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‘Nous vivons @ Vabri des signes et dans la dénégation du réel» (Jean Baudrillard). théme central Guillaume FAYE et Patrick RIZZI VERS LA MEDIATISATION TOTALE rganiquement dépourvy lors’ parat au monde, "homme ne doit sa survie qu'un certain nombre O Peoutlsculturels» qui Paident' prendre progresivement posession de son environnement. Le propre de notre epic ext en effet un développement phlologue retardéet unc veal persitante (oéotéie): toute son existence homme demete malleable, ess instincts organiquement déprogrammésnécs Stent qPautres «programmes, cauxconsitués parla culture et ls institutions. Cellesel médisen’ nos rap ort vee e monde. Comme I's abl le sociologue allemand Arnold Gehlen, "homme se pose face a meu Somme un ére d'action, un transformateur, que sa nature améve toujours 3 prendre position, sot pou suv ‘re, sit pour modifier son envionnement. La culture fourat les «outs» nécesaites& cette madtion entre homme et le monde. Ces outs sont des reais du corps etd cerveas, mas fonetionnent aus! comme giles imerpretatives dni naturel. On peut ls qualifier de médias ~ de médlu, «intemdiaite>. (Nous plo rons ile terme de «médias» dans tn souci de simplification lexical) Les outils, les machines, les rites religieu, ete, ont tous pour fonction de s‘eniremetre entre Vhomme et le monde. Ce sont des médias. Chaque culture possede ses médlas, stir ses systemes mediatse de repré= sentation et o'Imerpréttion du monde, dstnes A lui donner un sens et &le rendre acceptable. Et «est bien parce que les peupls son diférents que leurs médas le sont également. Chaque peuple pero et vit on monde felon son propre psychisme. Les médias forment done une trame essentelle des tradiions de chaque culture, ue les generations sucesivesmodifient,adapten et envichssen. Tame qui devient une wseconde nate car nous ne pouvons nous pssr de notre systme de médiatisation. Par ls medias, les groupes bumnains appr ‘eluent le monde, mais surtout fu donnent du sens Pour Robert Ardrey, nous sommes eniement dépendents de nos médias cultures: «Nous adoptons et novsinventons un perfecionnementeulturel pour ader& notre survi, mais par un procesus de rétroaction, nous perdons la capacté naturelle de faire face Ala méme situa tion. Aina en arvont-nows& dépendre completement de acquisition cultrelle pour survives (Et la chasse craa homme, Stock, 1977 Les médias nous modifient autant que nous modifions le milieu, Ains quel souligne Arnold Geen, lorsque boireexpérimentation et note perception médatises du milieu subssent une volition, notre rapport au monde se transforme piysilogiquement : nous «changeons de pean. Les médias remplisent done deux fonctions majeues “une fonction symboliue de eprisentation et une fonction atechngue> d'action La fonction symbo ligue ser & nous renvoyer du monde une image adéquate nos besos 4 travers les rites religieux, ls ars les spectacles divers, ec. : les médias s'ntrposent ene 'homne et son lie brut pour Iuien donner une image. La fonction icehmique concern tous les «aul» qui prolongent notre corp et notre cervea dans let page 12 la culture de masse action sur le monde, Les médias eppartenant & cette catégorie, que nous appelleronts méda-objets, par opposi- tion aux média-images ou aux médias de représentation, font progressivement partie de notre physiologic le véhicule, habitation, Poutil, ete "Notre épaque a multiplié dans des proportions considérables les meédia-objets et les médtia-images, mais surtout elle a créé des médias hybrides objets/images. C'est le cas notamment de la télévision, qui sinstaure la fois ‘comme média-image et comme média-objet. Or, tout média modifie notre perception du monde et toute intro- ‘duction d'un nouveau systéme de médias transforme les rapports physiologiques d'une civilisation au monde. (Crest ce que souligne Jean Baudrillard dans La société de consommation (Gallimard, 1970) : «Grossitrement, le message du chemin de fer, ce n’est pas le charbon ou les voyageurs qu'il transporte c'est une vision du monde, lun nouveau statut des agglomérations, etc. Le message de la TV, ce ne sont pas les images qu'elle transmet, ‘ce sont les modes nouveaux de relation et de perception qu'elle impose, le changement des structures tradition- nelles de la famille et du groupe. Plus loin encore, dans le cas de la TV et des mass-media modernes, ce qui est percu, assimilé, aconsorimé>, c'est moins le spectacle que la virtuaité de tous les spectacles. La vérité des ‘médias de masse est donc celle: ils ont pour fonction de neutraliser le caractére vécu, unique, événementiel du monde, pour substituer un univers multiple de médias homogénes les uns aux autres en tant que tels, se signifiane l'un autre et renvoyant les uns aux autres. A la limite, ils deviennent le contenu réciprogue les uns des autres — et c'est la le «messager totalitaire, d'une société de consommation» (p. 189) Pour prendre un autre exemple, doané par Konrad Lorenz, l'automobile peut avoir long terme un effet d’atro- phic sur nos organes de déplacement, comme d’ailleurs tous les média-objets tendant a déshabituer de I'effort physique. L’automobile transfigure, en le raccourcissant, notre espace vécu ; elle le rapetisse et le linarise. Notre ancestral rapport territorial a environnement est métamorphosé ; notre perception physique de I’éten- due et du déplacement change radicalement de nature. Le cerveau en prend acte et répercute ces modifications sur le comportement organique. Les temps modernes n’ont pas innové en la matire : les nouveaux systémes de médiations ont toujours eu des effets transformateurs sur ’organisme et le psychisme. Ce qui a change, c'est la rapidité (une génération) et la puissance quantitative des transformations organiques qui frappent d'un coup toutes les cultures. Notre époque se caractérse également par la multiplication des types de médiation. Les média-objets et les média- ‘mages se sont multipliés et, de ce fait, notre perception globale du réel éclate et perd sa cohérence. Chaque ‘média, en effet, en s‘interposant entre le réel brut et l'individu (ou le groupe) provoque un effer de distancia- tion, Gr, cet effet varie selon les .poques et les types de médias. La nature de la médiatisation change elle-méme fu fur et & mesure que se transforme le média. Le livre, au XVIléme sigcle, ne provoquait pas le méme type de rapport au monde, dans sa fonction et ses conséquences, que le livre aujourd'hui. Le cinéma des années trente, celui de "Inde actuelle, celui de 'Occident, révélent trois types de médiatisation différents. La télévision n'a pas le méme effet de distanciation que la chaine stéréo. Bref, chaque média (objet ou image) produit son propre univers de relation avec le monde des expériences de seconde main Jusqu’a une date récente, les médias n'englobaient pas tout le champ de I'expérience humaine, et c"était une bbonne chose : nous avons en effet physiquement besoin de rester en prise directe avec les rythmes naturels. Ilya seulement cinquante ans, il subsistait encore des tranches d’existence non médiatisées, oi la sexualité, lamort, le froid, la peur ou la joie s'éprouvaient de maniére directe. Seule intervenait une médiatistion symbo- lique, par les rites religieux notamment, qu Faisait «revivee» ces événements «bruts» et tentait de changer leurs signifiants. Notre époque, elle, e caractérise par la création d'un véritable miliew médian. Constitué par I'en- semble des médias-images et objets, ce «milieu médian» est devenu globat : ils'interpose totalement entre le ‘vécu et le réel, laissant de moins en moins de place & la perception directe de lexistence. Deu remarques toutefois 'imposent. En premier licu, il ne serviait a rien de crtiquer cette médiatisation glo- ble en clle-méme, car cela reviendrait & s'en prendre au fait méme de la technique moderne, ce qui n’est pas dans notre intention. La massification et la domestication que produisent les médias constituent plutot de notre point de vue des défis, notre critique portant seulement sur le fait que ces défis ne sont pas relevés, que les ‘conséquences négatives des medias ne sont pas compensées, notamment parce que les idéologies dominantes dde a Societe marchande s'y opposent. Deuxiéme remarque, conceptuelle celle-I : il est entendu que le terme ppopularisé par Marshall McLuhan de mass-media ne s’applique qu’aux médias de communication et de repré- sentation, Pour notre part, nous qualifierons aussi de média environnement technique lorsque celui-ci consti- ‘tue un fllire entre le monde et l'existence vécue. Le développement fabuleux — et inquiétant — de la médiatisation se caractérise par sa globatlté : nous som- mes médiatisés en tout, partout et pour fout. Le déplacement, Vacte social, le regard porté sur le monde, pas: sent par la grille des médias. Souvent, les médias se «médiatisent» eux-mémes : plus d'accés direct aux machi- nes, mais médiation dune télécommande ; plus de contact avec le poste de télévision, mais programmation ‘distance par micro-ondes, etc, Cette médiatisation massive accentue la distance qui nous sépare dela «nature, mais nous éloigne aussi de notte corps et, avec I'informatique, de notre cerveau. Sans y prendre garde, nous (Qui regarde quoi ? La t6vsion se regarde tous les dges, mais c'est elle aussi qui pose un regard {roid sur le téléspectateurs placés devant Véeran. ‘Avant de regarder tel ou tel programme, c'est le ‘médlum lui-méme que Von regarde. Toute expé- rience «spectaculariséen devient une expérience de seconde main. Or, sans expérimentation directe, homme tombe en état de dépendance physiologique. L’hypermédiatisation renforce ‘gravement sa frasil nous rapprochons dun monde semblable & celui qu’a décrit Francois TrufTaut dans Farenheit 451, ol, a la suite de Bradbury, il voque des «hommes-trones» abimés dans la contemplation animale d’un mur dimages, ‘ui Jeur tent lew de tout. On peut cailleus estimer dj que les individus nés dans une ambiance hyper-médiatisée (environnnementale et audio-visuelle) sont des infirmes réceprifs, équipés pour «survivre» de béquilles technologiques. La distanciation du réel provoquée par le milieu médian fait perdre au monde son caractére de densité vivante, Lacampagne survolée & 10 000 métres ou percue par les vires d’une auto filant sur ’autoroute n’est plus qu’une ‘sidée», qu'une abstraction de campagne. C'est la société tout entiére et, avec elle, le vécu existentel et social, ‘qui sont, au sens propre, «télevises»,regardés de loin et spectacularisés par les avions, les autos, les télévisions, etc ‘Ala suite d’ Arnold Gehlen, il faut reconnaitre que I'hyper-médiatisation ne laisse plus subsister de la vie que ‘des expériences de seconde main, |.’éproué vital dela mort, du combat, des sensations organiques, des rythmes biologiques, est aseptisé et médiatisé par le cinéma, le miliew médian et tout l'apparcillage technologique. Les ‘expérimentations directes sont alténuées et supprimiées ou bien, ce qui est encore pire, elles sont reconstituées ; Ie film ow la presse nous fournissent des trompe-l'eil d’événements que nous ne vivons plus: la sexualité revue et corrigée par 'érotisme sur papier alacé, lhistoriité par les revues d'histoire, la guerre et le combat par le cinéma, la passion affective par le roman, etc. Or, sans expérimentation directe, l'homme ne s'auto-construit plus. 1! combe en éat de dépendance physiologique. C'est bien & tort que les sociétés occidentales, hyper- édiatisées, se croient matures. Elles ne prennent pas conscience de leur extraordinaire fragilité physiologique, fraglité qui les laisserait sans ressources si les techniques de médiatisation venaient soudain a faire défat Ce qui caractersait les époques précédentes n’était pas, comme le sous-entend Arnold Gehlen, la régularité des expériences de premiare main (on entend par «expérience de premitre main» celle qui est vécue directement, ct par «expérience de seconde main», celle véeue & travers un ou plusieurs médias), car des experiences vitales comme la mort des proches, la souffrance, etc, étaient aussi médiatisées. Mai elles étaient de maniére symbo- Tique, par les rites religieux et les discours sociaux. Les experiences vitales étaient symboliquement médiatisées, ‘mais physiquement vécues, ce qui correspond trés exactement a la fonction d'un systtme culturel: rendre fa ie signifante sans Vévacuer, afin qu'elle soit postivement supportée. Aujourd!' hui, c'est "inverse : le milieu des médias ne se contente pas de transfigurer symboliquement le vécu brut, il le supprime physiquement et sy substitue. La oi Péprouvé vital était symbolisé, physiquement véeu et support, il est désormais incomplete- ‘ment syrabolisé, quasiment évacué, done non urtout mal supporté, Ce qui en subsiste devient insup- portable. Ce qui reste des experiences de combat, de mort, d’afflction, de crise collective, de pénibilité physi- {ue et psychique, méme aitenué et/ou reconstitué par les «signaux» techniques des médias modernes, heurte et traumatise le psychisme fragile de homme contemporain domestiqu ‘L’hyper-médiatisation tend aussi & aggraver la «perte de signification» de la vie que les individus éprouvent dans la société marchande, L'univers objets, de marchandises et de relations sociales éclatées qui constituent

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