée, celle des femmes ne souleva alors aucune objection des députés
tant elle semblait évidente (la Constitution de 1791 les écartait même de la régence). Il
faut attendre le 30 octobre 1793 pour que la question « les femmes doivent-elles exercer
les droits politiques ? » soit longuement abordée dans le rapport du député Amar
précédant l’interdiction des clubs de femmes.

40L’exclusion s’inscrit dans la continuité des écrits des Lumières. Des révolutionnaires
assurent que les femmes sont comme les enfants représentées par le chef de famille34.
Mais c’est surtout en se référant aux idées développées au XVIIIe siècle sur la nature et
le rôle de chaque sexe que le refus des droits est justifié. Représentatif de l’opinion
majoritaire et écho des écrits rousseauistes, Amar insiste sur la différence de nature
entre hommes et femmes, qui fonde l’ordre social. Plus faibles physiquement et
intellectuellement, sans « la force morale et physique qu’exige l’exercice » des droits
politiques, elles sont « destinées par la nature » à des « fonctions privées » alors que
l’homme est voué aux fonctions publiques. Qu’elles suivent donc les débats dans les
tribunes pour élever leurs enfants en mères républicaines, mais sans participer aux
discussions publiques et encore moins aux affaires du gouvernement. D’autres vont plus
loin, s’élèvent contre toute participation féminine à la vie politique et traitent la militante
de femme-homme qui « confond les sexes avec indécence35 ».

41Certain (e) s protestent tout de même contre l’exclusion, considérée comme une
véritable violation de la Déclaration des Droits. En juillet 1790, Condorcet publie un
article « Sur l’admission des femmes au droit de cité » : êtres humains, les femmes
naissent avec les mêmes droits naturels que les hommes ; les leur dénier en société c’est
« violer le principe de l’égalité des droits » et par-là même détruire les droits de tous,
qui sont réciproques-« ou aucun individu de l’espèce humaine n’a de véritables droits,
ou tous ont les mêmes ; et celui qui vote contre le droit d’un autre, quels que soient sa
religion, sa couleur ou son sexe, a dès lors abjuré les siens. » Après avoir examiné les
arguments sur leur prétendue incapacité au vote et à l’éligibilité, il conclut qu’il n’y a pas
« entre les hommes et les femmes une différence naturelle qui puisse légitiment fonder
l’exclusion du droit36. » En septembre 1791, Olympe de Gouges rédige sa Déclaration
des Droits de la Femme et de la Citoyenne pour souligner les ambiguïtés d’un
universalisme qui ne s’applique qu’à la moitié de l’humanité-et non pour dire que les
femmes auraient des droits différents. Ce texte de combat-dont les féministes
du XIXe siècle feront un emblème, mais qui n’est guère cité pendant la Révolution-
dénonce la domination masculine et appelle les femmes à se réveiller et à prendre
conscience de leurs droits naturels « perdus dans la société ». Payant des impôts et
soumises à la loi, elles devraient pouvoir voter, être éligibles et admissibles à toutes les
fonctions publiques : « la femme a le droit de monter sur l’échafaud, elle doit avoir
également celui de monter à la Tribune ». D’autres brochures, quasi toutes datées des
années 1789-1791, ont également un caractère revendicatif, demandant par exemple
que l’on « restitue » aux femmes « un droit inhérent à leur être » (Du sort actuel des
femmes, 1791).

42Les aspirations au droit de cité ne disparaissent pas ensuite, bien qu’elles ne soient
plus portées par les écrits percutants et explicites d’individus isolés. En 1792-1793, elles
s’expriment dans des actions ou pétitions collectives. Car, même si très peu de militantes
réclament les droits politiques, plusieurs de leurs initiatives peuvent, à la lumière des
conceptions du temps, être comprises comme mêlant soutien à la Révolution et
affirmation d’une existence politique de citoyennes. Dès 1789, lors de cérémonies
civiques des femmes avaient tenu à prêter serment avec ou après les hommes : or le
serment marque la création d’une nouvelle communauté politique, formée des citoyens
qui l’ont prononcé, et, en se joignant aux hommes à cette occasion, les femmes affirment
symboliquement que, elles aussi, elles sont citoyennes. En 1792, sur fond de poussée
populaire et d’entrée en guerre, les citoyennes de plusieurs villes demandent le « droit
naturel » de s’organiser en garde nationale37, ce qui est un des attributs la citoyenneté
politique. Le 6 mars 1792, conduites par Pauline Léon, 319 Parisiennes-dont plusieurs
futures Républicaines Révolutionnaires – signent ainsi une pétition sur ce sujet, qui sera
quatorze mois plus tard un des objectifs du club de femmes parisien. Sans réclamer
ouvertement la citoyenneté, elles demandent l’exercice d’un droit qui en est constitutif.

43Quant à l’autre droit définissant la citoyenneté, le vote, il fut symboliquement pratiqué


dans quelques dizaines de villes lors du scrutin référendaire de l’été 1793 sur la nouvelle
Constitution38. Dans des réunions particulières, dans leurs clubs, ou à la suite des
assemblées électorales, des femmes votent et informent ensuite solennellement les
députés que, même si elles sont « privées par [leur] sexe du droit honorable de donner
[leur] suffrage39 », elles aussi acceptent la Constitution « présentée à la sanction du
peuple souverain40 ». Ces votes féminins n’ont aucun poids légal : mais en se réunissant
pour voter et en en informant la Convention, elles transforment un acte privé, l’adhésion
à la Constitution d’un individu exclu du droit de cité, en un acte public, dont les auteurs
s’inscrivent dans le corps politique. Elles font ainsi acte de citoyenneté, exercent la
souveraineté et se réapproprient un droit dont elles ne jouissent pas. Et que réclament
d’ailleurs ouvertement quelques-unes à cette occasion, telles ces trente-quatre
citoyennes de Beaumont (Dordogne) qui demandent pourquoi « les citoyennes
n’[auraient] –elles pas aussi le droit de ratifier un acte auquel elles ont si efficacement
coopéré » et concluent que « les Droits de l’Homme sont aussi les nôtres », ou cette
Parisienne qui déclare à la Convention que « comme la Constitution repose sur les Droits
de l’Homme nous en réclamons aujourd’hui l’entier exercice » (« être comptées dans le
système politique » et voter)41.

44Ces votes s’inscrivent dans un contexte de forte présence féminine dans le mouvement
révolutionnaire : durant la grave crise politique de 1793, de nombreuses femmes
interviennent en effet, à Paris comme dans le reste du pays, pour défendre, en paroles
et/ou en actes, la République menacée (ce que rappellent les Beaumontoises citées plus
haut). L’importance de cette mobilisation féminine du printemps et de l’été 1793 conduit
alors des révolutionnaires à une (petite) ouverture sur la question de l’identité politique
des citoyennes. On le voit à plusieurs faits qui pris isolément pourraient paraître anodins
mais qui, concentrés dans ces quelques mois, font sens.
45Ainsi, à la différence de 1789-1791 où aucune voix ne s’était élevée dans le sein de
l’Assemblée en faveur du droit de vote des femmes, lors des débats d’avril 1793 sur la
nouvelle constitution les députés Romme et Guyomar le défendent-ils face à leurs
collègues. Le premier assure que « tout homme, de l’un ou de l’autre sexe, dès qu’il est
parvenu à l’âge de la maturité [...] est citoyen », et comme tel participe de la
souveraineté, « sans distinction d’état et de sexe42 ». Dans sa brochure Le partisan de
l’égalité politique entre les individus (avril 1793), le second appelle les députés à
s’affranchir de « l’orgueil sexuel », du « préjugé de sexe » et à appliquer
laDéclaration sous peine de détruire l’édifice démocratique en construction : « Cette
liberté, cette égalité appartiennent également à l’homme & à la femme, ou bien
l’immortelle déclaration des droits contient une mortelle exclusion ». Il se tourne vers le
vocabulaire pour souligner la distorsion entre le droit (le principe d’égalité) et le fait
(l’exclusion) et affirme que, sans droit de suffrage, il n’y a pas de citoyennes mais des
« ilotes de la République » : « le nom de citoyenne n’est plus que ridicule et doit être
retranché de notre langue. Il faudra désormais les appeler femmes ou fillesde citoyen,
jamais citoyennes. Ou retranchez le mot, ou accordez la chose. » Sans aller jusqu’à
accorder l’égalité politique, la Convention décide le 10 juin 1793 que, dans chaque
commune, les habitants « de tout sexe » voteront pour décider du partage de leurs biens
communaux. Ce vote, qui a lieu dans l’assemblée des habitants et non dans celle,
électorale, des citoyens, n’insère pas les femmes dans la citoyenneté politique mais il
leur confère une sorte de citoyenneté communale. Deux mois plus tard, la fête de l’Unité
du 10 août, qui célèbre l’acceptation de la Constitution de 1793, est la seule fête
révolutionnaire qui honore non pas les mères de famille mais l’action politique des
citoyennes, à travers les « héroïnes des 5 et 6 octobre 1789 » : juchées sur des canons,
elles attendent le cortège sous un arc de triomphe, puis « se réunissent au Souverain »,
écrit le peintre et député David, ordonnateur de la cérémonie.

46C’est également pendant l’été 1793 que quelques sociétés populaires parisiennes
deviennent mixtes, que les autorités parisiennes reconnaissent le droit des citoyennes à
participer activement à la Révolution et exhortent les Républicaines Révolutionnaires à
continuer leur action43, ou encore qu’un observateur de police note dans son rapport
que, « nées esclaves des hommes, [les femmes] ont un plus grand intérêt à son
règne44 ».

47Que l’on ne s’y trompe pas : il ne s’agit pas là d’une vague de revendications ou de
remises en cause, mais d’une petite reconnaissance et d’interrogations qui se font plus
vives sur le statut des femmes. Elles culminent en septembre 1793, lors de la campagne
menée par des Parisiennes pour que les femmes soient tenues, comme les hommes, à
porter la cocarde nationale, symbole de citoyenneté. Car c’est bien d’identité politique
dont il est question dans cette « guerre des cocardes45 ». Les pétitionnaires sont
soutenues par les sections et les clubs parisiens (« les citoyennes qui partagent nos
travaux doivent également partager cet avantage » reconnaît celui des Cordeliers), mais
elles affrontent les marchandes des Halles qui assurent que les femmes doivent
« s’occuper de leur ménage et non des affaires du temps », ajoutant qu’elles porteront
la cocarde si on leur donne des cartes de citoyennes. Pour mettre fin aux rixes
entre jacobines et femmes des marchés, la Convention cède le 21 septembre : dans le
contexte de l’été 1793, obliger les femmes à porter la cocarde revient à leur reconnaître
une existence politique de citoyennes. Des hommes craignent d’ailleurs que, après la
cocarde, elles demandent les droits de s’armer et voter, ce qui serait « humiliant » pour
le sexe masculin. Pour les contemporains, cette mesure symbolique semble entrouvrir la
porte à la citoyenneté et des policiers entendent alors dire dans les rues de Paris que les
femmes ont autant de droits que les hommes au gouvernement de leur pays, que le
droit de voter est un droit naturel qu’elles doivent réclamer, que dans un état où la loi
consacre l’égalité, elles peuvent prétendre à tous les emplois civils et militaires46.

48Il fallait donc mettre un terme à ces interrogations et revendications. Un mois plus
tard, dans un contexte nettement moins favorable au mouvement populaire et aux
femmes, les clubs féminins sont ainsi interdits. Le rapport du député Amar (30 octobre
1793), qui rappelle avec force que les femmes ne peuvent exercer les droits politiques,
est une réponse destinée à faire taire ces voix, toujours minoritaires mais plus audibles.
S’il reflète un mouvement idéologique commencé avant la Révolution visant à
masculiniser l’espace public, il correspond aussi à ce contexte revendicatif.

49Le rapport Amar ne mit pas fin, comme on l’a vu, à l’intervention des citoyennes dans
l’espace public. En revanche, on n’entend plus après le 30 octobre 1793 les partisans de
l’égalité. Par-delà leurs différences, ils se fondaient sur l’universalité du droit naturel et
sur la Déclaration des Droits, texte de référence qui avait sens d’argument. Ils faisaient
de l’égalité une question de principe et une question politique concernant toute la cité,
car, assuraient-ils, tant que les femmes n’auront pas recouvré l’intégralité de leurs droits,
la société ne pourra se dire libre et démocratique : « Partout où les femmes seront
esclaves [privées de droits] les hommes seront courbés sous le despotisme » écrivait la
présidente du club de femmes de Dijon en 179347.

50Non seulement les femmes n’obtinrent pas les droits politiques, mais le Code civil
napoléonien (1804) balaya les avancées révolutionnaires concernant le statut civil et
familial des femmes, qui redevinrent des mineures juridiquement incapables devant obéir
à leur mari. Le divorce fut rendu très difficile, l’incompatibilité d’humeur supprimée,
l’inégalité réintroduite, dans le statut des divorcé (e) s comme dans les motifs puisque
l’épouse ne pouvait invoquer l’adultère (réintroduit et puni bien plus sévèrement pour
elle) que si son mari entretenait une concubine sous le toit familial. Même l’égalité
successorale fut réduite par la faculté accordée aux parents d’avantager un des enfants.

51Quant à la citoyenne, son existence fut déniée et le mot banni : l’année même où
commençait l’élaboration du Code civil, le Premier Consul Bonaparte demandait que l’on
rendît aux femmes leur « titre de Madame ». Le Journal des débats du 23 février 1800
qui donne cette information48précise :

Comme elles n’exercent aucun droit politique, la qualification decitoyenne manque de


justesse à leur égard, et offre l’inconvénient de ne présenter aucune distinction entre les
personnes mariées et celles qui ne le sont pas.

52On ne peut être plus clair. À la qualification qui faisait des femmes des membres de
la Nation et les incluait dans la sphère politique, l’on en préférait d’autres qui les
désignaient par leur statut matrimonial et les cantonnaient dans la sphère familiale.

53Pourtant le retour à l’ordre n’est pas le retour au même ordre. En affirmant le principe
fondateur d’égalité, les révolutionnaires ont donné des armes pour combattre l’inégalité
et ouvert la porte à l’avenir. En s’exprimant dans l’espace politique, en s’affirmant
citoyennes dans leurs discours et par leurs actes, en se forgeant une identité politique
que beaucoup leur refusaient, les femmes révolutionnaires ont donné vie au mot, sans
en posséder pour autant les droits : dans les dictionnaires post-révolutionnaires
le citoyen, qu’il soit défini comme habitant d’une cité ou membre du Souverain, n’est
plus grammaticalement de genre masculin, mais se décline désormais toujours au
féminin49.

NOTES

1 Dictionnaire historique de la langue française, Rey Alain (dir.), Paris, Dictionnaires Le


Robert, 1992, tome 1, p. 426, date la première occurrence decitoyenneté de 1783,
mais je n’en ai trouvé aucune pour la fin de l’Ancien Régime et la Révolution, pas plus
que Jennifer Heuer pour le Consulat et l’Empire (HEUER Jennifer, « “Afin d’obtenir le
droit de citoyen… en tout ce qui peut concerner une personne de son sexe” : devenir
ou cesser d’être femme française à l’époque napoléonienne », in Clio HFS, n ° 12,
2000, p. 15-32).

2 Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, par une
Société de gens de Lettres, Paris, tome 3, 1753, p. 488.

3 Dictionnaire universel françois et latin, vulgairement appelé Dictionnaire de Trévoux,


6e éd., 1771, Paris, tome 2, p. 613.
4 Dictionnaire universel des Sciences morales, économiques, politiques ou
diplomatiques, ou Bibliothèque de l’Homme d’État et du Citoyen, mis en ordre et publié
par M. Robinet, censeur royal, Londres, 1777-1783, vol. 12, 1780.

5 Trente occurrences dans la banque de données TLF XVIIIe siècle (1988) contre 4544
de citoyen. Pour plus de développements : GODINEAU Dominique, « Autour du
mot citoyenne », in Mots, n ° 16, 1988, p. 91-110 (en ligne sur le site
mots.revues.org) ; GEFFROY Annie, « Citoyen / Citoyenne (1753-1829) », inDictionnaire
des usages socio-politiques (1770-1815), fasc. 4, INALF/Klincksieck, 1989, p. 63-83.

6 Dictionnaire de l’Académie française, Paris, tome 1, éditions de 1762, 1778 et 1786


(même texte) ; citoyenne figurait déjà dans la première édition (1694). On le trouve
également dans NICOT, Thrésor de la langue fransoyse, 1606, ou FERAUD JEAN-
FRANÇOIS, Dictionnaire critique de la langue française, Marseille, Mossy, 1787-1788, 3
vol. En revanche Furetière n’accorde aucune entrée à citoyen (enne) dans l’édition
(1690) que j’ai consultée de son Dictionnaire universel.

7 HUNT LYNN, « Révolution française et vie privée », in Histoire de la vie


privée, ARIES Philippe et Duby Georges (dir.), vol. 4 (dir. Michelle Perrot), Paris,
Éditions du Seuil, 1987, p. 19-46.

8 Sur les différentes conceptions du mot citoyenne pendant la


Révolution :GODINEAU Dominique, « Autour du mot citoyenne », op. cit.

9 Lettre du 10 février 1793 de la citoyenne Blandin Demoulin, envoyée au rédacteur


des Révolutions de Paris, et publiée dans le n ° 189 de ce périodique (tome 15, p.
367 sq.).

10 Sur ce club et plus largement sur les femmes dans le mouvement révolutionnaire
parisien, cf. GODINEAU DOMINIQUE, Citoyennes tricoteuses. Les femmes du peuple à
Paris pendant la Révolution française, Aix-en-Provence, Alinéa, 1988, rééd. Paris,
Perrin, 2004. Sur l’engagement, pour ou contre la Révolution, des femmes en
province, cf. en particulier : Les Femmes et la Révolution française, Brives MARIE-
FRANCE (dir.), Toulouse, PUM, 1990-1991, 3 vol. ; GUILHAUMOU Jacques
et LAPIED Martine, « L’action politique des femmes pendant la Révolution française »,
in Encyclopédie politique et historique des femmes, Fauré CHRIS-tine (dir.), Paris, PUF,
1997, p. 139-168.

11 Les Femmes et la Révolution française, op. cit. ; GUILHAUMOU Jacques


et LAPIEDMartine, L’action politique des femmes pendant la Révolution française », op.
cit. ; LAPIED Martine, « Les Comtadines et la Révolution française : une défense
prioritaire de l’identité religieuse ? », in Religion et identité, Audisio Gabriel (dir.), Aix-
en-Provence, PUP, 1998, et « La fanatique contre-révolutionnaire, réalité ou
représentation ? », in Le Genre face aux mutations. Masculin et féminin du Moyen Âge
à nos jours, Capdevila LUC et alii (dir.), Rennes, PUR, 2003 ; Olwen HUFTON H.,Women
and the Limits of Citizenship in the French Revolution, Toronto, University of Toronto
Press, 1992.

12 GODINEAU Dominique, Citoyennes tricoteuses., op. cit., p. 252-263.

13 MARTIN Jean-Clément, « Femmes et guerre civile, l’exemple de la Vendée », inClio


HFS, n° 5, 1997, p. 97-115, et La Révolte brisée. Femmes dans la Révolution française
et l’Empire, Paris, Armand Colin, 2008.

14 GODINEAU Dominique, « De la guerrière à la citoyenne. Porter les armes pendant


l’Ancien Régime et la Révolution française », in Clio HFS, n ° 20, 2004-2, p. 43-69.

15 LAPIED Martine, « Les Provençales actrices de la Révolution ? L’exemple des


Arlésiennes », in Pour la Révolution française, Hommages à Claude Mazauric,
LeBOZEC Christine et WAUTERS Éric (dir.), Rouen, Publication de l’université de Rouen,
1998.

16 GODINEAU Dominique, Citoyennes tricoteuses., op. cit.

17 Doléances des blanchisseuses et lavandières de Marseille, publié avec de


nombreuses brochures féminines, in Cahiers de doléances des femmes en 1789 et
autres textes, Duhet PAULE-MARIE (dir.), Paris, Des femmes, 1981, rééd. 1989. Voir du
même auteur, Les Femmes et la Révolution française, 1789-1794, Paris, Julliard, 1971.

18 Lettres bougrement patriotiques de la Mère Duchêne, suivi du Journal des Femmes,


Elyada OUZI (dir.), Paris, Edhis, 1989, et « La Mère Duchêne. Masques populaires et
guerres pamphlétaires (1789-1791) », Annales historiques de la Révolution française,
1988-1.

19 Archives nationales (désormais AN), DXLII n ° 8, rapport de police du 12 pluviôse


an II : sur ces points cf. Godineau Dominique, Citoyennes tricoteuses., op. cit.

20 AN, F7/4745 d. Hû.

21 Sur le mythe des tricoteuses et la diffusion du mot : GODINEAU Dominique, « La


tricoteuse : formation d’un mythe contre-révolutionnaire », in L’Image de la Révolution
française, Vovelle Michel (dir.), Oxford, Pergamon Press, 1989, tome 3, p. 2278-2285
(en ligne sur le site revolution-francaise. net), et « Histoire d’un mot : tricoteuse de la
Révolution française à nos jours », in Langages de la Révolution (1770-1815), Paris,
INALF-Klincksieck, 1995, p. 601-613.

22 Rapport du député Amar le 30 octobre 1793 sur l’interdiction des clubs de


femmes, Archives Parlementaires (désormais A. P.), tome 78, p. 48-51.

23 Cf. DUHET Paule-Marie, Les Femmes et la Révolution., op. cit.

24 Discours prononcé à la Société des Citoyennes Républicaines Révolutionnaires, par


les Citoyennes de la section des Droits de l’Homme en lui donnant un guidon sur lequel
est la déclaration des Droits de l’homme. S. l. n. d. (juillet 1793)

25 LAPIED Martine, « Les Provençale sactrices de la Révolution ? L’exemple des


Arlésiennes », op. cit.

26 GODINEAU Dominique, Citoyennes tricoteuses., op. cit.

27 AN, F7 4774/9, d. Leclerc (Mémoire sur sa conduite révolutionnaire, 16 messidor an


II).

28 APPLEWHITE Harriet B. and LEVY Darline G., « Women, Radicalization, and the Fall of
the French Monarchy », in Women and Politics in the Age of the Democratic
Revolution, APPLEWHITE Harriet B. and LEVY Darline G. (dir.), Ann Arbor, University of
Michigan Press, 1990, p. 81-107.

29 AN, F7 4554 d. Ravinet femme Baillet (appréciation du comité civil de la section du


Nord, 15 messidor an III).

30 FARGE ARLETTE, « Évidentes émeutières » in Histoire des femmes en


Occident, DUBY Georges et PERROT Michelle (dir.), tome 3 (dir. Natalie Z. DAVIS
ET ARLETTEFarge), Paris, Plon, 1991, p. 481-496 ; Nicolas JEAN, La Rébellion française.
Mouvements populaires et conscience sociale, 1661-1789, Paris, Éditions du Seuil,
2002.

31 BRAKE Wayne Ph., DEKKER Rudolf M., VAN DE POL Lotte C., « Women and Political
Culture in the Dutch Revolution », in Women and Politics in the Age of the Democratic
Revolution, op. cit., p. 109-146.

32 GUIBERT-SLEDZIEWSKI Élisabeth, « Le tournant », in Histoire des femmes en


Occident, op. cit., tome 4, p. 45-62. La Famille, la Loi, l’État de la Révolution au Code
Civil, THERY Irène et BIET Christian (dir.), Paris, Criv-CNRS, 1989.
33 DESAN Susan, The Family on Trial in Revolutionary France, Berkeley, University of
California Press, 2004 et « Pétitions de femmes en faveur d’une réforme
révolutionnaire de la famille », in AHRF, n ° 344, 2006-2, p. 27-46.

34 VERJUS Anne, Le Cens de la famille. Les femmes et le vote, 1798-1848, Paris, Belin,
2001.

35 Les Révolutions de Paris, n ° 213. Sur l’image de la femme-homme avant et


pendant la Révolution : GODINEAU Dominique, Les Femmes dans la société
française, XVIe-XVIIIe siècle, Paris, Armand Colin, 2003 et Citoyennes tricoteuses, op.
cit., p. 268 sq.

36 CONDORCET, « Sur l’admission des femmes au droit de cité », in Journal de la


Société de 1789, n ° 5, 3 juillet 1790.

37 GODINEAU DOMINIQUE, Citoyennes tricoteuses., et « De la guerrière à la


citoyenne. », op. cit.

38 En avril 1789, quelques veuves ou célibataires majeures avaient pu prendre part


aux assemblées villageoises pour l’élection des députés aux Etats généraux : ce vote
n’était pas lié à une citoyenneté inexistante avant la Révolution, mais à leur qualité de
« chefs de feu ». Sur les votes de femmes : GODINEAU Dominique, « Le vote des
femmes pendant la Révolution français », in La Démocratie « à la française » ou les
femmes indésirables, VIENNOT Éliane (dir.) Paris, Publications de l’université Paris 7,
1996, p. 199-211 (en ligne sur le site revolution-francaise.net) ; ABERDAM Serge,
« occasions de participation féminine en 1793 : le vote sur la constitution et le partage
des biens communaux », in AHRF, n ° 339, 2005-1, p. 17-34.

39 Club des Citoyennes Sans-Culottes du Mans : AN, C 266 d. 629, p. 15-16.

40 Citoyennes de la section parisienne des Marchés : A. P., tome 68, p. 286.

41 AN, C 267 d. 631, p. 19 (discours des citoyennes de Beaumont). A. P., tome 68, p.
254 (discours d’une citoyenne de la section parisienne de Beaurepaire).

42 ROMME Gilbert, Projet de Constitution présenté à la Convention le 17 avril 1793 : A.


P., tome 62 p. 263 et sqq. Pour une analyse plus détaillée de ce
débat :GODINEAU Dominique, « Autour du mot citoyenne », op. cit.

43 Les Autorités constituées du Département de Paris, & les Commissaires des


Sections, Aux Républicaines Révolutionnaires, signé « L’homme libre, L. P. DUFOURNY,
Président », Paris, Impr. de Ballard, (30 juin 1793).
44 AN, F1cIII Seine 7, rapport de Perrière du 17 juin 1793.

45 SOBOUL Albert, « Un épisode des luttes populaires en septembre 1793 : la guerre


des cocardes », in AHRF, 1961, p. 52-55 et GODINEAU Dominique,Citoyennes
tricoteuses, op. cit., p. 163-166.

46 AN, F7 3688/3, rapport de Latour-Lamontagne du 22 septembre 1793.

47 Lettre du 10 février 1793 de la citoyenne Blandin Demoulin, envoyée au rédacteur


des Révolutions de Paris, et publiée dans le n ° 189 de ce périodique (tome 15, p.
367 sq.).

48 Journal des Débats du 7 ventôse an VIII, cité par Brunot Ferdinand, Histoire de la
langue française, tome 9, Paris, Armand Colin, 1937, p. 696-697.

49 La cinquième édition (1798) du Dictionnaire de l’Académie française ajoute à la


définition sociale (« Habitant d’une Ville ») de CITOYEN, ENNE un paragraphe plus
politique : « nom de Citoyen, dans une acception stricte et rigoureuse, se donne à
l’habitant d’une Cité, d’un Etat libre, qui a droit de suffrage dans les Assemblées
publiques et fait partie du Souverain ». Dans le Supplément contenant les mots
nouveaux en usage depuis la Révolution (1798), les académiciens précisent
cependant : « CITOYEN, ENNE, subst. Nom commun à tous les François et autres
individus de nations libres, qui jouissent des droits de Citoyen. C’est, relativement aux
femmes, une simple qualification. »

AUTEUR
Dominique Godineau
CERHIO UMR 6258, université Rennes 2

Fuente : http://books.openedition.org/pupo/2901?lang=fr

Capturado el 25 de mayo de 2018

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