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• La guerre des missels a déjà eu lieu

lonne vertébrale de la célébration


eucharistique dans l’Église catho-
La guerre des missels a déjà eu lieu lique de rite latin. Pour le moins,
cela mérite le respect, et il sem-
ble évident qu’il ne peut être pure-
ment et simplement rangé au pla-
par l’abbé Didier BONNETERRE card des livres proscrits. Le missel
dit de Paul VI, lui, même si son âge
n’est pas aussi vénérable, est cé-
L’introduction d’un nouveau missel après 2000 ans d’Eglise a été un lébré depuis trente ans par l’im-
coup de force longuement préparé par des hommes et une famille mense majorité des prêtres et la
d’esprit. L’abbé Bonneterre retrace les principales étapes et évoque les quasi-totalité des évêques catho-
acteurs de la guerre des missels, une guerre qui ne fut autre chose liques de rite latin, à commencer
qu’une adaptation du Cheval de Troie. par celui de Rome : comment peut-
Cette conférence donnera au lecteur une idée de la qualité on l’exclure totalement de l’Égli-
des interventions faites au Congrès théologique se d’aujourd’hui ? Mais il y aurait
de SiSiNoNo, en avril dernier. aussi des progrès à faire dans la
Les Actes de ce congrès sont dès à présent disponibles. façon dont il convient de célébrer
ce nouvel Ordo Missæ. Il faudrait
pour cela tenir davantage compte
Chers participants à ce congrès, « Comment, alors que l’évangé- de la constitution Sacrosanctum
lisation est urgente, dépasser la Concilium de Vatican II et de la
Émergeant laborieusement du querelle liturgique ? D’abord, en lettre apostolique de Jean-Paul II
ministère paroissial, la vieille ami- excluant l’exclusion. publiée le 4 décembre 1988 à l’oc-
tié de M. l’abbé du Chalard m’ap- « Les divisions actuelles, au casion du 25e anniversaire de cette
pelle à me replonger dans mes loin- sein de l’Église, au sujet de litur- constitution. L’élimination presque
taines études sur le Mouvement gie, sont évidemment affl igean- totale des chants latins (Gloria,
liturgique. Je le ferai d’autant plus tes : alors que la tâche d’évangé- Credo, Sanctus, Agnus), par exem-
volontiers que la querelle des mis- lisation est urgente et immense, ple, n’est pas conforme aux vœux
sels est au centre de l’actualité re- et les évangélisateurs si peu nom- de l’Église, ni même à celui d’une
ligieuse. J’en voudrais pour preu- breux, il y aurait mieux à faire que partie des fidèles.
ve, et pour témoignage significatif, d’user nos forces dans ces querel- « Retrouver l’esprit du concile.
qu’un évêque de France, connu les. Mais aussi elles témoignent de Derrière le problème des ri-
pour sa modération et son esprit dit l’importance que l’on accorde, de tes, il y a chez la plupart des fidè-
conservateur, confiait à L’homme part et d’autre, à la liturgie, même les (et parfois même chez les prê-
nouveau un texte presque pathé- si l’immense majorité de la popula- tres), un problème de formation
tique appelant à la paix des braves tion demeure totalement étrangè- spirituelle et de compréhension de
les fidèles attachés à l’un ou l’autre re à ces problèmes, et cela même ce qui est vraiment célébré dans
missel dit romain : Non à la guerre au sein de la petite minorité que les sacrements, la dimension pro-
des missels, titrait Mgr Lagrange, représentent les catholiques pra- prement surnaturelle et théologa-
évêque de Gap. Je le cite dans son tiquants. De plus, ces discussions le étant souvent étouffée par les
entier, tant son témoignage a va- amènent malgré tout un certain dimensions affective, psychologi-
leur d’archives dans la guerre des nombre de catholiques à être in- que et sociologique, diverses mo-
missels qui se révèle plus violen- formés et à réfléchir, bien sûr à des des l’emportant sur les exigences
te que jamais. Que l’on se souvien- degrés divers, sur l’histoire de la li- fondamentales de la vie chrétien-
ne simplement de la passe d’armes turgie, sur sa signification et son ne en Église.
entre Mgr Raffi n, évêque de Metz, importance dans la vie de l’Église. « Pour certains, le concile sem-
et le cardinal Ratzinger (L’homme « Que faire cependant pour ble avoir essentiellement consis-
nouveau du 3 février 2002). avancer vers l’unité dans la véri- té à supprimer la soutane et le la-
té ? tin, alors qu’il n’a jamais parlé de la
Je cite intégralement l’inter- « Exclure les exclusions. Il soutane, et qu’il a demandé que la
vention de Mgr Lagrange, parue semble d’abord qu’il faudrait ex- langue latine garde une place dans
dans L’homme nouveau (du 17 fé- clure les exclusions. A en croire la liturgie (cf. par exemple § 36 et
vrier 2002 ) sous le titre : « Non à des spécialistes, le missel dit tri- 54 de la constitution sur la litur-
la guerre des missels ! » dentin, serait en fait mieux nom- gie). Dans sa lettre Novo millennio
mé grégorien. Il aurait donc été ineunte du 6 janvier 2001, Jean-
pendant environ 1 500 ans la co- Paul II demandait avec insistan-
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Nouvelles de Chrétienté Nº 76
Juillet-août 2002 •

ce : “En préparation au grand ju- siècle. J’ai essayé, il y a plus de ainsi, à côté des vrais succès du
bilé, j’avais demandé que l’Église vingt ans, une psychanalyse reli- Mouvement, qu’augmentaient en
s’interroge sur la réception du con- gieuse du Mouvement liturgique nombre et en gravité les dévia-
cile. Cela a-t-il été fait ? Aussi bien qui a amené le Novus Ordo Missae, tions.
parmi ceux qui se réclament ar- ce missel dit de Paul VI, apparu en
demment du concile Vatican II que 1969, sans que l’on s’y attende vrai- En Allemagne, Dom Herwegen
parmi ceux qui l’accusent de tous ment, et que l’on a imposé par la veut débarrasser le missel de ses
les maux, nombreux sont, en ef- force, et même la violence, à l’uni- éléments médiévaux pour le ra-
fet, ceux qui ne l’ont pas lu, ou qui vers catholique. J’étais alors re- mener à la pureté patristique. Plus
auraient grand besoin de le relire lativement libre de mon temps à grave, pour Dom Odon Casel, il y
de plus près...” Ecône, nommé professeur de li- a une justification théologique à
« Mais derrière ce qu’on appel- turgie après mon ordination sa- ce présupposé archéologique : le
le pudiquement les sensibilités di- cerdotale. Fideliter naissait, et le Moyen Age, et surtout l’âge baro-
verses, il y a très souvent, surtout cher abbé Aulagnier me demandait que, ont altéré le sens du mystère
en France, un fond culturel is- ma collaboration. La bibliothèque du culte chrétien. Laissons le pè-
su de notre histoire où des com- d’Ecône, admirablement aména- re Bouyer nous expliquer de quoi
plots politico-religieux ont cons- gée par Dom Guillou, était immen- il s’agit : « Disons d’un mot le con-
titué des familles d’esprit souvent se, vrai trésor pour tout esprit un tenu du “mystère”. C’est la réactua-
difficilement défi nissables (que si- tant soit peu curieux. lisation dans, par et pour l’Église,
gnifie exactement être de droi- de l’acte de Notre-Seigneur qui a
te ou être de gauche ?). Ce fut la Et quelle ne fut pas ma surpri- accompli notre salut, c’est-à-di-
Révolution française, puis l’op- se de voir apparaître, puis gran- re sa Passion et sa mort dans la
position des classiques et des ro- dir dès la première moitié du plénitude de leur effet ultime : la
mantiques, des monarchistes et XXe siècle une véritable force de Résurrection, la communication
des républicains, le ralliement, pression visant à réformer le mis- de la grâce salvatrice à l’humanité
l’ACJF, le Modernisme, le Sillon, sel romain que Mgr Lagrange re- et la consommation fi nale de tou-
l’Action française, l’Action catho- connaît vieux de quinze siècles. tes choses. Dans cette perspective,
lique, Pétain, les maquis, les prê- la propriété centrale de la liturgie,
tres ouvriers et tant d’autres affai- et donc ce qu’il faut saisir avant
res douloureuses que l’on a parfois I – Les pionniers du nouveau tout pour la comprendre, c’est le
oubliées, ou que l’on garde en silen- mouvement liturigque mode unique par lequel l’acte ré-
ce au fond de soi par crainte de ra- dempteur du Christ est renouve-
viver les querelles, mais qui cepen- Ce qui allait devenir le lé et distribué de façon permanen-
dant laissent des traces au fond Mouvement liturgique commen- te par l’Église. Bien comprendre
des cœurs. Au-delà des arguments çait bien, et sous les meilleurs ce mode, qui est entièrement dif-
historiques, philosophiques ou auspices avec les travaux de férent de celui d’une représenta-
théologiques, il y aurait à faire une Dom Guéranger et l’impulsion de tion théâtrale ou imaginative, ou
véritable psychanalyse, ou mieux saint Pie X. Il s’agissait, selon la de toute répétition physiquement
un sérieux examen de conscience, défi nition de Dom Rousseau, du réaliste, c’est la clef de l’intelligen-
en toute loyauté et sérénité, pour « renouveau de ferveur du clergé et ce de toute la liturgie dont la perte
mieux comprendre les autres... et des fidèles pour la liturgie 1. » Il fal- commença pendant le Moyen-Age.
se comprendre soi-même ! » lait, selon saint Pie X, « trouver le Et c’est cette clef que la période
véritable esprit chrétien à sa sour- baroque a si profondément perdue
Longue citation qui a valeur ce première et indispensable : la qu’elle n’a plus gardé sous son re-
d’aveu : on nous demande la paix participation active aux mystères gard que l’écorce vide de la litur-
entre un missel qualifié de grégo- sacro-saints et à la prière publique gie, une écorce d’autant plus déco-
rien vieux de 1 500 ans, et un mis- et solennelle de l’Église 2 . » rée et surchargée extérieurement
sel de trente ans d’âge. Il ne m’ap- que la réalité intérieure tendait à
partient pas ici de commenter Hélas bien vite, les premières être oubliée ». 3 De la sorte, « Dom
cette déclaration de Mgr Lagrange. déviations se fi rent sentir. Dom Casel nous a fait sortir des impas-
Je n’en retiendrai que l’appel à la Lambert Beauduin privilégia l’as- ses des théories post-tridentines
psychanalyse et à l’examen de pect apostolique de la liturgie sur du sacrifice 4 . »
conscience. son caractère essentiellement cul-
tuel. Il envisagea, avec son aven- Dom Pius Parsch, à côté d’étu-
L’évêque de Gap s’arrête à l’évo- ture de Chevetogne, de mettre des de valeur (comme L’année du
cation des problèmes franco-fran- au service de l’œcuménisme le Seigneur) entraîna la jeunesse al-
çais de politique religieuse du XXe Mouvement liturgique. Et c’est lemande dans une participation
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• La guerre des missels a déjà eu lieu
activiste à la messe. La présence plus célèbres membres, notons le fice offert par l’Église dans la cé-
du Seigneur dans sa parole deve- R.P. Agostino Béa, et surtout le se- lébration eucharistique. » L’action
nait de plus presque aussi impor- crétaire qui sera de toutes les com- de grâces, telle que la comprend
tante que sa présence eucharisti- missions, Annibale Bugnini, direc- l’oratorien, nous laisse déjà entre-
que. teur des Éphémérides liturgiques. voir les modifications de l’offertoi-
re que nous savons : « C’est une ac-
En France, les efforts conju- Et oui déjà, Mgr Bugnini qui, tion de grâces à Dieu pour tous ses
gués du jésuite Doncœur et des dès juillet 1946, était invité aux réu- dons, écrit-il, qui inclut en une seu-
dominicains Maydieu et Duployé nions du CPL (Centre de Pastorale le perspective tout l’ensemble de la
entraînèrent une succession d’ex- Liturgique), et qui confiait au Père création et de la Rédemption, mais
périences liturgiques et de publica- Duployé sur le chemin du retour : qui prend toujours comme point de
tions. Les Pères Congar et Chenu « J’admire ce que vous faites, mais départ le pain et le vin, représenta-
abritaient de leur aura intellectuel le plus grand service que je puis- tifs de toutes les choses créées, et
tous ces travaux. L’aboutissement se vous rendre est de ne jamais di- dont la consommation est l’occa-
de ces efforts fut la fondation, en re à Rome un mot de tout ce que je sion effective du repas comme de
1943, sous la présidence de Dom viens d’entendre »7. la célébration qui y est attachée. »
Beauduin, du Centre de pastora- Le mémorial envisagé dans sa re-
le liturgique, dont les travaux al- Ce furent la réforme du jeû- lation à la Parole de Dieu permet
laient être publiés par les éditions ne eucharistique, puis celle de la au P. Bouyer d’écrire, dans la tradi-
du Cerf. Semaine sainte, et une réforme des tion ouverte par Dom Pius Parsch :
rubriques et du bréviaire 8 . Les ex- « La célébration eucharistique tout
C’est encore Dom Beauduin qui perts romains ne réalisaient sans entière est aussi un mémorial (...)
met au point la méthode subversi- doute pas que toute réforme allait Il y a une connexion nécessai-
ve : dans le sens des éléments les plus re entre les deux parties de la sy-
• Faire découvrir et apprécier avancés du Mouvement liturgique, naxe chrétienne, entre les lectu-
tous les aspects de la liturgie anti- par le simple fait qu’elle ébranlait res de la Bible et le repas. Car les
que, et influencer la section histo- l’édifice. C’est ce qu’observait le lectures conduisent au repas (...)
rique de la Sacré congrégation des Père Duployé en France : « Si nous Et les lectures sont indispensa-
rites créée par Pie XI en 1930. parvenons à restaurer dans sa va- bles au repas, pour nous montrer
• Faire présenter toutes les leur première la vigile pascale, le de quelle manière il faut l’envisa-
requêtes de réformes par les évê- Mouvement liturgique l’aura em- ger, non pas comme un événement
ques, et les avancer sous raison porté ; je me donne dix ans pour d’aujourd’hui qui vaudrait par lui-
d’avantages pastoraux. cela 9. même, mais comme un événement
qu’on ne peut comprendre que par
C’était justement en 1956, tandis référence à une action décisive ac-
II – La préparation des réformes que le Père Louis Bouyer répandait complie une fois pour toutes dans
dans le grand public les thèses de le passé. Cette considération nous
L’encyclique Mediator Dei Dom Casel 10 . L’oratorien écrivait amènera, le moment venu, à voir
du 20 novembre 1947 n’allait dans La vie de la liturgie : « Ainsi que toute la messe n’est qu’une seu-
pas décourager les réforma- l’élément de “communion”, écrit- le liturgie de la Parole, qui a com-
teurs. L’admirable document il, signifie que l’Eucharistie est un mencé par parler à l’homme, qui lui
que l’on ne se lasse pas de reli- repas, un repas de communauté a parlé de façon de plus en plus in-
re allait être habilement dépas- dans lequel tous les participants time, qui fi nalement lui a parlé au
sé. C’est Mgr Martimort qui a no- sont rassemblés pour participer en cœur en tant que Parole faite chair,
té la remarque de Dom Beauduin : commun à des biens communs. » et qui maintenant, du cœur même
« L’encyclique Mediator Dei a don- Et un peu plus loin : « L’emploi de de l’homme, s’adresse à Dieu le
né dans le monde le branle à un es- ces termes sacrificiels ne vient Père par l’Esprit. » « Il est évident,
sor liturgique inouï 5 . » pas, comme on pourrait le suppo- ose-t-il encore écrire, que cet-
ser, de l’idée que la croix est repré- te notion équilibrée de la célébra-
Une commission pontifica- sentée d’une certaine manière à la tion eucharistique peut nous per-
le pour la réforme liturgique était messe. Tout au contraire, les don- mettre d’embrasser pleinement la
créée en 1948. Présidée par le car- nées historiques nous conduisent présence réelle du Christ dans son
dinal Micara, nous trouvons par- plutôt à penser que l’Église en est Église. En un mot, nous ne devons
mi ses membres le R.P. Fernando arrivée à appliquer habituellement pas concentrer notre contempla-
Antonelli dont la vie et l’œu- à la croix la terminologie sacrifi - tion exclusivement sur le pain et le
vre viennent d’être retracées par cielle parce que l’on comprenait vin sacramentels mais aussi bien
Nicola Giampietro 6 . Parmi les que la croix est au cœur du sacri- sur deux autres réalités (...) Sa pré-
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sence en tant que grand-prêtre de En attendant le Concile, Bénédiction, Ite missa est, plus
toute la hiérarchie. D’autre part, Jean XXIII se contenta de faire de dernier évangile, ni prières de
le Christ doit fi nalement être pré- aboutir les travaux de la commis- Léon XIII. Notre réformateur pas-
sent dans tout le corps de l’Égli- sion pour la réforme de la liturgie, se ensuite en revue tous les sacre-
se, car l’Église ne jouit de la pré- fondée en 1948. L’ensemble était ments et propose également des
sence eucharistique que pour être très en retrait des aspirations des réformes qu’il nous serait trop long
faite une dans le Christ et avec le leaders du Mouvement qui atten- de reprendre ici, mais qui sont en
Christ, par la célébration eucharis- daient avec impatience le Concile. substance les sacrements réfor-
tique, et spécialement par la con- Ce fut le motu proprio Rubricarum més de l’Église conciliaire 14 .
sommation de celui-ci dans le re- instructum du 25 juillet 1960 qui
pas sacré. » C’est dans la liturgie entra en vigueur le 1er janvier 1961. Pendant ce temps, se prépa-
juive que le P. Bouyer trouve cette rait le document de Vatican II sur
« conception équilibrée de la célé- Et c’est sans doute ici la liturgie. Il est regrettable, à no-
bration eucharistique ». La liturgie le lieu de citer l’ouvrage de tre avis, que le cardinal Stickler
des repas sacrés lui fournit la for- Dom Adrien Nocent, professeur n’émette aujourd’hui aucune ré-
mule eucharistique idéale : « Béni, à St-Anselme de Rome et lauréat serve sur ce texte du concile 15 .
sois-tu, Seigneur notre Dieu, roi de de l’Institut liturgique de Paris : Certes, de tous les schémas prépa-
toute éternité, qui as fait produi- L’avenir de la liturgie. Ce livre ratoires du concile, le seul à ne pas
re le pain à la terre ; Béni, sois-tu, montre l’état des travaux des réfor- avoir été repoussé fut celui sur la
Ô Seigneur notre Dieu, roi de tou- mateurs de l’ombre à cette époque. liturgie. C’est que l’aile progressis-
te éternité, qui as créé le fruit de la Don Nocent y énonce tout d’abord te ne pouvait qu’être satisfaite d’un
vigne. » Là encore, redisons-le, les le “principe et fondement” du cul- texte dont l’auteur principal était
studios Lercaro-Bugnini qui ont te nouveau : « Une grande variété le R.P. Bugnini, c.m., secrétaire de
réalisé la nouvelle messe ont trou- de célébrations serait donc permi- la Commission préparatoire de li-
vé leur scénario dans les ouvrages se autour du noyau central tou- turgie. Citons les noms de quelques
du Mouvement liturgique des an- jours respecté et qui serait cé- membres de cette commission :
nées 1950-1960. Le nouvel offertoi- lébré seul aux jours simples. » Dom Capelle, Dom Botte (il avait
re n’est que la reprise des bénédic- L’autel doit être face au peuple, soixante-dix ans en 1963), le cha-
tions juives tant vantées par le P. sans nappe en dehors des célébra- noine Martimort, l’abbé Hängi (an-
Bouyer. tions, les prières de préparation cien évêque de Bâle, alors profes-
doivent être simplifiées, les lectu- seur à Fribourg en Suisse), le Père
1956 connaît également la fon- res multipliées, la prière univer- Gy, l’abbé Jounel. Le président de
dation de l’Institut supérieur selle restaurée. L’offertoire, après cette commission était le vieux
de liturgie de Paris, dirigé par le Credo récité seulement le di- cardinal Gaetano Cicognani, qui
Dom Bernard Botte avec, pour manche, est très raccourci. Le cé- s’opposa de toutes ses forces à ce
sous-directeur, le Père Gy et pour lébrant ne fait qu’élever les oblats schéma qu’il jugeait très dange-
secrétaire, l’abbé Jounel. C’était en silence. Le calice est posé à reux. Le projet de schéma, pour
aussi l’époque des réunions inter- droite de l’hostie, la pale faculta- être présenté dans l’aula conciliai-
nationales d’études liturgiques qui tive, l’encensement rapide. Le la- re, devait être revêtu de la signatu-
réunissaient chaque année l’intel- vabo n’a lieu que si le célébrant a re du cardinal... Jean XXIII l’obli-
ligentsia liturgique du monde en- les mains sales, car « il faut éviter gea à le signer : « Plus tard, écrit le
tier 11. ce symbolisme facile et sans inté- P. Wiltgen, un expert de la commis-
rêt majeur ». L’Orate fratres est ré- sion pré-conciliaire de liturgie af-
cité à voix haute, ainsi que la se- fi rma que le vieux cardinal était au
III – Vers le concile Vatican II crète. Le Canon est dépouillé de bord des larmes, qu’il agitait le do-
toute prière d’intercession, des cument en disant “On veut me faire
per Christum Dominum nostrum, signer ça, je ne sais que faire”. Puis
La mort de Pie XII et l’élection moins de signes de croix et de gé- il posa le texte sur son bureau, prit
de Jean XXIII furent une explo- nuflexions, Canon récité à haute une plume et signa. Quatre jours
sion de joie dans les milieux du voix, même en langue vernaculai- plus tard, il était mort. »
Mouvement liturgique 12 : « S’ils re, Pater récité par tous ; on se ser-
élisaient Roncalli, tout serait sau- re la main à l’Agnus Dei, pendant C’est le 22 octobre 1962 que ce
vé : il serait capable de convoquer lequel a lieu la fraction de l’hostie. schéma préparatoire fut présen-
un concile et de consacrer l’œcu- La fraction de toutes les hosties a té dans l’aula conciliaire, et c’est
ménisme » confiait Dom Beauduin lieu à partir du même pain ordi- le 4 décembre 1963 que le nou-
au R.P. Bouyer 13 . naire. Communion sous les deux veau pape Paul VI promulgua la
espèces, debout et dans la main. constitution Sacrosanctum conci-
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• La guerre des missels a déjà eu lieu
lium. Elle avait été approuvée par Pères du Concile s’étaient pronon- groupes différents. Il y avait tout
2 151 voix contre 4 ! Pour une étu- cés sur les principes fondamen- d’abord une quarantaine de mem-
de détaillée de cette constitution, taux concernant la réforme liturgi- bres proprement dits – pour la plu-
nous renvoyons nos auditeurs aux que. La révolution liturgique était part cardinaux ou évêques – qui
ouvrages de MM. Pierre Tilloy et engagée ; la nouvelle liturgie issue avaient voix délibérative. Ensuite,
Jean Vaquié. Nous résumons sim- de la constitution allait être didac- il y avait le groupe des consulteurs,
plement ici, à leur suite, les carac- tique, évolutive, démocratique et beaucoup plus nombreux, chargés
téristiques de cette constitution : libre. Restait à mener à bien cet- de préparer le travail. Les séances
1. Elle une loi-cadre, c’est-à- te réforme ; le pape Paul VI allait se tenaient le plus souvent au pa-
dire qu’elle énonce seulement les y consacrer toutes ses énergies, lazzo Santa Marta, derrière la basi-
grandes lignes d’une doctrine li- soutenant sans cesse le parti ul- lique Saint-Pierre, dans la grande
turgique dont le Consilium et les tra-réformiste contre l’aile tradi- salle du rez-de-chaussée. »
commissions liturgiques nationa- tionaliste dans l’interprétation de
les et diocésaines s’inspireront la constitution. Acceptée par une Plusieurs experts étaient grou-
pour élaborer la nouvelle liturgie bonne majorité d’évêques fidèles, pés et travaillaient ensemble, sous
(a. 44-45). mais manquant de convictions ou, la direction d’un relator. Dom Botte
2. Elle inaugure une transfor- tout au moins, de connaissances li- fut chargé de la révision du pre-
mation fondamentale de la litur- turgiques, la constitution conciliai- mier tome du pontifical, et nous
gie ; en particulier, elle annonce re sur la liturgie va servir à la des- lui devons, en grande partie du
la révision du rituel de la messe (a. truction de la liturgie catholique. moins, la disparition des ordres
50), un nouveau rite de la concélé- Mais voyons les étapes de cette mineurs ainsi que le nouveau rituel
bration (a. 58), la révision des rites agonie. La machine mise en branle des ordinations et le nouveau ri-
du baptême (a. 66), de la confi rma- aboutira au Novus Ordo Missae. te de la confi rmation.Mgr Wagner,
tion (a. 71), de la pénitence (a. 72), directeur de l’Institut liturgique
des ordinations (a. 76), du mariage Le 25 janvier 1964, Paul VI, par de Trèves, fut le relator du grou-
(a. 77), des sacramentaux (a. 79), le motu proprio Sacram liturgiam, pe chargé de la réforme de la mes-
etc. met en application immédiate cer- se, dont les membres les plus ac-
3. Elle constitue un compromis taines dispositions de la constitu- tifs furent : le professeur Fischer,
entre le traditionalisme et le pro- tion et annonce la création d’une Mgr Schnitzler, le Père Jungmann,
gressisme qu’elle cherche à équili- commission spéciale chargée de le Père Louis Bouyer, le Père Gy,
brer l’un par l’autre. Pour satisfai- mettre en application cette cons- Dom Vaggagini et Dom Botte.
re la majorité traditionaliste sans titution.
principe ferme, on respectera les Le 26 septembre 1964, le
principes fondamentaux de la li- Le 29 février 1964, le pape crée Consilium autorise l’usage faculta-
turgie, mais sans aucune applica- le Consilium ad exsequendam tif de la langue vulgaire dans tous
tion pratique. Pour la minorité pro- constitutionem de sacra liturgia ; les rites sauf la préface et le Canon
gressiste agissante, on assurera il en confie les postes aux éléments de la messe ; le psaume Judica me
l’évolution ultérieure dans le sens les plus avancés du Mouvement li- et les prières après la messe dispa-
du progressisme. Cela en particu- turgique, en particulier la prési- raissent, de nombreuses rubriques
lier pour les questions si importan- dence au cardinal Lercaro et le de la messe sont modifiées et, en-
tes des rapports culte-pédagogie secrétariat au R.P. Bugnini. Le fi n, pour la première fois, des pou-
dans la liturgie (a. 33), et de l’em- Consilium peut très exactement voirs liturgiques sont confiés aux
ploi du latin (a. 36, 54, 101). être comparé au Comité de salut conférences épiscopales. Le décret
Telle est donc la constitution public de la Révolution françai- entra en vigueur le 7 mars 1965.
Sacrosanctum concilium : « Une se ; il va fonctionner, jusqu’en 1969,
loi cadre, inaugurant une trans- comme un véritable tribunal d’ex- La révolution se radicalise en-
formation fondamentale, écrit M. ception, dépossédant la Sacrée core, le 4 mai 1967, avec l’instruc-
Vaquié, et s’inspirant de deux doc- Congrégation des Rites de pres- tion Tres abhinc annos, qui auto-
trines contradictoires, ainsi se que tous ses pouvoirs. Paul VI in- rise la récitation du Canon de la
présente la constitution liturgique tervient personnellement le 20 oc- messe à haute voix et en langue
du 4 décembre 1963. » tobre 1964 et le 7 janvier 1965 pour vulgaire.
soutenir le Consilium alors en
confl it avec la Congrégation ro- Mais cela ne suffisait pas aux
IV – Les étapes d’une agonie maine. Laissons Dom Botte nous novateurs, la messe tridentine, mê-
expliquer la structure de cet orga- me mutilée et réformée, demeu-
Ainsi le vœu de Jean XXIII, ne révolutionnaire : « Le Conseil, rait un obstacle à l’œcuménisme,
émis en 1960, était-il réalisé, les écrit-il, était constitué de deux à ce christianisme universel tant
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désiré. Le cardinal Lercaro et le national. Afi n de lever tout doute le P. Bugnini est le manque de for-
P. Bugnini, qui n’avaient pas per- dans l’esprit de nos lecteurs, nous mation et de sensibilité théolo-
du leur temps depuis le Concile, devons préciser que cette messe giques. Manque et lacune grave,
avaient réussi en trois ans à mettre “expérimentale” voulait être une parce que dans la liturgie chaque
au point une nouvelle liturgie de la messe véritable, un vrai sacrifice, parole et chaque geste traduisent
messe, conforme en tous points avec présence réelle de la Victime une idée qui est une idée théolo-
aux desiderata du Mouvement li- sainte du Calvaire. » gique. J’ai l’impression qu’il y a
turgico-œcuménique. La quin- eu beaucoup trop de concessions,
tessence de l’hérésie anti-liturgi- Les évêques refusèrent cette surtout en matière de sacrements,
que allait voir le jour. On baptisa messe lors du vote du 27 octobre à la mentalité protestante. Non pas
ce culte nouveau messe normati- 1967. A la question : « La structure que le Père Bugnini ait fait lui-mê-
ve, et on le présenta aux évêques générale de la messe dite normati- me ces concessions, non en fait, il
réunis à Rome en synode le 14 oc- ve, telle qu’elle a été décrite dans le ne les a pas créées ; mais il s’est
tobre 1967. rapport et la réponse, a-t-elle l’ac- servi de beaucoup de monde, et
cord des Pères ? », les réponses fu- je ne sais pas pourquoi, il a intro-
Voici la relation que le Courrier rent : Placet : 71 ; non Placet : 43 ; duit dans le travail des gens habi-
de Rome donna de l’événement : Placet juxta modum : 62 ; absten- les, mais de coloration progressis-
« Une “première” à la chapelle Six- tions : 4. L’échec relatif de la Missa te. Et, ou il ne s’en est pas rendu
tine : c’est de la messe normative, Normativa ne découragea pas le compte, ou il n’a pas résisté, com-
montée dans les studios de la com- Consilium... Le pape mettrait son me il aurait dû résister à ces ten-
mission Lercaro-Bugnini, dont autorité dans la balance. En effet, dances 16 . »
nous voulons parler. Par une dé- le 3 avril 1969, Paul VI proclamait
licate attention, les producteurs la constitution apostolique Missale Grâce à Dieu, les réformateurs
avaient tenu, avant de soumettre romanum par laquelle il réformait étaient allés un peu loin, et un peu
leur invention au vote du synode, le rite de la messe et introduisait vite, ce qui entraîna la salutaire
à exécuter devant eux une repré- de force la messe normative à pei- réaction traditionaliste. Saisissant
sentation générale. Il fallait “tes- ne retouchée. Le 6 avril 1969, la enfi n où on les menait, les catholi-
ter”. On avait expliqué, avant de Sacrée Congrégation des Rites ques fidèles réagirent. Le 3 septem-
tourner, aux 183 prélats qu’ils de- promulguait le Novus Ordo Missae, bre 1969, les cardinaux Ottaviani
vaient s’imaginer jouer le rôle de avec son Institutio generalis ; le et Bacci écrivirent à Paul VI leur
paroissiens assistant à la nouvelle nouveau missel devait entrer en vi- célèbre lettre ouverte, présentant
messe, active, consciente, commu- gueur le 30 novembre 1969. au pape le Bref examen critique du
nautaire, simplifiée. Six séminaris- Novus Ordo Missæ. A partir de cet-
tes feraient la schola cantorum, un Le Consilium avait mené à ter- te date, la résistance catholique al-
lecteur lirait les deux plus une lec- me la révolution liturgique, il pou- lait devenir ce que l’on sait, grâce
tures, et le Père Annibal Bugnini vait disparaître. Le 8 mai 1969, surtout à la fermeté et au zèle in-
lui-même se dévouerait pour célé- Paul VI, par la constitution apos- trépide de S.E. Mgr Lefebvre.
brer et prononça l’homélie. Cette tolique Sacra rituum congregatio,
“messe normative” serait appelée substitua à l’antique Congrégation Démasqué par cette lettre
à remplacer celle que saint Grégoi- des Rites deux nouvelles congréga- ouverte, le R.P. Bugnini annonça
re le Grand, saint Thomas d’Aquin, tions intitulées, l’une pour la Cause le 18 novembre 1969 une nouvelle
saint Philippe de Néri, Bossuet, le des Saints, l’autre pour le Culte rédaction de l’Institutio generalis,
Curé d’Ars ont célébrée sans ja- Divin, cette dernière héritant des « pour une meilleure compréhen-
mais se douter qu’ils célébraient compétences de l’ancien dicastè- sion pastorale et catéchistique » ;
une messe passive, inconsciente, re et absorbant le Consilium. Le nouvelle rédaction qui demeu-
individualiste et compliquée. La préfet de la Congrégation pour le re aussi mauvaise que la premiè-
messe normative supprime le Ky- Culte Divin était le cardinal Gut, le re, et qui laisse inchangé le rite
rie, le Gloria et l’offertoire. Elle secrétaire, l’âme damnée de cette lui-même. De son côté, les 19 et
pulvérise le Confiteor. Elle glisse réforme, Annibal Bugnini. 26 novembre, Paul VI s’efforça de
sur l’intercession des saints, sur tranquilliser les fidèles. Déjà, le
le souvenir des âmes du purgatoi- Notons au passage le jugement 20 octobre 1969, la Congrégation
re, sur tout ce qui exprime l’offran- très modéré du Père Antonelli sur pour le Culte Divin avait publié
de personnelle du prêtre humain. le P. Bugnini : « Je pourrais dire l’instruction De constiutione mis-
Elle propose quatre canons de re- beaucoup de choses sur cet hom- sale romanum gradatim ad effec-
change. Elle corrige les paroles de me, toujours soutenu par Paul VI. tum deducenda par laquelle l’intro-
la consécration. Et, bien entendu, Je ne voudrais pas me tromper, duction du N.O.M. était reportée au
elle remplace le latin par l’idiome mais la lacune la plus notable chez 28 novembre 1971, et latitude était
6
• La guerre des missels a déjà eu lieu
laissée aux conférences épiscopa- C’est ainsi que, dès les années testantes : atténuation du sens de
les de fi xer une date ultérieure. On 1920, et surtout pendant et après la présence réelle, diminution du
sait que plusieurs épiscopats euro- la deuxième guerre mondiale, le sacerdoce ministériel, du caractè-
péens profitèrent de cette occasion Mouvement liturgique est deve- re sacrificiel et surtout propitiatoi-
pour déclarer interdite la messe nu « l’égout collecteur de toutes re de la messe. L’eucharistie y de-
traditionnelle. Le pape Paul VI ne les hérésies ». Dom Beauduin pri- vient une agape communautaire,
déclara-t-il pas la même chose au vilégia tout d’abord de façon ex- bien plus que le renouvellement du
Consistoire de mai 1976 ? cessive l’aspect pédagogique et sacrifice de la croix.
apostolique de la liturgie, il con-
çut ensuite l’idée de la faire ser- Par ce rite nouveau, les mo-
V – La Nouvelle liturgie, vir au Mouvement œcuménique dernistes et les révolutionnaires
moteur d’une ample révolution auquel il se dévoua corps et âme. de toute espèce, veulent transfor-
Dom Parsch lia le Mouvement au mer la foi des fidèles. Mgr Dwyer
renouveau biblique. Dom Casel en l’avouait, dès 1967 : « La réforme li-
C’est donc avec la promul- fit le véhicule d’un archéologisme turgique est, déclarait-il, dans un
gation du Nouvel Ordo Missæ forcené et d’une conception toute sens très profond, la clé de l’ag-
que nous achevons notre étude personnelle du Mystère chrétien. giornamento. Ne vous y trompez
du Mouvement liturgique. Cette Ces premiers révolutionnaires fu- pas, c’est là que commence la ré-
Nouvelle Messe est, effet, comme rent largement dépassés par la gé- volution. » Déjà, en 1965, Paul VI
la synthèse de toutes les erreurs nération des néo-liturges des di- n’avait pas caché ses intentions
et déviations de ce grand courant vers CPL. aux fidèles : « Vous prouvez par là,
d’idées. leur disait-il, que vous comprenez
Après la deuxième guerre mon- comment la nouvelle pédagogie re-
Brisés par saint Pie X, les mo- diale, le Mouvement était deve- ligieuse, que veut instaurer la pré-
dernistes ont compris qu’ils ne pou- nu une force que plus rien n’ar- sente rénovation liturgique, s’insè-
vaient pénétrer l’Église par la théo- rêterait. Protégés en haut lieu re pour prendre la place de moteur
logie, par un exposé clair de leurs par d’éminents prélats, les néo- central dans le grand mouvement
doctrines. Ils ont utilisé la notion liturges investirent peu à peu la inscrit dans les principes constitu-
marxiste de praxis, et ont compris Commission de réforme de la litur- tionnels de l’Eglise de Dieu. »
que l’Église pourrait devenir mo- gie, fondée par Pie XII, ils influen-
derniste par l’action, par l’Action cèrent les réformes élaborées par Aussi donc, cela est sûr, la révo-
sacrée par excellence qu’est la li- cette commission, à la fi n du ponti- lution et le modernisme ont péné-
turgie. La révolution utilise tou- ficat de Pie XII et au début de celui tré la Cité de Dieu par la liturgie.
jours les forces vives d’un organis- de Jean XXIII. Déjà maîtres, grâ- Le Mouvement liturgique a été le
me, elles les investit peu à peu et, ce au pape, de la Commission pré- cheval de Troie au moyen duquel
fi nalement, les fait servir à la des- conciliaire de liturgie, les néo-li- les disciples de Loisy ont occupé
truction du corps à abattre. C’est le turges fi rent accepter aux Pères du l’Église.
processus bien connu du cheval de concile un document contradictoi-
Troie. Le Mouvement liturgique de re et plein d’ambiguïté, la constitu-
Dom Guéranger, de saint Pie X et tion Sacrosanctum concilium. Le VI – Conclusion
des monastères belges, au moins à pape Paul VI, le cardinal Lercaro
leurs origines, était une force con- et le P. Bugnini, eux-mêmes mem-
sidérable dans l’Église, un moyen bres très actifs du Mouvement li- Et je voudrais, pour conclure
prodigieux de rajeunissement spi- turgique italien, dirigèrent les tra- cette trop longue conférence, vous
rituel, qui d’ailleurs produisit de vaux du Consilium, qui aboutirent citer le jugement que Mgr Lefebvre
bons fruits. Le Mouvement litur- à la promulgation de la nouvelle portait sur cette nouvelle messe.
gique était donc le cheval de Troie messe. Nous étions au début du pontifi -
idéal pour la révolution moder- cat de Jean-Paul II, je me permet-
niste. Il fut facile à tous les révo- Ce rite nouveau reprend à son tais de demander à Mgr Lefebvre si
lutionnaires de se cacher à l’inté- compte toutes les erreurs émises nous ne pourrions pas parler de li-
rieur de cette grande carcasse... depuis le commencement des dé- turgie dégradée pour entamer un
Avant Mediator Dei, qui se sou- viations du Mouvement. Ce rite est dialogue avec les autorités romai-
ciait de liturgie dans la hiérarchie œcuménique, archéologique, com- nes. Il me répondit dans une lettre
catholique ? Quelle vigilance ap- munautaire, démocratique, pres- inédite du 17 avril 1979 :
portait-on à déceler cette forme que totalement désacralisé ; il se « Quant à l’expression de “li-
particulièrement subtile de moder- fait aussi l’écho des déviations turgie dégradée”, je trouve qu’elle
nisme pratique ? théologiques modernistes et pro- ne répond pas à la réalité, elle est
7
Nouvelles de Chrétienté Nº 76
Juillet-août 2002 •

trop faible. L’influence protestan- Nous sommes obligés en cons- 7


Les origines du CPL par le P.
te et moderniste a rendu ces mes- cience d’être très fermes à ce sujet. Duployé, éditions Salvator, p. 320
8
ses dangereuses pour la foi. C’est Les réformateurs savent qu’ils ont Cf. Abbé D. Bonneterre, Le Mouve-
pourquoi je préfère dire qu’elles eu tort, ils constatent comme nous ment liturgique, p. 104 à 111
9
Cf. Abbé D. Bonneterre, Le Mouve-
sont empoisonnées. C’est ce que les effets. Tenir ferme dans le refus
ment liturgique, p. 110, note 7
j’ai dit à l’ex Saint-Office. Il est de de ces réformes est un devoir et le 10
Cf. Abbé D. Bonneterre, Le Mouve-
plus en plus évident que la réfor- seul remède pour la restauration ment liturgique, p. 85 à 94
me liturgique a pour résultat de de l’Église et le salut des âmes. » 11
Cf. Abbé D. Bonneterre, Le Mouve-
communiquer l’esprit protestant ment liturgique, p. 99 et 100.
12
sur le sacerdoce, sur la messe, sur Cf. Abbé D. Bonneterre, Le Mouve-
1 ment liturgique, p. 112 à 115.
l’Eucharistie, sur l’Église, sur les L’Église en prière - AG. Martimort,
13
vérités dogmatiques et morales, 1961, p. 51 Un homme d’Église, éditions Caster-
2 mann, 1964, p. 180
sur l’Ecriture sainte, sur l’œcumé- Saint Pie X, Tra le sollecitudini du
14
22 novembre 1903 A. Nocent, L’avenir de la liturgie,
nisme et la liberté religieuse. 3 éditions Universitaires, 1961, p. 119 à 171
Louis Bouyer, La vie de la liturgie,
Que d’assister à la nouvelle Cerf. 1956, p. 33 ; cf. Abbé D. Bonneterre, 15
Cardinal Stickler, conférence publiée
messe dite avec dévotion une fois Le Mouvement liturgique, p. 44 à 45 en 1995 dans The latin mass, et reprise
ou deux par an ne produise pas 4
Cf. Le Mouvement liturgique, page par le CIEL (Centre International d’Étu-
cet effet, c’est évident. Mais je suis 45, note 18 des Liturgiques) en mai 2000.
5 16
persuadé qu’une assistance régu- Cf. Abbé D. Bonneterre, Le Mouve- Il Card. Fernando Antonelli et gli
lière même une fois par mois est ment liturgique, p. 82, note 19 sviluppi della riforma liturgica dal
6
Nicola Giampietro, Il card. F. 1948 al 1970 par Nicola Giampietro -
très nocive, car la résistance au O.F.M. Cap., Studia Anselmiana, Roma
Antonelli et gli sviluppi della rifor-
poison diminue dès lors qu’on ac- ma liturgica dal 1948 al 1970, Studia 1998
cepte cette fréquence ! Anselmiana, Roma 1998

Un ouvrage de référence sur la question de la nouvelle messe… A lire absolument !


Trop souvent, face à la crise qui secoue l’Eglise depuis plu-
sieurs décennies, certains théologiens se contentent de consta-
ter les effets, sans remonter aux causes, sans jamais oser con-
tester les principes qui sont à l’origine du mal. En médecine,
une telle attitude signifie qu’on ne peut soigner que les symp-
tômes, parce que la maladie est trop avancée et que le malade
ne peut plus recevoir que des soins palliatifs. Voilà pourquoi
certaines études récentes semblent n’être que des analgésiques
idéologiques.
Il n’en est pas de même avec cet ouvrage qui offre au lecteur
exigeant le texte de toutes les communications données lors
du Vème Congrès théologique de la revue romaine Si Si No
No. La question fondamentale de la réforme de la messe y est
traitée sous un triple aspect théologique, liturgique et pasto-
ral. Ainsi est manifestée la cohérence qui relie la loi de la foi,
la loi de la prière et la première de toutes les lois : le salut des
âmes. Lex credendi, lex orandi, salus animarum prima lex.
Alliant pensée rigoureuse et expression vigoureuse, ces études
proposent un regard clairvoyant sur la crise actuelle, loin de
la myopie… ou de la presbytie.
500 pages – 25,-€ + frais de port
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