F. Youcefi (2015). Biopréservation de la crevette par l’association du chitosane et de métabolites microbiens Thèse de doctorat, Univ.

Mostaganem 117

Conclusion et perspectives

Notre étude a portée sur l’isolement, l’identification génétique des bactéries

lactiques mésophiles et psychrotrophes à partir de la crevette. Les résultats de ce
screening ont révélé la présence d’une souche lactique psychrotrophe pouvant se
développer à 8°C. L’analyse moléculaire a mis en évidence une biodiversité des espèces
lactiques isolées dont les 9 souches retenues appartiendraient aux espèces : Lb. plantarum,
Lb. Brevis, Enterococcus faecalis, Pediococcus pentosaceus, Leuconostoc et Weissella
paramesenteroïdes.

Certaines de ces souches manifestent une activité antagoniste remarquable. La

souche psychrotrophe Lb. Plantarum Lbr1 présente une activité inhibitrice plus ou moins
prononcée, sur toutes les bactéries pathogènes testées avec des diamètres des zones
d’inhibition de 15.70 à 23.83 mm. La plus forte inhibition (23.83 mm de diamètre)
exercée par cette souche a été celle observée contre Listeria monocytogenes EU2160.

Lactobacillus plantarum Lbr1 produit de l’acide lactique (18 g/L/24h) et un facteur

protéique relativement thermorésistant (100°C pendant 20 min).Par ailleurs, la
neutralisation de l’acidité du surnageant (SANA1) de culture de cette souche suivie de
l’utilisation de ce dernier dans l’inhibition de bactéries indicatrices comme Listeria
ivanovii EU2162 a montré que le facteur protéique responsable de cet effet inhibiteur était
insensible à la catalase ; mais, en revanche, très sensible aux enzymes protéolytiques
comme la trypsine, la pronase E et la proteinase K qui lui font totalement perdre son
activité biologique. Ceci est un argument supplémentaire en faveur de la nature protéique
de ce facteur. Selon le principe des dilutions critiques, la valeur de la CMI de ce facteur
protéique produit par la souche Lactobacillus plantarum Lbr1 serait de 1785,71 U.A/ mL
(unité arbitraire /ml).

La deuxième partie de cette thèse a été consacrée à l’extraction d’un biopolymère,

le chitosane, à partir de carapace de crevettes, à sa caractérisation physico-chimique par
diverses méthodes d’analyses comme la spectroscopie infrarouge (pour le calcul de son
degré de déacétylation), la viscosimétrie (pour la détermination de sa masse moléculaire)
et la détermination de la composition partielle (teneur en cendres, matière sèche,
protéines). Le chitosane a, également, fait l’objet d’une évaluation de son pouvoir

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réducteur (antioxydant), chélateur (vis-à-vis du fer, nickel et zinc) et antibactérien (vis-à-

vis de bactéries Gram – et Gram+).

Les résultats obtenus ont révélé que le chitosane est déacétylée à 75%, de viscosité
égale à 119.7±0.04 Pa.s et un poids moléculaire de 1414.33±16.99 kDa. Les teneurs en
cendres, matière sèche et protéines du chitosane sont, respectivement de l’ordre de 0.34,
0.74 et 0.37g /g de chitosane.

Concernant les propriétés biologiques du chitosane, nous avons constaté qu’à la

concentration de 2% (P/V), son pouvoir réducteur atteignait 62.6% et qu’il était dose-
dépendant. Ce biopolymère possède une activité inhibitrice importante (diamètre de la
zone d’inhibition = 28 mm) sur la souche Staphylococcus aureus résistante à la
methicilline. D’autres souches pathogènes ont, également, été inhibées par le chitosane :
Escherichia coli CIP76.24 (14 mm), Bacillus subtilis DSMZ10 (15.83 mm), Salmonella
enterica CIP81.3 (18.66 mm), Shewanella putrefaciens EU2187 (25.66 mm) et Listeria
monocytogenes EU2160 (21.66 mm).

Les concentrations minimales inhibitrices (CMI) du chitosane vis-à-vis des deux

souches pathogènes Staphylococcus aureus résistante à la methicilline et Escherichia coli
CIP76.24 obtenues sont, respectivement, de l’ordre de 800, 1000, ppm /mL,
respectivement ; alors que les concentrations minimales bactéricides (CMB) pour les deux
souches pathogènes sont de l’ordre de 1000 et 1200 ppm /mL, respectivement.

L’étude de l’adsorption des trois cations métalliques (manganèse, nickel et zinc) sur
le chitosane utilisé à différentes concentrations (3, 6 et 9 ppm) a montré l’efficacité de
celui-ci à éliminer ces métaux lourds sans qu’il y ait une relation directe entre
concentration en chitosane et force de chélation.

La finalité de ce travail de thèse est, bien entendu, représentée par les observations
relatives à la biopréservation à 4°C pendant 3 semaines de la crevette royale rose
contaminée par Staphylococcus aureus STRM et traitée soit, par le surnageant à acidité
neutralisée de la culture Lb plantarum (SANA1), soit par le chitosane, soit encore par la
combinaison des deux substances.

Les observations faites à l’issue de ces essais laissent apparaître le chitosane comme
très efficace dans l’inhibition de la croissance de Staphylococcus aureus STRM car la

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charge en ce pathogène dans le lot de crevettes traitées diminue de 99%. Le même effet a
été observé chez les lots de crevettes traitées par le biofilm chitosane-surnageant bactérien
à acidité neutralisée.

L’ensemble de ces résultats démontrent l’intérêt que revêt la valorisation et

l’exploitation de déchets générés par l’industrie de décorticage des crustacés (i.e. le
chitosane), ainsi que l’importance des substances sécrétées par les microorganismes
bénéfiques comme les bactéries lactiques (facteurs protéiques à action très spécifique,
voire même les acides organiques) dans la biopréservation des denrées alimentaires en
général et des produits marins en particulier.

En outre, le chitosane est un biopolymère à multi-usage étant donné ses propriétés

physico-chimiques et biologiques (chélation des métaux lourds, production de biofilms en
association avec des molécules plastifiantes et antibactériennes, applications dans la
conception d’emballages pour l’industrie laitière, carnée et autre…).

En perspective, ce travail devrait être poursuivi sur le plan de la purification et de la

caractérisation fine (composition, séquençage, poids moléculaire) du facteur protéique
SLbr1 synthétisé par la souche psychrotrophe, Lactobacillus plantarum, isolée de la
crevette. Il s’agira également de s’assurer de son innocuité ou de son caractère « GRAS »
quant à ses interactions avec la microflore digestive. Les applications offertes par le
chitosane, de par ses propriétés physico-chimiques et biologiques, devraient faire l’objet de
questionnements plus approfondis quant aux retombées de son utilisation dans le domaine
agro-alimentaire, pharmaceutique et environnemental.

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