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La dynamique de groupe
Claude Faucheux
Faucheux Claude. La dynamique de groupe. In: L'année psychologique. 1957 vol. 57, n°2. pp. 425-440;
doi : https://doi.org/10.3406/psy.1957.26617
https://www.persee.fr/doc/psy_0003-5033_1957_num_57_2_26617
Sans doute est-ce Lewin qui força l'intérêt naissant pour les groupes
vers 1938 d'une part avec des analyses de « cas » et la formulation de
définitions et de concepts nouveaux, d'autre part avec l'expérience sur
les « climats sociaux » (65). Sans doute a-t-il une responsabilité dans
l'accélération des publications consacrées aux groupes qui, de 21 par
an entre 1930 et 1939 passent à 31 jusqu'en 1944, puis à 55 jusqu'en 1949
pour atteindre 152 par an jusqu'en 1953, peut-être en débarrassant ce
domaine de recherches d'un certain nombre de préjugés qui, comme
le remarque M. Deutsch (23) faisaient penser à bon nombre de
psychologues, juste avant la seconde guerre mondiale, que c'était faire
preuve de mysticisme que de parler d' « atmosphère de groupe », de
« buts de groupe », et de reconnaître une existence au groupe même,
plutôt qu'aux seuls individus.
En effet, dès 1939 (66), Lewin considérait qu'il fallait aborder le
problème des groupes en concevant le groupe comme un ensemble
dynamique et en le définissant non pas sur la base de la similitude des membres,
mais sur la base de leur interdépendance dynamique.
On retrouve évidemment le même esprit dans les trois objectifs
du « Research Center for Group Dynamics » formulés par son actuel
directeur D. Cartwright (16) :
1 . Promouvoir une connaissance systématique et formuler des théories
fondamentales concernant les forces sous-jacentes à la vie de groupe, celles
qui influencent les relations entre groupes aussi bien que celles qui agissent
sur le développement de la personnalité et l'ajustement des individus.
2. Réduire le fossé entre le corps des connaissances en sciences sociales
et la pratique de l'action sociale ;
3. Fournir un programme d'enseignement portant sur les
connaissances accumulées en dynamique de groupe, sur les techniques de
recherches, sur les techniques de formation de leader, sur la consultation
et sur l'action sociale.
R. Lippitt, en 1948 (72), formule ainsi ses objectifs :
1. Appliquer des méthodes expérimentales au comportement des
petits groupes et au comportement des individus dans une situation de
groupe ;
2. Tenter l'intégration de ce travail dans les domaines de la
psychologie individuelle, de la psychologie sociale, de la sociologie et de
l'anthropologie sociale ;
3. Isoler les propriétés comparatives spécifiques des petits groupes
et essayer une transposition de ces propriétés dans le langage de la théorie
du champ ;
4. Développer une méthode de mesure applicable au comportement
des petits groupes ;
5. Appliquer les découvertes dans les problèmes pratiques de l'action
sociale.
A l'heure actuelle l'expression « dynamique de groupe » est entendue
dans un sens plus ou moins large suivant les milieux.
C. FAUCHEUX. LA DYNAMIQUE DE GROUPE 427
La dynamique de groupe
Gomme le dit Cartwright les chercheurs de cette tendance « préfèrent
laisser la théorie exercer une influence plus directrice dans la
planification des recherches... On ne peut choisir un dispositif d'enregistrement
et de mesure sans savoir ce qu'on va étudier. Jusqu'à ce que les variables
aient été définies conceptuellement ces chercheurs pensent qu'on ne
possède aucune base réelle pour décider si l'on utilisera un chronographe
d'interaction, un test sociométrique, un test de personnalité, un
questionnaire particulier ou quelque autre dispositif » (16).
Cette prééminence de la théorie est en effet un premier trait
caractéristique de la dynamique de groupe. Si l'on ne retrouve pas toujours
dans les publications de cette tendance une conceptualisation
typiquement léwinienne on peut néanmoins dire que toutes manifestent le
même souci de définition conceptuelle des variables dans un ensemble
systématique. L'exemple le plus frappant en est la série d'articles sur
les communications (30).
Une deuxième caractéristique réside dans une attitude expérimentale
stricte qui peut être schématisée ainsi :
— tout problème scientifique peut et doit être posé expérimentalement,
— une expérience est faite pour tester des hypothèses ;
428 REVUES CRITIQUES
Les factorialistes
Pour Cattell le problème qui doit se poser est uniquement celui de la
description du comportement de groupe. Il souhaite qu'on ne refasse pas
les mêmes errements avec les groupes comme auparavant avec la
personnalité individuelle. « Le développement d'une science exacte de la
prédiction en rapport avec la personnalité individuelle exigeait comme dans les
autres sciences biologiques, une provision préalable de descriptions
précises, de mesures et de classifications des phénomènes. En fait la
spéculation d'amateur, et 1' « explication » incontinente éloigna des réalités de
la mesure et de l'observation, provoqua des troubles et retarda
tristement le progrès en détournant l'attention des chercheurs, jusqu'à ces
dernières années, de la discipline fondamentale et inévitable d'une vraie
science de la mesure de la personnalité. « Cattell demande que les cher-
C. F.\I.I(':HKI!X. I.A. DYNAMIOliK UK (iKOIJPl: 429
Les sociométristes
Ceux-ci ne prêchent ni la description systématique ni
l'expérimentation pure. Ils font l'investigation d'un domaine où les confine l'emploi
quasi exclusif des tests sociométriques et la majeure partie de leurs
recherches peut être classée dans les « études de terrain » puisque le plus
souvent ils administrent les tests sociométriques à des groupes « naturels »
tels que groupes scolaires, communautés rurales ou urbaines, équipes
d'entreprises industrielles, administrations, etc.
La tendance psychanalytique
Issue de la thérapeutique de groupe, elle dépasse néanmoins la
pratique en essayant d'expliquer le comportement général des groupes.
Disposant d'une théorie dynamique elle se trouve sur un terrain épis-
témologiquement plus proche de la dynamique des groupes que les
autres tendances. Sans doute est-ce la raison de la publication de la
revue Human Relations conjointement par le Research Center of Group
Dynamics et le Tavistock Institute de Londres où plusieurs chercheurs
d'orientation psychanalytique étudient les groupes. Également
significatif est le témoignage de Cartwright : « D'une importance particulière
pour une théorie générale de la dynamique des groupes est la théorie
freudienne selon laquelle la cohésion du groupe surgit à travers les
identifications communes des membres entre eux. »
Une étude comme celle de Swanson (100) confirme l'intérêt des
théories freudiennes pour les expérimentalistes de la dynamique des
groupes. Un autre aspect de cet intérêt se trouve chez les moniteurs
des groupes de formation (T groups), dans les séminaires du « National
Training Laboratory in Group Development », à Bethel. Ces moniteurs
dont un certain nombre sont des chercheurs liés de près ou de loin
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.
Berkowitz (7) l'effet du leadership partagé, Horwitz (56) l'effet de la
décision sur le rappel de tâches terminées ou non.
L'étude du pouvoir réclamée par Cartwright (14) est amorcée par
Horwitz (57), Lippitt, Polansky et Rosen (72).
La perception retient l'attention de plusieurs chercheurs notamment
Block et Bennett (11) Bovard (12), A. Pepitone (73) et Raven (78).
A côté de thèmes de recherche nouveaux comme celui de Deutsch (21)
(22) : coopération et compétition, de Herbst (50) (48) (49) : la famille ou de
comparaison sociale par Festinger (27) (52) (24), on retrouve des thèmes
assez familiers à l'école lewinienne : le niveau d'aspiration (24, 50),
le rappel des tâches interrompues ou non (55) (56), le succès et l'échec (39)
(40) (78) (95), dans les travaux de Dreyer (24), Horwitz (55) (56), Gilchrist
(40) (95) , ou encore, l'agression dans la même perspective conceptuelle que
celle de Lewin (56) avec les études de Thibaut (103) (104) et Zajonc (109).
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