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Le Figaro (Paris.

1854)

Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France


Le Figaro (Paris. 1854). 28/05/1854.

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LQ T vous regardant du coin de l'ceil à travers leurs
grillées; plus loin, des tours gigantesques; Galata, qui
domine le quartier franc Topkhané, le quartier général
fenêtres

de l'artillerie, et le Seraskier, où une sentinelle veillejour


Celui qui sait voyager sait voir. Il ne se hâte pas de
descendre à terre de la poupe de son navire, prise comme
observatoire, il regarde se déroulerdevant ses yeux un pa-
norama éclatant.
Erthogrul mourut dans une grande et heureuse vieillesse,
et fut enterré à Sugut, où l'on visite son tombeau, ombragé
de beaux cyprès et de chênes toujours verts.
Le fils d'Erthogrul, Osman (ce nom, très-doux à pro-
noncer, veut dire « le briseur de jambes »), Osmanvassal ne se
et nuit pour donner à coups de canon le signal de l'in- II. résigna pas à la tranquille condition de pasteur. Le
cendie (les Turcs n'ont pas d'autres cloches) puis ce sont leva une armée et conquit promptement son indépen-
les mosquées Sainte-Sophie d'abord, Saint-Iréné, Sultan- dance. Il se rendit maître d'une portion de la Bithynie,
Nous donnons aujourd'hui un pendant à notre numéro Achmet, Osmanieh, Sultan-Bagézid, Solemanie Sedja- LES TURCS. battit Mourad Ier, fonda l'empire ottoman, et donna à ses
russe; c'est une étude sur la Turquie due à la plume Djmissi, Sultan-Mohammed Il, Sultan-Sélim. Au-dessus soldats le nom d'Osmanlis, qui est encore aujourd'hui l'ap-
colorée, délicate et spirituelle de M. Louis Enault. De re- d'un océan de maisons, ces mosquées, pareilles à d'im- Origine des Turcs. Les victoires d'Erthogrul et d'Osman. pellation la plus chère à sa race. Le nom de Turc passe
tour depuis quelques mois d'un voyage en Orient, notre menses écueils, arrondissent leurs coupoles bleuâtres; aux pour une injure, et dans la langue des Turcs, il veut dire
collaborateur a vu en artiste et en observateur le pays quatre angles, les minarets blancs s'élancent comme des Les nations ne se passent pas de merveilleux; l'étrange grossier, barbare, bien qu'Erthogrul et Osman appartins-
qu'il décrit, et s'est efforcé de retracer, dans un tableau fusées de pierres; le frêle balcon qui les entoure semble des peu-
se retrouve toujours à leur origine. L'enfancepoétiques sent à cette forte race tatare d'où sont sorties les diverses
un anneau d'or ou de fer, et l'aiguille menue
qui les sur- ples comme celle des hommes se berce de récits
rapide et impartial, l'origine, les mœurs, les usages, l'or- nations qu'on appelle généralement les nations turques.
ganisation càfe et militaire de ce. peuple, devenu le
client de la Iromce.
Notre but, en complétant une-première publication, est
purement historique. Nous avons voulu faire mieux con-
monte déchire le ciel délicat çà et là, contraste puissant
et doux, des bouquets de cyprès opposent leur verdure
uniforme à la blancheur des maisons, et, comme l'ombre
d'un tableau, font ressortir les fins détails de l'architecture.
Le ciel ajoute une splendeur à toutes ces magnificences
le mensonge dé la fable brode d'ornements la vérité trop
nue, et la légende est comme la préface de l'histoire.
froides races, du Nord ont leur mythologie le merveil-
Nos

leux ne pouvait manquer sous ce ciel oriental qui inspire


les poëtes. Aristote dit quelque part un mot profond « La
des peuples.
L'amour tient une grande place dans les récits de l'O-
rient. Il enchante le berceau des hommes et le berceau
Osman aimait la belle Malkathoun (la femme-trésor) 1
fille du cheikh Edébaly. Les grands parents n'entendent
naître le théâtre de la guerre européenne, en nous plaçant ce n'est pas le cobalt ardent de
l'Afrique, ni l'azur impla- poésie est plus vraie que l'histoire. Les légendes, les songes rien à l'amour, pas plus en Turquie qu'ailleurs.
au point de vue de l'histoire anecdotique, le seul
qu'il cable de l'Arabie; c'est un bleu tendre et délicat, une lu- prophétiques, si complaisammentrapportés par les histo- On lui refusa donc sa bien aimée Osman ne se dé-
nous convenait de choisir et qui se fasse accepter du mière tamisée, humide comme une lueur de perle, les riens orientaux, au sujet de l'origine de la dynastie otto- couragea pas; il connaissait le proverbe oriental qui dit
lecteur, que Figaro ne saurait captiver qu'à la condition reflets changeants et satinés des opales laiteuses le jour mane, ne font qu'exprimer poétiquement les préoccupa- que la patience est la clef du bonheur, et que la résigna-
de le distraire. d'un autre monde, celui du rêve et de la féerie. tions et les espérances qui remplirent pendant trois siè- tion dans l'amour obtient la palme comme le martyre. Un
H. de VUlemessant. Topkhané d'un côté et le vieux sérail de l'autre veulent cles l'imagination des Turcs, je veux dire l'envahissement soir, sous la tente d'Edébaly (car s'il était refusé comme
échancrer dans du monde et la propagation du Koran. gendre, il était accueilli comme hôte et comme ami), il fit
se rejoindre, comme deux croissants, pour « En 1231, Erthogrul (l'homme au cœur droit), sorti avec les
la mer le port de la Corne d'Or. Au milieu des escadres de un songe: il crut voir sortir de ses reins un arbre dont
vapeurs immobiles près des ponts, en face des embarca- une tribu nombreuse des bords orientaux de la mer Cas- verdoyants rameaux couvraient la terre entière. Le Cau-
CONSTANTINOPLE
dères, partout, des flottilles de caïks, longs, étroits et lé- pienne, s'avança vers l'occident de l'Anatolie, rencontra case, l'Hémus, le Taurus et l'Atlas, supportaient ce gi-
une vélocité deux armées qui se combattaient, prit la généreuse réso- gantesque dôme de feuillage. Des racines de l'arbre jail-
I gers, qui sillonnent la mer en tous sens avec lution de secourir la plus faible, et son intervention décida
de marche et une sûreté de direction sans égales un peu lissaient le Tigre, l'Euphrate, le Nil et le Danube. Des villes
plus loin, dans la perspective, au milieu de l'eau, en face
la victoire. Les vaincus étaient des ftlogols; les vainqueurs, ornées de mosquées, de tours, de pyramides, de palais
Quand, après une nuit de tempêtes dans la mer de Mar- des Turcs Seldjoukides, commandés par Aladin, sultan d'I- surmontés de croissants, se déployaient dans des hori-
pénètre de Scutari, à l'entrée du Bosphore, sur un îlot de rochers,
mara, le steamer qui vous apporte de Marseille de la la l'our de la Fille, pyramide dans sa blancheur d'albâtre
conium. La Providence m'a conduit vers toi, lui dit Er- zons sans limites. A l'extrémité des branches de cet
arbre
avec le jour et le calme renaissant dans le bassin beaux les dauphins et les espadons se jouent par bandes dans la thogrul après le combat; je te baise la main comme à mon s'allongeaient des épées nues, dont les pointes se tour-
Corne-d'Or, vous avez devant vous un des plus protecteur. Dieu seul est Dieu, et'Mahomet est son pro- naient vers les différentes villes de l'univers, et surtout
spectacles qui puissent réjouir l'œil de l'homme. Con- transparence bleue des eaux profondes des vols de pi- phète Aladin embrassa Erthogrul, jeta sur ses épaules
stantinople se déploiedans sa riante majesté la ville s'ar- geons blancs tourbillonnentdans l'air, et passent d'unel'Eu-côte vers Constantinople. Cette ville, placée entre deux mers
à l'autre. commepour porter les messages d'amour de une pelisse d'honneur, et lui donna en propriété la belle et deux continents, ressemblait à un anneau enchâssé en-
ronditautour d'un bassin immense, étageant l'amphithéâtre et riche vallée de Sugut (le saule), située à sept lieues de
de ses maisons, comme les gradins d'un cirque autour de rope et de l'Asie; les goëlands familierstandis se posent sur tre deux diamants; Osman allait mettre cet anneau à son
les vergues ou rasent le pont des bateaux, que des Dorylée, et à douze de Lefhé, l'ancienne Leuca du San- doigt lorsqu'il se réveilla il était temps
le sol s'élève par un mouvement
son arène gigantesque
troupes d'alcyons effleurent la cime des vagues de leurs gare. Erthogrul menait une vie patriarcale dans cette Osman, réveillé, raconta le songe au père de sa bien-
doux et inégal, qui fait onduler avec une sorte de morbi- vallée et pratiquait l'hospitalité. Il nourrissait son cœur
desse languissante de longues vagues de maisons de toutes longues ailes noires; leur cri plaintif et leur vol inquiet aimée.
les font prendre par les Turcs pour des âmes en peine, des préceptes du Koran et lisait souvent ce livre. « Puis- parmi les hommes, dit le cheikh
formes, de toutes couleurs, dont la disposition même du que tu as lu ma parole avec autant de respect, lui dit une « Tu seras grand
terrain permet d'embrasser l'ensemble et de saisir les dé- qui veulent revoir la terre des vivants et ceux qu'ils ont Edébaly; je te donne ma fille. »
aimés. Le musulmanles respecte comme il respecterait ses nuit, dans son sommeil, une voix céleste, les enfants de tes
tails çà et là quelqueimmense palais, le vieux et le nou- enfants seront honorés de génération en génération. » Un vieux derviche, qui avait vu quelques jours aupara-
veau serait, baignant leurs pieds dans les flots clairs, et morts eux-mêmes.

respectez les entrailles qui vous ont portés I subir aucun contrôle. Le mari lui-même s'arrête à la porte
Chaque Turc riche peut avoir plusieurs de ces belles «0 hommes 1
sont venues voir la sienne.-
FEUILLETON DE FIGARO DU 28 MAI 1854 Dieu observe vos actions Les hommes sont supérieurs aux du harem où d'autres femmes
créatures dans sa maison. femmes, à cause des qualités par lesquelles Dieu a élevé Les babouches jaunes ont le même privilége que la pan-
ceux-là au dessus de celles-ci, et parce que les hommes emploient touffie du moine espagnol. Quand ces femmes sortent du
La polygamie a existé de tout temps en Orient. On n'a pas particulier avertit les hommes de ren-
la même opinion sur la femme sous un ciel brumeux, ou leurs biens pour doter les femmes. (Voilà une raison pré- harem, un petit cri trouver sur le
LES FEMMES D'ORIENT dans le pays du soleil. La Bible n'a fait nulle part un repro- cieuse !) trer dans leur appartement, pour ne.pas se immédiatement
che à Jacob de donner des enfants à ses esclaves, bien qu'il Les femmes vertueuses sont obéissantes et soumises elles passage des visiteuses. L'escalier surtout est
eût déjà deux épouses légitimes; Abraham, père de la grande
»
conservent soigneusement, pendant l'absence de leur mari, abandonné. Ceux qui sont surpris par un mouvement trop
Il ne faut pas nommer les
La toilette turque. La polygamie.
femmes. La femme et les poètes. La femme et le Koran. race arabe, engendra Ismaël de sa dans concubine Agar, et le ce que Dieu a ordonné de conserver intact vous répriman- brusque retournent la tête vers le mur.
La vierge noire. saint roi David, devenu vieux, reçut son lit Abisag, sa derez celles dont vous aurez à blâmer l'inobéissance vous La femme turque sort à toutes les heures de la journée,
Le serai et le harem. La femme prêtre.
Les eaux douces. -Les cimetières. La femme sainte. Nar- jeune et belle servante. les reléguerez dans des lits à part vous les battrez mais, -seule ou accompagnée de ses femmes ou de ses eunuques.
ajoute jamaisde son mari elle est toujours hermétiquement
ghileh et cigarettes. A cette idée antique de polygamie, l'Orient moderne aussitôt qu'elles vous obéiront, ne leur cherchez pas que-
celle de la sequestrationabsolue de la femme. Le mot harem relle. Dieu est élevé et grand » voilée. La femme turque d'une intelligence supérieure peut
1
politique et sociale, mais
Elle est belle, la femme d'Orient, Haydée, Gulnare ouMédo- désigner
veut dire inviolable, et on s'en sert également pourterritoire L'interprétationdes docteurs, et les mœurs, pluspuissantes avoir une véritable influence
rah, belle comme le rêve d'un poète. Voyez plutôt: c'est le l'appartement impénétrable de' la femme et le que lès lois, ont singulièrement adouci ces théories,
la elle ne peut la faire prévaloir que par le moyen de son
soir elle est descendue dans les jardins du harem; elle tra- sacré des deux villes saintes, la Mekke et Médine. discipline conjugale des maris turcs est aujourd'hui une des mari, sur lequel tout d'abord elle l'exerce. Il n'y a pas là
verse lentement les longues allées, ou s'arrête un instant sous On sait que les Orientaux ne prononcent jamais le nom de plus douces qui soient au monde. d'Egérie politique, patronant officiellement ses favoris. On
les citronniers et les jasmins en fleurs; elle vient de regarder ne compte pas non plus un seul bas-bleu plus dans tout l'empire
leurs femmes devant un homme. Un Turc de Damas ou Le Koran permet quatre femmes légitimes, et tolère les grandessupé-
le ciel. Quelles flammes humides dans son grand oeil noir mé- d'Alep qui n'a pas voyagé en Europe regarde comme une esclaves. Mais nous devons ajouter, ceci peut-être sur- de la Sublime-Porte; c'est là une de ses
lancolique, brillant et doux comme l'œil des gazelles de son mortelle offense qu'on lui demande des nouvelles de sa prendra le lecteur,-que les cas de polygamie sont extrême- riorités sur l'empire français.
pays 1 Maintenant qu'elle ne craint plus les regards indis- femme ou de sa fille. Si lui-même est obligé d'en parler, il ment rares en Turquie. Si Mahomet permet d'épouser La femme remplit parfois des fonctions sacerdotales.
une réunion où il n.y a que des femmes, une d'elles est
crets, elle laisse aux mains des odalisques I'iasmak blanc qui trouve pour la nommer,- ou plutôt pour la désigner,– une plusieurs femmes, il ajoute qu'il est plus méritoire de se Dans les autres
voile son front, et le féredjé qui dérobe sa taille sous de forme elliptique des moins compromettantes. 11 dit « la contenter d'une seule. 11 a même dit quelque part que déléguée pour réciter à haute voix la prière, que
vastes plis. Sa veste, aux larges manches relevées, sa veste, maison. » Il est sûr comme cela de ne scandaliser personne. celui-là est damné qui répudie sa femme sans motif. répètent ensuite toutes ensemble. Quand le territoire est
brochée de fleurs d'argent, sentr'ouvre au corsage et laisse Quand un père veut annoncer la naissance d'une fille, il a A Constantinople, tout ce qui occupe un rang
élevé dans envahi, la femme peut être tenue de marcher à l'ennemi,
mais elle marche
sans l'autorisation de son mari, Constantinople,
voir une chemise de gaze, insaisissable, étincelante, un recours à cette circonlocution ingénieuse Il vient de me la hiérarchie sociale n'a qu'une seule femme; il en est de même Pendant que nous étions à une
rayon et un soume tissus ensemble. Le chalwar, flottant, naître une voilée 1 Auprès de cette réserve, la langue an- même dans la plupart des provinces. Il est vrai. comme on voilée.
descend jusqu'à ses pieds, dont la pointe se cache dans des glaise me semble badine et folichonne. dit vulgairement, que l'on se rattrape sur les esclaves.fillesJ'ai inconnue, une fille du désert, que l'on appelait la Vierge
terliks semés de perles; des anneaux d'urgent sonnent à ses Quoiqu'il en soit, le culte de la femme se retrouve à cha- certain pacha de Syrie qui avait quinze jeunes Noire, traversa la ville, suivie d'une troupe d irréguliers,
connu
chevilles nues son bras, sculpté dans un marbre vivant, que page dans les poëtes arabes du moyen âge. Rien de dans son harem j'ajouterai que ce moushir,– c était un pour aller joindre au camp de Varna le généralissime Omer-
s'abandonne aux morsures d'un serpent de saphir à tête de plus galant que les Maures d'Espagne et les poëtes de Gre- moushir,-avaitsoixante-cinq ans. On s'ennuyait beaucoup Pacha Elle montait à cheval avec autant de hardiesse que
rubis ses doigts sont chargés de bagues, sur lesquelles l'ar- haute taille disparaissait sous les plis nombreux
nade Les Arabes du Désert ont rempli leurs chants d'entre- dans son harem. de grâce sa
tiste savant a gravé les surates qui font aimer deux longues prises merveilleuses, dont les femmes étaient le but et la d'un vaste féredjé d'étoffe brune; elle portait sur le visage
tresses noires, entremêléesde sequins d'or, s'échappent du récompense. La liberté de la femme commence au seuil du harem, une le borghot de crin noir, masque habituel des femmes égyp-
tarbousch écarlate et parfument l'air qui les caresse. On de liberté absolue et que n'entrave jamais aucune tyranniecon- tiennes. Pas un soldat n'eut même la pensée de lui man-
devine qu'elle n'a qu'à vouloir pour être obéie, et qu'elle On sera peut-être curieux de connaître l'opinion jugale. La femme élève ses enfants et commande aux quer de respect.
entraînerait le inonde avec un cheveu de son cou, wno Mahomet au sujet des femmes. esclaves. Elle reçoit et rend les visites de femmes sans Le Turc regarde la femme comme le plus grand bien que
crine collisui, comme dit si bien l'Ecriture. Voici le texte sacré du Koran
vant un vautour royal planer sur la tête du guerrier, unit longé manque peut-être de la régularité correcte qu'on taire du sultan, le chef de sa maison militaire, et le premier
les deux époux. IV retrouve dans les types du beau artistique. Mais ces traits médecin du palais, qui a douze médecins ordinaires sous ses
Osman mourut à Sugut en 1326. Au moment où il allait calmes, à travers leur impassibilité marmoréenne, laissent ordres c'est le chef du corps médical de tout l'eiipire.
rendre l'âme, on lui annonce que son fils Ourkhan vient PORTRAIT DE MAHOMET Il. deviner l'immuable sérénité de ce pouvoir absolu, im- Les Aghas de l'intérieur sont presque toujours des eunuques.
de conquérir Brousse, la capitale de la Bithynie. « Allah1 Ils ont eu souvent une influence prépondérante: forts sous
mense, incontesté, qui s'appuie d'une main sur un livre les empereurs faibles, faibles sous les empereurs forts..
Allah s'écria-t-il, je te rends grâce je m'endors au bruit On sera peut-être curieux de le voir, tel qu'il a été tracé sacré et de l'autre sur une épée nue. Ses yeux sont noirs, Le chef des eunuques, que l'on appelle l'Agha des filles, est
d'une grande victoire demon fils » Et le chef des Osmanlis par un historien turc. fixés et comme immuables; ils voient sans regarder; le le premier dignitaire du palais. Les Turcs l'appellent, dans
mourut en bénissant Allah Son nez aquilin était pareil à un bec de perroquet re- rayon. semble éteint sous leur paupière immobile. leur langue fort galante, « l'Agha de la demeure de la félicité »
Osman, comme on le voit, est une grande et poétique posant sur des cerises (sur un passeport on mettrait plus Abdul-Medjid, à l'exemple de Mahmoud; son père, a ré- C'est le seul officier du palais à qui l'on reconnaisse le droit
figure, à la fois antique et jeune, forte et vivace elle simplement, nez aquilin, teint coloré); sa barbe noire pudié l'antique magnificence des sultans. Autrefois les d'avoir à son service des filles esclaves, c'est un droit dont
ouvre fièrement pour sa race l'ère glorieuse des conqué- était aussi épaisse que des fils d'or joints ensemble, et sa sultans n'apparaissaient à leurs peuples, comme Dieu à on est sûr qu'il n'abusera pas. Viennent ensuite le trésorier
rants. moustache ornait ses lèvres comme des feuilles de bnrolie Moïse, qu'à travers « un buisson ardent de diamants en impérial et le trésorier de la couronne, qui est préposé au
posées sur un bouton de rosé. Ses yeux 'hoirs étaient petits, garde-meuble de l'empire, que l'on suppose rempli de tré-
phosphorescence, » C'étaient de véritables idoles dans des
m vifs et brillants. Ses joues, pleines et rondes, étaient nuan- châsses de pierreries, « espèces de paons du pouvoir épa- sors accumulés depuis les premiers empereurs grecs jusqu'à
cées de teintes rouges et blanches. Sa taille était moyenne nos jours. On conserve dans une des salles du garde-meuble
nouis au milieu d'une auréo,le de soleils. » un portrait et un costume complet de chaque sultan. Je laisse
PRISE DE CONSTANTINOPLE. et bien prise. Il montait à cheval avec une rare perfection, On a changé, tout cela et la châsse, aujourd'hui, n'est à penser si cette chambre est intéressante à visiter pour les
et personne mieux que, lui ne savait dompter les plus fou- plus qu'un paletot, sac amateurs de la toilette turque.
Pendant les cent vingt-six ans qui s'écoulèrent depuis la gueux coursiers. Il portait le large pantalon, la robe, flot- Mahmoud, le père du sultan, avâîtyejëté le turban et la Le chef des eunuques blancs s'appelle aussi Gardien de la
mort d'Osman jusqu'à la prise de Constantinople,ses six pre- tante, les brodequins jaunes, terminés en pointe, et son robe, à l'époque de ses réforjpes. Ce fut un scandale porte.
mierssuccesseurs, Ourkan, Mourad Ier, BajazetI", Maho- turban, composé d'étoffes de soie de diverses couleurs, parmi les vieux Turcs. A l'avènement de Mahmoud, les On range après lui le grand maître de la cour, qui porte
med 1er, Mourad II et Mahomet II, enlevèrent successive- avait la forme cylindrique. Le sultan aimait le luxe et la grands dignitaires déclarèrent qu'ils n'assisteraient pas au comme insigne un bâton garni de lames d'argent puis vien-
ment à la faiblesse des empereurs grecs l'Asie-Mineure, la magnificence extérieure; ses vêtements, ses armes, comme nent le maitre de la garde-robe, le premier eunuque de la
Thessalie, la Thrace, une partie de la Bulgarie, la plus la bride de la selle, les caparaçons de son cheval de ba- sacre si le sultan ne reprenait, au moins pour, ce jour-là, chambre, le directeur des itchoglans (ou pages), le préposé
l'antique turban des Osmanlis. Abdul-Medjid résista, et il à la garde des reliques, le premier messager référendaire et
grande partie du littoral de la mer Noire, quelques îles de taille, resplendissaient d'or et de pierreries. parut dans la mosquée d'Eyoub, velu du pantalon' et de l'huissier en chef, n'oublions jamais les huissiers
l'Archipel et la rive gauche du Bosphore. la redingote à la frangue. Cependant les .femmes, tou- Celui qui remplit aujourd'hui cette fonction est un homme
Constantinople aura une grande place dans l'histoire. chées de sa jeunesse et de sa bonté, se disaient entre fort gras. Dans les cérémonies il marche à la droite du sul-
Un instant capitale du monde, capitale de l'empire d'Orient elles « .Ôylo'um né guzeb » N'est-ce pas, que notre fils tan, tenant la main posée sur la croupe de son cheval il
pendant des siècles, elle fut le premier boulevard de l'Eu-
rope contre l'Asie. Il y a cinq cents ans on jouait sous ses
murs, comme on fait encore aujourd'hui, une partie qui
avait pour en jeu la civilisation ou la barbarie.
SULTAN ABDUL-MEDJID-KHAN

Nous aimons à rapprocfîer de ce portrait celui du sultan


Quand les Turcs vinrent mettre le siège devant Con- actuel, Abdul-Medjid-Khan,tel que nous l'esquissions pour
est beau?
Le jour
n

simples, 8'é~ait"
si¡n'ples~ sais
je le vis, le costume du sultan était des plus
toutà l'jjipure.un paletot
C'était, çommeje le disais tO!ltqI'Jm!Ire"un
s^cendrap bleu foncé, un pantalon d'un bleu un peu plus
clair, des bottes vernies à éperons d'or. Le paletot flottant
porte partout sur sa poitrine les sandales de son maître, en-
fermées dans un fourreau de satin.
Tout ceci, comme on le voit, fait un état de maison con-
venable, mais assez simple. Avant le} sultan Mahmoud, le
personnel du séraï s'élevait à douze mille hommes.
On les appelait Kilidji, comme qui dirait les Sabres. Je ne
stantinople, la ville avait pour défenseurs environ cinq nous-même dans des notes de voyage, au mois d'octobre et rejeté de chaque côté, laissait voir la tunique nationale connais pas de nom plus guerrier.
mille Grecs et deux mille Italiens mais elle avait pour dernier. On nous, permettra de transcrire quelques lignes r^iausséç de quelques dorures, et un nichan-iftikhar res-
appui un héros digne d'un plus grand peuple et d'un meil- de notre journal, écrites avec précipitation, mais d'autant plendissant de pierreries pour coiffure, le fez en feutre
leur siècle Constantin Paléologue. Le désir de prendre plus fidèles que nous ne songions point alors à les impri-
Constantinople brûlait l'âme de Mahomet Il c'était son mer. On arrange toujours un peu la vérité qu'on im- rouge, laissant passer d'une ligne le tekkiè de lin blanc,
qui recouvre la tête rasée du musulman. Une aigrette
idée fixe le jour il dessinait ses murailles, marquait les prime
points d'attaque, indiquait l'emplacement des batteries et «
J'ai vu deux fois, aujourd'hui, sultan Abdul-Medjid. Mon
droite de plume de héron était fixée
bouton de gros diamants,
la coiffure par un
UN COUP D'ŒIL SUR LA TURQUIE

des machines de siège; la nuit, il en rêvait Les sultans ont caïk a effleuré sa barque impériale, comme il allait à la Le sceptre des Osmanlis s'étend sur trois parties du
Les deux traits distinctifs du caractère d'Abduil-Medjid monde, l'Europe, l'Asie et l'Afrique. L'empire turque pos-
toujours beaucoup rêvé. mosquée d'Eyoub recevoir le titre de ghazir (triompha-
Mahomet II braqua le canon d'Urbain devant la porte teur) après une première victoire de ses armes. Il était
sont la douceur et la fermeté il s'enferme des journées sède une mer pour lui tout seul, la mer de Marmara, qui
entières quand il sait qu'on doit lui présenter un arrêt de l'enserre de toutes parts, et développe sur six autres mers
Saint-Romain (qu'on appelle encore encore aujourd'hui la pâle, un peu triste, à demi couché sur une pile de cous-
mort à signer. Les gouverneurs de provinces sont quel- ses douze cents lieues de côtes brodées de golfes et den-
porte du canon (Top-Capoussil. Ce canon, fondu à Andri- sins, à la poupe de sa, barque pavoisée. Trenle-six ra- quefois obligés de faire mourir les criminels par accident,
nople par un Hongrois du nom d'Urbain, lançait un boulet meurs en vestes blanches faisaient voler cette barque telées de promontoires ce sont l'Adriatique, la Médi-
quand ils craignent la contagion de l'exemple à la suite de terranée, la mer Noire, la mer Rouge, la mer Morte, et
de six cents livres. Il fallait cinquante paires de bœufs comme une flèche sur le miroir bleu du Bosphore. A cent quelque forfait retentissant. Le bostangi-bachi, ou chef des
pour le traîner. Notre ami Georges Nouguès, le spirituel pas devant lui, une autre barque, remplie de musiciens, une portion du golfe Persique.
jardins, se plaignait un jour devant moi de ce que le sultan, Sa population, de trente-six millions, comprend qua-
rédacteur du Journal de Constantinople, nous montrait, il jouait tour à tour des marches turques et des motifs em- dans son horreur du sang versé, ne voulait pas lui per-
y a quelque mois, la trace de ses boulets entre la porte pruntés à nos opéras européens. Le tambour de basque et
torze races d'hommes répandues dans les plus beaux pays
d'Andrinople et la porte Courbée (œgri capoussi). Outre le la flûte des derviches, habilement introduits dans l'orches- mettre de détruire les lapins qui fourrageaient dans ses du monde.
pla!es-bandes; et ce même homme, après avoir contemplé En voici le tableau comparatif que nous empruntons aux
canon d'Urbain, quatorze batteries foudroyèrent la ville. tre, lui donnaient une teinte suffisante de couleur locale; sans crainte le réveil de la liberté dans les provinces limi- dernières statistiques connues
Le courage de Constantin grandissait avec le danger; il se la surface des eaux prolonge et adoucit leur sonorité trop trophes de son empire, sut résister aux exigences de.deux
multipliait on le trouvait partout. Les chrétiens, sous ses vive, et la barque impériale semble s'avancer dans un sil- grandes puissances, et sauver à la fois la vie des proscrits RACES. EN EUROPE. EN ASIE. EN' AFRIQUE.
ordres, réparaient la nuit les brèches faites le jour à leurs lage harmonieux. hongrois-etson honneur! On sait avec quelle impassibilité Ottomas.
Grecs. 1,000,000
2,100,000 10,700,000

Juifs.
»
murailles. Mais, un matin, les assiégés virent la flotte otto- Le sultan est descendu. 1,000,00,0
mane dans le port intérieur de la ville elle avait passé Une grande foule respectueuse et muette assiégeait la
sereine il a résisté aux exigences de la Russie. Il porte
Arméniens 400,000 2,000,000
>.

par dessus les murailles ou peu s'en faut!I mosquée. Les dignitaires de l'empire ont seuls pénétré
Les navires de Mahomet, au nombre de quatre-vingts, avec le prince. J'ai fait.aborder, et je me suis mêlé à la
écrit sur le front le mot suprême de Y Islam « Résigne-
toi » Mais, en sa qualité de souverain absolu qui voit le
monde à ses pieds, c'est devant Dieu qu'il se résigne.
Slaves.
Roumains
70,000
6,20.0,000
80,000
»
»
»
»
quittèrent le Bosphore, abordèrent et, posés sur des trains foule.
de bois, tournèrent le Grand-Champ-des-Morts,gravirent Chaque vendredi le sultan va dans une mosquée, tantôt
Sa Hautesse Abdul-Medjid, 38e sultan de la dynastie des Albanais.
Tatars.
/i,O0O,i.O0
1,500,000
» »
»

Arabes.
>•
Osmanlis, 28e sultan de Constantinople, grand seigneur 16,000 20,000
la colline de Péra, et furent lancés dans le port par le vallon dans la plus magnifique, tantôt dans la plus pauvre. C'est d'Europe, d'Afrique et d'Asie, est allié par les femmes à 900,000
»
3,800,000
»
de San-Dimitri, à l'ouest de Galata. un acte de religion et en même temps un certificat de vie
Les Grecs sentirent qu'ils étaient perdus. Une prophétie qu'il se délivre à lui-même devant son peuple. Le reste
avait dit Constantinopletombera quand on verra les flottes du temps il vit caché au fond du serai, dans un mystère
l'Empereur des Français. La grand'mère d'Abdul-Medjid
était une créole de la Martinique, Mlle Aimée Dubuc de
Rivery, parente de Joséphine de La Pagerie, aïeule mater-
Druses.
Syriens et Chaldéens.
Kurdes
»
»
»'
235,000
30,000
1,OUO,000
»
»
»
Turkomans
voguer sur la terre. La prophétie était accomplie à moitié
elle devait s'accomplir tout entière.
que nul ne pénètre.
Abdul-Medjid resta une demi-heure en prière; la foule nelle de Napoléon.
Mlle Aimée de Rivery, destinée à une aussi étrange for-
Tsiganés. »
21û,000
85,000
»
"Vl>
»
»
L'assaut général fut annoncé peur le 29 mai. attendait toujours. Un aide de camp vint annoncer que Sa Au point de vue religieux, on peut les répartir ainsi
Mahomet II, à cheval et tenant en main une massue d'or, Hautesse sentait le besoin de se recueillir et-de demeurer tune, vint en France à l'âge de dix ans. Elle fit son éduca-
tion à Nantes, au couvent des dames de la Visitation.
jura par le Prophète, par l'âme de son père, par ses en- plus longtemps dans la présence d'Allah.
fants et par son cimeterre que le Koran triompherait dans Le peuple se retira sans donner aucun signe d'impa-
Constantinople. Les Derviches parcouraient les rangs de tience ou de désappointement.
l'armée en criant Heureux ceux qui vont cueillir la palme J'allai prendre des sorbets aux roses dans un café voi-
A dix-huit ans elle reprit la mer pour gagner la Mar-
tinique. Une voie d'eau se déclare. La jeune créole est
sauvée et prise à bord par un bâtiment en route pour
GrecsRELIGIONS.
Musulmans.
Catholiques
Juifs
EN EUROPE.
4,550,000
10,000,000
640,000
70,000
EN ASIE.
12,650,000
3,C00,000
260,000
80,000
EN AFRIQUE.
3,800,000
»
»
Mayorque. Ce n'était pas précisément la ligne droite pour »
du martyre! Malheur aux lâches qui songeraient à la fuite! sin, bien décidé à rester jusqu'à la fin de la prière. aller de Nantes à la Martinique.
Cependant on n'entendait que ce cri dans les rues, sur.les Au bout d'une heure je vis passer des chevaux de main Environ 300,000 appartiennent à des sectes diverses
Survient un corsaire algérien qui enlève l'équipage et
places etdans les églises de Constantinople Kyrie eleison, ténus par des sais et des esclaves noirs aux bouches lip- les passagers. que nous ne saurions ranger sous aucune des dénomina-
Kyrie eleison Ce n'était pas rassurant. pues. tions sus-énoncées.
Mlle de Rivery fut conduite à Alger, achetée par le dey
L'empereur parla comme Léonidas, seulement son dis- Je courus me poster sur le mur d'un cimetière, d'où je
cours fut un peu plus long mais il tomba au premier rang, pouvaisdécouvrir une longueétendue de la route qu'il allait et envoyée par lui au sultan. Les petits cadeaux entretien-
nent l'amitié. Abdul-Haméd en fit sa favorite, et, par la
ce qui rachète bien des discours, et, dans cette mêlée de suivre. naissancé de Mahmoud, elle devint validè, c'est-à-dire
morts, on ne reconnut le cadavre du héros qu'à sa chaus- Le sultan allait au pas au milieu d'un cortège peu nom- sultane-mère. L'ARMÉE TURQUE.
sure de pourpre parsemée d'aigles d'or. breux. Il me sembla fort bien en selle. Il montait un cheval
Cependant le peuple se pressait dans la basilique de persan aux membres fins et délicats, à la tête fière, à l'œil
Sainte-Sophie, demandant à Dieu d'envoyer contre les ardent, et dont la robe claire et pâle se glaçait de tons li- c~c-_ L'armée turque avant la réforme. Sipahis. Janissaires. L'ar-
mée d'aujourd'hui. Patience du soldat turc pas payé et mat
Turcs son ange exterminateur qui devait, selon la prophé- las, comme on en voit dans quelques tableaux de M. Dela- nourri. La garnison de Jérusalem. Un chant de guerre.
tie, sauver Constantinople à l'heure suprême du péril. croix, que jusqu'ici je m'étais contenté de croire impossi- MAISON DU SULTAN
Aide-toi, le ciel t'aidera! Ce proverbe n'avait pas cours à bles. Il s'avançait lentement, avec une souplesse moelleuse, Un chapitre sur l'armée turque ne saurait manquer
Constantinople Ce ne fut pas l'ange qui vint; ce fut Maho- onduleux comme un cou de cygne, frissonnant sous sa La liste civile du sultan est maintenant fixée à dix-sept,t d'opportunité à un moment où sa résistance héroïque
met. Il entra à cheval dans la basilique de Constantin, et, longue crinière, et secouant son mors blanc d'écume. Il millions deux cent cinquante mille francs. Le sultan, au arrête l'effort de la Russie; au moment où elle se laisse
foulant aux pieds un monceau de morts, de sa droite teinte était magnifiquement enharnaché selle de velours rouge moyen de cette liste civile, doit subvenir aux dépenses de sa décimer sur la brèche de Trajan et au pied des Balkans,
de sang, sur les fresques à fond d'or où nous en avons vu brodée d'arabesques d'or; le frontal ruisselant de perles, maison, qu'on appelle Serai. pour donner ses alliés lointains le temps de venir vaincre
la trace, il imposa l'empreinte de la main rouge, qui un soleil de rubis étincelant sur le poitrail. Il sera peut-être curieux pour des lecteurs français de auprès d'elle 1
est encore aujourd'hui le symbole et la marque éternelle L'empereur a trente et un ans c'est le printemps de la jeter les yeux sur la liste des officiers qui composent la mai L'armée turque a reçu une organisation nouvelle en*
de la propriété. beauté virile. Il est de taille moyenne, brun sous sa pâ- son du Grand-Seigneur. 1843, sous le séraskiérat de Riza-Pacha, dont le fils, Riza-
Après Constantinople, les Osmanlis soumirent la Grèce leur;, son visage est à la fois doux et triste. La bouche, On les distingue, suivant la nature de leurs fonctions, en
Aghas de l'extérieur et Agitas de l'intérieur. Bey, occupa longtemps chez nous avec une rare distinc-
entière, la Valachie, la Bosnie, là Servie, la Crimée, l'Al- aux lèvres ronges, tranche vivement sur cette pâleur. Il On range dans la première classe les lirions, ou aumôniers tion les fonctions de premier secrétaire d'ambassade.
banie et plusieurs îles de l'Archipel. porte toute la barbe, mais elle est clair-semée, courte, de la maison impériale; le grand-écuyer, qui a aussi l'in- L'ère des conquêtes ottomanes fut close par le traité de
Ce devait être pendant longtemps leur part en Europe. soyeuse et brune. Le nez est un peu gros, et ce visage al- tendance des prairies du domaine privé; le premier secré- Carlowitz, et la période de décadence commença quand la.

le ciel ait créé pour lui aussi il la préfère à tout. Il ne re- de nacre, avec des gestes d'Otello après qu'lago a parlé.- l'aspect d'un immense bal masqué, qui n'est jamais, ou Il n'y a plus de sylphide en Turquie, passé quatorze ans.
çoit pas de dot, il en donne. Tout ceci n'empêche pas qu'il Cette jalousie des eunuques est une grande preuve de la spi- presque jamais, suivi du souper de rigueur. II y a entre Les femmes turques, aujourd'hui, se peignent presque au-
ne se croie infiniment supérieur à la femme; sa bonté envers ritualité de 1 amour, et démontre que l'ou peut aimer rien tous les maris une confraternité sincère c'est une com- tant que les Françaises. Elles allongent leurs sourcils avec
elle est grave et protectrice on sent qu'elle descend du qu'avec son âme. pagnie d'assurances mutuelles. La vertu de chacune est la l'encre de Chine, brunissent leurs paupières avec le sur-
supérieur à l'inférieur. Avec une civilisation plus avancée, prime de tous,- une sorte, de société du doigt dans l'œil./En
les maris porteraient la peine de ce léger ridicule, parfaite-
ment inoffensif d'ailleurs.
Mais c'est surtout dans les cimetières, la promenade du
vendredi, qu'il faut voir les femmes turques, soit au grand
Turquie, il n'y a pas de conversations innocentes; on vous
fait passer de suite au criminel. Un agent de police, un men-
meh, avivent la flamme de la prunelle en teignant de khol
le dedans de leur œil, fardent leurs joues avec le suc rouge
diant, un portefaix, peut administrer sur-le-champ et en du henné, et blanchissent leurs épaules et leurs bras avec
champ des morts de Péra, soit à Scutari, sous les hauts cy- des pâtes d'amande et des crèmes de jasmin.
près, ou dans la nécropole d'Eyoub, ou bien encore dans les pleine rue, une correction à la plus grande dame de Con-
A cela près, ce sont bien les femmes les plus naturelles
PROMENADES ET DIVERTISSEMENTS. cimetières qui bordent les murs, entre la porte d'Andrinople stantinople qui aurait le malheur d'écouter les propos sé- du monde!1
et la porte du Canon. Les femmes turques sont doucement ducteurs de quelque galant giapur. Tous les témoins Ces créatures délicates ont, en général, assez bon appétit.
familières avec la mort elles ne la craignent point; elles ne prendraient parti.contre la femme battue. On peut même dire qu'elles mangent beaucoup, nou pas
Les femmes de Constantinople ont, chaque semaine, trois s'en détournent point; au contraire, elles la coudoient à Le voile turc est loin d'avoir la sévérité du borghot d'E- qu'elles engloutissent gloutonnement de gros morceaux,
jours de promenade privilégiés le jeudi, le vendredi et le chaque instant et vivent avec elle; elles vont s'asseoir sur la gypte ou de l'yasmak de Syrie il est d'étoffe assez claire
pierre à demi brisée d'une tombe, s'appuient sur quelque pour qu'un œil exercé puisse voir beaucoup de choses au comme font quelquefois nos Anglaises blondes et seqtimenr
dimanche. tales,-mais elles grignottent toute la journée, tantôt un
Le jeudi elles vont aux Eaux Douces d'Europe; le di- stèle coiffée du turban ou du tarbouch, et là, calmes, à l'om- travers. fruit, tantôt un gâteau; à défaut d'autres choses, elles cro-
manche, aux Eaux Douces d'Asie. Le vendredi est consacré bre d'un cyprès séculaire, à demi penchées, elles parlent Une seule femme, en Turquie, a le droit de sortir visage
tout bas du cher défunt qu'elles regrettent ou dé la der- découvert c'est la sultane Validé, mère du peuple, vé- quent agréablement, et d'une dent fine et blanche, des bon-
aux cimetières. Les Eaux d'Europe à gauche, les Eaux bons et des sucreries.
d'Asie à droite du Bosphore, sont deux sites exquis, pleins nière mode. nérée de tous, et qui ne redoute l'outrage d'aucun désir.
de douceur, de mélancolie et de grâces charmantes. La ri- La mode turque est aussi changeante que la nôtre mais Le tabac joue aussi un grand rôle dans la vie des femmes.
vière d'Europe brode d'arabesques grises, glacées de bleu, le seul changement, sensible aux yeux européens ne Dans les grandes occasions, lors d'un mariage, au ré- -Elles le fument dans des narghilehs dont le lulé (fourneau),
le velours vert des prés de la Roumélie. On a planté ses bords porte. pas sur la coupe, mais sur la couleur du vête- tour d'un anniversaire que l'on veut fêter,- on fait venir les en terre de couleur, repose sur un'plateau de cuivre luisant
de bosquets égayés par des cafés, peints en blanc et en ment. comédiens à domicile. Les acteurs ne sont pas compro- ou d'étain poli, et dont le tuyau, en tresse élastique, traversé
rouge, où l'on sert aux musulmanes voilées des sorbets à la Ainsi, il y a deux ans, le féredjé des femmes était gris- mettants le Bressorrt est en carton. et le Mélingue n'est un flacon decristal tailladé, à moitié rempli d'eau de rosé et
neige et des confitures de feuilles de roses, saupoudrées perle il y a un an, il était orange cette année, il est rouge qu'une ombre chinoise. On se contente, de ce que l'on a, et d'essence de benjoin, qui enlève au tabac ses arômes
d'un œil de poudre. de sucre, qui leur donne l'aspect d'une vif. les dames turques prennent grand plaisir à ce divertisse- trop âcres. parfois aussi elles roulent entre leurs doigts
Heur frileuse où le souffle piquant du matin aurait congelé Quand les femmes turques sont inintelligentes, ce qui ment. et renferment dans la mince papillôtte de hilo les blonds che-
des gouttelettes de rosée. La rivière d'Asie, qui se jette leur arrive comme à d'autres, la vie intérieure du harem Souvent aussi on fait venir des danseuses,syriennes, qui veux de Latakié. La cigarette devient fort à la mode ce-
dans le Bosphore avec un violent remous, vous conduit à une et de 1 oda ne leur offre aucun charme. C'est une longue oi- dansent tour à tour dans le selamlik ou appartement des pendant elle ne fument pas encore le thé, comme on
pelouse de gazon ras, au sein d'un paysage doux et calme. siveté pleine de longs ennuis; elles cherchent partout des hommes, et dans le harem, Non-seulement on ne veut pas faisait à Paris, l'hiver dernier, chez la'princesse Tsche.
Çà et là, de grands noyers, un térébinthe, un bouquet de distractions qu'elles ne trouvent nulle part. Si, au con- que les hommes et les femmes puissent se voir, –-mais on Ceci est la fin de tout. En attendant qu'elles en viennent
cyprès, ou quelques platanes gigantesques. Les cadines traire, elle est intelligente et habile, elle n'arrive jamais au ne veut même pas qu'ils voient la même chose! Il est, je là, les kanounes et les Odalisques suivent d'un air mélanco..
paresseuses s'asseoient en rond ou s'accroupissent sur leurs pouvoir, mais elle a l'influence qui en est l'àme. Pendant crois, difficile de pousser la réserve plus loin. lique les spirales bleuâtres qui s'échappent de leurs lèvres,
talons, goûtant le frais silencieusement. Leurs esclaves im- tout le temps qu'elle a vécu, la sultane mère (la Validé) a Un des mérites que les Turcs prisent surtout dans les emportant avec elles leurs rêves et leurs désirs sans nom 1

mobiles les surveillent de loin, ou bien c'est quelque eunu- eu la plus grande prépondérance dans les conseils du sultan femmes, c'est l'embonpoint de leurs charmes. Au lieu 'de K.ODIS .ESAIIÏT.
que jaloux pour le compte de son maître, ou même pour Abdul-Medjid. dire, comme nous Est-elle belle ? ils diraient volontiers
le sien, qui tourmente lé manche de son kandjar incrusté Le voile des femmes de Constantinople donne à la ville « Est-elle
lourde ? ?»»
Turquie se trou va en présence désarmées régulières et Toute la journée a été pleine d'émotion populaire. tôt ils s'absorbèrent en eux-mêmes; l'abstraction inté- trois syllabes Allah-hou. Ce formidable Allah-hou fut ré-
disciplinées de l'Europe. Jusqu'au xvne siècle les Otto- On est allé conduire à deux lieues de la ville Y armée de rieure remplaça l'expansion affectueuse.- L'Egyple vit se pété pendant une heure avec une énergie croissante et
mans avaient eu dans la science des grands mouvements la foi; puis, au moment où l'on allait perdre de vue la repeupler pou à peu ses brûlantes thébaïdes. Sur la côte sur toutes les gammes sourdes des voix de basses. On eût
stratégiques une véritable supériorité, mais au xvne siècle tour de David et les portes crénelées, tous se sont retour- d'Asie, le mont Olympe abrita des milliers de solitaires, dit des lions en fureur et parfois, tout à coup, brusque-
cette supériorité passa aux troupes de l'Occident. nés vers Jérusalem la sainte, sainte pour les musulmans perdus dans la contemplation vaine de la nature et d'eux- ment, sans transition, on pouvait noter un râle de volupté,
Vers la fin du xvmc, sultan Sélim tenta une première comme pour les chrétiens c'était l'heure des adieux su- mêmes. L'ardente contagion courut de proche en proche: un soupir d'ineffable tristesse. Cependant la troupe forte-
réforme. prêmes Bientôt un repli de la montagne a dérobé à nos les derviches gagnèrent l'Arabie, la Perse, enfin les Indes ment enlacée se pliait, se tordait, reculait, avançait, tan-
Les sipahis formaient la principale force de la cavalerie yeux le croissant des étendards et les derniers rangs du lointaines, répandant autour d'eux le mépris des choses tôt par mouvements onduleux et doux, tantôt par saccades
ottomane (on avait compté jusqu'à deux cent mille cava- bataillon on entendait toujours le refrain belliqueux du monde et l'enthousiasme de l'invisible. brusques et soubresauts violents: et à chaque mouvement,
liers) les janissaires, celle de l'infanterie. Au vue siècle de l'hégire, il y avait trente-six ordres de avec un rinforsando indomptable, éclatait plus violem-
On ignore généralement en Europe comment se recru- la guerre sainte 1
A derviches dans l'Islam. ment le sauvage Allah-hou, Allah-hou!1
Allah Allah iallah 1
taient les janissaires; c'était an moyen du tribut d'en- L'anéantissement de l'individualité, voilà le fond de la De temps en temps un musulman dévot venait s'age-
fants que les provinces, habitées par les infidèles, étaient La foule est restée un instant silencieuse. Puis, en ren- doctrine des derviches. Quand, à force de mortifications nouiller devant le chef des derviches, qui lui sanglait les
tenues de fournir. On les plaçait dans divers serais, on. les trant dans la ville, quand on a vu sur toutes les mosquées et d'épreuves, il en est arrivé là, le voile tombe, et le saint reins avec son fléau plombé, perçait ses joues avec des
élevait dans l'islamisme, et, quand leur éducation était flotter l'étendard du Prophète, on a oublié le danger et contemple la vérité face à face; il peut alors se contenter broches aiguës, ou hachait ses épaules à coups de couteau.
terminée, on les faisait entrer dans la milice des janissai- l'absence plus cruelle; on n'a plus songé qu'à l'indépen- d'un culte purement spirituel et négliger les formes in- Le patient semblait le plus heureux du monde. Puis on
res. « Cette milice, avait dit le chef des derviches, Hadji- dance menacée, à l'honneur de la patrie insultée; tous signifiantes et les cérémonies extérieures. apporta des châles et des tapis. Les femmes voilées éten-
Bektach, sera victorieuse dans tous les combats; sa figure ces grands ressentiments faisaient tressaillir jusque dans Les derviches jouissent d'une véritable popularité dans dirent leurs petits enfants sur ces tapis, et le grand der-
sera blanche, son sabre tranchant et sa flèche acé- leurs fondements les murailles d'Omar et de Saladin. tout l'Islam. Les docteurs de la loi les appellent des scélé- viche se tint debout sur leurs reins souples, qu'on voyait
rée. » Si ce peuple est destiné à mourir, il aura du moins rats, mais le peuple les appelle des saints. J'en ai vu un plier. Ces pauvres enfants pleuraient et criaient, tandis que
Leur indiscipline causa leur perte, mais il ne fallut pas mérité une oraison funèbre et de grandes funérailles! au Kaire qui entrait dans toutes les boutiques du bazar, .leurs mères joignaient les mains d'un air béat.
moins de quarante ans pour la consommer. choisissait, prenait et emportait sans jamais offrir un para.
Tout le monde connaît la tragédie sanglante de l'Eit- A Damas il y en avait un l'an passé qui se promenait dans
Meïdan, dont Horace Vernet a écrit le cinquième acte avec les rues avec son bonnet pour tout vêtement (il est vrai
des pinceaux éloquents. qu'il faisait très-chaud). On l'avertit que le pacha, qui
Le lendemain du massacre des janissaires (je prends le PRIÈRE avait des mœurs, était assez mécontent il alla rendre RELIQUES TURQUES
mot de l'historien), un manifeste de la Sublime-Porte an- visite au pacha dans son costume, et pacha ne
le dit rien.
nonçait leur abolition perpétuelle et leur remplacement POUR LE SUCCÈS DES ARMÉES MUSULMANES Un autre arrêta un jour le sultan sur le pont de bois de
par une milice nouvelle qui prendrait le nom de troupes Cons'tantinople, et se jetant à la bride de son cheval Eh Les Turcs ont un profond respect pour les reliques.
réglées musulmanes aidées de Dieu. » Cette prière a été composée il y a deux mois par un bien, Giaour! quand finiras-tu tes damnéesréformes? Les reliques turques sont à la fois religieuses et guer-
Quelques jours après le sultan Mahmoud supprimait les Muderris des environs de Beyrouth; chaque vendredi, à Tàchez^qu'il me'laisse passer, dit doucement Abdul- rières. Tels sont, par exemple, les sabres d' Ebou-Békir,
sipahis et réunissait tous les fiefs militaires aux domaines la suite du Khoutbé, ou prière officielle, les khatib ou Medjid.en se retournant vers sa suite. d'Omar et d'Osman, le sabre et l'arc du Prophète, con-
de l'Etat. Vimam, montent dans leurs chaires, et le visage tourné .Les principales sectes de derviches sont les rouges, les servés dans le séraï.
Les derniers débris des janissaires s'étaient réfugiés en vers la Mekke sacrée, récitent cette prière devant les blancs, les masqués, les intimes; mais deux surtout sont Mais la plus grande vénération des Osmanlis, c'est pour
Afrique, chez le dey d'Alger, où ils tombèrent sous le fidèles. connues en Europe les derviches tourneurs de Constanti- la Elle robe de Mahomet.
bras de la France. L'original arabe a été envoyé à un habitant de la bonne nople, et les derviches hurleurs de Scutari. est en camelot noir.
Depuis 1843 l'armée ottomane se recrute comme la nô- ville d'Angers, qui s'est trouvé fort empêché devant les Nous avons eu la bonne fortune, pendant notre voyage Beaucoup de gens préféreraient son enveloppe, car on
tre par la voie du sort; l'organisation européenne s'est in- pleins et les déliés de la calligraphie orientale et hiérogly- en Orient, d'assis.ter aux diverses cérémonies de ce culte la conserve sous quarante couvertures en cachemire ou en
troduite dans toutes les armes. L'infanterie, la cavalerie phique de ce petit morceau de papier. Cependant, étrange. soie.
et le génie suivent l'ordonnance- française. L'artillerie est l'honnête Angevin se dit en son pardedans que, bien qu'il On appelle tekkés les monastères des derviches. On la découvre une fois chaque année, le 15 du mois
toujours soumise à la tactique prussienne. ne comprit pas, cela pouvait vouloir dire quelque chose. Le tekké des derviches tourneurs est situé dans le fau- de Ramazan, qui est, comme on sait, le carême turc.
On distingue dans l'armée le service actif, nizam, et la Il envoya donc le message à Paris il tomba entre les bourg européen de Constantinople qu'on appelle Péra, sur Le sultan et les grands dignitaires viennent la baiser avec
réserve, redi f. mains d'un de nos amis, qui voulut bien nous le confier. une petite place encombrée de tombeaux en assez mauvais respect.
La force ottomane est divisée en six corps d'armées que Nous pouvons garantir la fidélité de la traduction que état. L'intérieur de la cour est peint de vives couleurs. Puis on la trempe légèrement dans un grand bassin
l'on, appelle ordou, et qui obéissent à un feld-maréchal du nous offrons à nos leéteurs nous désirons qu'ils y retrou- Trois côtés sont occupés par les cellules riantes des der- rempli d'eau. Cette eau s'appelle l'eau de la noble robe.
nom de muchir. Chaque ordou comprend six régiments vent un peu de la couleur orientale de l'original viches un grand cyprès et une fontaine complètent la dé- L'agha des filles met cette eau en bouteille. On scelle
d'infanterie, quatre de cavalerie et un d'artillerie. Le clas- coration. A l'est la vue s'échappe sur le Bosphore, étince- les petites fioles du sceau de l'empire, et on les distribue
sement des grades dans un régiment d'infanterie turque INSlÈttE lant comme un miroir d'acier bleuâtre. La chapelle de aux personnes à qui on veut faire honneur.
est le même que dans un régiment d'infanterie fran- danse est au fond de la cour. Les murs extérieurs sont C'est de l'homœopalhie religieuse
çaise. Grand Dieu nous t'en conjurons par les versets sacrés couverts de surates empruntées au Koran et tracées en Un attaché d'ambassade a bien voulu se priver pour
La différence des grades est indiquée depuis le simple du Koran et par les lumières célestes de Mahomet arabesques bleues, avec une habileté de calligraphie qui, nous d'un petit flacon du dernier Ramazan, que nous gar-
soldat (néfer) jusqu'au muchir, par le sabre et par le ni- Grand Dieu nous t'en conjurons par le mérite des d'une page d'écriture, fait une décoration. dons maintenant entre deux bouteilles d'eau du Jourdain
chan, sorte de décoration qui se porte au cou. A chaque prophètes et de tous tes envoyés conserve l'empire Nous entrons. et de la mer Morte.
promotion nouvelle fEtat reprend le sabre et le nichan de ottoman, Le parquet uni, ciré, luisant, est entouré d'une balus- Il ne faut pas oublier non plus, parmi'les reliques, le
l'ancien grade et rend en échange ceux qui conviennent Grand Dieu fais resplendir sa gloire. trade circulaire, à hauteur d'appui. En face du mehrab, sandjagki-chériff, ou étendard illustre, qui est comme
au grade nouveau. Grand Dieu fortifie sa puissance éclaire l'esprit de ses qui indique l'orientation de la Mekke, une place est réser- l'oritlamme de l'empire. On le cache, sous treize en-
Le régiment de cavalerie comprend six escadrons. Le chefs. vée à l'orchestre. C'est dimanche; il est midi des Francs veloppes, dans le trésor de Sainte-Sophie, métropole des
premier et le sixième sont des chasseurs, les quatre autres Nous te prions, grand Dieu Dieuriche! ô Dieu infini-
ô et des Turcs, qui ont laissé leurs bottes ou leurs babouches mosquées, où le sultan le déploie de sa propre main quand
des lanciers. ment digne de louanges! ô libérateur ô toi qui dois à la porte, se pressent autour de la balustrade. la guerre sainte est déclarée.
Dans chaque régiment de cavalerie il y a dix hommes nous ressusciter ô toi qui es assis sur un trône de gloire Les derviches arrivent en procession, lentement, deux Jadis,- alors que les Turcs n'étaient pas tout à fait nos
non montés. ô toi qui accomplis infailliblement tous tes désirss, toutes par deux; gilet blanc, veste blanche, jupe blanche, cale- amis,-quand on promenait le sandjaki-chériff par les rues,
les Européens étaient obligés de se renfermer dans leurs
Chaque régiment d'artillerie a douze batteries, trois à tes volontés! garde, conserve le sultan des deux conti- çon blanc, fermant aux chevilles.
cheval, neuf à pied. Ces batteries sont pourvues de nents, le souverain des deux mers, le sultan, fils de sulfan, Le chef va s'asseoir sous le mehrab, ou plutôt s'accrou- maisons et de clore hermétiquement leurs volets. Aujour-
soixante-six pièces de canon et de quatre obusiers de Abdul-Medjid pir sur un tapis recouvert de peaux de gazelle, et deux d'hui, c'est la main jointe de la France et de l'Angleterre
montagne. Nous avons eu plus d'une fois l'occasion de re- GrandDieu!prête-lui ton aide, ton assistance;montre-toi jeunes derviches se tiennent à ses côtés. qui soutient le sandjagki-chériff, et il flotte dans le ciel
marquer l'excellente tenue de ce corps d'élite. son gardien, son défenseur et son fidèle protecteur atteins Les derviches, s'avançant d'un mouvement doux, lent bleu, entre le drapeau de Saint-Georges, écartelé de la
La réserve forme comme une seconde armée elle pré- par son épée les princes impies et infidèles qui se montrent et rhythmé, défilent devant lui en le saluant profondé- croix d'Irlande, et nos trois couleurs nationales.
sente dans chaque arme un nombre de régiment égal à rèbelles envers toi, envers ton royaume terrestre et ton ment. Tous vont alors se placer devant le mehrab.
celui de l'armée active. Organisée militairement, elle a royaume céleste La prière commence par une sorte de bourdonnement
permis au sultan, il y a quelques mois, de doubler, d'un 0 maître de l'univers ô Dieu accorde la victoire aux pieux, accompagné de génuflexions et de prosternations
trait de plume, l'effectifde sa puissance. armées musulmanes ne permets pas que les ennemis de c'est la préparation à l'extase. Bientôt la procession recom-
la grande cité aient lieu de se réjouir de nos malheurs 1 LA JUSTICE TURQUE
En appelant sa réserve, la Turquie peut mettre sur pied mence et passe devant le chef, qui fait sur chaque derviche
quatre cent quarante mille hommes. Avec cette force bien Grand Dieu mets en fuite et disperse les ennemis des un geste onctueux de bénédiction.
dirigée, un pays ne meurt que quand il ne veut pas se don- vrais croyants La musique prélude ce sont de petites flûtes jouant à L'administration de la justice tient toujours une grande
Grand Dieu n'admetspas au nombre des élus les enne- l'unisson, avec un accompagnement de tarboukas mar- place dans la vie d'une nation. Ce travail serait donc
ner ta peine de vivre. La Turquie n'en est pas là 1 incomplet si nous ne disions ici quelques mots de la justice
L'armée turque n'a pas sans doute la même instruction mis de ta sainte religion quant le rhythme. Cette musique, à la fois suave et bi- turque. En Turquie, le corps judiciaire est divisé d'après un
militaire que la nôtre elle manque de lieutenants, de sous- Grand Dieu délivre le pays de la présence des infi- zarre, vous saisit à
peu peu et finit par vous pénétrer ordre hiérarchique qui a les plus grands rapports avec celui
lieutenants et des sergents. Sa tenue n'est pas toujours ir- dèles comme d'un charme étrange. de notre magistrature française. On trouve au sommet une
réprochable je ne parie pas de la garnison de Constanti- Grand Dieu livre leurs biens et leurs terres aux musul- D'abord les derviches écoutent, immobiles au milieu de sorte de haute cour d'appel que l'on nomme Arsodaci.
nople qui m'a paru sur un fort bon pied dans les provin- mans 1 l'enceinte, puis un d'eux ouvre ses bras, les étend hori- Au-dessous, vingt-quatre cours que l'on appelle Mevleviets,
ces turques j'ai vu parfois des sentinelles en chemise, Grand Dieu rends leurs femmes veuves zontalement, et commence à tourner sur lui-même, lente- sudivisées elles-mêmes en tribunaux de première instance,
Grand Dieu rends leurs enfants orphelins ment et déplaçant peu à peu et sans bruit ses pieds nus au-dessous desquels sont encore des tribunaux inférieurs,
comme de simples gardes nationaux, et recousant un bou-
ton dans leur guérite. Mais ceci n'est qu'un détail. Grand Dieu! donne leur chair aux lions puis le mouvement s'accélère, la valse se précipite, que jematière comparerai assez volontiers à nos justices de paix.
criminelle, les tribunaux de première instance
En
Je ne louerai pas la bravoure de cette armée, voilà dix- Nous t'en conjurons, par le mérite de Notre Seigneur l'homme devient tourbillon. Toute la bande suit. C'était1 peuvent appliquer souverainement toutes les peines, moins
huit mois que l'Europe l'admire; mais ce que je ne saurais Mahomet, le dernier des envoyés, fais que les infidèles de- un curieux spectacle de voir tous ces hommes vêtus de la peine de mort.
trop louer, c'est cet attachement réfléchi au drapeau, c'est viennent la proie des musulmans. Amen. blanc, les bras étendus en croix, la tête penchée sur une Toutes les affaires qui sont de nature à entraîner une con-
ce sentiment du devoir qui naît de la conviction religieuse épaule, les yeux à demi fermés, la bouche entr'ouverte damnation capitale sont soumises à la révision du Conseil
dans une âme où la conviction religieuse se confond avec par le sourire divin de l'extase. Le mouvement de cette suprême de justice qui siège à Constantinople. La signature
la discipline.Je connais des soldats qui se battent admirable- valse avait je ne sais quoi de souple, d'onduleux et de du sultan peut seule rendre l'arrêt de mort exécutoire.
ment.quand ils ont trois livres de bœuf dans l'estomac. doux qui vous emportait dans le vertige de sa rotation. Une des grandes qualités de la justice turque, c'est sa célé-
LES DERVICHES Le chef se promenait à travers les groupes, frappant rité. Elle ne s'embarrassejamais dans les lents détours de la
Les Turcs vont au combat, mal payés et le ventre vide. procédure. Ce n'est pas l'antique chicane, à moitié sourde et
Ils dîneront quand ils auront chassé les Russes, dit parfois dans ses mains, pressant ou ralentissant le rhythme. trois quarts aveugle, siégeant dans un antre obscur,
Omer-Pacha. Souvent, quand vous parcourez les rues du Kaire, de Après un temps d'arrêt et une seconde procession, cou- aux c'est une vierge implacable, jugeant au grand jour, et ap-
Cela ne vous rappelle-t-il pas nos héros va-nu-pieds de Damas ou de Constantinople, il vous arrive de rencontrer ple par couple, la valse recommença, plus ardente cette puyée sur une épée nue. Le vizir churluli-Ali-Pacha, dont
la première République, à qui un général disait Grena- à la porte d'une mosquée, au pied d'un obélisque, ou dans fois, plus entraînante et plus éperdue. Il m'eût été impos- parle Cantemire en ses histoires, voilà le modèle du juge, tel
diers, encore trois victoires et vous aurez des sabots l'angle d'un bazar, un homme au teint bruni et à la prunelle sible de compter le nombre de tours accomplis dans une que le vieux Turc l'a compris longtemps
Cette bravoure froide, c'est la meilleure bravoure ardente. Une robe de laine tombe de ses épaules à ses pieds, minute. Légèrement, et comme des ailes d'oiseaux, les « Lorsqu'il siégeait au divan,il
était impossible de le consi-
bras s'élevaient ou s'abaissaient; une écume légère venait dérer sans admiration, car il était d'un esprit si vif et si dé-
est parfois susceptible d'exaltation. Nous avons vu un long bonnet pointu pyramide sur sa tête; ses cheveux, lié, qu'il pouvait faire trois choses à la fois, comme s'il eût
à Baalbek des cavaliers de Damas montés à cru sur des que lesciseaux ne touchentjamais.divaguentsursesépaules, de temps en temps tremper et blanchir la lèvre rouge été divisé en trois parties. Pour expédier plus promptement
étalons du désert, et des enrôlés de Smyrne insouciants et et des flots de barbe vierge inondent sa poitrine. Les en- tantôt la tête se renversait en arrière, la paupière battait les affaires, il faisait lire à la fois deux requêtes; il entendait
gais,comme des Français.. fants le montrent du doigt, les femmes le suivent de loin, des ailes, la prunelle retournée se noyait dans l'infini, et chacune des deux causes aussi bien que si elles avaient été
Parfois aussi, nous avons assisté à des scènes d'un en- les hommes le saluent avec respect. l'on ne voyait plus que la nacre vitreuse et troublée du répétées trois ou quatre fois, et il prononçait, en consé-
thousiasme indicible. C'est un derviche. crystallin tantôt, au contraire, elle retombait sur la poi- quence, une sentence convenable. Il écoutait en même temps
Nous étions à Jérusalem à la fin de l'été dernier, au Le derviche est une des physionomiesles plus originales trine comme accablée du poids d'une volupté surhumaine. celles qui se plaidaient devant le casi-asker,et, lui renvoyant
moment où les premiersbruits de guerre firent tressaillir de la société musulmane. Les derviches sont les moines Quand l'épuisement, survenant au milieu du rêve mys- l'arzi-hal (la requête), lui dictait la décision qu'il devait
l'Orient. de l'islamisme. On en rencontre partout où l'on trouve le tique jetait le valseur dans une prostration invincible, il donner. Il avait un si grand amonr pour la justice, que bien
Koran, depuis la Méditerranée jusqu'à la mer Rouge, de- des gens assurent qu'il n'a jamais prononcé une sentence
Les garnisons de Syrie reçurent l'ordre de rallier l'ar- se laissait tomber sur ses genoux, puis s'étendait, la face injuste.
mée d'Europe. Nous vîmes partir celle qui abandonnait le puis l'Atlantique jusqu'au Gange. contre terre, et de jeunes servants le recouvraient d'un »
Si l'on me permettait de faire encore une fois appel à mes
Jourdain pour le Danube. Ce départ a été un des plus Le mot derviche vient du persan {der, porte; vick, manteau bariolé, puis le chef s'approchait, murmurant tout souvenirs personnels, je pourrais peut-être donner un exem-
beaux spectacles que j'aie jamais vus. Rarement l'enthou- étendu). Il exprime le dernier degréde la pauvreté, quand bas quelques paroles de son rituel. La musique ne cessa ple assez piquant de la façon dont les Turcs expédient les
siasme d'un peuple a éclaté avec plus d'ardeur. l'homme n'a pas même une éabane ou une pierre à lui, et qu'après que tous furent ainsi terrassés par la fatigue des affaires. Jamais le mot n'a été plus juste. Quarante témoins,
On avait divisé la petite troupe en deux corps; un chœur qu'il n'a plus pour dormir que le seuil de l'étranger. muscles et le ravissement de l'âme. maintenant en France, peuvent attester la véracité de
de musiciens, instrumentistes et chanteurs, était placé en- Mais la pauvreté du derviche est volontaire il ne s'est C'est à Scutari, de l'autre côlé du Bosphore, sur la terre mon récit.
dépouillé que pour enrichir les autres. sacrée de l'Asie, qu'il faut aller voir les derviches hurleurs. Nous arrivions à séphoris vers deux heures de l'après-
tre deux haies de soldats. Les fifres, les petites flûtes et midi, après une longue et pénible marche, par un de ces
les tambours s'interrompaient de temps en temps, et Le khalife Ali donna le premier l'exemple de ce renon- La salle des hurleurs est un parallélogramme sans au- soleils
torrides qui vous dessèchent le gosier,
toute la petite armée, d'une seule voix et d'une âme, re- cement. Il eut bientôt des imitateurs, et il se trouva le chef cune espèce de décoration architecturale. Les murs vous
prenait le refrain d'une hymne guerrière. Voici ce refrain, d'une secte, la secte du Safi ou des Purs. Essentiellement présentent une panoplie d'outils féroces; ça vous fait Cum spuit ore viator
qu'un jeune officier a bien voulu traduire pour moi pratique, le renoncement d'Ali tournait au profit de ses malgré vous rêver tortureet question. Ici ce sont des masses Artus.
semblables. Sa vie se passait à faire le bien. Mais l'action d'armes, des tenailles et des pinces, des scies, des haches, L'air était embrasé. On respirait du sable chaud, et il
A la guerre sainte est difficile en Orient, où tout conspire à vous jeter dans des marteaux, des lardoires affilées, des fléaux terminés faisait si soif, que cette fois encore Cléopâtre eût offert sa
Que Dieu extermine l'infidèle les rêveuses délices du far niente. Les derviches se lais- par des balles de plomb, des disciplines avec du fer dans couronne pour une coupe fraîche une perle pour une
Que Dieu bénisse celui qui est avec nous 1 sèrent promptement aller aux charmes de ces contempla- les noeuds, enfin tous les instruments des supplices mys- goutte d'eau
Maudit celui qui est contre nous tions infinies qui consument comme un instant la vie im- tiques. Une femme passa, portant sur sa tête vaillante une de ces
A la guerre sainte 1 mobile des solitaires de l'Inde. Les derviches s'isolèrent Les derviches, rangés sur une seule ligne, psalmodiaient gracieuses amphores, comme on les voit, dans les tableaux
Allah Allah iallah! à l'unisson, sur un ton de mélodie traînante, une sorte de bibliques, entre les mains de Rébecca à la fontaine.
peu à peu des réalités sociales et tombèrent dans le vague Un peu d'eau! demanda une voix défaillante.
Toutes les maisons étaient fermées. Le peuple se répan- délire de l'état extatique. Ils se réunirent en vastes com- litanie entonnée par un jeune homme à la poitrine vail-
munautés, adoptèrent des pratiqués tour à tour austères lante. Tout en chantant ils se balançaient lentement d'a- On dit que la femme est naturellement bonne, et pour
dait dans les rues; les femmes, toujours voilées, se mêlant mon compte je l'ai toujours cru celle-ci approcha la
ou bizarres, et apportèrent, dans un pan de leur robe, le le
aux hommes, chantaient et pleuraient; c'étaient des mè-
res, des sœurs, des épousés, des amantes, mais c'étaient mysticisme au sein du Koran.
Les derviches, dans les premiers temps de leur institu-
vant en arrière, mesurant sur le même rhythme mou- coupe des lèvres altérées.
vement et la voix. Bientôt on décrocha les tambours de Pourquoi, dit une voix rude une voix d'homme
basque, les frères entrecroisèrent leurs bras passés sur les pourquoi donnes-tu à boire à un chien de chrétien?
surtout des musulmanes; il y avait de l'héroïsme dans ces
larmespromptement séchées, autant peut-être que dans tion, prêchaient, par la parole et par l'exemple, la sobriété, épaules, et tirèrent du fond de leur poitrine un hurlement Et toi, répondit le chrétien qui savait assez bien
ces chants mêmes!
la bienfaisance, l'union, la bienveillance universelle. Bien- rauque, qui pourrait se noter assez exactement sur les l'arabe, pourquoi m'insultes-tu? Ne sais-tu point qu'il faut
Kiervari-Bachi, avec lequel on débat les conditions d'ad- tout n'est que comédie, et, à tout prendre, les moins tristes
donner à boire à tous ceux qui ont soif? L'eau ne se refuse sont encore celles qui se jouent au théâtre.
point au désert. Que ta gorge se dessèche 1 mission n'est pas qui veut de la caravane. CORRESPONDANCE
Cette dernière phrase est une imprécationarabe qui paraît Les deux plus célèbres caravanes sont celles qui partent La Porte-Saint-Martin vient de représenter, sous ce titre
terrible à des gens qui ont toujours envie de boire. Le Bé- chaque année de Damas et du Kaire pour se rendre à la La Bête du Bon Dieu, un gros mélodrame de la vieille roche,
douin entra en fureur; il poussa un cri d'alarme, et bientôt Mekke. Dans l'avant-dernier numéro de Figaro, le nom de M. Biétry dû à l'association de MM. de Courcelles et Marc-Fournier.
tout le village fut sur pied. On prit fait et cause pour le dé- La caravane de Damas atteint quelquefois le chiffre se trouve cité à l'article Théâtres. Nous disions qu'à une Cette pièce, qui dénote doublement une grande expérience
linquant il plut des pierres, et il nous fallut opérer un mou- énorme de soixante-dix mille pèlerins. Pour se joindre à première représentation d'une pièce de M. de Champeaux, du théâtre et renferme quelques scènes dramatiques et bien
vement de retraite sous la mitraille des femmes, des enfants elle, une troupe nombreuse part chaque année à jour fixe ayant pour titre le Château Rouge, un couplet de facture faites, ne me semble pas appelée néanmoins à fournir une
et de ces quelques drôles qui sont toujours, à Séphoris comme de Constantinople, le 25 de redjeb (cinq mois avant les
avait été chanté en l'honneur de M. Biétry, et que ce dernier longue carrière, parce que la donnée en est fausse. C'est
ailleurs, du parti de ceux qui battent les autres. avait salué le public. Nous assistions à cette représentation, dommage car cette erreur capitale du point de départ nuit
Notre premier soin, en rentrant à Nazareth, où nous étions sacrifices), sous la conduite d'un fonctionnaire que l'on le fait est vrai, et n'a rien de désobligeant pour ce fabricant. à une création tracée de main de maître, et qui méritait
alors, fut de porter plainte près de l'agent consulaire qui appelle Tourric-Emini, c'est-à-dire le dépositaire des M. Biétry, armé du texte de la loi, profite de l'occasion d'être mieux enchâssée celle d'un paysan admirablement
représente la France, Kobroussy. offrandes; car chaque année le sultan envoie des offrandes pour causer cachemire, marque de fabrique, etc., toutes joué par Vannoy. Ce rôle, un type de comédie, après avoir
Kobroussy est fils d'un capitaine de l'empire aux mame- à la mosquée de la Mekke- pour se racheter de l'obliga- choses auxquelles nous n'entendons rien, et dont il n'est traversé la pièce, fidèle à la nature comme à la vérité,
louks d'Egypte, et frère d'un soldat mort en Afrique, « dans tion où il est de faire lui-même chaque année le pèlerinage nullement question dans notre article. Nous n'en insérons la dénoue avec ce mot que l'avarice fait jaillir d'un cœur de-
les blessures de.la France, » suivant sa noble expression. saint. pas moins sa lettre mais comme le droit de réponse est venu pierre. « Ne te désole point, » dit à sa fille le vieux
Il prit notre affaire à cœur, et nous proposa de nous mener La caravane s'avance dans un ordre parfait, marchant sagement limité par la loi, M. Biétry ne sera pas surpris de paysan qui vient d'être arrêté, « je connais mon affaire un
chez le naïb, sorte de juge de paix, pour faire nous- recevoir, en même temps que ce numéro, la facture acquittée peu de prison, mais pas un brin d'amende 1 »
mêmes notre déposition devant lui. Nous n'eûmes garde de environ douze heures par jour. Les pèlerins sont divisés de l'excédent des quatorze lignes auxquelles il a droit; cela
refuser; c'était une trop précieuse occasion d'avoir un par groupes selon leurs villes et leurs provinces; des lui semblera d'autant moins dur que, depuis longtemps, il est Le lendemain, l'Ambigu donnaitsa grande féerie des Contes
échantillon de la justice turque. troupes de cavalerie forment l'avant et l'arrière-garde et habitué à payer ses réclames. de la Mère l'Oie, bruyamment annoncée et impatiemment at-
Il était déjà tard nous n'en fûmes pas moins admis im- protègent la foule pacifique contre les Arabes du Désert. lï. de VilU-messunt.. tendue. Les deux auteurs, MM. Clairville et Jules Cordier, ont
médiatement auprès du juge. C'était un beau vieillard à che- Les stations, que l'on appelle konak, sont échelonnées voulu grouper, rattachés par une action principale, tous les
veux blancs, vêtu d'une robe bleue à bandes roses, dont sur la route on en compte soixante. A chaque station où contes de fées qui ont charmé notre enfance.
l'œil noir et vif pétillait sous un épais sourcil grisonnant. il y a de l'eau on trouve un petit fort, un réservoir pour
Il était assis, ou plutôt accroupi dans le coin de son divan, Paris, le 18 mai 1854. Si Peau-d'Ane m'était conté
abreuver les chameaux et un vaste bâtiment où s'abritent J'y prendrais un plaisir extrême
sur une pile de carreaux, fumant délicatement le vingtième les pèlerins. Ces établissements assez peu confortables, où
tchibouck de la journée, un tchibouck en simple terre A M. de Villemessant. C'est pourquoi je m'étais établi de mon mieux dans ma
rouge, avec un tuyau de jasmin long de six pieds. Nous nous il nous est plus d'une fois arrivé de passer'la nuit entre un stalle, tout yeux et tout oreilles, admirablementdisposé pour
répandîmes autour de lui, en des poses diverses, sur les chamelier et un derviche, se nomment en turc kiervun- Monsieur, la pièce que j'allais voir, et remerciant d'avance les deux
natttes et sur les coussins. serai. En été, les caravanes marchent depuis cinq heures Je viens de lire dans votre journal le Figaro, du Mx de ce auteurs qui avaient bien voulu prendre la peine de me ra-
Le naïb nous écouta dans un impassible silence. Quand
nous eûmes fini, il posa solennellement l'index de sa main
de l'après-midi jusqu'à une ou deux heures après le lever
du soleil en hiver, elles ne marchent guère que le jour.
mois, un article signé de vous, dans lequel vous avez cru jeunir. Le rideau s'est levé, hélas et
la fiie Grognon, pour
droite sur ses lèvres, et parut un instant livré à des réflexions devoir citer mon nom avec malveillance cela m'autorise à se venger sans doute de n'avoir pas été consultée par
Du turc kiervan-seraï notre prononciation française est penser que, soit par calcul, soit par tout autre motif, vous M. Clairville, frappant de sa baguette la féerie à peine com-
profondes. voulez vous rendre l'écho, le défenseur même des personnes mencée, a bien "vite changé pour moi un plaisir attendu en
Il appela son grenier. porvenue à faire caravansérail. Le caravansérail, que l'on
Celui-ci, plus vieux encore, accourut d'un pas tremblant, appelle aussi khan, est plus long que large et a de vastes intéressées aux partisans du laisser-faire et du laisser-passer un désenchantement complet! J'ai subi deux actes entiers
s'agenouilla au milieu du divan, posa une paire de besicles cours, dans lesquelles on met les chameaux, les chevaux, sans contrôle vous tenez, en tout point, à mon égard, le avec une résignation digne d'un meilleur sort; mais au mo-
les carrosses, enfin tous les équipages. u Dans cette même même langage que certains marchands et fabricants qui pré- ment où le troisième allait commencer, j'ai fait à part moi
sur un nez accentué, tira de sa ceinture une écritoire qui
fèrent vendre leurs produits sous le voile de l'anonyme plutôt ce petit raisonnement qui ne manquait pas, je l'avoue, d'une
contenait l'encre, le papier et les plumes, et écrivit quelques cour, dit un vieil historien, est un grand espace qui est ren- certaine dose de fatuité: « 11 y a ici 1,500 personnes qui
lignes chevrotantes, sous la dictée du naïb celui-ci trempa fermé d'un mur haut de quatre pieds c'est la chambre des que d'engager sérieusement leur responsabilité.
Ma franchise veut que je vous dise que, si celui qui ne s'ennuient, cela est certain; elles s'ennuieront jusqu'au bout
son anneau dans l'encre, l'apposa, en guise de seing, au bas étrangers, la salle à manger, la cuisine, la garde-robe, c'est cesse de demander par tous les moyens honnêtes, qu'il y pour n'en pas avoir le démenti si je faisais preuve de plus
du papier, qu'il remit tout ouvert à deux cavaliers epe- tout; l'épaisseur de ce mur fait toute la séparation de ce bel ait une loi d'application de marque de fabrique obligatoire, d'esprit que les auteurs, les acteurs et les spectateurs tout
ronnés. appartementavec l'écurie; et comme c'est aux pieds du mur c'est-à-dire la responsabilité du producteur et du vendeur ensemble, en tenant la pièce pour jouée et en m'esquivant
Puis, nous congédiant de la main, avec cette dignité su- de la avant la fin? Ma foi, je n'ai pas résisté plus que cela à la
perbe et un peu théâtrale qui n'abandonnejamais tout à fait que l'on attache les chevaux et les chameaux, ils semblent, envers le consommateur, la garantie de la désignation
quand ils lèvent la tête, tenir la place des domestiques chose vendue, enfin que la vérité reste la vérité, si celui-là, tentation, et voilà tout ce que j'ai à vous dire des Contes de
les Orientaux, il nous donna rendez-vous pour le lendemain,
à midi. et des laquais qui doivent être derrière leurs maîtres lors- dis-je, doit être appelé faiseur de réclames, j'en conviens, la Mèrel'Oie Je me trompe; la vérité m'oblige à conve-
nir en outre que mon avis est loin d'être partagé sur ce
qu'ils sont à table ou auprès du feu. J ai même vu que les monsieur, je mérite d'être appelé ainsi. Vos attaques vont
Le lendemain, toute la ville de Nazareth était en émoi. même encore heaucoup plus loin. Dans ce même article, point et sur un autre encore beaucoup plus sérieux. La
Une escorte de cavaliers venait d'amener à la prison dix chameaux, allongeant leur cou au-delà du mur, retiraient vous me faites jouer personnellement,dans une scène de votre féerie de l'Ambigu compte ses partisans, lesquels se mon-
cheikhs du village de Séphoris. Je noterai en passant, et des mains le pain et les pommes que l'on portait à la bouche invention, un rôle plus que ridicule, et vous y faites même trent en même temps les détracteurs acharnés de la comé-
comme trait de mœurs, qu'on les avait conduits d'abord à pendant qu'on était à table. L'on ignore dans ces hôtelle- intervenir ma décoration. die de M. Serret, dont Figaro a dit le plus grand bien. Ceci
la mosquée pour faire leurs prières, c'était un vendredi, ries l'usage des lits. Lorsque les Turcs veulent dormir, ils Ne croyant pas, monsieur, devoir laisser passer ce fait m'a donné à réfléchir, et j'ai voulu revoir Qu'en dira le monde.
et le vendredi est, comme on sait, le dimanche des Musul- mettent sur le pavé un tapis qu'ils portent avec eux pour sous silence, je dois vous prévenir que si, à l'avenir, vous Je suis sorti de cette deuxième épreuve encore plus satisfait
mans. A midi, nous entrions dans le divan, transformé en cet effet, sur lequel ils étendent leurs manteaux; pour che- citiez encore mon nom avec malveillance, comme vous l'avez qu'a la première pour cette fois je m'y tiens et n'éprouve
salle d'audience. Le naïb nous fit asseoir derrière lui on déjà fait plusieurs fois, et entre autres, il y a quelque temps, nullement le désir de retourner à l'Ambigu.
nous apporta du café et des pipes. vet, ils ont la selle de leurs chevaux, et cette grande casa- dans la Chronique de Paris, je me verrais forcé de m'adresser
Bientôt on introduisit les dix prévenus c'étaient dix que fourrée qui leur sert le jour de robe de chambre, leur à qui de droit pour faire réprimer cet abus, qui ne peut s'ap- Pendant que j'aurais pu entendre jusqu'au bout la pièce
hommes d'un âge mûr, graves comme des statues, et incapa- sert la nuit de couverture; c'est ainsi qu'ils dorment sans peler que licence et malveillance. de MM. Clairville et Jules Cordier, B. Jouvin, mon compère,
bles vraiment de jeter des pierres aux passants. Je me per- craindre que la mollesse de leur coucher trouble leur som- Je compte sur votre loyauté, monsieur, pour insérer la assistait à la première représentation de Madré Wolfram, qui
mis de faire observer à son Excellence qu'elle n'avait devant meil par des songes trop voluptueux. » présente dans votre plus prochain numéro. servait de début, au théâtre, à M. Ernest Reyer, et voici en
les yeux aucun des délinquants de la veille. Au milieu de la cour on trouve ordinairement une fon- J'ai l'honneur de vous saluer. quelques mots son opinion sur cette nouvelle tentative de
-Que voulez-vous réponditle naïb, il faut pourtant bien taine assez richementdécorée, ombragée de grands arbres; BIÉTRY. l'auteur du Sélam.
prendre quelqu'un. et puisque vous ne connaissez pas les A côté d'une grande Inexpérience de la scène et de l'art
palmiers, platanes ou sycomores. Au-dessus de la porte d'écrire, on rencontre des choses originales dans ce petit
autres, ceux-ci paieront à leur place. d'entrée, découpant ses lettres d'or sur un fond bleu, on P. S. Je compte également, comme question de bonne foi, que cette
Cette façon d'interpréter le dogme mystérieux de la réver- lettre sera aussi bien placée dans votre journal que l'article auquel opéra les couplets d'Hélène (Mme Meillet), ceux de Wolfram
sibilité humaine ne laissait pas que de troubler un peu ma lit quelque sentence du Koran. Celle-ci, par exemple, que elle répond. (Laurent), et je crois ancore une phrase gracieuse dans un
conscience naturellement timorée, mais on ne raisonne le lecteur qui ne me croira pas peut aller voir dans un duo d'amour. M. Alphonse Reyer a parfois des aspirations
point avec un juge sur son siège. Celui-ci adressa aux dix des khans de la côte de Phénicie, entre Tyr et Sedon. heureuses vers la musique, laquelle reste souvent pour lui,
malheureux accroupisdevant lui un discours foudroyant. II u Le paradis est à ceux
qui, soupirant eux-mêmesaprès plus qu'une femme voilée, une muse invisible. N'im-
leur reprocha amèrement l'énormité de leur crime vis à-vis le repas, donnent cependant de quoi manger au pauvre, à porte! il l'aime, de confiance, sans l'embrasser autrement
d'une nation amie de noire seigneur le Sultan. Il parla de la l'orphelin et au captif. »
CHRONIQUE PARISIENNE qu'avec ses désirs de jeune homme et d'artiste, semblable au
grandeur de la France et de bien d'autres choses encore, musulman, qui rêve le paradis de J^ahondft en attendant d'y
que notre consul écoutait avec des signes de visible appro-
bation.
Partout où ils passent, les pèlerins des caravanes sont
accueillis comme des envoyés de Dieu. Ils se chargent des BEVUE DE I.A SEMAINE
pouvoir entrer. ?
Qui sait? Il se pourrait faire que, cette fois, M. Reyer en
Cependant, un des cheikhs accusés, profitant du moment présents pour la Mecke ou en rapportent des reliques; ils eût entre-bâillé la porte 1

où l'éloquent orateur, légèrement suffoqué, s'arrêtait pour échangent les produits du Nord contre ceux du Midi, ten- M. Jules Janin et le procès de Figaro. Les honoraires d'une plai-
reprendre haleine, lui tint à peu près ce langage dent une main aux côtes barbaresques et l'autre aux fron- doirie. Les femmes perdues et retrouvées. Coup de canifdans Le Marbrier, attendu depuis longtemps et retardé par un
le Koran, c'est cer- tières de la Perse; offrent ici les perles de Ceylan, et plus un contrat. politique. Influence des dettes sur les hommes po- procès, a fait, cette semaine, enfin, son apparition au Vau-
« Magnanime cadi, tu parles comme litiques opinion de Méry à ce sujet. Porte-Saint-Martin la deville. La pièce est de MM. Alex. Dumas et Brunswick;
tain mais pourtant que Ton Excellence considère que nous loin les cuirs de Damas et les soies de Brousse. Ils Bêle dit bon Dieu. Ambigu les Contes de la mère l'Oie.
dor- mais on n'a nommé que M. Dumas. Sur un autre théâtre, au
ne savons pas encore au juste de quoi il s'agit. Nousquand apportent aussi les nouvelles d'un pays à l'autre inap- Théâtre-Lyrique Maître Wolfram. Vaudeville le Marbrier.
Gymnase, par exemple, elle eût pu obtenir un grand succès
mions tranquillement cette nuit dans nos maisons, préciable bienfait dans une contrée où l'on ne reçoit Un joli mot pour finir.
tes cavaliers sont venus nous prendre. On a donné des coups au Vaudeville, elle semble dépaysée. Ceci est une question
de pierre aux seigneurs chrétiens c'est mal. Si les sei- pas le Moniteur tous les matins. Les amis ne sont pas des Turcs. Qui a dit cela? Le pro- de lieu et non de personnes, car le Marbrier est générale-
gneurs chrétiens nous reconnaissent, qu'on nous punisse.
« » ment bien joué. Boccage dit et joue son rôle, sagement et
verbe. Le proverbe a tort, et c'est Figaro qui s'est chargé de habilement composé, avec une grande sobriété de voix et de
Ils sont là, qu'ils parlent 1 Sinon, qu'on nous renvoie. » le lui prouver; mais il n'a pu le faire qu'aux dépens de notre
Je n'aurais trop su, je l'avoue, que répondre a cela, mais gestes, sans effort, sans exagération. Mlle Saint-Marc, auprès
UNE CARAVANE AU DÉSERT. causerie, qui se voit rejetée à l'arrière-garde du journal et du comédien émérite, a fait preuve d'un talent aussi jeune
le naïb est un plus grand clerc Puisant donc une nouvelle obligée de condenser dans un espace restreint toute l'ac-
énergie dans la contradiction, il reprocha aux habitants de tualité d'une semaine que le théâtre a largement défrayée. que sympathique. En présence de ce résultat, qu'il était si
Séphoris tous leurs méfaits passés, et, entre autres choses, facile de prévoir, je ne conçois pas qu'on ait eu la pensée de
Rien n'est pittoresque comme ées pèlerins marchands, Dans le nombre des solennités dramatiques auxquelles jouer un mauvais tour à Mme Doche en lui destinant le rôle
le peu de soin qu'ils mettaient à surveillerleurs femmes et à navigateurs du Désert 1 nous étions convié, la plus dramatique, la plus intéressante
élever leurs enfants. acte du procès d'une enfant de seize ans! C'était, de la part du théâtre que
Un jour, il nous est arrivé de rencontrer une petite ca- pour nous a été, sans contredit, le premier Marguerite Gautier a longtemps enrichi un acte d'ingrati-
Pour moi, magnanime cadi, reprit le plus jeune des intenté à Figaro par M. Jules Janin. La loi est formelle et
accusés, je suis célibataire et je n'habite Séphoris que depuis ravane sur les frontières de l'Arabie. Un instinct de poëte ferme le champ clos à la moindre observation qui pourrait
tude qui n'a pas d'excuse. il faut citer, au second plan,
avait choisi l'emplacement du camp un goût d'artiste M. Allié, qui s'est fait un excellent masque dans le person-
fort peu de temps. avoir l'air d'un compte rendu sournois; mais elle doit nous nage gourmé d'un gentleman.
Il ne fallait pas y venir, reprit le juge impatienté, avait présidé à sa disposition les. tentes légères d'étoffe permettre de réparer une omission commise, à leur insu,
rude et noire étaient rangées avec une symétrie parfaite, Le défaut irremédiable de cette pièce, dans laquelle on
voilà ce que c'est que de fréquenter les méchants. Et, pour par tous les journaux qui ont inséré le jugement de la 7" reconnaît pourtant une rare entente de la scène, l'art d'em-
éviter toute discussion oiseuse, il déclara les débats termi- et de manière à tracer sur le sable d'ingénieuses figures. chambre. La condamnation a été prononcée par défaut seule- mêler et de démêler une intrigue, toutes choses qui consti-
nés; et, après avoir consulté le prophète, dans un recueille- On avait pratiqué des rues aux courbes gracieuses, au ment contre mes deux complices, B. Jouvin et Dollingen, tuent l'originalité d'un homme de grand talent, ce défaut,
ment de quelques minutes, il condamna les dix cheikhs pré- milieu de cette ville de toile qu'un coup de vent pouvait absents pour le service de Figaro. Quant à moi, qui me c'est d'être souverainement triste. Au lever du rideau nous
sents à dix jours de prison et à quatre-vingts coups de bâton. enlever. Elle s'adossait à un petit monticule de sable en suis défendu en personne, cette plaidoirie fantaisiste m'a assistons à la commande d'un mausolée, et quand nous avons
Les dix cheikhs se levèrent, saluèrent le juge et ne pronon- pente douce des nopals lui servaient de forteresses avan- rapporté 5UO francs d'amende. A l'avenir, et quelles que été suffisamment entretenus dans cette pensée lugubre, on
cèrent que ces seuls mots « Dieu est grand! Qu'il soit fait à cées, un sycomore l'abritait, et quelques palmiers s'élan- soient mes dispositions pour lè barreau, je ferai sagement complète notre plaisir,à la dernière scène, en faisant présen-
son plaisir » On les ramena en prison. çaient entre les tentes, comme la flèche aiguë d'un mina-
d'user de l'éloquence avec modération; car, à ce prix-là, je ter sous nos yeux la facture de cette tombe commandée au
Eh bien êtes-vous contents, et que direz-vous de moi ne pourrais longtemps me payer mes honoraires. premier acte. Un croque-mort, auprès duquel j'étais placé, a
en France? ret. Un ruisseau échappé du rocher voisin coulait à leurs Il y a toujours ici-bas le chapitre des compeasations.Tandis trouvé l'idée heureuse et en a beaucoup ri.
Que tes jugements égalent ceux de Salomon, et nous pieds, tandis que devant eux le désert déroulait ses per- que le propriétaire de VHôtel des Princes gagnait son pro-
voulons savoir ton nom pour le dire à nos amis, qui le redi- spectivesmélancoliques. On avait allumé un grand feu à la cès. et perdait sa femme, M. de B* retrouvait la sienne. Sans sortir de notre sujet, et pour venir en aide à M. Dumas
ront aux leurs. porte du camp des hommes aux bras nus dépeçaient un La princesse, après s'être tenue cachée quelque temps dans auquel on doit l'initiative.des tombes populairesà élever àBal-
Cheikh Amin-Effendi, répondit-il en s'inclinant avec, chameau dont chaque tente avait sa part. De beaux enfants une petite habitation qu'elle possède aux. environs d'Orléans, zac et à Soulié, je propose à mon illustre confrère la com-
une grâce pleine de majesté. baignaient dans le ruisseau; des groupes de femmes et s'est réfugiée dans un couvent d'ursulines, où elle attendra position d'une affiche de spectacle qui ne saurait manquer de
Eh bien I cheik AmînEffendi, tu as fait éclater ta co- se l'issue du procès en séparation qu'elle vient d'intenter à son produire une fructueuse recette au profit d'une bonne œuvre,
le pinceau d'un pein-
lère contre les méchants c'est bien laisse-nous maintenant de jeunes filles, posées comme pour coiffées de kouf- mari. Espérons que l'affaire s'arrangera. il s'agirait de faire jouer, le même soir et sur le même théâ-
faire éclater notre générosité envers des malheureux. Nous tre, drapées dans des burnous blancs, Autre nouvelle. S'il fallait en croire des propos qui cou- tre, Thèobald, de M. Scribe, dont l'idée première appartient
sommes les fils d'un Dieu qui pardonne; remets la peine fiehs de soie rouge et bleue,
d'où s'échappaientde longues rent de par le monde, il existerait entre les mains de -à une nouvelle de madame Sophie Gay; La joie fait peur, de
aux condamnés. tresses de cheveux noirs, causaient entre elles à la porte de, M. F** des lettres fort compromettantes pour la fidé- madame de Girardin, laquelle a retourné le sujet traité par
J'y consens dit le cheikh. Cela dépend de vous signez leurs tentes. Un peu plus loin, des hommes en manteau
1 lité. politique du prince de X* lettres qui établis- madame sa mère, et pour finir, le Marbrier, dé M. Alexandre


la grâce. rayé de noir et de blanc écoutaient, assis sur leurs talons, sent que le prince aurait donné un coup de canif au con- Dumas, une réminiscence de ces deux pièces, un compromis
Nous signâmes. conteur grisonnant, quiieur faisait, sans doute, un de trat et offert."avec un empressement chaleureux, ses ser- dramatique entre la tragédie en prose de la femme poëte et
Et les frais? demanda le greffier. un vices à l'Empereur, alors que celui-ci n'était que président de la comédie à couplets du vaudevilliste-académicien;' puis à
récits merveilleux dans lesquels les poëtes orientaux
ces
Vous savez bien, greffier, qu'on ne fait jamais grâce des dépensent vingt plus d'or, de perles et de rubis la république. Ence temps-là, il est vrai, la position financière la fin du spectacle, on jetterait aux acteurs des couronnes
frais, répondit le juge. en pages du prince avait grand besoin d'une restauration: cette position d'immortelles.
portée de que la terre et la mer n'en produisent en mille uns l'écrin s'étant considérablementaméliorée par suite d'un riche ma-
Il faut savoir, pour bien comprendre la cette
réponse, que les juges ne reçoivent pas un traitement de des rêveurs est plus riche que celui des rois. Les audi-
intarissables; riage, avec l'aisance est revenue la foi. Qu'est-ce que cela J'aurais désiré vous entretenir un peu longuement des
l'Etat, mais qu'ils perçoivent un droit sur toutes les affaires teurs naïfs écoutaient, suspendus aux lèvres prouve? Que Méry avait raison, un jour qu'il discutait de- courses de Chantilly; vous parler surtout de ce château tout
malgré sa décadence précoce et, je dois le
qui leur sont soumises ceci les excite à juger beaucoup. l'attention émue se lisait sur tous les traits. Au milieu des vant nous sur le scandale de certaines apostasies et sur la rempli encore,
Du reste, chez les Turcs, la peine afflictive n'est jamais tentes, les chevaux et les mulets, emprisonnés dans des cause des bouleversements politiques. dire, sa dévastation sacrilège, des grands souvenirs laissés
infamante. Le châtiment est considéré comme un malheur, entraves de fer,m angeaient bruyamment l'orge et la paille « Sans les dettes, -disait-il avec cet esprit original chez par une famille de héros. Mais il y a quelque chose de
non pas comme une honte. Ori lit souvent sur la pierre blan- hachée les chameaux en liberté erraient autour du camp, lequel le paradoxe n'est que l'enveloppe de la vérité, sans plus inexorable que le destin, ce sont les nécessités typo-
che du turbé (c'est le nom du tombeau turc) Un tel dé- sous la garde d un troupeau de chiens fauves, aux oreilles les dettes, est-ce qu'il y aurait des révolutions? Ce sont les graphiques, et j'arrête ici cette causerie tronquée sur un
capité, un tel étranglé. ceci ne fait de peine à personne, droites et piquées avant comme celles du loup. La nuit génies endettés qui font les révolutionnaires.Voyez-les tous mot absolument inédit, un de ces mots qui sont comme un
et les enfants du condamné n'ont besoin d'attendre aucune était en Catilina? couvert de dettes; Mirabeau, Danton criblés de glaive dont la poignée, recouverte en velours, serait tenue
réhabilitation pour jouir de toute la considération qu'ils venue et je commençais à perdre quelques-uns des dettes; Ledru-Rollin, Lamartine. Tenez, Lamartine sans par la main implacable d'un enfant
peuvent mériter personnellement. détails de la scène je jouissais peut-être plus encore de dettes aurait-il fait la république? quand, debout à la tribune, Une jeune Anglaise, affligée d'un nez irisé sur un visage
l'effet d'ensemble, éclairé par cette lumière des étoiles, maître de la situation, il aperçoit, errante sur les bancs de pâle, s'asseyait l'autre soir dans le salon de madame OnF*
bleue et un peu douteuse, qui semble le jour naturel du la chambre, une femme, une veuve, une mère, une prin- la disait mal mariée à un descendant de Silène et de
monde fantastique. cesse en deuil traînant deux orphelins sur ses pas, croyez- Falstaff.
vous qu'il n'y a pas là, au fond d'une âme enthousiaste et « Pauvre
femme I se
prit à dire sa meilleure amie, en
poétique comme la sienne, quelque chose qui parle pour faisant remarquer charitablement son air triste « est-elle
LES CARAVANES waip BKA.TOM'. elle et pour ses enfants?. Oui, mais une voix intérieure assez malheureuse c'est son mari qui boit, et c'est elle qui a
qui glace ses élans généreux lui dit « Et ton bottier, mal- le nez rouge !»

Les caravanes présentent un caractère tout à fait in- heureux ? et ton charbonnier qui, demain, l'ordre rétabli, Il. dt Vfflemessant.
connu à notre Europe. Leur nom vient d'un nom persan viendront te présenter leurs mémoires? » Et il s'écrie
et signifie également troupe de voyageurs, de pèlerins ou «
Défions-nous des surprises du cœur t » Et d'un mot il pulvé-
de marchands.– 11 y a, en effet, un peu de tout cela dans rise une couronne pourquoi? pour se sauver de ses créan-
une caravane. ciers. » L'on dks Rédacteurs EN chef B. JOCJVIN.
Les caravanes bien réglées ont un chef que l'on appelle Elan oratoire comédie!conviction politique comédie! I

PARIS. IMPRIMERIE CENTRALE DES CHEMINS DE FER DE


NAPOLÉON CHA1X ET C\ aux BERGÈRE, 20.

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