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30/09/2008

Réacteurs de recherche
et d’irradiation de matériaux

par Alain BALLAGNY


Chef de Projets au Commissariat à l’Énergie Atomique
et Bruno GUIGON
Ingénieur au Commissariat à l’Énergie Atomique, Direction de l’Énergie Nucléaire

1. Présentation générale............................................................................. BN 3 030 – 2


1.1 Évolution du nombre de réacteurs de recherche dans le monde............ — 3
1.2 Projets en cours dans le monde ................................................................. — 4
1.3 Situation en France...................................................................................... — 5
2. Types de réacteurs................................................................................... — 5
2.1 Réacteurs à eau lourde ............................................................................... — 5
2.2 Réacteurs à eau ordinaire ........................................................................... — 5
3. Caractéristiques techniques ................................................................. — 6
3.1 Puissance thermique, flux neutronique, régimes de fonctionnement.... — 6
3.2 Réacteur Osiris (Saclay) .............................................................................. — 6
3.3 Réacteur à haut flux RHF (Grenoble) ......................................................... — 8
3.4 Réacteur Orphée (Saclay) ........................................................................... — 8
3.5 Réacteur Jules Horowitz (en projet à Cadarache) ..................................... — 9
4. Utilisations................................................................................................. — 10
4.1 Recherche fondamentale............................................................................. — 10
4.2 Recherche appliquée ................................................................................... — 11
4.3 Production et activités diverses ................................................................. — 15
4.4 Enseignement, formation, physique des réacteurs .................................. — 18
5. Conclusions ............................................................................................... — 18
Références bibliographiques ......................................................................... — 19

n réacteur de recherche est une installation nucléaire dans laquelle on crée


U et on entretient, par une réaction en chaîne, la fission d’atomes de maté-
riaux fissiles (par exemple, de l’uranium) afin d’obtenir des flux de neutrons éle-
vés pour une utilisation dans les divers domaines de recherche fondamentale et
appliquée. L’énergie libérée par les fissions n’est généralement pas récupérée,
contrairement aux centrales nucléaires dont c’est l’unique objectif.
Les réacteurs de recherche sont à la fois des outils privilégiés pour l’étude de
la matière condensée en raison des caractéristiques physiques des neutrons et
des outils indispensables à la conception des réacteurs de puissance pour la
qualification sous irradiation des matériaux et des combustibles.
Les réacteurs d’essais spécifiques d’une filière donnée, avant son industriali-
sation, ne sont pas mentionnés dans cet article mais dans des articles propres à
chaque filière.
Cet article fait de larges emprunts à l’édition précédente rédigée par
Francis MERCHIE.

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1. Présentation générale — les réacteurs pour l’étude des accidents graves tels que Phé-
bus, Cabri en France ;
— les réacteurs utilisés pour la formation du personnel et l’ensei-
gnement universitaire tels qu’Ulysse, Minerve et Azur en France...
Il existe cinq grandes familles de réacteurs de recherche :
— les réacteurs d’irradiations technologiques tels qu’Osiris en C’est en 1942, à Chicago, que l’équipe d’Enrico Fermi a réussi
France, HBWR en Norvège, Hanaro en Corée, JMTR au Japon... qui l’approche sous-critique et la divergence de la première « pile
sont essentiellement utilisés pour les besoins de la recherche appli- atomique ».
quée à l’énergie nucléaire ; Depuis cette date, les réacteurs de recherche ont joué un rôle
— les réacteurs dits « à faisceaux de neutrons » tels qu’Orphée et important dans le développement de la science et de la technologie
le RHF en France, HFIR et MURR aux États-Unis, BER-II en Allema- nucléaire.
gne, JRR3M au Japon... qui utilisent la diffraction des neutrons pour
les besoins de la recherche fondamentale, en particulier pour carac- Jusqu’à présent, à peu près 600 réacteurs de recherches ont été
tériser les structures de la matière condensée ; construits dont 256 sont encore en fonctionnement aujourd’hui
dans 59 pays.
— les maquettes critiques telles que Masurca et Éole, Minerve,
Isis en France, BR-1 en Belgique... conçues pour répondre au besoin Une soixantaine seulement ont une puissance supérieure à 5 MW.
de qualification des calculs neutroniques et de physique des cœurs. C’est essentiellement à cette catégorie que nous nous intéresserons
Ce sont des réacteurs de très faible puissance [typiquement 5 kW, par la suite (liste des réacteurs les plus dans le monde et en Europe,
pour des flux neutroniques de l’ordre de 109 n/(cm2 · s)] ; tableau 1 et tableau 2). (0)

Tableau 1 – Principaux réacteurs de recherche en service hors Europe


Flux maximal
Utilisation
[en 1014 n/(cm2 · s)]
Mise

Radio-isotopes
fondamentale
Puissance

thermiques
Pays Réacteur en Situation Type Combustible

Recherche

Irradiation
matériaux
Neutrons

Neutrons
(MW)

rapides
service

Afrique du Safari 1965 Pelindaba 20 Caisson H2O Plaques 93 % 1,2 2,8 X X X


Sud
Argentine RA-3 1968 Ezeiza 3 Piscine H2O Plaques 90 % 0,4 X X
Australie Hifar 1958 Lucas Heights 10 Caisson H2O Tubes 60 % 1,4 0,4 X X
Brésil IEA-R1 1957 Sao Paulo 2 Piscine H2O Plaques 20 % 0,3 0,3 X X
Canada MAPPLE 1999 Chalk River 10 Piscine Crayons 20 % 10 0,5 X
1
MAPPLE 2000
2
Corée Hanaro 1995 Daejon 30 Piscine H2O / Crayons 20 % 2,0 1,0 X X X
caisson D2O

Inde Dhruva 1985 Bombay 100 Caisson D2O Crayons U naturel 1,8 X X X
Indonésie RSG-GAS 1987 Serpong 30 Piscine H2O Plaques 20 % 3,0 0,9 X X X
Japon JRR-2 1960 Tokai Mura 10 Caisson D2O Crayons 45 % 1,3 X X
JRR-3M 1990 Tokai Mura 20 Piscine H2O / Plaques 20 % 3,0 X X
caisson D2O

JMTR 1968 Oaraï 50 Caisson H2O Plaques 45 % 4,0 4,0 X X


Pakistan PARR-1 1965 Rawalpindi 9 Piscine Plaques 20 % 1,0 2,5 X X
Turquie TR-2 1981 Cekmeçe 5 Piscine H2O Plaques 20 % 0,5 0,7 X X
États-Unis MITR 1958 MIT-Cambridge 5 Caisson D2O Plaques 93 % 2,0 1,0 X
NBSR 1967 Gaithersburg 20 Caisson D2O Plaques 93 % 4,0 0,3 X X
ATR 1967 Idaho 250 Caisson H2O Plaques 93 % 8,5 1,8 X X
MURK 1966 Missouri University 10 Caisson H2O Plaques 93 % 2,0 1,0 X X
HFIR 1972 Oak Ridge 85 Caisson H2O Plaques 93 % 4,0 1,0 X X X

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(0)

Tableau 2 – Principaux réacteurs de recherche en service en Europe


Flux maximal
Utilisation
[en 1014 n/(cm2 · s)]
Mise

Radio-isotopes
fondamentale
Puissance

thermiques
Pays Réacteur en Situation Type Combustible

Recherche

Irradiation
matériaux
Neutrons

Neutrons
(MW)

rapides
service

Allemagne FRM 1957 Garching 4 Piscine H2O Plaques 45 à 93 % 0,8 0,4 X


FRG-1 1958 Geesthacht 5 Piscine H2O Plaques 20 % 0,6 0,4 X X
FRJ-2 1962 Jülich 23 Caisson D2O Tubes 80 à 93 % 2,0 0,5 X X X
FMRB 1967 Braunschweig 1 Piscine H2O Plaques 90 % 0,1 0,03 X
BER-II 1973 Berlin 10 Piscine H2O Plaques 90 à 93 % 2,0 0,14 X
Autriche Astra 1960 Seibersdorf 10 Piscine H2O Plaques 20 % 1,7 1,3 X X
Belgique BR-2 1961 Mol 100 Caisson H2O Tubes 93 % 9,0 7,0 X X X
France Osiris 1966 Saclay 70 Piscine H2O Plaques 20 % 4,0 4,0 X X X
RHF 1971 Grenoble 57 Caisson D2O Plaques 93 % 15,0 X
Orphée 1980 Saclay 14 Caisson D2O / Plaques 93 % 3,0
Piscine H2O
Phébus 1978 Cadarache 40 Piscine H2O Crayons UO2 2,8 % Essais
sûreté
Cabri 1963 Cadarache 25 Piscine H2O Crayons UO2 6 % Essais
sûreté
Grèce Democritus 1961 Athènes 5 Piscine H2O Plaques 93 % 0,6 0,15 X X
Hongrie VVR 1959 Budapest 10 Caisson H2O Tubes 36 % 1,6 1,0 X X X
Norvège HBWR 1959 Halden 25 Caisson D2O Crayons 4 % 1,0 1,0 X
(bouillant)
JEEP-2 1966 Kjeller 2 Caisson D2O Crayons 3,5 % 0,27 0,38 X X
Pays-Bas HFR 1961 Petten 45 Caisson H2O Plaques 93 % 2,7 4,5 X X X
HOR 1963 Delft 2 Piscine H2O Plaques 93 % 0,2 0,5 X X
Pologne Maria 1974 Swierk 30 Piscine / tubes Tubes 36 à 80 % 3,5 1,5 X X X
de force
Portugal RPI 1961 Sacavem 1 Piscine H2O Plaques 93 % 0,3 0,1 X X
Roumanie Triga-II 1979 Pitesti 14 Piscine H2O Crayons 20 à 70 % 2,6 2,6 X X X
Suède R-2 1960 Studsvik 50 Caisson H2O Plaques 20 % 4,0 4,0 X X X
R2-0 1960 Studsvik 1 Piscine H2O Plaques 93 % 0,10 0,10 X
République LWR-15 1957 Rëz 10 Caisson H2O Tubes 80 % 1,0 1,5 X X X
tchèque
Russie IR-8 1957 Moscou 8 Piscine H2O Tubes 10 % 2,5 0,6 X X
WWR-M 1959 St-Petersbourg 18 Caisson H2O Tubes 90 % 4,0 1,5 X X X
MR 1963 Moscou 40 Piscine H2O / Tubes 90 % 1,5 3,0 X
tubes de force
SM-2 1961 Dimitrovgrad 100 Caisson H2O Plaques 90 % 2,0 5,0 X X X
MIR-M1 1966 Dimitrovgrad 100 Piscine H2O / Tubes 90 % 5,0 2,0 X X
tubes de force

1.1 Évolution du nombre de réacteurs service entre 1955 et 1960 notamment aux États-Unis. Il correspond
également à la stagnation du marché de l’électronucléaire aux États-
de recherche dans le monde Unis à partir du début des années 1970. On peut, en effet, considérer
qu’il existe, pour un pays donné, une corrélation entre le nombre de
Le fléchissement observé à partir de 1975 sur la figure 1 est essen- réacteurs d’irradiations technologiques et son implication dans un
tiellement imputable à l’arrêt des réacteurs les plus anciens mis en programme électronucléaire. Quand on maintient en service les

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réacteurs d’irradiation en France, au Japon, en Allemagne, en Belgi-


400

Nombre de réacteurs de recherche


que (parce que dans ces pays, il existe un véritable programme élec- 358
370 356
tronucléaire)... on les arrête en Grande-Bretagne et aux États-Unis. 350 334
315 304 299 306
300 280 273
Dans les pays en voie de développement, le nombre de réacteurs 251
250 274 256
de recherche n’a cessé d’augmenter. À quelques exceptions près, 218
ces réacteurs n’appartiennent pas à la catégorie des réacteurs d’irra- 200 172
189
diations technologiques car la finalité de ces réacteurs n’est pas le 150
170
155
développement de l’énergie nucléaire mais, le plus souvent, la pro-
100 76 89 90 84
duction locale de radioéléments pour la médecine, l’enseignement 71 86
41 54
universitaire, la recherche fondamentale... 50 37
17
0
Les pays qui, ces dernières années, ont acquis un réacteur d’irra-
1/1/1950 1/1/1960 1/1/1970 1/1/1980 1/1/1990 1/1/1999
diations technologiques étaient soit fortement impliqués dans
Année
l’énergie électronucléaire (République de Corée) ou prévoyaient de
Total
l’être (Indonésie). Pays industrialisés
Pays en développement
Depuis l’arrêt massif des réacteurs aux États-Unis dans les
années 1980, c’est en Europe que sont concentrés les moyens d’irra- Figure 1 – Évolution du nombre de réacteurs de recherche
diations technologiques essentiellement : dans le monde
— HBWR à Halden en Norvège vers lequel convergent des pro-
grammes en coopération dans un cadre OCDE ;
25

Nombre de réacteurs
— Osiris en France qui réalise l’essentiel des irradiations du pro-
gramme français pour le compte d’EDF et de FRAMATOME, mais 20
également tout le programme de recherche du CEA sur les maté- 15
riaux et les combustibles pour les filières dites du futur ainsi que les
recherches sur l’aval du cycle en complément des irradiations faites 10
dans le réacteur à neutrons rapides Phénix ; 5
— HFR à Petten aux Pays-Bas qui se positionne de plus en plus 0
sur le créneau « médical » au sens large [radioéléments, BNCT 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50
(Boron Neutron Capture Therapy), méthode de traitement de certai- Âge (années)
nes tumeurs notamment du cerveau et de la peau par des particules
alpha issues de la réaction entre les neutrons et un composé boré Figure 2 – Histogramme de l’âge des réacteurs expérimentaux
préalablement concentré dans la tumeur [1], ...], mais qui effectue
néanmoins des irradiations technologiques à la demande, notam-
ment pour les programmes relatifs à la fusion et l’aval du cycle ;
1.2 Projets en cours dans le monde
— BR-2 à Mol en Belgique dont le régime de fonctionnement a
été ajusté en 1997 pour tenir compte de la baisse des demandes
d’irradiations technologiques. Il fonctionne aujourd’hui par campa- Nombreux sont les pays qui affirment avoir des projets... Ce qui
gne, surtout pour la production de radioéléments, le silicium dopé caractérise les projets qui se concrétisent, c’est leur caractère pluri-
et des irradiations technologiques à la demande ; disciplinaire et évolutif de telle sorte qu’on peut difficilement les ran-
ger dans une catégorie. Ce constat ne fait que traduire l’incertitude
— R-2 à Studsvik en Suède qui réalise des irradiations technolo-
des programmes et la pénurie de moyens financiers : chacun cher-
giques à la demande dans des domaines particuliers, par exemple
che à être en mesure de faire un maximum de choses pour rentabi-
les rampes de puissance ;
liser l’investissement. Ainsi, le dopage du silicium figure toujours en
— LVR-15 à Rez en Tchéquie qui réalise essentiellement des irra- bonne place parmi les objectifs affichés alors qu’il ne s’agit que
diations de matériaux et produit des radioéléments. d’une activité éphémère par nature (technologie de l’électronique)...

Les autres réacteurs, tels que FRG-2 et FRJ-2 en Allemagne, ne ■ La Belgique, après avoir considéré la possibilité de réaliser une
sont pas considérés comme impliqués dans les programmes de installation (classique ou du type de source à spallation) dédiée à la
Recherche et développement nucléaires, même s’ils en ont poten- production de radioéléments (Adonis), s’oriente actuellement sur
tiellement les moyens. un réacteur de type hybride (Myrrha). Dans ce dernier cas, le réac-
teur serait sous-critique et pourrait à la fois être utilisé pour la pro-
Ce qui caractérise les réacteurs européens, c’est leur bon état (mal- duction de radioéléments et les recherches nécessitant des flux et
gré leur âge), grâce à des campagnes régulières de jouvence et de des énergies très élevées.
mise à niveau au plan de la sûreté. Le réacteur BR-2 a fait l’objet d’une
jouvence importante pendant 1 an (1996) à l’occasion du remplace- ■ L’Allemagne construit à l’université technique de Munich un réac-
ment de la matrice de béryllium. Depuis 1990, le CEA s’est engagé teur de 20 MW à faisceaux de neutrons pour la recherche fondamen-
dans un processus de remplacement quasi systématique, par mor- tale (FRM-2). Il est prévu également d’y produire des radioéléments.
ceau, de la majeure partie des composants du réacteur Osiris : casier Cette installation devrait démarrer au cours du premier trimestre 2004.
alvéolé, contrôle commande, bac de désactivation... On constate ■ La Chine prévoit de construire un réacteur de 60 MW (CARR) dont la
néanmoins que les réacteurs dont l’âge dépasse 40 ans sont peu conception serait proche de celle du réacteur Orphée. Il est prévu que
nombreux ; aujourd’hui l’arrêt des réacteurs les plus anciens, tels que le CARR puisse également réaliser des irradiations technologiques.
Hifar en Australie (1958), est d’ores et déjà programmé.
■ L’Australie prévoit de remplacer son réacteur Hifar, situé à Lucas
Sur cette base, on peut considérer que, à l’horizon 2010, seuls Heights et mis en service en 1958, par un réacteur de 20 MW pour la
deux ou trois réacteurs de recherche à vocation technologique recherche fondamentale (faisceaux de neutrons), les applications
seront encore opérationnels à l’échelle européenne. Ils auront toute- médicales (production de radioéléments) et certaines applications
fois des perspectives de durée de vie limitées à quelques années industrielles (neutrographie, dopage du silicium). C’est l’INVAP
(figure 2). (Argentine) qui sera le maître d’œuvre de ce projet.

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■ Le Canada a un projet, l’IRF (Irradiation Research Facility). Ce neutrons thermiques très moyens et des flux de neutrons rapides
réacteur sera utilisé essentiellement pour des irradiations technolo- faibles. Par la suite, ces inconvénients ont été en partie surmontés
giques (filière CANDU) et la recherche fondamentale (faisceaux de par l’utilisation d’uranium enrichi.
neutrons). Ces réacteurs sont peu adaptés aux essais de matériaux sous
rayonnement, car la présence d’eau lourde impose une cuve étan-
che qui complique l’accès au cœur et au réflecteur. En revanche, ils
sont mieux adaptés aux recherches de physique fondamentale sur
1.3 Situation en France faisceaux sortis, car l’emploi de l’eau lourde comme modérateur et
réflecteur permet d’obtenir des flux thermiques très purs (absence
de neutrons rapides considérés comme parasites), indispensables
Le CEA a une longue expérience de conception et d’exploitation
aux études des états de la matière condensée.
des réacteurs de recherche. En 1974, quand la France s’engage dans
son grand programme électronucléaire, elle dispose de 7 réacteurs La possibilité de réaliser des cœurs très compacts en utilisant de
d’irradiations technologiques : Pégase, Rapsodie, Triton, EL3, Osiris, l’uranium très enrichi a permis, par la suite, de concevoir des réac-
Siloé et Mélusine. Ils ont, en particulier, servi à former toute une teurs à eau lourde extrêmement performants, totalement dédiés à la
génération de spécialistes dans la mise en œuvre de ce programme. recherche fondamentale et offrant des flux thermiques très élevés et
très purs (par exemple, le RHF et Orphée).
Les réacteurs d’irradiations technologiques doivent être considé-
rés, avec les laboratoires de haute activité, comme les outils de base
indispensables au développement de l’énergie nucléaire. Bien qu’il
soit possible d’utiliser les réacteurs de puissance eux-mêmes pour 2.2 Réacteurs à eau ordinaire
expérimenter de nouveaux matériaux et combustibles, les réacteurs
de recherche constituent les bancs d’essais indispensables pour les
qualifier dans des conditions incomparables de souplesse d’exploi- 2.2.1 Réacteurs à caisson fermé
tation, de maîtrise des conditions expérimentales, de précision des
mesures et aussi par la possibilité qu’ils offrent de simuler des tran-
sitoires des situations incidentelles voire accidentelles, qu’il serait Utilisant de l’uranium enrichi, ces réacteurs aux cœurs de faibles
inacceptable de vouloir réaliser dans les réacteurs de puissance. dimensions permettent de disposer de flux de neutrons thermiques
et de neutrons rapides élevés. La pressurisation, généralement de
Depuis l’arrêt du réacteur Siloé en 1997, la France ne dispose plus quelques bars, permet d’extraire une puissance spécifique plus éle-
que du seul réacteur Osiris pour satisfaire à la fois : vée que dans les réacteurs piscine à cœur ouvert et donc d’augmen-
— les besoins des industriels (liés à l’amélioration de la compéti- ter d’autant les flux disponibles. Les emplacements situés dans le
tivité et de la sûreté) ; cœur sont plus difficilement accessibles, car il faut traverser le cais-
— les besoins du CEA pour ses recherches sur les filières du futur son de pressurisation et les emplacements situés hors du caisson
et l’aval du cycle. présentent des flux moins importants à cause de l’absorption des
Compte tenu, d’une part, du rôle que continuera de jouer l’énergie neutrons dans le caisson. La présence de ce caisson entraîne, par
nucléaire en France au XXIe siècle, donc de la nécessité de toujours ailleurs, des contraintes de sûreté supplémentaires.
disposer d’un réacteur d’irradiations technologiques, et, d’autre
part, du délai nécessaire (environ 10 ans) à la réalisation d’un nou-
veau réacteur, le CEA a considéré qu’il fallait engager, sans délai, 2.2.2 Réacteurs à cœur ouvert (dits réacteurs
l’étude d’un nouveau réacteur appelé, à terme, à remplacer le réac- piscine)
teur Osiris. Il s’agit du réacteur Jules Horowitz.
L’absence de pressurisation limite la puissance spécifique extrac-
tible, donc les niveaux de flux, mais l’accès au cœur est particuliè-
rement aisé. C’est sans doute le type de réacteur qui regroupe le
2. Types de réacteurs maximum d’avantages :
— faible coût d’investissement et d’exploitation ;
— sécurité et simplicité d’utilisation ;
Bien que l’éventail des réacteurs de recherche soit très large, on — accessibilité générale ;
rencontre essentiellement deux principaux types de réacteurs : — polyvalence et souplesse d’adaptation à l’évolution des pro-
— les réacteurs à eau lourde, qui permettent d’obtenir des flux grammes de recherche, de fabrication de radioéléments, etc. ;
de neutrons thermiques importants extraits du réacteur sous forme — performances remarquables puisque Siloé, qui fonctionne à
de faisceaux, utilisés essentiellement en recherche fondamentale ; 35 MW avec un schéma de circulation d’eau classique (sens descen-
— les réacteurs à eau ordinaire, plus adaptés aux essais de dant), et Osiris, qui fonctionne à 70 MW avec un schéma de circula-
matériaux, avec deux sous-groupes : tion inversée (sens ascendant), offrent des flux élevés très attractifs ;
— utilisation de combustibles très fiables et posant peu de pro-
• les réacteurs piscine à cœur ouvert, refroidis et modérés à blèmes techniques, tant à la fabrication qu’au retraitement.
l’eau ordinaire, généralement polyvalents et très simples d’accès
et d’utilisation,
• les réacteurs à eau ordinaire et à caisson fermé sous pression, 2.2.3 Avantages respectifs des écoulements
capables de fonctionner à des puissances supérieures à celles des
réacteurs piscine, mais dont l’utilisation expérimentale est un peu
descendants et ascendants
moins facile du fait de la présence du caisson contenant le cœur.
La plupart des réacteurs à eau ordinaire, qu’ils soient à caisson ou
à cœur ouvert, utilisent des éléments combustibles à plaques dispo-
sées parallèlement, chaque plaque étant constituée d’un sandwich
2.1 Réacteurs à eau lourde de matériau fissile (à base d’uranium enrichi en uranium 235) gainé
d’aluminium. L’eau de refroidissement du cœur circule le long des
plaques des éléments combustibles qui forment deux à deux les
Conçus aux débuts de l’ère nucléaire, les premiers réacteurs de ce canaux de refroidissement. Pour des raisons de sécurité qui visent à
type fonctionnent avec de l’uranium naturel, seul combustible alors empêcher toute dégradation de la gaine et notamment sa fusion par
disponible. Ils ont des cœurs très volumineux et offrent des flux de suite d’un manque de refroidissement, on se fixe de limiter la tem-

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pérature de gaine au point le plus chaud du cœur à une valeur au


plus égale à la température d’ébullition de l’eau en ce point chaud
(au-delà, il y a des risques d’instabilité et de redistribution de débit

Échangeur
de chaleur
entre les canaux de refroidissement avec, comme conséquence, une
réduction de débit dans les canaux chauds).
La température d’ébullition de l’eau dépend de la pression et varie H H Pompe
dans le même sens. Eau
Eau

Échangeur
de chaleur
■ Dans un réacteur à caisson, la pressurisation du cœur par Cœur
∆pc Cœur ∆pc
l’intermédiaire du caisson permet d’augmenter la température
d’ébullition de l’eau et donc d’accroître la puissance extractible du
cœur avant d’atteindre la température limite au point chaud.
Pompe
■ Dans un réacteur à cœur ouvert à écoulement descendant,
les pompes aspirent l’eau sous le cœur et le référentiel de pression a circulation d'eau descendante : b circulation d'eau ascendante :
est situé à l’entrée du cœur (hauteur de la piscine au-dessus du p + H –  pc p – H + pc
cœur). La pression qui gouverne la température d’ébullition au point
chaud est égale à la hauteur d’eau au-dessus du point chaud dimi- p pression statique au point chaud (en m H2O)
nuée de la perte de charge du cœur jusqu’au point chaud (schéma- ∆pc demi-perte de charge dans le cœur (en m H2O)
tisé à mi-hauteur du cœur sur la figure 3 a). H hauteur d'eau (en m)

■ Dans un réacteur à cœur ouvert à écoulement ascendant, Figure 3 – Circulation de l’eau de refroidissement dans un réacteur
les pompes aspirent l’eau au-dessus du cœur au moyen d’une che- à cœur ouvert
minée ouverte sur la piscine (elles aspirent parallèlement dans la
piscine un débit dérivé qui représente environ 10 % du débit total) Les flux disponibles dépendent de la puissance, mais aussi de la
(figure 3 b). Le référentiel de pression imposé par la hauteur d’eau taille et du volume expérimental du cœur. L’évacuation de l’énergie
de la piscine est situé non plus à l’entrée mais à la sortie du cœur ; libérée devient plus difficile lorsque les flux atteignent des valeurs
la pression au point chaud est, dans ce cas, égale à la hauteur d’eau élevées pour un cœur de volume déterminé (densités de puissance
au-dessus du point chaud augmentée de la perte de charge du cœur élevées).
entre le point chaud et la sortie du cœur. Toutes choses égales par
ailleurs, la pression au point chaud est donc supérieure à celle en Pour des flux supérieurs à 1014 n/(cm2 · s), l’importance de
écoulement descendant. Il est par conséquent possible d’augmenter l’empoisonnement xénon et de son rebondissement après arrêt
la puissance maximale extractible du cœur. nécessite généralement d’organiser un fonctionnement continu, sur
la base de cycles de une ou deux à plusieurs semaines selon les uti-
lisations du réacteur.
Par ailleurs, il faut chercher à diminuer les variations de flux au
3. Caractéristiques niveau des expériences en cours d’irradiation en optimisant la taille
du cœur, son rechargement à chaque cycle, la plage d’évolution des
techniques barres, tout en visant un taux de combustion élevé du combustible.
À titre d’exemple, nous avons choisi de décrire les trois réacteurs
de recherche et d’essais de matériaux français cités dans le tableau 2
(Osiris, RHF et Orphée), car ils représentent les principaux types de
3.1 Puissance thermique, flux réacteur, couvrent les principaux domaines d’utilisation et sont parmi
neutronique, régimes les plus modernes et les plus performants ainsi que le projet de réac-
de fonctionnement teur Jules Horowitz qui remplacera Osiris à l’horizon 2010.
(Il convient de noter que les réacteurs de fusion poseront des pro-
blèmes technologiques nouveaux liés aux neutrons de haute éner-
Ces trois paramètres sont étroitement liés : selon les buts fixés gie (14 MeV) qui ne pourront être étudiés dans les réacteurs
pour l’utilisation des réacteurs expérimentaux, les flux nécessaires, « classiques »).
donc les gammes de puissance de fonctionnement, sont différents.
Selon les puissances et les contraintes de sûreté associées (refroi-
dissement du combustible, par exemple) d’une part et les exigences
des besoins expérimentaux d’autre part, les réacteurs peuvent avoir 3.2 Réacteur Osiris (Saclay)
des régimes de fonctionnement très variés.
Le tableau 3 donne les puissances de fonctionnement qu’il faut
envisager selon les flux choisis. Osiris est un réacteur piscine à cœur ouvert d’une puissance de
70 MW (figure 4) dont le sens de circulation de l’eau de refroidisse-
(0)
ment est ascendant à la différence de Siloé qui était à sens descendant.
Tableau 3 – Puissance de fonctionnement C’est un réacteur conçu pour réaliser des irradiations de matériaux
selon le flux choisi de structure et de combustibles nucléaires ; il produit également des
radioéléments artificiels. Il ne comporte pas de canaux horizontaux
Flux Puissance (faisceaux sortis de neutrons) pour la recherche fondamentale.
[n/(cm2 · s)] (kW)
Ses principales caractéristiques sont données dans le tableau 4.
1012 100 Le cœur compact (57 cm × 57 cm × 60 cm) est composé de
1013 1 000 44 éléments combustibles à plaques, 38 éléments standards et
6 éléments de commande (absorbant en hafnium).
1014 et au-delà 10 000 et plus
Initialement chargé d’éléments combustibles à plaques en
La colonne flux donne l’ordre de grandeur des flux de neutrons alliage UAl (aluminium et uranium enrichi à 93 %), il fut ensuite
thermiques et de neutrons rapides. chargé d’éléments appelés Caramel, car les plaques combustibles

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Casemate pompe-échangeur
Réfrigérant Échangeur
atmosphérique Cuvelage

Piscine Osiris

Cheminée
Canal 1

Pompe cœur

Pompe secondaire
Bac de
désactivation
Circuit primaire cœur
Circuit secondaire Clapets cœur
Mécanisme
de barres

a coupe du réacteur avec son circuit de refroidissement

Emplacement pour
capsules cœur
Barres de
contrôle
Radioéléments
artificiels (Rea)

b plan de chargement du cœur

Figure 4 – Réacteur Osiris

étaient constituées de petites plaquettes d’UO2 gainées de Zircaloy, L’enceinte de confinement en béton contenant le réacteur pré-
l’uranium enrichi étant à faible enrichissement (7,5 %). Ce combusti- sente un diamètre de 32 m et une hauteur de 20 m.
ble Caramel est lui-même remplacé, depuis 1995, par un combusti- Les irradiations sont effectuées dans des dispositifs expérimen-
ble constitué d’U3Si2 contenant de l’uranium enrichi à 20 %, la taux (boucles et capsules, § 4.2.2.1) qui sont placés dans des empla-
géométrie des plaques et des éléments demeurant inchangée. cements réservés à cet effet soit directement dans le cœur, soit à sa
Les dimensions de la piscine principale du réacteur sont les périphérie à l’extérieur du caisson ouvert en Zircaloy qui sert à cana-
suivantes : profondeur 11 m et section 7,5 × 6,5 m. liser l’écoulement ascendant de l’eau de refroidissement.

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Tableau 4 – Principales caractéristiques


du réacteur Osiris
Puissance thermique................................................................ 70 MW
Combustible................................................................. U3Si2, plaques
Enrichissement ........................................................................19,75 %
Modérateur .................................................................................... H2O
Réflecteurs ...................................................................H2O, béryllium
Réfrigérant ..................................................................................... H2O
Flux de neutrons thermiques disponibles...........4 × 1014 n/(cm2 · s)
Flux de neutrons rapides disponibles .................4 × 1014 n/(cm2 · s)
Température à l’entrée de cœur .................................................38 ˚C
Température à la sortie du cœur ................................................47 ˚C
Température de la piscine ...........................................................35 ˚C
Vitesse d’écoulement de l’eau entre les plaques ..................8,3 m/s
Débit primaire du cœur......................................................5 600 m3/h
Débit primaire de la piscine..................................................600 m3/h
Flux thermique moyen.......................................................125 W/cm2
Flux thermique maximal....................................................310 W/cm2
Température à l’entrée du secondaire .......................................23 ˚C
Température à la sortie du secondaire.......................................36 ˚C
Débit secondaire.................................................................4 200 m3/h

3.3 Réacteur à haut flux RHF (Grenoble)

Le réacteur à haut flux de Grenoble (figure 5) est totalement dédié


à la recherche fondamentale.
Il est équipé de 16 canaux, de guides de neutrons, de deux sour-
ces froides et d’une source chaude permettant la réalisation simulta-
née d’environ 40 expériences. Les faisceaux sont disposés
tangentiellement au cœur pour diminuer le bruit de fond des neu-
trons rapides.
C’est actuellement le réacteur le plus performant au monde dans
son domaine d’utilisation.
Son cœur très compact est constitué d’un seul élément combusti-
Source Barre de Élément
ble ayant la forme d’un cylindre creux de 80 cm de hauteur, 28 cm froide pilotage combustible
de diamètre intérieur et 39 cm de diamètre extérieur, comprenant horizontale
280 plaques courbes assemblées radialement en couronne autour
d’un trou central dans lequel peut se déplacer la barre de contrôle. Figure 5 – Réacteur à haut flux RHF
Ce cœur compact, dont la paroi extérieure fait directement office
de caisson tenant à la pression du circuit primaire de refroidisse- (comme le RHF) de deux sources de neutrons froids et d’une source
ment, est entouré d’une cuve contenant le réflecteur à eau lourde de neutrons chauds, de guides de neutrons pouvant alimenter envi-
(15 m3), dans laquelle sont disposés tous les canaux qui permettent ron 20 spectromètres de caractéristiques variées.
d’extraire et de diriger les neutrons thermiques vers les installations
expérimentales situées à l’extérieur de la piscine qui contient le cais- Le réacteur peut aussi assurer la production de radioéléments et
son cœur et la cuve à eau lourde. effectuer des analyses par activation.

Ses principales caractéristiques sont données dans le tableau 5. Moins puissant et moins performant que le RHF, il n’en présente
pas moins des caractéristiques très intéressantes qui en font un
réacteur complémentaire du RHF.

3.4 Réacteur Orphée (Saclay) Contrairement au RHF son cœur n’est pas monobloc. Constitué de
8 éléments combustibles à plaques, plus simples et moins coûteux
à fabriquer, il reste néanmoins compact (hauteur 90 cm, section
Comme le réacteur à haut flux (RHF), Orphée est un réacteur des- 25 × 25 cm2). Le centre du cœur est occupé par un élément
tiné à la recherche fondamentale (figure 6). Outre les 7 canaux dis- réflecteur en béryllium contenant lui-même la source de neutrons
posés dans un flux thermique de 3 × 1014 n/(cm2 · s), il est équipé nécessaire au démarrage.

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Refroidi à l’eau ordinaire, le cœur est placé dans un caisson en Zir-


(0)

Tableau 5 – Principales caractéristiques caloy qui le sépare de la cuve à eau lourde qui l’entoure et dans
du réacteur à haut flux (RHF) laquelle sont disposés les canaux et les sources froides et chaudes,
comme dans le RHF.
Puissance thermique............................................................... 57 MW
Ses principales caractéristiques sont données dans le tableau 6.
Combustible.................................................................... UAl, plaques
Enrichissement ............................................................................ 93 % Le circuit primaire de refroidissement en eau ordinaire est plus
simple qu’un circuit équivalent en eau lourde.
Modérateur ....................................................................................D2O
Réflecteur .......................................................................................D2O (0)
Réfrigérant .....................................................................................D2O Tableau 6 – Principales caractéristiques
Flux de neutrons thermiques dans le réflecteur.. 1,5 × 1015 n/(cm2 · s) du réacteur Orphée
Température à l’entrée du cœur ................................................ 39 ˚C
Puissance thermique ............................................................... 14 MW
Température à la sortie du cœur ............................................... 47 ˚C
Combustible ................................................................................. UAlx
Débit primaire .....................................................................2 150 m3/h
Enrichissement............................................................................. 93 %
Flux thermique maximal................................................... 500 W/cm2
Réfrigérant..................................................................................... H2O
Vitesse d’écoulement de l’eau entre les plaques ................15,5 m/s
Réflecteurs................................................................... H2O, béryllium
Densité de puissance maximale dans le cœur .................. 3,3 MW/L
Flux thermique dans le réflecteur......................... 3 × 1014n/(cm2 · s)
Pression de l’eau à l’entrée du cœur ....................................... 14 bar
Température à l’entrée du cœur ................................................. 35 ˚C
Pression de l’eau à la sortie du cœur ..................................... 3,2 bar
Température à la sortie du cœur ................................................ 49 ˚C
Durée du cycle de fonctionnement ...............................................47 j
Température de la piscine........................................................... 35 ˚C
Masse de U235 dans le cœur en début de cycle....................... 8,6 kg
Débit primaire ....................................................................... 810 m3/h
Flux thermique maximal ................................................... 172 W/cm2
Vitesse d’écoulement de l’eau entre les plaques .................. 7,5 m/s
Densité de puissance maximale ......................................... 1,2 MW/L
Pression de l’eau à l’entrée du cœur ..........................................4 bar
Pression de l’eau à la sortie du cœur .........................................2 bar
Durée du cycle de fonctionnement ............................................ 100 j
Masse de U235 dans le cœur en début de cycle ...................... 5,9 kg

3.5 Réacteur Jules Horowitz (en projet


à Cadarache)

Le réacteur Jules Horowitz (RJH) (figure 7) prendra la relève du


réacteur Osiris après 2010 en tant que réacteur d’irradiation de
matériaux et de combustible pour le développement de l’énergie
nucléaire. Il sera implanté sur le site CEA de Cadarache (Bouches-
du-Rhône).

Le RJH répondra à des besoins plus variés qu’Osiris, afin de pren-


dre en compte la disparition progressive des outils expérimentaux
spécifiques.

Bureau Bâtiment Atelier Atelier de montage


réacteur laboratoire des dispositifs expérimentaux

Figure 7 – Implantation générale de l’installation nucléaire de


Figure 6 – Réacteur Orphée base « RJH »

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Tableau 7 – Principales caractéristiques du réacteur


Jules Horowitz (RJH)
Puissance thermique ............................................................. 100 MW
Combustible .............................................................. U-7Mo, plaques
Enrichissement........................................................................ 19,75 %
Modérateur.................................................................................... H2O
Réflecteurs................................................................... H2O, béryllium
Réfrigérant..................................................................................... H2O
Flux de neutrons thermiques disponibles ....... 7,3 × 1014 n/(cm2 · s)
Flux de neutrons rapides disponibles .............. 6,4 × 1014 n/(cm2 · s)
Température à l’entrée du cœur................................................. 25 ˚C
Température à la sortie du cœur ................................................ 36 ˚C
Température de la piscine........................................................... 35 ˚C
Vitesse d’écoulement de l’eau entre les plaques ................... 18 m/s
Sens de l’écoulement dans le cœur .................................. ascendant
Débit primaire du cœur .......................................................2 500 kg/s
Débit secondaire ..................................................................2 500 kg/s
a flux neutronique rapide
Débit tertiaire........................................................................2 100 kg/s
Flux thermique moyen ...................................................... 190 W/cm2
Flux thermique maximal ................................................... 500 W/cm2
Température à l’entrée du secondaire ....................................... 20 ˚C
Température à la sortie du secondaire ...................................... 30 ˚C
Température à l’entrée du tertiaire ............................................ 18 ˚C
Température à la sortie du tertiaire............................................ 30 ˚C
Source de refroidissement............ Canal du Verdon (circuit ouvert)

Le cœur compact est composé de 46 éléments combustibles


(figure 9) placés dans un caisson/casier constitué d’un bloc en
alliage aluminium percé d’alvéoles cylindriques.
Les éléments combustibles sont constitués par l’assemblage de
plaques combustibles cintrées maintenues par des raidisseurs
(figure 9).
Les plaques combustibles sont obtenues par le procédé picture-
frame qui consiste à colaminer à chaud un noyau fissile [un mélange
compacté de poudre uranifère (U-7Mo pour le RJH) et de poudre
d’aluminium] entre deux feuilles d’un alliage d’aluminium (AlFeNi
pour le RJH).
La conception des éléments combustibles est telle qu’ils peuvent
accueillir « indifféremment » :
b flux neutronique thermique
— les barres de contrôle ou de sécurité ;
— des petits dispositifs d’irradiation (de type capsule
Les flux sont exprimés en 1014 n/(cm2 · s) (moyenne axiale) essentiellement) ;
— des mandrins en aluminium si aucun des deux autres items
n’est requis.
Figure 8 – Flux neutroniques rapide et thermique
Vis-à-vis des préoccupations de sûreté :
— le RJH disposera de trois réelles barrières de confinement des
Ainsi, le RJH disposera de caractéristiques suffisantes (figure 8) matières nucléaires (la première : la gaine du combustible ; la
pour couvrir les besoins en irradiations liés au développement des deuxième : le circuit primaire (fermé) ; la troisième : l’enceinte de
filières nucléaires du futur. Il participera aux programmes de recher- confinement) ;
che visant à trouver des solutions pour éliminer les déchets nucléai- — l’évacuation de la puissance du réacteur se fera au travers de
res (transmutation...). Il participera à la qualification des nouveaux trois circuits en série, évitant ainsi tout risque de pollution de la
combustibles nucléaires aussi bien en fonctionnement normal source de refroidissement ;
qu’en fonctionnement accidentel. — compte tenu du caractère sismique du lieu d’implantation, le
bâtiment réacteur et le bâtiment des annexes nucléaires reposeront
Les principales caractéristiques du RJH sont données dans le probablement sur un radier unique posé sur des « patins
tableau 7. parasismiques ».

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— il possède un moment magnétique ;


— il a une longueur d’onde très intéressante ;
— il permet de voir les noyaux d’hydrogène en présence d’ato-
mes lourds (biologie).
Pour les neutrons thermiques, la vitesse moyenne v est de l’ordre
de 2,2 km/s, ce qui donne pour l’onde associée λ = 0,18 nm.
De tels neutrons sont bien adaptés à l’étude des structures cristal-
lines par diffraction, puisque leur longueur d’onde est du même
ordre de grandeur que les distances réticulaires dans les cristaux.
En utilisant une source de neutrons froids avec de l’hydrogène
liquide (20 K), on peut déplacer le spectre des neutrons et obtenir
des longueurs d’onde plus élevées λ = 15 nm. Avec une source de
neutrons chauds (1 500 K), on obtient des longueurs d’onde plus fai-
3 x 6 plaques cintrées bles, de l’ordre de 0,05 m.
Entrefer : 1,84 mm
L’emploi du neutron est incomparable pour :
Hauteur active : 600 mm
Combustible U-7Mo à 8 gU/cm3 — les études de physique des solides ;
Gainage : AlFeNi (cf. RHF) — les études du magnétisme à l’échelle de l’atome par interac-
tion de son moment magnétique avec celui de l’atome ;
— la détermination des structures cristallines par diffraction ;
Caisson monobloc en alliage d'aluminium
— la physico-chimie moléculaire et macromoléculaire ;
48 alvéoles (version à 600 kW/L)
2 réservées pour des dispositifs spécifiques
— la biochimie et la biologie moléculaires.
48 pour les éléments combustibles Le tableau 8 rappelle les possibilités des principaux réacteurs de
recherche fondamentale en service. Le concept de ces réacteurs
évolue en permanence de façon à offrir aux physiciens des perfor-
Figure 9 – Cœur de référence. Élément combustible 3 × 6 plaques
mances et des possibilités toujours plus élevées :
— flux thermiques plus importants ;
Vis-à-vis des préoccupations de non-prolifération et de la fin de
cycle du combustible : — meilleur spectre de neutrons, couvrant une large gamme
d’énergie ;
— l’enrichissement en 235U sera limité à 20 % ;
— meilleure définition du faisceau (amélioration de l’angle
— le combustible utilisé sera retraitable par l’usine COGEMA de
solide, diminution du bruit de fond) ;
la Hague.
— utilisation de conduits de neutrons : guides de neutrons de
longueur allant jusqu’à 100 m permettant d’augmenter considéra-
blement le nombre d’expériences installées autour du réacteur ;

4. Utilisations — utilisation de sources de neutrons froids et chauds.


Un réacteur d’une puissance de 1 à 10 MW permet déjà d’effec-
tuer certaines recherches dans le domaine de la diffusion et de la dif-
Les réacteurs de recherche jouent un rôle important en recherche fraction des neutrons (structures cristallines et magnétiques de
fondamentale, en recherche appliquée, dans la production de radio- corps composés, localisation d’atomes légers dans des structures
isotopes, les analyses et les contrôles divers et, enfin, dans la physi- complexes, mesure de sections efficaces, etc.), des études de physi-
que des réacteurs, l’enseignement et la formation. Chacun de ces que du solide sur les métaux purs ou les alliages.
domaines d’activité est passé en revue en indiquant pour chacun Cependant, un grand nombre d’expériences nécessitent des flux
d’eux les possibilités offertes en fonction du niveau de flux disponible. supérieurs à 1014 n/(cm2 · s) ; c’est pourquoi les réacteurs les plus
adaptés et les plus recherchés ont une puissance nettement supé-
rieure à 10 MW. Un exemple d’implantation des expériences est
donné sur la figure 10.
4.1 Recherche fondamentale
L’obtention de très hauts flux [supérieurs à 1015 n/(cm2 · s)] pose
cependant des problèmes parfois difficiles :
Ce domaine trouve, auprès des réacteurs expérimentaux, un — d’extraction de la puissance ;
champ de possibilités très ouvert par l’utilisation des faisceaux sor-
— d’échauffement dû aux rayons γ (proportionnel au flux de neu-
tis pour les recherches en physique de la matière condensée ou en
trons rapides) ;
physique nucléaire.
— d’évacuation de la puissance résiduelle à l’arrêt du réacteur
La réalisation de faisceaux intenses de neutrons parallèles per- (rayonnements β et γ des produits de fission) ;
met, en effet :
— de surempoisonnement xénon et samarium au moment des
— l’étude de la structure cristalline par diffraction des neutrons arrêts (proportionnel au flux avant l’arrêt) ;
dans les milieux solides ou liquides (spectrométrie à neutrons) ; — de variation locale de flux à puissance constante.
— l’étude des états d’énergie de la matière condensée (physique
nucléaire).
Le neutron est un moyen d’investigation sans équivalent dont
l’interaction avec la matière (diffusion, absorption, fission, etc.) pré- 4.2 Recherche appliquée
sente de nombreux avantages, car :
— il est neutre, donc pénètre et traverse bien la matière, alors que Elle concerne essentiellement le domaine des réacteurs de puis-
les rayons X, qui permettent également des études de ce genre, sont sance et s’effectue à l’aide de dispositifs d’irradiation placés dans le
très vite arrêtés ; cœur et contenant les échantillons à étudier.

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Tableau 8 – Principaux réacteurs dédiés à la recherche fondamentale


Flux thermique
Modérateur maximal dans le
Puissance Cœur et Facilités expérimentales
Réacteur Lieu et Réflecteur réflecteur
(MW) enrichissement (canaux)
réfrigérant
[en 1014 n/(cm2 · s)]
RHF Grenoble 57 1 élément D2 O D2O 12 canaux horizontaux dont 15,0
(France) monobloc, pla- 1 traversier et 4 inclinés,
ques à 93 % 10 guides de neutrons,
2 sources froides, 1 source
chaude (figure 11 a)
Orphée Saclay 14 8 éléments à H2O, Be D 2O 9 canaux horizontaux, 3,0
(France) plaques à 93 % 6 guides, 2 sources froides,
1 source chaude (figure 11 b)
FRJ-2 Jülich 23 25 éléments à D2 O D2O 9 canaux horizontaux dont 2,0
(Allemagne) plaques à 80 % graphite 1 traversier, 3 guides, 1 source
froide
BER-II Berlin 10 36 éléments à H2 O Be 11 canaux horizontaux, 1,2
(Allemagne) plaques à 90 % 5 guides, 1 source froide
JRR-3M Tokaï Mura 20 26 éléments à H2 O Be 9 canaux horizontaux, 3,0
(Japon) plaques à 20 % D2 O 5 guides, 1 source froide
HFBR Brookhaven 60 28 éléments à D2 O D2O 9 canaux horizontaux, 7,0
(États-Unis) plaques à 93 % 1 source froide (figure 11 c)
NBSR Gaithersburg 20 30 éléments à D2 O D2O 11 canaux horizontaux dont 4,0
(États-Unis) plaques à 93 % 2 traversiers, 7 guides,
1 source froide
PIK St-Petersbourg 100 18 éléments, H2 O D2O 10 canaux horizontaux dont 13,0
(en construction) (Russie) crayons à 90 % 6 inclinés, 10 guides,
(section uni- 2 sources froides, 1 source
forme) chaude
FRM-2 Garching 20 1 élément H2 O D2O 10 canaux dont 1 traversier et 8,0
(Allemagne) monobloc, pla- 2 inclinés, 8 guides, 1 source
ques à 93 % froide, 1 source chaude
ANSTO Sydney 20 8 éléments à H2 O D2O 8 canaux dont 2 équipés de 40
(en projet) (Australie) plaques à 20 % supermiroir

Spectromètre Multidétecteur Spectromètre


4 cercles à 800 cellules deux axes avec
bras mobile

Analyseur

Spectromètre
3 axes Cercle
Euler

Spectromètre
à neutrons polarisés

Spectromètre
à temps de vol

Sélecteurs
Échantillon
de neutrons
Monochromateur

Détecteur
Figure 10 – Implantation des expériences de
recherche fondamentale sur les canaux de Siloé

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Source chaude Hall des


H9 expérimentateurs
H8
IH4 Source froide
H6
IH2
Canal
H10 standard
Piscine
H5
H11 Canal
double
Bidon
réflecteur Hall des
guides
H4 à neutrons
IH3
Canal
H7 simple
H 2O
Vide
H3 annulaire
H13
Réflecteur
d'eau lourde
H2 Canal vertical
IH1 H12 H1

Source de démarrage
Caisson Zircaloy

Élément combustible
Réflecteur béryllium
Barre de contrôle

Élément combustible RHF Cœur Orphée

a réacteur RHF b réacteur Orphée

Barres de commande
Canaux verticaux
Cuve à eau lourde

Canaux horizontaux

Éléments combustibles
Canal horizontal de gros diamètre

c réacteur HFBR (High Flux Beam Reactor )

Figure 11 – Coupe horizontale des réacteurs RHF, Orphée et HFBR

4.2.1 Recherche et développement grammes de recherche et de développement ou des programmes de


sûreté et de qualification des procédés et des matériaux.
Le réacteur de recherche permet, par l’expérimentation d’échan- L’étude sous rayonnements de ces matériaux peut se faire sur les
tillons de combustible, de gaine, mais aussi de structures et de plans de :
composants de réacteurs (cuve et équipements internes, instrumen- — l’étude du comportement des combustibles, gaines, assembla-
tation, protections, absorbants, etc.), de bâtir et de réaliser des pro- ges, etc., dans les conditions normales de fonctionnement prévues ;

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— l’étude du comportement en conditions accidentelles (transi- C’est ainsi que toute une technologie spécifique s’est progressive-
toires de puissance, de débit du réfrigérant...) ; ment développée auprès des réacteurs. Il s’agit de la conception et
— la sélection des matériaux candidats et la qualification des de la réalisation de capsules et de boucles instrumentées, adaptées
matériaux sélectionnés. à l’étude des filières de réacteurs nucléaires de puissance.
Dans un réacteur de recherche, ces essais ne peuvent se faire sur
■ Capsules
un grand nombre d’éléments ou d’échantillons identiques, d’où un
manque de résultats statistiques. Cependant, ils présentent des Ce sont des dispositifs dont le fluide de refroidissement (gaz, Na-K,
avantages importants par rapport aux essais qui peuvent être réa- etc.) est statique ; les échanges à travers les différentes enveloppes
lisés directement dans le cœur de la centrale de puissance : de l’expérience se font par conduction vers la piscine du réacteur.
— l’instrumentation des échantillons peut être très poussée Les capsules à gaz permettent d’étudier par exemple le comporte-
(mesures de pression, de température, de flux, etc.), permettant ment général des combustibles sous flux, la corrosion du graphite
ainsi de nombreuses études sur la tenue du combustible, les gaz de dans du dioxyde de carbone, l’effet de la production d’hélium dans
fission (mesure du gonflement, interaction pastille-gaine, etc.) ; les matériaux borés, etc.
— les différents types d’essais de simulation peuvent y être réa-
Les capsules remplies de Na-K (eutectique Na-K liquide à tempé-
lisés sans interférence avec le réacteur (rampes et cyclages de puis-
rature ambiante dont la conductivité thermique est élevée) offrent
sance, ruptures de gaine, etc.) ;
des conditions de température bien homogène et permettent d’étu-
— les risques sont moindres ; aussi les conséquences d’un inci- dier le comportement de matériaux de gainage, l’évolution des
dent, toujours possible, y sont plus faibles (incident toujours pris en dimensions des crayons combustibles, etc.
compte dans la conception de l’expérience, les structures étant con-
çues pour contenir ses effets sur le réacteur et ses annexes) ; Les capsules à eau bouillante permettent de créer un milieu très
— les flux plus importants que dans les centrales permettent de proche de celui des réacteurs à eau ordinaire. Leur simplicité de
réduire la durée des irradiations dont l’objectif est d’accumuler des mise en œuvre et d’exploitation les rend très attrayantes pour de
doses de neutrons ; nombreux essais de comportement des crayons combustibles des
— la réirradiation est possible : cette technique consiste à irra- réacteurs à eau (rampes de puissance, cyclages, etc.).
dier, dans des conditions particulières, un combustible ayant déjà L’enveloppe extérieure des capsules est souvent double : le main-
séjourné dans un réacteur de puissance en y ajoutant une instru- tien d’une pression de gaz dans l’espace entre les deux enveloppes
mentation appropriée. permet de s’assurer de la bonne étanchéité de l’expérience (ce qui
Selon leur puissance, les réacteurs permettent des études plus ou est primordial si la capsule contient du Na-K ou du Na). La composi-
moins poussées : tion de ce gaz, plus ou moins conducteur (He ou N2 généralement),
permet de faire varier à volonté la température interne du dispositif.
— un réacteur de 10 à 25 MW peut convenir pour les tests de
matériaux de structure, de protection ou d’absorbants, tels que par Certaines capsules perfectionnées comme Décor (figure 12 a) per-
exemple l’étude du fluage, de la croissance, du gonflement, de la mettent de réaliser une profilométrie, c’est-à-dire une mesure du dia-
densification des aciers inoxydables, du zirconium, de l’aluminium mètre des crayons combustibles expérimentaux directement pendant
et de leurs alliages ; l’irradiation. D’autres offrent la possibilité de réaliser des cyclages et
— un réacteur de 25 à 100 MW convient pour la majorité des des réglages de puissance comme Aquilon (figure 12 b) par :
essais de combustibles et des matériaux de structure les plus divers. — avance vers le cœur ou recul grâce à des dispositifs de
Plus que de mettre au point des matériaux nouveaux, il s’agit sur- déplacement ;
tout aujourd’hui de comprendre et d’analyser en profondeur les dif- — diminution du flux de neutrons sur le matériau à irradier grâce
férents phénomènes induits par les rayonnements. Ces à un écran neutrophage en hélium 3.
connaissances sont nécessaires pour améliorer les performances
des réacteurs de puissance et surtout pour les rendre plus sûrs. ■ Boucles
Pour une bonne interprétation des études de combustibles, il Les boucles à gaz, à eau ou à sodium, placées éventuellement sur
s’agit donc d’assurer une bonne représentativité neutronique et un dispositif de déplacement, permettent de tester des combusti-
thermohydraulique des expériences d’irradiation. bles dans des conditions d’environnement (milieu, température,
pression, etc.) qui sont celles des réacteurs de puissance.
Pour les matériaux, les volumes d’irradiation nécessaires sont
plus faibles que pour les combustibles, mais il faut disposer de flux Le refroidissement des échantillons s’opère par circulation du
rapides importants afin notamment de pouvoir effectuer des études fluide : pompe et échangeur sont disposés soit en piscine, soit dans
de durée de vie des matériaux soumis à de fortes doses (par exem- une casemate blindée à l’extérieur de la piscine. Ce fluide peut être
ple, équipements internes des cuves de REP). un gaz (CO2, He), un liquide (eau sous pression) ou un métal fondu
(Na, Na-K). L’évacuation de puissance beaucoup plus importante
que dans les capsules peut ainsi être couramment réalisée.
4.2.2 Irradiation des matériaux
4.2.2.2 Choix du dispositif et déroulement des expériences
4.2.2.1 Dispositifs d’irradiation d’irradiation
Le but est de réaliser le plus simplement possible un dispositif Les problèmes spécifiques posés par l’utilisation de ces différents
pour irradier, dans des conditions données, des éprouvettes de dispositifs en réacteurs de recherche sont nombreux tels que, par
matériaux ou du combustible tout en respectant : exemple, celui des variations de flux dues à la combustion des
— des conditions de flux ; noyaux fissiles initiaux et à la formation de nouveaux noyaux fissi-
— des conditions de température ; les (239Pu, 233U), aux mouvements des barres de commande, aux
— des conditions mécaniques (traction, pression, cyclage, etc.) ; poisons consommables, etc.
— des contraintes d’environnement ; Les installations sont adaptées aux problèmes à traiter et à la sou-
— des contraintes de sûreté et de sécurité ; plesse d’exploitation souhaitée. Ainsi, pour l’étude des éléments
— des contraintes de coût et de délai. combustibles des réacteurs à eau pressurisée, plusieurs boucles
En effet, le dispositif doit être fiable et présenter la sûreté maxi- existent dans le réacteur Osiris :
male, de façon à ne pas interférer avec les structures du réacteur et — la boucle Isabelle (figure 13) permet de tester 4 crayons
des expériences voisines, en cas d’incident. combustibles simultanément et les liaisons souples entre les parties

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■ Préparation des irradiations


Diamètre Pour cela, il faut :
(mm)
— faire les calculs neutroniques (l’utilisation d’un réacteur
9,8 Avant maquette tel qu’Isis près d’Osiris à Saclay est parfois utile, pour
Pendant
Après vérifier expérimentalement les résultats des calculs), les calculs
thermiques et les calculs d’évolution des échantillons qui caracté-
risent chaque expérience ;
— faire l’étude de la sûreté de chaque expérience, afin qu’un acci-
9,5
dent éventuel soit confiné ou sans conséquence sur le cœur du réac-
teur ou les expériences voisines, et n’entraîne pas de relâchement
Longueur dangereux de radioactivité dans l’enceinte du réacteur ou à
100 300 (mm) l’extérieur ;
Calibres Calibres
— concevoir et construire le dispositif en y intégrant les mesures
Pastilles REP irradiées nécessaires au suivi de l’irradiation et en réalisant les conditions
permettant d’assurer la représentativité de l’expérience.
Jauges de Palpeurs
contrainte ■ Mesures en réacteur
Elles doivent permettre de suivre convenablement l’irradiation.
a dispositif Décor : mesure in situ du diamètre d'un crayon Ces mesures, avec leurs sécurités associées pour une mise en
combustible au cours de son irradiation
sûreté de l’expérience et/ou du réacteur, peuvent être nombreuses.
Elle sont saisies sur ordinateur et traitées en temps réel ou différé
4 800 mm suivant les besoins :
Accéléromètre
Capteur d'émission
— mesures de flux par collectrons (capteurs basés sur la mesure
acoustique
champs
Convertisseur de charge
du courant émis par la collection des rayons β lors de la réaction des
collectrons neutrons sur un métal, par exemple l’argent) ou à l’aide de détec-
Eau aller
Eau retour teurs à seuil (Ni, Cu, etc.) ;
Thermocouples
— mesures de température, de débit, de puissance ;
— mesure de pression ;
— analyse des produits de fission relâchés ;
— mesures dimensionnelles des échantillons, etc.
Porte-crayon
Porte crayon
Double enveloppe ■ Examens spécialisés pendant et après l’irradiation
Panier porte-coupelles
porte coupelles
Pour procéder à ces examens, les dispositifs d’irradiation sont
retirés du cœur et installés sur des bancs de mesure spécialisés, le
Hydrophone
temps nécessaire à leur examen, et rechargés ensuite dans le cœur
Fourreau amovible pour poursuivre leur irradiation. Selon les besoins, divers examens
équipé de
peuvent être pratiqués :
collectrons
thermocouples — étude du comportement et de la migration des produits de fis-
calorimètre
Aspiration d'eau sion à l’aide d’un banc de gammamétrie immergé dans la piscine ;
— visualisation des échantillons irradiés à l’intérieur des capsules
Crayon combustible long
ou des boucles grâce à un dispositif de neutronographie (§ 4.3.3)
immergé qui permet de suivre, sans démontage, l’évolution des
irradiations, qu’elles soient de matériaux de structure ou de
Plan
Cœur combustible ;
du
— examen sous l’eau par courants de Foucault, profilométrie et
médian réacteur Boîte à
caméra vidéo des crayons combustibles testés ;
déplacement — examens destructifs en cellules chaudes, après découpage des
échantillons pour constater les effets de l’irradiation (variation de
0 mm dimensions, mesure des dépôts de produits de fission, metallogra-
Grille phies, etc.).

Schéma de la partie
basse instrumentée 4.3 Production et activités diverses

b capsule Aquillon utilisée pour effectuer des rampes de puissance 4.3.1 Production des radioéléments
sur des crayons combustibles REP
La plupart des réacteurs expérimentaux produisent des radioélé-
Figure 12 – Exemple de capsules d’irradiation ments artificiels. Cette production très variée intéresse beaucoup de
domaines : médecine, biologie, agriculture, industrie, hydrologie,
contrôles non destructifs.
en pile et hors pile offrent une grande facilité de chargement et de Leur utilisation dans le domaine médical est en forte expansion.
déchargement des échantillons ; Aujourd’hui, on compte plus de 30 millions d’actes médicaux fai-
sant appel aux isotopes chaque année (dans le monde).
— la boucle Irène, plus puissante, permet de tester jusqu’à
9 crayons à la fois. Dans l’imagerie nucléaire, utilisée pour diagnostiquer des mala-
dies courantes, comme les maladies du cœur et le cancer, les rayons
Trois étapes sont nécessaires pour mener à bien de telles expé- gamma émis par les radio-isotopes (tableau 9) sont détectés à l’aide
riences. de caméras gamma.

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Sortie tableau de commande


et calculateur

Condenseur avec Réserve d'eau dégazée


contrôle de niveau avec contrôle de niveau
Niveau d'eau

Sécurité Capteur
Effluents gazeux en pression de pression

Capteur de pression Pressuriseur Effluents gazeux

Épingle électrique Circuit Effluents


Liaisons lame
souples de gaz liquides
Traversée piscine Bac de récupération
avec contrôle de niveau
Mesure Débimètre
Effluents liquides
et contrôle Pompes
de débit et ∆p volumétriques
de pression
de la boucle Échangeur à
eau industrielle

Capteur
de pression

Venturi
Circuit lame de gaz
Crayons combustibles à tester (4) Contrôle activité
des mesures physiques
Cœur
Détection de rupture
de gaine
Boîte à gants
pour prélèvements
He N2
Pressurisation des liaisons
et du circuit lame de gaz

Tuyauterie des circuits primaires

Capsule d'irradiation dans le cœur

Caisson contenant le cœur

Boucle Isabelle

Collimateur en neutronographie

Figure 13 – Boucle Isabelle : schéma de principe et implantation dans le réacteur Osiris

On voit le rôle très important joué par 99mTc essentiellement pro- avec A nombre de masse de l’isotope radioactif,
duit dans les réacteurs de recherche. I (Bq) activité radioactive,
Par ailleurs, ceux-ci interviennent également dans la production
T (s) période radioactive,
de sources pour la radiothérapie notamment 192Ir.
m (g) masse de l’isotope radioactif,
La période de ces radioéléments est suffisamment longue pour
qu’ils puissent être transporté d’un pays à l’autre. Il existe un mar- t1 (s) temps d’irradiation,
ché mondial des radioéléments pour la médecine. t2 (s) temps de désactivation (depuis sa sortie de
S’agissant des éléments à vie courte qu’il faut fabriquer près de pile),
leur lieu d’emploi, à un instant donné, l’activité radioactive d’un
matériau irradié est donnée par la formule : Φ [n/(cm2 · s)] flux de neutrons dans lequel a été plongé le
matériau,
0 ,693t 0 ,693t
I = 4 ,18 × 10 23 -------- Φσ 1 – exp  -------------------1- exp  -------------------2-
m σ (cm2) section efficace d’activation du matériau
AT  T   T  irradié.

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bles (10−1 à 10−4 g). C’est le cas des Cl, Mn, Cu, Co, Ni, W, Ta, etc., qui
(0)

Tableau 9 – Principaux isotopes utilisés pour le diagnostic sont le plus fréquemment dosés dans les corps de haute pureté.
L’analyse par activation permet aussi la qualification rapide et
Organes Isotopes Maladie recherchée complète d’échantillons de minerais d’U, de Th ou autres.
Poumons 81mKr, 99mTc, 133Xe Embolies, affections L’utilisation de canaux pneumatiques (grande vitesse : 10 à 20 m/s)
respiratoires ou hydrauliques (vitesse moyenne : 1 m/s) reliant directement le
Os 99mTc Tumeurs, infections, réacteur aux laboratoires de comptage permet l’étude et la mesure
fractures osseuses des produits à période courte.
Thyroïde 99mTc, 123I, 131I Hyper/hypothyroïdie, Un réacteur de 1 à 10 MW permet de gagner sur la sensibilité
tumeurs générale et de jouer de façon plus fine sur le temps d’irradiation,
99mTc, 111In, 131I
tout en libérant les emplacements aux flux élevés pour d’autres uti-
Rein Fonctions rénales lisations. On peut ainsi gagner une décade sur le seuil de détection
Cerveau 99mTc, 123I, 133Xe Embolies, débit san- des corps à période très courte.
guin, tumeurs, Patholo-
gies neurologiques
Foie, pancréas 99mTc, 111In Tumeurs
4.3.3 Neutronographie
Abdomen 67Ga, 99mTc Tumeurs La technique du contrôle non destructif par neutronographie est,
Sang 99mTc, 111In Infections, volume san- dans son principe, analogue à la technique de la gammagraphie et
guin et circulation san- de la radiographie aux rayons X, les rayons gamma ou X étant rem-
guine placés par un faisceau de neutrons issus du cœur du réacteur. En
Cœur 82Rb, 99mTc, 201Tl Fonction et viabilité utilisant des rayons X ou gamma, il est difficile de distinguer des élé-
myocardiques ments qui ont des nombres atomiques voisins ainsi que d’analyser
de fortes épaisseurs d’éléments lourds et de faibles épaisseurs
Tous les organes 67Ga, 99mTc, 111In, Tumeurs d’éléments légers, car l’atténuation des rayons X et gamma dans la
201Tl matière est d’autant plus forte que le nombre atomique des élé-
ments rencontrés est élevé (interaction avec le cortège électronique
des atomes). En revanche, les sections efficaces d’interaction des
Pour un corps déterminé, A, T et σ sont connus et fixés ; il est pos- éléments aux neutrons thermiques sont très irrégulières, elles sont
sible d’obtenir une activité par gramme plus grande en augmentant fortes pour les éléments légers (H, Li, Be, B, etc.) et plutôt faibles
le flux de neutrons ou le temps d’irradiation t1 ou les deux en même pour de nombreux éléments lourds (U, Th, Bi, Pb, Pt, etc.) car les
temps. Un temps d’activation voisin de 2 périodes de l’isotope neutrons interagissent avec les noyaux des atomes.
désiré permet d’avoir une activité spécifique suffisante (70 % de
l’activité à saturation) pour les emplois habituels. Il faudrait Les possibilités offertes par la neutronographie pour l’examen de
7 périodes pour approcher la saturation à 1 % près, ce qui représen- faibles épaisseurs de corps hydrogénés est illustrée par l’image
terait peu d’intérêt devant le coût de fabrication. neutronographique d’une fleur (figure 14). On notera la sensibilité
de la méthode et la finesse du cliché. La neutronographie et la radio-
En conséquence, quelques heures suffisent pour obtenir, dans un graphie sont donc très complémentaires et possèdent chacune leur
flux supérieur à 1013 n/(cm2 · s), du manganèse 56, du brome 82, de domaine d’utilisation propre.
l’or 198 ou du lanthane 140. Un flux de 1014 n/(cm2 · s) permet la
fabrication en quelques jours de sodium 24, de potassium 42 ou de Un faisceau de neutrons traversant un objet à examiner subit
mercure 197. Ainsi, de nombreuses sources peuvent être produites donc des atténuations qui varient d’un point à un autre selon la
pour la plupart des applications courantes dans les réacteurs de nature et l’épaisseur des éléments rencontrés. On peut ainsi obtenir
puissance égale à environ 10 MW. une image interne de l’objet à condition de disposer d’un faisceau
de neutrons thermiques bien collimaté et d’éliminer les rayons
Une douzaine de jours d’irradiation dans un flux de
gamma parasites qui pourraient impressionner le cliché. Cela
3 × 10 14 n ⁄ ( cm 2 ⋅ s ) permet l’obtention d’une quantité convenable nécessite la présence d’un long collimateur (1 à 3 m) dont le nez
d’iode 131 (période de 8,04 j) à partir du tellure tandis que du molyb- vient près du cœur du réacteur, afin de disposer d’un flux intense.
dène irradié dans les mêmes conditions fournit du technétium 99m Ce collimateur, blindé par du carbure de bore, par exemple, pour
métastable (période 6 h). Utilisé en remplacement de nombreux iso- absorber les neutrons parasites qui apporteraient du flou à l’image,
topes pour les usages médicaux, le technétium 99m est de plus en et empli d’hélium, conduit les neutrons sur l’objet à étudier.
plus produit à partir de molybdène 99 obtenu par fission de
l’uranium 235. On irradie dans ce but pendant une centaine d’heu-
res des cibles en alliage UAl à très haut enrichissement en
uranium 235.
Les éléments combustibles irradiés déchargés du cœur des réac-
teurs peuvent servir également : leur fort taux d’irradiation en fait
des sources possibles de rayonnements intenses de rayons γ pour
diverses utilisations (polymérisation de résines, etc.).

4.3.2 Analyse par activation

Le lecteur pourra se reporter utilement à l’article [P 2 565] Analyse


par activation dans le traité Analyse et Caractérisation.
La composition d’échantillons quelconques peut se déterminer faci-
lement en profitant de la grande variété des résultats fournis par l’acti-
vation des isotopes naturels. Un réacteur de puissance relativement
faible (100 kW à 1 MW) délivrant un flux de 1012 n/(cm2 · s) permet
d’évaluer avec une bonne précision des quantités d’impuretés très fai- Figure 14 – Neutronographie d’une fleur

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Un filtre en plomb ou en bismuth permet éventuellement de — tracé de cartes de flux de neutrons ;


réduire considérablement les rayonnements gamma. Pour recueillir — mesures d’activités (relatives et absolues) ;
l’image fournie, un convertisseur, généralement en dysprosium 164 — mesures de périodes radioactives ;
(période courte de 140 min et émetteur surtout de rayonnements
bêta), est disposé derrière l’objet à observer. Tous les neutrons ayant — mesures d’absorption des rayonnements, etc.
traversé l’objet y sont absorbés ; après son irradiation, dont le Toutes ces mesures nécessitent l’emploi d’appareillages très
temps est fonction de l’intensité du faisceau de neutrons incidents, variés (cf. l’article traitant les Détecteurs de rayonnements).
il est prélevé et placé sur un film photographique. Les rayonne-
ments bêta vont impressionner le film proportionnellement à leur
nombre, donc à celui des neutrons reçus.
Une autre technique permet de s’affranchir des rayonnements
gamma : le dysprosium est remplacé par un dépôt de quelques
5. Conclusions
micromètres de bore 10 ou de lithium 6 sur une feuille de
nitrocellulose : les rayonnements alpha émis par ceux-ci provoquent
dans cette dernière des dommages rendus visibles dans un bain de Pour plus de renseignements le lecteur pourra se reporter aux
soude ou de potasse qui révèle les variations d’épaisseur que l’on références bibliographiques [2] à [27].
peut observer par transparence sous une incidence particulière ou Pour ce qui concerne la réglementation et la sûreté spécifiques
dupliquer par projection. Cette seconde manière de faire permet de des réacteurs expérimentaux, le lecteur devra se reporter à l’enca-
s’affranchir de toute activation et est insensible aux rayonnements dré 1 dans lequel sont également cités les principaux producteurs et
gamma reçus ; le développement peut se faire en plein jour. distributeurs mondiaux de radioéléments articiels.
La neutronographie permet donc de suivre l’évolution d’un maté- Depuis les débuts de l’énergie nucléaire, après la Seconde Guerre
riau, en particulier celle des combustibles très actifs, en cours d’irradia- mondiale, les réacteurs de recherche ont joué un rôle primordial et
tion. L’utilisation d’une pile piscine offre alors de grandes commodités. continu dans le développement des sciences et des techniques
En outre, la neutronographie pénètre de plus en plus dans le nucléaires. Cependant, depuis quelques années, les besoins de la
domaine industriel non nucléaire, en particulier celui des technolo- recherche fondamentale et appliquée ont évolué et les attitudes vis-
gies de l’aéronautique et de l’espace. Elle est devenue un des à-vis de l’énergie nucléaire ont aussi beaucoup changé dans cer-
moyens non destructifs indispensables pour contrôler la qualité des tains pays, modifiant en conséquence la situation des réacteurs de
dispositifs pyrotechniques (boulonnerie explosive, etc.) équipant les recherche et d’essais dans le monde.
lanceurs. Un petit réacteur totalement consacré à cet usage a été Après une phase de développement accéléré, notamment entre
mis en service récemment aux États-Unis. 1960 et 1970, pendant laquelle 270 réacteurs de recherche ont été
construits, on assiste à une décroissance du nombre des réacteurs
en service. Cette situation résulte :
4.3.4 Dopage de silicium
— de l’absence d’un programme clair quant au renouvellement
des centrales en service qui justifierait le maintien d’un potentiel
La réalisation des composants utilisés en électronique industrielle
expérimental important pour la sélection, la qualification de nou-
(thyristors, diodes) exige l’utilisation de silicium ayant une excel-
veaux matériaux et combustibles. Quant à l’amélioration des perfor-
lente distribution de résistivité que les méthodes traditionnelles de
mances et de la sûreté des parcs existants de centrales nucléaires,
dopage par voie chimique ne permettent pas d’atteindre.
ces programmes ne représentent pas un volume suffisant pour
L’irradiation neutronique permet de générer uniformément, dans assurer un plan de charge suffisant des réacteurs de recherche ;
le réseau de silicium, du phosphore 31 par la réaction :

( n, γ ) (β) Encadré 1 – Réglementation et producteurs et distributeurs


30
Si → 31
Si → 31P de radioéléments artificiels

Par cette méthode, les variations de résistivité radiale dans les lin- ■ Réglementation
gots monocristallins de silicium, dont le diamètre peut aller jusqu’à Sûreté des Installations Nucléaires en France. Recueil des tex-
127 mm (5 pouces), sont inférieures à 1 %. tes réglementaires. Ministère de l’Industrie et du Commerce
La période du 31Si étant de 2,6 h, l’activité résiduelle des lingots Extérieur, Ministère de l’Environnement - 2e édition, janv. 1992
est très au-dessous des normes internationales pour les matériaux (Organisation générale des pouvoirs publics, textes à caractères
se trouvant dans le domaine public, après quelques jours de technique, Règles fondamentales de Sûreté).
désactivation en piscine. Sûreté Nucléaire. Le contrôle par les pouvoirs publics en
France. Ministère de l’Industrie et du Commerce Extérieur. Édi-
tion déc. 1991.
4.4 Enseignement, formation, physique Recueil de législation et de réglementation des activités
nucléaires, tomes I et II, CEA, Direction Juridique et des relations
des réacteurs Commerciales.
Safe operation of research reactors and critical assemblies,
Un réacteur de 100 kW est généralement très bien adapté pour ce AIEA, Safety Series n° 35, Vienne, 1984.
genre d’utilisation. Citons, à titre d’exemple, les réacteurs français ■ Radioéléments artificiels. Principaux producteurs et distribu-
Ulysse (Saclay), Minerve et Azur (Cadarache). On peut y effectuer des teurs mondiaux
expériences et des travaux pratiques dans les domaines suivants :
CIS Bio International (France)
— mesures de masse critique, approche sous-critique ;
— mesure diverses de réactivité ; IRE (Belgique)
— étalonnages de barres de commande ; Amersham (Grande-Bretagne)
— détermination de caractéristiques, telles que temps de vie des Nordion (Canada)
neutrons, proportion de neutrons retardés, effets de température et
de vide ; Mallinckrodt (États-Unis)

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— de l’âge des réacteurs de recherche dont on ne peut pas pro- sources à spallation tandis que les réacteurs d’irradiation demeurent
longer la durée de vie au-delà de 40-45 ans maximum sans engager incontournables pour le développement de l’énergie nucléaire.
une jouvence, fort coûteuse, de l’installation ;
— du coût de plus en plus lourd d’exploitation et du maintien en Le coût de ces installations se situe entre 300 et 600 M€. Les nou-
service des installations, notamment pour prendre en compte des veaux réacteurs présentent la caractéristique d’être pluridisciplinai-
exigences de sûreté de plus en plus contraignantes. res. Même les réacteurs tels que FRM-2 (Allemagne) ou le réacteur
Ce constat est surtout vrai dans les pays industrialisés. de l’ANSTO (Australie), pourtant présentés comme des outils pour
Dans les pays moins développés, on constate une volonté de con- la recherche fondamentale, sont conçus, dès l’origine, pour produire
server les petits réacteurs car ils sont utiles à la formation et à des radioéléments, du silicium dopé... et offrir des services particu-
l’enseignement. Certains ont acquis, depuis 10 ans, des réacteurs liers tels que le traitement de certaines tumeurs par BNCT (Boron
pour le développement de l’énergie nucléaire (en Indonésie, en Neutron Capture Therapy).
Corée...), dans la perspective d’un démarrage proche d’un pro-
gramme de réalisation de centrales électronucléaires. Le réacteur Jules Horowitz sera probablement le seul réacteur à
Les réacteurs dédiés à la recherche fondamentale restent des outils pouvoir réaliser des irradiations de combustibles et de matériaux en
privilégiés pour l’étude de la matière condensée et pour l’étude des Europe après 2010-2015. De fait, il aura la double charge de poursui-
molécules complexes en biologie, mais ces recherches peuvent éga- vre les améliorations des performances des réacteurs existants et
lement être menées à bien avec des neutrons produits à partir de celle de préparer les réacteurs du futur.

Références bibliographiques

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2000 – nov.-déc., édition SFEN. Auteurs (par Radioéléments. Analyse par activation
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ordre d’apparition dans les différents articles
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composant le dossier) : P. LEDERMAN, J-
during the recent years. Proceedings of AIEA [21] Usages bénéfiques et production des isoto-
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X. BRAVO, A. BALLAGNY, M. ROMMENS, Ouvrage rédigé sous la direction de C. Fisher,
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30/09/2008

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