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DU MÊME AUTEUR
Figures I
coll. «Tel Quel», 1966
coll. «Points Essais», 1976
Figures II
coll. «Tel Quel», 1969
coll. «Points Essais», 1979
Figures III
coll. «Poétique», 1972
M im ologiques
coll. «Poétique», 1976
Introduction à l ’architexte
coll. «Poétique », 1979
Palimpsestes
coll. «Poétique», 1982
coll. «Points Essais», 1992
Seuils
coll. «Poétique», 1987
GÉRARD GENETTE
FICTION
ET
DICTION
ÉDITIONS D U SEUIL
27, rue Jacob, Paris VIe
I
C E L IV R E
E ST P U B L IÉ D A N S LA C O L L E C T IO N
POÉTIQUE
D IR IG É E PAR G É R A R D G E N E T T E
is b n 2-02 -012851- 9 .
© É D I T IO N S D U S E U IL , J A N V IE R 1 99 1 .
7
FICTION ET DICTION
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ARGUM ENT
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I //>/</
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FICTION ET DICTION V
l’histoire de la poétique essentialiste peut être décrite
comme un long et laborieux effort pour passer du critère
thématique au critère formel, ou du moins pour faire sa
place au second, à côté du premier.
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FICT ION ET DICTION
1. Idem.
2. Poétique, 1451b.
3. D e l ’origine des romans, 1670, p. 5.
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Sherlock Holmes sont évidemment des œuvres de fiction, mais c’est une
affaire de jugement de savoir s’il convient de les considérer com m e
appartenant à la littérature anglaise » - ici, l’exclusion est envisagée au
nom d’un éventuel jugement de valeur qui me semble sans pertinence.
Comme dit à peu près Nelson Goodman, si l’on exclut du champ de
l’art les mauvaises œuvres d’art, il risque fort de n’y pas rester grand-
chose, car la plupart des œuvres (mais non, pour moi, celles de Conan
D oyle) sont mauvaises - ce qui ne les empêche nullement d’être des
œuvres.
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LES ACTES DE FICTION
1. La limite est atteinte, bien sûr, dans les Actes sans paroles, dont le
texte est entièrement didascalique.
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LES ACTES DE FICTION
nion courante, celte forme ne me sem ble pas nécessairem ent liée à
cette catégorie. Elle consiste en la description assertlve explicite
(¡’avoue que la notion de «performatif implicite» me laisse perplexe)
de n’importe quel acte illocutoire: déclaratif, bien sûr («Je déclare la
' séance ouverte »), mais aussi bien expressif (« Je vous exprime tous mes
regrets »), directif (« Je vous ordonne de sortir »), promissif (« Je vous
promets de venir»), et même assertif : «Je vous signale... », «Je vous
indique... », « J ’observe... », etc., sans compter l’envahissant explétif
« Je dirai(s) que... », ou : « Disons que... » Les rares impossibilités (on
ne dit pas: «Je te m enace... ») pourraient être d’ordre rhétorique: la
menace n’a pas intérêt à s’expliciter comme telle, mais au contraire à se
couvrir, par exemple du manteau du conseil : « Je vous conseille de sor
tir» (sous-entendu : «sin on ... »). Inversement, un acte déclaratif peut
prendre une forme non perform ative, par exem ple assertive : «La
séance est ouverte. »
1. A vrai dire, cette phrase me semble relever plutôt du directif que
du déclaratif, mais la frontière est ici très poreuse.
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1. Ici encore, un diagnostic sur les états simples n’exclut pas l’exis-
tcncc de formes complexes, intermédiaires, entre le fictionnel et le non-
llclionnel, comme lorsque Hamburger définit le texte lyrique par l'indé
termination de son énonciateur.
2. Je substitue « texte » à « œuvre » ( w ork), car je ne donne pas exac-
Ic mcnt à cette remarque le même sens que Searle : pour lui, encore une
lois, le jugement de littérarité semble être affaire de mérite attribué à ce
qui serait de toute façon une œuvre; pour moi, de fonction esthétique
attribuée à un texte qui n’a pas nécessairement été produit dans cette
Intention.
f, I é m % r< J r$ 4 m Û ·
3. Récit fictionnel, récit factuel
1. Le constat a déjà été fait par Paul Ricœur, Temps et Récit, II, Paris,
l ’d. du Seuil, 1984, p. 13. U ne illustration frappante de cet état de
choses est fournie par deux textes de Roland Barthes à peu près
contem porains: «Introduction à l’analyse structurale des récits»
( 1966), L ’Aventure sémiologique, Paris, Éd. du Seuil, 1985, et « Le dis
cours de l’Histoire » (1967), L e Bruissement de la langue, Paris, Éd. du
Seuil, 1984. Le premier, malgré son titre très général, n’envisage que
des récits de fiction, et le second, malgré une antithèse initiale entre
| *<récit historique » et « récit fictif », néglige complètement les aspects
narratifs du discours historique, rejetés in fin e com m e une déviance
propre au x ix e siècle (Augustin Thierry) et dévalorisés au nom des
principes anti-« événementiels » de l’école française - qui depuis...
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Ordre
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I . P. 228.
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1. P. 17.
2. Je substitue à ceux de Goodman ces exemples dont seul le second,
bien sûr, est imaginaire. L'H istoire de la R évolution française en pré
sente (au moins) un, dont la lisibilité ne doit rien au caractère factuel et
contrôlable du récit historique, dans le récit de la journée du 14 juillet
1789. Michelet raconte d’abord une réunion à l’Hôtel de Ville autour
du prévôt des marchands ; la réunion est interrompue par l’arrivée d’un
cortège annonçant la prise de la Bastille et brandissant ses clés. Puis
l’auteur enchaîne: «La Bastille ne fut pas prise, il faut le dire, elle se
livra... » Suit le récit, en analepse, de la chute de la prison.
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I.P 799.
?.. Figures III, Paris, Éd. du Seuil, 1972, p. 115. Il rrHétait d’ailleurs
«li'jft arrivé, dans Figures I (Paris, Éd. du Seuil, 1966, p. 77), de nier,
i <mire Bruce Morrissette, la possibilité de « rétablir » la chronologie des
n i ils de Robbe-Grillet.
< Plus généralement, j’ai quelque peine à percevoir la portée de la
i inique adressée par Herrnstein Smith à ce qu’elle appelle le «dua-
Iim iic de la narratologie. La formule, d’allure intentionnellement prag-
iiuiliquc, qu’elle contre-propose - «actes verbaux consistant en ce que
t|Mcl(iu'un raconte à quelqu’un d’autre que quelque chose est arrivé»
(|> .¡ (2) ne me semble nullement incompatible avec les postulats de la
iiiiiiiilologie, et je la reçois plutôt comme une parfaite évidence. Le sys-
li inc de Discours du récit (Histoire, Récit, Narration) n’est d’ailleurs
Miiimlcslcment pas dualiste, mais bien trinitaire, et je ne sache pas qu’il
ini icncontré d’objections chez mes confrères narratologues. Je perçois
l'ti n que Herrnstein Smith, quant à elle, milite en faveur d’une position
mais je ne la trouve guère illustrée par la formule ci-dessus.
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Vitesse
Fréquence
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Mode
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bien les tenir, fût-ce avec quelques nuances, pour des traits
distinctifs de la différence entre les deux types. Mais
(contrairement à Kàte Hamburger, qui n’en souffle mot)
j’en dirais autant de l’attitude narrative inverse, que j’ai
jadis baptisée focalisation externe et qui consiste à s’abste
nir de toute incursion dans la subjectivité des personnages,
pour ne rapporter que leurs faits et gestes, vus de l’exté
rieur sans aucun effort d ’explication. D e Hemingway à
Robbe-Grillet, ce genre de récit « objectif » me semble
aussi typiquement fictionnel que le précédent, et ces deux
formes symétriques de focalisation caractérisent ensemble
k* récit de fiction comme opposé à l’attitude ordinaire du
récit factuel - qui ne s’interdit a priori aucune explication
psychologique, mais doit justifier chacune d’elle par une
indication de source («N ous savons par le M ém orial de
Suinte-Hélène que Napoléon croyait que Koutouzov... »),
ou l'atténuer et, précisément, la m odaliser par une pru-
<lrnte marque d’incertitude et de supposition («Napoléon
noyait sans doute que Koutouzov... »), là où le romancier,
lu (ionalisant son personnage, peut se permettre un
ptTcmptoire «Napoléon croyait que Koutouzov... »
le n’oublie pas que ces deux types de focalisation sont
i actéristiques de formes relativement récentes du récit
.11
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Voix
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I.'« La fictivité essen tielle des romans n’est pas à chercher dans
I iii<-.ililc des personnages, des objets et des événem ents mentionnés,
iimis dans l’irréalité de la mention elle-même. En d’autres termes, dans
un roman ou dans un conte, c’est l’acte de rapporter des événements,
l in le de décrire des personnes et de se référer à des lieux, qui est fictif »
( <hi ilir Margins o f Discourse, The University of Chicago Press, 1978,
|l .">)
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A
* * — *■ Autobiographie
N= P
A
* » — * Récit historique (dont biographie)
N* P
A
* » — * Fiction homodiégétique
N= P
A
te * — * Autobiographie hétérodiégétique
P
A
te » — » Fiction hétérodiégétique
P
l< style du récit qui est celui du narrateur » (Sartre, L ’Idiot de la fam ille,
l*iu ts. Gallimard, 1988, III, p. 773-774). Bien entendu, l’idée d’une dis-
iiit ml ion (pour moi, purement fonctionnelle) de l’auteur et du narra-
li ni n’aurait pas l’agrément de Kate Hamburger, pour qui l’Ich-Origo
•lu personnage évince nécessairement toute présence d’un narrateur.
< rlle relation d’incompatibilité me semble procéder d’une conception
n· ·. ligidcment monologique de rénonciation, qu’infirme à merveille la
iliiiil voice du discours indirect libre.
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A
* * — * récit historique
N* P
A
* ■*· — * autobiographie
N= P
puisqu’un narrateur identifié à l’auteur y produit un
récit de fiction hom odiégétique, communément baptisé,
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Fielding auteur de Tom Jones n’est pas fonctionnellement
(énonciativem ent) le Fielding narrateur, même s’ils ont
pour ami le même Hogarth et pour défunte la même
Charlotte. La formule de ces récits est donc bien en fait,
dans le second cas :
A
* *
N i P
fiction hétérodiégétique, et dans le premier :
A
te *·
N= P
fictio n hom odiégétique. Pour celui-ci, j ’avoue que cette
réduction au droit commun rend mal com pte du statut
paradoxal ou, pour mieux dire, du pacte délibérém ent
contradictoire propre à l’autofiction (« Moi, auteur, je vais
vous raconter une histoire dont je suis le héros mais qui
ne m’est jamais arrivée »). On pourrait sans doute, dans ce
cas, adapter à la formule de l’autobiographie, A = N = P,
une prothèse boiteuse où P se dissocierait en une person
nalité authentique et en un destin fictionnel, mais j ’avoue
répugner à ce genre de chirurgie - qui suppose qu’on
puisse changer de destin sans changer de personnalité1 -,
et plus encore à sauver ainsi une formule qui suggère chez
l’auteur une adhésion sérieuse évidem m ent absente2,
comme si Dante croyait être allé dans l’au-delà ou Borges
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Em prunts et échanges
général il ne s’en prive pas. Il peut aussi mentir, et ce cas met quelque
peu à l’épreuve la solidité de notre formule. Disons provisoirement que,
ici, la relation est censée être A = N, ou qu’elle est A = N pour le lecteur
crédule et A * N pour l’auteur malhonnête (et pour le lecteur perspi
cace, car le mensonge n’est pas toujours felicitous), et léguons ce pro
blème à une pragmatique du m ensonge qui, à ma connaissance, nous
fait encore défaut.
1. Ces deux évidences ne sont certes pas elles-mêmes toujours garan
ties : les énallages de personne, comme toute figure, sont affaire d’inter
prétation, et le nom du héros peut être tu (cas innombrables) ou dou
teux (« Marcel », dans la Recherche).
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Prime M inister who was very fat» et le sophistiqué «the Prime Minister
o f the US said good m orning to his secretaries, etc.». La présupposition
d’existence se lit aussi bien dans l’exemple cher aux philosophes analy
tiques : « Sherlock Holmes habitait 221 B Baker Street », dont la régres
sion au type naïf passerait par une récriture à la Russell : « Il était une
fois un homme et un seul nommé Sherlock H olm es... » On peut encore
dire que le type naïf (émique) pose ses objets, et que le type étique les
impose à coup de prédicats : quelqu’un qui habite 221 B Baker Street
ne peut manquer d’exister.
1. J’emprunte évidem m ent ce terme à Michal Glowinski, « Sur le
roman à la première personne » (1977), Poétique, 72, novembre 1987.
Mais Glowinski, com m e Hamburger, réserve cette notion au régime
homodiégétique.
2. Sir A ndrew M arbot (1981), Paris, Lattès, 1984.
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Joh n W h itn e y P a y so n , le p r o p r ié ta ir e d e s Ir is d e V an
G o g h , n ’avait pas vu le tab leau d ep u is q u e lq u e tem ps. Il
n e s ’a tte n d a it p as à l ’e f f e t q u ’il alla it lui fa ire q u an d il
l ’aurait d e n o u v ea u en face d e lui, dans les b ureau x n ew -
york ais d e S o th eb y ’s, l’au tom n e dernier, q u elq u es instants
a van t la c o n fé r e n c e d e p r e s se qui a v a it é t é c o n v o q u é e
p o u r a n n o n c e r sa m ise e n v e n te . P a y so n , u n h o m m e à
l ’allu re co r d ia le e t e n jo u é e , ap p roch an t la cin q u a n ta in e,
avec d es ch ev eu x roux et u ne barbe s o ig n é e ...
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1. Qui passe directement du cas des noms propres à celui des propo
sitions.
2. J’em ploie ce terme pour éviter celui de s y n o n y m ie, qu’il vaut
mieux, selon le conseil de Carnap, réserver aux cas - s’il en existe -
d ’identité non seulem ent de référence, mais de com préhension, ou
intension («Signification et synonymie dans les langues naturelles»
[1955], Langages, juin 1969).
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STYLE ET SIGNIFICATION
Mais sans doute peut-on aller plus loin vers une caracté
risation subjective de la connotation : si, pour désigner la
gardienne de mon immeuble, j ’utilise non le mot tradi
tionnel concierge, mais le mot argotique pipelette ou
bignole, la qualification de mon choix se déplacera très
sensiblem ent de l ’aspect, ou «m ode de donation», de
cette employée vers un mode de locution - celui, précisé
ment, de l’argot - , et, dans certaines situations d’énoncia-
tion, ce choix peut à la limite ne plus évoquer pour mon
interlocuteur rien d’autre que la vulgarité de mon langage,
voire de ma personne, comme les innovations dans le
vocabulaire d ’A lbertine n ’évoquent pour Marcel que
l’évolution morale de la jeune fille. Nous sommes ici, dans
le spectre des valeurs possibles du sens frégéen, au pôle
opposé à celui qu’occuperait le choix entre triangle et tri-
latère. A ce choix purement (gnoséo)logique entre deux
définitions géom étriques s’oppose un choix entre deux
registres de discours. Entre ces deux pôles, s’étend toute
une gamme de valeurs intermédiaires, selon que prédo
mine l’aspect de l’objet désigné ou l’attitude ou apparte
nance langagière du désignateur; et ce qui vaut pour un
mot vaut manifestement pour la totalité d’un discours. Je
n’ai pas encore qualifié l’option entre concierge et bignole,
mais chacun l’aura compris : c’est typiquement là ce qu’on
appelle un choix stylistique.
A vrai dire, le mot choix n’est pas ici très heureux, car il
semble impliquer une décision consciente et délibérée, ce
qui n’est pas toujours le cas : on ne choisit pas toujours ses
mots, et certains voyous ignorent peut-être qu’une bignole
est une concierge, comme les honnêtes gens ignorent la
réciproque - ou comme les lève-tard ignorent que l’étoile
du soir apparaît aussi le matin. Je ne donne ici à choix que
ce sens objectif : il existe plusieurs mots pour désigner une
gardienne d’immeuble, et parmi ces mots quelqu’un a
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matériel, ou, comme dit sim plem ent Sartre, une chose,
dont la fonction première n ’est pas de signifier. Mais
l'emploi par Sartre du mot sens pour désigner l’un de ses
deux modes de signifiance empêche de congédier trop vite
la comparaison avec Frege. Morgenstern désigne certaine
planète par le détour d’un aspect, un peu comme la chaise
sartrienne évoque le Grand Siècle par le détour d’une
appartenance historique. Vénus, ou, mieux, telle désigna-
lion plus conventionnelle ou plus neutre qui pourrait être
lin numéro de code, désigne la même planète sans détour,
ou par un détour moins perceptible, comme le sigle x v i i
désigne le Grand Siècle. On peut donc dire que certaines
signifiances (xvn, Vénus) sont plus directes, ou plus trans
parentes, que d’autres (chaise, Morgenstern), en tant que
plus conventionnelles et moins chargées de sens. Ces dif
férences sont évidemment toutes relatives, et éminemment
réversibles (j’y reviendrai), mais sans doute suffisantes
pour qu’on puisse dire qu’en situation courante le premier
type est plus dénotatif, et donc le second plus connotatif
ou, si l’on préfère l’équivalence posée par Dufrenne, plus
expressif1.
L’opposition tient au mode de signifiance, et non à la
nature du signifié (identique) ni à celle du signifiant, même
si l’analyse de Sartre, dans Saint Genet, suggère une diffé
rence de nature entre les « m o ts» , qui signifient, et les
« choses », qui font sens. Soit dit en passant, s’il en était
ainsi, une définition du style par l’emploi connotatif de la
langue n’aurait aucune application, puisque la langue
serait toujours et seulement dénotative, sans aucune apti
tude à porter un sens sartrien, c’est-à-dire une connotation.
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Le sigle x v ii dénote
le Grand Siècle.
La chaise évoque
1. Ibid., p. 60 sq.
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dénote Vénus
Morgenstern
évoque le matin
dénote ma concierge
Bignole
évoque ma vulgarité
dénote
évoque
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1. Ibid., p. 95.
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1. P. 127.
2. Cette notion est évidemment étrangère au système goodmanien.
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« étoile du matin ».
Étoile du m a tin ' « Vénus »
,« nuit »s^
N uit ' « mort »
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A m p litu d e
m ot > m ot
N iv e a u
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1. Les termes fait et trait stylistique (ou encore, chez G. Molinié, sty
lem e) sont souvent employés comme synonymes. Or, il me semble qu’il
serait utile de distinguer entre le fa it de style, qui est un événement,
récurrent ou non, dans la chaîne syntagmatique (par exem ple, une
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1. O f M ind, p. 131.
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STYLE ET SIGNIFICA ΓΙΟΝ
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A r g u m e n t....................................................................... 7
1. Fiction et diction............................................................ 11
4. Style et signification.......................................................95
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