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Cahier (Collège international de philosophie).
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PHILIPPE LACOUE-LABARTHE
n
V^>* ETTE seancevautrepara-
tion- d'unedefection accidentelle,il y a quelquesmois(elle
devaitavoirlieu en juin dernier).Dans cettedefection, j'ai
ete,malgremoi,pourquelquechose.Jetiensdonea presen-
terpubliquement mesexcusesa AlainBadiouqui, je le sais,
n'a pas meconnuqu'il s'agissait,en effet,d'un accident.
NOTES
JACQUES RANCIÈRE
P._„
tes des remarquesqui vontsuivre.Pour prendrela mesure
d'un ouvragecommeL'êtreetl'événement il faudrait
le temps
de la relecture et du recul,il faudraitreparcourir quelques-
uns des grandstextesfondateurs qui le hantent- le Parmé-
nideparexemple; il faudrait la maîtrisedes mathématiques
qu'il utilise
et de ce qu'il leurfaitproduire...Toutesexigen-
ces par rapportauxquellesje me sensen défaut.Jeparlerai
doncmoinsdes thèsesdu livreque du gestequ'il représente
aujourd'hui,de la façondontce gestese dessinedansle pré-
sentde la penséeet de l'opinion.
Un motparcourt le livreetrésumece geste,celuide fidélité.
Ce motimpliqueun doublerefuspar rapportaux pensées
du jour.Refusd'abordde s'installer dansla finde la philoso-
phieet le malheurdes temps.Refusde ce tourparlequella
philosophie, en proclamant sa finet en accusantdu malheur
des tempsson double,sa faced'ombrenomméemétaphysi-
que, confirme encoresa royauté, réexploite indéfiniment son
histoiredansla figured'une patrimonialité héroïque.Refus
d'autrepartde suivrela vaguedu social,de céderau poids
dominant de la penséeétatisée, cettepenséepourlaquellerien
n'existesinondes étatsde choses,des combinaisons de pro-
priétés,etqui jugeles pratiquesetles discoursselonqu'elles
réfléchissent,démentent ou méconnaissent ces propriétés.La
figureepistemologique de la penseeetatisee,c'est,dansson
expression la plus generate, le revisionisme dontla formule
- en toutecirconstance irrefutable - estde direque les cho-
ses ne sontpas ce qu'on croitou ce qu'on croyait.Sa figure
ethique,c'estle reniement, lequels'argumente ainsi: il faut
avoirle couraged'avouerque les chosesne sontpas ce qu'on
croyait qu'ellesetaient, et,commec'etaitce qu'on croyait qui
determinait nos discourset nos actions,il fautsavoirrecon-
naitrel'ecartde nos desirsa l'ordredu monde,ne serait-ce
que pourl'instruction des jeunesgenerations.
Dans ces deuxfiguresdominantes, la questionde la fide-
litese perd,parexcesou pardefaut,soitqu'elles'abimedans
l'immemorial de l'avant-catastrophe, soitqu'ellecomparaisse
au tribunalpermanent de la demystification parles proprie-
tes. II n'y a pas d'evenement, seulementla longuecatastro-
phe ou les petitesvaguelettes a la surfacedes choses.
Parrapport a cetteconfiguration presente,l'oeuvre de Badiou
represente l'entreprise la plusresoluepourconstruire unespace
conceptuel de la fidelite, pour demontrer qu'il y a lieu a fide-
lite.Contrele tempsqui n'en finitpas de passerdes tenants
de la realiteet le tempsqui n'en finitpas de s'acheverdes
tenantsde l'etre,il affirme la fidelitecommeconduiteethi-
du
que temps. Ce lieu a fideliteetcetteethiquedu tempspren-
nentchezluiunefigure precise.II affirmequec'estaujourd'hui
le tempsde construire ce lieua fidelite commeespacede com-
possibilitedes quatreproceduresproductrices de verites-
le mathemeet le poeme,la politiqueet l'amour.Cettecons-
truction, c'estaujourd'huile « pas de plus » qui estdemande
a la philosophic Mais la modestie de cepasdeplusprendd'une
la
maniereinsistante figure d'un recommencement de cette
hyperbole ou de cet Uebergang parquoi la philosophicprend
ou reprendsa marchefondatrice. Faireun pas de plus,c'est
aussi bien refairele gesteplatonicien, recommencer Platon
Pagedespoetes,designeparBadiou,c'estaussibienPagedes
revolutions. A datersa naissance, on s'accorderait vraisembla-
blementsurces dernieres anneesdu dix-huitieme sieclequi
sontaussilesanneesdubilansurla Revolution fran^aise comme
evenement, surl'horizon d'enthousiasme qu'ellea defini, surla
manierenouvellequ'ellea eu d'organiser la politiqueen certi-
tudesensibleeten objetde perception esthetique. Ce sontles
anneesou HolderlinpublieHyperion tandisque Wordsworth
etColeridgepublientcesLyricalBalladsqui ne disentpas un
motde politiquemaisrepresentent pourtant la de-fection de
l'enthousiasme revolutionnaire, unemaniere de defaire le noeud
qui liaitles pouvoirs de Pevidence sensible a ceux de la nou-
veautepolitique,l'utopiede la communaute nouvellea Puto-
pie du sens communesthetique.Partant de ce moment
privilegie, onpourrait fairea travers notamment Biichner, Bau-
delaireetsonlecteurBenjamin,commea travers Rimbaudou
Mandelstamune histoirede Page des poetescommehistoire
d'untravailcritiquesurlesmodesde subjectivation etd'objec-
de
tivation, temporalisation etde metaphorisation propres aux
figuresrenouvelees de la nouveautepolitique.Le travailde
l'agedespoetescourttoutau longdu travailde l'agedesrevo-
lutions.Declarerclosleurage,n'est-cepas alorsunemaniere
de direclos sansle direl'age des revolutions, de transferer a
la seuletachede nomination d'unenouveaute politique encore
inouiele tranchant du signifiant revolutionnaire ?
Parmilesmanifestations de ce « nouveau» en attente d'une
nominationpolitique,Badiou range significativement la
« peremption » de la figuremarxiste-leniniste de la politique.
Le « nouveau» qui appellela politiquenouvellement appelee
generiqueest-ilalorsautrechoseque la minede l'ancienne
nouveautequi en a pourtant gardelespouvoirsd'evenement ?
II ya iciun evitement tresspecifiquede la confrontation avec
l'objettheorique « revolution ». Riena voir,evidemment, avec
MZZZZsHS; du collegeinternational
m,,«,co*che ,^,,.^2S;*:
de philosophic
ISSN 0980-1626 80 f
>
M OSIRIS 4 Jft
JEAN-FRANQOISLYOTARD
^^^
c
E que j'ai a direestd'une
d'unecertainefa?onprochede ce que vientde direRanciere,
maisil l'a beaucoupmieuxdit que je ne le dirai,beaucoup
mieuxcentreet beaucoupmieuxpointe..- Jepenseque le
livrede Badiouestun livreconsiderable, c'estle motqui me
vientspontanement. On ne peutpas ne pas en etre« sidere»,
on ne peutpas le contourner. Sa considerabilite consistea
mes yeuxen ceci qu'une « decision» y est prise,la decision
que la question estle multiple,le compte-pour-un du multi-
et
ple, que toute la problematique philosophiquedoit etre
pensee au titre du rapportun/multiple. Sous la categorie
ensembliste de l'appartenance, et
multiple compte-pour-un
du multiplesignifient que ce qui se presentese presente
commesituation (etce n'estpas une petiteenigmeque quel-
que chosese presente). Quandon dit« une situation », on dit
deja qu'il y a du multiplequi est compte-pour-un. J'ordon-
neraia partirde cettedecisiontroisquestionnements, assez
obscurset mal elabores,mais ou j'essaieraide te suivrede
pres.Jen'auraipas cetteagilitede Ranciered'allerchercher
le politique,le conflitavecla democratic, qui se trouveeffec-
tivement (la-dessus,Rancierea millefoisraison)impliquedans
tonapproche.Jevais plutotessayerde circulerun moment
avec toi,a partirde cettedecision,en prenantpouracquise
cettedecision,que la seule questionest celle de Tun et du
ALAIN BADIOU
Dix-neufreponses a
beaucoup plus d'objections
F
1. 1 1 XAMINQNS la maximeou
Ranciereme recapitule: « Pourque la politiquecommence,
il fautmarquerla finde l'age des poetes.C'est a quoi doit
servirle croisement de la mathematique et du discourssur
l'amour». Cettemaximeestplus forte- plus systematique
- que je puis l'etre,dans le momentactuelde mon effort
(ou de notreeffort) pour compossibiliser le Temps. Trois
constatsviennenten effet ce
deregler platonisme decale(a ce
propos: j'ai parlede « gesteplatonicien», et non de plato-
nisme.C'etait,je crois,indiquerassezprecisement uneforme,
ou un dessein,et non une thematique).
6. II en iraitpourRousseaucommepourPascal.Jeconvoque
Rousseauuniquement pourliredansle conceptde « volonte
generate » uneapproximation generique de la veritepolitique.
Ce seraitl'occasionde discuterl'idee centraledu generique
(soutien, si Tonveut,de mavision« philosophique » du demo-
cratique).Mais Rancieres'etonnesymetriquement de ce que
la loi soittropabsenteet le peupletropinconsistant... Jene
le savais pas si soucieuxde la Loi et de la Communaute
substantielle. A moinsqu'il ne soitle gardienacademiquede
Rousseau? La encore,que le Contratne soitevenement que
dansle moded'unefiction estevident, Rancierecroit-ilunseul
instant que je croisa untel« evenement » ? Le seulevenement
historique mentionne dans mon livreestprecisement la Revo-
lutionde 92-94,que Ranciere opposea l'evenement « abstrait»
du contrat, comme me de
pour reprocher preferer leschimeres
conceptuelles aux solidesaleas du Temps.
C'est que Rancieretientbeaucoupa ce que je soutiennela
posturedu philosophelegislateur, carc'estla deconstruction
de cetteposturequi lui permetde faireune philosophicdia-
gonale,historique, souventbrillanteet progressiste (comme