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« Les hommes, disait G. Burdeau, ont inventé l’Etat pour ne plus obéir aux hommes ». Cette
phrase reflète bien la volonté constante des hommes de se doter de règles de nature à
fonder de façon durable , « d institutionnaliser les conditions d’ exercice du pouvoir
politique. Ce phénomène est apparu dès le milieu du XVIIe siècle. Cette institutionnalisation
constitue le premier pas dans la voie de la formation de ce qu’on appelle l’Etat de droit (où
les dirigeants sont soumis au droit) par opposition à l’Etat de Police (où règne le bon vouloir
du prince). Cette volonté s’est concrétisée par l’apparition de Constitution et notamment
par l’édiction de Constitution écrite (à distinguer des Constitutions coutumières) visant à
encadrer les règles d’organisation de l’Etat. L’Etat est dès lors considéré comme une entité
abstraite, c’est à dire une personne morale, et cette fiction juridique prend forme par la
création d’institutions dont la fonction est avant tout juridique. Voici l’objet de la
Constitution : créer des institutions (telle que celle du Président de la République) en les
dotant de règles relatives à leurs « statuts » et en énonçant leurs « compétences ».
L’ensemble des Etats de droit possède une Constitution- parfois également appelée Loi
fondamentale (terminologie allemande). Ces constitutions se situent généralement au
sommet de l’ordre juridique, ce sont les règles de droit suprême. En France, la Constitution a
d’ailleurs été jugée supérieure aux traités internationaux. On remarque également que ces
lois fondamentales revêtent souvent un caractère symbolique, et que les gouvernants ne
souhaitent ou n’osent que très rarement modifier leurs contenus (distinction possible entre
constitution souple et stricte) : la Constitution adoptée en 1776 par les constituants
américains est ainsi toujours en vigueur et n’a fait l’objet que de très rares amendements.
Une constitution est une règle de droit particulière, ambivalente même, car si elle contient
des prescriptions relatives aux institutions politiques, elle est en même temps la source
originelle de création du droit de par laquelle découlera tout le régime et l’ordonnancement
juridique de l’Etat. Les articles de la Constitution française opèrent une délimitation
fondamentale entre ce qui est de la compétence de la loi (article 34) et ce qui est permis par
la voie du règlement (article 37). Une Constitution est donc une règle de droit mais c’est
aussi une règle de droit particulière car elle est le fruit d’un consensus entre les gouvernants
et les gouvernés- autour d’un projet social et politique.
Certaines Constitutions peuvent se ressembler mais aucune n’est identique. En effet, chaque
constitution est censée refléter l’aspiration d’une nation à se retrouver sur une vision du
bien commun à un moment donné et potentiellement pour une longue durée car les
Constitutions servent de fondation à un idéal de « vivre ensemble ». Ce Pacte de la Nation,
qui insère dans ses articles une vraie « feuille de route » politique et sociale pour la Nation
(A), acquiert sa légitimité par l’onction reçue par ce qu’on appelle « l’expression de la
souveraineté nationale » (B).
La Constitution est la règle de droit suprême que gouvernés autant que gouvernants
doivent respecter. Les constitutions permettent de limiter le pouvoir, ce qu’énonce l’article
16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 : « Toute société dans
laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée,
n’a point de constitution ». L’Etat de droit – promu par les constitutions – entend limiter les
pouvoirs des gouvernants, aussi bien sur la forme (A) que sur le fond (B).