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Résumé Abstract
Notre article vise à améliorer la com- Our paper aims to improve the understand-
préhension des liens entre les dimensions ing of the links between the social, economic and
économique, sociale, et sociétale (incluant environmental performance by mobilizing a
l’environnement) de la performance globale, joint theoretical framework (the stakeholder the-
en mobilisant un cadre théorique mixte (la ory and the resource-based view theory). Also, we
théorie des parties prenantes et la théorie des develop a measurement model of the performance
ressources). Dans ce cadre, nous développons clarifying simultaneously the structural relations
un modèle de représentation et de mesure de between the three dimensions (economic, social,
la performance globale explicitant simultané- and environmental). This conceptual model is
ment les relations structurelles entre ses diffé- validated on worker cooperatives data, then we
rentes dimensions. Ce modèle conceptuel est examine the theoretical and managerial implica-
validé sur des données collectées auprès des tions.
sociétés coopératives et participatives (SCOP)
et ses implications sont discutées.
Introduction
Appréhendée originellement sur un plan strictement financier, la performance a été progressivement
élargie, au cours du vingtième siècle, afin de prendre en considération la « responsabilité sociale » de
l’entreprise vis-à-vis de ses différents ayants droit ou « stakeholders »1 (Zenisek 1979). Cette vision
d’une performance élargie conjuguant les dimensions sociale, économique, sociétale et environne-
mentale fait référence à la notion de « performance globale », qui vise à dépasser la définition segmen-
tée des performances économique et sociale dans les organisations dont l’objectif est de délivrer des
avantages sociaux et environnementaux (Elkinghton 1997 ; Paton 2003). Ainsi Baret (2006) définit
la performance globale comme « l’agrégation des performances économiques, et sociales et environ-
nementales », ou Reynaud (2003) comme la réunion de la performance financière, de la performance
sociale et de la performance sociétale. Cette conceptualisation de la performance est celle soutenue par
la théorie des parties prenantes (TPP). En effet, le terme de performance globale a émergé pour tenir
compte des stratégies annoncées de développement durable (Capron et Quairel-Lanoizelée 2010)
et de responsabilités sociale et sociétale (RSE), même si le concept admet une diversité d’acceptions
selon que l’on s’inscrive dans la vision européenne ou américaine de la RSE. Ainsi, cette vision de la
performance s’oppose à une performance hiérarchisée entre les dimensions économique, sociale et
sociétale (Brignall et Modell 2000 ; Weaver et al. 1999).
Par ailleurs, la place de la performance sociétale et/ou environnementale (nous utiliserons les deux
termes accolés par la suite) dans la performance globale peut admettre deux perspectives (Wolff et al.
2009) : une approche normative avec des travaux relatifs à l’éthique des affaires (Business Ethics), et
une approche pragmatique s’intéressant au rôle de l’entreprise dans la société (Business and Society).
Selon la première approche, les comportements des acteurs et l’activité de l’entreprise sont sujets au
jugement moral des parties prenantes (Evan et Freeman 1988), et le fait d’agir de manière responsable
est justifié par des considérations d’ordre moral et éthique. Dans la seconde optique, l’organisation ne
peut être déconnectée de son environnement social (Donalson 1982) et la dimension sociétale-envi-
ronnementale, à travers le développement durable et la responsabilité sociétale, représente un levier
susceptible de créer de la valeur (Sharma 2001). Cette approche rejoint l’idée d’une conception élargie
de la responsabilité et de la performance, cependant la prise en compte progressive des préoccupations
économiques, sociales et environnementales par l’organisation suppose un intérêt à internaliser. Or,
les résultats des travaux empiriques sur le sens et l’intensité des relations entre la performance finan-
cière, la performance sociale et la performance sociétale sont contrastés (Allouche et Laroche 2005 ;
Orlitzky et al. 2003 ; Margolis et Walsh 2003 ; Mackey et al. 2007 ; Surroca et al. 2010). Ainsi,
l’hypothèse d’un modèle de la performance contenue dans la notion de globalité est questionnée.
Cependant, ces travaux empiriques comportent des faiblesses théoriques et méthodologiques : a) les
contenus des définitions de la performance sont souvent ambigus et sujets à des critiques (Griffin et
Mahon 1997 ; Dohou et Berland 2007), b) les dimensions de la performance restent segmentées,
parfois hiérarchisées (Ces travaux juxtaposent les composantes de la performance globale, telles que
les recherches fondées sur l’adaptation des balanced scorecard) et s’éloignent de la définition d’une
performance globale, c) les méthodes statistiques utilisées (les méthodes des événements, les analyses
statistiques bivariées) ne sont pas en mesure d’appréhender la complexité des interactions entre les
différentes composantes de la performance. Cet article s’inscrit alors dans la continuité des travaux
qui visent à mieux clarifier le contenu de la performance globale et à comprendre les relations causales
entre ses différentes dimensions.
L’objectif de cette recherche est donc d’apporter des éclairages sur la représentation et la mesure de
la performance globale. Pour ce faire, nous présentons un modèle conceptuel de la performance qui
tient compte simultanément des interactions entre ses différentes composantes. Au niveau méthodo-
logique nous spécifions un modèle d’équations structurelles qui explicite les relations causales entre
les différentes dimensions de la performance et les pratiques de management, sociales et sociétales. Sa
validation repose sur des données collectées auprès des sociétés coopératives, dont l’identité duale les
amène à rechercher une performance à la fois économique et sociale (Chédotel et Pujol 2012).
Ce papier est organisé en deux parties. Dans la première nous présentons les fondements
théoriques d’un modèle de mesure de la performance globale, puis la procédure de sa validation.
Dans la seconde partie nous discutons les résultats des analyses empiriques, avant d’en exposer les
implications.
globale, la vision de Caroll qui a été opérationnalisée pour identifier la responsabilité vis-à-vis des
parties prenantes. Nous utilisons donc la perspective instrumentale de la théorie des parties prenantes.
Notre objectif est d’examiner la validité des hypothèses de la TPP sur la performance globale, en déve-
loppant un modèle structurel explicitant les relations causales telles que prédites par la TPP.
Par ailleurs, la prise en compte de pratiques sociale, sociétale, environnementale peut s’expliquer
par la théorie de la gestion par les ressources (Barney 1991). Cette théorie fait dépendre l’organisation
des acteurs de son environnement, notamment de l’aptitude à gérer les demandes de groupes diffé-
rents, en particulier ceux dont les ressources et le soutien sont déterminants pour sa survie (Pfeffer et
Salancik 1978). Les recommandations en termes d’identification des groupes sociaux dont dépend
l’organisation, d’ajustements des actions à leurs demandes et d’influence afin de réduire les incerti-
tudes, rendent la « légitimité sociale » une ressource stratégique dont dépend l’organisation pour sa
survie2. Néanmoins, la théorie de la dépendance aux ressources inscrit la responsabilité sociétale dans
la vision économique traditionnelle des finalités d’entreprise (Capron et Quairel-Lanoizelée 2010) : les
organisations s’engagent dans la responsabilité sociétale lorsqu’elles sont contraintes de l’assumer pour
répondre aux pressions et attentes des apporteurs de ressources. Aussi nous mobilisons cette approche
pour la prise en compte des pratiques (internes) de l’organisation sur le niveau de performance. Le
terme global est donc un élargissement équilibré des domaines couverts par la performance.
Ces théories des parties prenantes et des ressources nous permettent de considérer la performance
globale comme un construit multidimensionnel conjuguant les aspects économique, financier, social
et sociétal-environnemental (Figure 1, infra), qui constitueraient la performance globale, telle que
définie par les auteurs précédents.
Si les deux théories se complètent pour expliquer la prise en compte dans un modèle de perfor-
mance globale des environnements interne et externe, elles supposent une intégration des dimensions.
Des travaux ont montré les liens positifs existants entre ces éléments de la performance globale et
certains évoquent des interrelations entre ces déterminants (Brammer et Millington 2008 ; Margolis
et Walsh 2003 ; Mackey et al. 2007 ; McWilliams et Siegel 2000 ; Orlitzky et al. 2003). Nous
sommes conscients que des auteurs (Capron et Quairel- Lanoizelée op.cit., Brignall et Modell op.cit.)
supposent que la dissociation des dimensions est préférable pour mieux en compte et mesurer la per-
formance, laquelle fait référence à une logique de territoire des différents managers, ou bien qu’une
mesure segmentée de la performance est plus aisée (Weaver et al. 1999). Cependant nous cherchons à
dépasser les travaux représentant la performance globale comme une juxtaposition des performances
intermédiaires - économiques, sociales, environnementale - pour proposer une vision intégrée de la
performance. Cette dernière s’inscrit dans le courant systémique où le caractère global d’un élément
correspond à plus que la somme de ses parties. Autrement dit, les interrelations théoriques entre les
dimensions de la performance globale impliquent une évaluation du concept à un niveau agrégé plu-
tôt qu’une mesure dissociée des dimensions évinçant les relations.
couvre les impacts des activités de l’organisation auprès de l’ensemble de ses parties prenantes et
nécessite de relier différents facteurs issus de dimensions différentes. Cependant les représentations
existantes dissocient souvent ces dimensions.
À ce titre, Reynaud (2003) propose de schématiser la performance globale à partir de trois compo-
santes que sont la performance économique, sociale (appréciée avec l’égalité de traitement, les condi-
tions de travail et le respect des droits de l’Homme) et la performance environnementale (comprenant
la diminution de la pollution et des ressources, la sécurité des produits et des installations) mais les
items ne sont pas testés ni les relations supposées.
Une autre représentation permettant l’évaluation de la performance globale est proposée par les
travaux portant sur l’élargissement du Balanced Scorecard (BSC), où le caractère « environnemental »
est pris en compte par des critères spécifiques dans les quatre axes de la BSC ou bien dans un axe
particulier (Bieker 2002). Ainsi le Sustainability BSC (il s’agit d’un BSC spécifique à la responsabilité
sociétale, mettant en œuvre les objectifs sociaux et environnementaux, Hockerts 2001) et le Total
BSC (un modèle reposant sur une série de six relations causales entre les parties prenantes, Supizet
2002). Cependant, ces représentations segmentent les dimensions de la performance et les hiérar-
chisent (Germain et Trébucq 2004) et par ailleurs, les liens de causalité ne sont presque jamais analysés
(Ittner et Larcker 2004).
L’évaluation peut également se faire à travers l’approche anglo-saxonne du concept Triple Bottom
Line (Elkington 1997). En mettant en avant une « valeur sociale ajoutée » ou un impact sur la société
le Triple bottom line est une piste pour une mesure globale comprenant une triple contribution à la
prospérité économique, à la qualité de l’environnement et l’amélioration de la cohésion sociale. Mais
le bilan reste segmenté en trois parties distinctes présentées ensemble sans causalité ; de même que
l’approche retenue par le reporting global (Global Reporting Initiative – GRI) pourtant citée pour
l’évaluation de la performance globale (Dohou et Berland 2007).
De ces différentes approches théoriques, dont la visée explicative est celle d’une performance dépas-
sant la dimension économique et financière, sont extraits des déterminants externes et internes afin de
proposer une conceptualisation intégrant les interactions entre les différentes dimensions (Figure 1,
infra). Fondée sur le principe de la systémique qui stipule que la totalité est plus que la somme des
parties constitutives, elle dépasse la vision segmentée de la performance globale. Cette modélisation
de la performance permet ainsi de calculer un score qui agrège les différentes dimensions de la perfor-
mance. Une fois normalisé sur un échantillon représentatif d’une population d’organisations cible, cet
indicateur de performance peut être utilisé à des fins de comparaisons longitudinale ou transversale.
D’un point de vue méthodologique, cette conceptualisation de la performance globale peut être
représentée par un modèle de mesure de second ordre comportant deux niveaux d’abstraction : la
performance globale (le superfacteur h) et ses déterminants économiques, sociaux et sociétaux (fac-
teurs xi) (Figure 1). C’est pourquoi nous adoptons la procédure de développement d’un modèle de
mesure préconisé dans la littérature (Jarvis et al. 2003). Bien que nous privilégions cette conceptuali-
sation de la performance (approche européenne), nous avons aussi spécifié un modèle de mesure dans
lequel les dimensions sociales, économiques et sociétales sont prises isolement (approche Business
Ethics). L’objectif est de déterminer laquelle de ces deux conceptualisations s’ajuste le mieux aux
données (principe de parcimonie) par le biais d’indicateurs statistiques du modèle d’équations struc-
turelles estimé (voir méthodologie, infra).
Figure 1a Figure 1b
Modèle théorique de mesure Modèle segmenté
formatif de second ordre de la performance (ou indice
de la performance globale composite de la performance globale)
PERFECO PERFECO
ξ
PERFENV PERFENV
Pour le sens des relations entre les différentes variables, la théorie des parties prenantes (perspective
instrumentale) prédit une relation causale positive entre les pratiques sociétales- environnementales
et la performance économique. Quant à l’approche par les ressources elle prédit que les pratiques
d’entreprise et les pratiques sociales (qualificatifs de Côté 2009) influencent positivement les perfor-
mances économiques et sociales3. Ces deux performances, associées aux pratiques sociétales - environ-
nementales expliqueraient la performance globale, comme le suggèrent les modèles issus de la RSE
(Reynaud 2003).
Au regard de ces différents apports, notre modèle conceptuel de mesure de la performance globale
est représenté par la figure n° 2.
Figure 2
Le modèle conceptuel
+ +
Pratiques sociales Performance sociale
+
Comme le montre la figure n° 2, les liens de causalité attendus sont tous positifs – hormis ceux entre
« les pratiques sociétales et environnementales » avec la « performance économique et financière » et
« les pratiques d’entreprises » où la littérature admet des relations positives et négatives (ainsi, Berman
et al. 1999, ou Hillman et Keim 2001, attestent d’une relation positive entre la performance financière
et des notations sociétales incluant les salariés et la société civile ; mais la notation environnementale
apparaît sans relation avec la performance financière ou avec une relation négative selon Trébucq et
d’Arcimoles 2003). Il est aussi posé que les pratiques sociétales - environnementales influencent à la fois
la performance économique (réduction de risques, de coûts par réutilisation des déchets, et améliora-
tion de l’image commerciale) et la performance environnementale. De même que les pratiques sociales
influencent les pratiques sociétales (Savall et Zardet 2001) et la performance économique (Martory
2009). Le sens (les signes) et la direction des relations structurelles attendues entre les variables du
modèle conceptuel sont argumentés dans la présentation du contenu des construits et leurs mesures.
référence à l’égalité de traitement, de bonnes conditions de travail et le respect des droits de l’Homme.
Nous reprenons ces idées, en mesurant par trois variables la performance sociale : la participation
élevée aux réunions, l’encadrement de l’échelle des salaires5, et la présence de conditions de travail
favorisant l’implication. Le respect de ces éléments se traduit également par une performance sur la
dimension sociale dans le référentiel SD21000.
La performance environnementale
Ce concept a été opérationnalisé avec la liste des items proposés dans le référentiel SD 21 000,
complétés par deux items propres aux SCOP proposés par les experts. Nous avons alors retenu des
variables en référence aux dimensions du référentiel, et plus précisément à la responsabilité sociétale
(exemple, la prise en compte de l’impact sociétal attachés aux produits/services), le développement
durable (exemple, la présence d’une Stratégie environnementale et d’écoconception) et la transparence
envers les parties prenantes (exemple, les informations aux clients et la coopération durable avec les
fournisseurs).
La performance globale
Ce construit est par définition multidimensionnel (figure 1). Étant donné sa complexité, nous avons
retenu d’une part ses déterminants social, économique, sociétal et environnemental (causes) en réfé-
rence au modèle de Reynaud (2003) et au triple bottom line (performance économique et sociale
et légitimité institutionnelle), et d’autre part ses manifestations (indicateurs réflectifs) appréciées à
l’aide des critères évoqués par Belucci et al. (2012), à savoir la croissance du chiffre d’affaires (dimen-
sion économique), la recherche d’échanges de savoirs et d’absence de conflit (dimension sociale), la
recherche de placement éthique, la gestion des risques de pollution, la participation à l’intérêt général
(dimension sociétale-environnementale pour légitimité). Ces éléments (indicateurs formatifs et réflec-
tifs) ont été proposés aux mêmes experts que ceux pour apprécier les pratiques sociétales et retenus
selon leur hiérarchisation. Ainsi, le modèle de mesure de la performance globale est représenté par un
modèle de type MIMIC (Multi-Indicateurs/Multi-Causes).
Nous discutons maintenant de nos hypothèses de recherche.
sur les dimensions de la performance. De ce fait, parmi les 1920 SCOP en France, nous avons adressé
un fichier à 360 et obtenu 140 réponses dont 121 exploitables (les non-réponses ont été supprimées
afin de ne pas biaiser les résultats statistiques). La taille de cet échantillon est appréciable car il est issu
d’une population réduite7. Le tableau 1 décrit les caractéristiques de cet échantillon.
Tableau 1
Statistiques descriptives de l’échantillon
La surreprésentation des grandes SCOP (cf. les effectifs et chiffres d’affaires) dans l’échantillon
est due au choix d’un seuil plancher d’effectifs dans l’administration du questionnaire. Néanmoins,
les caractéristiques sectorielles de notre échantillon sont assez proches de celles de la population. En
conséquence la généralisation de nos résultats empiriques à l’ensemble de la population des SCOP de
plus de 15 salariés n’est pas problématique pour la validité externe.
les travaux récents sur le développement d’une mesure (Jarvis et al. 2003) : l’examen des validités
convergente et discriminante des échelles de mesure a été effectué avec des analyses exploratoires et
confirmatoires et la validité prédictive et nomologique des échelles de mesure a été examinée dans le
cadre des analyses confirmatoires du MES (annexe n° 2).
Par ailleurs, les coefficients de déterminations multiples des construits sont satisfaisants (les R2
supérieurs à 0.5) sauf pour la performance globale dont la variance expliquée par les trois dimensions
de la performance (PerfEco, PerfSOC, PerfENVT) est de 39,2 %. Ce résultat encourageant montre
néanmoins que le contenu de ce construit est relativement difficile à délimiter et donc à expliquer
malgré les pré-tests (cf. les recherches ultérieures).
Nous discutons maintenant en détail les principaux résultats avant de conclure sur les implications
managériales.
Figure 3
Modèle d’équations structurelles estimé
0,1** 0,25*
0,10**
0,09**
0,62* 0,48*
Il ressort que les hypothèses HG, H1, H2 et H3, sont confirmées (pour la H3 a = 0,10).
Nous constatons aussi que la performance sociale impacte deux fois plus la performance globale
que la composante économique et financière. Ce résultat est intéressant et supporte l’idée d’élargir
la notion de la performance économique et financière pour tenir compte des aspects sociaux de la
performance. Néanmoins le rôle de la dimension sociétale et environnementale (PratSOC-ENVT)
largement discuté dans la littérature est marginal et influence peu la performance économique et
globale. Ainsi son effet direct sur la performance globale n’est que de 0.09, moins d’un dixième de sa
variance, et l’effet indirect médiatisé par la performance économique est seulement de 0,028 ; soit un
effet total relativement faible (0,028 + 0,09 = 0,118).
Tableau 3
Validation empirique des hypothèses sur les relations structurelles
Hypothèses Résultats
testées Sens attendu de la relation Acceptation de l’hypothèse (a = 0,05)
HG Confirmée oui
H1 Confirmée oui
H2 Confirmée oui
H3 Confirmée significatif avec a = 0,10
Figure 4
Modèle II – Le facteur Taille comme variable confondante
0,1** 0,28*
0,10**
0,15*
Ce modèle ne présente pas les relations non significatives telles que les liens entre pratiques d’entre-
prise et pratiques sociales, ou pratiques d’entreprise et pratiques sociétales-environnementales.
Tableau 4
Indices d’ajustement du modèle II
Globalement peu de changements sont observés par rapport aux indices du premier modèle
(tableau 2). Néanmoins, les principaux résultats sont i) qu’avec l’augmentation des effectifs la per-
formance économique et sociale est supérieure, ii) que le secteur industriel (BTP) a une performance
économique supérieure au secteur des services mais ne modifie pas la performance globale, et iii) les
pratiques sociétales-environnementales ont un impact relativement faible (statistiquement significa-
tif qu’au seuil de 10 %) sur la performance économique et sur la performance globale lorsque les
variables de contrôle sont introduites.
Ce résultat mitigé du rôle des pratiques sociétales-environnementales est ensuite discuté.
sociale et environnementale sur la performance globale, nos résultats apparaissent concluants, excepté
pour l’impact des pratiques sociétales-environnementales sur la performance globale où la relation
est faible. Alors que le terrain mobilisé était favorable à la validation des hypothèses, à travers un lien
statistiquement significatif qu’au seuil de 10 %, nous retrouvons les débats sur les difficiles relations
qu’entretiennent les investissements en RSE et la performance économique et financière (Allouche et
Laroche 2005 ; Berman et al. 1999 ; Trébucq et d’Arcimoles 2003).
Une explication peut résider dans l’horizon long terme de l’influence des pratiques sociétales-envi-
ronnementales qui peut être en décalage avec le caractère court-termiste de la mesure de la perfor-
mance considérée (mesure de rentabilité). Cet écart entre nos résultats et les promoteurs d’une vision
positive du lien entre « pratiques sociétales-environnementales » et performance économique peut
aussi s’expliquer par une contingence de ce lien (i.e. l’historique de l’organisation avec ses parties pre-
nantes), ou bien s’expliquer par des comportements opportunistes de la part de certains répondants
(s’approprier de manière inéquitable des ressources, ce qui détruit des bénéfices issus des pratiques
environnementales et détériore l’influence sur la performance économique).
performance globale que les deux autres dimensions économique et environnementale. Bien qu’elles
soient liées, il semblerait que l’on puisse envisager une hiérarchisation des effets des trois dimensions
de la performance globale au sein de notre échantillon. De même, si la théorie de la dépendance aux
ressources apparaît validée au regard des relations positives entre les pratiques et les performances
intermédiaires, les résultats nuancent la TPP : les liens entre les pratiques sociétales-environnemen-
tales et la performance globale sont faibles (mais statistiquement significatifs au seuil de 10 %). Il est
cependant possible qu’un délai soit nécessaire entre le recensement des pratiques et la mesure des effets
sur la performance globale puisque les démarches sont récentes dans les SCOP étudiées et nécessitent
un temps pour produire des impacts.
Enfin, la validation du modèle de mesure de la performance globale appelle d’autres travaux théo-
riques et empiriques. Il serait par exemple intéressant d’examiner les effets de la performance globale
sur les comportements des parties prenantes, et d’identifier les mécanismes d’influence (i.e. la réputa-
tion).
construction de ce tableau repose sur le processus suivant. Dans un premier temps, nous avons cal-
culé les scores des différentes variables du modèle I sans standardiser les paramètres. Cette étape est
usuelle avec la régression linéaire, Y = aX +b + e dans laquelle le paramètre d’une variable explicative
X s’interprète comme l’effet causal de X sur Y. Bien entendu, notre modèle est plus riche car il per-
met d’estimer à la fois l’effet direct, l’effet indirect et donc total d’une variable sur une autre. Dans
un second temps, nous avons calculé la taille de l’effet de chacune des pratiques sur les différentes
dimensions de la performance.
Tableau 5
Taille des effets des pratiques sur les performances
L’interprétation des coefficients sur le tableau est simple. Par exemple une augmentation de 1 %
du score des pratiques sociales produirait une augmentation du score de la performance globale de
3,3 %, de 7,1 % pour le score de la performance sociale et de 2,1 % la performance économique.
Par ailleurs, ce modèle estimé peut permettre d’effectuer des analyses comparatives nationales entre
sociétés coopératives.
Conclusion
Cette recherche s’est appuyée sur un cadre théorique mixte (la théorie des parties prenantes et théorie
des ressources) pour éclairer la compréhension des liens entre les dimensions sociale, économique
et sociétale-environnementale de la performance globale. Devant les résultats divergents obtenus, le
plus souvent par des études hétérogènes, l’objectif était de proposer une modélisation fondée sur la
méthode des équations structurelles pour tester simultanément les relations entre les dimensions de
la performance globale auprès d’organisations a priori favorables au concept. Tout d’abord, nos résul-
tats montrent que le recours à un management « intégré », avec des pratiques d’entreprises, sociales
et sociétales, influence positivement la performance globale. D’autre part, nos résultats démontrent
l’effet positif de la performance sociale sur la performance globale et des pratiques sociales sur les
pratiques sociétale-environnementale. Cependant, le modèle obtenu aboutit à une certaine hiérarchi-
sation des effets des trois dimensions de la performance globale, ce qui interroge la notion de gestion
intégrée de la performance, notamment dans les organisations étudiées qui étaient a priori favorables
à ces pratiques. En outre, les résultats doivent être interprétés en tenant compte d’un certain nombre
de limites attachées à ce premier modèle de performance globale, notamment le choix des variables
pour opérationnaliser les pratiques sociétales-environnementales et la performance globale. Aussi,
pour augmenter la validité externe de ce modèle de mesure de la performance et étendre la recherche
à d’autres contextes organisationnels, d’autres études empiriques sont souhaitables.
Si les variables utilisées pour l’évaluation de la performance globale semblent encore à améliorer,
elles constituent un premier pas vers une mesure ou estimation de ce concept par nature englobant.
En effet, si le moyen le plus couramment utilisé est, par facilité, de dissocier les dimensions de la per-
formance, une approche intégrative paraît préférable à la juxtaposition des performances pour appré-
cier la nature globale. En ce sens, les variables proposées peuvent créer une dynamique d’apprentissage
et élargir les options pour les décisions.
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